Sommaire
Présidence de M. Jean-Patrick Courtois
Secrétaire :
M. Jacques Gillot.
2. Communication relative à une commission mixte paritaire
3. Communication du Conseil constitutionnel
4. Harcèlement sexuel. – Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire
Discussion générale : M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois, en remplacement de M. Alain Anziani, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire ; Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice.
Mmes Esther Benbassa, Muguette Dini, Éliane Assassi, MM. Nicolas Alfonsi, Jean-Jacques Hyest, Mmes Christiane Demontès, Virginie Klès, Brigitte Gonthier-Maurin, MM. Jean-Claude Requier, Alain Gournac, Mme Michelle Meunier.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire
Amendement no 1 du Gouvernement. – Mme la garde des sceaux, M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. – Adoption.
Réserve du vote sur l’article.
M. Jacques Mézard, Mme Laurence Cohen.
Adoption du projet de loi.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement ; M. le président de la commission ; Mme la garde des sceaux.
5. Organismes extraparlementaires
Suspension et reprise de la séance
6. Communication d’un avis sur un projet de nomination
7. Dépôt d’un rapport du Gouvernement
8. Loi de finances rectificative pour 2012. – Adoption des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire
Discussion générale : MM. François Marc, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire ; Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation.
M. François Fortassin, Mme Marie-France Beaufils, M. Jean Arthuis.
PRÉSIDENCE DE Mme Bariza Khiari
Mme Fabienne Keller, M. Jean-Vincent Placé, Mme Michèle André, M. Yves Daudigny, Mme Marie-Christine Blandin.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire
Amendement no 1 du Gouvernement. – MM. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget ; François Marc, rapporteur général de la commission des finances. – Vote réservé.
Amendement no 2 du Gouvernement. – MM. le ministre délégué, François Marc, rapporteur général. – Vote réservé.
Amendement no 3 du Gouvernement. – Vote réservé.
Amendement no 4 du Gouvernement. – Vote réservé.
MM. Roger Karoutchi, Vincent Delahaye, François Marc, rapporteur général.
Adoption définitive, par scrutin public, du projet de loi.
9. Clôture de la session extraordinaire
compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Patrick Courtois
vice-président
Secrétaire :
M. Jacques Gillot.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2012 est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
3
Communication du Conseil constitutionnel
M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le lundi 30 juillet 2012, que, en application de l’article 61-1 de la Constitution, il a été saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité à la Constitution de l’article L.O. 134 du code électoral (démission du suppléant d’un parlementaire) (2012-4563 AN).
Le texte de cette saisine est disponible à la direction de la séance.
Acte est donné de cette communication.
4
Harcèlement sexuel
Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif au harcèlement sexuel (texte de la commission n° 712, rapport n° 711).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, en remplacement de M. Alain Anziani, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, prenant la parole en ce jour au nom de notre collègue Alain Anziani, rapporteur, qui vous prie de bien vouloir accepter ses excuses, car il ne pouvait être parmi nous cet après-midi, je dirai simplement en préambule : le contrat est rempli et la promesse, tenue.
C’est le 4 mai dernier que le Conseil constitutionnel a choisi d’annuler, pour les raisons pertinentes qu’il a indiquées, la législation existante en matière de harcèlement sexuel. Nous-mêmes, au Sénat, avons immédiatement pensé aux victimes et, plus largement d’ailleurs, aux justiciables ayant engagé une action devant la justice, action qui se trouvait de fait brutalement interrompue. Nous nous sommes dit qu’il était de notre devoir de parlementaires de combler le plus rapidement possible le vide juridique ainsi créé. J’avais même fixé l’objectif d’y parvenir pour la fin du mois de juillet, avant que se termine la session extraordinaire.
Mes chers collègues, nous sommes le 31 juillet, et, oui, le contrat est rempli, car je ne doute pas que les conclusions de la commission mixte paritaire seront adoptées dans nos deux assemblées.
Je tiens une fois encore à souligner le travail fécond organisé au Sénat sur l’initiative de mes collègues Annie David, présidente de la commission des affaires sociale, et Brigitte Gonthier-Maurin, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.
Nous avons en effet choisi d’unir nos trois instances – deux commissions et une délégation – pour constituer un groupe de travail au sein duquel, en confrontant toutes nos réflexions et en auditionnant quelque cinquante personnes, nous avons accompli, sans a priori, une œuvre utile, qui a permis de rassembler les points de vue.
Qu’il me soit permis de souligner le travail approfondi mené par Alain Anziani, que j’ai l’honneur de suppléer en cet instant, et par Christiane Demontès, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Je soulignerai aussi le travail de nos collègues, il en est beaucoup, qui ont contribué à l’élaboration des sept propositions de loi déposées sur le bureau du Sénat, émanant de tous les groupes de notre assemblée.
Enfin, madame la garde des sceaux, je tiens à souligner, ce qui ne vous étonnera pas, l’entente profonde et fructueuse qui a marqué notre intense dialogue avec vous et avec Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes. Aussi peut-on dire aujourd’hui que le projet gouvernemental a constitué une contribution très utile, tout comme les sept propositions de loi d’origine sénatoriale et les conclusions de notre groupe de travail.
Cela montre que, lorsque chacun est actif et apporte sa pierre à l’édifice, l’œuvre parlementaire qui en résulte n’appartient à personne, parce qu’elle appartient à tous : Parlement, Gouvernement, délégations, commissions, groupes politiques.
Il s’agissait de trouver la meilleure solution possible à un problème difficile. Je l’ai dit, il était sans doute plus facile, pour le Conseil constitutionnel, que je respecte infiniment, comme chacune et chacun d’entre vous, d’abolir ces dispositions législatives que d’en rédiger de nouvelles.
Nous nous sommes attelés à cette tâche.
Je n’aurai garde d’oublier de citer les représentants des partenaires sociaux, syndicats et représentants des chefs d’entreprise, ainsi que les associations, qui ont joué un grand rôle dans le débat.
Cela nous permet d’examiner aujourd’hui les conclusions de la commission mixte paritaire.
Mes chers collègues, je souhaite rappeler rapidement ce que fut l’apport du Sénat à l’issue de la précédente lecture dans notre assemblée.
D’abord, nous avons clarifié la rédaction des définitions relatives au harcèlement sexuel et nous avons choisi d’inscrire dans la loi ce que nous avons appelé, sans doute de façon impropre, l’« acte unique », c'est-à-dire que nous incriminons le fait d’exercer une seule fois, mais de manière gravissime, un chantage en lien avec une embauche ou telle ou telle prestation.
Nous avons élevé l’ensemble des peines encourues à deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende, ces peines étant portées à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende en cas de circonstances aggravantes.
Sur proposition de la commission des affaires sociales et de son rapporteur pour avis, Mme Christiane Demontès, nous avons introduit la vulnérabilité économique ou sociale de la victime au titre des circonstances aggravantes. Il y a eu de grands débats sur ce sujet et j’ai la faiblesse de penser que cette innovation pourra être réutilisée en d’autres circonstances. Quoi qu’il en soit, chacun voit bien que, dans ces situations de harcèlement, il y a souvent un rapport du fort au faible. Par conséquent, les notions de misère, de précarité, de vulnérabilité économique et sociale, traduisent bel et bien, mes chers collègues, la réalité.
Nous avons, sur proposition de plusieurs de nos collègues, expressément reconnu les discriminations dont peuvent être victimes des personnes en raison de leur « identité sexuelle ». Ce débat n’est pas sans signification, y compris, sans doute, au-delà de ce texte particulier.
Nous avons facilité l’action en justice pour des associations accompagnant les victimes et procédé à une mise en cohérence du statut de la fonction publique avec les nouvelles dispositions pénales réprimant le harcèlement sexuel.
Enfin, par l’adoption de plusieurs amendements, nous avons renforcé les compétences des délégués du personnel ainsi que des services de santé au travail en matière de prévention et de détection du harcèlement, et nous avons inclus les stagiaires et les apprentis dans le champ des dispositions protégeant les victimes et les témoins de harcèlement sexuel.
Telle a été l’action du Sénat, et je pense que l’on peut la qualifier d’importante. L’unanimité qui s’est peu à peu construite ici a été féconde.
L’Assemblée nationale a largement conforté le texte du Sénat. Elle a choisi de remplacer le mot « agissements », que nous avions finalement choisi après que la commission des lois lui eut préféré le mot de « comportements », par celui de « comportements » ! Nous ne rouvrirons pas des querelles sémantiques, car nous estimons que cette rédaction est satisfaisante.
Les députés ont en revanche conservé le terme de « situation », que le Sénat avait préféré, ce dont je m’étais réjoui, à celui d’« environnement », qui nous paraissait trop vague.
L’Assemblée nationale a retenu une nouvelle rédaction pour répondre à la crainte qui avait été exprimée par des associations de voir le nouveau délit de chantage sexuel utilisé par les juridictions pour requalifier des agressions sexuelles ou des tentatives de viol, ce qui aurait été préjudiciable aux victimes. Nous l’avions dit en séance publique, à nos yeux, notre rédaction était très claire, elle ne permettait pas une telle requalification. Toutefois, les craintes subsistant, l’Assemblée nationale a clarifié la rédaction de l’article en question, afin que fût expressément exclue une telle possibilité.
Les associations ont joué leur rôle, l’Assemblée nationale également, et la commission mixte paritaire a donné son accord.
Par cohérence, l’Assemblée nationale a également choisi d’aligner les peines encourues en cas de harcèlement moral sur celles qui sont désormais encourues en cas de harcèlement sexuel.
Elle a étendu les dispositions réprimant les discriminations aux témoins de harcèlement sexuel.
Elle a reproduit in extenso dans le code du travail la nouvelle définition du harcèlement sexuel que nous avions déjà inscrite dans le code de la fonction publique.
Enfin, elle a adopté une disposition qui permettra de faciliter l’allocation de dommages et intérêts aux personnes qui avaient engagé une procédure devant une juridiction pénale et qui se sont retrouvées face à un vide juridique du fait de la décision du Conseil constitutionnel.
Nous avons largement évoqué ce sujet en commission mixte paritaire et nous sommes tombés d’accord pour adopter cet article ainsi rédigé. Il est vrai que la décision du Conseil constitutionnel a créé un préjudice en raison de l’interruption de l’ensemble des actions qui étaient alors engagées sur le plan pénal. Aussi, l’idée qu’ont exprimée nos collègues députés que l’on puisse obtenir réparation sur le plan civil nous est apparue tout à fait judicieuse.
Force est de reconnaître qu’il n’y avait pas de bonne solution. Soit le Conseil constitutionnel accordait un délai au législateur pour récrire la loi, à l’instar du choix qu’il avait fait s’agissant de la garde à vue, mais cette solution n’était pas parfaite, car, pendant cette période que je qualifierai d’intérimaire ou d’intermédiaire, les avocats n’auraient pas manqué, se fondant sur la décision même de la haute juridiction, d’exciper de l’inconstitutionnalité de cette disposition. Soit le Conseil constitutionnel déclarait que, à compter du 4 mai, le délit de harcèlement sexuel n’était plus dans la loi, ce qui soulevait tout autant de problèmes.
En conclusion, la commission mixte paritaire s’est réunie dans un excellent climat et a procédé à quelques clarifications rédactionnelles. Ainsi, elle a amélioré la rédaction de l’article 7, de telle sorte que les victimes de faits de harcèlement sexuel commis jusqu’à l’entrée en vigueur de la présente loi devraient pouvoir se voir octroyer des dommages et intérêts sur le fondement de la faute civile commise par l’auteur des faits.
Je rappelle qu’un tel mécanisme existe déjà, notamment en matière de délits non intentionnels ou encore en cas de loi d’amnistie.
Enfin, pour être tout à fait juste, je dois reconnaître qu’une question a échappé à la sagacité de la commission mixte paritaire et donc, madame le garde des sceaux, aux représentants de l’Assemblée nationale et du Sénat. En effet, il était nécessaire de procéder à une coordination de manière à étendre à Wallis-et-Futuna, à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie les dispositions relatives à l’indemnisation des victimes que je viens d’évoquer. Heureusement, madame la garde des sceaux, vous avez été vigilante et vous nous présenterez à cet effet un amendement que je vous propose de voter, mes chers collègues.
Au final, nous avons tenu notre engagement vis-à-vis des victimes et des justiciables. Pour ce faire, madame la garde des sceaux, nous autres parlementaires avons souhaité, demandé même, que soit engagée la procédure accélérée. Pourtant, une telle démarche n’est pas dans notre habitude, car nous n’aimons guère cette procédure dans la mesure où nous estimons que, pour faire de bonnes lois, il faut s’accorder du temps. À cet égard, la seconde lecture est souvent très utile, au Sénat comme à l’Assemblée nationale. Mais nous avions un devoir moral à l’égard tant des victimes que des justiciables. De surcroît, nous avons compensé cette absence de seconde lecture par un travail préalable approfondi et une étroite coopération avec le Gouvernement.
En définitive, je crois pouvoir dire que le Parlement et le Gouvernement auront fait leur travail C’est pourquoi, mes chers collègues, j’ai l’honneur de vous demander de bien vouloir adopter les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, de la commission des lois, vous avez dit l’essentiel. Aussi, je serai brève et n’aborderai que les quelques points qui méritent encore quelques éclaircissements.
Au préalable, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux vous dire tout le plaisir que j'éprouve à être de retour devant vous pour l’adoption définitive, sans nul doute, de ce projet de loi. Je rappelle que c’est sur votre diligence, à peine deux semaines après la décision du Conseil constitutionnel d'abroger l'infraction de harcèlement sexuel, qu’a été ouvert ce débat.
Je remercie particulièrement chacune des sénatrices et chacun des sénateurs qui se sont fortement impliqués sur ce texte et grâce auxquels nos débats ont été d’une grande qualité. En particulier, je pense aux auteurs des sept propositions de loi jointes à ce projet de loi et à ceux d’entre vous qui, dès les auditions en commission et jusqu’à la commission mixte paritaire, auront suivi l’ensemble du processus, y compris, pour certains d’entre vous, notamment le président de la commission des lois, le rapporteur et les rapporteures, les travaux de l'Assemblée nationale.
Ce travail aura permis d’enrichir ce texte au fur et à mesure de son cheminement entre les deux assemblées.
Vous l'avez rappelé, monsieur le président de la commission des lois, nous avons dû légiférer dans un délai contraint, celui de la procédure accélérée, une procédure que vous avez en général en aversion, et ce n’est pas l'ancienne parlementaire que je suis qui pourrait vous le reprocher.
Si nous avons recouru à cette procédure, c’est par souci des victimes, des victimes qui ont vu s'éteindre des actions qu’elles avaient engagées parfois de longue date pour des faits de harcèlement sexuel, des victimes qui s'apprêtaient à appeler la justice à leur secours, des victimes qui ont été exposées au harcèlement sexuel au cours de cette période durant laquelle leur action pénale n’avait plus aucun fondement.
Les voilà désormais mieux armées qu'elles ne l'étaient dans le passé, parce que l'incrimination est plus précisément définie, parce qu’elle couvre un champ plus large et que les sanctions sont plus conformes à la gravité des faits, tant par la nature des transgressions, bien entendu, que par leurs conséquences.
Dorénavant, ces victimes peuvent à nouveau demander en justice réparation des préjudices subis à la suite de faits de harcèlement sexuel.
Le texte adopté en première lecture à l'unanimité tant par le Sénat que par l'Assemblée nationale puis, finalement, après quelques modifications qui en ont « fluidifié » la rédaction, par la commission mixte paritaire, obéit donc pleinement aux objectifs que nous nous étions fixés.
Premier objectif, nous devions agir avec célérité pour combler le vide juridique créé par la décision du Conseil constitutionnel. En dépit de la circulaire adressée par la Chancellerie aux parquets leur demandant de poursuivre sur la base d’autres qualifications – violences volontaires, harcèlement moral ou tentative d'agression sexuelle –, de nombreuses victimes, de nombreux plaignants se sont retrouvés sans possibilité d’engager une procédure judiciaire.
Deuxième objectif, il s’agissait de définir aussi précisément que possible cette incrimination de harcèlement sexuel, non seulement pour satisfaire aux exigences constitutionnelles et répondre ainsi aux considérants du Conseil constitutionnel, mais également pour couvrir sinon la totalité, du moins la grande majorité des situations concrètes susceptibles de se présenter.
Troisième objectif, il nous fallait proportionner la sanction à la gravité des faits, mais en conservant une échelle des peines cohérente au sein des agressions et atteintes sexuelles, à défaut de pouvoir obtenir cette même cohérence pour la totalité des peines prévues dans le code pénal.
Enfin, quatrième objectif, et c’est le plus important, nous devions « armer » les victimes de façon qu'elles puissent recourir à la justice le plus vite possible et le mieux possible, tout en tenant compte du fait que, lorsqu’elles prennent cette courageuse décision, elles sont encore souvent en contact avec la personne coupable des faits de harcèlement sexuel.
Nous avons modifié le code pénal et le code du travail de façon que les discriminations soient plus précisément définies et plus diversement envisagées.
Nous nous sommes également attachés à protéger à la fois les victimes, mais aussi les témoins, afin que ces derniers puissent contribuer à la manifestation de la vérité sans crainte de représailles.
Dans le même ordre d’idées, nous avons modifié le code de procédure pénale de manière à permettre aux associations d’accompagner plus aisément les victimes. Nous savons combien ces associations, qui sont déjà à l’œuvre, accomplissent un travail important et même remarquable.
Dans ce souci de protection des victimes, plusieurs députés et sénateurs, dont Mme Dini, ont souhaité que le délai de prescription coure à compter non plus du dernier fait commis, mais de la date de cessation du contrat de travail.
Comme j’ai eu l’occasion de le dire, nous comprenons parfaitement cette préoccupation, et nous y avons fait droit dans le débat. Néanmoins, il ne nous a pas été possible d’accepter les amendements tendant à rédiger la loi en ce sens.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le législateur doit avoir le souci que la victime soit mieux armée pour mettre un terme aussi rapidement et efficacement que possible aux faits de harcèlement sexuel. Le code pénal pose comme règle générale que les délits sont soumis à une prescription de trois ans. Faire partir le délai de prescription des faits de harcèlement sexuel à compter de la date de cessation du contrat de travail reviendrait pratiquement à introduire un délai de prescription indéterminé. Surtout, nous savons tous combien il est difficile, dans le cas de cette infraction particulière, de rassembler non seulement les preuves des faits, mais également les preuves du refus de la victime, lorsqu'elle a pu l'exprimer.
Par conséquent, nous avons choisi de privilégier les dispositions permettant aux victimes d’engager aussi rapidement que possible une procédure plutôt que d'étendre le délai de prescription. Si nous n’avions pas agi de la sorte, nous aurions pris le risque de signifier que rien ne pressait, alors que, au contraire, tout presse dans le harcèlement sexuel, parce que ses effets sont dévastateurs, et parce qu’il est important que la victime sache qu'elle peut recourir à l’action publique et obtenir de la justice qu’elle garantisse sa liberté de vivre et de travailler sans être harcelée.
Évidemment, cela ne suffit pas. Un certain nombre de messages doivent être délivrés. En priorité, il doit bien être affirmé que le harcèlement sexuel ne bénéficiera d’aucune complaisance sociale.
Ainsi, le 3° ter du texte proposé par l’article 3 pour l’article L.1153-1 du code du travail, introduit au cours des débats, prévoit l'affichage sur le lieu de travail du texte de l'article 222–33–2 du code pénal.
C’est dans cette optique aussi que sera lancée dès la rentrée une campagne d’information conjointe de la Chancellerie, du ministère des droits des femmes, du ministère de la santé et des affaires sociales, du ministère du travail, du ministère de la réforme de l'État et du service d'information du Gouvernement, campagne qui est d’ores et déjà en préparation.
Vous l'avez rappelé, monsieur le président de la commission, nous avons eu, tant ici qu’à l’Assemblée nationale, des débats sur des questions de vocabulaire, et ces débats n’étaient pas que sémantiques : fallait-il retenir « agissements » plutôt que « comportements », « environnement » de préférence à « situation », ou encore, comme il en fut question à l’Assemblée nationale, « placer » plutôt que « créer » ?
Ces débats étaient motivés par le souci des parlementaires de s'assurer que la définition des éléments constitutifs de l'infraction était aussi précise que possible eu égard au motif d'abrogation par le Conseil constitutionnel de cette infraction, à savoir le non-respect du principe de légalité des délits et des peines.
Nous avons donc veillé à ce que les termes employés soient aussi précis que possible et la rédaction ultime retenue par la commission mixte paritaire me paraît à cet égard constituer une combinaison optimale pour garantir une bonne interprétation et donc une bonne application de la loi.
La commission mixte paritaire a maintenu le « fait unique », qui a fait débat également à l'Assemblée nationale. En prévoyant qu’est assimilée à du harcèlement sexuel « toute forme de pression grave », même non répétée, exercée « dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle », cette rédaction permet d'inclure dans le champ de l'infraction des faits que le législateur de 1992 avait déjà retenus en raison de leur fréquence, de leur gravité ou parce que leurs conséquences étaient identiques ou analogues à celles du harcèlement sexuel dans sa définition plus classique.
En ce qui concerne le niveau des peines, le projet de loi initial prévoyait deux niveaux d’infraction et deux niveaux de sanction. Le Sénat a souhaité unifier les sanctions en retenant le quantum le plus sévère, et le Gouvernement s’est rallié très volontiers à cette position ; l’Assemblée nationale l’a adoptée ainsi que la commission mixte paritaire. Cette unification laisse au juge une marge d’appréciation plus importante pour traduire la gravité des faits dont il est saisi.
Pour ce qui est des circonstances aggravantes, le texte en compte désormais cinq ; les quatre qui figuraient dans le projet du Gouvernement ont été conservées, à savoir l’abus d’autorité, la minorité de quinze ans, la vulnérabilité personnelle ainsi que la commission des faits en groupe en tant qu’auteur ou complice.
Le Sénat a manifesté dès le début le souci de prendre en considération la vulnérabilité économique ou sociale ainsi que la dépendance, et, au nom du Gouvernement, je vous sais gré d’avoir adopté à l’unanimité l’amendement qui permet d’inclure dans le texte cette cinquième circonstance aggravante.
La commission mixte paritaire a conservé cette disposition et, désormais, les cinq circonstances aggravantes sont passibles de trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
Des débats extrêmement intéressants ont également eu lieu tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale concernant la minorité de quinze ans, car nous nous sommes posé la question de l’effectivité de cette circonstance aggravante dans le milieu du travail.
Je sais que ces dispositions ont suscité une certaine insatisfaction, et pas seulement de la part de ceux des sénateurs et des députés qui ont plaidé pour la minorité jusqu’à dix-huit ans, contre quinze ans dans le texte. Cette question nous concerne tous, car la protection de la jeunesse est l’une de nos priorités.
D’abord, ce texte de loi ne vise pas exclusivement les lieux de travail ; ensuite, des mineurs de quinze ans peuvent tout à fait travailler pour effectuer des stages de une ou plusieurs semaines. Nous avons veillé à les protéger, notamment grâce aux dispositions destinées à lutter contre les discriminations, qui visent toutes les personnes en formation ou en stage.
Néanmoins, nous n’avons pas souhaité modifier la disposition concernant la minorité de quinze ans, pour ne pas introduire un biais susceptible de provoquer des conséquences en cascade dans le code pénal, qui protège les mineurs – c’est la logique de protection - mais qui comporte aussi des exceptions pour la tranche des seize – dix-huit ans au titre cette fois de la logique d’engagement.
Nous en sommes bien conscients, on trouve des jeunes de seize à dix-huit ans dans des lieux de travail, un univers qui ne leur est pas familier, ce qui constitue déjà une première fragilité, raison pour laquelle nous devons protéger ce public.
Le texte de loi, d’ailleurs, ne vise pas uniquement les lieux de travail, et des amendements ont été examinés à l’Assemblée nationale sur le milieu sportif, les colonies de vacances, partout où les adolescents qui travaillent peuvent être exposés au harcèlement sexuel.
Nous allons donc exercer une vigilance particulière, tout d’abord au travers de cette circulaire d’application dont je vous ai parlé. Elle enjoindra aux parquets d’être particulièrement attentifs à ce public qu’il convient tout particulièrement de protéger, les mineurs de quinze ans avec la nouvelle circonstance aggravante et les mineurs de seize à dix-huit ans, avec la circonstance aggravante d’abus d’autorité.
Ces mesures de protection seront prises, mesdames, messieurs les sénateurs, d’autant que le Président de la République a fait de la jeunesse une priorité de son quinquennat. Nous serons donc d’une vigilance particulière s’agissant de cette frange de la population.
Nous avons également beaucoup discuté, au Sénat comme à l’Assemblée nationale, de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre.
Nous avons retenu l’identité sexuelle tout en écoutant attentivement les observations relatives à la différence entre le sexe et le genre et les conséquences que cette dernière induit, notamment pour la reconnaissance des droits des individus.
Nous avons tenu des propos précis et clairs qui pourront éclairer les juges sur l’intention du législateur : les personnes transsexuelles et les personnes transgenres sont concernées par les discriminations prévues dans le texte mais également au titre de l’identité sexuelle et doivent être protégées en conséquence. Il n’existera aucune ambiguïté sur l’inclusion des personnes transsexuelles et transgenres dans le champ de la protection.
Par ailleurs, nous avons veillé, dans le texte, à protéger le témoin autant que la victime, puisque sa contribution est très importante pour éclairer les enquêteurs.
Vous l’avez dit, monsieur le président de la commission, la loi portant statut des agents des fonctions publiques a été modifiée en conséquence. Enfin, grâce à l’adoption, à l’unanimité, d’un amendement du Gouvernement, le quantum de peine du harcèlement moral a été porté à deux ans et 30 000 euros d’amende, contre un an et 15 000 euros d’amende aujourd’hui.
Nous avons entamé au Sénat et à l’Assemblée nationale un débat qui mériterait d’être approfondi, même s’il a été très riche aussi au sein de la commission mixte paritaire, comme j’ai pu le lire dans le compte rendu, puisque députés et sénateurs se sont interrogés sur les solutions à apporter aux victimes se heurtant à l’extinction de l’action publique. En effet, si l’action publique est éteinte dans le cadre de la procédure pénale, les victimes sont fondées à recourir à la procédure civile pour obtenir réparation. Ce droit existe déjà, mais, aux termes de la loi actuelle, il implique qu’une nouvelle procédure soit engagée devant les juridictions civiles.
Vous l’avez évoqué, monsieur le président de la commission, sur l’initiative de Pascale Crozon, rapporteure à l’Assemblée nationale, a été introduit dans le projet de loi un nouvel article 7, qui permettra aux plaignants de maintenir devant la juridiction correctionnelle, saisie dans le cadre de l’action pénale, leur demande de réparation civile.
Autrement dit, avec cette disposition, plutôt que de devoir entamer une nouvelle procédure, les victimes pourront réclamer des dommages-intérêts devant la juridiction correctionnelle, la juridiction pénale demeurant compétente pour statuer sur l’action civile.
J’ai l’intention, dans la circulaire d’application, de demander aux parquets d’écrire aux personnes confrontées à l’extinction de l’action publique, afin de les informer de leur droit à demander réparation des préjudices subis devant les juridictions civiles sur le fondement de l’article 1382 du code civil. Cette possibilité existait, mais l’article va en faciliter la mise en œuvre.
La réponse apportée au travers de l’amendement déposé à l’Assemblée nationale a néanmoins soulevé un certain nombre d’interrogations concernant la sécurité juridique et constitutionnelle de cette disposition, les droits de la partie civile et, surtout, la possibilité d’une extension de cette action.
La rédaction que la commission mixte paritaire a retenue n’est pas exactement celle de l’amendement adopté par l’Assemblée nationale. Elle tient compte des observations du Gouvernement et ne fait donc plus référence à l’article 470-1 du code de procédure pénale, qui concerne des actes non intentionnels pour lesquels la relaxe a été prononcée. Par ailleurs, cette disposition serait transitoire compte tenu du délai de prescription de trois ans. Or il n’y a pas lieu d’introduire dans le code de procédure pénale une disposition transitoire.
Ces arguments ayant été pris en considération, la nouvelle rédaction se réfère non plus à l’article 470-1 du code de procédure pénale, mais très clairement à la décision du Conseil constitutionnel du 4 mai 2012, pour préciser le champ d’application de cette procédure. Il s’agit donc, non d’une disposition de droit pénal de fond, mais d’une pure règle de procédure pénale et civile destinée à réduire les délais et à faciliter l’action des victimes.
Cela étant, cet article 7, vous l’avez dit, monsieur le président de la commission, ne permet pas, là où il est placé, une application aux justiciables de Wallis-et-Futuna, de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie. Le Gouvernement propose donc un amendement technique qui permettra l’extension de ces dispositions en faveur des justiciables de ces territoires.
Compte tenu des délais de procédure – en moyenne vingt-sept mois – et de leur coût – entre 13 000 et 20 000 euros –, nous avons tous eu le souci de venir en aide aux victimes confrontées à l’extinction de l’action publique. Je vous ai fait part de mon intention de sensibiliser les bureaux d’aide juridictionnelle, à l’article de la loi du 10 juillet 1991 instituant l’aide juridictionnelle qui prévoit une dérogation aux conditions de ressources en cas de situation exceptionnelle. À l’évidence, nous sommes devant une situation exceptionnelle !
Tel est le texte aujourd’hui soumis à votre approbation, mesdames, messieurs les sénateurs. La circulaire d’application sera prête et publiée le jour même de la promulgation de la loi.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Très bien !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Devant vos collègues députés, j’avais pris l’engagement qu’elle soit disponible vingt-quatre heures après la promulgation de loi. Les services de la Chancellerie ont travaillé d’arrache-pied, en particulier la Direction des affaires criminelles et des grâces. Ils ont tenu compte de nos débats, du contenu des interrogations des uns et des autres, des engagements que j’ai pris devant vous, et ont commencé à rédiger cette circulaire au fur et à mesure du cheminement parlementaire du texte.
Nous avons fait une belle œuvre commune, je dirai même, avec un peu d’audace, de la belle ouvrage ! (Sourires.) Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous remercier très sincèrement de la qualité de nos débats sur ce texte. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, mesdames les présidentes de commission et de délégation, mes chers collègues, une lecture comparative du texte initialement adopté par le Sénat et de celui qui a été voté par l’Assemblée nationale, qui s’est largement « coulé » dans le premier, rend manifestes d’emblée, et une nouvelle fois, les signes réconfortants d’une authentique collaboration parlementaire, par-delà les différences de sensibilité politique, et dans le souci exclusif de garantir aux victimes de harcèlement sexuel la possibilité de faire entendre leur souffrance et d’obtenir la sanction de leurs harceleurs.
Il était urgent que les deux chambres comblent le vide juridique créé du fait de l’abrogation par le Conseil constitutionnel, en vertu de sa décision du 4 mai 2012 consécutive à une question prioritaire de constitutionnalité, de l’article 222-33 du code pénal définissant le délit de harcèlement sexuel.
La qualité des débats au sein des deux assemblées a traduit tout le soin mis par les parlementaires pour aboutir à un texte qui, nous l’espérons toutes et tous, sera définitivement à l’abri d’une nouvelle abrogation par le Conseil constitutionnel.
Mme Christiane Taubira, ministre de la justice, Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, et leurs équipes ont été à la hauteur d’une tâche difficile, et ont su travailler la main dans la main avec les parlementaires. À ce titre, je tiens à rendre hommage à leur travail.
Les modifications de fond et les rectifications rédactionnelles apportées par nos collègues députés ont contribué à améliorer la structuration du texte et à accentuer sa précision. En substituant au mot « agissements » celui de « comportements », nos collègues députés n’ont finalement fait que revenir au texte de notre commission des lois. Ils ont également reproduit in extenso la définition du harcèlement sexuel dans le code du travail. L’alignement des peines applicables en cas de harcèlement moral sur les sanctions prévues pour le harcèlement sexuel constitue, de même, une avancée substantielle.
