Mme Mireille Schurch. Cet amendement devait être défendu par ma collègue Annie David, mais il me tient aussi à cœur, étant Auvergnate et originaire d’une zone de montagne.
Cela vient d’être dit, il s’agit de mettre en œuvre la reconnaissance d’une dénomination « montagne » spécifique, mais au niveau de l’Union européenne, avant, peut-être, de l’obtenir un jour au niveau mondial : il y a des montagnes sur tous les continents et les enjeux liés à la spécificité de ces territoires ignorent tout clivage. À cet égard, permettez-moi de vous rappelez l’existence de l’Association européenne des élus de montagne et de l’Association des populations des montagnes du monde.
Cette reconnaissance à l’échelle européenne passe notamment par la promotion des produits fabriqués en montagne. Aussi, le label « Indication géographique protégée », garant de la qualité du produit, est un outil parfaitement adapté pour promouvoir ces produits au niveau européen. Il importe de plaider la cause d’une IGP « montagne » auprès de l’Union européenne, car celle-ci permettrait de protéger la véritable origine de ces produits dans toute l’Europe.
L’objet de cet amendement est d’ailleurs en parfaite cohérence avec l’article 179 de la loi relative au développement des territoires ruraux, qui précise : « Le Gouvernement s’attache à promouvoir auprès de l’Union européenne et des instances internationales compétentes la reconnaissance du développement durable de la montagne comme un enjeu majeur. À cet effet, il peut proposer toute action ou initiative pouvant concourir à cet objectif et y associe, le cas échéant, les organisations représentatives des populations de montagne. »
On ne peut qu’approuver le principe général énoncé dans cet article, et l’amendement tend à préciser et à compléter, en partie, l’engagement de la République.
Lors du débat en commission, le rapporteur a proposé, pour répondre à cette exigence, une résolution européenne. Notre proposition n’est en rien contradictoire ; au contraire, elle donnera plus de poids à la résolution, qui, vous le savez, n’a pas de valeur contraignante, mais marque simplement l’expression d’une volonté.
Aussi, le fait d’inscrire dans la loi l’engagement du Gouvernement à promouvoir auprès de l’Union européenne la reconnaissance de la dénomination « montagne » comme un signe officiel d’origine et de qualité de niveau européen serait un premier pas.
C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous invite à adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Marsin, pour présenter l’amendement n° 529 rectifié.
M. Daniel Marsin. Si François Fortassin, élu de montagne, avait été parmi nous ce soir, il aurait défendu cet amendement avec toute l’inspiration qu’on lui connaît ! En son absence, je me contenterai de me ranger aux explications qui viennent d’être données par notre collègue du groupe CRC-SPG, puisque son amendement est identique au nôtre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les trois amendements restant en discussion ?
M. Gérard César, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur l’amendement 114 rectifié, ainsi que sur les amendements identiques nos 330 rectifié et 529 rectifié, qui traitent tous du même sujet.
Cela me rappelle les débats que nous avons eus dans le cadre de la discussion de la loi d’orientation agricole et de la loi relative au développement des territoires ruraux, adoptée en 2005 et dont le président Emorine était l’un des rapporteurs. Nous avions alors discuté pendant très longtemps de l’appellation « montagne » et du concours qu’elle pouvait apporter au niveau national.
Mme Schurch l’a rappelé fort opportunément, une telle dénomination n’est pas reconnue au niveau communautaire ; seuls les AOC, IGP et STG sont, elles, reconnues.
Le problème des mentions valorisantes tient à leur nombre, trop grand, ce qui les rend peu lisibles pour le consommateur. Il n’est donc pas certain que l’ajout d’un nouveau label puisse résoudre le problème.
Aujourd’hui, il est impossible pour le consommateur de s’y retrouver. C’est la raison pour laquelle le président Emorine a proposé que soit un jour remis sur la table le dossier des IGP, AOP, AOC, STG, and so on, comme disent les Espagnols. (Sourires.)
L’engagement demandé au Gouvernement concernant la dénomination « montagne » trouverait toute sa place dans une proposition de résolution européenne, mais pas vraiment dans la loi, car cela constituerait alors une injonction.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Maire, ministre. Quel que soit l’attachement que l’on peut avoir par ailleurs pour la montagne, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les trois amendements, et ce pour trois raisons.
