M. le président. La parole est à M. Nicolas Alfonsi.
M. Nicolas Alfonsi. Ma question s’adressait à M. le Premier ministre, car lui seul, compte tenu de son autorité renouvelée, pouvait mettre un terme à la polémique qui est née à la suite à la décision récente du tribunal de Bobigny.
En outre, interroger M. le ministre de l’intérieur pourrait conduire ce dernier à récidiver une nouvelle fois : n’a-t-il pas déclaré à la suite des propos sensés et mesurés de M. le garde des sceaux qu’il « confirmait, revendiquait et assumait ses premiers propos » ?
Ainsi, le fait que les décisions de justice soient rendues au nom du peuple français ne semble pas avoir troublé, au moment même ou sont évoqués des projets de jury populaire dans les tribunaux correctionnels, M. le ministre de l’intérieur, qui, soucieux de soigner son image auprès des forces de police, a violé l’article du code pénal qui sanctionne le fait « de chercher à jeter le discrédit sur une décision juridictionnelle de nature à porter atteinte à l’autorité de la justice ». (Très bien ! sur les travées socialistes.)
Au demeurant, qui nous dit que les officiers de police judiciaire, confrontés quotidiennement à des situations difficiles – je tiens d’ailleurs à leur rendre hommage – et plus respectueux, sans doute, des décisions de justice que le ministre de l’intérieur,…
M. Roland Courteau. En effet !
M. Nicolas Alfonsi. … partagent le sentiment de ce dernier ? Qui nous dit qu’ils n’approuvent pas la sanction du tribunal de Bobigny, eu égard à la gravité des faits sanctionnés ?
M. Roland Courteau. Absolument !
M. Nicolas Alfonsi. Comme l’a souligné avec raison M. le Premier ministre, la décision d’engager des poursuites est due à une initiative du ministre de l’intérieur. N’est-il pas regrettable, dès lors, que cette initiative soit ruinée par les propos du même ministre, dont l’opinion publique retiendra le commentaire et non l’initiative.
S’arroger le droit de critiquer les décisions de justice est une faute, et même un délit, aggravé en l’occurrence par la qualité et le statut de celui qui s’exprime.
Il faut le dire et le répéter, l’état de droit s’impose aux ministres. Ces derniers doivent respecter le principe de la séparation des pouvoirs, lequel ne saurait être bafoué au bénéfice de considérations subalternes ou corporatistes,…
Mme Raymonde Le Texier. Très bien !
M. Nicolas Alfonsi. … quelle que soit la compréhension que nous pouvons manifester envers les policiers qui exercent leur métier dans des conditions difficiles.
M. le président. Veuillez poser votre question !
M. Nicolas Alfonsi. Il eût sans doute été préférable que M. le Premier ministre, plutôt que de rappeler la justice à ses devoirs, adressât semblable recommandation au ministre de l’intérieur.
Monsieur Baroin, pouvez-vous nous confirmer, sans remonter au Déluge, ou en tout cas à plus de dix ans en arrière comme vous l’avez fait voilà quelques instants, que des instructions ont été données à M. le ministre de l’intérieur pour l’inviter à plus de mesure, afin d’éviter que ne se reproduisent de tels dérapages, qui portent atteinte à l’idée que l’on doit faire de la justice ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement.
M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je pourrais vous rappeler à nouveau que le Premier ministre a déclaré que les sept policiers qui ont été condamnés avaient commis des faits injustifiables. Je pourrais aussi vous rappeler que cette affaire est née de l’initiative du commissariat et de l’autorité hiérarchique qui a signalé les faits. Mais j’irai à l’essentiel.
Vous me dites de remonter moins loin que dix ans en arrière. Vous avez raison ! Arrêtons-nous donc ensemble à ce qui s’est passé voilà quelques jours.
Il faut tout de même beaucoup d’audace et un culot d’acier pour se draper dans une sorte de virginité en nous disant : « Vous, au Gouvernement, vous, à droite, vous vous comportez mal », alors que, voilà quelques jours, rue de Solférino, le « politburo » du PS a condamné par avance les observations du Conseil d’État, haute juridiction parfaitement inattaquable, au sujet de la situation du président de la région d’Île-de-France ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. David Assouline. Ça vole bas !
Mme Raymonde Le Texier. On persiste et on signe !