Parmi les ajouts effectués par nos collègues députés, l’obligation d’un affichage, sur le lieu de travail, des articles du code pénal relatifs au harcèlement sexuel ou moral, de même que les dispositions en faveur d’une meilleure protection des victimes, relève bien sûr d’une sage et utile prophylaxie sociale.
Toutefois, j’émettrai quelques réserves quant à la prolifération des affichages qui risquent de tapisser les murs de nos entreprises ou de nos administrations, et de perdre, par l’effet de l’excès ou de la banalisation, une part de leur efficacité. (M. Jacques Mézard acquiesce.)
Personnellement, j’aurais préféré que les articles du code pénal relatifs au harcèlement moral et sexuel – ainsi que les dispositions de protection – soient fournis individuellement par le service des ressources humaines à chaque salarié embauché, avec son contrat de travail, sur simple papier libre. De fait, prenons garde de ne pas tomber dans le piège de ces photographies de poumons abîmés par la cigarette que l’on affichait autrefois sur les murs des couloirs des écoles : non seulement ces clichés n’empêchaient personne de fumer mais ils finissaient par être banalisés par le regard, n’étant même plus vus au sens propre du terme.
Il y aurait peut-être plus de solennité à accompagner les contrats de semblables documents, au moment même de leur signature, dans un souci de responsabilisation accrue des employeurs et des employés. D’ailleurs, aux États-Unis, les employeurs sont tenus de répondre chaque année à un questionnaire informatique destiné à mesurer leur degré de compréhension des réalités du harcèlement sexuel.
Par ailleurs, pour être militante anti-discriminations depuis de nombreuses années, je suis tout à fait satisfaite que la transphobie ait été reconnue comme une forme de discrimination dans le code pénal, dans le code du sport, dans le code du travail, dans la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881, au deuxième alinéa de l’article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et dans la loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.
Peut-être aurions-nous pu accorder une place au terme de « transgenres », comme les associations le suggéraient initialement. Néanmoins, je ne suis pas certaine que ce mot eût été aisément compris par les magistrats. En effet, l’usage de ce vocable est encore peu répandu en France, si ce n’est dans certains milieux militants ou dans la recherche en sciences sociales. Dans le monde anglo-saxon, les mots de gender et transgender ont sans doute acquis une autre visibilité et une autre légitimité que les termes de « genre » et « transgenre » dans notre pays.
J’émettrai une ultime réserve concernant le libellé du sixième alinéa de l’article 2 quater dans la mouture de l’Assemblée nationale : l’accumulation des mots risque de rendre légèrement confuse la lecture du texte dans le code de procédure pénale. Ainsi peut-on lire cette formule : « des mœurs ou de l’orientation ou l’identité sexuelle ». Pour plus de clarté, il aurait sans doute été opportun de la rédiger ainsi : « des mœurs, de l’orientation ou de l’identité sexuelle ».
En tout état de cause, sur la question de l’« identité sexuelle », la discussion conduite au Sénat, qui a impliqué les représentantes et les représentants de tous les groupes politiques, avait été exemplaire et avait témoigné de la volonté commune de réprimer la transphobie en droit français.
Enfin, la transphobie constitue désormais une forme pleinement reconnue de discrimination. Pour ma part, je me réjouis de cette heureuse rencontre entre les réflexions des législateurs et les attentes de la société civile.
Bien sûr, l’article 7 ajouté par les députés, en maintenant la compétence de la juridiction correctionnelle pour statuer sur une demande d’indemnisation, permet d’apporter une solution aux effets induits par l’abrogation résultant de la décision du Conseil constitutionnel en date du 4 mai 2012. Même si certains peuvent encore considérer ce dispositif comme fragile, il donne tout de même la possibilité aux tribunaux pénaux de demeurer compétents sur la demande de réparation de la partie civile dont ils auraient été saisis, alors que l’action publique est éteinte.
De surcroît, l’article 7 précise que ce dispositif n’est applicable qu’aux demandes d’indemnisation formulées avant la clôture des débats. Ainsi, les auteurs de harcèlement sexuel ne pourront plus se prévaloir de la seule décision du Conseil constitutionnel, tandis que les victimes pourront obtenir la réparation civile des préjudices subis. Cette évolution n’empêchera pas, naturellement, une personne accusée indûment de harcèlement sexuel de se défendre en invoquant l’article 226-10 du code pénal, réprimant la dénonciation calomnieuse. (Mme la garde des sceaux acquiesce.)
Madame la garde des sceaux, vous trouverez certainement la solution pour que les décisions des tribunaux puissent être appliquées par les divers conseils disciplinaires, au sein des institutions dont ils relèvent.
Vous l’aurez compris, le groupe écologiste se félicite de l’adoption par la commission mixte paritaire des dispositions du projet de loi restant encore en discussion, et ses membres voteront évidemment les conclusions qui nous sont soumises.
Pour conclure, en cette dernière séance de notre session extraordinaire, puis-je vous confesser que nos débats autour du harcèlement sexuel m’ont appris ou réappris, à moi, professeur d’université, toute la modestie que nous devons conserver devant les mots ? Dans une société qui se dit moderne, progressiste et démocratique, la loi est là, aussi et sans doute avant tout, pour défendre celles et ceux qui se trouvent momentanément en situation de faiblesse et de précarité. Or, pour ceux-là et pour celles-là, tout peut se jouer sur un simple mot, sur une simple formule.
C’est une évidence, me répondrez-vous ? Pas si sûr. J’ai beaucoup écrit dans ma vie, mais ces dix premiers mois au Sénat n’auront pas été de trop pour m’imprégner de cette vérité à la fois toute simple et essentielle. Peut-être savais-je déjà tout cela vaguement, mais désormais, je l’ai appris clairement, et grâce à vous tous. Merci, chers collègues, de m’avoir dispensé cette belle leçon, à mon âge avancé (Dénégations amusées sur plusieurs travées de l’UMP et du groupe socialiste.),…
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. On ne peut pas vous laisser dire cela !
Mme Esther Benbassa. … mais il n’y a pas d’âge pour apprendre, n’est-ce pas ? (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini.
Mme Muguette Dini. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, voilà bientôt trois mois que le Conseil constitutionnel, saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à l’article 222-33 du code pénal réprimant le harcèlement sexuel, a rendu son verdict et a décidé d’abroger ce texte.
On peut admettre que cette décision ait été justifiée en raison de l’imprécision de l’incrimination. Au jour de son abrogation, l’article 222-33 du code pénal définissait le harcèlement sexuel comme « le fait de harceler autrui dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle ». Il était le produit de strates législatives successives, ayant conduit à un assouplissement progressif des conditions d’incrimination et à une dilution de l’élément matériel du délit, si bien que c’est le verbe « harceler » qui contenait toute la substance de l’incrimination.
Du fait de cette imprécision, ce texte était difficilement applicable et souvent mal appliqué. En effet, ce flou a permis que de nombreuses plaintes pour agression sexuelle aient été requalifiées en harcèlement sexuel. Le Conseil constitutionnel ne pouvait donc que conclure que cet article 222-33 était contraire à la Constitution, en ce qu’il méconnaissait le principe de légalité des délits et des peines.
Cela dit, si cette décision ne souffrait aucune critique sur le plan juridique, elle s’est révélée catastrophique pour de nombreuses victimes : le Conseil constitutionnel ayant jugé que sa décision s’appliquait sans délai, cette décision a emporté, dans le tourbillon de la suppression du texte de loi, non seulement les poursuites engagées, mais aussi les condamnations prononcées.
On sait tout le tort et toute l’injustice que cette décision brutale a pu causer aux victimes – majoritairement des femmes – dont les procédures étaient en cours : annulation de toutes ces actions sans recours possible à une autre plainte, préjudice moral et financier souvent irréparable, et, injustice suprême, annulation des condamnations prononcées et non encore exécutées.
En somme, tous les harceleurs qui n’avaient pas encore été définitivement condamnés ont été disculpés. Quelle déception, quelle humiliation, quelle amertume, quelle souffrance pour toutes ces victimes ! D’où l’importance des dispositions de l’article 7 du projet de loi, adoptées sur l’initiative de nos collègues députés, maintenant la compétence de la juridiction correctionnelle pour statuer sur les demandes d’indemnisation des victimes.
En effet, le fait que cette réparation puisse être obtenue devant le juge correctionnel épargnera à ces victimes le nouveau parcours du combattant que nécessiterait l’introduction d’une nouvelle action devant le juge civil.
Mais trêve d’amertume et de critiques ! Aujourd’hui nous pouvons nous réjouir.
Oui, nous sénateurs, pouvons nous réjouir d’avoir réagi rapidement, par la création d’un groupe de travail, dont les études préparatoires et les réflexions ont été en grande partie reprises par le Gouvernement.
Nous pouvons nous réjouir d’avoir voté un projet de loi cohérent qui, amélioré par l’Assemblée nationale, constitue un texte solide, précis, applicable immédiatement et traduisant de véritables avancées.
Parmi celles-ci, je souhaite – rapidement – citer la création de l’Observatoire national des violences envers les femmes, l’intégration de la vulnérabilité économique et sociale comme circonstance aggravante, le renforcement du droit des associations, ou encore la reconnaissance, comme facteur de discrimination, de l’identité et de l’orientation sexuelle. Bien entendu, je n’oublie pas toutes les autres dispositions, qui ont été largement évoquées par M. le président de la commission des lois ainsi que par vous, madame la garde des sceaux.
Je salue la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale et retenue par la commission mixte paritaire pour le II de l’article 1er. Les substantifs « ordres », « menaces » et « contraintes » posaient problème aux associations de défense des droits des femmes parce que trop proches de ceux de la définition de l’agression sexuelle et du viol ; les associations craignaient la requalification de ces derniers en harcèlement sexuel. Ce risque est écarté. De plus, madame la garde des sceaux, nous avons noté que vous vous engagiez à faire en sorte que la circulaire d’application de la loi insiste sur ce point.
On sait que le harcèlement sexuel est particulièrement prégnant dans le monde professionnel. Le projet de loi a pris en compte cette réalité, en complétant le code du travail : outre l’intégration in extenso de la définition du harcèlement sexuel, il impose l’affichage sur le lieu du travail des articles du code pénal concernés.
Pourquoi ces dispositions d’affichage sont-elles si importantes ? Parce qu’elles donnent du harcèlement sexuel une définition compréhensible par tous ; parce que, grâce à l’affichage, ces dispositions seront mieux connues des victimes ; parce que ces dernières pourront être efficacement soutenues par des associations compétentes ; mais aussi parce que ces dispositions seront connues des harceleurs potentiels ; parce que ceux qui n’étaient pas conscients que leur comportement relevait d’un délit passible de lourdes peines y réfléchiront peut-être à deux fois avant de prononcer des propos graveleux ou d’avoir des gestes et attitudes provocateurs.
Les dispositions de ce texte de loi vont non seulement dans le sens d’une réelle égalité entre les hommes et les femmes, mais aussi dans celui d’une reconnaissance formelle du fait que les femmes ne sont pas des objets sexuels, qu’elles ont le droit au respect de leur dignité et qu’elles n’ont pas à subir ce qu’elles ne désirent pas.
Le combat pour protéger les femmes des violences sexuelles semble être sans fin. Quand les hommes de notre pays admettront que les femmes sont leurs égales, quand ils les respecteront sans les considérer avec condescendance, nous pourrons peut-être relâcher nos efforts. Mais un long chemin reste à parcourir !
Pour s’en convaincre, il suffit de se souvenir des propos ridicules et terriblement sexistes tenus à l’encontre de Mme la ministre de l’égalité des territoires et du logement, Cécile Duflot, il y a seulement deux semaines, dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme Michelle Meunier. Exactement !
Mme Muguette Dini. Quel exemple pour ceux que nous représentons !
On peut parfois être découragé, je suis parfois découragée, devant si peu de progrès !
Nous en sommes certainement en partie responsables, nous, les parents, pas toujours attentifs aux dérives verbales de nos fils, pas suffisamment réactifs pour protéger nos filles.
C’est la société tout entière qui a un devoir d’éducation à l’égalité sexuelle, au respect de l’autre, en particulier du plus faible.
Je sais que ce volet éducatif ne pouvait être pris en compte dans le cadre de cette loi et je compte sur vous, madame la ministre, pour que le sujet soit rappelé au ministre de l’éducation nationale.
Madame la ministre, je tiens à saluer votre réactivité face à la décision du Conseil constitutionnel. Je tiens aussi à saluer votre écoute, votre capacité à prendre en compte ce qui vous a paru améliorer votre projet de loi.
Je vous remercie pour toutes les victimes à venir d’avoir su rapidement proposer et faire voter ce texte.
Madame la ministre, je souhaite terminer mon propos en insistant sur l’urgence de travailler à une évolution des délais de prescription de l’action publique des délits et crimes en général, ainsi qu’à une nouvelle échelle des peines. Les victimes de violences sexuelles nous le demandent et nous devons évoluer en ce sens pour mieux les aider à se reconstruire.
Mais aujourd’hui, madame la ministre, le groupe de l’Union centriste et républicaine, que je représente, votera les conclusions de la commission mixte paritaire sur ce texte. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, je voudrais à mon tour saluer le travail que nous avons toutes et tous accompli, au-delà des clivages politiques, et qui a permis un débat très approfondi. Il est vrai que nous étions animés d’une grande ambition, celle d’aboutir à une loi qui devrait permettre aux victimes de harcèlement sexuel d’être mieux protégées, s’agissant du volet répressif, du moins.
Pour ce qui concerne l’aspect préventif, tout aussi important – si ce n’est plus –, nous avons entendu et saluons les engagements que vous avez pris, madame la garde des sceaux, ainsi que votre collègue Mme Najat Vallaud-Belkacem, pour aller vers la création d’un observatoire national des violences faites aux femmes.
Un tel observatoire jouera certainement un grand rôle dans la prévention, dès lors qu’il sera, bien évidemment, accompagné de campagnes de sensibilisation. En effet, outre la sanction des auteurs, des moyens importants doivent être mis en œuvre pour informer, sensibiliser, et faire progresser la société sur le sujet du harcèlement mais aussi sur toutes les autres formes de violences sexuelles, afin de les faire reculer.
Je crois pouvoir dire que le groupe communiste républicain et citoyen a largement pris sa part dans l’élaboration de ce projet de loi. Bien évidemment, nous avons eu des divergences sur certains points – je pense notamment aux éléments constitutifs de l’acte unique assimilé au harcèlement, à la majorité sexuelle retenue comme seuil pour la circonstance aggravante du harcèlement commis sur mineurs, mais ces divergences auront eu le mérite de nourrir le débat et ne manqueront pas d’alimenter les réflexions des magistrats.
Je ne reviendrai pas en détail sur ces divergences, qui ont déjà fait l’objet de longues discussions. Je m’attarderai plutôt sur deux autres points qui revêtent, me semble-t-il, une dimension symbolique assez particulière.
Premier point, je me réjouis de la prise en considération de la précarité économique ou sociale de la victime de harcèlement, au titre des circonstances aggravantes.
En effet, prenant appui sur des amendements déposés par plusieurs d’entre nous, l’amendement du Gouvernement admet comme circonstance aggravante « la particulière vulnérabilité ou dépendance de la victime résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale, apparente ou connue de l’auteur ».
Cette vulnérabilité revêt, il est vrai, un sens particulier dans les cas de harcèlement sexuel, malheureusement trop souvent commis par des personnes qui abusent de la situation précaire de la victime, que ce soit dans le milieu du travail, dans la recherche d’un logement ou dans la vie quotidienne.
Un signal fort leur est envoyé dans ce texte. Et puisque le débat a déjà eu lieu sur la pertinence de cette circonstance aggravante et des mots qui la définissent, nous pourrons à l’avenir, dans d’autres textes et pour d’autres infractions, veiller à ce que l’on ne profite pas impunément de la précarité économique ou sociale d’une personne.
Second point, je salue la prise en compte de la « transphobie » comme discrimination punie par la loi. Longtemps ignorée, la situation des personnes transgenres ou transsexuelles qui vivent dans notre pays a été longuement abordée dans notre hémicycle. J’ai moi-même, prenant la parole sur l’article 1er lors de la précédente lecture au Sénat, tenu spécifiquement à introduire ce sujet.
Même si les termes « identité sexuelle » ne sont pas pour nous les plus appropriés – nous en avons débattu –, la prise en compte de la situation des personnes concernées est un premier pas, qui devra bien sûr, être suivi d’évolutions législatives importantes pour les droits des personnes « trans », notamment en matière d’état civil.
Madame la ministre, mes chers collègues, nous avons tous condamné le choix qui a été fait d’une abrogation immédiate de l’article 222-33 du code pénal et avons déploré très fortement ses conséquences. Cette abrogation immédiate a fait tomber toutes les affaires de harcèlement sexuel pendantes devant les juridictions pénales.
Cette situation a été douloureusement ressentie par les victimes qui avaient eu le courage de dénoncer leurs harceleurs. Ces personnes étaient, pour beaucoup, en procédure depuis de nombreuses années. Il était donc impératif de trouver une solution. C’est chose faite, puisque l’Assemblée nationale n’a pas hésité à bousculer - très légèrement - les règles juridiques en ce sens.
Désormais, le nouvel article 7 prévoit le maintien de la compétence de la juridiction correctionnelle pour statuer sur une demande d’indemnisation lorsque, en raison de l’abrogation de l’article 222-33 du code pénal résultant de la décision du Conseil constitutionnel, le tribunal correctionnel, ou la chambre des appels correctionnels, constate l’extinction de l’action publique.
Cet article permettra aux victimes d’obtenir une réparation des préjudices subis en leur évitant le parcours du combattant que représenterait pour elles l’introduction d’une nouvelle action devant le juge. Il envoie par ailleurs – là aussi dans une certaine mesure, car l’action pénale reste, elle, éteinte – un message aux auteurs de harcèlement : ils ne peuvent aujourd'hui se satisfaire de la décision du Conseil constitutionnel et nous nous en réjouissons !
Au-delà du harcèlement sexuel, je pense que nous devrons prochainement nous pencher sur les conséquences des décisions rendues par le Conseil constitutionnel en réponse à des questions prioritaires de constitutionnalité, et - pourquoi pas ? - réfléchir plus largement sur le Conseil constitutionnel, sur sa composition, ses pouvoirs, son rôle.
En tout état de cause, madame la garde des sceaux, vous l’aurez compris, mon groupe votera bien évidemment les conclusions de cette commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. Nicolas Alfonsi.
M. Nicolas Alfonsi. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, nous nous félicitons tous du travail qui a été accompli et dont nous examinons aujourd’hui les conclusions.
Il est à l’honneur du Sénat de s’être immédiatement saisi de la question du harcèlement sexuel. Le groupe de travail qui a été mis en place a su mener avec célérité une large concertation associant l’ensemble des acteurs impliqués dans la lutte contre le harcèlement.
Je me réjouis tout autant, madame la garde des sceaux, que le Gouvernement ait été à l’écoute des propositions des parlementaires de toutes sensibilités, sans sectarisme ni préjugés sur un sujet qui dépasse les clivages partisans, et il est heureux que tous les groupes aient pris toute leur part à l’élaboration de ce texte.
De même, l’Assemblée nationale a conforté l’analyse du Sénat, ce qui démontre la qualité du travail accompli, tout en l’améliorant grâce à l’instauration d’un dialogue constructif. Sans doute est-ce là la véritable coproduction législative que d’aucuns appelaient de leurs vœux.
Enfin, pour ceux qui doutent encore de l’utilité du bicamérisme, le parcours de ce projet de loi illustre de façon exemplaire les raisons pour lesquelles le dialogue des assemblées est indispensable à l’œuvre permanente d’approfondissement de notre État de droit.
Sur le fond, peu de dispositions, madame la garde des sceaux, restaient en discussion au stade de la commission mixte paritaire, tant la convergence de vues entre nos deux chambres était patente.
J’aborderai plus spécifiquement trois points.
En premier lieu, je me réjouis que les remarques formulées par les membres du groupe du RDSE en première lecture aient été prises en compte dans la version finale du texte.
Je pense en particulier au nouveau délit dit de « chantage sexuel », dont les éléments matériels tels qu’ils étaient définis à l’origine pouvaient prêter à une certaine confusion avec ceux qui caractérisent les tentatives de viol ou d’agression sexuelle et que pose l’article 222-22 du code pénal.
La frontière était ambiguë.
Je note toutefois avec satisfaction que la commission des lois de l’Assemblée nationale, suivie par la CMP, a préféré éviter ce risque de confusion. La rédaction adoptée rend désormais impossibles les éventuelles déqualifications qui auraient pu subvenir et altérer la répression du chantage sexuel.
Il appartiendra désormais aux juges du fond de préciser les éléments constitutifs de la notion de « toute forme de pression grave ».
En deuxième lieu, le Sénat avait travaillé avec beaucoup d’attention à mettre en place une nouvelle définition pénale du harcèlement sexuel. La densité et la qualité des débats l’ont très bien illustré.
Nous avions cependant prêté moins d’attention à l’harmonisation de cette définition, ainsi que de celle du harcèlement moral, avec les autres branches du droit, notamment pour ce qui concerne le droit du travail et, par ricochet, le droit de la fonction publique.
Sur ce point, nos collègues députés ont parfaitement complété notre travail en apportant les précisions utiles et nécessaires ; je songe en particulier à l’extension du champ du harcèlement hors du cadre du travail, ou encore aux stagiaires. J’observe au demeurant qu’il faudra un jour nous pencher très sérieusement sur la question des stagiaires dans les relations de travail.
Enfin, ma troisième observation résulte directement des effets de la décision du Conseil constitutionnel.
Nous avons été nombreux à faire remarquer que l’abrogation immédiate de l’article 222-33 du code pénal par le Conseil constitutionnel n’a pas été sans engendrer quelques effets dommageables sur les procédures en cours. Si la solution retenue se justifie en droit, cela n’empêche pas qu’avec l’avènement de la question prioritaire de constitutionnalité va certainement s’ouvrir un débat plus large (M. Jean-Jacques Hyest fait un signe d’assentiment.) sur la modulation dans le temps des effets des décisions du Conseil constitutionnel, au nom du principe de sécurité juridique.
Certes, le Conseil constitutionnel n’a jamais reconnu de façon explicite ce principe, mais le Conseil d’État comme la Cour de justice de l’Union européenne l’ont érigé en principe général du droit.
Le débat est loin d’être clos.
C’est d’ailleurs sur ce fondement que l’article 7 du présent texte permet au juge, vous l’avez souligné, madame la garde des sceaux, malgré l’extinction de l’action publique qui résulte de la décision d’abrogation, de statuer sur l’indemnisation de la victime.
Gageons que ce dispositif n’a pas vocation à être pérennisé en raison de son caractère circonscrit à une situation particulière.
Madame la ministre, je terminerai en disant que le groupe du RDSE, dans son unanimité cette fois, se satisfait du texte que nous nous apprêtons à voter. J’appelle néanmoins de mes vœux que l’avenir nous évite d’avoir à légiférer dans l’urgence, même si – cela a été souligné par M. le président de la commission des lois –en la circonstance, celle-ci pouvait se justifier, à la suite d’une déclaration d’inconstitutionnalité.
Pour cela, la montée en puissance de la question prioritaire de constitutionnalité impose plus que jamais au législateur de travailler avec la rigueur et la précision que requièrent notre bloc de constitutionnalité et, plus largement, notre État de droit.
Je termine, madame la ministre, en vous remerciant de la célérité avec laquelle vous avez tenu à régler ce problème dès votre installation.
J’ajoute que nous éprouvons tellement de difficultés à obtenir des textes d’application lorsque nous votons un projet de loi qu’il y avait pour nous quelque chose de rafraîchissant à vous entendre nous annoncer la parution de la circulaire d’application dès la promulgation du présent texte. Nous vous en remercions aussi, madame la garde des sceaux. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC. – M. Yves Détraigne applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, quel qu’eût été le résultat des dernières élections, nous avions de toute manière le devoir de réagir rapidement à la décision rendue par le Conseil constitutionnel le 4 mai.
Vous avez d’ailleurs pu constater, madame la garde des sceaux, que le Sénat, parce qu’il était sans doute moins préoccupé par d’autres considérations que l’Assemblée nationale (Sourires.), a immédiatement constitué un groupe de travail sur le sujet. Il faut en remercier les initiateurs, ainsi que tous les participants : ils ont permis d’aboutir dans des délais raisonnables à la rédaction d’une législation qui ne soit pas critiquable sur le plan constitutionnel.
Grâce à l’effort de tous, nous avons abouti, me semble-t-il, à un bon résultat.
M. le président de la commission et Mme la garde des sceaux ayant déjà développé les différents aspects de ce texte, je me contenterai de quelques remarques, mes chers collègues.
Nous avons tout d’abord rencontré des difficultés en ce qui concerne le « chantage sexuel ». Je me suis opposé avec la plus grande vigueur à tout mélange entre le chantage et le chantage sexuel. Il me semble toutefois que, pour ce qui concerne l’assimilation au harcèlement sexuel, l’Assemblée nationale a permis de lever les quelques incertitudes qui subsistaient. Avant cela, nous avions bien entendu affirmé qu’il n’y avait aucun risque de confusion entre l’agression sexuelle et le « chantage sexuel ». Les termes retenus par l’Assemblée nationale permettent de penser qu’il n’y aura pas de déqualification et que les deux délits resteront effectivement distincts.
Je rappelle d’ailleurs que, si l’on a évoqué cette question, c’est parce que le viol est souvent déqualifié en agression sexuelle, pour les raisons que j’ai déjà exposées, et qui sont d’ailleurs reconnues, y compris par les juridictions elles-mêmes. Il s’agit parfois de permettre aux victimes d’être plus rapidement reconnues dans leurs droits. Nous savons très bien que, actuellement, certaines cours d’assises, dont celle de Seine-et-Marne, que je connais bien, sont encombrées par les affaires de viol, qui peuvent représenter jusqu’à neuf affaires sur dix. Cette saturation des cours d’assises est l’une des raisons de la requalification en agression sexuelle.
Je la déplore sur le plan des principes, mais il arrive que l’on fasse primer l’efficacité, sans parler des cas où il y a doute.
Autre point : je regretterai toujours que nous n’ayons pas conservé le terme d’« agissements » à propos du harcèlement. C’est assez curieux comme raisonnement, mais j’en rends responsable au premier chef mon excellent ami Guy Geoffroy ! (Sourires.)
En effet, dans la définition du harcèlement moral, on parle d’agissements répétés, et non de propos. Nous avons opté pour les « propos et comportements » répétés. Sauf que le comportement, ce n’est pas un agissement ! Les juges s’en débrouilleront, mais l’absence d’harmonie entre les deux incriminations pose problème. À mon avis, nous aurions dû supprimer « propos » et ne garder qu’« agissements », ce qui eût été beaucoup plus simple, en définitive. Mais c’est un détail, et nous n’allons pas nous battre pour cela !
Il était également important à nos yeux d’assurer une harmonisation dans le droit du travail - malheureusement, faute de temps, nous n’avions pas pu le faire - et dans le droit de la fonction publique, notamment en matière de discriminations. Nous avions pourtant bien travaillé, en incluant l’orientation ou l’identité sexuelle. À l’occasion de la définition de ce délit de harcèlement, nous avons incontestablement ouvert une porte vers cette harmonisation. Il faudra maintenant vérifier l’application à d’autres domaines. Nous avons là un vrai problème d’harmonisation.
Il n’en demeure pas moins que je me pose toujours la question de la méthode. C’est toute la question du code suiveur. Car il existe deux possibilités : soit l’on procède par simple renvoi au code pénal dans le code du travail, soit l’on reproduit in extenso les dispositions du premier dans le second. Dans ce dernier cas, il ne faut pas oublier de reproduire l’intégralité des nouvelles dispositions lorsque le texte cité est modifié.
Reste que nous n’avons jamais tranché définitivement cette question de méthode. Il me semble que nous devrions tout de même choisir une bonne fois pour toutes, au lieu de privilégier tantôt une solution, tantôt l’autre, ce qui aboutit à quelques distorsions.
En l’occurrence, nous avons fait le choix de reproduire intégralement les dispositions du code pénal dans le code du travail et dans la loi de 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Ne revenons pas sur ce choix : il en a été ainsi décidé, et c’est très bien comme cela !
Les députés prétendent que l’on ne doit pas viser les « relations de travail » dans le code du travail. Or, mes chers collègues, je vous renvoie à la décision du Conseil constitutionnel du 12 janvier 2002 : que l’on emploie ou non ce terme, cela ne change strictement rien, car, de toute façon, ce sont les droits de la personne au travail qui sont visés, tels qu’ils sont énoncés à l’article L. 120-2 du code du travail.
Enfin, par rapport au texte initial, il me semble qu’il convient d’être prudents à propos de l’amendement que vous aviez déposé sur la vulnérabilité économique ou sociale, madame la ministre, même si la formule est tout à fait acceptable. En effet, les circonstances aggravantes renvoient généralement à des conditions objectives, comme l’âge ou l’état de dépendance. En outre, pour d’autres crimes ou délits, les circonstances aggravantes sont les mêmes dans tout le code pénal, mais elles ne correspondent pas à ces conditions-là. Il faudra donc vérifier si cela ne peut pas être étendu à d’autres crimes ou délits, car on risque sinon d’introduire une distorsion entre diverses infractions.
Je doute quelque peu de l’efficacité de l’article 7. En tout état de cause, il n’y aura pas de saisine du Conseil constitutionnel, bien entendu. Je ne pense pas non plus qu’une question prioritaire de constitutionnalité puisse prospérer sur ces bases, pour la simple et bonne raison que nous avons, me semble-t-il, pris toutes les garanties pour que la légalité des délits et des peines soit assurée.
Au final, nous avons en effet accompli un beau travail parlementaire, avec bien sûr la coopération de la Chancellerie, qui était dans son rôle. Pour ma part, je n’ai jamais dit que le Gouvernement n’aurait pas dû déposer de projet de loi. Les différentes propositions de loi et le projet de loi ont permis à chacun de progresser.
Le plus important, c’est que les faits dont il s’agit soient enfin punis. C’est la raison pour laquelle mon groupe votera ce texte, comme il l’a fait lors de la lecture au Sénat et lors de la commission mixte paritaire.
Ce projet de loi montre aussi que, parfois, notre société évolue dans le bon sens.
M. Charles Revet. Heureusement !
M. Jean-Jacques Hyest. Ce n’est pas toujours le cas, hélas ! Mais, dans le cas présent, il y a une réelle prise de conscience collective des drames que vivent beaucoup de victimes de harcèlement sexuel. On parle des femmes, mais il ne faut pas oublier non plus tous ceux qui sont victimes de harcèlement, sexuel ou moral, en raison de leur orientation.
Nous avons fait du bon travail. Espérons maintenant que les juridictions traiteront sévèrement tous ceux qui ne respectent pas la personne humaine. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès.
Mme Christiane Demontès. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre des droits des femmes, monsieur le président-rapporteur, madame la présidente de la délégation aux droits des femmes, mes chers collègues, nous voici arrivés au terme de l’examen du projet de loi relatif au harcèlement sexuel.
Je rappelle que le Gouvernement avait demandé l’examen de ce texte en procédure accélérée, une demande parfaitement justifiée puisque, à une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel avait répondu, le 4 mai 2012, en prononçant l’abrogation immédiate de l’article 222-33 du code pénal, qui définit le délit de harcèlement sexuel. Le texte avait été jugé insuffisamment précis quant aux éléments constitutifs de l’infraction.
Les sénateurs et sénatrices de toutes les sensibilités se sont mobilisés : sept propositions de loi ont été déposées au Sénat et une commission spéciale a été constituée, qui a procédé à de nombreuses auditions. Mesdames les ministres, je crois pouvoir dire que vous avez pu vous appuyer sur ces travaux pour élaborer votre projet de loi.