Premièrement, les IGP répondent à un certain nombre de critères précis, ciblent des espaces géographiques beaucoup plus délimités que le terme « montagne » et des produits bien déterminés, tels que le sel de Guérande, les fraises du Périgord, le foie gras du Sud-Ouest ou le jambon de Bayonne. L’appellation « montagne », si elle était adoptée, serait, elle, beaucoup plus générale.
Deuxièmement, la montagne est une mention valorisante au titre du code rural, et nous sommes prêts à proposer à l’Union européenne de l’étendre au niveau communautaire. Cela ne pose pas de difficultés.
Troisièmement, l’enfer étant toujours pavé de bonnes intentions, mieux vaut, à mon sens, y réfléchir à deux fois avant de porter un tel dossier.
M. Gérard César, rapporteur. Ah oui !
M. Bruno Le Maire, ministre. J’ai peur en effet qu’une mention aussi globalisante ne soit finalement pas tellement valorisante pour le produit concerné. La force des AOC ou des IGP, c’est qu’elles correspondent à des produits très précis et clairement identifiés par les consommateurs.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 330 rectifié et 529 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 1er ter (nouveau)
Après la section 2 du chapitre III du titre III du livre II du code rural, il est inséré une section 3 ainsi rédigée :
« Section 3
« Dispositions relatives à la formation
« Art. L. 233-4. – Le fonctionnement des établissements de production, de transformation, de préparation, de vente et de distribution de produits alimentaires peut être subordonné à la présence d’une personne pouvant justifier d’une formation spécifique en matière d’hygiène alimentaire adaptée à l’activité de l’établissement concerné.
« Sans préjudice des dispositions prévues à l’article L. 233-1, les personnes pouvant justifier d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans au sein d’une entreprise du secteur alimentaire comme gestionnaire ou exploitant sont réputées avoir satisfait à l’obligation de formation mentionnée au premier alinéa.
« Un décret précise la liste des établissements concernés par l’obligation mentionnée au premier alinéa et précise les conditions auxquelles doivent répondre les organismes délivrant cette formation.
« Le contenu et la durée de la formation mentionnée au premier alinéa sont définis par arrêté du ministre chargé de l’alimentation. »
M. le président. L’amendement n° 38, présenté par M. Virapoullé, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 400, présenté par M. Lecerf et Mme Descamps, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
ou d’une formation adaptée au sein des établissements d’enseignement agricole
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 111, présenté par M. Fauconnier, Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni, Antoinette et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Gillot, S. Larcher, Lise, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patient, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Rebsamen, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
après validation des acquis de l’expérience
La parole est à Mme Odette Herviaux.
Mme Odette Herviaux. Avec l’article 1er ter, nous abordons la question de la formation des personnes qui seront chargées d’appliquer les règles d’hygiène alimentaire dans les établissements concernés.
Nous proposons que l’obligation de formation ne s’applique pas aux personnes pouvant justifier d’une certaine expérience, sous réserve qu’elles aient procédé auparavant à la validation des acquis de leur expérience.
L’article 1er ter permet de subordonner le fonctionnement des établissements de production, de transformation, de préparation, de vente et de distribution de produits alimentaires à la présence d’une personne formée en matière d’hygiène alimentaire.
Monsieur le ministre, vous avez souhaité que le Gouvernement puisse être habilité à prendre une ordonnance sur cette obligation de formation. Nous aurions bien sûr préféré que la commission choisisse de préciser directement dans la loi de quoi il s’agissait.
Monsieur le rapporteur, comme vous l’avez souligné, une telle obligation peut constituer une réponse au problème récurrent du niveau sanitaire insatisfaisant constaté dans nombre d’établissements du secteur alimentaire.
Toutefois, l’article 1er ter précise également que les personnes pouvant justifier d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans au sein d’une entreprise du secteur alimentaire comme gestionnaire ou exploitant « sont réputées avoir satisfait à l’obligation de formation ».
Dans la mesure où il s’agit d’un domaine très vaste et extrêmement complexe, une telle précision ne nous semble pas totalement pertinente, car rien ne nous garantit que la seule expérience permette aux personnes d’acquérir les connaissances nécessaires en matière d’hygiène alimentaire.
