M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Hyest. Je pense que nos collègues n’ont pas forcément écouté avec attention Mme la ministre.
Un an avant une élection, potentiellement, un compte de campagne peut être ouvert. Or, si l’on change les règles du jeu en cours de partie, se posera un vrai problème de constitutionnalité.
Je rappelle que tout le monde était d’accord pour éviter les candidatures de fantaisie, y compris aux élections législatives. Cette position est d’ailleurs à l’origine des règles un peu plus strictes qui ont été fixées à la place de celles qui existaient auparavant. Je rappelle que certains groupements qui s’étaient constitués disposaient, pendant cinq ans, de ressources non négligeables de plusieurs dizaines de milliers d’euros parce qu’ils avaient présenté des candidats à une élection, indépendamment du pourcentage de voix obtenu. En effet, le Parlement avait fixé un seuil minimal que n’a pas retenu le Conseil constitutionnel.
On peut trouver fort bien que se présentent vingt-cinq, trente ou quarante candidats. Mais parmi ceux-ci figureront forcément des fantaisistes. Or de telles candidatures doivent être évitées dans l’intérêt de la dignité du débat précédant toute élection, sinon la démocratie n’en sortirait pas grandie.
Pour ma part, je suis hostile à tous les amendements déposés qui ont pour objet de changer les règles du jeu fondamentales qui ont été fixées souvent par la loi de 1962. Certes, des corrections ont été apportées à ces dernières, mais il faut se souvenir des raisons pour lesquelles elles ont été adoptées. Dans le passé, nous avons tous connu des candidatures sympathiques sans grand intérêt pour définir la politique de notre pays pour les cinq années suivantes.
M. Gaëtan Gorce, rapporteur. Marcel Barbu est resté dans l’Histoire !
M. Jean-Jacques Hyest. On peut discuter des règles existantes, mais pas trois mois avant une élection !
Monsieur Masson, vous critiquez l’engagement de la procédure accélérée. Mais pensez-vous vraiment que le projet de loi organique initial méritait deux lectures ? Nos méthodes de travail soulèvent le problème de l’examen par le Parlement de textes mineurs. Si aujourd'hui nous discutons du présent projet de loi organique, c’est parce qu’une diminution des comptes de campagne relatifs à l’élection présidentielle est une mesure organique, alors qu’une disposition de même nature relève d’une loi de finances pour les autres élections. Le débat en cause, minime mais cohérent par rapport aux décisions que nous avons prises précédemment, devrait être rapide.
Nous voterons contre les amendements que nous examinons actuellement.
Nous avons aussi déposé l’amendement n° 9 tendant à supprimer de l’article unique des dispositions qui figurent déjà dans le code électoral. Point n’est besoin d’en rajouter ! On ne va pas faire de lois mémorielles en matière électorale !
M. le président. En conséquence, les amendements nos 13, 6 et 7 ainsi que le sous-amendement n° 17 n'ont plus d'objet.
L'amendement n° 10, présenté par M. Gorce, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° Le cinquième alinéa du II de l’article 3 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Sa décision est notifiée à tous les candidats. » ;
…° À la première phrase du troisième alinéa du III de l’article 3, les mots : « par le candidat concerné » sont remplacés par les mots : « par l’un des candidats » ;
La parole est à M. Gaëtan Gorce.
M. Gaëtan Gorce. Cet amendement est inspiré par la même philosophie que celle qui a présidé à la saisine de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. Si ces amendements auraient pu être substitués l’un à l’autre, ils peuvent aussi être cumulés.
Il s’agit de faire en sorte que puisse être définie le plus rapidement possible une jurisprudence qui permettra de cadrer les dépenses imputables et non imputables des titulaires de mandat électif notamment.
Aujourd’hui, si une infraction est commise en matière de législation sur les comptes de campagne, elle ne peut être contestée que par la Commission nationale elle-même. Le candidat qui bénéficie d’un avis favorable de celle-ci n’a aucun intérêt à saisir le Conseil constitutionnel, même si le point de vue émis par la Commission peut susciter de la part des autres candidats, au regard des informations dont ils disposent ou des interprétations qu’ils font de la loi, un jugement différent.
