M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Le principe de l’hospitalisation des détenus est celui d’une prise en charge dans les UHSA. Dans l’attente de l’ouverture de toutes ces unités, les patients détenus continuent à être hospitalisés en établissements de santé, en application de l’article 48 de la loi du 9 septembre 2002. La précision que l’amendement tend à introduire dans le texte n’est donc pas nécessaire.
Par ailleurs, l’objectif est bien que les UHSA, qui sont un dispositif adapté et sécurisé, répondant aux critères de garde des détenus, accueillent à terme l’ensemble des personnes incarcérées ayant besoin d’hospitalisation. C’est pourquoi le programme de déploiement prévoit dix-sept unités afin que l’ensemble du territoire soit couvert. Les établissements de proximité qui ne disposent pas de dispositif de garde assuré par du personnel pénitentiaire ne sont pas en mesure de prendre en charge ces patients dans des conditions satisfaisantes.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 207, présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. L’alinéa 10 de l’article 4 est d’importance, puisqu’il encadre les conditions dans lesquelles le juge des libertés et de la détention statue sur la levée ou le maintien d’une mesure d’hospitalisation sans consentement d’une personne détenue.
La rédaction qui nous est proposée prévoit que la décision du juge des libertés et de la détention se fonde uniquement sur l’avis d’un psychiatre intervenant dans l’établissement pénitentiaire où se trouvait la personne incarcérée.
Cette rédaction appelle plusieurs observations.
En premier lieu, on perçoit mal pourquoi, dans ce cas, la décision judiciaire est soumise, non à un examen médical circonstancié, mais uniquement au recueil de l’avis d’un psychiatre qui officie dans l’établissement de détention d’origine. Puisque cet avis n’est pas conditionné à un examen, la prise en compte systématique de l’évolution possible de l’état de santé du malade n’est pas garantie, ce qui peut être source de contentieux.
Qui plus est, comment ne pas s’interroger sur la différence de régime existant entre cette situation et l’hospitalisation sur demande d’un tiers, la HDT, par exemple, dont la levée peut être obtenue, notamment, après remise d’un certificat médical de sortie, circonstancié, émanant d’un psychiatre exerçant dans l’établissement, adressé au directeur de l’établissement qui le transmet dans les vingt-quatre heures au préfet, à la commission départementale des hospitalisations psychiatriques, la CDHP, et au procureur de la République ?
En second lieu, cette disposition présuppose la compétence systématique d’un psychiatre du seul fait de son exercice en milieu pénitentiaire. En outre, le fait que cet avis soit rédigé par un psychiatre qui travaille dans l’établissement de détention peut porter atteinte à la relation entre le médecin et le patient qui, nous le savons tous, est essentielle dans toute stratégie thérapeutique.
Si un avis médical circonstancié doit être émis, la déontologie voudrait qu’il le soit par un psychiatre tiers. Il s’agit non pas de mettre en doute la qualité des avis médicaux rendus, mais bien d’encadrer ces dispositions afin de leur garantir une objectivité, une indépendance, de notre point de vue essentielle. Cela paraît d’autant plus réalisable que nous ne sommes pas dans un cas d’urgence.
Aussi, considérant que la rédaction proposée est dénuée de réalisme et contraire à la nécessité de disposer d’un examen médical circonstancié pour pouvoir juger du bien-fondé du maintien ou de la levée d’un régime de prise en charge des patients, nous vous proposons de supprimer cet alinéa 10.
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« L'avis conjoint mentionné au II de l'article L. 3211-12-1 est rendu par un psychiatre de l'établissement d'accueil, désigné par le directeur et participant à la prise en charge du patient, ainsi que par un psychiatre, consulté par tout moyen, intervenant dans l'établissement pénitentiaire dans lequel la personne détenue était incarcérée avant son hospitalisation. » ;
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Christian Cointat, rapporteur pour avis. Cet amendement de la commission des lois répond parfaitement aux inquiétudes exprimées à l’instant par M. Le Menn.
En effet, la rédaction actuelle du texte est imprécise et justifie les craintes de notre collègue. Pour éviter tout risque de dérive, la commission des lois vous soumet cet amendement qui prévoit clairement que « l’avis conjoint […] est rendu par un psychiatre de l’établissement d’accueil, ainsi que par un psychiatre […] intervenant dans l’établissement pénitentiaire dans lequel la personne détenue était incarcérée avant son hospitalisation ».
