PRÉSIDENCE DE M. Didier Guillaume
vice-président
Article 5 bis
(Non modifié)
Pendant une durée de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, le corps de l’inspection du travail est accessible, sans préjudice des voies d’accès prévues par le statut particulier de ce corps, par la voie d’un examen professionnel ouvert aux agents relevant du corps des contrôleurs du travail, dans la limite d’un contingent annuel. Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.
M. Dominique Watrin. Cet article, qui résulte de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement présenté par le Gouvernement, vise l’évolution professionnelle des contrôleurs du travail. Il institue pendant une période de trois ans un examen professionnel ouvert aux contrôleurs du travail, afin de leur permettre d’accéder au corps des inspecteurs du travail. Cette évolution professionnelle s’accompagne, en conséquence, d’une revalorisation salariale.
Bien entendu, les sénatrices et sénateurs du groupe CRC ne sont pas opposés à ce que des fonctionnaires puissent bénéficier d’une mesure accroissant leur pouvoir d’achat, particulièrement dans le contexte de crise économique et de rigueur que personne ne peut méconnaitre.
Toutefois, je le note, cette mesure, introduite par le Gouvernement, est sans lien avec l’accord national interprofessionnel, ou ANI, que le présent projet de loi est censé transposer et elle n’a pas fait l’objet d’une négociation dans ce cadre. Elle n’a d’ailleurs donné lieu à aucune négociation que ce soit avec les organisations syndicales au sein du ministère du travail.
Il est tout de même paradoxal de sacraliser le dialogue social en transposant à l’identique, ou presque, un accord national interprofessionnel négocié au mot près, tout en y insérant une disposition qui n’a fait l’objet d’aucune négociation – j’y insiste – avec les principaux intéressés.
Le paradoxe semble plus grand encore lorsque l’on sait que l’ANI a été adopté à l’unanimité, alors que la mesure prévue dans cet article est contestée par les organisations syndicales majoritaires.
De plus, la mesure que vous proposez, monsieur le ministre, ne profitera qu’à un nombre réduit de contrôleurs – 540 environ, quelque 85 % des contrôleurs du travail demeurant dans leur situation actuelle. Leur revendication d’un passage en catégorie A type nous paraît pourtant légitime. Leurs missions sont proches, en effet, de celles des inspecteurs du travail. Naturellement, ces derniers continueraient à relever de la catégorie A spécifique dont ils dépendent et conserveraient ainsi une rémunération supérieure à celle des contrôleurs.
Les contrôleurs non concernés par votre mesure seront très majoritaires, et rien ne semble prévu pour eux, si ce n’est leur entrée dans le nouvel espace salarial, une mesure contestée par l’ensemble des organisations syndicales. Les inquiétudes sont grandes, et les organisations syndicales majoritaires, la CGT, la FSU et SUD, ont fait connaitre leur opposition.
Dans ce contexte, il nous semble plus opportun que le Gouvernement négocie avec les organisations syndicales les conditions de mise en œuvre de cette mesure ainsi que, de manière générale, l’ensemble de la réforme de l’inspection du travail.
Pour toutes ces raisons, le groupe CRC s’abstiendra sur cet article.
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, sur l'article.
M. Ronan Kerdraon. Cet article prévoit l’accession des contrôleurs du travail au corps de l’inspection du travail, par la voie d’un examen professionnel, dans la limite d’un contingent annuel, pendant une durée de trois ans.
Monsieur le ministre, vous avez indiqué que 540 contrôleurs du travail pourront être concernés sur un total de 3 413 actuellement, selon nos sources. Ils ont donc vocation à rejoindre le corps des inspecteurs. Un simple calcul arithmétique amène donc à poser une première question : quel est l’avenir professionnel des 2 873 autres ? La pyramide des âges au sein de ce corps est nettement inversée, de nombreux contrôleurs ayant plus de 50 ans. Toutefois, il semble hasardeux de faire fond sur une extinction progressive, comme d’aucuns le craignent. En outre, cette hypothèse assez malsaine créerait certainement davantage de problèmes et aboutirait à une démotivation préjudiciable au service.