Nous souhaitons donc préciser que ces personnes doivent d’abord réaliser une validation des acquis de l’expérience, ou VAE, afin de vérifier qu’elles peuvent réellement prétendre à l’obtention d’un certificat de qualification professionnelle.
La VAE, je le rappelle, est une mesure permettant justement à toute personne, quels que soient son âge, son niveau d’études ou son statut, de faire valider les acquis de son expérience professionnelle, non pas forcément pour aller systématiquement en formation, mais pour obtenir l’équivalent d’un diplôme, d’un titre ou d’un certificat de qualification professionnelle. Elle constitue, à nos yeux, la voie légale à emprunter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard César, rapporteur. L’article 1er ter prévoit que les personnes justifiant d’une expérience professionnelle d’au moins trois ans sont dispensées de la formation obligatoire à l’hygiène, afin de ne pas alourdir les contraintes dans le secteur alimentaire.
Imposer une procédure de validation des acquis de l’expérience me paraît une contrainte trop lourde. Dans ces conditions, la formation finirait par s’imposer à tout le monde, ce qui n’est pas notre objectif commun.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 111.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Bruno Le Maire, ministre. Le Gouvernement émet pour les mêmes raisons un avis défavorable.
L’intention des auteurs de l’amendement est louable, mais la formation ici prévue a pour objet la maîtrise des conditions minimales d’hygiène dans un secteur d’activité. Par rapport à la nature de cette formation, qui est censée durer très peu de temps, une vingtaine d’heures environ, la procédure de validation des acquis de l’expérience me semble donc quelque peu disproportionnée.
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er ter.
(L’article 1er ter est adopté.)
Article 1er quater (nouveau)
Le titre Ier du livre VIII du code rural est ainsi modifié :
1° L'article L. 811-1 est ainsi modifié :
a) Après la première phrase du premier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Ils contribuent à l’éducation au développement durable et à la mise en œuvre de ses principes. » ;
b) Le 4° est ainsi rédigé :
« 4° Ils contribuent aux activités de développement, d'expérimentation et d'innovation agricoles et agroalimentaires. » ;
2° L'article L. 811-8 est ainsi modifié :
a) Les quatre premiers alinéas sont remplacés par six alinéas ainsi rédigés :
« I. – Tout établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole assure une formation générale, technologique et professionnelle initiale et peut dispenser une formation continue, dans les métiers énoncés à l'article L 811-1.
« À ce titre, il regroupe plusieurs centres :
« 1° Un ou plusieurs lycées d'enseignement général et technologique agricole, lycées professionnels agricoles ou lycées d'enseignement général, technologique et professionnel agricole ;
« 2° Un ou plusieurs centres de formation professionnelle et de promotion agricoles ou centres de formation d'apprentis qui dispensent les formations mentionnées au présent chapitre ;
« 3° Un ou plusieurs ateliers technologiques ou exploitations agricoles à vocation pédagogique qui assurent l'adaptation et la formation aux réalités pratiques, techniques et économiques, et qui contribuent à la démonstration, à l'expérimentation et à la diffusion des techniques nouvelles.
« Il a pour siège soit un lycée d'enseignement général et technologique agricole, soit un lycée professionnel agricole, soit un lycée d'enseignement général, technologique et professionnel agricole et dispose d’un centre relevant de chacune des catégories mentionnées aux 2° et 3° » ;
b) Le sixième alinéa est supprimé ;
c) Au début du dixième alinéa est insérée la mention : « II.- » ;
d) Après le dixième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sous réserve de l'autorisation préalable de l'autorité académique, la partie pédagogique du projet d'établissement peut prévoir la réalisation d'expérimentations, d'une durée maximale de cinq ans, portant sur l'enseignement et son organisation, et l'organisation pédagogique de la classe ou de l'établissement. Ces expérimentations sont préparées par le conseil de l'éducation et de la formation prévu à l'article L. 811-9-1. Elles font l'objet d'une évaluation annuelle. » ;
3° Après l'article L. 811-9, il est inséré un article L. 811-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 811-9-1. – Dans chaque établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole, il est institué un conseil de l'éducation et de la formation présidé par le chef d'établissement. Il a pour mission de favoriser la concertation notamment entre les professeurs et les formateurs, en particulier sur l'élaboration de la partie pédagogique du projet d'établissement et sur l'individualisation des parcours de formation des élèves, étudiants, apprentis et stagiaires. Il prépare les expérimentations pédagogiques prévues à l'article L. 811-8. Sa composition est fixée par décret. » ;
