M. Jean-Pierre Sueur. … mais il est urgent de ne pas l’adopter !
Monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, j’ai bien entendu vos propos, mais je me permets de vous rappeler, avec beaucoup de modestie, que vous avez la possibilité d’amender ce texte en vue de l’améliorer.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Avec certaines limites !
M. Jean-Pierre Sueur. Madame le ministre d’État, j’ai cru voir poindre dans vos propos l’idée selon laquelle on ne saurait traiter une question aussi sérieuse et importante à la faveur d’une simple proposition de loi. Il fallait un projet de loi qui présentât…
M. Nicolas About. Toutes les garanties !
M. Jean-Pierre Sueur. … toute l’ambition requise.
En ma qualité de parlementaire, je me permettrai de contester cette sorte de hiérarchie que l’on voudrait instaurer entre les propositions de loi et les projets de loi, comme si les seconds atteignaient une dignité à laquelle les premières ne pourraient prétendre !
M. Nicolas About. Quelquefois, les projets de loi deviennent des propositions de loi !
M. Jean-Pierre Sueur. À cet égard, je me référerai tout simplement, ce qui ne vous étonnera pas, madame le ministre d’État, mes chers collègues, à la Constitution, qui prévoit que l’initiative de la loi revient, à égalité, au Gouvernement et au Parlement.
Aussi, je le répète, il serait souhaitable d’adopter la proposition de loi de notre ami Jacques Mézard, fût-elle amendée – car nous sommes là pour cela ! –, plutôt que de renvoyer perpétuellement ce texte à la commission.
M. François Zocchetto, rapporteur. Pas perpétuellement !
M. Jean-Pierre Sueur. J’ai bien entendu M. le rapporteur et toutes ses arguties, mais nous connaissons ses compétences sur ce dossier. Nous sommes donc bien peinés de le voir…
M. Jean-Pierre Michel. Se contorsionner !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il s’en remettra ! (M. le rapporteur le confirme.)
M. Jean-Pierre Sueur. … se contorsionner en effet pour nous expliquer qu’il est urgent de traiter cette question essentielle, mais qu’il convient de renvoyer le texte à la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Certainement !
M. Jean-Pierre Sueur. Chers collègues de droite, vous allez sans doute voter la motion tendant au renvoi à la commission, mais faites-moi l’amitié de reconnaître que vous n’êtes pas convaincus !
M. Jean-Pierre Chauveau. Si, nous en sommes convaincus !
M. Jean-Pierre Sueur. Vous le dites, mon cher collègue, mais vous n’en avez pas l’air du tout !
Mme Catherine Troendle. Nous le sommes !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous savons bien qu’il n’en est rien !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C’est incroyable !
M. Jean-Pierre Sueur. Si j’avais eu le temps de développer mon propos, mais je ne dispose que de cinq minutes, …
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il ne vous reste qu’une minute et quinze secondes, mon cher collègue !
M. Jean-Pierre Sueur. … j’aurais pu évoquer l’arrêt John Murray c. Royaume-Uni, du 8 février 1996, qui a affirmé le principe de l’assistance obligatoire d’un avocat dès le début de la garde à vue, ou encore l’arrêt Salduz c. Turquie, du 27 novembre 2008, qui, je ne l’ignore pas, a donné lieu à quelques querelles d’interprétation, …
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Oui, comme d’habitude !
M. Jean-Pierre Sueur. … et je me serais derechef référé à l’arrêt Dayanan c. Turquie, du 13 octobre 2009, qui précise que l’équité d’une procédure pénale requiert, d’une manière générale, qu’un suspect jouisse de la possibilité de se faire assister par un avocat dès son placement en garde à vue. De plus, la Cour européenne des droits de l’homme décrit, dans ce même arrêt, l’ensemble des diligences que l’avocat doit librement exercer lors de son intervention en garde à vue : « la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse et le contrôle des conditions de détention ».
J’aurais terminé par l’arrêt Savas c. Turquie, du 8 décembre 2009, dans lequel la Cour européenne des droits de l’homme a considéré, d’une part, que la renonciation au droit d’être assisté d’un avocat devait être faite de façon non équivoque et, d’autre part, que, même si l’on pouvait contester les déclarations faites sans assistance d’un avocat devant une juridiction, l’impossibilité de se faire assister par un avocat en garde à vue nuisait « irrémédiablement », et je cite ici l’adverbe utilisé par la Cour, aux droits de la défense.