La simple suppression de l’alinéa 10 de l’article 4 serait un recul puisque rien ne serait prévu. Voilà pourquoi j’invite M. Le Menn à retirer son amendement au profit de celui que j’ai l’honneur de présenter.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L’amendement de la commission des lois me semble bon !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. L’amendement n° 207 tend à supprimer la mention selon laquelle la levée de l’hospitalisation d’un détenu doit être précédée de l’avis d’un psychiatre intervenant dans l’établissement.
L’amendement n° 32 de la commission des lois, qui vise à prévoir que l’avis conjoint donné au juge avant qu’il se prononce est rendu par un psychiatre de l’établissement d’accueil et par un psychiatre intervenant dans l’établissement pénitentiaire, lorsqu’il s’agit d’un détenu malade, me semble beaucoup plus fonctionnel.
C’est pourquoi nous souhaiterions que l’amendement présenté par M. Le Menn soit retiré au profit de l’amendement n° 32, auquel la commission donne un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à l’amendement de clarification de la commission des lois, ce qui m’amène à émettre un avis défavorable sur l’amendement n° 207.
En effet, il est utile que le psychiatre de l’établissement hospitalier se mette en contact avec le psychiatre de l’établissement pénitentiaire avant de proposer la fin de l’hospitalisation, et donc le retour en détention. La rédaction prévue par la commission des lois va dans le bon sens.
M. le président. Monsieur Le Menn, l'amendement n° 207 est-il maintenu ?
M. Jacky Le Menn. Non, je le retire, monsieur le président, compte tenu des explications qui m’ont été données et de la présentation de l’amendement n° 32, que la commission des lois n’avait pas encore déposé lorsque j’ai rédigé le mien.
M. le président. L'amendement n° 207 est retiré.
La parole est à Mme Bernadette Dupont, pour explication de vote sur l'amendement n° 32.
Mme Bernadette Dupont. L’amendement de la commission des lois me semble intéressant.
Les psychiatres qui travaillent en établissements pénitentiaires, en général, connaissent bien leurs patients, qu’ils suivent malheureusement souvent longtemps. Il me paraît donc judicieux de les associer à la décision du psychiatre de l’établissement hospitalier.
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 33 rectifié, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéas 19 à 23
Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Le certificat médical ne peut émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil. » ;
b) Les quatre derniers alinéas sont remplacés par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le régime de cette hospitalisation est celui prévu pour les hospitalisations ordonnées en application de l'article L. 3213-1.
« Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu la mesure de soins psychiatriques sans consentement nécessaire. Ils désignent l'établissement mentionné à l'article L. 3222-1 qui assure la prise en charge de la personne malade et sont inscrits sur le registre mentionné à l'article L. 3212-11 » ;
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Christian Cointat, rapporteur pour avis. Il s’agit encore d’un amendement de clarification.
L’actuelle rédaction de l’article 4 pourrait laisser penser que le certificat médical exigé dans le cadre d’une hospitalisation d’une personne détenue peut émaner d’un psychiatre exerçant dans l’établissement d’accueil, ce qui constituerait un recul par rapport au droit en vigueur. Cet amendement vise à indiquer clairement que cette possibilité n’est pas envisageable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement de clarification.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
Le chapitre V du titre Ier du livre II de la troisième partie du même code est ainsi modifié :
1° L’article L. 3215-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3215-1. – Est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende :
« 1° Le fait pour le directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 de maintenir la mesure de soins psychiatriques dont une personne fait l’objet sans son consentement, quelle qu’en soit la forme, lorsque la levée de la mesure est ordonnée par le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police, en application du dernier alinéa de l’article L. 3212-8 ou de l’article L. 3213-5, ou par le juge des libertés et de la détention, en application des articles L. 3211-12 ou L. 3211-12-1, ou lorsque la mesure de soins doit être levée en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7, L. 3212-8, L. 3212-9 ou L. 3213-4 ;
« 2° Le fait pour le directeur ou pour tout médecin d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 de supprimer ou de retenir une requête ou une réclamation adressée par une personne faisant l’objet de soins psychiatriques sans son consentement à l’autorité judiciaire ou administrative. » ;
2° L’article L. 3215-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3215-2. – Est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende le fait pour le directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 :
« 1° D’admettre une personne en soins psychiatriques sans son consentement en application du 1° du II de l’article L. 3212-1 sans avoir obtenu la demande d’admission en soins sans consentement et les certificats prévus par le même 1° ;