4° L'article L. 813-1 est ainsi modifié :
a) Après la première phrase du deuxième alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Ils contribuent à l’éducation au développement durable et à la mise en œuvre de ses principes » ;
b) Le 4° est ainsi rédigé :
« 4° Ils contribuent aux activités de développement, d'expérimentation et d'innovation agricoles et agroalimentaires ; »
5° Après le cinquième alinéa de l’article L. 813-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sous réserve de l'autorisation préalable de l'autorité académique, la partie pédagogique du projet d'établissement peut prévoir la réalisation d'expérimentations, d'une durée maximale de cinq ans, portant sur l'enseignement et son organisation, et l'organisation pédagogique de la classe ou de l'établissement. Ces expérimentations font l'objet d'une évaluation annuelle. » ;
6° L’intitulé du chapitre premier est ainsi rédigé : « Dispositions relatives à l’enseignement et à la formation professionnelle publics aux métiers de la nature, de l’agriculture et des territoires » ;
7° À la première phrase des premier et dernier alinéas de l’article L. 811-1, à la première phrase des premier et deuxième alinéas de l’article L. 811-2, les mots : « l'enseignement et la formation professionnelle agricoles publics » sont remplacés par les mots : « l'enseignement et la formation professionnelle publics aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires » ;
8° À la troisième phrase du premier alinéa de l'article L. 811-2, les mots : « formation professionnelle agricoles » sont remplacés par les mots : « formation professionnelle aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires » ;
9° À la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 811-2, les mots : « formation professionnelle agricoles publics » sont remplacés par les mots : « formation professionnelle aux métiers de la nature, de l’agriculture et des territoires » ;
10° À la première phrase du dixième alinéa de l'article L. 811-8, les mots : « formation professionnelle agricoles publics » sont remplacés par les mots : « formation professionnelle publics aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires » ;
11° À la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 813-1, les mots : « formation professionnelle agricoles » sont remplacés par les mots « formation professionnelle aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires » ;
12° Au dernier alinéa de l’article L. 813-1 et à la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 813-2, les mots : « formation professionnelle agricoles privés » sont remplacés par les mots : « formation professionnelle privés aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires » ;
13° Au quatrième alinéa de l’article L. 813-2, les mots : « formation professionnelle agricoles privés » sont remplacés par les mots : « formation professionnelle privés aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires » ;
14° À la dernière phrase du troisième alinéa de l’article L. 814-2, les mots : « formation professionnelle agricoles » sont remplacés par les mots : « formation professionnelle aux métiers de la nature, de l'agriculture et des territoires ».
M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, sur l'article.
Mme Françoise Férat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cela ne vous surprendra pas que je parle à nouveau de l’enseignement agricole. (Sourires.)
Je tenais tout d’abord à remercier le président de la commission, les rapporteurs, ainsi que l’ensemble de ses membres pour l’adoption de mon amendement, pour avoir entendu mes arguments et compris l’importance de l’enseignement agricole et de ses évolutions. Je pense pourvoir affirmer que, même s’il reste encore beaucoup à faire, cet article est une avancée significative.
Notre système éducatif, nos territoires ruraux et notre agriculture ont entre leurs mains un enseignement doté d’un fort potentiel et d’une identité originale, et qui a confirmé au fil des années son succès. Il constitue, à mon sens, une richesse qu’il nous faut valoriser et préserver.
Les assises de l’enseignement agricole public ayant tracé de nouvelles perspectives, les propositions qui ont été retenues conduisent à adapter le cadre législatif aux évolutions rencontrées, sans oublier les enjeux auxquels doit faire face le système éducatif. Je souhaite les évoquer ici.
Premièrement, en ce qui concerne l’éducation au développement durable, la loi relative à la mise en œuvre du Grenelle prévoit qu’elle soit portée par les établissements scolaires, en particulier par les lycées agricoles. Leur savoir-faire, lié au vivant et aux territoires, leur permet d’être particulièrement performants en matière de développement durable.
C’est pourquoi il est proposé de l’inscrire au cœur même des objectifs de l’enseignement et de la formation professionnelle agricoles, publics et privés.