Par conséquent, mes chers collègues, nous ne pouvons pas continuer à être en infraction par rapport au droit tel qu’il a été dégagé, et à tant de reprises, par la Cour européenne des droits de l’homme.
Même si elle peut être améliorée – encore une fois, nous sommes là pour cela ! –, il faut adopter la proposition de loi de notre collègue Jacques Mézard. C’est une question de droit, de justice, d’équité et de conformité à toutes les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme. Puissions-nous être entendus ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre d'État.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est avec grand plaisir que je vais répondre à vos différentes interventions.
Je remercie Mme Anne-Marie Escoffier à la fois du travail qu’elle a entamé sur le projet de réforme de la procédure pénale et de la façon dont elle a présenté le dossier.
Il est vrai que deux questions se posent : celle de la présence de l’avocat et celle des conditions de la garde à vue. Sur ce dernier point, la seule réserve que je formulerai est relative à l’image de notre pays.
Je suis la première à le dire, dans un certain nombre de cas – trop fréquents ! –, les conditions dans lesquelles s’effectue la garde à vue ne sont pas tolérables, les mauvaises conditions matérielles et le manque d’hygiène, par exemple, portant atteinte à la dignité des personnes.
Cela dit, nous devrions aussi préciser que des avancées ont été permises grâce aux efforts de tous. Et si, dans certains lieux, les conditions ne sont effectivement pas dignes de notre pays, dans nombre d’autres elles sont parfaitement respectueuses de la dignité des personnes.
Alors arrêtons de battre notre coulpe pour tout et n’importe quoi, reconnaissons la réalité – ce que je fais – et cessons de stigmatiser systématiquement notre pays ! Nous pouvons reconnaître ce qui ne va pas, sans pour autant considérer que la situation qui est la nôtre est indigne. M. Jean-Marie Delarue en est d’ailleurs convenu lui-même : des gardes à vue s’effectuent aussi dans des conditions parfaitement admissibles. Sachons faire la différence !
Pour en terminer sur ce point, j’ajoute que la présence de l’avocat ne garantit pas, à elle seule, les conditions de la garde à vue. En effet, ce n’est pas lui qui peut changer l’état des locaux ! Il s’agit bien de deux problèmes réels et indépendants l’un de l’autre que nous devons régler parallèlement.
M. Jean Louis Masson trouve le texte insuffisant, mais il refuse le renvoi à la commission. Je n’ai donc pas très bien saisi la logique du raisonnement.
M. François-Noël Buffet distingue la nécessité de la garde à vue des conditions dans lesquelles elle s’effectue. Effectivement, à chaque fois qu’elle est nécessaire, la garde à vue doit se dérouler dans des conditions satisfaisantes.
J’ai bien noté le souhait du groupe UMP s’agissant du projet de réforme de la procédure pénale. Ce texte est important, puisqu’il comporte un millier d’articles. La partie qui est d’ores et déjà disponible en compte sept cents et couvre des sujets qui vont de la commission des faits au renvoi devant la juridiction de jugement. Nous serons sans doute amenés à le scinder. Je verrai avec les présidents des commissions des lois de l’Assemblée nationale et du Sénat comment procéder pour conserver à l’ensemble sa cohérence tout en répondant aux souhaits qui ont été émis quant aux améliorations rapides à apporter.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, qui dit avoir lu l’avant-projet de réforme de la procédure pénale, affirme que les professionnels ne seraient pas très rassurés. Je n’ai pas l’impression que c’est ce qui se dessine aujourd’hui. J’ai effectivement reçu de nombreux témoignages d’inquiétude, mais avant que le texte ne soit disponible et avant même que la première phrase n’en soit écrite, ce qui laissait d’ailleurs planer quelque suspicion sur les a priori idéologiques de certains !
Mais, depuis que le texte est disponible sur Internet, les professionnels se font de plus en plus nombreux à en approuver les grandes lignes. J’en ai encore été témoin hier, quand le premier président de la cour d’appel de Paris, magistrat du siège, s’est prononcé, lui qui travaille sur le texte.