Il s’agit donc de permettre à tout candidat admis à concourir à la campagne présidentielle de saisir le Conseil constitutionnel sur l’avis rendu par la commission précitée sur les comptes de campagne de telle sorte que puisse s’établir, par cette contestation plus ouverte, une véritable jurisprudence et que puissent être éliminées les polémiques auxquelles peuvent donner lieu certains types de dépenses, certains comportements et in fine certaines appréciations. Ce point a déjà été rappelé tout à l’heure.
On pourrait penser qu’une telle mesure devrait s’accompagner d’une réforme du Conseil constitutionnel. Je ne veux pas entrer dans ce débat, qui me paraît cependant complémentaire à celui que je viens d’évoquer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Michel, vice-président de la commission des lois. Favorable, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 8, présenté par MM. Collombat et Mézard, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le III de l’article 3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de rejet du compte du candidat élu, le Conseil constitutionnel en informe le Parlement, afin d’apprécier si les motifs du rejet renvoient à des actes constituant un manquement manifestement incompatible avec l’exercice du mandat de Président de la République. »
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Mes chers collègues, avec cet amendement, on sort de l’épicerie fine (Sourires.) pour s’attaquer à un problème que je vais essayer de résumer en quelques mots, puisque je l’ai déjà évoqué à la tribune.
Il s'agit du cas où le compte du candidat élu – le Président de la République, donc – serait rejeté. Imaginons – la réalité a montré que ce n’était pas complètement farfelu – que son compte de campagne présente un dépassement du montant de dépenses autorisé, voire de sérieuses irrégularités.
Que fait-on alors ? Le Président de la République reste-t-il président alors même qu’il a eu des comportements manifestement incompatibles avec sa fonction ? Demande-t-on à une autorité administrative, la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques, ou au Conseil constitutionnel, qui n’est certes pas une autorité administrative mais qui n’est pas non plus une autorité élue, de le destituer ? Cela poserait tout de même un sérieux problème, puisque le Président de la République a été élu.
Soit on renonce à trouver une solution, on laisse les choses en l’état, soit on adopte la seule solution possible : on confie le pouvoir de décision à la seule instance capable de décider si le comportement du candidat lors de la campagne électorale est incompatible avec l’exercice de la fonction présidentielle. C’est ce que prévoit l’article 68 de la Constitution. (M. Jean-Jacques Hyest s’exclame.) C’est très simple. Il n’y a pas d’autre solution !
Va-t-on continuer à vivre dans l’hypocrisie la plus totale et, comme l’ont montré nos débats d’aujourd’hui, raffiner sur le sixième chiffre après la virgule pour savoir ce que l’on va compter, ne pas compter, etc, en laissant de côté le gros problème ? Est-ce qu’on continue, ou est-ce qu’on essaie d’apporter une réponse ? Est-ce qu’on se réfugie derrière des arguties juridiques – je pense qu’on arrivera à en trouver – ou est-ce qu’on essaie de porter le fer dans la plaie ? Voilà l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gaëtan Gorce, rapporteur. La commission a débattu activement de cet amendement, car il pointe un problème qui est au cœur de nos discussions : comme cela a été rappelé à plusieurs reprises, notre réglementation sur les comptes de campagne est relativement floue s'agissant de la campagne pour l’élection présidentielle, et nous n’avons pas les moyens de la faire respecter.
L’avis que la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques peut émettre en amont, sur des transports ou déplacements du Président de la République, pour ne citer qu’un exemple parmi beaucoup d’autres, ne s’impose à personne. Si la Commission maintient son point de vue à l’issue de l’élection, et si l’on ne permet pas – notre assemblée a heureusement voté une disposition le permettant – à un autre candidat de contester la décision devant le Conseil constitutionnel, l’affaire ne va pas plus loin.
Par conséquent, d’éventuelles infractions peuvent apparaître dans un compte de campagne sans que personne puisse émettre de contestation à l’occasion de l’examen du compte par la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques ou par le Conseil constitutionnel. C’est ensuite par la justice que sont révélés un certain nombre de faits.
Cette situation est bien sûr extrêmement choquante. On comprend parfaitement la volonté de M. Collombat – j’espère que beaucoup de sénateurs, de toutes sensibilités politiques, la comprennent – de corriger cette situation, dans l’intérêt de la République et de l’ensemble des candidats à l’élection présidentielle.