Le présent texte répond à un double objectif : d’une part, combler le vide juridique créé par la décision du Conseil constitutionnel ; d’autre part, donner la définition la plus précise possible du harcèlement sexuel, en la rapprochant de la directive européenne.
L’examen par le Sénat a permis d’apporter plusieurs modifications. Je pense notamment à l’alourdissement des peines et des amendes, mais aussi à la création d’une nouvelle circonstance aggravante : le fait de profiter de la particulière vulnérabilité ou dépendance de la victime résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale. Je veux ici vous remercier, mesdames les ministres, d’avoir, lors de la lecture du projet de loi au Sénat, permis que cette circonstance aggravante soit inscrite dans le texte, ce qui est une première. Je reprends à mon compte le point de vue de notre collègue Jean-Jacques Hyest, et je pense tout comme lui que cette circonstance aggravante pourra par la suite opportunément être étendue à d’autres délits.
Le Sénat a également ajouté le critère de l’identité sexuelle à la liste des discriminations énoncées à l’article 225-1 du code pénal. L’article 2 ter permet aux associations de lutte contre le harcèlement sexuel d’exercer les droits reconnus à la partie civile, conformément au souhait de ces associations, qui est ici pris en compte.
Des coordinations et mises en cohérence ont, bien entendu, été introduites dans le code du travail et dans le code du travail applicable à Mayotte, ainsi que dans le statut de la fonction publique. Peut-être conviendra-t-il d’ailleurs ultérieurement de modifier plus largement le statut de la fonction publique, car les fonctionnaires ont des droits et des obligations comme les autres salariés.
L’Assemblée nationale a elle-même apporté des modifications au texte, en particulier en supprimant, à l’article 1er, la mention des « ordres, menaces ou contraintes », pour conserver la seule référence à « toute forme de pression grave », afin d’éviter, comme l’a souligné Jean-Jacques Hyest, toute déqualification de l’agression sexuelle.
Nos collègues députés ont aligné la sanction prévue pour le harcèlement moral sur celle qui est introduite pour le harcèlement sexuel.
Ils ont souhaité maintenir la définition in extenso du harcèlement sexuel et du harcèlement moral dans le code du travail, plutôt que de procéder à un renvoi au code pénal. On ne va pas refaire le débat ; la question de la méthode peut effectivement se poser, mais la solution retenue ne me semble pas devoir poser de problèmes.
Les députés ont également adopté un amendement rendant obligatoire l’affichage dans les entreprises du texte des articles 222-33 et 222-33-2 du code pénal.
Enfin, ils ont introduit un article 7, qui a d’ailleurs été réécrit par les rapporteurs en CMP, et qui prévoit que le tribunal correctionnel ou la cour d’appel peuvent accorder, à la demande de la partie civile, réparation du préjudice subi par les victimes de harcèlement sexuel lorsque l’action publique est éteinte en raison de la décision du Conseil constitutionnel du 4 mai 2012.
Nous allons donc approuver les conclusions de la commission mixte paritaire, et ce, comme cela a été fait à l’Assemblée nationale et lors de la CMP, par un vote unanime de toutes les composantes politiques de notre assemblée.
Mes chers collègues, nous avons atteint notre objectif : voter une loi suffisamment claire, qui servira à protéger les victimes et à décourager les harceleurs.
La campagne d’information que vous allez lancer, madame la ministre des droits des femmes, et la circulaire ministérielle que vous allez adresser au parquet, madame la garde des sceaux, constituent bien évidemment des éléments forts : il faut que cette loi soit connue et que les tribunaux l’appliquent.
Mes chers collègues, nous avons connu de nombreuses lois qui n’avaient comme unique raison d’être que la satisfaction du besoin de communication de l’ancien Président de la République ! (Protestations sur les travées de l'UMP.) Aujourd'hui, nous sommes pleinement satisfaits de voter cette loi utile. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Christian Cointat. Nous aussi, nous le sommes !
M. le président. La parole est à Mme Virginie Klès.
Mme Virginie Klès. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre, mes chers collègues, je veux dire, à mon tour, ma satisfaction à l’issue de nos débats, à la fois passionnés et passionnants, mais aussi difficiles.
En effet, si nous étions, d’entrée de jeu, unanimes sur les objectifs, l’unanimité sur les moyens à mettre en œuvre ne s’est, en revanche, que progressivement construite au fur et à mesure de l’élaboration du texte aujourd'hui soumis à notre vote, chaque mot ayant pris son importance.
Il s’agissait pour le législateur de définir, sans en exclure aucun, des comportements, ou des situations, que j’aurais qualifiés, dans ma vie antérieure de vétérinaire, de « protéiformes », c'est-à-dire susceptible de revêtir de multiples aspects.
Pourtant, c’était une nécessité que notre droit, qui organise et garantit les équilibres sociaux et sociétaux, ne se satisfasse pas du vide juridique créé.
De même, il était essentiel de légiférer pour les victimes, pour toutes les victimes, quels que soient leur personnalité et le lieu dans lequel elles évoluent. Chacun, chacune d’entre nous est concernée. Tous les lieux de travail, les espaces de loisirs, associatifs et sportifs – on pense notamment aux compétitions -, tous les lieux d’enfermement aussi sont autant d’endroits où les relations humaines peuvent dégénérer en des rapports de proie à prédateur, sans fuite possible pour la proie, le prédateur pouvant, par son emprise, réduire l’autre à n’être plus qu’un simple objet de possession. Ici, les mots sont utilisés non pas pour définir le droit, mais pour détruire, pour posséder, voire pour tuer.
Il fallait non seulement définir le délit, mais le faire par rapport à l’acte lui-même, et non par rapport aux effets qu’il produit sur la victime. Or il me semble que nous y sommes parvenus aujourd'hui.
Quelle que soit la victime, homme, femme ou enfant, quelles que soient ses forces ou ses faiblesses, quelle que soit sa force ou sa faiblesse, c’est bien le harcèlement sexuel en tant qu’acte qui est reconnu comme délictueux.
Pour les victimes les plus fragiles, les circonstances aggravantes ont été clairement identifiées, ce qui constitue une grande avancée.
Légiférer était aussi, selon moi, une nécessité pour les auteurs.
Notre collègue Muguette Dini a dit tout à l'heure que certains auteurs s’abstiendraient de commettre des actes délictueux, se félicitant d’un effet préventif du texte. Ce sera sans doute le cas pour certains d’entre eux, mais pas pour tous, et je pense ici aux auteurs réellement pathologiques, à ceux qui sont mal structurés, à ceux qui ont clairement inscrit dans leur personnalité ce comportement de harceleur.
Pour ces auteurs-là, qui ont, eux aussi, un comportement et des symptômes extrêmement protéiformes, le premier obstacle sur la voie de la réitération ou de la récidive est d’abord la reconnaissance du délit, et donc l’étape pénale. C’est une constante pour les harceleurs, pour les manipulateurs. La première étape de la prise en charge est celle de la société, celle du droit, celle du pénal. Il était donc essentiel de réécrire les dispositions abrogées dans les termes qui nous sont aujourd'hui proposés afin de protéger les autres victimes.
Pour autant, cela ne suffira pas. Le texte est écrit, reste à l’appliquer, sans oublier, comme je le soulignais dans mon intervention liminaire à la tribune, que, quand la plainte a été déposée, la relation entre victime et auteur continue, qu’elle se maintient dans les mêmes termes, c'est-à-dire comme avant la reconnaissance éventuelle du délit. N’oublions pas que, dès qu’une plainte est déposée, il y a un délit, que ce soit du côté de l’accusé ou du côté de l’accusant, et il faut absolument aller à la source pour faire sortir la vérité. En effet, les dénonciations calomnieuses détruisent et tuent, elles aussi. Or elles sont souvent utilisées par les harceleurs pathologiques et par les manipulateurs, qui inversent la réalité. Il importe alors de prendre en considération le comportement pathologique.
Madame la garde des sceaux, madame la ministre, aucun appel au secours ne doit plus jamais rester sans réponse, comme un cri lancé dans le désert ; aucune main ne doit rester tendue en vain pendant des semaines, des mois ou des années, sans que la justice entende, réponde, sanctionne et protège !
Je compte sur vous pour donner des instructions générales en ce sens ou publier des circulaires afin que ces plaintes soient partout considérées comme prioritaires et qu’elles soient traitées en urgence jusqu’à leur terme.
Je compte sur vous pour favoriser l’interdisciplinarité avec le secteur médico-psychiatrique et les travailleurs sociaux, notamment.
Je compte sur vous aussi pour prendre des mesures afin de soutenir les aidants, les associations, les syndicats ou tous les autres partenaires susceptibles d’aider les victimes. Elles prolongeront efficacement la loi.
Confiante dans les décisions que vous allez prendre, et pour toutes les raisons que j’ai dites, je voterai, avec mon groupe, les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre, mes chers collègues, à mon tour je me réjouis que nous ayons pu respecter le calendrier que nous nous étions fixé et que nous soyons en mesure d’adopter aujourd’hui, avant la fin de la session extraordinaire, une nouvelle définition du délit de harcèlement sexuel.
Nous pouvons nous féliciter de la rapidité avec laquelle le Parlement aura adopté ce texte, car elle témoigne d’une volonté partagée sur toutes les travées de la Haute Assemblée de combler au plus vite le vide juridique choquant qui résultait de l’abrogation, par le Conseil constitutionnel, de l’ancien article 222-33 du code pénal.
Il me semble que cette mobilisation des pouvoirs publics, faisant écho au fort émoi et à la mobilisation des victimes et des associations de défense des droits des femmes, une mobilisation à laquelle le Sénat a contribué en mettant rapidement en place un groupe de travail, envoie un signal fort.
Le harcèlement sexuel est un fait social grave que la société ne doit pas, ne doit plus tolérer. Ces comportements ne doivent pas rester impunis et la loi doit les sanctionner.
La nouvelle définition du délit que nous nous apprêtons à adopter marque de réels progrès par rapport à la disposition précédente : en sanctionnant à la fois les comportements répétés et l’acte unique d’une particulière gravité, elle prend mieux en compte la réalité vécue du harcèlement sexuel, celle que nous ont décrite non seulement les associations qui viennent en aide aux victimes, les associations de défense des droits des femmes, mais aussi les associations des lesbiennes, des gays, des bisexuels et transgenres.
En désignant comme élément intentionnel du délit l’atteinte à la dignité, cette définition devrait, en outre, faciliter l’administration de la preuve devant les tribunaux, même si la recherche d’un acte sexuel reste l’élément intentionnel pour l’acte unique d’une particulière gravité.
En ma qualité de présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, je me réjouis que le texte que nous allons adopter prenne en compte certaines des recommandations à portée législative que nous avions adoptées à l’unanimité.
Nous avions ainsi souhaité que l’état de vulnérabilité de la victime, qui figurait parmi les circonstances aggravantes prévues par le projet de loi et par le texte de la commission des lois du Sénat, englobe la vulnérabilité économique et sociale. Le Sénat nous a entendus en adoptant une définition qui vise expressément « la particulière vulnérabilité ou dépendance de la victime résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale ». L’Assemblée nationale a confirmé et ajusté cette formulation, ce dont je me réjouis.
Nous avions souligné la nécessité d’effectuer la coordination nécessaire avec la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires au motif que l’administration et les agents publics ne pouvaient rester à l’écart de la réforme du délit de harcèlement sexuel.
La commission des lois nous a rejoints en complétant le projet de loi au travers de l’adoption d’un nouvel article 3 bis, ensuite confirmé et complété par l’Assemblée nationale.
Notre délégation avait, en outre, souhaité que la loi confirme expressément l’obligation pour l’État et les collectivités territoriales de prendre les dispositions nécessaires à la prévention du harcèlement sexuel dans leurs administrations respectives. Nous avions envisagé d’introduire cette obligation dans la loi du 13 juillet 1983, mais le Sénat n’avait pas adopté nos amendements, considérant que cette obligation s’imposait déjà implicitement à l’État et aux collectivités territoriales.
Je me réjouis que l’Assemblée nationale ait partagé notre préoccupation et ait donné une confirmation légale à cette obligation par un autre biais, en insérant la prévention du harcèlement sexuel au nombre des obligations de prévention imposées à l’employeur, public ou privé, avec l’article L. 4121-2 du code du travail.
Toutefois, je souhaiterais revenir sur trois de nos recommandations qui n’ont pas de portée législative directe, mais qui me semblent importantes pour accompagner la loi.
Dans notre troisième recommandation, nous avions invité Mme la garde des sceaux, responsable de la définition de la politique pénale, à veiller à ce que le nouveau délit de harcèlement sexuel ne soit plus utilisé pour sanctionner des agissements relevant d’incriminations pénales plus lourdes.
La modification opérée par l’Assemblée nationale, qui a recentré la définition de l’acte unique grave sur la notion de « pression grave » pour éviter une possible confusion avec les incriminations de viol et d’agression sexuelle, participe de cette même préoccupation et me paraît, à titre personnel, aller dans le bon sens.
Nous ne devons plus accepter que le harcèlement sexuel soit utilisé pour « déqualifier » des agressions ou des tentatives d’agression.
C’est pourquoi, à titre personnel, j’avais plaidé avec mon groupe pour que nous allions plus loin afin d’écarter totalement le risque de déqualification pour des incriminations relevant du viol et de l’agression sexuelle, d’autant que la formulation retenue ne garantira pas le même niveau de protection aux populations transgenres.
Enfin, dans ses deux premières recommandations, la délégation avait demandé la réalisation d’une nouvelle enquête sur les violences faites aux femmes en France, ainsi que la création d’un observatoire national des violences envers les femmes.
Je me réjouis que la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale, et sa rapporteure, Ségolène Neuville, aient apporté leur appui à ces deux demandes, et je juge très encourageants les engagements que vous avez pris, madame la ministre des droits des femmes, devant notre assemblée. Je me félicite que vous nous rejoigniez sur les missions du futur observatoire national, qui ne devra pas se contenter de collecter des données, mais qui devra également être une plateforme d’action permettant de coordonner l’intervention des différents acteurs publics, institutionnels, sociaux ou associatifs.
Je pense, comme vous, que nous aurons besoin de faire le point, dans un proche avenir, sur l’application de la loi du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, et de prendre en considération les premiers retours que nous aurons de l’application de la loi relative au harcèlement sexuel, afin d’y apporter les éventuelles retouches qui seront apparues, à l’expérience, nécessaires.
C’est par un effort constant que nous pourrons faire reculer, dans notre pays, cette plaie sociale que constituent les violences envers les femmes, violences dont le harcèlement sexuel constitue le premier maillon. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre, mes chers collègues, le délit de harcèlement sexuel est une invention relativement récente dans notre droit, qui traduit une réalité sociale dont les statistiques officielles peinent à rendre compte avec précision.
Selon les années, les tribunaux ne sont amenés qu’à prononcer entre 70 et 85 condamnations sur ce chef. Bien sûr, ces chiffres, quelque peu abstraits, ne disent rien des victimes silencieuses, contraintes de ne pas faire valoir leurs droits en raison des pressions qu’elles subissent ou de la peur qui les tétanise.
Tout a été dit sur les raisons qui ont conduit le Conseil constitutionnel à invalider l’article 222-33 du code pénal, y compris le fait que, dès le vote de la loi du 17 janvier 2002, qui modifiait la définition du harcèlement sexuel, la doctrine s’était interrogée sur la rédaction adoptée par le législateur. Je ne reviendrai donc pas sur ces éléments, que mon collègue Nicolas Alfonsi, éminent juriste, a brillamment développés.
Vous le savez, madame la garde des sceaux, la décision du Conseil constitutionnel du 4 mai dernier était prévisible dans ses considérants. Néanmoins, elle a eu le mérite de remettre en lumière la question du harcèlement sexuel et, plus largement, celle des droits des femmes dans notre société et de la lutte contre les formes de violence ou de mépris dont elles sont les victimes. Le silence sur ces questions fera toujours le jeu de ceux qui abusent de leur position dominante pour attenter à la dignité des femmes ; l’ensemble de la représentation nationale, dans toutes ses composantes, ne cessera jamais de réprouver ces comportements.
Légiférer à nouveau sur le harcèlement sexuel, comme nous y a exhorté le Conseil constitutionnel, nous permet non seulement de réparer la malfaçon votée en 2002 mais encore de moderniser notre droit. C’est ainsi que l’article 1er du projet de loi prévoit la création d’un nouveau délit de chantage sexuel, défini comme « le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers ».
À l’issue de la première lecture, nous aurions pu craindre qu’il s’opère une certaine confusion avec la tentative de viol ou d’agression sexuelle, en raison de la proximité des éléments matériels posés par le code pénal pour définir ces infractions. Nous comptons cependant sur votre vigilance, madame la garde des sceaux, pour que la loi que nous allons voter soit appliquée à la lettre, et que les déqualifications ne deviennent pas un outil de régulation face à l’engorgement ou à la lenteur des tribunaux.
Toujours dans cet objectif de modernisation de notre droit, le travail conjoint et convergent de nos deux assemblées a permis de renforcer la protection dont doivent bénéficier les salariés et les fonctionnaires dans leurs relations de travail. Les discriminations qui résulteraient de faits de harcèlement sexuel ou moral doivent être sanctionnées à leur juste mesure, y compris lorsqu’elles touchent les personnes amenées à témoigner de tels faits.
Sur cette question, il me semble que le texte de la commission mixte paritaire répond parfaitement à l’évolution de l’ordre public social depuis l’introduction dans notre droit du harcèlement par la loi du 22 juillet 1992. La violence du monde du travail, le plus souvent sournoise et insidieuse, appelle des réponses claires et fortes du législateur. Il appartient désormais aux pouvoirs publics de donner corps à ce message. L’obligation pour les employeurs d’informer les salariés sur les lieux de travail des dispositions légales relatives aux harcèlements sexuel et moral va dans le bon sens.
La lutte contre les discriminations relève elle aussi de la modernisation de notre droit. La version finale de ce projet de loi dépasse le cadre auquel il était initialement circonscrit : au départ, il s’agissait simplement de combler dans les meilleurs délais le vide juridique créé par la décision du Conseil constitutionnel. Les conclusions de la commission mixte paritaire retiennent ainsi les dispositions relatives à la lutte contre les discriminations opérées à raison de l’identité sexuelle de la victime. Nous nous satisfaisons naturellement de cette avancée pour l’égalité, dont le Sénat dans toute sa diversité est d’ailleurs à l’origine.
Pour conclure, j’appelle votre attention, madame la garde des sceaux, sur le chapitre qui va s’ouvrir lorsque ce texte aura été promulgué. On peut dire en effet que le Parlement et le Gouvernement ont bien travaillé, mais cette œuvre commune restera vaine tant que l’égalité entre les hommes et les femmes ne progressera pas, tant que les victimes n’oseront pas parler et tant que la peur ne frappera pas ceux qui se rendent coupables de harcèlement. La mobilisation des pouvoirs publics est donc indispensable. Cela implique que l’ensemble de nos concitoyens soient sensibilisés à la question du harcèlement.
Les radicaux de gauche et l’ensemble des membres du RDSE joindront naturellement leurs voix à l’unanimité que requiert ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Alain Gournac.
M. Alain Gournac. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre, madame la présidente de la délégation aux droits des femmes, mes chers collègues, mon propos sera relativement bref, mais il était important pour moi de reprendre la parole sur un sujet qui me préoccupe depuis plus de dix ans et sur lequel, en tant qu’ancien membre de la commission des affaires sociales et de la délégation aux droits des femmes, je m’investis au quotidien.
Mon collègue François Pillet, qui est tout aussi attaché que moi à cette problématique, nous a rappelé que le harcèlement sexuel était un drame humain mal compris et trop souvent méprisé. Depuis de nombreuses années, nous n’avons cessé de réfléchir aux moyens de construire un cadre juridique clair pour la lutte globale, déterminée, cohérente, contre toutes les formes de violence, en particulier celles qui visent les femmes, que ce soit dans le cadre privé, intime, de la vie du couple, ou en dehors de ce cadre, notamment au travail.
Je ne reviendrai pas sur les circonstances qui nous amènent aujourd’hui à adopter un nouveau cadre juridique, mais je peux vous dire que cette journée est attendue par de nombreuses victimes dont les affaires ont été classées du fait de la décision du Conseil constitutionnel, mais aussi par des victimes encore inconnues des services judiciaires, qui vont pouvoir plus facilement – j’en suis désormais convaincu – porter plainte contre leur tortionnaire.
En effet, il existe bel et bien un manque de considération pour la souffrance de certaines femmes. Car les victimes sont le plus souvent des femmes qui, par crainte des représailles ou peur de se lancer dans des procédures interminables, en viennent à garder le silence, acceptant ainsi l’inacceptable.
Si le projet de loi présenté par le Gouvernement était complexe, je suis heureux de constater que la réflexion du Sénat a été très largement prise en compte. Je tiens d’ailleurs à saluer, comme l’a fait Jean-Jacques Hyest, le travail de notre rapporteur, Alain Anziani, mais également de Brigitte Gonthier-Maurin, qui a formulé, au nom de la délégation aux droits des femmes, des propositions qui ne manqueront pas d’alimenter nos réflexions à venir.
Mme Éliane Assassi. C’est vrai !
M. Alain Gournac. Car le combat n’est pas terminé, mes chers collègues ! Nous pouvons certes partir en vacances en nous disant que, grâce à ce projet de loi, les femmes sont désormais protégées, mais, mes amis, il nous reste encore beaucoup, beaucoup de choses à faire pour progresser dans ce domaine !
Je me réjouis que les députés aient largement conforté le texte du Sénat, tout en y apportant plusieurs séries de modifications rédactionnelles et de fond. Nous avons essayé de procéder, sur ce sujet sensible, à une écriture unique du droit, qui s’applique aussi bien au code pénal qu’au code du travail ou au statut général de la fonction publique. Il faudra certes aller plus loin, mais la voie est désormais ouverte.
Sans revenir sur le fond des dispositions, qui ont fait l’objet d’un consensus indiscutable, j’indique que je voterai ce projet de loi, tout comme mes collègues du groupe UMP, car, les exemples versés aux débats le prouvent, il répond à l’attente des victimes. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame la présidente de la délégation aux droits des femmes, mes chers collègues, nous voici à nouveau réunis en séance publique pour aborder la question du harcèlement.
J’aimerais moi aussi commencer par vous faire part de ma grande satisfaction. Après trois mois de travaux, d’auditions et de débats, nous pouvons nous féliciter du travail que nous avons accompli collectivement : membres de la commission des lois et des affaires sociales, membres de la délégation aux droits des femmes, membres des différents groupes politiques que compte la Haute Assemblée, parlementaires du Sénat comme de l’Assemblée nationale.
Je tiens à saluer, à ce propos, le président Jean-Pierre Sueur, les présidentes Annie David et Brigitte Gonthier-Maurin ainsi que les rapporteurs, Alain Anziani et Christiane Demontès. Merci à eux, merci à vous, chers collègues, d’avoir mis en mouvement notre assemblée autour de ce texte si précieux et d’avoir su créer les conditions d’un travail de fond, d’un travail sérieux, d’un travail qui rassemble et nous donne le sentiment partagé d’avoir été utiles à notre pays, à nos concitoyennes et à nos concitoyens.
Trois mois, c’est beaucoup, au regard de l’urgence qu’il y avait à statuer après la décision du Conseil constitutionnel du mois de mai, qui a ouvert une période de flou, d’incertitudes et, surtout, d’insécurité juridique pour les victimes. À ce propos, je tiens à remercier les membres de la commission mixte paritaire d’avoir précisé que, en cas d’extinction d’une action publique du fait de l’abrogation par le Conseil constitutionnel des dispositions réprimant le harcèlement sexuel, la juridiction demeurera compétente pour accorder la réparation de l’ensemble des préjudices subis.
Il fallait réagir vite ! C’est ce qu’ont fait le Président de la République, François Hollande, ainsi que le Gouvernement – au premier chef, Mme la garde des sceaux et Mme la ministre des droits des femmes – et le Sénat.
Trois mois, c’est beaucoup, mais c’est également peu, au regard de l’ampleur du travail à réaliser. Il fallait certes réagir rapidement, mais en prenant le temps de rencontrer les associations féministes et de défense des victimes, d’auditionner experts et juristes, de poser les bases d’un texte qui ne connaisse pas le même sort que son prédécesseur mais permette effectivement de protéger, prévenir et défendre.
Il fallait d’abord redéfinir le harcèlement sexuel.
Quel que soit le lieu où il s’exprime, le harcèlement sexuel vise à utiliser la victime comme un objet sexuel à des fins de satisfaction personnelle. Les répercussions sont importantes : perte d’emploi, difficultés psychologiques ou de santé pour les victimes, voire pour leurs proches… À cela s’ajoute un coût financier évident.
Vous le savez, mes chers collègues, ce qui caractérise les violences envers les femmes, c’est qu’elles créent un continuum dans le temps et entre chacune des différentes sphères de la vie des victimes – personnelle, familiale, sociale et professionnelle. Ces violences doivent toutes être sanctionnées de manière mesurée, en recherchant des réponses pénales adaptées et, surtout, en essayant de prévenir et d’empêcher des passages à l’acte plus graves.
Le projet de loi que nous allons voter solennellement est un bon texte, un texte utile, un texte symbole, aussi. Symbole, car adopté en première lecture par chacune des deux chambres à l’unanimité. Symbole, car constituant le premier projet de loi déposé par le nouveau gouvernement de la France devant la Haute Assemblée. Symbole, enfin, car présenté par la ministre aux droits des femmes comme un premier pas sur le chemin, long et difficile, de la défense des droits des femmes et de la conquête de nouveaux droits.
M. Alain Gournac. Absolument !
Mme Michelle Meunier. Tout en confortant le texte adopté par le Sénat, les députés lui ont apporté plusieurs modifications, parmi lesquelles la substitution du mot « comportements » au mot « agissements » pour qualifier le délit de harcèlement sexuel, la reproduction de la définition du harcèlement sexuel dans le code du travail ou encore l’alignement des peines prévues en cas de harcèlement moral sur celles qui sanctionnent le harcèlement sexuel.
J’aimerais terminer en évoquant trois points sur lesquels je me suis plus particulièrement penchée au cours de nos travaux, avec mes collègues de la commission des affaires sociales et de la délégation aux droits des femmes.
Tout d'abord, la précarité économique et sociale est désormais reconnue comme une circonstance aggravante. En effet, dans le milieu du travail, le risque de perdre son emploi peut donner lieu un à un chantage, explicite ou implicite, lorsque le harcèlement est le fait d’un supérieur hiérarchique ou d’un collègue. Il nous fallait donc reconnaître cette vulnérabilité particulière. C’est aujourd'hui chose faite, et nous savons gré au Gouvernement de nous avoir facilité la tâche, avec un nouvel article 222-33 du code pénal, qui prévoit notamment de porter la peine à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende si les faits sont commis « sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de l’auteur ».
L’article 225-1 du code pénal, notamment, a été modifié pour y introduire la notion d’« identité sexuelle » et ainsi reconnaître la « transphobie » comme discrimination punie par la loi.
Longtemps ignorée, voire méprisée, la situation difficile des personnes transgenres ou transsexuelles a été longuement abordée dans notre hémicycle. Je garde le souvenir de l’audition de responsables d’associations qui les représentent, en particulier ORTrans. Cet après-midi-là nous a permis de prendre conscience, si ce n’était déjà le cas, de la complexité du parcours de ces personnes, de l’impasse dans laquelle elles se trouvent souvent et de la nécessité d’avancer vers la conquête de nouveaux droits.
Cet article est un premier pas qui devra être suivi d’évolutions législatives importantes pour les droits des personnes « trans », notamment en matière d’état civil.
M. Alain Gournac. Exactement !
Mme Michelle Meunier. Je sais, madame la garde des sceaux, que vous y êtes particulièrement attentive.
Il conviendra également de s’interroger sur la question de l’« identité de genre », et non plus de l’« identité sexuelle ». En effet, comme l’indique notamment la Commission nationale consultative des droits de l’homme dans son avis du 22 mars 2012, « le genre est un concept opératoire, acquis aux niveaux national et international, pour faire progresser l’égalité entre les hommes et les femmes. […] Le recours au concept de genre avait permis de faire progresser la lutte contre les inégalités et les discriminations faites aux femmes, ainsi que l’égalité réelle, dans les politiques nationales et internationales. » Avec ma collègue Maryvonne Blondin, j’aurai l’occasion de revenir prochainement sur ces différents sujets.
Enfin, je tiens à remercier sincèrement Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, de s’être engagée, lors de la première lecture, sur la création d’un observatoire national des violences envers les femmes par le biais d’un texte abordant de façon plus large l’ensemble de ces violences et devant être présenté au Parlement d’ici à la fin de l’année.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, c’est avec enthousiasme et détermination que je voterai le texte qui nous est présenté, et surtout en ayant conscience de tout ce qu’il reste à faire en la matière pour qu’un jour l’égalité puisse être vécue, aux quatre coins de la France, comme une réalité et non plus comme un objectif politique.
Oui, il nous reste du travail à accomplir, beaucoup de travail, mais au regard de ce que nous avons réalisé autour de ce texte, je sais que nous ne manquerons pas d’énergie ni de détermination ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – M. Alain Gournac applaudit également.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, aucun amendement n’est recevable, sauf accord du Gouvernement ; en outre, étant appelé à se prononcer avant l’Assemblée nationale, le Sénat statue d’abord sur les amendements puis, par un seul vote, sur l’ensemble du texte.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :
projet de loi relatif au harcèlement sexuel
Article 1er
Le paragraphe 4 de la section 3 du chapitre II du titre II du livre II du code pénal est complété par un article 222-33 ainsi rétabli :
« Art. 222-33. – I. – Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.
« II. – Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.
« III. – Les faits mentionnés aux I et II sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende.
« Ces peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende lorsque les faits sont commis :
« 1° Par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ;
« 2° Sur un mineur de quinze ans ;
« 3° Sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur ;
« 3° bis Sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de leur auteur ;
« 4° Par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice. »
Article 1er bis
Après le mot : « puni », la fin de l’article 222-33-2 du code pénal est ainsi rédigée : « de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende. »
Article 2
I. – Après l’article 225-1 du code pénal, il est inséré un article 225-1-1 ainsi rédigé :
« Art. 225-1-1. – Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes parce qu’elles ont subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel tels que définis à l’article 222-33 ou témoigné de tels faits, y compris, dans le cas mentionné au I du même article, si les propos ou comportements n’ont pas été répétés. »
II. – Au premier alinéa des articles 225-2 et 432-7 du même code, la référence : « à l’article 225-1 » est remplacée par les références : « aux articles 225-1 et 225-1-1 ».
III. – Les 4° et 5° de l’article 225-2 du même code sont complétés par les mots : « ou prévue à l’article 225-1-1 ».
IV. – Au deuxième alinéa de l’article L. 1110-3, au premier alinéa de l’article L. 1110-3-1 et au troisième alinéa du III de l’article L. 1541-2 du code de la santé publique, après la référence : « au premier alinéa de l’article 225-1 », est insérée la référence : « ou à l’article 225-1-1 ».
Article 2 bis
I. – Aux premier et second alinéas de l’article 132-77, au 7° de l’article 221-4, au 5° ter des articles 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13, à la seconde phrase de l’article 222-18-1, au 9° de l’article 222-24, au 6° de l’article 222-30, aux premier et second alinéas de l’article 225-1, au premier alinéa de l’article 226-19, au 9° de l’article 311-4 et au 3° de l’article 312-2 du code pénal, après le mot : « orientation », sont insérés les mots : « ou identité ».
II. – Au 3° de l’article 695-9-17, au 5° de l’article 695-22 et au 4° des articles 713-20 et 713-37 du code de procédure pénale, après le mot : « orientation », sont insérés les mots : « ou identité ».