Dans la presse également, de plus en plus de professionnels, avocats ou universitaires, se félicitent du sens de la réforme même si, ce qui est normal car c’est le jeu de la concertation, ils souhaitent – tout comme moi - un certain nombre d’amendements.
L’interprétation que vous avez faite du principe de l’audition libre ne me paraît pas exacte. J’y reviens donc.
L’audition libre est réservée aux infractions peu graves et pour les cas où il n’y a aucun risque de disparition, ni de l’auteur, ni des preuves sur l’initiative de ce dernier. Surtout, cette audition libre est facultative, c’est-à-dire que la personne peut toujours demander à bénéficier des règles qui sont celles de la garde à vue.
S’agissant des mineurs, je vous rappelle qu’ils font l’objet de dispositions particulières.
Le cas du terrorisme est également spécifique, comme la Cour européenne des droits de l’homme elle-même le reconnaît, et peut donner lieu à des dispositions particulières.
Quant à la question prioritaire de constitutionnalité, je vous rappelle que, dans sa décision du 2 mars 2004, le Conseil constitutionnel a lui-même déclaré l’article 63-4 du code de procédure pénale conforme à la Constitution et, ce faisant, a validé la garde à vue. À cette occasion, il a également déclaré conforme à la Constitution le report de l’intervention de l’avocat en matière de criminalité organisée.
La jurisprudence constitutionnelle est donc très claire.
S’agissant de l’attitude du Conseil de l’Europe et de la Cour européenne des droits de l’homme, je pensais avoir répondu à M. Jean-Pierre Michel ; mais sans doute ne l’avais-je pas convaincu...
Je vous rappelle donc que la Turquie a été condamnée en raison de l’interdiction de la présence de l’avocat pendant toute la garde à vue. Quand on veut citer un exemple à l’appui de la thèse que l’on soutient, encore faut-il le faire avec exactitude !
Dans l’avant-projet du Gouvernement, le pouvoir d’enquête est transféré au parquet, qui traitera donc 100 % des affaires – contre 97 % actuellement, ce qui ne pose en général aucun problème –, cela sous le contrôle du nouveau juge du siège, le juge de l’enquête et des libertés, qui jouira du même statut, et donc des mêmes garanties, que le juge d’instruction aujourd’hui.
Le nouveau système offrira davantage de garanties.
La présentation que vous avez faite de l’avant-projet de loi est en grande partie erronée, car, contrairement à ce que vous avez affirmé, il est explicitement prévu que l’aveu fait hors la présence d’un avocat ne pourra pas fonder à lui seul une condamnation.
De plus, la défense pourra, comme avec le juge d’instruction aujourd’hui, demander au juge de l’enquête et des libertés tout acte utile à la manifestation de la vérité.
Pour le déroulement des enquêtes, ce sont bien des garanties supplémentaires par rapport à la situation actuelle. Et, grâce à la réforme, la vérité judiciaire ne sera certainement pas établie au stade de la garde à vue. La large introduction du contradictoire apportera des garanties qui n’ont jamais existé jusqu’à présent.
Il ne faut pas faire de présentations erronées ; cela laisse entendre que vos propositions seraient inspirées par autre chose que la volonté de voir la justice rendue dans les meilleures conditions !
M. Pierre Fauchon a eu grandement raison de rappeler qu’il faut être prudent quand on ne connaît pas soi-même, par une pratique de terrain avérée, les réalités, les difficultés et les besoins.
Je ne reviens pas sur le fait que l’aveu fait hors la présence de l’avocat ne pourra pas fonder à lui seul une condamnation. Cela figure dans l’avant-projet de loi.
Vous avez évoqué l’idée d’une « mini » garde à vue par rapport à l’audition libre. Nous avons réfléchi à un certain nombre de points et nous aurons l’occasion d’y revenir, mais je ne voudrais pas que nous retombions dans les lourdeurs de la procédure de la garde à vue.
Notre idée est d’aller vite, de trouver une procédure qui soit la plus légère et la moins traumatisante possible pour les petits problèmes. C’est pourquoi nous avons renoncé au système envisagé initialement au profit d’une version plus light, si vous me permettez l’expression, réservant la garde à vue et les garanties qui s’y attachent aux situations plus graves.