Par ailleurs, les contrôleurs sont affectés aux entreprises de moins de 50 salariés, qui sont, et seront dans un proche avenir, le tissu économique majeur de notre économie. Comme vous le savez, c’est aussi dans ces entreprises que les droits de salariés, pour ne pas dire la législation du travail dans son ensemble, sont les moins bien respectés ; il faut reconnaître cependant que la cause de cette situation est moins souvent la mauvaise volonté que le manque de moyens et de compétences en ce domaine.
Monsieur le ministre, vous avez entrepris une réorganisation du ministère du travail afin d’obtenir plus de cohérence et d’efficacité face à un environnement changeant. Vous avez, à cette fin, engagé un dialogue social avec les organisations syndicales qui avaient été fort malmenées ces dernières années. La RGPP a fait des ravages, aggravés par une absence de considération et de reconnaissance des efforts accomplis.
Des évènements tragiques ont eu lieu. Il ne fait pour nous aucun doute que le climat était conflictuel et délétère, et que vous avez commencé à l’apaiser. C’est une politique de sagesse, que nous approuvons évidemment et que nous ne saurions trop vous encourager à poursuivre et même à approfondir.
Sur le fond, nous nous interrogeons sur les principes qui guident cette réorganisation et ses modalités de mise en œuvre. La fonction d’appui a été développée ces dernières années de façon souvent un peu chaotique. Elle est nécessaire pour fonder une cohérence. La spécialisation de certains agents, au sein d’équipes pluridisciplinaires est aussi envisagée. Sans doute est-elle justifiée, notamment pour renforcer la sécurité et la santé au travail.
Cependant, la réponse de terrain, à la fois généraliste et de proximité, doit rester le fondement de l’action de contrôle comme de prévention. L’inspecteur du travail est, et doit rester, l’interlocuteur privilégié, le secours ultime des salariés victimes d’atteintes à leurs droits, à leur sécurité, à leur santé, à leurs conditions de travail.
Des inquiétudes s’expriment. Nous-mêmes sommes très attentifs à la préservation d’un maillage territorial serré, pour que soient défendus la santé et les droits des salariés, le conseil aux employeurs, ou la lutte contre le travail illégal.
Cette exigence implique que soient maintenus des effectifs en nombre suffisant sur le terrain. Comme vous le savez aussi, le groupe socialiste ne cesse de demander, depuis de nombreux examens de lois de finances, un renforcement sérieux des effectifs. Nous attendons beaucoup sur ce point.
Comme le rappelle souvent le sénateur Jean-Jacques Mirassou, le monde du travail n’est pas le monde des Bisounours. (Sourires.) Il n’est pas non plus un univers fantasmé par une technocratie hors-sol. Dans de nombreux pays, la condition des travailleurs est dramatique. Pour protéger les salariés et faire respecter le droit, notre pays s’est doté d’un corps d’inspection remarquable, qu’il ne faut pas décourager davantage. Les premières victimes en seraient les salariés.
Nous sommes tout à fait confiants quant à vos intentions et votre action. C’est pourquoi nous vous demandons aujourd’hui de nous préciser vos intentions en matière de politique du travail, les modalités de réorganisation envisagées sur le plan territorial et fonctionnel, ainsi que les moyens qui en découlent.
Le groupe socialiste votera bien évidemment cet article 5 bis.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Michel Sapin, ministre. Je répondrai de manière précise aux questions qui viennent d’être posées et qui, je pense, intéressent le Sénat dans son ensemble.
Quelle est la situation d’où nous partons ? Deux corps de contrôle et d’inspection interviennent dans le domaine de la surveillance des entreprises et de la protection des salariés : les inspecteurs et les contrôleurs du travail.
Cette division en deux corps est une spécificité française. La plupart des autres grands pays qui appliquent les conventions sur le droit du travail de l'Organisation internationale du travail, l’OIT, ne disposent que d’un seul corps, en général équivalent à notre corps de catégorie A, compte tenu de la technicité et de la qualification requises.