« 2° D’admettre une personne en soins sans son consentement en application du 2° du même II sans disposer du certificat médical prévu par le même 2° ;
« 3° D’omettre d’adresser au représentant de l’État dans le département ou, à Paris, au préfet de police dans les délais prescrits la décision d’admission, les certificats médicaux et le bulletin d’entrée établis en application du I de l’article L. 3212-5 ;
« 4° D’omettre d’adresser au représentant de l’État dans le département ou, à Paris, au préfet de police dans les délais prescrits les certificats médicaux établis en application de l’article L. 3212-7, des 1° et 2° du I de l’article L. 3213-1 et de l’article L. 3213-3 ;
« 5° D’omettre de se conformer dans le délai indiqué aux prescriptions de l’article L. 3212-11 et du III de l’article L. 3213-1 relatives à la tenue et à la présentation des registres ;
« 6° (Supprimé)
« 7° D’omettre d’aviser dans le délai prescrit par l’article L. 3213-5 le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police du certificat prévu à cet article. » ;
3° L’article L. 3215-3 est abrogé ;
4° L’article L. 3215-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3215-4. – Est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende le fait pour un médecin d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 de refuser ou d’omettre d’établir dans les délais prescrits les certificats médicaux relevant de sa responsabilité en application des articles L. 3211-2-2, L. 3212-7, L. 3213-1 et L. 3213-3. »
M. le président. L'amendement n° 499, présenté par M. Lorrain, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer la référence :
L. 3213-5
par la référence :
L. 3213-4
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Cet amendement vise simplement à corriger une erreur matérielle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Demande de priorité
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, pour la clarté de nos débats, la commission souhaite que soit appelé par priorité l’amendement n° 37 à l’article 14 afin qu’il soit examiné conjointement avec l’amendement n° 34.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
M. le président. La priorité est de droit.
Article additionnel après l'article 5 et article 14 (priorité)
M. le président. L'amendement n° 34, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Après l'article 5, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre II de la troisième partie du même code est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :
« Chapitre VI : Contentieux
« Art. L. 3216-1. - Le contentieux né de l'application du présent titre est exclusivement porté devant l'autorité judiciaire. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Christian Cointat, rapporteur pour avis. Monsieur le président, vous voudrez bien me pardonner la longueur de mon intervention, mais cette proposition, essentielle pour la commission des lois, est au cœur du dispositif et mérite, à ce titre, quelques développements.
En effet, le présent amendement prévoit l’unification du contentieux en matière d’hospitalisation sous contrainte.
Le contentieux en la matière se caractérise par un éclatement entre le juge judiciaire et le juge administratif : le juge administratif est compétent pour examiner la seule régularité de la procédure d’admission en soins ; le juge judiciaire, gardien de la liberté individuelle, est quant à lui compétent pour statuer sur le bien-fondé de la mesure d’hospitalisation sous contrainte. Lui seul peut en prononcer la mainlevée.
Comme l’a indiqué le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-71 du 26 novembre 2010 issue d’une question prioritaire de constitutionnalité, il est loisible au législateur d’unifier le contentieux de l’hospitalisation sous contrainte dans le souci d’une bonne administration de la justice. Il semble d’ailleurs que le Conseil constitutionnel, dans le commentaire de sa décision, invite le législateur à procéder ainsi, puisqu’il précise qu’en matière d’hospitalisation sous contrainte il est possible de déroger au principe constitutionnel de dualité des juridictions. J’insiste sur ce point.
Cette unification ne peut se faire qu’au profit du juge judiciaire, gardien des libertés individuelles.
Une telle réforme garantirait qu’un juge se prononce à bref délai sur la mesure de soins sans consentement, en ce qui concerne tant le bien-fondé que la régularité formelle de cette mesure. En effet, comme vous pouvez le comprendre aisément, le juge judiciaire, pour se prononcer, a besoin de connaître l’ensemble du dossier, sinon sa tâche est beaucoup plus difficile.
Cette réforme mettrait fin à une situation complexe, byzantine, dans la mesure où le patient souffrant de troubles mentaux ne peut qu’être dérouté par la dualité des juridictions : alors qu’il a déjà une maladie psychique, on lui complique la tâche en l’obligeant à choisir l’ordre de juridiction en fonction des moyens qu’il entend invoquer. S’il souhaite contester la régularité de la procédure d’admission en soins, il devra s’adresser au juge administratif, mais s’il entend remettre en cause le bien-fondé de la mesure, il devra se tourner vers le juge judiciaire… Tout cela est très compliqué, d’autant que, si le juge administratif considère que l’acte administratif à l’origine de l’hospitalisation sous contrainte était irrégulier, il ne peut pas lui-même prononcer la mainlevée de l’hospitalisation. C’est presque ubuesque !