III. – Au premier alinéa de l’article L. 332-18 et au dernier alinéa de l’article L. 332-19 du code du sport, après le mot : « orientation », sont insérés les mots : « ou identité ».
IV. – À l’article L. 1132-1, au 3° de l’article L. 1321-3 et au 1° de l’article L. 1441-23 du code du travail, après le mot : « orientation », sont insérés les mots : « ou identité ».
V. – À l’article L. 032-1 du code du travail applicable à Mayotte, après le mot : « orientation », sont insérés les mots : « ou identité ».
VI. – Au neuvième alinéa de l’article 24, au troisième alinéa de l’article 32, au quatrième alinéa de l’article 33 et au premier alinéa de l’article 48-4 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, après le mot : « orientation », sont insérés les mots : « ou identité ».
VII. – Au deuxième alinéa de l’article 6 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, après le mot : « orientation », sont insérés les mots : « ou identité ».
VIII. – Au premier alinéa de l’article 1er et du 2° de l’article 2 de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, après le mot : « orientation », sont insérés les mots : « ou identité ».
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Article 2 quater
I. – L’article 2-6 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Les mots : « ou sur les mœurs » sont remplacés par les mots : « , sur les mœurs ou sur l’orientation ou l’identité sexuelle » ;
b) Après les mots : « code pénal », la fin de cet alinéa est ainsi rédigée : « et les articles L. 1146-1 et L. 1155-2 du code du travail, lorsqu’elles sont commises en raison du sexe, de la situation de famille, des mœurs ou de l’orientation ou l’identité sexuelle de la victime ou à la suite d’un harcèlement sexuel. » ;
2° Le début du deuxième alinéa est ainsi rédigé : « Toutefois, en ce qui concerne les discriminations commises à la suite d’un harcèlement sexuel, l’association n’est recevable... (le reste sans changement) ».
II. – Au second alinéa de l’article 807 du même code, les mots : « ou sur les mœurs » sont remplacés par les mots : « , sur les mœurs ou sur l’orientation ou l’identité sexuelle » et les mots : « ou des mœurs » sont remplacés par les mots : « , des mœurs ou de l’orientation ou l’identité sexuelle ».
Article 3
Le code du travail est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
1° bis À l’article L. 1152-2, après le mot : « salarié », sont insérés les mots : « , aucune personne en formation ou en stage » ;
2° L’article L. 1153-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1153-1. – Aucun salarié ne doit subir des faits :
« a) Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
« b) Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers. » ;
3° L’article L. 1153-2 est ainsi modifié :
a) Les mots : « aucun candidat à un recrutement, à un stage ou à une période de formation » sont remplacés par les mots : « aucune personne en formation ou en stage, aucun candidat à un recrutement, à un stage ou à une formation » ;
b) Après le mot : « subir », la fin de cet article est ainsi rédigée : « des faits de harcèlement sexuel tels que définis à l’article L. 1153-1, y compris, dans le cas mentionné au a du même article, si les propos ou comportements n’ont pas été répétés. » ;
3° bis À l’article L. 1153-3, après le mot : « salarié », sont insérés les mots : « , aucune personne en formation ou en stage » et les mots : « des agissements » sont remplacés par les mots : « de faits » ;
3° ter L’article L. 1152-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le texte de l’article 222-33-2 du code pénal est affiché dans les lieux de travail. » ;
3° quater L’article L. 1153-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le texte de l’article 222-33 du code pénal est affiché dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l’embauche. » ;
3° quinquies Aux articles L. 1153-5 et L. 1153-6, le mot : « agissements » est remplacé par le mot : « faits » ;
4° Le premier alinéa de l’article L. 1155-2 est ainsi rédigé :
« Sont punis d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 3 750 € les faits de discriminations commis à la suite d’un harcèlement moral ou sexuel définis aux articles L. 1152-2, L. 1153-2 et L. 1153-3 du présent code. » ;
5° Les articles L. 1155-3 et L. 1155-4 sont abrogés ;
5° bis À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 2313-2, après le mot : « résulter », sont insérés les mots : « de faits de harcèlement sexuel ou moral ou » ;
5° ter A Après le mot : « moral », la fin du 7° de l’article L. 4121-2 est ainsi rédigée : « et au harcèlement sexuel, tels qu’ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1 ; »
5° ter Au 2° de l’article L. 4622-2, après les mots : « lieu de travail, », sont insérés les mots : « de prévenir le harcèlement sexuel ou moral, » ;
6° Au 1° de l’article L. 8112-2, après la référence : « 225-2 du code pénal, », sont insérés les mots : « les délits de harcèlement sexuel ou moral prévus, dans le cadre des relations de travail, par les articles 222-33 et 222-33-2 du même code ».
Article 3 bis
L’article 6 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires est ainsi modifié :
1° Avant le premier alinéa, sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« Aucun fonctionnaire ne doit subir les faits :
« a) Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
« b) Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers. » ;
1° bis Après le mot : « fonctionnaire », la fin du premier alinéa est supprimée ;
2° Le 1° est ainsi rédigé :
« 1° Parce qu’il a subi ou refusé de subir les faits de harcèlement sexuel mentionnés aux trois premiers alinéas, y compris, dans le cas mentionné au a, si les propos ou comportements n’ont pas été répétés ; »
3° Au 2°, les mots : « Le fait qu’il a » sont remplacés par les mots : « Parce qu’il a » et le mot : « agissements » est remplacé par le mot : « faits » ;
4° Au 3°, les mots : « le fait qu’il a » sont remplacés par les mots : « parce qu’il a » et le mot : « agissements » est remplacé par le mot : « faits » ;
5° Après le mot : « aux », la fin de l’avant-dernier alinéa est ainsi rédigée : « faits de harcèlement sexuel mentionnés aux trois premiers alinéas. »
Article 4
Le code du travail applicable à Mayotte est ainsi modifié :
1° Le titre V du livre préliminaire est ainsi modifié :
a) (Supprimé)
a bis) À l’article L. 052-2, après le mot : « salarié », sont insérés les mots : « , aucune personne en formation ou en stage » ;
a ter) (nouveau) L’article L. 052-4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le texte de l’article 222-33-2 du code pénal est affiché dans les lieux de travail. »
b) Le chapitre III est ainsi rédigé :
« Chapitre III
« Harcèlement sexuel
« Art. L. 053-1. – Aucun salarié ne doit subir des faits :
« a) Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
« b) Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.
« Art. L. 053-2. – Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage, aucun candidat à un recrutement, à un stage ou à une formation en entreprise ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel tels que définis à l’article L. 053-1, y compris, dans le cas mentionné au a du même article, si les propos ou comportements n’ont pas été répétés.
« Art. L. 053-3. – Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir témoigné de faits de harcèlement sexuel ou pour les avoir relatés.
« Art. L. 053-4. – Toute disposition ou tout acte contraire aux articles L. 053-1 à L. 053-3 est nul.
« Art. L. 053-5. – L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel.
« Le texte de l’article 222-33 du code pénal est affiché dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l’embauche.
« Art. L. 053-6. – Tout salarié ayant procédé à des faits de harcèlement sexuel est passible d’une sanction disciplinaire. » ;
c) Le chapitre IV est ainsi modifié :
– au premier alinéa de l’article L. 054-1, après la référence : « L. 052-3 », sont insérées les références : « et L. 053-1 à L. 053-4 » ;
– le premier alinéa de l’article L. 054-2 est complété par les références : « et L. 053-1 à L. 053--4 » ;
d) Le chapitre V est ainsi modifié :
– le premier alinéa de l’article L. 055-2 est ainsi rédigé :
« Sont punis d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 3 750 € les faits de discriminations commis à la suite d’un harcèlement moral ou sexuel définis aux articles L. 052-2, L. 053-2 et L. 053-3 du présent code. » ;
– les articles L. 055-3 et L. 055-4 sont abrogés ;
1° bis À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 432-2, après le mot : « résulter », sont insérés les mots : « de faits de harcèlement sexuel ou moral ou » ;
2° La première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 610-1 est complétée par les mots : « et les délits de harcèlement sexuel ou moral prévus, dans le cadre des relations de travail, par les articles 222-33 et 222-33-2 du même code ».
Article 5
Les articles 1er à 2 quater de la présente loi sont applicables à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.
Article 6
La loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952 instituant un code du travail dans les territoires et territoires associés relevant des ministères de la France d’outre-mer est ainsi modifiée :
1° Le titre Ier est complété par des articles 2 bis à 2 quater ainsi rédigés :
« Art. 2 bis. – I. – Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
« II. – Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.
« III. – Toute disposition ou tout acte contraire aux I et II est nul.
« IV. – L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.
« Le texte de l’article 222-33-2 du code pénal est affiché dans les lieux de travail.
« V. – Tout salarié ayant procédé à des agissements de harcèlement moral est passible d’une sanction disciplinaire.
« Art. 2 ter. – I. – Aucun salarié ne doit subir des faits :
« a) Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
« b) Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.
« II. – Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage, aucun candidat à un recrutement, à un stage ou à une formation en entreprise ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel tels que définis au I, y compris, dans le cas mentionné au a du même I, si les propos ou comportements n’ont pas été répétés.
« III. – Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir témoigné de faits de harcèlement sexuel ou pour les avoir relatés.
« IV. – Toute disposition ou tout acte contraire aux I à III est nul.
« V. – L’employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel.
« Le texte de l’article 222-33 du code pénal est affiché dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l’embauche.
« VI. – Tout salarié ayant procédé à des faits de harcèlement sexuel est passible d’une sanction disciplinaire.
« Art. 2 quater. – Sont punis d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 3 750 € les faits de discriminations commis à la suite d’un harcèlement moral ou sexuel définis au II de l’article 2 bis et aux II et III de l’article 2 ter. » ;
2° Après le cinquième alinéa de l’article 145, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Constate les délits de harcèlement sexuel ou moral prévus par les articles 222-33 et 222-33-2 du code pénal ; ».
Article 7
Lorsque, en raison de l’abrogation de l’article 222-33 du code pénal résultant de la décision du Conseil constitutionnel n° 2012-240 QPC du 4 mai 2012, le tribunal correctionnel ou la chambre des appels correctionnels constate l’extinction de l’action publique, la juridiction demeure compétente, sur la demande de la partie civile formulée avant la clôture des débats, pour accorder, en application des règles du droit civil, réparation de tous les dommages résultant des faits qui ont fondé la poursuite ainsi que le paiement d’une somme qu’elle détermine au titre des frais exposés par la partie civile et non payés par l’État.
Articles 1er à 6
M. le président. Sur les articles 1er à 6, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?...
Le vote est réservé.
Article 7
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Les dispositions du présent article sont applicables à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.
La parole est à Mme la garde des sceaux.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, il s’agit d’un aménagement technique destiné à remédier à une omission.
L’article 7, qui a été introduit dans le texte par la commission des lois de l’Assemblée nationale et modifié substantiellement par la commission mixte paritaire, vise à faciliter le recours à l’action publique pour les victimes dont l’action s’est éteinte dans le cours du processus pénal. L’amendement du Gouvernement tend à étendre le champ de cette disposition aux justiciables des collectivités d’outre-mer dans lesquelles ne s’appliquent pas automatiquement les lois de la République, à savoir Wallis-et-Futuna, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Je n’ai pas jugé nécessaire de réunir la commission des lois pour examiner cet amendement, étant persuadé que ses membres n’accepteraient en aucun cas que cette disposition ne s’appliquât point à Wallis-et-Futuna, à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie !
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par l’amendement précédemment adopté par le Sénat, je donne .la parole à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Le groupe du RDSE votera ce texte avec conviction.
En abrogeant l’article 222-33 du code pénal, dans le cadre d’une réponse à une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a opportunément rappelé, tant au Gouvernement qu’au législateur, un principe général fondamental, celui de légalité des délits et des peines.
En effet, en considérant que, dans cet article 222-33, le délit était punissable sans que les éléments constitutifs de l’infraction soient suffisamment définis, le Conseil constitutionnel a souligné une chose évidente, qu’il est nécessaire d’avoir à l’esprit constamment.
J’estime qu’il a eu raison : au lieu d’accumuler les lois, souvent pour des motivations avant tout d’ordre médiatique, mieux vaut légiférer peu, mais bien, selon des termes précis, en laissant aux tribunaux le soin d’appliquer la loi en considération de la personnalité de ceux qui sont poursuivis, mais en évitant la possibilité de multiples interprétations parfois contradictoires.
Nous sommes une nation qui a construit son système juridique sur la primauté de la loi et non sur celle de la jurisprudence. Dans cette unanimité dont nous nous réjouissons, peut-être est-il bon de souligner encore une fois qu’une justice équilibrée, donc tout simplement la justice, doit permettre de protéger à la fois les droits des victimes et ceux des présumés innocents.
Par conséquent, nous voterons ce texte sans réticence, avec conviction, parce qu’il constitue une amélioration de la législation, un moyen de protéger celles qui sont le plus souvent en position de faiblesse. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Avec ce texte, la loi répondra mieux aux exigences des victimes et des associations féministes. Le débat de fond serein et extrêmement constructif que nous avons eu au Sénat, au-delà de nos différences politiques, y a contribué. Il a également révélé l’ampleur des chantiers à poursuivre : je pense notamment aux discriminations dont sont victimes les personnes transsexuelles dans le monde du travail, sur le plan familial ou au regard de leur statut de citoyenne ou de citoyen. En tant que parlementaires, nous devrons contribuer à faire bouger les mentalités non seulement en soulignant les obstacles et les souffrances que rencontrent au quotidien ces femmes et ces hommes, mais également en légiférant en conséquence, particulièrement en matière d’état civil.
Pour le groupe CRC, il apparaît essentiel de veiller à ce que l’observatoire national des violences envers les femmes ait les moyens d’accomplir ses missions. Cela peut paraître anodin, mais, dans une période où une crise violente affecte la majorité de nos concitoyens et où les urgences sociales sont très nombreuses, la tentation peut être forte de ne prendre, sous le prétexte d’accorder tous les moyens à la sphère économique, que des mesures symboliques, même si les symboles sont importants dans ce domaine. Ce serait vraiment une lourde erreur !
Toute avancée vers l’égalité réelle entre les femmes et les hommes repose sur quatre piliers : l’indépendance économique des femmes au travers de l’égalité professionnelle, leur liberté de disposer de leur corps, l’exercice plein et entier par elles de responsabilités électives, lié à la question de la parité, et enfin le respect de leur dignité, supposant l’éradication de toutes les violences.
Telle est la raison pour laquelle notre groupe soutient l’élaboration d’une loi-cadre contre les violences. Mesdames les ministres, je sais que vous êtes sensibles à cette préoccupation. Il me semble essentiel de souligner le travail important accompli par les associations féministes, notamment le Collectif national pour les droits des femmes : en s’appuyant sur ce travail, on pourra aboutir assez rapidement à la promulgation d’une telle loi.
Notre société est gangrénée par le sexisme ordinaire et institutionnel. Il incombe aux parlementaires que nous sommes de fournir des outils pour éliminer ce fléau. En effet, toute avancée des droits des femmes prend appui sur des lois dont l’élaboration résulte le plus souvent de la mobilisation des féministes et de leurs associations. Geneviève Fraisse l’exprime plus directement dans son livre intitulé La fabrique du féminisme : « L’égalité, cela s’impose par des rapports de forces, par des voies, par des issues à des conflits, etc., mais de toute façon cela s’impose. »
Le groupe CRC continuera de prendre toute sa part dans ce combat de longue haleine contre le patriarcat, notamment avec la présentation d’une proposition de loi antisexiste extrêmement importante.
Aujourd’hui, nous sommes heureux de soutenir ce texte, premier pas vers d’autres lois. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par l’amendement précédemment adopté par le Sénat.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. Je constate que le texte a été adopté à l’unanimité des présents. (Applaudissements.)
M. Alain Gournac. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie tout d’abord de bien vouloir m’excuser de n’avoir pu assister au début de cette discussion, ayant été retenue à l’Assemblée nationale pour évoquer les chantiers prioritaires de mon ministère.
Je tiens à saluer très chaleureusement à mon tour le travail qui a été accompli à la Haute Assemblée, en amont et au cours de débats en séance publique qui ont été riches et ont indéniablement permis d’améliorer le texte. Ce travail a été tout à fait exemplaire, de même que celui qui a été mené à l’Assemblée nationale. Il a montré que nos institutions sont capables de répondre à l’urgence : réussir, en moins de trois mois, à élaborer un texte qui rétablit le délit de harcèlement sexuel, qui le précise et qui renforce la protection des victimes était une gageure, mais nous avons relevé le défi !
Cette urgence s’est imposée à nous. Ici comme à l’Assemblée nationale, beaucoup a été dit quant aux conditions de l’abrogation du délit, aux risques liés à la question prioritaire de constitutionnalité. À cet égard, Mme la garde des sceaux a annoncé qu’elle fera en sorte qu’il soit procédé à un examen systématique des crimes et délits en vue de mesurer leur exposition à un risque de question prioritaire de constitutionnalité. Je m’associerai bien entendu à ce travail pour ce qui concerne les violences envers les femmes, qui méritent toute notre attention.
Je qualifierai le texte que vous venez d’adopter de juridiquement nécessaire et de moralement indispensable, car il n’était pas possible de laisser perdurer la situation d’impunité prévalant depuis le 4 mai dernier. En adoptant ce texte à l’unanimité, vous avez de surcroît envoyé un signal extrêmement fort à la société, car la loi réprimera les actes de harcèlement sexuel non seulement pour ce qu’ils sont et pour les dommages qu’ils créent, mais aussi pour l’atteinte qu’ils portent à un projet de société que nous partageons tous, fondé sur la justice et l’égalité.
Votre vote unanime est un acte politique essentiel pour les victimes, passées et à venir, qui ont été au cœur de nos débats. Avec ce texte, nous leur offrons un véritable outil de protection.
Vous envoyez également un message fort aux juridictions, qui seront éclairées par nos débats.
Exemplaire, ce texte l’est aussi par son mode d’élaboration, marqué par une collaboration étroite entre le Gouvernement et le Parlement. Je salue la mobilisation des commissions, de la Délégation aux droits des femmes : le travail considérable accompli nous a permis de vraiment progresser.
Après le vote de la loi viendra le temps de sa promulgation et de son application. Nous y serons vigilantes et prendrons les mesures complémentaires qui s’imposent : pour ce qui me concerne, je pense notamment à la campagne de sensibilisation, ainsi qu’à la réforme des procédures disciplinaires à l’université, sur laquelle nous sommes d’ores et déjà en train de travailler avec ma collègue Geneviève Fioraso. Nous y reviendrons prochainement. Soyez certains que je garderai la même détermination pour lutter contre l’ensemble des violences envers les femmes ! (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Je voudrais remercier les deux ministres pour deux annonces importantes.
Madame la ministre des droits des femmes, vous nous avez confirmé la création d’un observatoire national des violences envers les femmes et indiqué que vous prendriez toutes dispositions nécessaires pour bien évaluer, mois après mois, année après année, les conséquences de la mise en œuvre de la présente loi. Vous le savez, le Sénat est très attaché au suivi de l'application des lois. Je vois donc dans vos propos le présage d'une coopération, très nécessaire, sur ce thème.
Madame la garde des sceaux, vous avez bien voulu annoncer à cette tribune que la circulaire d'application de la loi paraîtrait le jour même de la promulgation de celle-ci. Je tenais à relever ce fait, car si, à l'avenir, il pouvait en aller de même pour tous les textes de loi relevant de votre compétence, nous serions comblés !
Nous avons, en tout cas, été très heureux de coopérer avec vous, mesdames les ministres, pour élaborer cette loi. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Monsieur le président de la commission des lois, je le confirme, la circulaire d'application sera bien publiée le même jour que la loi. En ce qui concerne les décrets d'application, cela ne peut être aussi rapide, mais je prends devant vous l'engagement formel que, pour tous les textes relevant de ma compétence, ils seront publiés, et ce dans des délais raisonnables. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Ainsi, concernant la loi pénitentiaire, texte adopté voilà trois ans et dont je sais qu’il préoccupe la Haute Assemblée, je puis vous dire que les services de la Chancellerie et mon cabinet travaillent déjà à l’élaboration d’un certain nombre de décrets d'application nécessaires. C’est une question d’efficacité.
Je me réjouis vivement de la qualité de notre travail commun et de nos échanges sur ce texte. Je crois que nous avons tous bien travaillé et que nous pouvons nous féliciter de l’œuvre accomplie.
Néanmoins, vous l’avez dit, madame Dini, il reste beaucoup à faire,…
M. Alain Gournac. Beaucoup !
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. … car la question traitée a des ramifications dans d'autres domaines.
Nous nous sommes engagés sur un certain nombre de points. Vous avez évoqué le sujet de la prescription pour le harcèlement, ainsi que pour d'autres délits punis par le code pénal. J'ai bien entendu votre préoccupation, qui est fondée. Nous cherchons la voie la plus efficace. Le Sénat prendra certainement l'initiative d'ouvrir un espace d'échanges afin que nous puissions déterminer s’il est nécessaire et urgent de traiter cette question.
En ce qui concerne l'échelle des peines, il s’agit d’un chantier lourd, sur lequel le Gouvernement s'engagera très prochainement.
Mme Benbassa nous a fait part de ses réticences quant à l'affichage. Je crois, pour ma part, qu’il est nécessaire, même si j'entends bien votre préoccupation, madame la sénatrice. Cela n'exclut pas que, à l'occasion de la signature du contrat de travail, une information spécifique soit délivrée.
J'ai beaucoup aimé votre propos sur la modestie dont nous devons faire preuve devant les mots. Je le relie à celui de M. Mézard sur l'injonction contenue dans la décision du Conseil constitutionnel : il est rappelé au législateur que la loi est une affaire extrêmement sérieuse, que c’est la règle commune ; chaque mot peut avoir un effet bénéfique ou néfaste pour les justiciables et, plus généralement, pour les citoyens. Nous assumons une très lourde responsabilité lorsque nous écrivons la loi, et notre rédaction doit être la plus précise possible. C’est ainsi que l’on pourra répondre aux angoisses suscitées par les risques liés aux questions prioritaires de constitutionnalité. Le recours à cette procédure ne doit pas mener à un « détricotage » de tout notre droit. Jusqu'à présent, elle avait surtout servi les victimes, mais la question prioritaire de constitutionnalité relative à l’incrimination de harcèlement sexuel les a pénalisées. Nous devons donc avoir une conscience aiguë de la responsabilité qui est la nôtre lorsque nous élaborons la loi.
Je confirme d’ailleurs que, en collaboration avec les deux chambres du Parlement, nous allons mener un travail de prospection pour identifier les textes de loi présentant des éléments de fragilité.
En ce qui concerne la reprise dans le code du travail, les usagers de ce dernier ont fait valoir qu’il était préférable de lui redonner une autonomie en y réintroduisant in extenso la définition de l'incrimination.
Quant à la cinquième circonstance aggravante, à savoir la vulnérabilité économique et sociale, il était nécessaire de l'introduire dans le texte. Si cela doit conduire, à l'avenir, à la reprendre pour d’autres délits, nous aurons fait progresser le droit.
S’agissant du fait unique, vous avez beaucoup insisté sur le risque de déqualification. Je vous ai donné des assurances sur ce point : la circulaire d'application traitera de la question. Le Gouvernement avait préparé un amendement visant à supprimer les mots « menaces et contraintes », car il s’agit d’éléments de définition de l’agression sexuelle, mais la commission des lois de l'Assemblée nationale s’est chargée d’opérer elle-même cette suppression, ce dont nous nous réjouissons. Ainsi, la référence au fait unique permettra d'inclure dans le champ de l’incrimination de harcèlement sexuel des faits qui, jusque-là, n'étaient pas punis, sans risquer pour autant une déqualification de faits plus graves, tels qu’une tentative d'agression sexuelle ou une tentative de viol.
Je tiens à redire tout le plaisir que j'ai eu à travailler avec vous sur ce texte, à la fois en tant que garde des sceaux et en tant qu'ancienne parlementaire. J'ai le goût du travail parlementaire : l’expérience montre que la navette permet une véritable maturation des textes. Bien entendu, sur un projet de loi aussi important, nous aurions tous aimé pouvoir peser chaque mot au trébuchet, mais une contrainte de temps s’imposait à nous. Il se trouve que le génie des deux assemblées – et un peu aussi celui du Gouvernement ! (Sourires.) – nous a permis d’accomplir, dans des délais extrêmement resserrés, une œuvre législative de très grande qualité, dont se félicite l’ancienne parlementaire que je suis. Même si, pour ma part, je persiste à m’interroger sur quelques points, en particulier à propos de la distinction faite, au titre des circonstances aggravantes, entre la minorité de 15 ans et celle de 18 ans, je ne suis pas certaine qu'une double lecture nous aurait permis de progresser davantage.
Enfin, vous n'avez pas hésité à aborder des sujets connexes avec pertinence et précision, sans essayer pour autant de tout traiter : vous avez su éviter le risque de trop embrasser et mal étreindre. Je vous en remercie vivement ! (Applaudissements.)
5
Organismes extraparlementaires
M. le président. M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation de sénateurs appelés à siéger au sein de plusieurs organismes extraparlementaires.
Conformément à l’article 9 du règlement, j’invite :
- la commission de la culture, de l’éducation et de la communication à présenter une candidature pour un suppléant appelé à siéger au sein du conseil d’administration de l’Institut national de l’audiovisuel, en application de l’article 3 du décret n° 2004-532 du 10 juin 2004 ;
- la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées à présenter une candidature pour un titulaire appelé à siéger au sein du conseil d’administration de l’Institut des hautes études de la défense nationale, en remplacement de Mme Hélène Conway Mouret, nommée membre du Gouvernement ;
- la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique à présenter une candidature pour un suppléant appelé à siéger au sein de la Commission nationale d’évaluation des politiques de l’État outre-mer, en remplacement de Mme Anne-Marie Escoffier, nommée membre du Gouvernement ;
- et la commission des affaires sociales à présenter trois candidatures pour des titulaires appelés à siéger au sein du conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine, en application des articles L. 1418-4 et R. 1418-19 du code de la santé publique.
Les nominations au sein de ces organismes extraparlementaires auront lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.
Mes chers collègues, je vais maintenant suspendre la séance. Elle sera reprise à partir de 18 heures, pour l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2012.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures, est reprise à dix-neuf heures dix.)
M. le président. La séance est reprise.
6
Communication d’un avis sur un projet de nomination
M. le président. En application de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution et en application de l’article 3 de la loi n° 2002-3 du 3 janvier 2002 et de l’article 2 du décret n° 2004-1317 du 26 novembre 2004, la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière de transports, lors de sa réunion du 31 juillet 2012, a émis un vote favorable – six voix pour – en faveur de la nomination de M. Philippe Duron aux fonctions de président du conseil d’administration de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France.
Acte est donné de cette communication.
7
Dépôt d’un rapport du Gouvernement
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport recensant les emprunts structurés conclus entre les établissements de crédit et les collectivités territoriales et organismes publics qui comportent soit un risque de change, soit des effets de structure cumulatifs ou dont les taux évoluent en fonction d’indices à fort risque, établi en application de l’article 5 de la loi n° 2011-1416 du 2 novembre 2011 de finances rectificative pour 2011.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il a été transmis à la commission des finances et à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
Il est disponible au bureau de la distribution.
8
Loi de finances rectificative pour 2012
Adoption des conclusions modifiées d’une commission mixte paritaire
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2012 (texte de la commission n° 727, rapport n° 726).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. François Marc, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, la commission mixte paritaire est parvenue à un accord. Cela ne constitue pas une réelle surprise, car les deux chambres du Parlement ont examiné ce texte dans le même état d’esprit et l’ont enrichi sans, pour autant, sortir des limites de l’exercice. Elles ont toutes deux débattu une quarantaine d’heures – un peu plus à l’Assemblée nationale, un peu moins au Sénat.
Comme nous l’avons souvent rappelé lors de nos débats, il s’agissait d’adopter des mesures susceptibles de nous permettre d’atteindre l’objectif de solde public que nous nous sommes fixé pour 2012, tout en commençant à mettre en œuvre une nouvelle politique fiscale, inspirée par les orientations qui ont été tranchées à l’issue de la campagne électorale.
Ainsi, la CMP a validé, dans leur rédaction issue du Sénat, les quatre articles qui revenaient sur les symboles de l’ancienne politique fiscale, tout en procurant l’essentiel des nouvelles recettes. Je pense à la suppression de la TVA sociale, à la suppression de l’essentiel du régime fiscal dérogatoire des heures supplémentaires, à la taxe additionnelle à l’impôt sur la fortune et à la réduction des abattements applicables aux droits de mutation à titre gratuit.
La CMP a aussi validé, sous réserve de précisions complémentaires, les dispositifs anti-abus proposés pour l’impôt sur les sociétés.
Elle a également sécurisé le régime de la nouvelle taxe sur les dividendes, en l’adaptant aux spécificités des régimes juridiques des sociétés immobilières et des groupes bancaires mutualistes – achevant, en cela, un travail entamé au Sénat.
Toutefois, comme lors de toute CMP qui réussit, il a été nécessaire de faire des compromis. Par exemple, nous avons accepté de ne pas supprimer dès aujourd’hui les « ambassadeurs itinérants » et d’attendre le projet de loi de finances pour 2013 pour réexaminer cette question, à la lumière du rapport que le rapporteur spécial de la commission des finances prépare sur le sujet.
Mme Nathalie Goulet. Ce n’est donc que partie remise !
M. François Marc, rapporteur. Néanmoins, nous avons préservé la plupart des apports du Sénat.
Ainsi, l’extension de l’assiette de la taxe sur les transactions financières, adoptée sur l’initiative du groupe CRC, a été confirmée, même si la date d’entrée en vigueur de cette mesure a été repoussée pour permettre aux opérateurs de s’adapter.
De même, l’augmentation des taux des prélèvements sur les retraites chapeaux, laquelle résulte également d’une initiative du groupe CRC, est maintenue, malgré une retouche des conditions de son entrée en vigueur.
Ont aussi étés validées l’augmentation des taux de la taxe sur les logements vacants, adoptée sur l’initiative du groupe du RDSE, ainsi que deux mesures adoptées sur l’initiative du groupe socialiste : d’une part, la création d’une taxe sur les cessions de fréquences et, d’autre part, l’exonération de hausse du taux du forfait social pour les sociétés coopératives ouvrières de production, les SCOP.
L’abaissement du seuil de déclenchement de l’assujettissement aux prélèvements sociaux des parachutes dorés, adopté sur l’initiative de notre commission des affaires sociales, a également été validé.
Enfin, à la suite d’une initiative de François Fortassin et des membres de son groupe, une fraction du produit de la redevance sur les nouvelles concessions hydroélectriques sera désormais affectée aux communes.
M. Didier Boulaud. Très bien !
M. François Marc, rapporteur. La commission des finances, pour sa part, a apporté sa contribution au texte définitif dans des domaines auxquels elle accorde traditionnellement un suivi particulier. Ainsi, s’agissant de la situation de la zone euro – sujet sensible –, nous avons obtenu de disposer, avant le dépôt du prochain projet de loi de finances, d’un état global des conséquences budgétaires et financières pour la France des dispositifs de stabilité mis en place depuis 2010.
S’agissant de la régulation financière, le Gouvernement nous remettra au printemps prochain un rapport analysant les possibilités d’étendre l’assiette de la taxe de risque systémique à l’ensemble des acteurs favorisant la création et la diffusion de ces risques. Rappelons que la taxe de risque systémique elle-même est née des suites données au rapport Lepetit, qui lui-même avait été rédigé en réponse à une demande de la commission des finances du Sénat.
Dans le domaine des finances locales, les initiatives que j’ai suggérées à la commission des finances, complétées par celles du corapporteur spécial Pierre Jarlier, permettront de résoudre les difficultés concrètes que rencontrent certaines intercommunalités, mais aussi, et surtout, d’engager enfin le processus de révision des valeurs locatives professionnelles.