M. François Baroin, ministre. Vous appelez à plus de mesure ; nous appelons, nous, à plus de responsabilité partagée. (Vifs applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Claude Jeannerot.
M. Claude Jeannerot. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé. Elle concerne le fonctionnement de Pôle emploi.
Parce qu’ils ont du bon sens, nos concitoyens savent bien que, face au déficit abyssal des comptes de l’État, il faut faire des économies. Mais ils ne comprennent pas que cette recherche d’économies s’exerce tous azimuts, y compris sur des domaines aussi essentiels que celui de l’emploi.
Ainsi, le service public de l’emploi n’est pas épargné par votre politique de rigueur. Vous envisagez de réduire ses moyens, et ses personnels, vous le savez, sont très inquiets. Sommes-nous sortis de la crise, sur le front de l’emploi, pour justifier une telle mesure ? De toute évidence, non.
M. Guy Fischer. Effectivement !
M. Claude Jeannerot. Certes, en octobre dernier, le nombre des chômeurs a très légèrement diminué par rapport au mois précédent. Cette donnée ne doit cependant pas nous en faire oublier d’autres, moins flatteuses, mais bien réelles : le nombre des chômeurs de longue durée a progressé de 23 % en un an et la durée moyenne d’inscription au chômage ne cesse de s’allonger. Les plus touchés sont les jeunes : un sur quatre est sans emploi. On sait depuis hier que, en zone urbaine sensible, un homme jeune sur deux – chiffre terrible ! – est au chômage.
M. Guy Fischer. Voilà la réalité ! (Oui ! sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
M. Claude Jeannerot. Cette situation devrait, à l’évidence, conduire le Gouvernement à renforcer les moyens d’accompagnement des chômeurs au retour à l’emploi ou à l’entrée en formation. Ces moyens, monsieur le ministre, ont fait la preuve de leur efficacité économique et sociale.
Vous envisagez précisément de faire le contraire en amputant la politique de l’emploi de ses moyens d’action, notamment en décidant de supprimer 1 800 emplois à Pôle emploi.
Comment cette politique est-elle compatible avec la volonté affichée par le Président de la République de doubler le nombre de jeunes admis en formation en alternance ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n’est pas fait : les patrons n’en veulent pas !
M. Claude Jeannerot. Monsieur le ministre, alors que la fracture sociale ne cesse de s’aggraver, notamment dans les territoires urbains sensibles, quelles mesures comptez-vous prendre pour permettre au service public de l’emploi d’exercer correctement sa mission ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé. Monsieur le sénateur, si vous voulez que Pôle emploi puisse accomplir sa mission, il faut arrêter de prononcer des contrevérités à son sujet.
M. Jacques Mahéas. Ça commence mal !
M. Xavier Bertrand, ministre. Or c’est ce que vous avez fait dans votre intervention.
D’une part, vous dites que les moyens baissent. Ce n’est pas vrai. Les discussions qui ont eu lieu récemment ici même ont montré que les moyens de Pôle emploi étaient au contraire confortés.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Allez dans les agences de Pôle emploi et vous verrez comment les choses se passent !
M. Xavier Bertrand, ministre. D’autre part, vous parlez des effectifs.
En février 2008, quand s’est engagée la fusion de l’UNEDIC avec l’ANPE, il y avait 48 000 agents. Au moment où je vous parle, ils sont 52 000.
M. Alain Gournac. Tiens !
M. Xavier Bertrand, ministre. Où est la baisse des effectifs ? (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jacques Mahéas. Moi, je vois ce qui se passe dans mon département !
M. Guy Fischer. Vous êtes complètement déconnecté de la réalité ! Vous devriez venir à Vénissieux…
M. David Assouline. Ils sont faux !
M. Xavier Bertrand, ministre. Pour les connaître, il suffisait de participer au débat qui s’est tenu ici ou de consulter les documents s’y rapportant ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
La baisse du chômage, c’est la priorité de chacun des élus sur leur territoire. Dans ces conditions, pourquoi ne pas sortir des postures habituelles et regarder ensemble si nous sommes capables d’être plus efficaces ?
Ce que nous proposons, c’est de mettre sur la table de nouveaux outils pour l’emploi des jeunes, notamment en matière d’alternance.
M. Didier Boulaud. Cela fait huit ans que vous nous répétez cela !
M. Xavier Bertrand, ministre. Je le dis notamment aux responsables de collectivités locales, quelle que soit leur sensibilité : le Gouvernement veut avancer davantage sur cette voie. Nous verrons si l’intérêt général prime les postures politiciennes.