Deuxièmement, pour ce qui est de l’innovation agricole et agroalimentaire, il est proposé de moderniser l’intitulé de la mission, en tenant compte des politiques publiques contemporaines, et de confirmer son rôle dans les processus d’innovations agricoles et agroalimentaires.
Troisièmement, s’agissant des établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricole, qui sont implantés sur tout le territoire, il est proposé, non de revenir sur le principe de complétude de l’offre des voies de formations prévues par la loi d’orientation de 1999, mais d’en imposer le respect au niveau pertinent qu’est l’établissement, au lieu du seul lycée.
Quatrièmement, les expérimentations pédagogiques dans le projet d’établissement n’interviendront qu’en cohérence avec les axes du schéma prévisionnel national des formations, et feront l’objet tout à la fois d’une autorisation préalable de l’autorité académique et d’une évaluation annuelle.
Cinquièmement, les réformes de la voie professionnelle et du lycée, ainsi que l’autonomie pédagogique grandissante qu’elles impliquent, nécessitent un pilotage renforcé au sein de l’établissement, condition que ne satisfont pas pleinement les dispositions existantes. Il est donc proposé de créer un conseil de l’éducation et de la formation au sein de chaque établissement public.
Sixièmement, force est de constater que l’enseignement agricole souffre aujourd’hui d’un déficit d’image. C’est pourquoi il importe, et ce point me tient particulièrement à cœur, de faire connaître par sa dénomination la diversité des métiers auquel il prépare, des métiers qui sont ancrés non plus simplement dans les réalités agricoles, mais plus largement dans les territoires et la ruralité.
Les difficultés qu’éprouvent les jeunes à s’orienter vers l’enseignement agricole tiennent à leur méconnaissance de ce système d’enseignement et de formation. Sur ce sujet, il nous faut faire preuve d’ingéniosité et d’ouverture, et mettre en place des actions de communication.
Les établissements d’enseignement agricole constituent de réels lycées des métiers. Malheureusement, ils restent mal connus de nos concitoyens et la diversité des formations et des métiers préparés est masquée par sa dénomination actuelle. Cela rend difficile la perception pour les jeunes, les familles, mais aussi les adultes qui recherchent des formations.
Au-delà de ces opérations ponctuelles, il nous fallait également envisager de changer l’appellation elle-même. Monsieur le ministre, vous m’avez confié la délicate mission de travailler sur une nouvelle dénomination et sur l’image de l’enseignement agricole dans son ensemble.
C’est un exercice enthousiasmant mais complexe, car chaque mot a son importance, et, justement, comme j’ai pu le constater, chacun voulait apporter « son mot », sa pierre à l’édifice.
Après de nombreuses auditions en présence des représentants d’enseignants, des représentants syndicaux, d’élèves, de parents d’élèves et des ministères concernés – je peux d’ailleurs vous affirmer que tous mes interlocuteurs se sont particulièrement investis – la dénomination retenue serait celle-ci : « l’enseignement et la formation professionnelle aux métiers de la nature, de l’agriculture et des territoires ».
Pour conclure, je crois nécessaire de rappeler encore et toujours quelques chiffres, car ils parlent d’eux-mêmes. Globalement, nous constatons plus de 90 % de réussite aux examens, plus de 92 % d’intégration professionnelle. Quelle autre filière peut se prévaloir de tels résultats ?
Les valeurs véhiculées par l’enseignement agricole, fort d’une pédagogie qui formera d’excellents professionnels, feront également des citoyens, des hommes et des femmes responsables et épanouis dans leur vie, sans oublier que l’ancrage territorial de ses établissements participe à l’animation et au développement de nos espaces ruraux.
Faut-il rappeler que l’enseignement agricole accompagne, depuis son origine, les mutations du monde agricole et des territoires ?
Faut-il rappeler que les établissements forment des élèves, des étudiants, des apprentis et des stagiaires de la formation continue dans des secteurs variés, non seulement l’agriculture, mais aussi l’alimentation, l’environnement, les services, le paysage, qui font tous les métiers d’aujourd’hui et, à n’en pas douter, ceux de demain ?
Je pense que l’article 1er quater contribue au bon développement de cette filière d’exception, qui prend toute sa place dans le paysage éducatif. C’est pourquoi, mes chers collègues, je compte sur vous pour le soutenir et le voter.