Je vous remercie d’avoir réaffirmé que des régimes dérogatoires sont nécessaires pour la grande criminalité et le terrorisme. Je note votre idée de désignation de l’avocat par le bâtonnier. C’est ce qui se fait en Espagne pour tout ce qui est lié au terrorisme. J’ignore les réactions des uns et des autres sur ce point ; je serai à l’écoute du débat que nous ne manquerons pas d’avoir.
M. Laurent Béteille, fort de son expérience, a lui aussi montré combien il était important, pour préparer un texte, d’avoir une connaissance concrète et pratique de toutes les phases de la procédure. C’est la raison pour laquelle je souhaite la concertation la plus large, afin que les praticiens nous fassent également part de leurs analyses.
Je vous remercie, monsieur le sénateur, d’avoir appelé au respect de la déontologie par les avocats. Elle est respectée dans la grande majorité des cas, mais, malheureusement, il subsiste toujours des exceptions...
Vous avez eu raison d’insister sur toutes les conséquences concrètes qu’aurait la proposition de loi, notamment le risque d’allongement de la durée des gardes à vue en raison de la nécessité de reporter les auditions jusqu’à l’arrivée des conseils. Une telle mesure peut avoir des conséquences en termes de coûts budgétaires et de libertés publiques, d’où l’importance d’avoir une vraie discussion sur le sujet.
Je félicite Mme Alima Boumediene-Thiery de s’être plongée dans les sept cent vingt-cinq articles de l’avant-projet et d’en avoir tiré un certain nombre de conclusions.
Sachez, madame le sénateur, que, si j’ai choisi d’élaborer un projet de loi, c’est bien pour qu’il soit amendé et qu’aucun point ne soit laissé dans le flou. Je n’ai nullement l’intention d’ignorer certaines questions.
Les régimes dérogatoires seraient contraires à la position de la Cour européenne des droits de l’homme, dites-vous. C’est inexact, puisque celle-ci a déjà reconnu que de tels régimes pouvaient être nécessaires en matière de terrorisme et de grande criminalité.
Je trouve votre vote en faveur de la proposition de loi de M. Mézard peu cohérent avec votre constat que nombre de questions sont laissées en suspens. Cela étant, je ne vous taxerai pas d’hypocrisie.
En revanche, monsieur Sueur, il est quelque peu hypocrite d’affirmer que nous voudrions ajourner toute décision en la matière, alors que, je l’ai dit très clairement, le projet de loi sera déposé avant l’été, et de prétendre que nous refuserions de faire bouger les choses quand l’avant-projet comporte des modifications sensibles, comme cela a été reconnu, y compris sur vos travées. Il y a également une certaine hypocrisie à soutenir que ce texte serait bouclé, alors que jamais autant de temps n’avait été donné à la concertation et que tout article est susceptible d’être amendé.
M. Jean-Pierre Sueur. C’est aussi le cas pour le texte de M. Mézard !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. De même, il est hypocrite de préconiser l’adoption de la proposition de loi de M. Mézard au seul motif que la commission et le Gouvernement s’y opposent, alors que vous lui trouvez de nombreuses insuffisances, au point que cela vous amène à présenter un texte différent…
M. Jean-Pierre Sueur. Non ! Cette proposition de loi peut très bien être amendée !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Il y a enfin une certaine hypocrisie, monsieur Sueur, à dénoncer une élaboration de la loi par petits bouts, qui conduirait à une incohérence générale, tout en soutenant une proposition de loi alors que votre groupe en a déposé une autre sur le même thème à l’Assemblée nationale…
M. Jean-Pierre Sueur. Vous discréditez toutes les propositions de loi !
M. Jean-Pierre Sueur. Vous mettez en cause l’initiative parlementaire !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Pour assurer la cohérence de la législation, il convient d’adopter un texte qui reprenne tout de zéro, en refondant intégralement la procédure.