M. Jean-Claude Frécon. Très bien !
M. François Marc, rapporteur. C’est une réelle satisfaction pour nous d’avoir contribué au lancement de cette très importante réforme, et je suis particulièrement reconnaissant au Gouvernement d’avoir répondu sans attendre à cette préconisation forte du Sénat.
M. Didier Boulaud. C’est ça le changement !
M. François Marc, rapporteur. Mes chers collègues, ainsi s’achève notre session extraordinaire. Nous nous retrouverons à la rentrée pour un programme financier qui s’annonce fourni, puisque nous devrons nous préoccuper du traité budgétaire européen et de ses modalités de transposition en droit interne, d’un projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques et des deux textes financiers pour 2013, qui devront relever un défi inédit : permettre de réduire notre déficit public de 1,5 point de PIB en une seule année, ce qui représente un effort considérable, pour atteindre l’objectif d’un déficit de 3 % à la fin de l’année 2013.
M. André Reichardt. On craint le pire !
M. François Marc, rapporteur. Monsieur le ministre délégué, nous serons à vos côtés dans cette entreprise. Pour l’heure, mes chers collègues, je vous invite à approuver la première étape de cette trajectoire de redressement des finances publiques en votant les conclusions de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Richard Yung. Avec plaisir !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l’économie et des finances, chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le texte élaboré par la commission mixte paritaire donne pleinement satisfaction au Gouvernement. Nous n’aurons donc que des amendements rédactionnels à vous présenter, et nous ne pouvons qu’encourager la Haute Assemblée à adopter, à la suite de l’Assemblée nationale, le compromis élaboré par la CMP, afin de mettre un terme à la toute première étape du redressement de nos finances publiques entamé par le Gouvernement, conformément aux engagements du Président de la République.
Comme l’a rappelé M. le rapporteur, nous aurons d’autres rendez-vous après l’été : le projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques et le projet de loi de finances pour 2013 ; ce dernier engagera la réforme fiscale qui mettra enfin la justice au cœur de notre fiscalité.
En attendant, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux vous remercier, au nom du Gouvernement, du travail effectué et saluer la grande qualité des débats, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat. Votre travail aura permis d’enrichir le projet du Gouvernement sans en dégrader l’équilibre.
Parmi les modifications importantes que vous avez adoptées figurent celle de l’article 5, destinée à mieux prendre en compte la situation des groupes mutualistes, et celle de l’article 6, afin de rendre plus efficace la taxe sur les transactions financières tout en renvoyant à la discussion européenne le soin de lui donner la portée que nous lui souhaitons, c’est-à-dire celle d’une vraie taxe sur les transactions financières dont le rendement permettra d’améliorer, notamment, la prise en charge du développement, selon le vœu émis sur l’ensemble des travées de cette assemblée.
L’article 8 a été modifié pour prendre en compte la situation des raffineries en difficulté, pour répondre notamment à une sollicitation de M. Philippe Marini. Vous avez également amendé l’article 14, pour tenir compte de la situation des entreprises en difficulté, et l’article 29, afin de faciliter les démarches d’admission à l’aide médicale de l’État.
Enfin, plusieurs articles additionnels ont été introduits, notamment sur les parachutes dorés et les retraites chapeaux, ainsi que sur certaines plus-values. Je n’oublie pas non plus les articles additionnels relatifs aux finances locales, sujet auquel votre assemblée est particulièrement attentive, au premier rang desquels figure celui qui résulte de l’adoption d’un amendement déposé par votre rapporteur général relatif à la révision des valeurs locatives.
Permettez-moi ensuite de me réjouir, à titre personnel, de la prise en compte de la problématique des SCOP, à l’article 10, sur l’initiative de l’Assemblée nationale, et à l’article 27, grâce à un amendement de la sénatrice Frédérique Espagnac.
Au nom de Pierre Moscovici et de Jérôme Cahuzac, je tiens à remercier les présidents de séance et les fonctionnaires des assemblées de leur contribution à la clarté de nos débats et du temps qu’ils y ont consacré.
Je remercie également M. le président de la commission des finances et, au-delà, l’ensemble de l’opposition dont la contradiction a été nécessaire et utile, car elle a fait avancer la discussion et donné de la vigueur, contribuant ainsi à la vitalité du débat démocratique.
Je remercie enfin M. le rapporteur général et son équipe de leur engagement constant et de la qualité de leur travail, grâce auquel ce texte est si satisfaisant.
Au nom du Premier ministre, du ministre de l’économie et des finances et du ministre délégué chargé du budget, je dois enfin adresser un grand merci aux parlementaires de la majorité pour le soutien qu’ils ont apporté à ce projet de loi de finances rectificative. Ce texte permettra en effet de trouver les ressources nécessaires à l’équilibre de nos comptes et de montrer à tous que les engagements du Président de la République seront tenus, à commencer par la suppression, à l’article 1er, de la TVA dite « sociale », qui n’était en réalité qu’une augmentation du taux de la TVA. Ce n’est que le premier exemple d’une longue liste d’engagements qui seront tenus devant les Français !
Merci à tous de votre patience et de votre implication. Avant que ne commence véritablement ce débat, je me permets de vous souhaiter à tous d’excellentes vacances, ainsi qu’à vos familles ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, ce deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2012 répond d’abord à une urgence, celle du redressement de nos comptes publics. Face au constat d’une croissance de plus en plus faible et instable, et des sous-budgétisations chroniques de la période précédente,…
M. Roger Karoutchi. Oh !
M. François Fortassin. … la nouvelle majorité a donc proposé une série de mesures qui doivent permettre d’apporter 7,2 milliards d’euros de recettes supplémentaires en 2012, conformément aux besoins soulignés par la Cour des comptes dans son dernier rapport.
Ce rapport nous rappelle d’ailleurs combien il est nécessaire de poursuivre notre trajectoire de réduction du déficit public pour le ramener à 3 % dès l’année prochaine. La Cour souligne en effet que « le redressement de nos comptes conditionne la maîtrise future par la collectivité nationale de ses choix en matière économique et sociale ».
Son Premier président a insisté non seulement sur la nécessité, mais aussi sur l’urgence de l’action à entreprendre. En effet, si le coût du redressement est important aujourd’hui, il serait encore plus élevé s’il était différé aux années futures. Une sortie de la trajectoire de réduction du déficit aurait des conséquences très graves pour notre pays. Dans ces conditions, mes chers collègues, ne remettons pas à demain, ce que nous pouvons et devons faire dès aujourd’hui !
M. François Marc, rapporteur. Très bien !
M. François Fortassin. Ce projet de loi de finances rectificative est le premier pas dans le sens du retour à l’équilibre de nos comptes publics, prévu pour 2017. Un certain nombre d’amendements adoptés par l’Assemblée nationale et le Sénat et confirmés par la commission mixte paritaire contribueront à accroître les recettes nouvelles attendues des différentes mesures de ce projet de loi.
Trouver des recettes supplémentaires n’est pas une tâche facile, mais la véritable difficulté consiste à répartir équitablement l’effort entre les Français. C’est là où le précédent gouvernement a échoué, et c’est là où il nous faut impérativement réussir ! L’ensemble des mesures contenues dans ce projet de loi va dans ce sens, même si les véritables réformes, comme nous l’ont rappelé M. le ministre délégué et M. le rapporteur général, auront vocation à s’inscrire dans le projet de loi de finances pour 2013.
Ce collectif apporte d’abord des solutions d’urgence qui visent à colmater les « brèches » creusées dans la période précédente. (M. Roger Karoutchi s’exclame.) Il n’est donc qu’une amorce de ce que sera la politique du Gouvernement et de sa majorité, tandis que le projet de loi de finances pour 2013, nous l’espérons, réorientera véritablement notre système fiscal, pour le rendre plus juste, plus transparent et plus efficace, tout en garantissant des recettes fiscales suffisantes pour poursuivre le redressement de nos comptes publics et faire face aux aléas.
Aujourd’hui, mes chers collègues, du fait des errements du passé, il est urgent de restaurer la confiance des Français ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. Alain Fouché. Il ne faut pas exagérer !
M. Philippe Dallier. Tout en finesse !
M. Roger Karoutchi. Un homme de qualité comme vous…
M. François Fortassin. C’est sur cette confiance que repose la croissance. Sans elle, tous les collectifs budgétaires et les négociations européennes ne pourront rien ! Cette croissance, je le rappelle au passage, reste bien terne, puisque l’INSEE nous annonce qu’elle sera de 0,4 % ; le Gouvernement, avec prudence, a retenu une hypothèse de 0,3 %.
La nouvelle majorité, en choisissant l’axe de la justice fiscale, et non celui des cadeaux fiscaux aux privilégiés – je sais que cette appréciation fait réagir, mais elle correspond à une réalité ! –, est en bonne voie pour restaurer cette confiance.
Je me permets néanmoins d’appeler votre attention, monsieur le ministre délégué, sur le fait que beaucoup de nos concitoyens restent inquiets et que leurs inquiétudes sont entretenues par l’habileté de certains de nos collègues qui se donnent bien du mal pour leur faire croire que le Gouvernement va pénaliser non pas les plus aisés, mais une large partie d’entre eux.
M. Philippe Dallier. Et les neuf millions de salariés qui bénéficiaient des heures supplémentaires ?
M. François Fortassin. Nous savons que tel n’est pas le cas, car nous avons écouté avec attention les excellents arguments de votre collègue ministre délégué chargé du budget sur lesquels vous vous êtes appuyé, qui montrent bien que les classes moyennes et défavorisées seront préservées.
M. Roger Karoutchi. Non !
M. François Fortassin. Il faudra néanmoins rester vigilants,…
M. Philippe Dallier. Ô combien !
M. François Fortassin. … et c’est à nous désormais qu’il incombe de rétablir la vérité et de permettre aux Français de garder espoir dans l’avenir. D’ailleurs, messieurs qui vociférez, selon quelle justification les heures supplémentaires devraient-elles être défiscalisées alors que les heures normales ne le seraient pas ? Il n’y en a aucune ! (Eh oui ! sur les travées du groupe socialiste.)
M. André Reichardt. Si, les 35 heures !
M. François Fortassin. Pour ma part, je sais que nos concitoyens sont prêts à faire des efforts, efforts qu’ils savent nécessaires ; mais ce qu’ils demandent, c’est la justice, l’équité dans la répartition des efforts. Quoi de plus normal ! C’est tout ce qui a manqué ces dernières années. (Mme Odette Duriez applaudit.)
M. Jackie Pierre. Oh !
M. Roger Karoutchi. Allons donc !
M. François Fortassin. Rétablir la justice, comme s’y emploie le nouveau gouvernement, passe aussi par une plus grande transparence et une plus grande honnêteté. Cela a fait cruellement défaut par le passé. Je ne prendrai que l’exemple du contentieux européen sur les organismes de placement collectif en valeurs mobilières, que l’on nous a caché et qui, au passage, pourrait nous coûter 9 milliards d’euros !
M. Richard Yung. Ça, ce n’est pas bien !
M. François Fortassin. Voilà sans doute la transparence !
En des temps difficiles comme ceux que nous connaissons, c’est une perte de recettes qui est loin d’être négligeable, d’autant que celle-ci aurait pu être évitée si la précédente majorité avait pris ses responsabilités en temps et en heure.
M. Jacques Mézard. Eh oui !
M. François Fortassin. Le nouveau gouvernement devra assumer les responsabilités que ses prédécesseurs ont rejetées sur d’autres.
M. Jacques Mézard. Absolument !
M. François Fortassin. Je voudrais revenir désormais brièvement sur quelques points du débat qui a eu lieu la semaine passée, ainsi que sur des sujets qui sont très chers aux membres du groupe du RDSE.
M. Roger Karoutchi. Ah ça, ils sont chers !
M. François Fortassin. En particulier, je tiens à remercier le rapporteur général d’avoir reconnu le rôle de pionnier joué par notre groupe sur le sujet, notamment par notre collègue Yvon Collin. Certes, l’amendement que nous avons défendu à l’article 6, qui visait à élargir l’assiette de la taxe en rétablissant la version adoptée par la majorité sénatoriale à deux reprises, n’a pu être adopté. Cependant, nous soulignons que M. le rapporteur général a dit partager « la philosophie de cette proposition » et que M. le ministre délégué au budget a déclaré à l’issue de la discussion générale que M. Collin avait « raison d’appeler de ses vœux une taxe sur les transactions financières plus ambitieuse ».
Au RDSE, nous sommes très heureux de ces propos, qui ont longtemps fait défaut, au-delà des clivages politiques partisans, sur la nécessité d’un dispositif ambitieux. Nous sommes bien sûr très favorables au développement d’une possible coopération renforcée entre au moins neuf États européens. Mais nous pensons qu’il faudra rester vigilants et que la France devra se battre ardemment pour que la taxe soit un dispositif à la hauteur de l’enjeu et non une pâle copie du droit de timbre britannique, qui est le plus petit dénominateur commun entre les États membres, comme le rappelait notre excellente collègue devenue ministre Nicole Bricq.
Mes chers collègues, à l’issue de l’examen de ce collectif par la Haute Assemblée la semaine dernière, les amendements du RDSE auxquels nous tenions ont été adoptés, et nous nous en félicitons. Je remercie encore M. le rapporteur général de l’avoir souligné.
Le premier de nos amendements portait sur la taxe sur les logements vacants. Le second sur l’électricité. Ce sont des points extrêmement importants dans une optique d’équité et de justice.
Enfin, les membres de mon groupe ont souligné, comme l’avait fait précédemment la Cour des comptes, que la lutte contre les niches fiscales et sociales inefficientes reste une priorité très importante.
Une autre question chère aux radicaux de gauche est celle de la refonte de l’impôt sur le revenu, et j’espère qu’elle sera mise en chantier par le Gouvernement, monsieur le ministre délégué, car la création de tranches d’imposition supplémentaires ne sera pas à même, vous le savez, de résoudre les faiblesses de notre impôt sur le revenu, dont l’assiette est sérieusement « mitée ».
Nous sommes bien entendu pour un élargissement de l’assiette, qui comporterait la fusion de l’impôt sur revenu, de la contribution sociale généralisée et d’une grande partie des cotisations sociales salariales. La Cour des comptes estime d’ailleurs que l’augmentation des prélèvements obligatoires devra reposer prioritairement sur « l’élargissement de l’assiette […] plutôt que sur des hausses de taux, pour des raisons d’efficacité économique ».
Voilà les quelques éléments de réflexion que je tenais à apporter sur ce collectif, qui constitue un premier pas très encourageant concernant les orientations prises par le nouveau gouvernement. C’est pourquoi la majorité des membres du groupe du RDSE lui apporte son soutien aujourd’hui, comme elle l’a fait vendredi dernier.
Enfin, avant de quitter cette tribune, je tiens à souligner la qualité des arguments développés par le rapporteur général et par les ministres, notamment le ministre délégué au budget. J’ai particulièrement apprécié la clarté, la pertinence et la profondeur de leurs interventions,…
M. Philippe Dallier. Quel flatteur !
M. Roger Karoutchi. Encore !
M. François Fortassin. … comme j’ai d’ailleurs goûté l’excellent climat et la sérénité qui ont prévalu lors de nos débats en commission mixte paritaire hier, majorité et opposition confondues. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, premier acte politique majeur du nouveau gouvernement et de la nouvelle majorité choisie par les électeurs au printemps dernier, ce collectif budgétaire a été discuté dans un climat économique assez largement marqué par l’incertitude.
Si les taux d’intérêt de notre dette publique sont marqués par une inflexion à la baisse, rendant négatif le taux grevant les bons du Trésor à court terme – mais est-ce vraiment une bonne nouvelle à plus long terme ? –, des éléments ne manquent pas d’inquiéter.
La croissance économique est loin d’être au rendez-vous, et nous voyons clairement que les décisions budgétaires et économiques prises ces cinq dernières années, voire ces dix dernières années, n’ont pas évité à notre pays de connaître une forme de récession caractérisée par l’atonie de la croissance du PIB, mais surtout par la progression du chômage, dont les derniers chiffres montrent combien elle est lourde, la recrudescence des plans sociaux et la détérioration des prévisions économiques pour 2013.
L’atonie de la croissance va de pair avec la tension sur les comptes publics, mais cette tension sur les comptes publics prouve qu’une certaine forme de gaspillage est encore à l’œuvre, s’agissant de nos finances collectives. L’État supporte trop le poids de la crise.
Ainsi que le soulignait la présidente de notre groupe, Nicole Borvo Cohen-Seat, lors de l’explication de vote sur le texte issu des travaux du Sénat, cela fait une bonne trentaine d’années que notre pays est engagé dans une course au moins-disant fiscal et social, qui, avec le temps, est le moteur principal de l’endettement public, sans que cet endettement constitue un outil de progrès économique et social.
Rapporteure spéciale de la commission des finances pour la mission « Remboursements et dégrèvements », je ne peux que m’interroger sur les sommes considérables que nous mobilisons tous les ans pour alléger les impôts et les cotisations sociales des entreprises – sans trop de discernement, puisque le plus souvent au profit des plus importantes d’entre elles – ou des ménages les plus aisés.
Vous recherchez, monsieur le ministre délégué, des économies pour le budget de 2013. En procédant, ainsi que nous l’avions souhaité dans certains de nos amendements, à l’analyse critique de quelques-unes des niches fiscales qui polluent notre code général des impôts sans que leur pertinence absolue soit avérée, je pense que nous pouvons trouver des sources de diminution de la dépense fiscale.
Vous souhaitez mettre en place une banque publique d’investissement permettant d’aider les PME à innover et, qui sait, à exporter. Nous pourrions commencer par nous demander s’il est juste de dépenser plus de 730 millions d’euros pour le dispositif ISF-PME, qui ne met que 1,5 milliard d’euros, et encore pas tout à fait, au service des PME et des fondations d’utilité publique, alors que le coût fiscal d’un doublement du livret de développement durable serait moindre et l’effet levier des fonds recueillis autrement plus spectaculaire.
Se poser cette question peut évidemment se reproduire pour bien d’autres dispositifs, notamment pour ce qui est des « bilans organisés » autour d’un surendettement des entreprises, dans le cadre des opérations de LBO, comme des relations entre une société mère et ses filiales, telles qu’elles sont régies par notre code. On peut d’ailleurs parfois s’interroger pour savoir si ce sont les entreprises qui sont tenues de respecter la loi ou si c’est la loi qui se conforme aux attentes et aux desiderata des entreprises…
Nous avons, dans le cadre de la discussion de ce collectif, présenté certaines propositions. Nous y reviendrons, bien sûr, à l’occasion de la discussion du projet de loi de finances pour 2013. Cependant, il nous semble nécessaire d’engager dès maintenant, en amont, dans le cadre de la consultation des forces politiques constituant la nouvelle majorité parlementaire, un certain nombre de réflexions. Je crois que vous l’envisagez également.
Nous souhaitons, pour ce travail futur, partir de trois axes essentiels : la justice du prélèvement fiscal, la limitation des niches fiscales au seul avantage des plus modestes, le recyclage d’une part significative de la dépense fiscale, devenue inflationniste et inefficiente, en crédits budgétaires nouveaux, pour une politique publique efficace apportant des réponses aux besoins de nos concitoyens. C’est ainsi que nous préférons, par exemple, voir disparaître les heures supplémentaires imposées aux enseignants dans les collèges et les lycées, et apparaître des postes complémentaires d’enseignants renforçant les équipes pédagogiques en place, pour œuvrer dans le sens de la réussite de nos jeunes, ouvrant de vraies perspectives d’avenir.
Il y a sans doute quelques chapitres budgétaires qu’il convient aujourd’hui de maîtriser, voire de réduire, mais nous pensons clairement que le principal gisement de redressement budgétaire n’est pas dans la collection de sacrifices imposés aux personnels, comme le gel du point d’indice, ou aux usagers du service public, mais bien plutôt dans une démarche délibérée, volontaire et décidée de justice fiscale, sachant revenir sur les trop nombreuses dispositions dérogatoires qui existent dans notre législation.
De la même manière, le rapport de la commission d’enquête sur l’évasion fiscale a mis en évidence que les bases d’imposition avaient quelque peu tendance à être détournées, de temps à autre, de leur lieu normal de prise en compte et à échapper à toute contribution légitime. Notre législation prévoit d’aider nos entreprises à s’implanter à l’étranger, quand bien même cette implantation peut parfois confiner à la délocalisation.
S’attaquer aux niches fiscales et livrer une action résolue contre la fraude et l’évasion fiscales, contre l’optimisation fiscale au détriment de l’intérêt général, voilà ce qui doit animer l’action du Gouvernement dans les semaines et les mois à venir, et qui peut contribuer à donner à notre pays les moyens de réduire durablement les déficits publics.
Venons-en au texte du projet de loi de finances rectificative. Il comporte un certain nombre de mesures assez fortes : la suppression de la TVA dite « sociale », la mise en question du dispositif « heures supplémentaires », l’imposition plus forte des patrimoines. Pour l’essentiel, ces mesures visent clairement à assurer des recettes fiscales complémentaires pour un budget général que l’atonie économique de ce début d’année 2012 ne lui permet pas d’assurer a priori.
Nous avons évidemment partagé les intentions du Gouvernement, de manière générale, sur ces articles essentiels, mais il est aussi important pour l’avenir que l’objectif de ces nouvelles recettes ne soit pas la seule réduction du déficit budgétaire. La suppression de la TVA dite « sociale » est une bonne mesure, mais une réflexion plus générale sur les produits et services qui sont soumis au taux normal et ceux qui sont soumis au taux réduit sera nécessaire.
La mise en cause du dispositif « heures supplémentaires » doit être prolongée.
Tout d’abord, il faut mettre un terme à la défiscalisation et à la suppression des cotisations sociales des heures supplémentaires, ne serait-ce que parce que leur exécution prive les salariés de droits nouveaux en termes d’assurance maladie, d’assurance chômage ou de retraite.
Ensuite, il faut clairement donner des signes plus forts sur la question des salaires. Nous ne pourrons pas sortir la France de l’ornière économique dans laquelle elle végète, notamment depuis dix ans, tant que le salaire médian dans notre pays sera péniblement de 1 600 et quelques euros et que des millions de salariés, entre SMIC et temps partiel imposé, seront à peine au-dessus du seuil de pauvreté.
La France est malade des bas salaires. L’État dépense, en lieu et place des entreprises, des milliards d’euros à alléger les cotisations sociales, ouvrant en grand la trappe à bas salaires dans laquelle est depuis trop longtemps tombée l’égalité salariale entre les hommes et les femmes.
Le constat est clair : le débat doit s’engager sur le coût du travail qui ne doit pas être, comme ce fut trop souvent le cas dans cette dernière période, la seule variable d’ajustement. C’est un vrai choix de société qui nous est posé : à qui doit profiter la richesse produite ? La rémunération des capitaux, les frais financiers doivent-ils absorber l’amélioration de la productivité ? Nous ne le pensons pas.
Cet objectif politique essentiel, que nous avons porté lors de la discussion de ce collectif, doit être inscrit dans le programme de la nouvelle majorité.
Pas d’aide publique pour les entreprises qui nient l’égalité salariale !
Pas d’aide publique pour celles qui négligent la négociation collective sur la juste rémunération du travail !
Suspension, voire remboursement, des aides publiques dès lors qu’une entreprise met simultanément en œuvre, ou presque, un plan social en France et une délocalisation de tout ou partie de ses activités à l’étranger.
Tels sont les grands axes de la politique que nous souhaitons voir mise en œuvre.
En ce qui concerne l’impôt de solidarité sur la fortune, nous aurions souhaité aller plus loin que ce que prévoit le collectif budgétaire, comme en attestent les amendements que nous avons déposés. Ce n’est que partie remise. Il conviendra, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2013, de mettre en œuvre le nouvel ISF dont notre pays a besoin. Il faudra ainsi revenir sur la fixation de son tarif, sur sa progressivité et procéder à une approche critique des exonérations actuelles, ainsi que des modalités de calcul et de recouvrement.
Enfin, nous devrons nous interroger sur les conditions d’évolution du tarif de l’impôt, ne serait-ce que parce que les dix dernières années ont montré que la valorisation des patrimoines prenait d’autres voies que celle des revenus, et surtout beaucoup plus rapidement.
Pour notre part, nous sommes partisans d’une déconnexion de l’ISF de l’évolution de l’impôt sur le revenu – la même réflexion vaut d’ailleurs pour les autres droits d’enregistrement. Nous pensons que l’évolution du tarif doit être propre à chaque loi de finances.
Certains de nos amendements, et M. le rapporteur général l’a rappelé, ont été adoptés. Nous ne pouvons que nous féliciter que la commission mixte paritaire ait validé ces propositions. Quelques questions ne sont toutefois pas tranchées, notamment le gel du barème de l’impôt sur le revenu, avec ses multiples conséquences, et le plafonnement de la taxe d’habitation, ces deux questions étant liées.
Comme nous l’avons indiqué, il est indispensable que la nouvelle majorité parlementaire adresse un signe aux catégories sociales les plus modestes. Si le texte prend acte de la fin de la TVA sociale – la consommation populaire se portera mieux dans les mois à venir –, il faut cependant aller plus loin.
Les réponses à la question du pouvoir d’achat ne relèvent pas exclusivement de la responsabilité de l’État et des politiques publiques. La négociation collective, sur les salaires comme sur les classifications ou les qualifications, est bien sûr aussi l’affaire des partenaires sociaux.
Si l’État doit agir, peut-être peut-il réserver certaines aides publiques aux entreprises ou aux branches respectant les principes d’égalité salariale entre hommes et femmes ou conduisant à la valorisation du travail ?
Le gel du barème de l’impôt sur le revenu est d’abord un problème pour les revenus qui composent la plus grande partie de l’assiette, c’est-à-dire les salaires, les traitements, les pensions et les retraites. Il incite également fortement les détenteurs de revenus du capital ou du patrimoine à ne pas passer sous le régime du barème progressif. Dans ce contexte se pose donc la question de savoir si le redressement des comptes publics peut passer par une ponction sans cesse accrue des revenus du travail, ce que provoquera immanquablement le gel du barème, et des droits connexes. Selon nous, cette question doit être débattue lors de l’examen du projet de loi de finances initial.
L’affaire, si l’on en croit le rapporteur général, outre la question de principe – que nous devons résoudre en ne perdant pas de vue que la valeur locative cadastrale n’est bien évidemment pas fondée sur le revenu des contribuables –, est une question de 220 millions d’euros environ. C’est à la fois beaucoup et peu par rapport à d’autres éléments du projet de loi de finances rectificative. C’est beaucoup pour les contribuables concernés et peu au regard de bien des cadeaux fiscaux accordés sur d’autres lignes de notre droit fiscal.
Vous l’aurez compris, nous sommes très désireux de trouver une réponse à cette question.
C’est donc avec à la fois un regard critique et une volonté constructive que nous voterons le projet de loi de finances rectificative. Nous souhaitons que, très rapidement, des transformations d’une autre ampleur viennent répondre aux attentes de nos concitoyens qui se sont exprimés pour le changement lors des dernières élections. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis.
M. Jean Arthuis. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme de la discussion du premier projet de loi de finances rectificative du nouveau gouvernement et de la nouvelle majorité. Ce rendez-vous était attendu, et nous nous réjouissons que la commission mixte paritaire ait pu parvenir à un accord.
Je tiens à saluer la qualité de l’exercice auquel s’est livré M. le rapporteur général au nom de la commission des finances. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Je veux également me réjouir que les propositions de notre collègue Jarlier, propositions qu’il avait conçues avec François Marc, aient emporté l’adhésion du Sénat et de l’Assemblée nationale. Je pense que les collectivités territoriales y trouveront un motif de satisfaction.
Je regrette cependant que l’on n’ait pas pu dès maintenant mettre bon ordre aux nominations d’ambassadeurs thématiques, mais rendez-vous est pris à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances pour l’année 2013.
M. André Reichardt. Très bien !
M. Jean Arthuis. Monsieur le ministre délégué, la France et l’Europe sont en crise. Face à la gravité de cette situation, nous avons deux problèmes majeurs à résoudre : rééquilibrer nos finances publiques et retrouver de la compétitivité, sans laquelle il est vain de prétendre vouloir créer suffisamment d’emplois pour faire refluer le chômage et redonner du pouvoir d’achat à nos compatriotes.
J’évoquerai en premier lieu le rééquilibrage des finances publiques.
Vous répondez aux engagements de la France en ramenant le déficit public pour l’année 2012 à 4,5 % du produit intérieur brut, mais, pour cela, vous recourez au moyen sans doute le plus commode, à savoir l’alourdissement de la fiscalité. Et vous n’y allez pas de main morte ! En effet, dès 2012, nos concitoyens devront consentir un effort supplémentaire de 7 milliards d’euros : 4 milliards d’euros pour les ménages et 3 milliards d’euros pour les entreprises. Toutefois, chacun sait bien que, lorsqu’on fait peser sur les entreprises un impôt supplémentaire, vient un moment où le coût se répercute sur les prix des produits payés par les consommateurs. Au final, je gage que cela fera 7 milliards de contributions supplémentaires pour l’ensemble des Français.
M. François Rebsamen. C’est moins ! Il faut aussi prendre en compte la suppression de la TVA sociale !
M. Jean Arthuis. Or 7 milliards d’euros en 2012, cela signifie pratiquement 14 milliards d’euros en 2013. C’est une façon de commencer à résorber le déficit prévisionnel excessif de 33 milliards d’euros afin d’être au rendez-vous de l’objectif de 3 % à la fin de l’année 2013.
Reste que l’amélioration de la situation devra également passer par une réduction des dépenses publiques. Nous avions accompli un geste symbolique en ce sens, ici, au Sénat, tirant en cela les conséquences du rapport spécial de la Cour des comptes, reprises dans le rapport général, tous deux soulignant une anomalie majeure de gestion du Centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT.
Mme Nathalie Goulet. Eh oui !
M. Jean Arthuis. Nous avions abaissé le taux de la masse salariale à 0,9 %. Vous venez de le remonter à 1 % dans la présente loi de finances rectificative. À deux mois des états généraux de la démocratie territoriale, les collectivités territoriales apprécieront ! Chacun doit également savoir que le CNFPT n’a pas le monopole des actions de formation des agents de la fonction publique territoriale.
Ce n’est pas ainsi que l’on pourra commencer à réduire le niveau de la dépense publique. Vous vous montrez d’ailleurs bien timide et vous ne faites pas preuve d’une imagination considérable en la matière : vous vous contentez de détricoter ce que la législature précédente a conçu.
M. Yves Daudigny. Il fallait commencer par là !
M. Jean Arthuis. En second lieu, j’évoquerai le problème majeur de la compétitivité.
Une esquisse d’amélioration avait été mise en œuvre avec la TVA anti-délocalisation ou TVA sociale. Certes, le taux retenu était infime. À mon avis, il était même insuffisant pour permettre un véritable accroissement de la compétitivité, mais c’était une amorce.
Au début du mois de juillet, lors de la conférence sociale, le Gouvernement et les partenaires sociaux ont semble-t-il commencé à admettre qu’il fallait alléger les charges sociales pour améliorer la compétitivité. Mais comment allez-vous financer ces allégements ?
La hausse de la CSG était dans tous les esprits. De mon point de vue, ce n’est pas la bonne solution, car la CSG sera nécessaire pour financer la dépendance et pour réduire le déficit public. Or voilà que Jérôme Cahuzac vient de déclarer qu’il n’était pas question d’augmenter la CSG en 2013 ! Le petit espoir que l’on voyait poindre à l’horizon vient de disparaître. Dans ces conditions, comment va-t-on réduire le déficit de compétitivité ?
M. André Reichardt. Eh oui !
M. Jean Arthuis. Je persiste à penser qu’il vous faudra reconnaître la nécessité d’alléger les charges sociales. Si vous le faites, ne le faites donc pas à moitié. Un basculement de 40 milliards à 50 milliards d’euros est nécessaire. Dans ces conditions, la seule solution à votre portée sera une augmentation significative du taux de la TVA.