De surcroît, environ la moitié des recours actuellement portés devant le juge administratif sont rejetés au motif qu’ils portent sur le bien-fondé de la mesure d’hospitalisation. Lorsque le patient a saisi la justice administrative en référé, il n’a perdu que quelques jours, mais ce sont déjà quelques jours de trop.
A fortiori, lorsque le patient n’a pas saisi la justice administrative dans le cadre d’une procédure d’urgence, il attendra parfois jusqu’à dix-huit mois pour obtenir une décision de rejet de sa requête portée devant le juge administratif. Il y a quand même de quoi s’émouvoir face à une telle situation !
Par ailleurs, dans un avis rendu le 31 mars dernier, la Commission nationale consultative des droits de l’homme indique : « On pourrait aussi imaginer qu’il soit fait un bloc de compétences au profit du juge judiciaire, afin que celui-ci connaisse de l’intégralité du contentieux du soin psychiatrique contraint : la concurrence entre la compétence du juge administratif pour connaître des décisions du directeur de l’établissement et celle du juge judiciaire pour décider du maintien de l’hospitalisation sous contrainte ou de la mainlevée de celle-ci n’est guère satisfaisante. » Je crois que vous en conviendrez, mes chers collègues.
Enfin, le principe de l’unification du contentieux a été défendu par l’ensemble des magistrats que le rapporteur pour avis de la commission des lois, M. Jean-René Lecerf – j’ai l’honneur de le représenter dans ce débat aujourd’hui –, a entendus, qu’ils appartiennent à l’ordre judiciaire ou à l’ordre administratif.
C’est donc un souhait général et j’espère que ce sera celui de la Haute Assemblée.
M. le président. L'amendement n° 37 étant appelé par priorité, je donne lecture de l’article 14 :
Article 14
I. – La présente loi entre en vigueur au 1er août 2011, sous réserve des dispositions du présent article.
II. – Le 1° du I de l’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique est applicable aux décisions d’admission en soins sans consentement prises à compter du 1er août 2011.
III. – Le juge des libertés et de la détention se prononce, dans les conditions prévues aux articles L. 3211-12-1 à L. 3211-12-5 du même code dans leur rédaction résultant de la présente loi, sur le maintien en hospitalisation complète des personnes faisant l’objet, au 1er août 2011, de soins sans consentement en application de décisions d’admission prises avant cette date. Il statue :
a) Avant l’expiration d’un délai de quinze jours faisant suite à la décision d’admission, lorsque celle-ci est intervenue entre le 23 juillet 2011 et le 31 juillet 2011 ;
b) Avant la plus prochaine des échéances successives de six mois faisant suite à la décision d’admission ou à la décision judiciaire prononçant l’hospitalisation sans consentement en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale ou, le cas échéant, à la décision du juge des libertés et de la détention statuant sur cette mesure, lorsque la décision d’admission initiale est antérieure au 23 juillet 2011.
Pour l’application du présent III, le juge est saisi, respectivement, par le directeur de l’établissement d’accueil ou par le représentant de l’État dans le département au plus tard six jours avant l’expiration du délai dans lequel il statue, dans les conditions prévues au II de l’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique. Lorsque l’hospitalisation complète est maintenue après la décision du juge prononcée en application des alinéas précédents, cette décision est assimilée à une décision rendue sur le fondement du même article L. 3211-12-1 pour l’application du 3° du I dudit article.
IV. – Les personnes bénéficiant au 1er août 2011 de sorties d’essai décidées en application de l’article L. 3211-11 du code de la santé publique, dans sa rédaction en vigueur antérieurement à la présente loi, sont réputées, après cette date et jusqu’à l’échéance fixée par la décision autorisant la sortie d’essai, faire l’objet de soins sans consentement en application du 2° de l’article L. 3211-2-1 du même code. À l’issue de chacune de ces sorties d’essai et au vu d’un certificat médical ou, à défaut, d’un avis médical, établi par un psychiatre dans un délai de soixante-douze heures, le directeur de l’établissement, pour les personnes ayant été hospitalisées sur demande de tiers, ou le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police pour les personnes ayant été hospitalisées d’office, décide de la forme de la prise en charge de la personne malade en application du même article L. 3211-2-1 dans sa rédaction résultant de la présente loi.
V. – Le présent article est applicable en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. Pour leur application dans ces territoires, les références au représentant de l’État dans le département ou au préfet de police sont remplacées par la référence au haut-commissaire de la République.