M. Jean-Pierre Sueur. Vous niez l’initiative parlementaire ! L’incohérence vient du Gouvernement !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Ultime hypocrisie, monsieur Sueur, vous avez cité l’arrêt Murray du 8 février 1996,…
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. … lequel a donc été rendu bien avant 2001, année qui a vu un gouvernement de gauche déposer un projet de loi sur la garde à vue dont les dispositions s’appliquent aujourd’hui, avec les conséquences que l’on connaît. Ce texte ne visait-il pas à tenir compte de cet arrêt ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Pierre Sueur. J’ai cité dix décisions !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Il est temps, à mon sens, d’essayer de travailler ensemble, dans la transparence et un certain climat de confiance, avec pour seul objectif d’élaborer le meilleur texte possible au bénéfice de nos concitoyens. Il n’est pas question pour moi d’établir une quelconque hiérarchie entre propositions et projets de loi : j’ai enseigné le droit constitutionnel pendant un certain nombre d’années ! La seule différence, c’est qu’un large projet de refondation générale permet de garantir davantage de cohérence et de visibilité, donc une plus grande certitude sur le droit applicable à l’ensemble de nos concitoyens.
Je souhaite que ce projet prenne en compte toutes les améliorations que le Sénat et l’Assemblée nationale pourront y apporter. Nous ferons ainsi, les uns et les autres, le meilleur travail possible en notre qualité de législateurs, au nom du peuple français, mais surtout pour le peuple français ! (Applaudissements prolongés sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion de la motion tendant au renvoi à la commission.
Demande de renvoi à la commission
M. le président. Je suis saisi par M. Zocchetto, au nom de la commission, d'une motion n° 1 tendant au renvoi à la commission.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, la proposition de loi tendant à assurer l'assistance immédiate d'un avocat aux personnes placées en garde à vue (n° 208, 2009-2010).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
Aucune explication de vote n’est admise.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Cette motion a été défendue lors de mon intervention dans la discussion générale.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, contre la motion.
M. Jacques Mézard. Je viens d’entendre parler de cohérence et d’hypocrisie…
Cependant, à écouter les différents intervenants, il m’a semblé que cette proposition de loi marquait tout de même un progrès par rapport à la situation existante.
Chers collègues de la majorité, ma proposition de loi est moins – oserai-je le mot ? – « libertaire » que celle qui a été déposée à l’Assemblée nationale le 21 décembre 2009 par trente et un députés UMP, dont MM. Aeschlimann, Balkany, Clément, ancien garde des sceaux, et Goasguen, tendant à instituer la présence immédiate de l’avocat lors de la garde à vue. Je vous en cite l’exposé des motifs :
« Il s’avère donc indispensable de modifier notre législation afin qu’elle se conforme aux principes du procès équitable énoncés par les dispositions de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
« De plus, la réforme proposée permettrait d’éviter que soient utilisées des déclarations incriminantes faites lors d’un interrogatoire subi sans l’assistance d’un avocat.
« Enfin, cette évolution positive de notre législation en la matière ne ferait qu’aligner la France sur la position des démocraties voisines, qui, pour la plupart (Allemagne, Espagne, Suisse), autorisent l’assistance de l’avocat pendant les interrogatoires ainsi que son accès au dossier de la procédure. »
Quant aux régimes dérogatoires, cette proposition de loi prévoit de tous les supprimer…
M. Jean-Pierre Sueur. C’est complètement incohérent !
M. Jacques Mézard. Où est la cohérence, où est l’hypocrisie ? Je constate simplement que nous avions, pour notre part, pris une voie qui nous semblait raisonnable…
M. Jean-Pierre Sueur. Réaliste ! C’est une avancée !
M. Jacques Mézard. Certes, notre proposition de loi n’est peut-être pas parfaite, mais j’ai le sentiment qu’un certain nombre de textes votés ces derniers mois ne l’étaient pas davantage !
M. Jean-Pierre Sueur. La taxe carbone, par exemple !
M. Jacques Mézard. Selon moi, mieux vaut voter un texte qui représente un progrès, plutôt que de le renvoyer aux calendes grecques ! (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Je voudrais rassurer M. Mézard : dès mercredi prochain, nous poursuivrons notre travail sur la réforme de la garde à vue, avec l’examen d’une proposition de loi sur ce sujet qui a été déposée par Mme Boumediene-Thiery. Le travail que vous avez fourni nous sera sans aucun doute très utile.
M. Jean-Pierre Sueur. Cette proposition de loi sera-t-elle également renvoyée à la commission ?
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 1, tendant au renvoi à la commission.
J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe du RDSE.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 163 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 171 |
Pour l’adoption | 183 |
Contre | 157 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
En conséquence, le renvoi à la commission est ordonné.