Cette occasion a été manquée. À titre personnel, je le regrette, comme mes amis de l’Union centriste et républicaine. Certes, nous aurons de nouveaux rendez-vous prochainement, mais, en attendant, que va-t-il se passer pour les salariés de Peugeot qui vont perdre leur emploi ?
La fermeture du site d’Aulnay-sous-Bois est un coup de tonnerre, et les plans sociaux se multiplient ! Nos concitoyens vivent dans l’angoisse de perdre leur travail. Qu’adviendra-t-il également des sous-traitants de l’automobile ? D’ailleurs, qu’est-ce que ce procès fait à Peugeot d’avoir eu l’audace de tenter de produire encore des automobiles en France ?
Le ministre du redressement productif vient d’exercer une pression sur le Syndicat des transports d’Île-de-France, qui envisage de délocaliser des centres d’appels téléphoniques. M. Sapin a annoncé qu’il faudrait peut-être revoir le code des marchés publics, qu’il connaît bien puisque c’est lui qui a conduit à le complexifier au lendemain de l’affaire Urba Conseil. Mais tout cela est du raccommodage ! Sans doute faut-il simplifier le code des marchés publics, mais exercer cette pression en ayant recours à ces moyens ne réglera pas le problème. Si vous souhaitez faciliter le maintien des centres d’appels téléphoniques en France, pensez à alléger les charges sociales qui pèsent sur les salaires !
Je l’ai dit lors de la discussion générale, je l’ai répété à l’occasion de l’examen des articles, et je vais le redire une fois de plus : à l’heure de la mondialisation, c’est en achetant des produits fabriqués en France et non des produits venus de l’étranger que les citoyens consommateurs participent au financement de leur protection sociale.
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe de l’Union centriste et républicaine ne pourra voter le premier projet de loi de finances rectificative du gouvernement de Jean-Marc Ayrault. (Applaudissements sur les travées de l’UCR et de l’UMP.)
(Mme Bariza Khiari remplace M. Jean-Patrick Courtois au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE Mme Bariza Khiari
vice-présidente
Mme la présidente. La parole est à Mme Fabienne Keller.
Mme Fabienne Keller. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué chargé du budget, monsieur le ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire – nous sommes très honorés de votre présence à tous les deux à l’occasion de cette séance conclusive –,…
Mme Fabienne Keller. … mes chers collègues, nous arrivons au terme de l’examen du deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2012, qui est le premier grand texte budgétaire du quinquennat de François Hollande.
Avant tout, permettez-moi de saluer le travail des équipes de la commission des finances, de la commission de la culture, de la commission des affaires sociales, du service de la séance, des services des comptes rendus, qui ont toute mon admiration, ainsi que de l’ensemble des personnels du Sénat, qui nous ont permis de travailler en cette toute fin du mois de juillet.
M. François Rebsamen. C’est vrai !
Mme Fabienne Keller. Le texte issu de la commission mixte paritaire est sans surprise sur le fond, puisque le Gouvernement dispose désormais de la majorité dans les deux chambres du Parlement.
Au cours des débats, le groupe UMP a eu l’occasion d’exprimer ses convictions et, en général, nous le regrettons, son opposition à de nombreuses dispositions. En effet, ce premier texte budgétaire illustre l’absence de cohérence des choix politiques du Gouvernement. Ainsi, de nombreuses interrogations demeurent en suspens, faute de réponse de votre part, messieurs les ministres.
Vous augmentez les effectifs de la fonction publique dans des secteurs jugés prioritaires. Cependant, vous refusez de nous dire les secteurs dans lesquels deux fonctionnaires sur trois ne seront pas remplacés. Sera-ce la culture, l’aide au développement, l’aide Nord-Sud ou le domaine social qui sera sacrifié ?
Vous refusez également de nous expliquer la façon dont vous allez résoudre l’équation impossible que vous avez posée : maintien du pouvoir d’achat des fonctionnaires, maintien de leurs effectifs globaux, maintien de la masse salariale. Comment allez-vous réaliser ce miracle ?
Outre l’absence de réponse, je note des incohérences sur plusieurs points. À titre personnel, je mentionnerai ainsi la taxe sur les transactions financières, qui avait été courageusement initiée par le précédent Président de la République.
M. Roger Karoutchi. Eh oui !
Mme Fabienne Keller. Vous doublez son taux, mais vous refusez de donner des orientations relatives à l’affectation de son produit, vous contentant de simples déclarations de principe. J’en veux pour preuve les propos du Président de la République lors de sa visite à Washington qui n’ont pas trouvé de concrétisation dans le présent texte.
Vous vous targuez d’avoir augmenté le SMIC de 20 euros par mois… en réalité, de 6,50 euros par mois, hors indexation. Dans le même temps, vous allez, sans hésitation, retirer 40 euros par mois, en moyenne, à neuf millions de salariés, avec la fin de l’exonération sociale et fiscale des heures supplémentaires ainsi que la remise en cause de la participation et de l’intéressement que représente la hausse du forfait social.
Contradiction ou limite de la vertu ? Permettez-moi, sur ce point, de citer mon collègue Philippe Dallier, ici présent.
Puisque le président normal et son gouvernement exemplaire ont décidé de diminuer leur salaire, M. Dallier vous a proposé, par cohérence, de diminuer, voire de supprimer, leur indemnité de résidence. Bizarrement, vous avez refusé, alors qu’il me semblait que le Président de la République et le Premier ministre étaient logés. À quoi peut bien leur servir cette indemnité ?
M. François Rebsamen. Quelle petitesse !
Mme Fabienne Keller. Je ne suis pas certaine que les Français trouvent cette situation « normale ».
Par ailleurs, allez-vous au bout de votre raisonnement lorsque vous reprochez aux heures supplémentaires d’être financées par la dette ? N’est-ce pas plutôt le cas des nouvelles mesures de votre politique ?
M. François Marc, rapporteur. Mais non, on va diminuer la dette !
Mme Fabienne Keller. Quoi d’autre que la dette de l’État pour financer les recrutements supplémentaires dans les ministères prioritaires ? Quoi d’autre que la dette sociale pour financer les mesures tendant au rétablissement de la retraite à soixante ans pour les carrières longues ?
M. Yves Daudigny. Ces dépenses sont couvertes par les recettes !
Mme Fabienne Keller. L’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires a aidé à maintenir de l’activité dans des entreprises, en leur permettant d’être réactives après la conquête de nouveaux marchés. Elle a aussi indéniablement créé du pouvoir d’achat pour les neuf millions de salariés concernés. Ce pouvoir d’achat supplémentaire, c’est de la consommation, et donc de la croissance, et ce malgré la crise.
Or c’est la croissance qui est un vecteur de l’emploi. Ce dernier permet non seulement d’améliorer la situation des personnes concernées, mais également de générer de la richesse. Cette croissance, pour replacer le sujet dans le cadre de la discussion sur le projet de loi de finances rectificative, donne de la matière à la base fiscale et occasionne des recettes, ce qui conduit à réduire les déficits et la dette.
M. François Rebsamen. On ne l’a pas vu !
M. Roger Karoutchi. Parce que vous regardez mal !
Mme Fabienne Keller. Vous vous êtes employés à détruire ce cercle vertueux, mis en place par le dispositif initial. En supprimant ces différents stimuli – fin de l’exonération des heures supplémentaires, rétablissement des charges patronales familiales, augmentation du forfait social sur l’intéressement –, vous nous faites entrer dans un cercle infernal : augmentation de la fiscalité sur le travail, baisse du pouvoir d’achat des salariés, baisse de confiance des entreprises, baisse des recettes fiscales.
Enfin, le présent projet de loi de finances rectificative est caractérisé par l’absence complète d’économies, comme Jean Arthuis l’a magnifiquement expliqué. Le projet de loi de finances pour 2012, lui, avait réparti l’effort de manière équilibrée entre des augmentations de recettes, certes, et une remarquable maîtrise des dépenses. La Cour des comptes a d’ailleurs souligné cet effort historique.
Ainsi, François Hollande est désormais le président…
Mme Michèle André. … des Français !
Mme Laurence Rossignol. Et il est aussi le vôtre !
Mme Fabienne Keller. … des impôts pour neuf ou douze millions de Français que le présent texte affecte.
Cela augure très mal des orientations qui seront prises dans le cadre du budget pour 2013. Son enjeu financier est quatre fois supérieur à celui qui nous ressemble aujourd’hui, puisque nous passerons de 7 milliards d’euros à environ 30 milliards d’euros d’économies à réaliser. Voilà le défi qui nous attend !
Pour toutes ces raisons, ainsi que toutes celles que nous avons exprimées avec engagement et conviction tout au long des débats, le groupe UMP votera contre le projet de loi de finances rectificative, tel qu’il ressort des travaux de la commission mixte paritaire. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Vincent Placé.
M. Jean-Vincent Placé. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, le présent collectif budgétaire nous a été dicté par l’urgence.
L’urgence de redresser nos finances publiques, d’abord. Rappelons une fois de plus que, sous la mandature précédente, la dette de la France a augmenté de 50 % – rien de moins ! – et que 7 milliards d’euros manquaient pour boucler l’année 2012, ainsi que l’a révélé la Cour des comptes.
L’urgence sociale, ensuite. C’est en effet par une politique délibérée que la majorité précédente a creusé les inégalités sociales. Un seul chiffre le prouve : entre 2007 et 2010, le ratio entre les plus riches et les plus pauvres a progressé de 15,4 %. C’est la plus forte aggravation des inégalités parmi les pays européens !
Le présent collectif budgétaire a permis d’adopter de nombreuses mesures, cela a été dit, comme l’abrogation de la TVA sociale ou de l’exonération de cotisations sociales des heures supplémentaires, dont on a eu l’occasion d’expliquer longuement, au cours de nos riches débats, qu’elles sont à la fois coûteuses et inefficaces.
Parmi les nouvelles recettes, certaines sont prélevées sur les ménages. Je pense au renforcement de la fiscalité sur les patrimoines de plus de 1,3 million d’euros, ou encore à la diminution des abattements sur les droits de succession. Ce sont bien les ménages les plus aisés qui sont mis à contribution. Quoi de plus normal ! Il y a une vraie mauvaise foi à prétendre que la mesure portant sur les droits de succession revient à s’attaquer aux classes moyennes, alors que 88 % des héritiers demeurent exonérés de l’impôt !
D’autres recettes sont prélevées sur les entreprises, comme les taxes exceptionnelles sur les établissements de crédits ou sur les stocks de produits pétroliers, cette dernière pouvant peut-être, d’ailleurs, gagner à devenir pérenne. Mentionnons également le train de dispositions visant à contrarier l’optimisation, voire, disons-le clairement, l’évasion fiscale, que pratiquent à grande échelle certaines entreprises, qui devrait rapporter 1 milliard d’euros en année pleine. Là encore, ce sont bien les entreprises les plus rentables ou les moins vertueuses – ce ne sont pas toujours les mêmes ! – qui sont sollicitées.
La commission mixte paritaire, réunie hier, a incorporé au texte la plupart des améliorations votées par la Haute Assemblée, comme la taxation de 5 % sur la revente des chaînes de télévision attribuées gratuitement par le CSA, l’alourdissement de la taxation des parachutes dorés et des retraites chapeaux, la majoration de la taxe sur les logements vacants, ou encore l’extension de l’assiette de la taxe sur les transactions financières, dont le projet de loi présenté au Parlement proposait déjà de doubler le taux.
Vous l’aurez compris, parce que ces mesures sont nécessaires pour nos finances publiques autant qu’elles sont justes pour nos concitoyens, les écologistes approuvent le projet de loi de finances rectificative.
M. Roger Karoutchi. Étonnant !
M. Jean-Vincent Placé. Avec l’adoption de ce texte par le Parlement, la France tournera définitivement la page de l’ère Sarkozy. (M. Roger Karoutchi s’esclaffe.)
Eh oui, monsieur Karoutchi, vous en avez fait partie !
M. Roger Karoutchi. Et je continuerai !
M. Jean-Vincent Placé. Vous étiez chargé des relations avec le Parlement avec le talent et la délicatesse dont on vous sait capable.
Pour autant, le plus dur est devant nous : redresser notre pays et nous prémunir contre la prolifération de ces ferments d’extrême droite que, dans une irresponsable politique de terre brûlée, l’ancienne majorité a entretenus tout au long de la campagne présidentielle.
M. Roger Karoutchi. Oh la la !
M. Jean-Vincent Placé. J’en veux pour preuve les propos tenus aujourd’hui même dans un quotidien paraissant le matin, bien connu d’un sénateur élu de l’Essonne, par un député membre de l’UMP, qui compare les conséquences des mesures contenues dans le collectif budgétaire à une « épuration » !
M. François Marc, rapporteur. Le grand mot !
M. Jean-Vincent Placé. Voilà où on en est ! Les mots ont une histoire, mes chers collègues, et il y en a qui vous glacent le sang, à l’heure où les prédicateurs populistes du Front national, que l’on sait rompus à toutes les outrances, se sont installés à l’Assemblée nationale.
M. Roger Karoutchi. Je n’ai pas lu de tels propos !
M. Jean-Vincent Placé. Monsieur Karoutchi, trouvez-vous normal et convenable qu’un parlementaire de l’UMP, votre formation politique, puisse comparer ce texte à une épuration ? Où sommes-nous pour que le débat démocratique en arrive là ?
Mes chers collègues de la majorité, tout cela nous permet de mesurer mieux encore l’étendue de nos responsabilités pour l’avenir de notre pays.
Nos débats furent très riches. Face à l’urgence, à laquelle nous répondons aujourd’hui, les écologistes veulent tout à la fois améliorer l’état de nos finances publiques et rétablir l’équité sociale. Ces débats rejoignent ceux portant sur la croissance et le productivisme. Nous pensons que ces efforts seront vains si nous ne répondons pas à l’autre urgence qui pèse sur nous : l’inscription de notre société dans le mouvement de la transition écologique qui, dans tous les cas, que nous l’anticipions ou non, s’imposera à nous.
L’objet du collectif n’était évidemment pas de tendre à la transformation immédiate. Nous n’attendions pas que la transition écologique fût menée au sein du présent texte, estival mais très sérieux. Disons-le aussi, très franchement, nous espérions y déceler quelques signaux, que nous n’avons pas forcément perçus.
Au cours des débats, nous avons pourtant noté, monsieur le ministre délégué, l’ouverture du Gouvernement sur un certain nombre de sujets, que vous avez évoqués avec beaucoup de compétence et de sérieux, je dirais même avec maestria et dextérité rhétoriques.
M. François Rebsamen. C’est vrai !
M. Jean-Vincent Placé. Cela force le respect mais vous donne aussi le devoir d’honorer, à l’avenir, la confiance que nous vous portons aujourd’hui.
Nous avons, par exemple, abordé le sujet du diesel. Il me semble que le bilan du secteur automobile français réalisé par le Gouvernement établit clairement l’aberration tant économique que sanitaire de la prévalence de la filière diesel. Le Gouvernement rejoint ainsi une position ancienne des écologistes.
Les débats auront lieu à l’automne et au début de l’hiver prochains. Nous sommes tournés vers la conférence environnementale de septembre et vers les différents textes qui suivront. C’est donc dans un esprit de confiance que nous abordons les semaines à venir. Nous sommes d’autant plus confiants que – je tiens à le dire, car il m’arrive parfois d’être un peu critique – je m’honore, comme j’ai pu déjà le dire lors des explications de vote, du travail très solide et sérieux mené cette dernière semaine, qui démontre aux Françaises et aux Français l’intérêt d’une deuxième chambre et du bicamérisme.
En témoigne la solidité des arguments avancés par M. le rapporteur général de la commission des finances, François Marc, par M. le rapporteur général de la commission des affaires sociales, Yves Daudigny, par M. le président de la commission des finances, Philippe Marini, ou par les différents membres du Gouvernement qui se sont succédé dans l’hémicycle, en particulier vous-même, monsieur Cahuzac.
Mme Nathalie Goulet. Et nous ?
M. Jean-Vincent Placé. En témoignent également les améliorations qui ont été apportées au texte.
Je me félicite de l’état d’esprit qui a prévalu tout au long de nos débats, et je me réjouis de la qualité du texte élaboré par la commission mixte paritaire. Voilà pourquoi le groupe écologiste apporte ce soir, avec sérénité et confiance, son soutien au projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle André.
Mme Michèle André. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, la nouvelle majorité parlementaire a pour mandat de mettre en application le programme sur lequel François Hollande a été élu.
Ce programme est simple : dans un contexte de crise économique et sociale, notre pays a besoin de justice et d’équilibre.
L’équilibre doit porter à la fois sur la contribution de tous à l’effort national et sur une stratégie intégrée d’encadrement des dépenses et de renforcement des recettes.
En outre, la loi de finances rectificative qui nous intéresse aujourd’hui s’imposait, afin d’assurer l’objectif d’un déficit à 4,5 % cette année. Le doublement de l’encours de dette depuis 2002 nous oblige en effet à agir, et à agir vite.
Nous l’avons dit et répété, notamment en réponse à la motion de procédure défendue par Jean Arthuis la semaine dernière : oui, l’action sur les dépenses est nécessaire ! Elle sera menée dès l’automne dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013. Nous le savons tous, à l’horizon de 2017, l’effort sera équilibré entre dépenses et recettes. Obligés d’œuvrer en cours d’année à cause des défaillances du précédent gouvernement, nous ne voulions pas affaiblir nos services publics par une action précipitée.
Dans ce cadre, le Sénat a cherché à contribuer à l’établissement d’une fiscalité plus juste, plus fine et plus adaptée à la conciliation de la croissance et du redressement des finances publiques. Je me félicite que ces choix aient été confirmés hier par la commission mixte paritaire.
Parmi les mesures portées par la majorité sénatoriale, deux procèdent du même esprit : la division par trois du seuil déclenchant l’assujettissement dès le premier euro des parachutes dorés aux cotisations sociales, qui a été portée par la commission des affaires sociales, et le relèvement des taux de contributions des employeurs sur les retraites dites « chapeaux », qui a été voté en 2012 et défendu cette année par nos collègues du groupe CRC. Ces deux mesures ont le même objectif : réduire les inégalités de revenus les plus flagrantes et faire contribuer équitablement les différents acteurs de l’économie à la solidarité nationale. C’est une question de justice et d’équilibre de nos comptes sociaux.
Je me réjouis également que les cessions de fréquences audiovisuelles soient désormais encadrées et imposées. Nous avions voté cette mesure l’hiver dernier, mais sa réécriture par l’Assemblée nationale avait abouti à une censure par le Conseil constitutionnel. Cette fois-ci devrait être la bonne, car l’amendement défendu par le groupe socialiste tient compte à la fois de la jurisprudence constitutionnelle et des préoccupations du Conseil supérieur de l’audiovisuel. Le risque de spéculation sur les fréquences concédées gratuitement sera désormais encadré par une surveillance ex ante et par une juste taxation.
Enfin, sur l’initiative du groupe du RDSE, la taxe sur les logements vacants a été augmentée, afin d’inciter les propriétaires à remettre ceux-ci sur le marché, dans un contexte de tension locative croissante.
Ce rôle d’aiguillon de la fiscalité se retrouve dans le relèvement du forfait social. En rapprochant les cotisations dues pour les mécanismes de participation de celles qui sont versées pour les revenus salariaux classiques, le législateur a souhaité se rapprocher de la neutralité fiscale tout en maintenant un certain attrait pour les rémunérations de remplacement. En particulier, l’adoption de l’amendement présenté par Frédérique Espagnac a permis de prendre en compte la spécificité des SCOP, pour lesquelles la participation est un enjeu de survie financière. Nous avons donc souhaité assurer la pérennité de ce mécanisme en maintenant pour elles un taux à 8 %.
Ce projet de loi de finances rectificative n’a pas vocation à tout régler, mais il prépare l’avenir.
Ainsi, notre excellent rapporteur général a initié la réflexion sur la révision des valeurs locatives – ce fut un travail de longue haleine, et nous avons pu l’observer au sein de la commission des finances –, en reportant d’un an l’exercice et en proposant un certain nombre d’ajustements techniques indispensables. Cette remise à plat sera un enjeu essentiel pour les collectivités locales. Il était donc naturel que le Sénat en prenne l’initiative.
Certains sujets restent à traiter. Nous avons évoqué à plusieurs reprises l’imposition des revenus et la remise à plat de la fiscalité environnementale, auxquelles nous avions déjà réfléchi en 2012. La loi de finances pour 2013 nous permettra de traiter ces sujets avec le recul nécessaire. Et il en sera de même pour les dépenses ! Le Gouvernement définit actuellement la première phase de sa stratégie quinquennale. Le Sénat contribuera, avec les moyens qui lui sont offerts par la loi organique relative aux lois de finances, à ajuster cette stratégie aux besoins des collectivités publiques et de nos concitoyens.
Depuis deux mois, la majorité gouvernementale a changé, mais celle du Sénat est la même que celle qui avait porté un autre projet en 2012. Et nous restons fidèles à ce projet ! Certains sujets ont été reportés de quelques mois, mais nous nous reconnaissons dans l’inspiration d’ensemble du texte. Nous nous félicitons donc de ce premier pas. Nous nous tenons prêts à poursuivre la marche, en soutien attentif du Gouvernement.
Cela n’étonnera personne, le groupe socialiste votera le projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, à l’instant de l’adoption définitive du premier texte financier de ce nouveau quinquennat, le rapporteur général de la commission des affaires sociales que je suis ne peut se priver de marquer sa satisfaction et sa confiance.
Satisfaction d’abord, parce que les premières mesures du projet de loi de finances rectificative représentent près de 1,5 milliard d’euros de recettes supplémentaires pour 2012 et 5,5 milliards d’euros par an à compter de 2013 pour la sécurité sociale.
Satisfaction ensuite, parce que ces recettes supplémentaires ne sont pas assurées par l’emprunt, contrairement à ce qui était devenu l’habitude il y a encore très peu.
Satisfaction enfin, parce que, et ce n’est pas le moins, ces ressources procèdent d’une juste répartition de la charge contributive en faisant porter l’effort sur des revenus trop peu sollicités, ceux du capital ou ceux qui bénéficient d’exonérations non justifiées du droit commun – c’est le cas des heures supplémentaires – ou particulièrement exorbitantes dans notre climat de crise.
Je le rappelle, sans de telles mesures correctrices, le déficit du régime général pour 2012 s’alourdirait de 2 milliards d’euros par rapport aux prévisions du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale et atteindrait de nouveau les 20 milliards d’euros, ce qui serait créateur de nouvelles dettes. Dans ces conditions, qui pourrait contester le bien-fondé de ces dispositions, qui nous extraient enfin de la spirale d’endettement dans laquelle s’était cloisonné le précédent gouvernement, et leur nécessité absolue pour tendre à nouveau à l’équilibre ?
Je me réjouis donc de la confirmation en commission mixte paritaire des six articles sur lesquels la commission des affaires sociales avait été saisie et émis un avis favorable, ainsi que de l’adoption des trois amendements que j’ai eu l’honneur de défendre.
Mon premier amendement, que j’avais présenté au nom de la commission des affaires sociales, tendait à clarifier la rédaction de l’article 2, relatif à la compensation de l’exonération des heures supplémentaires dues par l’État à la sécurité sociale. À cet égard, j’ai eu l’occasion d’exprimer la satisfaction de la commission, d’une part, que soit ainsi apurée la dette contractée par l’État pour les années 2010 et 2011 et, d’autre part, que le Gouvernement ait pris l’engagement de proposer un nouveau mécanisme de compensation pour 2013.
Mon deuxième amendement, également présenté au nom de la commission des affaires sociales, visait à abaisser le seuil d’assujettissement au premier euro des indemnités de rupture les plus élevées, autrement dit des parachutes dorés. Ce seuil passe ainsi de plus de 1 million d’euros à environ 360 000 euros. Il n’est pas choquant qu’à un tel niveau d’indemnité, leurs bénéficiaires ne soient plus partiellement dispensés de contribuer au financement de la protection sociale et s’acquittent de leur part de contribution sociale généralisée, de contribution au remboursement de la dette sociale et de cotisations de sécurité sociale.
Mon troisième amendement, présenté avec ma collègue vice-présidente de la commission des finances Michèle André et les membres du groupe socialiste, concernait l’aide médicale de l’État, l’AME. Confirmée en commission mixte paritaire, cette disposition abroge une autre restriction, récente et importante, d’accès à l’AME, du même esprit que celles qui sont visées par l’article 29, c’est-à-dire aussi dénuée de motif sanitaire qu’économique. Nous rétablissons la possibilité de déposer les demandes d’AME dans les centres communaux d’action sociale, les services sanitaires et sociaux du département de résidence ou les associations à but non lucratif agréées.
La lutte contre la fraude, qui avait motivé l’adoption d’une telle restriction d’accès, se révèle hors de propos : seules les caisses primaires d’assurance maladie instruisent les demandes. Quel réel motif a pu inspirer son auteur, Thierry Mariani, lorsqu’il a ainsi amendé le projet de loi relatif à l’immigration ? En tout cas, certainement pas une préoccupation de santé publique, ni le souci de l’efficacité économique ! Une telle mesure devait donc être supprimée.
Mme Michelle Meunier. C’est vrai !
M. Yves Daudigny. Le projet de loi de finances rectificative s’est attaché à la fois à reconstituer les ressources nécessaires à la réduction des déficits et à engager ce retour à l’équilibre de manière juste. À cet égard, je voudrais appeler l’attention et la réflexion sur la portée de propositions qui peuvent apparaître non seulement productives de recettes et équitables, mais qui sont aussi porteuses de beaucoup d’interrogations. Je pense, par exemple, à l’idée, formulée au cours de nos débats, de soumettre l’aide personnalisée à l’autonomie à récupération sur succession.
Au-delà des quatre arguments techniques, c’est-à-dire le phénomène d’auto-exclusion, l’absence de récupération sur la prestation de compensation du handicap et l’aide sociale aux personnes handicapées, le rendement très modéré et la question de seuil au regard de la composition des patrimoines, il y en a un cinquième, plus fondamental : la nature participative de la récupération individuelle sur succession contredit la logique de solidarité de notre système de protection sociale. Se poserait alors un véritable choix de société.
La discussion a eu le mérite de nous rappeler l’obligation de réformer la nature et le périmètre des sources de financement de notre protection sociale, aujourd’hui essoufflés, et la nécessité de conduire cette réforme dans notre société mondialisée sans oublier les principes fondateurs de notre sécurité sociale. C’est pourquoi je me félicite que les premières mesures du projet de loi de finances rectificative ne préjugent pas la réforme à venir et que nos ministres sociaux en aient confié la réflexion au Haut Conseil du financement de la protection sociale. Cette instance travaillera certainement, je l’espère, dans cet esprit, avec la préoccupation de préserver la structuration solidaire qu’incarne depuis 1945 notre système de protection sociale.
Je vous disais tout à l’heure satisfaction – je m’en suis expliqué – et confiance. C’est celle que l’on vous doit, monsieur le ministre délégué, parce que la raison, l’efficacité et la justice sont au rendez-vous de ce premier texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin.
Mme Marie-Christine Blandin. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, les écologistes se félicitent des arbitrages en faveur de l’école et de la culture.
Mme Fabienne Keller. Ah bon ? Lesquels ?
Mme Marie-Christine Blandin. La tentation aurait pu être grande, en période difficile, de faire régner l’austérité sur des dépenses de fonctionnement, tant fustigées par ceux qui préfèrent le béton à la conversation. Mais il est des conversations épanouissantes et émancipatrices, celles de la transmission des savoirs et de l’apprentissage du vivre ensemble.
Cela sera permis par les 1 000 professeurs des écoles, les 100 conseillers principaux, les 1 500 auxiliaires de vie scolaire, les 2 000 assistants d’éducation, les 500 agents chargés de la prévention et de la sécurité scolaire et les 50 postes supplémentaires dans l’enseignement technique agricole. Ces ressources humaines sont de l’investissement pour les générations futures ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)
Il est des conversations qui font lien et sens, comme celles qui naîtront du spectacle vivant, soutenu par l’éradication du gel budgétaire et le retour au taux de 5,5 % de la TVA. Ce sont de beaux arbitrages, obtenus par Mme la ministre Aurélie Filippetti et confortés par le Parlement.
Le livre aussi en bénéficiera. Les modes d’application de ce nouveau taux devront être concertés, afin que l’avantage ne se transforme pas en difficulté technique pour les libraires demandeurs de la mesure.
En matière de communication, l’amendement de David Assouline a vécu dans la commission mixte paritaire. La commission de la culture se félicite que la vente d’un droit d’émission attribué gratuitement soit désormais taxée.
En matière de sport, la commission de la culture s’était étonnée que le gouvernement précédent n’ait budgété aucune prime pour les médailles d’or aux jeux Olympiques. Nous avons eu raison d’avoir confiance en nos sportifs puisque la France a déjà remporté cinq médailles.
M. Yves Daudigny. Neuf !
Mme Marie-Christine Blandin. Je sais, monsieur le ministre, que vous veillerez sur ce point !
Enfin, Monsieur le ministre, dans plusieurs de vos réponses destinées à repousser des amendements, vous avez argué de supposées incompatibilités avec les textes européens ; je pense à la taxation du diesel des flottes de véhicules. Gageons que le domaine de la culture, dans les débats à venir, sera également affecté par ce type d’obstacles, plus fréquemment que nous ne le voudrions.
Les écologistes demandent donc au Gouvernement d’être présent, actif, imaginatif et militant auprès de la Commission européenne. La France doit faire valoir, au-delà de l’exception culturelle, la légitimité plus globale de tout ce qui concourt au développement social et culturel et participe à l’intérêt général, à être soutenu et tenu à l’écart des règles du marché et de la concurrence.
Ce n’est qu’à ce prix, monsieur le ministre, que l’économie sociale et solidaire, qui a également toute sa place dans la culture, pourra grandir et l’emporter sur les mécanismes destructeurs d’emplois de l’hyper-concurrence.
Nous soutenons, évidemment, ce projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, lorsqu’il examine après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, le Sénat se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte en ne retenant que les amendements ayant reçu l’accord du Gouvernement.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :
projet de loi de finances rectificative pour 2012
PREMIÈRE PARTIE
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE IER
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
i. – impôts et ressources autorisés
Article 1er bis
(Adoption du texte voté par le Sénat)
Le dixième alinéa du III de l’article 13 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 est ainsi modifié :
1° Après le mot : « habitation », la fin est ainsi rédigée : « ou d’une décision favorable prise dans les conditions prévues aux articles R. 331-3 et R. 331-6 du même code avant cette même date. » ;
2° Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :
« Dans ces deux derniers cas, la livraison à soi-même au taux de 5,5 % peut s’appliquer aux travaux facturés au taux de 7 % en application de l’article 279-0 bis du code général des impôts, sous réserve que ces travaux remplissent les conditions précitées. »
Article 2
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
A. – L’article L. 241-17 est abrogé ;
B. – L’article L. 241-18 est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi rédigé :
« I. – Dans les entreprises employant moins de vingt salariés, toute heure supplémentaire effectuée par les salariés mentionnés au II de l’article L. 241-13 ouvre droit à une déduction forfaitaire des cotisations patronales à hauteur d’un montant fixé par décret.