M. Didier Boulaud. Changez de disque !
M. Xavier Bertrand, ministre. En la matière, ma politique sera celle de la main tendue.
Par ailleurs, le chômage des jeunes, autre aspect qui me semble important, se situe effectivement à un niveau trop élevé dans notre pays, comme dans l’ensemble des États européens. Mais, depuis un an, la baisse est de 7 %, et il faut encore l’accentuer. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Nous savons pertinemment qu’un jeune qui apprend son métier et à l’école et en entreprise a beaucoup plus de chances de garder son emploi ou d’en trouver un autre. Voilà pourquoi nous nous engagerons davantage dans cette voie. Dès la semaine prochaine, je commencerai, avec Nadine Morano, à recevoir les partenaires sociaux pour formuler de nouvelles propositions en matière d’alternance.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les patrons ne prennent même pas de stagiaires !
M. Xavier Bertrand, ministre. Enfin, vous nous dites que l’effort du Gouvernement diminue. Disons les choses très clairement : en 2009, 290 000 contrats aidés ont été signés dans le secteur non marchand. L’an prochain, grâce au budget qui a été voté par la majorité, leur nombre passera à 340 000.
Cela démontre bien que nous sommes conscients de la nécessité de sortir de la crise le plus rapidement possible et que, pour nos concitoyens, le marqueur de la sortie de crise, ce sera la baisse durable du chômage.
M. David Assouline. Pour une fois, je suis d’accord !
M. Xavier Bertrand, ministre. C’est notre priorité. Il ne tient qu’à vous de changer d’attitude et de nous aider à relever encore plus vite ce défi. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
transports ferroviaires en île-de-france
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye.
M. Dominique Braye. Monsieur le président, madame la ministre d’État, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État chargé des transports. Je précise qu’elle a été préparée avec notre collègue des Yvelines Bernadette Dupont, et je sais toute l’attention que le président Gérard Larcher y porte.
Le 17 novembre dernier, la Cour des comptes a rendu public un rapport sur les transports ferroviaires en Île-de-France : réseau inadapté et saturé, qualité de service dégradée, infrastructures vieillissantes, retards d’investissements,…
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Sous-investissement de l’État !
M. Dominique Braye. … déséquilibres financiers. Le constat de la Cour est très sévère pour l’autorité organisatrice des transports régionaux, le Syndicat des transports d’Île-de-France, le STIF, pour les opérateurs de transport, la SNCF et la RATP, ainsi que pour Réseau ferré de France.
Ce constat de la Cour des comptes rejoint malheureusement celui qui est fait quotidiennement par les centaines de milliers d’utilisateurs des transports franciliens, notamment dans le département des Yvelines, sur l’ensemble des lignes du Transilien, qu’il s’agisse des lignes SNCF ou des lignes RER A et C, exploitées conjointement avec la RATP.
M. Didier Boulaud. Ça doit faire longtemps qu’il ne les a pas prises !
M. Dominique Braye. Toutes les destinations yvelinoises sont concernées, que ce soit Versailles, Saint-Germain-en-Laye, Mantes-la-Jolie, Rambouillet, Poissy, Conflans-Sainte-Honorine, pour ne citer que les principales.
Depuis quelques années, on observe sur toutes ces lignes une très nette dégradation des conditions de transport, la saturation du réseau entraînant un manque de régularité du trafic et de ponctualité des rames, notamment aux heures de pointe, insupportable pour nos concitoyens.
Ces graves dysfonctionnements constituent un véritable frein au développement durable du département et pénalisent fortement la qualité de vie d’un grand nombre de nos concitoyens yvelinois, sans parler du handicap indiscutable que cela constitue pour trouver ou même conserver un emploi.
Ce service dégradé illustre ce que la Cour des comptes pointe, à savoir que la SNCF et RFF négligent depuis trop longtemps la rénovation du réseau francilien, alors même que le trafic s’est accru de 20 % à 30 % au cours de la seule décennie passée.
S’il est évident que de très importants efforts doivent être faits par le STIF poux y remédier, notamment dans ses relations contractuelles avec la SNCF, il semble que l’on puisse aussi regretter l’absence de stratégie concertée avec l’État.
Monsieur le secrétaire d’État, alors que des investissements massifs vont être consentis dans le cadre du futur réseau de transport du Grand Paris,…
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Avec quel argent ?