Je suis persuadée que l’enseignement agricole est plus que jamais une chance pour l’avenir de nos jeunes et de nos territoires. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je souhaite, tout d’abord, dénoncer la méthode par laquelle l’enseignement agricole a été introduit dans ce projet de loi. Absent dans la version initiale, l’enseignement agricole n’est finalement introduit que par un article additionnel voté en commission.
Il transcrit d’ailleurs cinq des soixante mesures annoncées par le ministère de l’agriculture dans le pacte de décembre 2009, adopté à l’issue des assises de l’enseignement agricole public.
Alors que nous sommes en plein débat sur l’application du Grenelle de l’environnement et dans une dynamique de développement durable indispensable qu’il faut susciter et amplifier dans notre pays, comment imaginer qu’il ne soit pas fait mention de la formation dans un projet de loi dit de modernisation ?
Le Gouvernement n’a de cesse de proclamer que l’enseignement agricole public est une voie d’excellence et de réussite. En effet, les taux de succès aux examens et d’insertion professionnelle des élèves attestent que tel est bien le cas.
L’enseignement agricole participe efficacement à l’insertion et à la lutte contre l’échec scolaire, grâce à des spécificités pédagogiques en lien avec les territoires. Mais, malgré de belles paroles, le Gouvernement maltraite – et je pèse mes mots, monsieur le ministre – l’enseignement agricole par une insécurité budgétaire insupportable.
Depuis plusieurs années, du fait des suppressions de postes et d’une sous-évaluation du plafond des emplois tant administratifs qu’enseignants, nous sommes contraints à de véritables bricolages budgétaires : ponction, notamment de moyens sur l’éducation nationale, déblocage de postes dans l’urgence, comme les soixante postes en septembre dernier.
Et pourtant, grande devrait être notre ambition pour un enseignement agricole innovant, performant, diversifié. Or les mesures avancées dans cet article additionnel vont contribuer à bouleverser en profondeur les structures éducatives existantes.
Outre l’inscription dans le marbre de l’autonomie des établissements d’enseignement agricole, notamment dans le domaine pédagogique, et contre laquelle nous avons déposé des amendements, le bouleversement sous-jacent est celui de la fusion à venir de nombreux établissements existants.
L’article, tel qu’il est formulé, en rendant obligatoire la présence des formations générales, technologiques et professionnelles initiales dans tout établissement d’enseignement agricole, rend de fait inévitable le regroupement de différents établissements, notamment des plus petits et des plus isolés en milieu rural.
Tous les lycées agricoles ne proposent pas de filière générale scientifique : que vont-ils devenir, si ce n’est une annexe, après fusion avec un établissement plus grand, lequel proposera, lui, des filières générales ?
L’innovation pédagogique sert de prétexte à l’application de la RGPP, sans tenir compte des réalités de terrain, de l’importance des lycées professionnels agricoles, du moins si l’on veut obtenir un maillage éducatif fin du territoire national.
Quel est l’intérêt de regrouper des établissements, de mélanger des publics – élèves, étudiants, adultes, apprentis – si ce n’est pour désengager les finances de l’État, en captant les budgets des régions destinés à la formation professionnelle, supprimer des postes, fermer des classes à faibles effectifs et fusionner des filières et des formations ?
Nos amendements ont, en partie, pour objet de permettre aux petites structures de l’enseignement agricole d’être préservées et de continuer à remplir leurs missions de proximité.
Enfin, je souhaite dire un mot de la situation de mise en concurrence des enseignements agricoles public et privé, notamment dans le cadre budgétaire, mais aussi en ce qui concerne la mission d’éducation et de service public, désormais complètement offerte au secteur privé.
Le rapport public-privé dans l’enseignement agricole ne cesse d’évoluer au détriment du public, qui est en recul constant depuis 2002. Ce rapport est, pour résumer, à l’exact opposé de celui qui est constaté dans l’éducation nationale. Dans certaines régions, comme la Picardie et les Pays-de-la-Loire, la part de l’enseignement public est même passée sous la barre des 20 %.
Aujourd’hui, le ministère de l’agriculture répond à la demande sociale de formation en répartissant les formations indistinctement entre public et privé.
Or, mes chers collègues, l’État a une responsabilité : pérenniser et diversifier l’offre publique d’éducation, afin de garantir l’accès à un enseignement public gratuit sur l’ensemble du territoire national.