L’amendement n° 37, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le chapitre VI du titre Ier du livre II de la troisième partie du code de la santé publique entre en vigueur au 1er septembre 2012. La juridiction administrative est compétente pour statuer sur les recours dont elle est saisie antérieurement à cette date.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Christian Cointat, rapporteur pour avis. L’amendement n° 37 prévoit une entrée en vigueur différée concernant l’unification du contentieux afin de laisser le temps au juge judiciaire d’être formé sur les questions de légalité externe qui relèvent aujourd’hui de la compétence du juge administratif.
Cet amendement prévoit donc un dispositif transitoire permettant d’éviter un dessaisissement du juge administratif au profit du juge judicaire pour les affaires en cours au 1er septembre 2012 ; il importe qu’une sécurité juridique soit garantie.
Voilà pourquoi ces deux amendements forment un ensemble que je vous invite bien entendu à adopter.
M. le président. Le sous-amendement n° 505, présenté par M. Lorrain, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Amendement n° 37, dernier alinéa, première phrase
À la fin de cette phrase, remplacer la date :
1er septembre 2012
par la date :
1er janvier 2013
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter le sous-amendement n° 505 et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 34 et 37.
M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. L’amendement n° 34, qui tend à justifier l’unification du contentieux, est un acquis important qui résulte des travaux de la commission des lois, et, à la satisfaction, me semble-t-il, de l’ensemble des partenaires concernés, la commission des affaires sociales s’est elle-même efforcée de le conforter.
Il s’agit d’une évolution souhaitable, car les règles actuelles sont complexes, comme M. Cointat vient de l’expliquer, et difficilement compréhensibles. L’unification du contentieux au profit du juge judiciaire constituerait un progrès évident pour les personnes hospitalisées sous contrainte, qui ne comprennent pas la subtilité de la répartition des compétences.
La commission a donc donné un avis favorable à cet excellent amendement n° 34.
Elle soutient également l’amendement n° 37 mais a proposé le sous-amendement n° 505 qui vise à reporter l’entrée en vigueur de la mesure du 1er septembre 2012 au 1er janvier 2013, soit quatre mois plus tard. Il s’agit, en se donnant un peu plus de temps, de rendre cette unification plausible et faisable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nora Berra, secrétaire d'État. L’amendement n° 34 a pour objet d’unifier le contentieux réparti entre le juge administratif, aujourd’hui compétent pour apprécier la régularité formelle de la procédure, et le juge judiciaire, habilité à se prononcer sur le bien-fondé des mesures d’hospitalisation.
Le Gouvernement ne méconnaît pas l’intérêt qui pourrait s’attacher à la création d’un bloc de compétences au bénéfice du juge judiciaire, en vue de faciliter l’exercice des droits de recours des patients.
Toutefois, je tiens à attirer votre attention sur le fait que cet amendement a une portée très large, puisqu’il s’agit de confier à l’autorité judiciaire tout contentieux né de l’application des droits des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques.
Un tel champ est de nature à soulever de nombreuses questions juridiques.
Outre les décisions de placement ou de renouvellement, les actions en responsabilité administrative devront-elles incomber désormais au juge judiciaire ?
Quel juge judiciaire se verra transférer la compétence : le juge des libertés et de la détention ou le tribunal de grande instance, qui est naturellement compétent en matière de responsabilité ?
Quelles sont les conséquences en matière de remise en liberté que le juge tirera lorsqu’il relèvera une irrégularité dans un acte administratif, telle qu’un défaut de motivation ou une délégation de signature non publiée ? Faut-il prévoir des dispositions législatives particulières ?
Ce travail préalable d’expertise n’a pu être effectué à ce jour, les délais fixés par le Conseil constitutionnel ayant imposé une élaboration du texte dans un calendrier extrêmement serré.
Il convient de rester prudent et d’éviter d’imposer aux praticiens – qui devront déjà faire face, à compter du 1er août prochain, à ce nouveau contentieux – de nouvelles tâches qui ne seraient pas absolument nécessaires et qui ne feraient qu’alourdir un peu plus leur office.
Je souhaite rappeler que la mission première du juge judiciaire est d’apprécier la proportionnalité de la mesure de privation de liberté au regard de la situation médicale du patient.
C’est pourquoi je ne peux donner un avis favorable à l’amendement n° 34, sur lequel je m’en remettrai à la sagesse de votre assemblée.
Si vous entendez toutefois aller dans cette voie, je vous invite – et je réponds là à l’amendement n° 37 – à repousser l’entrée en vigueur de cette unification à l’année 2013, comme l’a proposé M. le rapporteur dans le sous-amendement n° 505.