M. Dominique Braye. … comment pensez-vous agir pour que l’État contribue à la remise à niveau urgente et indispensable de l’actuel réseau de transport ferroviaire yvelinois et francilien, si largement défaillant ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des transports.
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, chargé des transports. Monsieur le sénateur, comme vous le savez, l’organisation des transports en Île-de-France relève du syndicat des transports d’Île-de-France, sous la responsabilité du président du conseil régional d’Île-de-France. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Nicole Bricq et M. Jacques Mahéas. Depuis quand ?
Mme Raymonde Le Texier. Vous vous êtes débarrassés du ferroviaire francilien faute d’avoir su l’entretenir !
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État. Cependant, l’État est particulièrement attentif à l’amélioration de la qualité du service offert aux usagers des transports collectifs en Île-de-France, et notamment dans les Yvelines.
L’effort de l’État repose sur trois axes : premièrement, la rénovation des infrastructures ; deuxièmement, le renouvellement du matériel roulant ;…
Mme Nicole Bricq. Il est laissé à l’abandon !
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État. … troisièmement, la création d’infrastructures nouvelles.
L’engagement de l’État représente au total près de 1,4 milliard d’euros.
Au-delà de cet effort financier, monsieur le sénateur, les entreprises responsables des transports collectifs en Île-de-France ont lancé des programmes de modernisation du matériel roulant : acquisition de 172 rames de la nouvelle automotrice et rénovation des rames à deux niveaux des lignes C et D du RER ;…
M. Jacques Mahéas. Grâce à qui ?
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État. … amélioration des réseaux Paris Est et Paris Sud-est et des trains RER B.
M. Yannick Bodin. Ayez donc le courage de dire qui a pris la responsabilité de cela ?
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État. Toutefois, nous en sommes conscients, ces efforts ne sont pas suffisants pour répondre à l’ensemble des besoins de déplacement des Franciliens.
C’est pourquoi le Président de la République a annoncé en 2009 un programme d’investissement de 35 milliards d’euros en faveur des transports collectifs en Île-de-France jusqu’en 2025.
Mme Nicole Bricq. Il n’y a pas de sous !
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État. Ce programme recouvre le projet de rocade par métro automatique, mais aussi l’extension et l’amélioration du réseau existant.
D’autres projets de transports collectifs contribueront à améliorer l’accessibilité dans les Yvelines. Je citerai le prolongement de la tangentielle ouest, le projet de tramway reliant Châtillon à Viroflay, qui est en cours de réalisation, le projet de réaménagement du pôle d’échange multimodal de Versailles, chantier qui est inscrit au contrat de projet 2007-2013.
Les Yvelines, par ailleurs, bénéficieront du prolongement du RER E à l’ouest, pour relier la gare Haussmann-Saint-Lazare à Mantes-la-Jolie, en passant par le secteur de la Défense. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Il faut également, monsieur le sénateur, remédier de façon urgente à la saturation de la ligne A du RER. Ce projet prioritaire, qui représente plus de 2 milliards d’euros, est actuellement soumis à un débat public et devrait être mené à bien à l’horizon 2020.
M. Didier Boulaud. Il n’y a plus un sou ! C’est la faillite !
M. Thierry Mariani, secrétaire d'État. Soyez assuré, monsieur le sénateur, que l’État mettra en place, dans les Yvelines comme dans l’ensemble de la région d’Île-de-France, avec l’ensemble des acteurs concernés, les financements nécessaires à la réalisation de ces projets. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
outre-mer et europe
M. le président. La parole est à M. Serge Larcher.
M. Serge Larcher. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous sommes à la veille de la réforme de la politique de cohésion européenne, qui va intervenir dans un cadre budgétaire européen assurément contraint.
Le commissaire européen à la politique régionale, M. Johannes Hahn, a présenté le 10 novembre dernier le cinquième rapport de la Commission sur la cohésion en Europe.
Ce rapport dessine les grandes orientations stratégiques que la Commission entend proposer pour les fonds structurels après 2013.
C’est un enjeu important pour nos régions ultrapériphériques, ou RUP, qui reçoivent, pour la période 2007-2013, une enveloppe de 3,2 milliards d’euros dans le cadre de l’objectif « convergence » et de l’allocation spéciale du FEDER, au titre des contraintes géographiques auxquelles elles sont soumises, notamment l’éloignement.