« La déduction s’applique :
« 1° Au titre des heures supplémentaires définies à l’article L. 3121-11 du code du travail ;
« 2° Pour les salariés relevant de conventions de forfait en heures sur l’année prévues à l’article L. 3121-42 du même code, au titre des heures effectuées au-delà de 1 607 heures ;
« 3° Au titre des heures effectuées en application du troisième alinéa de l’article L. 3123-7 du même code ;
« 4° Au titre des heures supplémentaires mentionnées à l’article L. 3122-4 du même code, à l’exception des heures effectuées entre 1 607 heures et la durée annuelle fixée par l’accord lorsqu’elle lui est inférieure. » ;
2° Au début du II, sont ajoutés les mots : « Dans les mêmes entreprises, » ;
3° Après le mot « salarié », la fin du même II est ainsi rédigée : « relevant d’une convention de forfait en jours sur l’année, au-delà du plafond de deux cent dix-huit jours mentionné à l’article L. 3121-44 du code du travail, dans les conditions prévues à l’article L. 3121-45 du même code. » ;
4° Le deuxième alinéa du IV est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les I et II sont applicables sous réserve du respect par l’employeur des dispositions légales et conventionnelles relatives à la durée du travail, et sous réserve que l’heure supplémentaire effectuée fasse l’objet d’une rémunération au moins égale à celle d’une heure non majorée.
« Ils ne sont pas applicables lorsque les salaires ou éléments de rémunération qui y sont mentionnés se substituent à d’autres éléments de rémunération au sens de l’article L. 242-1 du présent code, à moins qu’un délai de douze mois ne se soit écoulé entre le dernier versement de l’élément de rémunération en tout ou partie supprimé et le premier versement des salaires ou éléments de rémunération précités. » ;
5° Au dernier alinéa du même IV, les mots : « de la majoration mentionnée au I » sont remplacés par les mots : « des déductions mentionnées aux I et II » ;
6° Le V est ainsi rédigé :
« V. – Le bénéfice des déductions mentionnées aux I et II est subordonné, pour l’employeur, à la mise à la disposition des agents chargés du contrôle mentionnés à l’article L. 243-7 du présent code et à l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime d’un document en vue du contrôle de l’application du présent article. » ;
7° Il est ajouté un VI ainsi rédigé :
« VI. – Un décret fixe les modalités d’application du présent article ainsi que les modalités selon lesquelles les heures supplémentaires effectuées par les salariés affiliés au régime général dont la durée du travail ne relève pas du titre II du livre Ier de la troisième partie du code du travail ou du chapitre III du titre Ier du livre VII du code rural et de la pêche maritime ouvrent droit aux déductions mentionnées au présent article. » ;
C. – L’article L. 711-13 est ainsi rédigé :
« Art. L. 711-13. – Un décret fixe les conditions d’application des articles L. 241-13 et L. 241-18 aux employeurs relevant des régimes spéciaux de sécurité sociale des marins, des mines et des clercs et employés de notaires. »
I bis. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 81 quater est abrogé ;
2° Au troisième alinéa du 1 de l’article 170, la référence : « 81 quater, » est supprimée ;
3° Le septième alinéa du 3° du B du I de l’article 200 sexies est supprimé ;
4° Au c du 1° du IV de l’article 1417, la référence : « 81 quater, » est supprimée.
II. – À l’article L. 741-15 du code rural et de la pêche maritime, la référence : « L. 241-17, » est supprimée et, au I de l’article 53 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008, la référence : « aux articles L. 241-17 et » est remplacée par les mots : « à l’article ».
II bis. – Après le mot : « du », la fin du 2° du II du même article 53 est ainsi rédigée : « code général des impôts ; ».
II ter. – Au V de l’article 48 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, le mot : « majoration » est remplacé par le mot : « déduction ».
III. – A. – Au titre de l’année 2012, l’affectation prévue au 2° du II de l’article 53 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 précitée est limitée à une fraction égale à 42,11 % du produit de la contribution.
B. – Le même article 53 est abrogé à compter du 1er janvier 2013.
C. – Le j du 7° de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale est abrogé à compter du 1er janvier 2013.
IV. – Pour l’année 2012, après affectation préalable de la fraction mentionnée au A du III du présent article, une fraction égale à 340 988 999,21 € du produit de la contribution mentionnée à l’article 235 ter ZC du code général des impôts est affectée au financement des sommes restant dues par l’État aux caisses et régimes de sécurité sociale retracées à l’état semestriel du 31 décembre 2011 au titre des mesures dont la compensation est prévue à l’article 53 de la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 précitée.
V. – A .– Les I, II et II ter s’appliquent aux rémunérations perçues à raison des heures supplémentaires et complémentaires effectuées à compter du 1er septembre 2012.
B. – Lorsque la période de décompte du temps de travail ne correspond pas au mois calendaire et est en cours au 1er septembre 2012, les articles L. 241-17 et L. 241-18 du code de la sécurité sociale et L. 741-15 du code rural et de la pêche maritime dans leur rédaction en vigueur antérieurement à l’entrée en vigueur de la présente loi demeurent applicables à la rémunération des heures supplémentaires et complémentaires versée jusqu’à la fin de la période de décompte du temps de travail en cours, et au plus tard le 31 décembre 2012.
C. – Par dérogation au A du présent V, le I bis s’applique aux rémunérations perçues à raison des heures supplémentaires et complémentaires effectuées à compter du 1er août 2012.
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Article 4
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
A. – À la première phrase du dernier alinéa de l’article 776 A et à l’article 776 ter, le mot : « six » est remplacé par le mot : « quinze » ;
B. – Le dernier alinéa de l’article 777 est supprimé ;
C. – L’article 779 est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du I, le montant : « 159 325 € » est remplacé par le montant : « 100 000 € » ;
2° Le VI est abrogé ;
D. – Au deuxième alinéa de l’article 784, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « quinze » ;
E. – Le V de l’article 788 est abrogé ;
F. – Le dernier alinéa des articles 790 B, 790 D, 790 E et 790 F est supprimé ;
G. – L’article 790 G est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du I, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « quinze » ;
2° Le V est abrogé ;
H. – L’article 793 bis est ainsi modifié :
1° La seconde phrase du deuxième alinéa est supprimée ;
2° Au troisième alinéa, les mots : « devant notaire » sont supprimés et le mot : « six » est remplacé par le mot : « quinze ».
I bis. – L’article L. 181 B du livre des procédures fiscales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La valeur des biens ayant fait l’objet des donations antérieures dont il est tenu compte pour l’application du troisième alinéa de l’article 793 bis du code général des impôts peut, pour la seule appréciation de la limite mentionnée au deuxième alinéa du même article, être rectifiée. »
II. – Le III de l’article 7 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011 est abrogé.
III. – 1. Les A, 1° du C, D, 1° du G, 2° du H du I, le I bis et le II s'appliquent, selon le cas, aux successions ouvertes et aux donations consenties à compter de la date de publication de la présente loi.
2. Les B, 2° du C, E, F, 2° du G et 1° du H du I s'appliquent à compter du 1er janvier 2013.
Article 5
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
A. – Le premier alinéa du 2 de l’article 119 bis est ainsi modifié :
1° Après la première occurrence du mot : « France », la fin de la première phrase est remplacée par les mots et trois alinéas ainsi rédigés : « , autres que des organismes de placement collectif constitués sur le fondement d’un droit étranger situés dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État ou territoire ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales et qui satisfont aux deux conditions suivantes :
« 1° Lever des capitaux auprès d’un certain nombre d’investisseurs en vue de les investir, conformément à une politique d’investissement définie, dans l’intérêt de ces investisseurs ;
« 2° Présenter des caractéristiques similaires à celles d’organismes de placement collectif de droit français relevant des 1, 5 ou 6 du I de l’article L. 214-1 du code monétaire et financier.
« La retenue à la source s’applique également lorsque ces produits sont payés hors de France dans un État ou territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A du présent code. » ;
2° La seconde phrase est supprimée ;
A bis. – Le même 2 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les produits mentionnés au premier alinéa distribués par des sociétés mentionnées au 3° nonies de l’article 208, par des sociétés mentionnées au I et au premier alinéa du II de l’article 208 C et, pour la part des produits distribués à des bénéficiaires autres que des sociétés mentionnées au 3° nonies de l’article 208 qui les détiennent dans les conditions mentionnées au III bis de l’article 208 C, par des sociétés mentionnées au même III bis ayant leur siège en France, donnent lieu à l’application d’une retenue à la source au taux prévu au 2° de l’article 219 bis lorsqu’ils sont prélevés sur des résultats exonérés en application de l’article 208 C ou du 3° nonies de l’article 208 et qu’ils bénéficient à des organismes de placement collectif de droit français relevant des 1, 5 ou 6 du I de l’article L. 214-1 du code monétaire et financier ou à ceux constitués sur le fondement d’un droit étranger mentionnés au premier alinéa et satisfaisant aux conditions prévues aux 1° et 2° du présent 2.
« La retenue à la source mentionnée à l’alinéa précédent n’est pas libératoire de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt sur les sociétés et ne donne lieu ni à restitution ni à imputation. » ;
B. – À la fin du II des articles 137 bis et 137 ter, les mots : « dont le domicile fiscal ou le siège social est situé hors de France métropolitaine et des départements d’outre-mer » sont supprimés ;
C. – Le II de l’article 163 quinquies C est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa du 1 est complété par les mots : « ou, lorsqu’elles sont payées dans un État ou territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A, à la retenue à la source prévue au 2 de l’article 119 bis » ;
1° bis Au deuxième alinéa du même 1, les mots : « ce taux » sont remplacés par les mots : « le taux mentionné au 2 de l’article 200 A » ;
2° Le dernier alinéa du 2 est complété par les mots : « ni aux distributions mentionnées au premier alinéa du 1 du présent II payées dans un État ou territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A » ;
D. – Au premier alinéa de l’article 163 quinquies C bis, après les mots : « revenu et », sont insérés les mots : « , sauf si elles sont payées dans un État ou territoire non coopératif au sens de l’article 238-0 A, » ;
E. – Après l’article 235 ter ZC, est insérée une section XIX bis ainsi rédigée :
« Section XIX bis
« Contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés au titre des montants distribués
« Art. 235 ter ZCA. – I. – Les sociétés ou organismes français ou étrangers passibles de l’impôt sur les sociétés en France, à l’exclusion de ceux mentionnés au I de l’article L. 214-1 du code monétaire et financier ainsi que de ceux qui satisfont à la définition des micro, petites et moyennes entreprises donnée à l’annexe I au règlement (CE) n° 800/2008 de la Commission, du 6 août 2008, déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché commun en application des articles 87 et 88 du traité (Règlement général d’exemption par catégorie), sont assujettis à une contribution additionnelle à cet impôt au titre des montants qu’ils distribuent au sens des articles 109 à 117 du présent code.
« La contribution est égale à 3 % des montants distribués. Toutefois, elle n’est pas applicable :
« 1° Aux montants distribués entre sociétés du même groupe au sens de l’article 223 A, y compris pour les montants mis en paiement par une société du groupe au cours du premier exercice dont le résultat n’est pas pris en compte dans le résultat d’ensemble si la distribution a lieu avant l’événement qui entraîne sa sortie du groupe ;
« 1° bis Aux montants distribués aux entités mentionnées au 2° du 6 de l’article 206 par des entités affiliées à un même organe central au sens de l’article L. 511-31 du code monétaire et financier ou aux montants distribués, directement ou indirectement, aux caisses locales, départementales ou interdépartementales mentionnées au troisième alinéa de l’article 223 A du présent code et rattachées au même organe central au sens de l’article L. 511-31 précité, par des entités que ces caisses contrôlent conjointement, directement ou indirectement, à plus de 95 % ;
« 1°ter Aux montants distribués par les sociétés ayant opté pour le régime prévu à l’article 208 C à des sociétés ayant opté pour le même régime et détenant la société distributrice dans les conditions prévues au premier alinéa du II ou au III bis de cet article ;
« 2° Aux distributions payées en actions en application de l’article L. 232-18 du code de commerce ou en certificats coopératifs d’investissement ou d’associés en application de l’article 19 vicies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération, à la condition qu’il ne soit pas procédé à un rachat de titres en vue d’une réduction de capital en application de l’article L. 225-207 du même code ou du second alinéa de l’article 19 sexdecies de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 précitée dans le délai d’un an suivant la distribution. En cas de non respect de ce délai, la société distributrice est tenue de verser une somme égale au montant de la contribution dont elle a été exonérée majorée de l’intérêt de retard prévu à l’article 1727 du présent code. Ce versement est payé spontanément lors du premier versement d’acompte d’impôt sur les sociétés suivant le mois au cours duquel il est procédé au rachat de titres ;
« 3° (Supprimé).
« Pour les bénéfices réalisés en France par les sociétés étrangères et réputés distribués en application du 1 de l’article 115 quinquies du présent code, la contribution est assise sur les montants qui cessent d’être à la disposition de l’exploitation française.
« II. – Les crédits d’impôt de toute nature ainsi que la créance mentionnée à l’article 220 quinquies et l’imposition forfaitaire annuelle mentionnée à l’article 223 septies ne sont pas imputables sur la contribution.
« III. – La contribution est établie, contrôlée et recouvrée comme l’impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions.
« Elle est payée spontanément lors du premier versement d’acompte d’impôt sur les sociétés suivant le mois de la mise en paiement de la distribution.
« Pour l’application du deuxième alinéa du présent III, les sommes réputées distribuées au titre d’un exercice au sens des articles 109 à 117 sont considérées comme mises en paiement à la clôture de cet exercice. » ;
F. – Au premier alinéa de l’article 213, après la référence : « 235 ter ZAA », sont insérés les mots : « , la contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés sur les montants distribués mentionnée à l’article 235 ter ZCA ».
II.– Les A à D du I sont applicables aux produits, sommes, valeurs et distributions versés à compter de la date de publication de la présente loi.
Le E du même I s’applique aux montants distribués dont la mise en paiement est intervenue à compter de la date de publication de la présente loi et le F dudit I s’applique aux exercices clos à compter de cette même date.
Par exception au deuxième alinéa du III de l’article 235 ter ZCA du code général des impôts, pour les distributions mises en paiement avant le 1er septembre 2012, la contribution prévue audit article est payée spontanément lors du versement d’acompte d’impôt sur les sociétés du 15 décembre 2012.
Article 6
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. – L’article 235 ter ZD du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la fin de la première phrase du premier alinéa du I, les mots : « 1er janvier de l’année d’imposition » sont remplacés par les mots : « 1er décembre de l’année précédant celle d’imposition » ;
1° bis Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les titres représentant ceux mentionnés au premier alinéa émis par une société, quel que soit le lieu d’établissement de son siège social, sont soumis à la taxe. » ;
2° À la fin du V, le taux : « 0,1 % » est remplacé par le taux : « 0,2 % » ;
3° Après le premier alinéa du VI, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque plusieurs opérateurs mentionnés au premier alinéa interviennent pour l’exécution de l’ordre d’achat d’un titre, la taxe est liquidée et due par celui qui reçoit directement de l’acquéreur final l’ordre d’achat. »
II. – 1. Le 1° du I s’applique aux sociétés dont les titres font l’objet de transactions réalisées à compter du 1er janvier 2013.
2. Le 1° bis du même I s’applique aux acquisitions réalisées à compter du 1er décembre 2012.
3. Les 2° et 3° du même I s’appliquent aux acquisitions réalisées à compter du 1er août 2012.
Article 6 bis
(Adoption du texte voté par le Sénat)
La seconde phrase du IV de l’article 232 du code général des impôts est ainsi rédigée :
« Son taux est fixé à 12,5 % la première année d’imposition, 15 % la deuxième année et 20 % à compter de la troisième année. »
Article 7
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – Il est créé une taxe additionnelle à la taxe prévue à l’article 235 ter ZE du code général des impôts due au titre de 2012. Elle est due par les personnes redevables, en 2012, de cette dernière taxe.
Cette taxe additionnelle est égale au montant de la taxe de risque systémique qui était exigible au 30 avril 2012.
Elle est exigible le 30 août 2012.
Elle est acquittée auprès du comptable public compétent au plus tard le 30 septembre 2012.
Les VI à X du même article 235 ter ZE s’appliquent à cette taxe additionnelle.
II. – À la fin du III dudit article 235 ter ZE, le taux : « 0,25 % » est remplacé par le taux : « 0,50 % ».
III. – Le II s’applique à compter du 1er janvier 2013.
IV. – Le Gouvernement remet, avant le 31 mars 2013, un rapport au Parlement sur l’assiette de la taxe de risque systémique mentionnée à l’article 235 ter ZE du code général des impôts. Ce rapport étudie notamment les modalités d’un élargissement du champ d’application de la taxe à l’ensemble des institutions financières qui sont d’importance systémique ou qui, par leurs liens avec les établissements de crédit, contribuent à la diffusion des risques systémiques.
Article 8
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – Il est institué une contribution exceptionnelle due par toute personne, à l’exception de l’État, propriétaire au 4 juillet 2012 de volumes de produits pétroliers mentionnés au tableau B du 1 de l’article 265 du code des douanes, placés sous l’un des régimes prévus aux articles 158 A et 165 du même code et situés sur le territoire de la France métropolitaine.
II. – La contribution est assise, pour chacun des produits pétroliers mentionnés au I, sur la valeur de la moyenne des volumes dont les redevables étaient propriétaires au dernier jour de chacun des trois derniers mois de l’année 2011.
L’assiette est calculée à partir du montant fixé conformément au 1° du 2 de l’article 298 du code général des impôts pour le dernier quadrimestre de l’année 2011, hors droits, taxes et redevances.
Par dérogation, l’assiette des gaz de pétrole et autres hydrocarbures gazeux visés aux codes 27-11-14, 27-11-19 et 27-11-29 de la nomenclature prévue par le règlement (CEE) n° 2658/87 du Conseil, du 23 juillet 1987, relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun, et qui ne sont pas destinés à être utilisés comme carburants, est calculée à partir du prix de revient de ces produits au 31 décembre 2011.
II bis. – Les redevables ayant totalement interrompu leur activité pendant une durée continue supérieure à trois mois au cours du premier semestre 2012 sont exonérés de la contribution.
III. – Le taux de la contribution est fixé à 4 %.
IV. – La contribution est exigible le 1er octobre 2012.
V. – La contribution est liquidée, déclarée et acquittée sur une déclaration conforme au modèle établi par l’administration, déposée au plus tard le 15 décembre 2012. Le montant de la contribution n’est pas admis en charge déductible pour la détermination du résultat imposable de l’entreprise qui en est redevable.
VI. – La contribution est contrôlée et recouvrée selon les règles, garanties, privilèges et sanctions prévus à l’article 267 du code des douanes. Les infractions sont recherchées, constatées et réprimées, les poursuites sont effectuées et les instances sont instruites et jugées comme en matière de douanes par les tribunaux compétents en cette matière.
Article 8 bis
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – L’article 42-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sans préjudice de l’application du premier alinéa, tout éditeur de service détenteur d’une autorisation délivrée en vertu des articles 29, 29-1 et 30-1 doit obtenir un agrément du Conseil supérieur de l’audiovisuel en cas de transfert du contrôle direct ou indirect, au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, de la société titulaire de l’autorisation. Le conseil apprécie si les modifications envisagées sont, eu égard, le cas échéant, aux engagements pris par les opérateurs intéressés pour en atténuer ou en compenser les effets, de nature à compromettre l’impératif fondamental de pluralisme et l’intérêt du public. »
II. – Le chapitre III du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complété par une section XXIII ainsi rédigée :
« Section XXIII
« Taxe sur la cession de titres d’un éditeur de service de communication audiovisuelle
« Art. 235 ter ZG. – Tout apport, cession ou échange de titres ayant fait l’objet d’un agrément dans les conditions prévues au dernier alinéa de l’article 42-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est soumis à une taxe au taux de 5 %, assise sur la valeur des titres apportés, cédés ou échangés. Cette taxe est due par la personne ayant, au terme des apports, cessions ou échanges réalisés sur ses titres, transféré le contrôle de la société titulaire de l’autorisation d’usage de la ressource radioélectrique.
« La taxe s’applique à l’ensemble des apports, cessions ou échanges dont le cumul au cours de six mois a abouti au transfert de contrôle de la société titulaire de l’autorisation.
« Le montant dû au titre de cette taxe fait l’objet d’un abattement de 1 000 000 € par société titulaire d’une autorisation d’usage de la ressource radioélectrique.
« Cette taxe est due et acquittée auprès du comptable public au plus tard le 1er mai de l’année qui suit celle de l’apport, de la cession ou de l’échange. Le paiement est accompagné d’un état conforme au modèle fourni par l’administration faisant apparaître les renseignements nécessaires à l’identification de la personne assujettie et à la détermination du montant dû.
« Cette taxe est recouvrée selon les règles et sous les sanctions et garanties applicables aux droits d’enregistrement. »
III. – Les I et II sont applicables aux apports, cessions ou échanges réalisés à compter du 26 juillet 2012.
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Article 10
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. – À la première phrase du premier alinéa du 3 du II de l’article 237 bis A du code général des impôts, après le mot : « constituer », sont insérés les mots : « en franchise d’impôt ».
II. – Le même article 237 bis A est complété par un IV ainsi rédigé :
« IV. – Les provisions prévues aux 1 et 2 du II cessent d’être admises en déduction des résultats imposables constatés au titre des exercices clos à compter de la date de publication de la loi n° … du … de finances rectificative pour 2012. À compter de ces mêmes exercices, les dispositions prévues aux 5 et 6 du II s’appliquent aux seules provisions constituées en application du 3 du II.
« Les provisions mentionnées au premier alinéa figurant à l’ouverture du premier exercice clos à compter de la date de publication de la même loi sont rapportées aux résultats imposables dans les conditions prévues au 4 du II. »
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Article 13
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
A. – Le 6 de l’article 145 est complété par un k ainsi rédigé :
« k) Aux produits des parts de sociétés immobilières inscrites en stock à l’actif de sociétés qui exercent une activité de marchand de biens au sens du 1° du I de l’article 35. » ;
B. – Le 1 de l’article 210 A est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la société absorbante a acquis les titres de la société absorbée moins de deux ans avant la fusion, l’éventuelle moins-value à court terme réalisée à l’occasion de l’annulation de ces titres de participation n’est pas déductible à hauteur du montant des produits de ces titres qui a ouvert droit à l’application du régime prévu aux articles 145 et 216 depuis leur acquisition. » ;
C. – Le a ter du I de l’article 219 est ainsi modifié :
1° La première phrase du deuxième alinéa est complétée par les mots : « , à l’exception des moins-values afférentes aux titres de ces sociétés à hauteur du montant des produits de ces titres qui a ouvert droit à l’application du régime prévu aux articles 145 et 216 au cours de l’exercice au titre duquel ces moins-values ont été constatées et des cinq exercices précédents » ;
2° Le quatrième alinéa est complété par les mots : « , à l’exception des provisions pour dépréciation des titres de sociétés mentionnés à la première phrase du deuxième alinéa à hauteur du montant des produits de ces titres qui a ouvert droit à l’application du régime prévu aux articles 145 et 216 au cours de l’exercice au titre duquel les provisions ont été comptabilisées et des cinq exercices précédents » ;
D. – Le troisième alinéa de l’article 223 B est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque les titres mentionnés à la première phrase du deuxième alinéa du a ter du I de l’article 219 sont conservés pendant au moins deux ans, leur prix de revient est diminué, pour la détermination de la moins-value de cession, du montant des produits de participation y afférents dont le montant a été retranché du résultat d’ensemble en application du présent alinéa, au cours de l’exercice au titre duquel cette moins-value a été constatée et des cinq exercices précédents. » ;
E. – Au début de la première phrase du quatrième alinéa du même article 223 B, le mot : « Il » est remplacé par les mots : « Le résultat d’ensemble ».
II. – Le I s’applique aux exercices clos à compter du 4 juillet 2012.
Article 14
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 39 est complété par un 13 ainsi rédigé :
« 13. Sont exclues des charges déductibles pour l’établissement de l’impôt les aides de toute nature consenties à une autre entreprise, à l’exception des aides à caractère commercial.
« L’alinéa précédent ne s’applique pas aux aides consenties en application d’un accord homologué dans les conditions prévues au II de l’article L. 611-8 du code de commerce, ni aux aides consenties aux entreprises pour lesquelles une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte.
« Les aides mentionnées à l’alinéa précédent qui ne revêtent pas un caractère commercial sont déductibles à hauteur de la situation nette négative de l’entreprise qui en bénéficie et, pour le montant excédant cette situation nette négative, à proportion des participations détenues par d’autres personnes que l’entreprise qui consent les aides. »
2° Le 4 du I de l’article 1586 sexies est ainsi modifié :
a) Après le mot « exploitation », la fin du quatrième alinéa du a est supprimée ;
b) Le huitième alinéa du b est supprimé.
II. – Le I s’applique aux exercices clos à compter du 4 juillet 2012.
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ii. – ressources affectées
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Article 17
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – Il est ouvert, à compter du 1er septembre 2012 et jusqu’au 31 décembre 2020, un compte d’affectation spéciale intitulé : « Participation de la France au désendettement de la Grèce ».
Ce compte retrace :
1° En recettes : le produit de la contribution spéciale versée par la Banque de France au titre de la restitution des revenus qu’elle a perçus sur les titres grecs détenus en compte propre ;
2° En dépenses :
a) Le versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus mentionnés au 1° ;
b) Des rétrocessions de trop-perçu à la Banque de France.
II. – Le Gouvernement remet au Parlement, avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2013, un rapport évaluant l’ensemble des engagements financiers de l’État dans le cadre du programme de soutien au désendettement de la Grèce et des autres dispositifs pour la stabilité de la zone euro.
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TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES
Article 19
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. – Pour 2012, l’ajustement des ressources tel qu’il résulte des évaluations révisées figurant à l’état A annexé à la présente loi et la variation des charges du budget de l’État sont fixés aux montants suivants :
(en millions d’euros) |
|||
Ressources |
Charges |
Soldes |
|
Budget général |
|||
Recettes fiscales brutes / dépenses brutes |
– 394 |
– 217 |
|
À déduire : Remboursements et dégrèvements |
483 |
483 |
|
Recettes fiscales nettes / dépenses nettes |
– 877 |
– 700 |
|
Recettes non fiscales |
– 496 |
||
Recettes totales nettes / dépenses nettes |
– 1 373 |
– 700 |
|
À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne |
|||
Montants nets pour le budget général |
– 1 373 |
– 700 |
– 673 |
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants |
|||
Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours |
– 1 373 |
– 700 |
|
Budgets annexes |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
0 |
0 |
|
Publications officielles et information administrative |
|||
Totaux pour les budgets annexes |
0 |
0 |
|
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants : |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
|||
Publications officielles et information administrative |
|||
Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours |
0 |
0 |
|
Comptes spéciaux |
|||
Comptes d’affectation spéciale |
– 3 776 |
– 3 801 |
25 |
Comptes de concours financiers |
– 3 378 |
– 7 716 |
4 338 |
Comptes de commerce (solde) |
|||
Comptes d’opérations monétaires (solde) |
|||
Solde pour les comptes spéciaux |
4 363 |
||
Solde général |
3 690 |
II. – Pour 2012 :
1° Les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier sont évaluées comme suit :
(en milliards d’euros) |
|||
Besoin de financement |
|||
Amortissement de la dette à long terme |
55,5 |
||
Amortissement de la dette à moyen terme |
42,4 |
||
Amortissement de dettes reprises par l’État |
1,3 |
||
Déficit budgétaire |
81,1 |
||
Total |
180,3 |
||
Ressources de financement |
|||
Émissions à moyen et long terme (obligations assimilables du Trésor et bons du Trésor à taux fixe et intérêt annuel), nettes des rachats effectués par l’État et par la Caisse de la dette publique |
178,0 |
||
Annulation de titres de l’État par la Caisse de la dette publique |
- |
||
Variation des bons du Trésor à taux fixe et intérêts précomptés |
– 7,7 |
||
Variation des dépôts des correspondants |
– 0,3 |
||
Variation du compte de Trésor |
2,4 |
||
Autres ressources de trésorerie |
7,9 |
||
Total |
180,3 |
; |
2° Le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an demeure inchangé.
III. – Pour 2012, le plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État, exprimé en équivalents temps plein travaillé, est porté au nombre de 1 936 014.
SECONDE PARTIE
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
TITRE IER
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2012. – CRÉDITS DES MISSIONS
Article 20
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. – Il est ouvert aux ministres, pour 2012, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement supplémentaires s’élevant à 572 494 088 €, conformément à la répartition par mission et programmes donnée à l’état B annexé à la présente loi.
II. – Il est annulé pour 2012, au titre du budget général, des autorisations d’engagement et des crédits de paiement s’élevant à 789 986 940 €, conformément à la répartition par mission et programmes donnée à l’état B annexé à la présente loi.
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TITRE II
AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES POUR 2012. – PLAFONDS DES AUTORISATIONS D’EMPLOIS
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TITRE III
DISPOSITIONS PERMANENTES
I. – MESURES FISCALES NON RATTACHÉES
Article 24
(Adoption du texte voté par l’Assemblée nationale)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 278-0 bis est ainsi modifié :
a) Le A est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° Les livres, y compris leur location. Le présent 3° s’applique aux livres sur tout type de support physique, y compris ceux fournis par téléchargement. » ;
b) Il est ajouté un F ainsi rédigé :
« F. – 1° Les spectacles suivants : théâtres, théâtres de chansonniers, cirques, concerts, spectacles de variétés, à l’exception de ceux qui sont donnés dans les établissements où il est d’usage de consommer pendant les séances ;
« 2° Le prix du billet d’entrée donnant exclusivement accès à des concerts donnés dans des établissements où il est servi facultativement des consommations pendant le spectacle et dont l’exploitant est titulaire de la licence de la catégorie mentionnée au 1° de l’article D. 7122-1 du code du travail. » ;
2° Le 6° de l’article 278 bis est abrogé ;
2° bis L’article 279 est ainsi modifié :
a) Les deuxième à sixième alinéas du b bis sont supprimés ;
b) Le b bis a est abrogé ;
2° ter Après le mot : « réduit », la fin du c de l’article 281 quater est ainsi rédigée : « de 5,5 % dans les conditions prévues au 2° du F de l’article 278-0 bis. » ;
3° Le 2° du 1 du I de l’article 297 est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, la référence : « au 1° » est remplacée par les références : « aux 1° et 3° » ;
b) Au dernier alinéa, la référence : « et E » est remplacée par les références : « , E et F ».
II.– Le I s’applique aux opérations pour lesquelles la taxe sur la valeur ajoutée est exigible à compter du 1er janvier 2013.
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Article 25 bis
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la troisième phrase du 5° et à la dernière phrase du 5° bis du II de l’article L. 136-2, le nombre : « trente » est remplacé par le nombre : « dix » ;
2° À la deuxième phrase du douzième alinéa de l’article L. 242-1, le nombre : « trente » est remplacé par le nombre : « dix ».
II. – Le I s’applique aux indemnités versées à compter du 1er septembre 2012.
Article 26
(Adoption du texte voté par l’Assemblée nationale)
I. – Le II de l’article L. 137-13 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la fin de la première phrase, le taux : « 14 % » est remplacé par le taux : « 30 % » ;
2° La deuxième phrase est supprimée.
II. – Le premier alinéa de l’article L. 137-14 du même code est ainsi modifié :
1° À la première phrase, le taux : « 8 % » est remplacé par le taux : « 10 % » ;
2° La seconde phrase est supprimée.
III. – Le I est applicable aux options consenties et aux attributions effectuées à compter du 11 juillet 2012.
Article 26 bis
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. – Le I de l’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au 1°, le taux « 16 % » est remplacé par le taux « 32 % » ;
2° Au dernier alinéa du 2°, le taux : « 12 % » est remplacé par le taux : « 24 % » et le taux : « 24 % » est remplacé par le taux : « 48 % ».
II. – Le 1° du I est applicable aux rentes versées au titre des retraites liquidées à compter du 1er janvier 2013. Le 2° du I est applicable aux versements, comptabilisations ou mentions réalisés à compter des exercices ouverts après le 31 décembre 2012.