La France vit donc avec les inspecteurs et les contrôleurs. Un critère, que vous avez évoqué, monsieur Kerdraon, distingue les deux corps : la taille des entreprises qu’ils surveillent. La compétence des inspecteurs du travail porte sur les entreprises de plus de 50 salariés ; les contrôleurs travaillent dans les entreprises dont l’effectif est inférieur à ce seuil. Le raisonnement qui avait présidé à cette distinction a longtemps été valable : plus l’entreprise est grande, plus le travail est compliqué ; plus elle est petite, plus il est simple.
Cette distinction n’est plus pertinente aujourd’hui. En effet, de nombreuses modifications sont intervenues, beaucoup de grandes entreprises ont externalisé des activités vers des entreprises plus petites et le lien entre la petite et la grande entreprise est beaucoup plus serré. Le travail d’inspection ou de contrôle doit aujourd’hui être mené sur un réseau, un ensemble d’entreprises, et non pas simplement être divisé entre entreprises de plus ou moins 50 salariés. Il est donc absolument indispensable de mettre en place une autre manière de travailler.
Depuis longtemps, le corps des contrôleurs ressent comme une injustice profonde cette différence de statut et de rémunération, alors que son travail est souvent aussi compliqué, parfois même plus, que celui des inspecteurs, compte tenu de ces relations complexes entre petites et grandes entreprise. Ces dernières fonctionnent souvent, en outre, avec d’importants services de DRH, donc selon des mécanismes beaucoup plus simples. L’un de mes prédécesseurs au ministère du travail, M. Gérard Larcher, attachait d'ailleurs une grande importance aussi bien au corps des inspecteurs qu’au corps des contrôleurs ; il acquiescerait à mon observation s’il m’entendait.
Cette situation n’a donc plus de raison d’être. Elle crée chez les contrôleurs une frustration profonde, qui s’exprime depuis longtemps. Des tentatives de réforme ont déjà été menées, qui ont été évoquées, comme la création du nouvel espace salarial, le NES, que les personnels ont refusé. J’ai donc rouvert la discussion et la négociation pour trouver une solution.
Ce processus est également lié à une question posée par ce projet de loi, celle des moyens, qui est reprise par nombre d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs. Le nouveau dispositif va créer de nouvelles nécessités de contrôle, d’homologation, de vérification de la qualité des négociations et des plans mis en place. Il faudra bien contrôler que le contrat de génération en lui-même est bien respecté, en particulier en ce qui concerne les obligations en termes de formation des uns et des autres.
Un lien étroit existe donc entre la réforme qui vous est proposée dans cet article 5 bis, mesdames, messieurs les sénateurs, et la mise en œuvre, dans de bonnes conditions, de l’ensemble du projet de contrat de génération. C’est vrai également pour d’autres textes passés, sur les emplois d’avenir, ou à venir, concernant d’autres mesures.
Ce constat suscite deux questions, que vous avez posées l’un et l’autre, monsieur Watrin, monsieur Kerdraon.
Premièrement, s’agissant des contrôleurs eux-mêmes, nul ne peut refuser, vous l’avez dit, la possibilité qui est ouverte à 130 contrôleurs cette année et à 540 en l’espace de trois ans d’accéder au poste d’inspecteur du travail.
Néanmoins, vous posez avec raison la question inverse. Quel destin est-il prévu pour les autres ? Bien évidemment, je n’ai pas proposé de faire de faire de cet effectif de 540 le terme ultime de la réforme. Je l’ai déjà expliqué aux organisations syndicales, avec lesquelles des négociations continuent sur les modalités du processus.
Je propose 540 passages dans le corps des inspecteurs tout de suite, et pour cela cette disposition de caractère législatif est nécessaire, puis nous nous placerons dans un processus plus global de réforme au sein de la fonction publique. Le secteur qui nous occupe n’est en effet pas le seul où la différenciation entre inspecteurs et contrôleurs, entre corps de catégorie B+, comme l’on dit, et de catégorie A, pose question. D’autres corps de contrôle ou d’inspection, dans d’autres secteurs de l’État, sont confrontés à cette question, et une réforme globale sera donc mise en œuvre.