Comment pouvons-nous y parvenir ? En l’état, si une infraction – un financement illégal, par exemple – était constatée à l’issue du scrutin dans le compte de campagne du candidat élu – cette hypothèse devient malheureusement plausible –, nous n’aurions pas les moyens de la faire sanctionner. En effet, même s’il s’agissait d’une infraction pénale, celle-ci serait couverte par les dispositions relatives à l’irresponsabilité pénale du chef de l’État. Autrement dit, si un candidat non élu a commis une infraction, il pourra être poursuivi dès lors qu’elle sera découverte ; en revanche, si le candidat élu, c'est-à-dire celui qui porte la responsabilité la plus élevée, a commis une infraction, il ne pourra pas être poursuivi.
La logique voudrait donc qu’il existe un mécanisme et un processus de sanction, ou en tout cas de contrôle, à l’égard du candidat élu, si de telles infractions sont révélées. La seule procédure qui semble pouvoir être utilisée est celle que prévoit l’article 68 de la Constitution en cas de manquement particulièrement grave du chef de l'État à ses obligations.
Si la loi organique nécessaire à l’application de cette disposition entrait enfin en vigueur – le Gouvernement pourra peut-être nous donner des indications sur ce point, nous dire s’il a véritablement l’intention de faire aboutir le processus législatif –, on pourrait considérer, dans la mesure où les avis rendus par la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques et les décisions du Conseil constitutionnel sont rendus publics, que le Parlement serait en mesure d’enclencher la procédure prévue à l’article 68. L’amendement de notre ami Collombat serait donc satisfait, et ce dernier pourrait éventuellement le retirer. Toutefois, encore faudrait-il que le Gouvernement nous donne des indications quant à sa volonté – dont nous doutons aujourd'hui – de rendre enfin applicable la procédure prévue à l’article 68.
À défaut, la commission estime que la sagesse doit l’emporter : son avis n’est ni favorable ni défavorable. En effet, elle considère qu’il appartient à chacun d’entre nous de déterminer si la volonté politique exprimée par le Gouvernement est suffisante pour qu’on puisse attendre la mise en œuvre de l’article 68, ou si, en la matière, le processus législatif est si mal engagé qu’il faut, par un vote clair de notre assemblée, indiquer notre souhait que cesse cette forme d’impunité. C’est évidemment dans cet esprit que M. Collombat a présenté son amendement. La commission s’en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Si l’objet de cet amendement est simplement de garantir l’information du Parlement, il n’a pas de raison d’être car il n’apporte aucune plus-value.
Si le but est de rendre applicable à cette matière la procédure de l’article 68 de la Constitution, j’estime qu’on ne peut pas en débattre dans ces conditions, lors de l’examen d’un projet de loi organique visant à modifier le code électoral. Même si vous vous exprimez avec beaucoup de talent, monsieur le rapporteur, je crois que cela n’est pas l’objet du texte que nous examinons aujourd'hui. Le Sénat ne peut adopter dans ce cadre une disposition concernant le statut du Président de la République. Nous n’allons tout de même pas remettre en cause les équilibres existant entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif.
Comme je l’ai rappelé lors de mon intervention liminaire et lorsque j’ai présenté le projet de loi organique, ce dernier découle d’un plan d’économies. Alors que va s’engager une campagne électorale très importante – l’élection présidentielle – et que le contexte nous impose un effort de réduction des dépenses publiques, nous ne pouvons pas envoyer un signal laissant penser que ces dépenses pourraient augmenter. C’est le sens de la disposition gelant les plafonds de dépenses électorales. Je crois qu’il serait dangereux d’aller sur un autre terrain.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Madame la ministre, ce n’est pas moi qui ai demandé qu’on examine ce texte aujourd'hui : c’est vous qui nous l’avez soumis.
Ce que je supporte de plus en plus mal, c’est que nous passions notre temps à nous mouvoir dans le dérisoire. Tout le monde sait bien que l’équilibre des comptes publics, avec lequel on nous bassine, ne passe pas par ce type de mesure ! L’équilibre des comptes publics passe par une relance de l’économie ! Point barre !
On nous demande de nous prononcer sur un projet de loi organique relatif au remboursement des dépenses de campagne de l’élection présidentielle. Nous essayons de parler des véritables problèmes qui se posent, et pas de l’épicerie fine, comme je l’ai dit il y a quelques instants.
Je veux bien tout ce que vous voulez ! On peut continuer à accepter que les petits maladroits soient sanctionnés lourdement, au point de perdre le peu d’argent qu’ils ont, pendant que les gros malins, qui ont de solides amitiés, continuent à agir comme ils veulent. Je veux bien ! Mais si on ne le veut pas, en quoi cela vous gêne-t-il d’appliquer simplement ce que prévoit l’article 68 de la Constitution ?
On peut considérer – moi je le considère – que les manquements graves commis lors de la campagne électorale ne sont pas détachables de l’exercice de la fonction présidentielle. Comment pourriez-vous faire comprendre aux Français qu’on n’essaie pas d’apporter une réponse ? Si vous en avez une meilleure que celle que je propose, je la voterai volontiers ! Mais on ne peut laisser les choses en l’état ! Ou alors il ne faut pas s’étonner que certains trouvent que notre système ne fonctionne pas très bien.
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.
M. Philippe Bas. Soyons clairs : personne ici ne soutient que la réduction du plafond des dépenses de campagne remboursées aura un impact décisif sur la réduction des déficits publics. Toutefois, ce n’est pas une raison pour ne pas faire preuve d’un peu de sobriété dans les dépenses de campagne. De fait, l’étalage de dépenses de campagne excessives a quelque chose de choquant dans une période où chacun est appelé à fournir un effort dont nous souhaitons naturellement, les uns et les autres, qu’il soit le plus juste possible.
Par conséquent, il me semble que la seule question qui nous est posée aujourd'hui – et la réponse à cette question est bien ce qui ressortira de notre débat – est de savoir si oui ou non nous souhaitons que les candidats fassent preuve de sobriété et de mesure dans leurs dépenses de campagne pour les élections à venir,…
M. Jean-Jacques Mirassou. La réponse est « oui » !
M. Philippe Bas. … à commencer par l’élection présidentielle, puisque le sort des autres élections a déjà été réglé par des dispositions analogues contenues dans une loi ordinaire.
M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.
M. Jean Louis Masson. Je suis tout à fait partisan de la sobriété : je pense qu’il faut réduire les dépenses électorales. Sur ce point, il n’y a aucun problème.
Ce que je regrette, c’est que l’on ne réduise que de 2,5 points – de 50 % à 47,5 % – la part des dépenses remboursée. Ce n’est effectivement pas avec ça que l’on va redresser la France !
Ce qu’il aurait fallu faire – et le Gouvernement se serait grandi s’il l’avait fait –, c’est diminuer d’un tiers le plafond de remboursement et le plafond de dépenses autorisées. En effet, quand on voit les sommes colossales dépensées par certains grands candidats, on se dit qu’il serait tout de même possible de ne pas dépenser autant lors de la campagne présidentielle. Je pense que, pour être crédible auprès de nos concitoyens, il aurait fallu diminuer d’un tiers le plafond de remboursement et le plafond de dépenses autorisées, et non se contenter de cette réduction de 2,5 points du plafond de remboursement.
S'agissant de l’amendement de notre collègue Collombat, cela me semble une bonne chose que le Parlement soit informé. Le début de cet amendement me paraît donc excellent. Il faudrait d'ailleurs qu’il y ait davantage d’information lors de toutes les élections car, actuellement, il n’y a pas d’information systématique des différents candidats en cas de contentieux administratif ou d’avis de la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques. Il serait souhaitable, dans un souci de transparence, que nous progressions dans ce domaine. Je suis par conséquent tout à fait d’accord avec une bonne partie de l’idée de notre collègue.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. J’ai le sentiment que nous avons les yeux un peu trop fixés sur le rétroviseur : le passé est le passé, nous ne le changerons pas. Regardons donc devant nous.
L’amendement déposé par MM. Collombat et Mézard soulèvent de bonnes questions ; peut-être mon groupe n’aurait-il pas tenu exactement le même raisonnement, mais, puisque nous ne disposons pas d’autre cadre pour aborder ces questions, nous le voterons.
Novice dans cette assemblée, je tiens à dire que je suis surprise que nous consacrions, comme l’a dit Jean-Yves Leconte de façon éloquente et convaincante, autant d’heures à débattre d’un texte qui ne représente que 3 millions d’euros d’économie. Le ratio entre l’énergie déployée et l’économie attendue ne me paraît pas correspondre à l’efficience que défend ce gouvernement. Il prouve au contraire, je suis désolée d’avoir à le dire, que nous ne sommes pas efficaces ! Nous ne sommes pas bons et il faudrait peut-être envisager de travailler autrement.
Je ne comprends pas bien non plus que nous passions notre temps à voter ici des textes qui ne relèvent pas du domaine de la loi, comme celui qui vient d’être inscrit à l’ordre du jour du 23 janvier : l’historienne que je suis est très surprise d’apprendre qu’elle a été élue ici pour dire l’histoire officielle, ce qu’il est bon de raconter et ce qui ne l’est pas !
Je regrette pour ma part que nous passions autant de temps sur 3 millions d’euros d’économie et que nous nous apprêtions à en passer beaucoup également sur des dispositions qui sont du domaine de la science et non du Parlement. Nous, nous sommes venus ici pour changer les choses en profondeur afin que la société française aille mieux, pas pour discuter d’économies de bouts de chandelles !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Hyest. D’abord, le rejet des comptes est publié. Ensuite, s’il s’agit de manquements graves susceptibles de relever de l’article 68 de la Constitution, ce dernier s’appliquera. Je ne vois donc pas ce qu’ajoute l’amendement.
Certes, la loi organique qui permettra l’application de cet article n’est pas encore complètement votée, mais elle le sera – il est tout de même utile que l’on aille au bout de la réforme constitutionnelle de 2007, et il est temps qu’on le fasse –…
M. Gaëtan Gorce. Le Gouvernement ne se presse pas !
M. Jean-Jacques Hyest. … et, si elle ne l’était pas votée, cela ne changerait rien : la disposition proposée ne pourrait pas s’appliquer, puisque le Parlement ne pourrait pas mettre en œuvre la procédure de l’article 68.
Cet amendement ne sert donc strictement à rien, si ce n’est à se faire plaisir, et, personnellement, je n’aime pas voter des dispositions qui ne servent à rien.
J’ajoute à l’intention de quelques-uns de nos collègues que, lorsqu’on est parlementaire depuis un certain nombre d’années, on s’habitue à perdre des heures à entendre des discours répétitifs…
M. Yves Détraigne. C’est vrai !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Michel. M. Collombat a le mérite de soulever une question que le Sénat s’est déjà posée, celle de l’application de l’article 68 de la Constitution issu de la réforme de 2007 et fait pour M. Chirac, comme le savent M. Hyest et M. Bas, qui a été secrétaire général adjoint puis secrétaire général de la présidence de la République. Je me demande d’ailleurs bien pourquoi M. le président Sarkozy n’a jamais voulu que cette question soit réglée…
En tout état de cause, l’article 68 prévoit qu’une procédure pourra être engagée à l’encontre du Président de la République par le Parlement en cas de manquement grave à ses devoirs – on sait que le Président de la République est sinon totalement irresponsable, pénalement, civilement, commercialement et financièrement.
Le Sénat a pris l’initiative de déposer une proposition de loi organique portant application de cet article, proposition finalement votée dans des conditions quelque peu houleuses et à laquelle le Gouvernement s’était opposé au prétexte qu’un projet de loi organique ayant le même objet était déposé à l’Assemblée nationale, mais cette dernière ne votera le projet de loi organique, en première lecture, que le mardi 24 janvier.
C’est dire qu’il est assez peu probable que ce texte soit voté avant la fin du quinquennat et c’est le problème qui découle de cette situation que souligne en réalité M. Collombat, car, question que nous nous sommes posée, en commission et en séance, lorsque nous avons examiné la réforme, qu’est-ce qu’un manquement grave ? Eh bien, ce pourrait être des faits frauduleux apparaissant dans le compte de campagne.
Dans un tel cas, le Parlement serait non seulement informé, madame la ministre, monsieur Hyest, mais aussi mis en mesure de mettre en œuvre, le cas échéant, les dispositions qu’une loi organique pour l’instant théorique…
M. Jean-Jacques Mirassou. Virtuelle !
M. Jean-Pierre Michel. … permettra ultérieurement d’appliquer et donc de mettre en accusation le Président de la République.
Mon groupe votera par conséquent cet amendement.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Raffarin.)