Cette dotation complémentaire du FEDER, baptisée « allocation de compensation des surcoûts liés aux handicaps structurels », s’élève à 35 euros par habitant et par an, ce qui représente 482 millions d’euros pour les quatre départements d’outre-mer actuels. Elle est destinée aux RUP mais aussi aux régions septentrionales. Quel avenir pour ces fonds ?
La combinaison des critères d’éligibilité et de la baisse du PIB moyen de l’Union, à la suite de l’élargissement, suscite l’inquiétude de certaines RUP, susceptibles de ne plus être éligibles à l’objectif « convergence » ; c’est, par exemple, le cas de la Martinique.
Toutefois, la Commission a annoncé son projet de créer un nouvel objectif intermédiaire pour les régions dont le PIB se situerait entre 75 % et 90 % de la moyenne du PIB communautaire, ce qui est de nature à apaiser en partie les esprits sur ce point.
En revanche, l’avenir de l’allocation spécifique pour les RUP est loin d’être garanti : le cinquième rapport sur la cohésion ne donne, à ce sujet, aucune assurance, et les réserves, voire les réticences de nos partenaires européens sur ce point particulier sont connues. Rappelons-nous avec quelles difficultés cette allocation fut mise en place pour la période 2007-2013 !
En outre, je ne m’inquiète pas seulement du montant des fonds dont bénéficieront les RUP après 2013. Je suis aussi préoccupé par la volonté affichée par la Commission de concentrer les fonds de cohésion uniquement sur les domaines relevant de la stratégie de croissance d’« Europe 2020 ».
Il importe de garder une certaine souplesse pour accorder aux priorités d’« Europe 2020 » une importance adaptée au contexte local, et permettre, par exemple, la réalisation d’infrastructures dans les départements d’outre-mer.
Madame la ministre, quelles actions entendez-vous mener pour assurer la continuité de cette allocation spécifique après 2013 et pour soutenir, par le biais des fonds de cohésion, le développement de nos départements d’outre-mer ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée de l’outre-mer. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Marie-Luce Penchard, ministre auprès du ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration, chargée de l’outre-mer. Vous avez raison, monsieur le sénateur, de rappeler l’enjeu considérable que représentent les fonds structurels destinés à l’outre-mer puisque l’enveloppe se monte à plus de 3 milliards d’euros.
M. Bruno Sido. C’est énorme !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Vous connaissez mon engagement et ma détermination pour faire reconnaître les problèmes de l’outre-mer au niveau européen. J’ai insisté personnellement, à plusieurs reprises, auprès du commissaire européen Johannes Hahn afin que l’Europe prenne en compte la nécessité de cette enveloppe. Le Gouvernement a ainsi veillé à ce que son montant soit bien inscrit dans le mémorandum conjoint entre les États membres et les régions ultrapériphériques, signé lors de la XVe conférence des présidents des régions ultrapériphériques de l’Union européenne, qui s’est tenue à Las Palmas, dans les îles Canaries, le 15 octobre dernier.
Lors de cette conférence, j’ai également rappelé l’importance du maintien de l’allocation visant à compenser les surcoûts liés aux handicaps spécifiques de nos territoires.
Comme vous le savez, le chemin est encore long...
M. Didier Boulaud. Et la pente est rude ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Nous n’en sommes qu’au début des négociations. En effet, afin de déterminer la stratégie de l’Europe à l’égard de l’outre-mer, la Commission doit adopter préalablement une communication, qui sera établie sur la base de ce mémorandum.
M. David Assouline. Ce n’est pas la même chose !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Ce travail est en cours et nous en attendons le résultat.
Par ailleurs, la Commission vient d’engager un débat très important sur la politique de cohésion territoriale, qui permettra vraisemblablement de guider les perspectives financières. Nous n’en connaissons pas encore les conclusions.
Je tiens à vous rassurer, monsieur le sénateur : nous suivons ce processus depuis plus d’un an,...
M. Didier Boulaud. À distance !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. ... et nous veillons à ce que l’outre-mer ne soit pas oublié par l’Europe.
Le Gouvernement est d’autant plus mobilisé sur ce dossier que, Mayotte étant appelé à bénéficier du statut des régions ultrapériphériques, nous avons absolument besoin de ces crédits pour soutenir le développement économique de nos territoires. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. David Assouline. En fait, vous n’avez rien dit !