Article 27
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – L’article L. 137-16 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la fin du premier alinéa, le taux : « 8 % » est remplacé par le taux : « 20 % » ;
2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, ce taux est fixé à 8 % pour les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de prévoyance versées au bénéfice de leurs salariés, anciens salariés et de leurs ayants droit, ainsi que pour les sommes affectées à la réserve spéciale de participation conformément aux modalités définies à l’article L. 3323-3 du code du travail au sein des sociétés coopératives ouvrières de production soumises aux dispositions de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives ouvrières de production. » ;
3° Les trois derniers alinéas sont remplacés par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le produit de cette contribution est réparti conformément au tableau suivant :
« |
Pour les rémunérations ou gains soumis à la contribution au taux de 20 % |
Pour les rémunérations ou gains soumis à la contribution au taux de 8 % |
||
Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés |
5 points |
5 points |
||
Caisse nationale d’assurance vieillesse |
6 points |
|||
Fonds mentionné à l’article L. 135-1Dont section mentionnée à l’article L. 135-3-1 |
9 points0,5 point |
3 points0,5 point |
» |
I bis. – Au 3° de l’article L. 135-3 et au 1° du I de l’article L. 135-3-1 du même code, la référence : « au 2° de » est remplacée par le mot : « à ».
I ter. – Au 4° de l’article L. 241-2 du même code, la référence : « au 1° de » est remplacée par le mot : « à ».
I quater. – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 241-3 du même code, la référence : « et L. 137-12 » est remplacée par les références : « , L. 137-12 et L. 137-15 ».
II. – Les I à I quater s’appliquent aux rémunérations ou gains versés à compter du 1er août 2012.
Article 27 bis A
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – Après le cinquième alinéa du II quater de l’article 1411 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de fusion d’établissements publics de coopération intercommunale réalisée dans les conditions prévues par l’article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales, la correction des abattements intercommunaux prévue au présent II quater continue à s’appliquer sur le territoire des établissements publics de coopération intercommunale préexistants à la fusion. »
II. – Le I entre en vigueur à compter des impositions établies au titre de 2013.
Article 27 bis B
(Adoption du texte voté par le Sénat)
Le IV de l’article 1638-0 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La réduction du taux de taxe d’habitation prévue au premier alinéa du présent IV s’applique également aux communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale soumis au 1er janvier 2011 à la fiscalité propre additionnelle et qui applique, l’année précédant la fusion, les dispositions de l’article 1609 nonies C. »
Article 27 bis C
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. – L’article 154 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales est modifié comme suit :
1° Le B du II est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'ils relèvent du régime prévu au I de l'article 1609 nonies C du code général des impôts, les établissements publics de coopération intercommunale issus d'une fusion réalisée dans les conditions prévues par l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales perçoivent, au lieu et place des établissements publics de coopération intercommunale préexistants et, le cas échéant, des communes membres, la compensation prévue par l’article 21 de la loi n° 91-1322 du 30 décembre 1991 de finances pour 1992, dans les conditions prévues à l’article 77 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010. »
2° Au G du II, après les mots : « de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 » sont insérés les mots : « à l’exception de la compensation prévue au troisième alinéa du B du présent II. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Article 27 bis D
(Adoption du texte voté par le Sénat)
L’article 34 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 est ainsi modifié :
1° Au second alinéa du I, la date : « 1er janvier 2012 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2013 » ;
2° À la fin de la dernière phrase du XI, l’année : « 2015 » est remplacée par l’année : « 2016 » ;
3° Le XVI est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, l’année : « 2014 » est remplacée par l’année : « 2015 » ;
b) Au deuxième alinéa, les références : « et aux articles 1499 et 1501 du code général des impôts » sont supprimées ;
c) Au a, la date : « 1er janvier 2011 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2012 » et l’année : « 2012 » est remplacée par l’année : « 2013 » ;
d) Après le mot : « révisées », la fin du b est ainsi rédigée : « au 1er janvier 2013 de ces propriétés » ;
e) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « et pour la cotisation foncière des entreprises » sont remplacés par les mots : « , la cotisation foncière des entreprises, la taxe d’habitation et la taxe d’enlèvement des ordures ménagères » ;
f) Au dernier alinéa, les mots : « ou en application des articles 1499 ou 1501 du code général des impôts » sont supprimés et la date : « 1er janvier 2012 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2013 » ;
4° À la première phrase du XVII, les mots : « en 2012 » sont supprimés ;
5° Au B du XVIII, la date : « 1er janvier 2014 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2015 » et la date : « 1er janvier 2013 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2014 » ;
6° Il est ajouté un XXII ainsi rédigé :
« XXII. – A. – Des exonérations partielles d’impôts directs locaux sont accordées au titre des années 2015 à 2018 lorsque la différence entre la cotisation établie au titre de l’année 2015 et la cotisation qui aurait été établie au titre de cette même année sans application du XVI du présent article est supérieure à 200 € et à 10 % du second terme de cette différence.
« Pour chaque impôt, l’exonération est égale à 4/5ème de la différence définie au premier alinéa pour les impositions établies au titre de l’année 2015 puis réduite d’un cinquième de cette différence chaque année.
« L’exonération cesse d’être accordée à compter de l’année qui suit celle au cours de laquelle la propriété ou fraction de propriété fait l’objet d’un des changements mentionnés au I de l’article 1406 du code général des impôts.
« B. – Les impôts directs locaux établis au titre des années 2015 à 2018 sont majorés lorsque la différence entre la cotisation établie au titre de l’année 2015 sans application du XVI du présent article et la cotisation qui aurait été établie au titre de cette même année est supérieure à 200 € et à 10 % du second terme de cette différence.
« Pour chaque impôt, la majoration est égale à 4/5ème de la différence définie au premier alinéa pour les impositions établies au titre de l’année 2015 puis réduite d’un cinquième de cette différence chaque année.
« Cette majoration est supprimée à compter de l’année qui suit celle au cours de laquelle la propriété ou fraction de propriété fait l’objet d’un des changements mentionnés au I de l’article 1406 du code général des impôts.
« C. – Pour l’application des A et B :
« 1. Les impôts directs locaux s’entendent de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe d’habitation et de leurs taxes annexes.
« 2. La différence définie au premier alinéa des A et B s’apprécie pour chaque impôt en tenant compte de ses taxes annexes et des prélèvements prévus à l’article 1641 du code général des impôts.
« Elle s’apprécie par propriété ou fraction de propriété bâtie.
« 3. Selon le cas, le coût de l’exonération ou la majoration est réparti entre les collectivités territoriales et, le cas échéant, les établissements publics de coopération intercommunale, les établissements publics fonciers, les chambres de commerce et d’industrie et les chambres de métiers et de l’artisanat au prorata de leur part dans la somme des variations positives de chaque fraction de cotisation leur revenant. »
Article 27 bis E
(Adoption du texte voté par le Sénat)
L’article L. 6331-48 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le taux : « 0,15 % » est remplacé par le taux : « 0,25 % » ;
2° Au deuxième alinéa, le taux : « 0,24 % » est remplacé par le taux : « 0,34 % » ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités de mise en œuvre des dispositions prévues aux deux premiers alinéas du présent article. »
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ii. – autres mesures fiscales
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Article 29
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 251-1, les mots : « , sous réserve, s’il est majeur, de s’être acquitté, à son propre titre et au titre des personnes majeures à sa charge telles que définies ci-dessus, du droit annuel mentionné à l’article 968 E du code général des impôts » sont supprimés ;
2° Le dernier alinéa de l’article L. 251-2 est supprimé ;
2° bis Le premier alinéa de l’article L. 252-1 est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :
« La demande d’aide médicale de l’État peut être déposée auprès :
« 1° D’un organisme d’assurance maladie ;
« 2° D’un centre communal ou intercommunal d’action sociale du lieu de résidence de l’intéressé ;
« 3° Des services sanitaires et sociaux du département de résidence ;
« 4° Des associations ou organismes à but non lucratif agréés à cet effet par décision du représentant de l’État dans le département.
« L’organisme auprès duquel la demande a été déposée établit un dossier conforme au modèle fixé par arrêté du ministre chargé de l’action sociale et le transmet, dans un délai de huit jours, à la caisse d’assurance maladie qui en assure l’instruction par délégation de l’État. » ;
3° L’article L. 253-3-1 est abrogé.
II. – L’article 968 E du code général des impôts est abrogé.
III. – A. – Les 1° et 2° du I et le II s’appliquent à compter du 4 juillet 2012.
B. – Le 3° du I s’applique à compter du 31 décembre 2012. Le solde du fonds mentionné à l’article L. 253-3-1 du code de l’action sociale et des familles constaté à cette date est reversé à la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés au titre du financement de l’aide médicale de l’État mentionnée au premier alinéa de l’article L. 251-1 du même code.
Article 30
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – L’article 133 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 et l’article 141 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 sont abrogés.
II. – Le Gouvernement remet au Parlement un rapport, avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2014, présentant les conséquences de la suppression de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement d’enseignement français à l’étranger et sur les ajustements à apporter aux bourses sur critères sociaux.
Article 30 bis
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – Au c du 1 du VI de l’article 199 terdecies-0 A du code général des impôts, après les mots : « huit mois à compter de la date de constitution du fonds, », sont insérés les mots : « sauf pour les fonds mentionnés au VI ter A du présent article pour lesquels la période de souscription est allongée de 8 à 12 mois, ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
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Article 33
(Adoption du texte voté par le Sénat)
I. – L’article L. 521-23 du code de l’énergie est ainsi rédigé :
« Art. L. 521-23. – Pour toute nouvelle concession hydroélectrique, y compris lors d’un renouvellement, il est institué, à la charge du concessionnaire, au profit de l’État, une redevance proportionnelle aux recettes résultant des ventes d’électricité issues de l’exploitation des ouvrages hydroélectriques concédés desquelles est déduit, le cas échéant, le montant des achats d’électricité pour les pompages. Pour le calcul du montant de la redevance, les recettes et les achats d’électricité sont calculés comme la valorisation de la production ou de la consommation d’électricité aux prix constatés sur le marché. Le taux de chaque redevance ne peut excéder un taux plafond, déterminé par l’autorité concédante dans le cadre de la procédure de mise en concurrence.
« Un tiers de la redevance est affecté aux départements sur le territoire desquels coulent les cours d’eau utilisés, l’éventuelle répartition entre plusieurs départements étant proportionnelle à la puissance moyenne hydraulique devenue indisponible dans les limites de chaque département du fait de l’usine.
« Un sixième de la redevance est affecté aux communes sur le territoire desquelles coulent les cours d’eau utilisés ou à leurs groupements sous réserve de l’accord explicite de chacune d’entre elles, la répartition entre les communes étant proportionnelle à la puissance moyenne hydraulique devenue indisponible dans les limites de chaque commune du fait de l’exploitation de l’ouvrage hydroélectrique. »
II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
État A
(Article 19 du projet de loi)
VOIES ET MOYENS POUR 2012 RÉVISÉS
i. – budget général
(en milliers d’euros) |
||
Numéro de ligne |
Intitulé de la recette |
Révision des évaluations pour 2012 |
1. Recettes fiscales |
||
13. Impôt sur les sociétés |
– 2 219 910 |
|
1301 |
Impôt sur les sociétés |
– 2 375 910 |
1302 |
Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés |
156 000 |
14. Autres impôts directs et taxes assimilées |
3 430 000 |
|
1402 |
Retenue à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers et le prélèvement sur les bons anonymes (ligne nouvelle) |
15 000 |
1406 |
Impôt de solidarité sur la fortune |
2 325 000 |
1499 |
Recettes diverses |
1 090 000 |
16. Taxe sur la valeur ajoutée |
– 1 914 397 |
|
1601 |
Taxe sur la valeur ajoutée |
– 1 914 397 |
17. Enregistrement, timbre,autres contributions et taxes indirectes |
310 000 |
|
1705 |
Mutations à titre gratuit entre vifs (donations) |
130 000 |
1706 |
Mutations à titre gratuit par décès |
10 000 |
1797 |
Taxe sur les transactions financières |
170 000 |
2. Recettes non fiscales |
||
21. Dividendes et recettes assimilées |
– 257 000 |
|
2110 |
Produits des participations de l’État dans des entreprises financières |
– 154 000 |
2111 |
Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés |
– 103 000 |
24. Remboursements et intérêts des prêts, avanceset autres immobilisations financières |
– 300 000 |
|
2401 |
Intérêts des prêts à des banques et à des États étrangers |
– 300 000 |
26. Divers |
61 000 |
|
2603 |
Prélèvements sur les fonds d’épargne gérés par la Caisse des dépôts et consignations |
– 79 000 |
2604 |
Divers produits de la rémunération de la garantie de l’État |
140 000 |
ii. – récapitulation des recettes du budget général
(en milliers d’euros) |
||
Numéro de ligne |
Intitulé de la recette |
Révision des évaluations pour 2012 |
1. Recettes fiscales |
– 394 307 |
|
13 |
Impôt sur les sociétés |
– 2 219 910 |
14 |
Autres impôts directs et taxes assimilées |
3 430 000 |
16 |
Taxe sur la valeur ajoutée |
– 1 914 397 |
17 |
Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes |
310 000 |
2. Recettes non fiscales |
– 496 000 |
|
21 |
Dividendes et recettes assimilées |
– 257 000 |
24 |
Remboursements et intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières |
– 300 000 |
26 |
Divers |
61 000 |
Total des recettes, nettes des prélèvements |
– 890 307 |
iii. – comptes d’affectation spéciale
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iv. – comptes de concours financiers
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État B
(Article 20 du projet de loi)
RÉPARTITION DES CRÉDITS POUR 2012 OUVERTS ET ANNULÉS, PAR MISSION ET PROGRAMMES, AU TITRE DU BUDGET GÉNÉRAL
budget général
(en euros) |
||||
Mission / Programme |
Autorisations d’engagement supplémentaires ouvertes |
Crédits de paiement supplémentaires ouverts |
Autorisations d’engagement annulées |
Crédits de paiement annulés |
Action extérieure de l’État (nouveau) |
20 000 |
20 000 |
||
Diplomatie culturelle et d’influence |
20 000 |
20 000 |
||
Dont titre 2 |
||||
Action de la France en Europe et dans le monde |
||||
Dont titre 2 |
||||
Administration générale et territoriale de l’État |
3 200 |
3 200 |
||
Vie politique, cultuelle et associative |
3 200 |
3 200 |
||
Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales |
9 200 |
9 200 |
800 000 |
800 000 |
Économie et développement durable de l’agriculture, de la pêche et des territoires |
9 200 |
9 200 |
||
Forêt |
400 000 |
400 000 |
||
Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation |
200 000 |
200 000 |
||
Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture |
200 000 |
200 000 |
||
Aide publique au développement |
3 260 000 |
3 260 000 |
||
Solidarité à l’égard des pays en développement |
2 860 000 |
2 860 000 |
||
Développement solidaire et migrations |
400 000 |
400 000 |
||
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation |
50 000 |
50 000 |
1 199 534 |
1 199 534 |
Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant |
1 199 534 |
1 199 534 |
||
Liens entre la Nation et son Armée (ligne nouvelle) |
50 000 |
50 000 |
||
Dont titre 2 |
||||
Conseil et contrôle de l’État (nouveau) |
10 000 |
10 000 |
||
Conseil d’État et autres juridictions administrative |
10 000 |
10 000 |
||
Dont titre 2 |
||||
Culture |
234 000 |
234 000 |
||
Patrimoines |
68 000 |
68 000 |
||
Création |
15 000 |
15 000 |
||
Transmission des savoirs et démocratisation de la culture |
151 000 |
151 000 |
||
Défense |
29 200 000 |
29 200 000 |
||
Environnement et prospective de la politique de défense |
2 868 577 |
2 868 577 |
||
Soutien de la politique de la défense |
4 510 100 |
4 510 100 |
||
Équipement des forces |
21 821 323 |
21 821 323 |
||
Direction de l’action du Gouvernement |
1 957 926 |
1 957 926 |
||
Coordination du travail gouvernemental |
1 157 926 |
1 157 926 |
||
Dont titre 2 |
47 926 |
47 926 |
||
Moyens mutualisés des administrations déconcentrées |
800 000 |
800 000 |
||
Écologie, développement et aménagement durables |
10 059 000 |
10 059 000 |
||
Infrastructures et services de transports |
8 357 000 |
8 357 000 |
||
Sécurité et circulation routières |
100 000 |
100 000 |
||
Sécurité et affaires maritimes |
200 000 |
200 000 |
||
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
502 000 |
502 000 |
||
Prévention des risques |
600 000 |
600 000 |
||
Énergie, climat et après-mines |
300 000 |
300 000 |
||
Économie |
900 000 |
900 000 |
||
Développement des entreprises et de l’emploi |
900 000 |
900 000 |
||
Engagements financiers de l’État |
700 000 000 |
700 000 000 |
||
Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs) |
700 000 000 |
700 000 000 |
||
Enseignement scolaire |
89 459 488 |
89 459 488 |
||
Enseignement scolaire public du premier degré |
17 376 052 |
17 376 052 |
||
Dont titre 2 |
15 096 052 |
15 096 052 |
||
Enseignement scolaire public du second degré |
13 676 000 |
13 676 000 |
||
Dont titre 2 |
13 676 000 |
13 676 000 |
||
Vie de l’élève |
54 178 612 |
54 178 612 |
||
Dont titre 2 |
15 215 672 |
15 215 672 |
||
Enseignement privé du premier et du second degrés |
3 468 824 |
3 468 824 |
||
Dont titre 2 |
3 468 824 |
3 468 824 |
||
Enseignement technique agricole |
760 000 |
760 000 |
||
Dont titre 2 |
760 000 |
760 000 |
||
Gestion des finances publiques et des ressources humaines |
4 800 000 |
4 800 000 |
||
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local |
3 600 000 |
3 600 000 |
||
Stratégie des finances publiques et modernisation de l’État |
800 000 |
800 000 |
||
Facilitation et sécurisation des échanges |
400 000 |
400 000 |
||
Justice |
5 300 000 |
5 300 000 |
||
Accès au droit et à la justice |
5 300 000 |
5 300 000 |
||
Outre-mer |
30 000 |
30 000 |
1 100 000 |
1 100 000 |
Emploi outre-mer |
1 100 000 |
1 100 000 |
||
Conditions de vie outre-mer |
30 000 |
30 000 |
||
Politique des territoires |
890 000 |
890 000 |
||
Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire |
790 000 |
790 000 |
||
Interventions territoriales de l’État |
100 000 |
100 000 |
||
Pouvoirs publics |
47 926 |
47 926 |
||
Présidence de la République |
47 926 |
47 926 |
||
Recherche et enseignement supérieur |
24 915 000 |
24 915 000 |
||
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
9 800 000 |
9 800 000 |
||
Recherche spatiale |
7 600 000 |
7 600 000 |
||
Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de l’aménagement durables |
2 500 000 |
2 500 000 |
||
Recherche et enseignement supérieur en matière économique et industrielle |
2 000 000 |
2 000 000 |
||
Recherche duale (civile et militaire) |
2 800 000 |
2 800 000 |
||
Enseignement supérieur et recherche agricoles |
200 000 |
200 000 |
||
Formations supérieures et recherche universitaire (ligne nouvelle) |
15 000 |
15 000 |
||
Relations avec les collectivités territoriales |
1 476 566 |
1 476 566 |
||
Concours spécifiques et administration |
1 476 556 |
1 476 556 |
||
Remboursements et dégrèvements |
482 603 000 |
482 603 000 |
||
Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs) |
482 603 000 |
482 603 000 |
||
Santé |
1 600 000 |
1 600 000 |
||
Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins |
1 600 000 |
1 600 000 |
||
Solidarité, insertion et égalité des chances |
41 200 |
41 200 |
60 488 |
60 488 |
Actions en faveur des familles vulnérables |
22 000 |
22 000 |
||
Handicap et dépendance |
19 200 |
19 200 |
||
Égalité entre les hommes et les femmes |
60 488 |
60 488 |
||
Sport, jeunesse et vie associative |
44 000 |
44 000 |
965 000 |
965 000 |
Sport |
44 000 |
44 000 |
||
Jeunesse et vie associative |
965 000 |
965 000 |
||
Travail et emploi |
200 000 |
200 000 |
||
Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail |
200 000 |
200 000 |
||
Ville et logement |
0 |
0 |
1 245 500 |
1 245 500 |
Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables |
0 |
0 |
45 500 |
45 500 |
Développement et amélioration de l’offre de logement |
100 000 |
100 000 |
||
Politique de la ville et Grand Paris |
1 100 000 |
1 100 000 |
||
Totaux |
572 494 088 |
572 494 088 |
789 986 940 |
789 986 940 |
État C
(Article 21 du projet de loi)
RÉPARTITION DES CRÉDITS POUR 2012 OUVERTS ET ANNULÉS, PAR MISSION ET PROGRAMMES, AU TITRE DES BUDGETS ANNEXES
budgets annexes
˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙
État D
(Article 22 du projet de loi)
RÉPARTITION DES CRÉDITS POUR 2012 OUVERTS ET ANNULÉS, PAR MISSION ET PROGRAMMES, AU TITRE DES COMPTES SPÉCIAUX
i. – comptes d'affectation spéciale
˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙
ii. – comptes de concours financiers
˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙
Mme la présidente. Nous allons maintenant examiner les amendements déposés par le Gouvernement.
article 1er bis à 20
Mme la présidente. Sur les articles 1er bis à 20, je ne suis saisie d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?...
Le vote est réservé.
article 24
Mme la présidente. L'amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Remplacer les mots :
, spectacles de variétés,
par les mots :
; spectacles de variétés
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. Cet amendement vise à préciser la rédaction de l’article pour maintenir le champ du taux normal inchangé.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission a reçu les amendements du Gouvernement il y a seulement quelques instants. Elle n’a donc pas eu le temps de se réunir pour les examiner. Je me prononcerai néanmoins en son nom, persuadé que mes collègues seront d’accord avec moi.
M. Jean-Vincent Placé. La commission des finances vous fait confiance !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission des finances ne peut, selon moi, qu’être favorable à l’amendement n° 1, qui vise à rétablir une rédaction proche de celle qui avait été adoptée par le Sénat.
Mme la présidente. Sur les articles 25 bis à 27 bis B, je ne suis saisie d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?...
Le vote est réservé.
Article 27 bis C
Mme la présidente. L'amendement n° 2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Si vous me le permettez, madame la présidente, je présenterai également les amendements nos 3 et 4.
Mme la présidente. Je vous en prie, monsieur le ministre.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Ces trois amendements sont des amendements rédactionnels de suppression de gage.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission émet un avis favorable sur ces trois amendements.
Mme la présidente. Sur les articles 27 bis D à 30, je ne suis saisie d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?...
Le vote est réservé.
article 30 bis
Mme la présidente. L'amendement n° 3, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
Cet amendement a déjà été défendu et la commission a donné son avis.
Le vote est réservé.
article 33
Mme la présidente. L'amendement n° 4, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer cet alinéa.
Cet amendement a déjà été défendu et la commission a donné son avis.
Le vote est réservé.
Vote sur l'ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi de finances rectificative dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifiée par les amendements déposés par le Gouvernement, je donne la parole à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Je ne reprendrai pas les propos de Jean-Vincent Placé.
M. Jean-Vincent Placé. Pourquoi pas ? (Sourires.)
M. Roger Karoutchi. En fait, le projet de loi de finances rectificative pour 2012 que nous avons examiné au cours de cette session extraordinaire ne fait que détricoter un certain nombre de dispositions prises par les gouvernements précédents. Où est le grand texte qui était annoncé ? Quelle est la grande mesure votée ?
Mme Françoise Cartron. La justice !
M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas tout de dire que l’on va démolir, que l’on va supprimer les allégements sociaux attachés aux heures supplémentaires, que l’on va aménager les droits de succession, et même que l’on va modifier le forfait social sur l’intéressement et la participation. Vous mettez en avant ce qui vous arrange – l’ISF, les parachutes dorés –, en occultant le reste.
M. Michel Berson. Ce n’est pas négligeable !
M. Roger Karoutchi. On prend aux riches, dites-vous ; très bien ! Mais, en parallèle, ce que vous ne dites pas, c’est que, en réalité, la défiscalisation des heures supplémentaires, l’aménagement des droits de mutation, la suppression du forfait social vont être payés par les millions de salariés que compte notre pays !
Le texte que nous votons aujourd’hui ne prévoit que très peu, voire pas du tout, de réduction de dépenses. En revanche, les prélèvements fiscaux sont en hausse de 7 milliards d’euros. Quoi que vous en disiez, ces augmentations pèseront en grande partie sur les classes moyennes et sur les salariés. Tout le monde va payer sans que l’État fasse d’efforts.
Vous nous promettez des choses formidables pour l’automne, lors du vote du budget. Or, durant toute la campagne présidentielle, nous avons entendu le candidat Hollande, devenu depuis Président de la République, annoncer que, s’il était élu, des changements interviendraient rapidement, car vous aviez beaucoup travaillé, vous étiez prêts et que de nombreuses mesures étaient déjà dans les tuyaux, mesures qui seraient dès l’été mises en application. En réalité, vous ne proposez que du matraquage fiscal et du détricotage idéologique. Toutes les mesures que vous présentez ne changeront qu’en négatif la vie des Français.
Monsieur le ministre, vous ferez certainement à l’automne un certain nombre d’annonces. Mais, comme l’a souligné M. Arthuis, si la crise financière s’aggrave, si la situation de la zone euro devient encore plus difficile, vous nous direz que, par la force des choses, vous ne pouvez pas faire tout ce que vous aviez envisagé ! Tout cela parce que vous n’avez pas voulu dès cet été mettre en place un programme d’économies dans les dépenses publiques.
Il faut marcher sur ses deux jambes : on ne peut pas augmenter les prélèvements fiscaux sans prévoir, en parallèle, des réductions de dépenses.
Mme Fabienne Keller. Absolument !
M. Roger Karoutchi. Demain, mes chers collègues, nous le savons tous, les collectivités locales verront leurs dotations gelées, voire réduites.
En réalité, ce soir, le Parlement vote des augmentations d’impôts sans savoir quelle politique fiscale sera mise en œuvre en 2013.
Naturellement, nous nous prononcerons contre ce projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UCR.)
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons hâte d’être à l’automne ! (Exclamations ironiques sur diverses travées.)
M. Roger Karoutchi. Hâte, peut-être pas…
M. Vincent Delahaye. Mais si ! J’aurais bien aimé que nous ayons des débats de fond à l’occasion de cette session extraordinaire, et je pensais que le Gouvernement s’y était préparé.
Or seule la TVA sociale a fait l’objet d’une discussion approfondie. Je m’en réjouis, car ce débat, j’en suis convaincu étant optimiste de nature, a pu faire évoluer les esprits, à droite comme à gauche.
J’aurais aimé que le Gouvernement propose des réductions de dépenses. Ma collègue Nathalie Goulet avait déposé un amendement allant dans ce sens, sur les ambassadeurs thématiques, amendement dont j’étais cosignataire et qui a été adopté par le Sénat. Je regrette que la commission mixte paritaire soit revenue sur cette disposition.
Mme Marie-France Beaufils. Pourquoi ne l’avez-vous pas mise en place auparavant ?
M. Vincent Delahaye. Quoi qu’il en soit, j’espère que nous aborderons le chapitre de la réduction de la dépense publique à la rentrée.
J’espère également que nous aborderons la question de la compétitivité de l’économie française et de la création d’emplois. Je ne vois rien dans ce projet de loi de finances rectificative qui aille dans ce sens. En revanche, je vois bien que ce texte ne contient pas exclusivement des mesures destinées à taxer les riches ; y figurent des mesures qui taxeront les Français en général, notamment les classes moyennes.
M. Roger Karoutchi. Bien sûr !
M. Vincent Delahaye. J’y vois aussi beaucoup de dispositions un peu particulières, pour ne pas dire démagogiques, comme la diminution de la rémunération du Président de la République et du Premier ministre, mesure assez symbolique qui représentera 96 000 euros d’économies…
J’y vois enfin une surcharge inutile et injustifiée pour les collectivités locales, avec l’augmentation de la cotisation au CNFPT, le Centre national de la fonction publique territoriale. Je regrette que l’on n’ait pas maintenu, comme l’avait souhaité la Cour des comptes, le taux de 0,9 %.
M. Jean Arthuis. Eh oui !
M. Vincent Delahaye. J’attends donc avec impatience la loi de finances initiale à venir pour pouvoir me prononcer sur le fond de la politique du Gouvernement, puisqu’on nous a annoncé des débats fouillés et de nombreuses mesures importantes. Pour l’heure, malgré toutes les discussions que nous avons eues, je ne saurais me faire un jugement définitif.
Telles sont les raisons pour lesquelles je voterai contre ce texte, comme une très grande majorité du groupe UCR. (Applaudissements sur de nombreuses travées de l'UCR et sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. À l’heure où nous mettons un point final à l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2012, je souhaite remercier tous nos collaborateurs, qui ont activement contribué à l’examen approfondi de ce projet de loi de finances rectificative.
Je tiens à rendre hommage en particulier à tous les collaborateurs de la commission des finances, qui ont été très actifs, et dont le travail sérieux et de qualité a été pleinement reconnu par la commission mixte paritaire : celle-ci a en effet suivi le Sénat en adoptant la quasi-totalité des trente-cinq amendements que nous avions élaborés.
Je remercie également l’ensemble des personnels du Sénat qui ont contribué au bon déroulement de ce débat, durant lequel nous avons, à plusieurs reprises, travaillé de jour comme de nuit.
Enfin, je salue le Gouvernement, en particulier M. le ministre délégué au budget, cher Jérôme Cahuzac, pour le travail très lourd qui a été accompli. Vous avez hérité, monsieur le ministre, d’une situation extrêmement difficile, qui l’était déjà il y a cinq ans. Je tiens d’ailleurs à ce propos à souligner – pour répondre à quelques observations récurrentes – que le gouvernement d’alors avait commencé par diminuer les recettes. Ce fut la première décision prise, et l’on voit où l’on en est aujourd’hui !
Cette situation actuelle très difficile s’explique par des raisons conjoncturelles, mais aussi par un solde négatif structurel, qui résulte de décisions prises dans le passé, décisions que nous déplorons et qui nous imposent aujourd’hui d’autres décisions d’autant plus difficiles.
Monsieur le ministre, je vous adresse, au nom de l’ensemble de mes collègues, mes encouragements car vous allez, au cours des semaines qui viennent, être confronté à la tâche ardue des arbitrages dans la préparation de la maquette budgétaire pour 2013. L’exercice s’avérera compliqué, tant est difficile la situation qu’il faut aujourd’hui gérer en France. Je suis persuadé que, avec l’appui du Sénat, durant les semaines des mois d’octobre, novembre et décembre qui vont nous rassembler, vous saurez relever le défi.
C’est un défi très lourd, mais nous saurons être au rendez-vous et contribuer une nouvelle fois, par nos débats, à enrichir cette maquette budgétaire. Par sa contribution et son éclairage, le Sénat fera en sorte que le budget pour 2013 soit le plus efficace mais aussi le plus juste possible.
C’est une préoccupation que nous sommes très nombreux à partager et c’est dans cette direction qu’il nous faut aller, dans le sens tracé par le Président de la République : nous avons déjà pris la bonne voie avec ce projet de loi de finances rectificative pour 2012, que je vous incite, mes chers collègues, à voter. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l’ensemble du projet de loi de finances rectificative pour 2012 dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements du Gouvernement.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 129 :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 172 |
Pour l’adoption | 177 |
Contre | 166 |
Le Sénat a adopté définitivement le projet de loi de finances rectificative pour 2012. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
9
Clôture de la session extraordinaire
Mme la présidente. Mes chers collègues, je constate que le Sénat a épuisé son ordre du jour pour la session extraordinaire.
Mais l'Assemblée nationale n'a pas terminé ses travaux.
Dans ces conditions, le Sénat voudra sans doute s'ajourner.
M. le président prendra acte de la clôture de la session extraordinaire par voie d'une communication publiée au Journal officiel.
Je vous souhaite à tous de bonnes vacances !
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures cinquante.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART