M. le président. Veuillez conclure, cher collègue !
M. Jean Boyer. Monsieur le président, je laisse parler mon cœur et non mon intérêt personnel. Sachez que j’ai été pris dans neuf embuscades. À ce moment-là, on voit sa fiancée à sa maman.
Monsieur le secrétaire d’État, le groupe de l’UCR votera votre budget ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UCR et de l’UMP.)
M. le président. Vous avez dépassé votre temps de parole de trois minutes, cher collègue, mais vous aviez certainement le cœur gros.
La parole est à Mme Christiane Kammermann.
Mme Christiane Kammermann. Cher collègue Boyer, vous avez fort bien parlé et nous avons tous été très touchés par vos propos !
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avant d’entrer dans le vif du sujet, qu’il me soit permis d’avoir une pensée amicale pour notre ancienne collègue Jeanine Rozier, ancien rapporteur pour avis de cette mission budgétaire. Pendant des années, elle n’a cessé de défendre les droits des anciens combattants. J’espère pouvoir en faire autant en tant que porte-parole du groupe de l’UMP.
Monsieur le secrétaire d’État, les crédits que vous nous présentez diminuent de 4,3 %, mais ils représentent tout de même un budget de 3,17 milliards d’euros.
Comme l’a précisé notre collègue Philippe Marini, président de la commission des finances et rapporteur spécial, cette contraction budgétaire est principalement liée à la diminution des effectifs de la population pensionnée et à la poursuite de la réforme des services d’administration aboutissant à la suppression de la direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale ainsi qu’à la rationalisation de la direction du service national.
Cette baisse de crédits, qui suscite des réactions hostiles parmi les associations et chez certains parlementaires, résulte avant tout de faits et de réformes structurelles. Dès lors, les économies et la marge de manœuvre dégagées bénéficient avant tout aux premiers concernés : les anciens combattants.
Si beaucoup n’ont cessé de critiquer la révision générale des politiques publiques engagée en 2007, les effets de cette dernière sont positifs en ce qui concerne l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre. Oui, la modernisation de l’ONAC a permis la mise en place d’une véritable politique de proximité envers les anciens combattants !
Ces efforts, nous nous en félicitons, se sont articulés autour de trois axes : la pérennisation des missions de l’ONAC, le renforcement de ses moyens, la réforme de sa gouvernance et de son conseil d’administration afin de rééquilibrer la représentation des différentes générations du feu. Ainsi, dans chaque département, les ressortissants de l’ONAC disposent d’un seul et même interlocuteur qui les conseille et les accompagne dans leurs démarches. Ce service unique d’accueil, sur le territoire national, comme en Afrique du Nord, évite à ceux que la guerre a marqués physiquement de se déplacer en plusieurs endroits, au gré des méandres administratifs dont notre pays a souvent le secret !
Le deuxième point que j’aborderai – le plus emblématique de ce budget – concerne la revalorisation de 4 points de la retraite du combattant.
Au nom du groupe de l’UMP, je tiens à rappeler que, depuis 2007, la majorité présidentielle n’a cessé de préserver le maintien du niveau de prestations en faveur du monde combattant, et ce dans un contexte de crise financière sans précédent.
En politique, il est d’usage d’affirmer que les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. Force est de constater que c’est l’une des plus belle excuses à l’inaction et à l’immobilisme. J’en veux pour preuve le fait que la promesse relative à la nécessaire revalorisation de la retraite du combattant est aujourd’hui une réalité.
Si, en 2007, le candidat Sarkozy a promis une retraite au taux de 48 points, en 2012, le Président Sarkozy a tenu son pari.
Mme Gisèle Printz, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Ah bon ?
Mme Christiane Kammermann. Il revient aux parlementaires que nous sommes de voter cette revalorisation.
Pour mémoire, entre 2002 et 2006, la retraite du combattant n’a été augmentée que de 2 points et atteignait difficilement 37 points en 2007.
En cinq ans, les anciens combattants auront donc bénéficié d’une augmentation de leur retraite de plus de 30 %, non seulement du fait de l’attribution de 4 points supplémentaires, mais aussi grâce à la majoration du point de la pension militaire d’invalidité, le PMI, qui atteindra 14 euros. Concrètement, cela signifie que les retraites du combattant et les rentes mutualistes seront alignées sur l’évolution du point de retraite de la fonction publique. En période de crise et de réduction des dépenses de l’État, nous ne pouvons que nous féliciter de ces priorités budgétaires, de leur cohérence et de leur constance. Elles témoignent du profond attachement du Gouvernement au monde combattant.
À cette revalorisation inégalée des retraites, s’ajoute la consolidation des crédits consacrés à une mesure historique, je veux parler de l’indemnisation des victimes des essais nucléaires.
Sur ce point, qu’il me soit permis de rendre hommage au remarquable travail de mon collègue Cléach, qui a été rapporteur du projet de loi relatif à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français et qui siège au sein de la Commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires.
Je rappelle que, en dépit des dix-huit propositions de loi déposées dans les deux assemblées, des trente années de combats des associations de vétérans, c’est notre majorité qui a voté cette loi, qui concerne militaires et populations civiles, de Mururoa jusqu’à Reggane, de 1960 à 1998. Cela représente cette année encore une provision de 10 millions d’euros. Peu de gouvernements ont eu le courage de s’attaquer à un tel tabou.
M. Alain Néri. Et combien de dossiers encore pendants ?
Mme Christiane Kammermann. Monsieur le secrétaire d'État, le temps qui m’est imparti étant trop court, je ne pourrai aborder tous les sujets. Je veux donc dire que je me réjouis de la politique qui est menée, car bon nombre des mesures et crédits répondent à une logique et à des valeurs propres à celles du monde combattant. C'est la raison pour laquelle le groupe de l’UMP votera les crédits de la mission.
Il s’agit de l’égalité entre les générations du feu. À cet égard, la décristallisation complète des pensions et l’attribution de la campagne double pour les anciens d’Afrique du Nord sont des mesures phares.
M. Alain Néri. Combien de dossiers ont été pris en compte ?
Mme Christiane Kammermann. C’est cette même égalité qui participe non seulement à la transmission de valeurs républicaines, mais également à la consolidation du lien – trop fragile – entre l’armée et la Nation. À l’heure où nos soldats sont sur des théâtres d’opérations extérieures difficiles, il semble que bon nombre de nos concitoyens ignorent la spécificité du statut militaire et ne comprennent pas la notion de sacrifice pour la Nation. Qu’ils aient été en Afghanistan, au Liban ou en Libye, ils sont l’honneur de la France et, demain, ils seront de « jeunes anciens combattants ».
Aussi, nous ne pouvons que nous réjouir de l’attribution de la campagne double au titre des OPEX ; c’est pour moi un minimum.
Par contre, concernant l’attribution de la campagne double pour les soldats ayant combattu en Afghanistan, je vous demande solennellement la plus grande vigilance, monsieur le secrétaire d'État. Comme le ministre de la défense l’a annoncé au mois d’octobre 2011, cette mesure procède de deux étapes réglementaires.
Le 5 novembre dernier, un premier décret a permis la modification de l’article R. 17 du code des pensions civiles et militaires de retraite. Un nouvel article R. 17 bis précise désormais : « Le service effectué lors d’opérations militaires qualifiées d’opérations extérieures dans les conditions prévues à l’article L. 4123-4 du code de la défense et les blessures qui en résultent peuvent donner lieu, lorsque la nature des opérations le justifie, à l’attribution du bénéfice de la campagne double, par décret. »
Dans un second temps, un autre décret définira précisément les conditions et le champ d’application de l’opération. C’est ce décret qui fixera la période de mission des soldats et précisera les actions de feu et de combats.
Dès lors, il nous importe de ne pas reproduire les erreurs de 1999, lorsque M. Alain Richard, ministre de la défense, a attribué la double campagne aux anciens de la guerre d’Algérie sans prévoir de rétroactivité.
M. Éric Doligé. Eh oui !
Mme Christiane Kammermann. Presque cinquante ans après la fin de cette guerre, des inégalités demeurent.
En conclusion, mes chers collègues, il convient d’être attentif aux conditions d’attribution relatives à la période chronologique concernée. Ce second décret devra prendre en compte le début des opérations en Afghanistan et il devra s’étendre jusqu’au rapatriement du dernier soldat. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon.
M. Ronan Kerdraon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes réunis cet après-midi pour examiner le dernier budget de la législature de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».
L’année dernière, du haut de cette tribune, j’avais regretté que le monde combattant ait perdu son interlocuteur spécifique. Je me réjouis donc, monsieur le secrétaire d’État, de votre présence parmi nous aujourd’hui.
Avant de m’exprimer sur le budget pour 2012, je souhaite formuler quelques observations sur l’exécution de celui de cette année.
Je condamne, comme l’ensemble de mon groupe, les réductions opérées en loi de finances rectificative, pour un montant global de près de 25 millions d’euros, sur les moyens initialement attribués à la mission pour 2011.
Mes chers collègues, le budget des anciens combattants – notre rapporteur pour avis Gisèle Printz l’a parfaitement souligné dans son excellent rapport et dans son intervention – n’est pas un budget comme les autres. En effet, comme l’ont rappelé les orateurs qui m’ont précédé, il doit exprimer la reconnaissance de la Nation à l’égard de celles et ceux qui ont été jusqu’à engager leur existence pour elle. De fait, il ne peut servir de variable d’ajustement.
Pourtant, une fois encore cette année, le constat est amer : les crédits de la mission pour 2012 connaissent une diminution de 4,34 % par rapport à 2011. Cette baisse n’est pas une nouveauté : déjà en 2009, elle était de 105 millions d’euros, de 67 millions d’euros en 2010 et de 110 millions d’euros en 2011. En tout, les anciens combattants auront perdu près de 450 millions d’euros en cinq ans.
Comme si cela ne suffisait pas, la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » a subi à l’Assemblée nationale deux coups de rabot par décision du Gouvernement : la première lame a emporté 14 millions d’euros ; la seconde a supprimé 12,6 millions d’euros. C’est regrettable !
Ces décisions sont justifiées par une évolution démographique, qui conduit, hélas ! à la diminution du nombre des anciens combattants. Pourquoi ne pas avoir maintenu les crédits à leur niveau de 2011, ce qui aurait permis de satisfaire la plupart des demandes des anciens combattants ?
M. Éric Doligé. Par manque de moyens !
M. Ronan Kerdraon. Nous ne nions pas le contexte économique international dans lequel s’est inscrite la construction de ce budget, mais celui-ci ne doit pas servir de prétexte pour justifier des choix budgétaires contestables.
Pourquoi faire participer à la réduction des déficits publics ceux qui ont déjà tant donné, et souvent au prix de nombreuses souffrances ? Bien sûr, chacun doit consentir des efforts, mais ces derniers doivent être répartis équitablement. Et, dans ce cas précis, le compte n’y est pas !
Commençons par la retraite du combattant, qui symbolise concrètement le témoignage des services rendus à notre Nation.
Le projet de budget porte à 48 points d’indice son montant, soit une augmentation de 4 points. Cette décision répond à la plus emblématique des demandes du monde combattant et obéit à une nécessité : honorer la fidélité de la Nation à l’égard de ceux qui ont combattu pour elle. Reste que je m’interroge : comment ce qui était impossible l’an dernier en raison de la crise économique et financière et de la rigueur est-il devenu possible cette année ? Pourtant, la situation s’est aggravée, comme on ne cesse de nous le répéter depuis plusieurs jours du haut de cette tribune. Sans doute l’approche de l’élection présidentielle en mai prochain n’est-elle pas étrangère à ce retournement…
Je veux aussi appeler votre attention sur le fait qu’augmenter de 4 points la retraite du combattant au mois de juillet 2012 signifie que seulement 25 % des pensionnés pourront en bénéficier entre juillet et décembre. La très grande majorité devra patienter jusqu’au 1er janvier 2013.
Nous venons d’apprendre que l’année commençait le 1er juillet. Nous connaissions le calendrier révolutionnaire ; nous avons maintenant le calendrier gouvernemental ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste-EELV.) De qui se moque-t-on ?
Ne pouvez-vous pas modifier le rythme de cette hausse, en proposant, par exemple, dans le pire des cas, que 2 points soient attribués dès le 1er janvier 2012 et 2 autres points au mois de juillet ? La promesse du Président de la République de revaloriser la retraite du combattant avant la fin de son mandat ne sera donc pas tenue. Il n’aura échappé à personne que le 1er juillet vient après le 6 mai 2012…
Je veux maintenant aborder la question de l’allocation différentielle allouée au conjoint survivant et aux plus démunis.
Ce budget prévoit la revalorisation de l’allocation différentielle des veuves d’anciens combattants en portant celle-ci à 834 euros.
Cette somme représente une hausse de 50 % de l’allocation en quatre ans. Certes, cela n’est pas négligeable, et on peut se réjouir de la revalorisation du plafond, d’autant que l’allocation logement n’est pas prise en compte dans le calcul des ressources, mais ce dispositif reste modeste, puisqu’il ne représente que 5 millions d’euros pour 4 800 bénéficiaires percevant annuellement 1 042 euros en moyenne. II serait donc souhaitable que ce plafond soit encore revalorisé pour correspondre au seuil de pauvreté en France, soit 954 euros. C’est pourquoi, avec mon collègue Alain Néri – grand spécialiste du monde combattant –, qui a rejoint la Haute Assemblée en septembre dernier, nous proposerons un amendement en ce sens. Il s’agit là d’un geste symbolique fort, qui représenterait un effort budgétaire soutenable.
Par ailleurs, certains anciens combattants sont dans une situation particulièrement précaire. Au regard de la reconnaissance que la Nation leur doit, proposerez-vous, monsieur le secrétaire d’État, que cette allocation soit étendue aux anciens combattants les plus modestes ?
Un autre sujet me tient à cœur : la campagne double pour les anciens combattants fonctionnaires et assimilés de la troisième génération du feu. Trop de temps a été perdu sur ce dossier, reconnaissons-le.
Les conditions d’attribution du bénéfice de la campagne double aux anciens combattants d’Afrique du Nord sont définies dans le décret n° 2010-890 du 29 juillet 2010. L’article 3 dudit décret précise que seules les pensions liquidées à compter du 19 octobre 1999 peuvent être révisées.
En choisissant unilatéralement une approche extrêmement restrictive et en créant des conditions qui n’apparaissent pas dans la décision du Conseil d’État, le Gouvernement a fait preuve d’une évidente mauvaise volonté, d’ailleurs sanctionnée par la plus haute juridiction administrative.
Le dispositif adopté crée des inégalités parmi les anciens combattants concernés puisqu’il exclut, d’une part, ceux qui ont bénéficié de la carte du combattant en prenant en compte la durée d’exposition aux risques et non plus les actions de feu et de combat, et, d’autre part, tous ceux qui ont liquidé leur droit à pension avant le 19 octobre 1999. Face à cette situation d’iniquité, les associations attendent que des mesures soient prises afin de répondre à cette inquiétude, partagée notamment par les personnes relevant du régime des pensions civiles et militaires de l’État, des collectivités locales, de la fonction hospitalière, de la SNCF, de la RATP et d’EDF-GDF.
Venons-en maintenant à la question du 19 mars. Sur ce point, le professeur d’histoire que je suis s’interroge.
Cette date, qu’on le veuille ou non, fait partie de notre histoire contemporaine. Chaque année, le 19 mars, des milliers d’anciens d’Afrique du Nord et leurs familles, ainsi que des élus, à l’appel d’associations d’anciens combattants, se rassemblent autour du monument aux morts de leur commune. C’est pourquoi je ne comprends pas la position du Gouvernement.
Nous célébrerons en 2012 le cinquantième anniversaire des accords du 19 mars 1962 ; il y aura à Paris une importante manifestation nationale. Les anciens combattants seront présents en grand nombre à ce qu’ils considèrent comme la dernière grande manifestation à laquelle ils pourront probablement participer.
Nous souhaiterions bien sûr que le 19 mars devienne la date officielle de la fin de la guerre d’Algérie et que certains arrêtent de se rendre devant le monument aux morts le 5 décembre, date qui ne correspond à rien.
M. Robert Tropeano. C’est vrai !
M. Ronan Kerdraon. Nombreux sont les anciens d’Afrique du Nord qui se demandent pourquoi des préfets de la République se trouvent ce jour-là devant un monument aux morts.
Dans toutes nos communes, nous avons des places ou des rues du 19 mars. Mais je ne connais pas de place ni de rue du 5 décembre !
Le Gouvernement est-il prêt à revoir sa position et à proposer que le 19 mars devienne la date officielle de la fin de la guerre d’Algérie ? Cette mesure ne coûterait rien. Inutile d’invoquer l’article 40 ! Ce serait seulement un signe positif en direction des associations d’anciens d’Algérie et d’Afrique du Nord. Il serait d’ailleurs tout à l’honneur de la République que les plus hautes autorités de l’État soient présentes le 19 mars prochain à l’Arc de triomphe.
Enfin, je tiens à dire ici notre opposition à toute proposition visant à instaurer un Memorial Day à la française. Nous ne sommes pas aux États-Unis ! Toutes les dates de notre calendrier commémoratif doivent être maintenues, car elles ont chacune leur spécificité. Par ailleurs, le mérite de ces journées est de favoriser la connaissance de l’histoire par les jeunes générations.
M. Alain Néri. Très bien !
M. Ronan Kerdraon. Dans le même esprit, nous accueillons favorablement l’idée d’instituer une journée de la Résistance. La date du 27 mai pourrait être retenue, car elle correspond à l’unification des mouvements de résistance au sein du Conseil national de la Résistance par Jean Moulin en 1943.
Avant de conclure, je voudrais vous inviter, mes chers collègues, à réfléchir au devenir de ceux qui sont de moins en moins nombreux autour des monuments aux morts, les porte-drapeaux.
La génération des anciens combattants vieillit. Physiologiquement, elle ne pourra plus, un jour, accompagner ces commémorations. Il nous faut collectivement répondre à cette problématique. À cet égard, il me semblerait intéressant d’y associer, quand ils existent, les conseils municipaux d’enfants. J’y pense pour ma commune des Côtes-d’Armor, Plérin.
Monsieur le secrétaire d'État, je le disais en préambule de mon intervention, ce projet de budget est le dernier du quinquennat de Nicolas Sarkozy. C’est donc l’occasion de porter un regard global sur la politique menée depuis cinq ans par votre majorité. Qu’en restera-t-il ?
Avec des crédits qui baissent d’année en année et des effectifs qui se réduisent comme peau de chagrin, les anciens combattants et leurs ayants droit ont le sentiment légitime d’avoir été bernés.
M. Éric Doligé. Vous faites du mauvais esprit !
M. Ronan Kerdraon. Pour ma part, deux mots me viennent à l’esprit : déception et amertume.
Déception, car, au final, les engagements du Président de la République n’auront été que partiellement concrétisés. Mais, après les retraites, nous ne sommes pas à un renoncement près de sa part !
Amertume, car la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques s’est faite de manière aveugle, mettant en péril les différentes structures chargées de veiller au droit à réparation des anciens combattants et victimes de guerre. Et ce n’est pas le clientélisme de fin de législature qui me fera changer d’opinion !
Voilà les quelques observations que je souhaitais formuler dans le temps qui m’était imparti.
Vous l’aurez compris, monsieur le secrétaire d'État, mon groupe ne pourra adopter ce budget en l’état. La prise en compte de nos amendements déterminera notre vote final. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Éric Doligé. C’est petit !
M. le président. La parole est à M. Raymond Couderc.
M. Raymond Couderc. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’indice applicable aux retraites des combattants était fixé à 33 points en 1978 et n’a pas évolué entre 1978 et 2006. À M. Kerdraon, qui s’interrogeait sur la raison pour laquelle cet indice n’était pas revalorisé au 1er janvier prochain, on peut donc rétorquer que la question n’est pas nouvelle : depuis 1978, tous les gouvernements sont passés à côté, y compris ceux de gauche !
M. Alain Néri. Ceux de droite aussi !
M. Raymond Couderc. Le Président de la République s’est engagé lors de son élection à augmenter la retraite du combattant durant tout le quinquennat, l’objectif étant de parvenir à un indice de 48 points. Or, depuis le 1er juillet 2011, l’indice est de 44 points.
La revalorisation proposée dans le projet de budget pour 2012 permet de poursuivre l’évolution engagée depuis 2006 en portant l’indice à 48 points au 1er juillet 2012. Ainsi, l’objectif fixé par le Président de la République est atteint.
Au-delà de toute considération partisane, il est important de nous souvenir que notre pays doit beaucoup à ses anciens combattants : ces hommes ont mis leur vie en péril pour le salut de notre Nation. C’est pourquoi il est primordial de leur accorder la reconnaissance, pécuniaire et morale, de la Nation tout entière.
Le budget que nous examinons aujourd’hui est intitulé « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ». Mes chers collègues, je souhaite appeler votre attention sur des anciens combattants dont on parle trop peu : il s’agit des membres des formations supplétives, autrement dit les harkis.
M. René Garrec. Absolument !
M. Raymond Couderc. En février 2010, j’ai déposé une proposition de loi tendant à modifier la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés. En tant que parlementaire, je ne pouvais rester inactif face à la multiplication d’affaires d’injures et de diffamations prononcées à l’encontre de harkis. Malheureusement, elles ont fait l’objet de classements sans suite de la part des autorités judiciaires.
La loi de 2005 interdit toute injure ou diffamation envers les harkis ou apologie de crimes commis à leur encontre. Pourtant, cette loi rencontre un obstacle majeur, celui de son application. En effet, aucune sanction n’est prévue à l’encontre de ceux qui se rendent coupables de ces actes.
Dans ces conditions, plusieurs questions se posent : comment est-il possible que, en France, aujourd’hui, on puisse tenir des propos injurieux et racistes sans être condamné ? Pourquoi les associations d’anciens combattants harkis ne se voient-elles pas reconnaître, comme les associations dont le but est de lutter contre les discriminations à caractère racial ou religieux, la possibilité d’exercer les droits reconnus à toute partie civile ? Il existe des lacunes dans le droit français qu’il nous faut corriger !
L’état actuel du droit ne permet de sanctionner que les propos injurieux ou diffamants envers un harki. Comme tout particulier, il dispose d’un droit individuel à demander réparation du préjudice subi au titre de l’article 33 de la loi du 29 juillet 1881. En revanche, il ne peut pas entamer une procédure en cas d’injure ou de diffamation formulée de manière générale à l’encontre des harkis, blessant un groupe de personnes caractérisées par leur engagement militaire pour la France.
Ma proposition de loi a pour objectif de répondre à ces deux écueils. Reste que je connais les impératifs de l’ordre du jour de notre assemblée et ses aléas. C’est pour cette raison que je tiens à dire solennellement, lors de cette séance budgétaire consacrée aux anciens combattants, que nous ne devons pas oublier les combattants harkis et leur sacrifice pour la France.
Monsieur le secrétaire d'État, votre ministère est celui de la mémoire et du lien entre l’armée et sa Nation. Aussi, je formulerai le vœu que notre politique de mémoire leur rende pleinement hommage. Les harkis méritent le respect dû à tous les anciens combattants, et cela doit être inculqué aux jeunes générations. Toute insulte envers ceux qui ont combattu pour la France et ses valeurs est inadmissible, quels que soient la période et le contexte historique. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. François Trucy. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Alain Néri.
M. Alain Néri. Monsieur le secrétaire d'État, nous avons été très satisfaits de voir que, après quelques mois d’incertitude, les anciens combattants avaient retrouvé un interlocuteur privilégié. Cependant, notre joie fut de courte durée, car, dès votre arrivée, en juin 2011, nous avons constaté un rabotage inquiétant des crédits mis à la disposition du monde combattant.
Dans un premier temps, le 29 juillet, vous avez récupéré 13 millions d’euros, puis, le 19 septembre, vous avez escamoté 12 millions d’euros. Aujourd’hui, vous amputez le budget pour 2012 de 14 millions d’euros supplémentaires. Au total, depuis votre arrivée, les crédits de la mission auront régressé de 39 millions d’euros par rapport à ceux votés par la représentation nationale !
Durant son quinquennat, le Président de la République aura inventé un nouveau type de ministre, l’OMNI : l’objet ministériel non identifié. En effet, se sont succédé au secrétariat d’État chargé des anciens combattants, tels des météores, MM. Marleix, Bockel et Falco, avant que le poste ne vous revienne. Or, malgré toute l’estime que nous vous portons, nous savons que votre mission n’ira guère plus loin que le mois de mai prochain. (M. Ronan Kerdraon s’esclaffe.) En tout état de cause, vous êtes un interlocuteur à durée déterminée.
Mme Catherine Deroche. C’est d’une élégance…
M. Alain Néri. Tout cela n’est pas de nature à nous rassurer, d’autant que vos crédits diminuent de 4,2 %. Personne ne peut contester cette réalité ! Pourtant, selon vous, un effort considérable a été fait puisque la retraite du combattant va être augmentée de 4 points. Effectivement, c’est formidable…
L’an dernier, nous avions réussi à arracher 2 points d’augmentation, contre l’avis du Gouvernement. Huit jours plus tard, M. Baroin passait un coup de rabot, courageusement soutenu par ceux-là même qui avaient voté cette mesure. Ce ne sont pas des méthodes, monsieur le secrétaire d'État !
Vous présentez un budget en trompe-l’œil. Nous ne sommes pas prêts à nous laisser rouler dans la farine, si vous me pardonnez l’expression, aussi facilement. C’est pourquoi nous ne le voterons pas en l’état.
Pour ce dernier budget du quinquennat, je voudrais vous aider. Je vais donc vous présenter des mesures qui permettront à la représentation nationale, unanime, de voter vos crédits. Déjà, j’ai déposé un amendement qui vise à rétablir les crédits supprimés : voilà de quoi financer nos propositions budgétaires ! Il vous sera donc impossible de nous opposer l’article 40 de la Constitution.
Monsieur le secrétaire d'État, il aura fallu dix ans pour augmenter de 15 points la retraite. Je vous le rappelle, les 4 points sont un engagement de 2002 ! Si l’on fait un rapide calcul, sachant que le point est à 13,86 euros, cela fait 55,44 euros par an, autant dire 15 centimes d’euro par jour.