Selon moi, la disposition qu’il vous est demandé d’adopter, mesdames, messieurs les sénateurs, répond à l’urgence d’une revendication profonde et légitime du corps des contrôleurs. Toutefois, nous devons également nous placer dans la durée. Dans ce cadre, tous les postes de contrôleur du travail seront concernés dans les dix prochaines années. Nous proposons 130 passages en 2013, 540 dans les trois ans, et 3 234, en équivalents temps plein de contrôleurs, dans les dix ans.
Nous devons faire cette réforme progressivement, parce qu’il faut organiser un certain nombre d’examens professionnels et mettre en place des formations. En effet, il ne s’agit pas simplement d’un passage de contrôleur à inspecteur : il faut aussi vérifier que les agents concernés disposent bien des compétences nécessaires pour occuper ces nouveaux postes.
Telle était donc la première question. Ma réponse est que le processus ne concerne pas 540 contrôleurs puis plus personne, mais bien tout le monde, de façon progressive.
La seconde question concerne ma vision de l’inspection du travail. Certains – je ne mets pas en cause leur bonne foi – considèrent que cette démarche dissimule une certaine vision de l’avenir de l’inspection du travail.
C’est vrai, j’ai une vision de l’inspection du travail. Je me limiterai à quelques mots à cet égard, même si je puis être intarissable sur le sujet, compte tenu de la reprise du dialogue avec ces organisations syndicales. En effet, je préside moi-même les comités techniques paritaires ministériels et j’y attache beaucoup d’importance.
Toutes les organisations syndicales sont présentes autour de la table, alors que, auparavant, le dialogue était rompu et la situation extrêmement difficile. Je ne veux pas trop insister sur ce point, mais nous avons connu des situations dramatiques, comme des suicides d’inspecteurs du travail, qui ont considérablement meurtri l’ensemble des corps et des personnels concernés.
Quelle est donc ma vision ?
Elle consiste à partir de ce que l’inspection du travail fait aujourd’hui. Elle est territorialisée et sa compétence est générale. C’est très important parce que cela veut dire que chaque entreprise a un référent et qu’à chaque inspecteur du travail correspond un territoire sur lequel il intervient. Cette territorialisation et cette compétence générale sont la base du métier et il n’est pas question d’y toucher.
Doit-on en rester là ? Non, et je considère – c’est le deuxième élément de ma vision – que des évolutions sont nécessaires. Je prendrai deux exemples qui démontrent cette nécessité.
En premier lieu, puisque nous voulons que, contrairement à ce qui se passe aujourd’hui, les plans d’action relatifs à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes soient respectés dans les entreprises, notamment en matière salariale, nous devons être capables, sur l’ensemble d’un territoire ou à l’échelle d’un groupe implanté en différents points du territoire, de procéder à des contrôles et d’exercer la pression nécessaire pour que l’égalité salariale soit respectée à l’échelle du groupe. Or, pour mettre en œuvre cette politique que nous souhaitons tous, les inspecteurs du travail doivent être en mesure de travailler au-delà des limites de leur territoire.
En second lieu, nous devons nous donner les moyens de lutter contre le travail illégal, ce que me demandent toutes les organisations syndicales, sans exception, en particulier au niveau confédéral. Nous savons tous que des abus sont commis à travers le recours aux personnels dits « détachés ». Les conditions de travail de ces salariés venus d’un autre pays de l’Union européenne sont censées respecter les règles sociales en vigueur dans notre pays, notamment en termes de rémunération et d’hébergement. Dans les faits, cependant, il y a souvent intérêt à aller y regarder de plus près…
Mme Isabelle Pasquet. En effet !
M. Roland Courteau. Oh oui !
M. Michel Sapin, ministre. De surcroît, on a généralement affaire à des dispositifs extrêmement compliqués, avec une cascade d’entreprises, depuis le donneur d’ordre jusqu’aux divers sous-traitants, en passant par l’entreprise étrangère qui déplace du personnel sur le chantier.
Cela signifie que ce n’est pas à un seul endroit qu’il faut agir, comme le font la plupart du temps les fonctionnaires de l’inspection du travail. D’ailleurs, ils sont les premiers à nous dire que, finalement, ils « tapent » sur les plus faibles, sur ceux qui sont présents sur tel chantier de construction, alors qu’il faudrait remonter toute la filière jusqu’au donneur d’ordre.
M. Roland Courteau. Exactement !
M. Michel Sapin, ministre. Seulement, décortiquer une telle mécanique et identifier les donneurs d’ordre suppose parfois de se rendre à l’autre bout de l’Hexagone !
Vous le voyez, de nouvelles missions doivent être conduites par l’inspection du travail, bien entendu dans le respect de l’indépendance des inspecteurs du travail, pour déjouer de nouvelles modalités de mise en cause des intérêts des salariés.
C’est dans le cadre de cette vision que s’inscrit l’augmentation du nombre des inspecteurs du travail, laquelle permet également de satisfaire une revendication légitime des contrôleurs du travail.
Pardon, monsieur le président, d’avoir été un peu long, mais je sais que cette question intéresse beaucoup les sénateurs de tous bords. En tout cas, moi, elle me passionne ; je veux que la situation bouge, je veux qu’on respecte les inspecteurs du travail !
Je connais la manière dont ces fonctionnaires travaillent sur le terrain. Chaque fois que je me déplace, j’accompagne, incognito – si je puis dire ! –, un inspecteur du travail dans une entreprise. Évidemment, le patron ne manque pas de se dire qu’il a déjà vu cette tête-là quelque part, mais il sait bien que je ne suis pas un des fonctionnaires de l’inspection du travail auxquels il est habitué… (Sourires.) Mais je demande à chacun de faire comme si je n’étais pas là, parce que je veux voir concrètement comment les choses se passent, tout en ayant la plus grande considération pour la manière dont les inspecteurs du travail accomplissent leur mission.
Quoi qu'il en soit, je sais qu’il faut conserver à la fois la territorialisation et la compétence générale de l’inspection du travail, mais que de nouvelles méthodes sont aussi nécessaires pour arriver à « taper » là où c’est nécessaire. Le fait est que, malheureusement, certaines entreprises, évidemment minoritaires, cherchent à contourner la législation et à exploiter des personnels.
La plupart des entreprises sont d’ailleurs les premières victimes de celles qui utilisent des méthodes contraires à la loi ; c’est pourquoi elles nous demandent d’être plus pertinents dans nos investigations et dans la poursuite des délits, car les abus en matière de travailleurs européens détachés, par exemple, sont bien des délits. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste du groupe écologiste et du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe CRC.)
M. Roland Courteau. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'article 5 bis.
(L'article 5 bis est adopté.)
Article 6
À compter du 30 juin 2014, un rapport du Gouvernement est déposé au Parlement, chaque année, sur la mise en œuvre du contrat de génération. Il précise le nombre d’accords d’entreprise, de groupe et de branche conclus, de plans d’action élaborés et d’entreprises n’étant couvertes ni par un accord, ni par un plan d’action. Il évalue le nombre de créations d'emploi qui en résultent. Ce rapport analyse également les difficultés de mise en œuvre rencontrées par les entreprises et l’administration.
Il présente les modalités d’application du contrat de génération dans les départements et régions d’outre-mer.
Trois ans après l’entrée en vigueur de la présente loi, il évalue l’opportunité de modifier les conditions d’âge pour accéder au dispositif et de mettre en place, dans les entreprises employant entre cinquante et trois cents salariés, une pénalité en cas d’absence d’accord d’entreprise ou de plan d’action.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, sur l’article.
Mme Isabelle Pasquet. L’article 6 du projet de loi a notamment pour objet de reprendre les dispositions qui figuraient en son article 1er bis. Il résulte de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement déposé par le député Serge Letchimy et son groupe et tendant à prévoir le dépôt au Parlement d’un rapport sur les modalités de mise en œuvre du contrat de génération dans les départements et les régions d’outre-mer.
Or il nous semble que, dans sa rédaction actuelle, le projet de loi ne prévoit pas de modalités d’application particulières pour les DOM, les contrats de génération devant s’appliquer de plein droit en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique et à la Réunion ; les seules règles propres à l’outre-mer figurent à l’article 4 du projet de loi et concernent exclusivement Mayotte, dont le droit du travail présente certaines spécificités.
Nous trouvons curieux que l’on prévoie l’évaluation des conditions d’application du contrat de génération dans des territoires auxquels s’appliqueront les règles de droit commun. Si des dispositions dérogatoires doivent être prises par voie réglementaire, il serait opportun que le Gouvernement nous en informe.
Si j’avoue mal cerner la portée de cette disposition, je ne nie pas pour autant les singularités des départements et des régions d’outre mer, qui rencontrent des difficultés considérables. Il y a peu, mon collègue et ami Paul Vergès m’a fait part de la situation particulièrement dramatique que connaît l’île de la Réunion : au cours du mandat présidentiel, entre 2012 et 2017, l’île va compter 50 000 habitants supplémentaires, ce qui provoquera, en l’absence de mesures d’ampleur, une aggravation des problèmes dans tous les domaines.
La Réunion compte déjà 160 000 demandeurs d’emploi, soit un taux de chômage de l’ordre de 60 %. Compte tenu du nombre de jeunes bacheliers – 10 000 par an, environ –, ce chiffre est appelé à croître, d’autant plus que les entreprises réunionnaises sont frappées par la crise plus durement encore que celles de la métropole. Le taux de chômage des jeunes à la Réunion bat des records : malgré leurs diplômes, près de 23 000 Réunionnais de moins de 25 ans étaient privés de travail à la fin du mois de décembre 2012. Cette précarité sociale accrue est d’autant plus insupportable que les inégalités de revenus dans l’île sont très importantes, au point que beaucoup parlent d’un « apartheid social ».
Au nom de mon collègue Paul Vergès, je vous demande, monsieur le ministre, si des mesures spécifiques vont être prises pour les DOM. Dans l’affirmative, quelles seront-elles ?
J’ajoute que le nombre de contrats aidés à la Réunion semble être en nette diminution en 2013 par rapport aux années précédentes, alors même que le chômage connaît une augmentation continue dans l’île. Dans ces conditions, quelles mesures le Gouvernement entend-il prendre pour soutenir l’emploi à la Réunion et dans les DOM en général ?
M. le président. L'amendement n° 63, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
l’entrée en vigueur
par les mots :
la promulgation
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Cet amendement rédactionnel m’offre l’occasion de rappeler la position de la commission des affaires sociales relativement à l’article 6 du projet de loi, tout en faisant écho aux propos de notre collègue Isabelle Pasquet.
Nous avons souhaité regrouper au sein de cet article toutes les dispositions relatives au rapport sur le contrat de génération que le Gouvernement devra remettre au Parlement chaque année à compter du 30 juin 2014 ; je ne reviens pas sur toutes les précisions qui ont été rappelées tout à l’heure.
Madame Pasquet, nous n’avons pas voulu faire un cas particulier des départements et des régions d’outre-mer, et cela tout simplement parce qu’ils n’en sont pas un. Cela étant, on peut avoir l’impression que l’alinéa 2 de l’article 6 vise des modalités d’application du contrat de génération spécifiques aux départements et aux régions d’outre-mer. Je pense donc qu’il faudrait rédiger cet alinéa de manière un peu différente, par exemple en précisant que, dans le rapport annuel du Gouvernement au Parlement, on devra veiller à la mise en œuvre du contrat de génération dans les départements et les régions d’outre-mer. La commission mixte paritaire permettra éventuellement de procéder à ce changement de formulation.
Enfin, nous avons souhaité introduire un alinéa 3 prévoyant l’éventualité d’une modification des bornes d’âge. Un certain nombre de nos collègues sont revenus sur cette question au cours de cette discussion. Il nous a semblé important que, trois ans après la promulgation de la loi, on puisse évaluer l’opportunité de changer les conditions d’âge.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?