Mme Catherine Procaccia. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ma question porte sur le statut des adresses électroniques des élus pour la constitution de base de données par des pétitionnaires. Elle nous concerne tous.
L’article L. 34-5 du code des postes et des communications électroniques pose comme principe l’interdiction de l’utilisation de l’adresse électronique d’une personne physique si cette dernière n’a pas « exprimé son consentement préalable à recevoir des prospections directes par ce moyen » ; il prévoit cependant une exception dans le cadre d’un usage « professionnel », lorsque les données ont été recueillies loyalement.
Nous constatons tous que nos messageries parlementaires sont envahies de mails ayant pour corps un message dont le contenu est strictement identique et non personnalisé. En cherchant la raison pour laquelle je recevais des mails relatifs à des pétitions qui ne me concernaient absolument pas, j’ai découvert que certains sites internet proposaient aux internautes de signer des pétitions en ligne. Pour ce faire, il leur suffit de remplir un formulaire et d’envoyer le message type au choix à tous les parlementaires, soit plus de 900 personnes, ou aux députés et aux sénateurs d’une région ou d’un département sélectionné, sans même connaître le nom des élus. Par un seul clic, le message est automatiquement transmis aux parlementaires concernés.
Certains sites précisaient clairement que leurs bases de données avaient été constituées via les portails officiels des assemblées…
Dans ces conditions, madame la ministre, pouvez-vous nous indiquer si l’utilisation pour des envois de courriers non personnalisés d’adresses électroniques trouvées sur des sites institutionnels, qu’il s’agisse de ceux des assemblées parlementaires ou de ceux des collectivités territoriales, peut être considérée comme un usage professionnel ou si elle nécessite un consentement préalable ? La constitution de fichiers d’adresses électroniques institutionnelles et publiques des élus nationaux ou locaux, puis leur mise à disposition via des sites internet destinés à diffuser des pétitions entrent-elles dans le champ de l’exception au principe du consentement préalable ?
Enfin, le Gouvernement entend-il rechercher une solution pour réglementer l’utilisation de ce type de fichiers, de manière à permettre aux élus de connaître les demandes réelles des citoyens sans que leurs messageries électroniques se trouvent paralysées ? Pouvons-nous saisir la CNIL, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, pour que celle-ci autorise préalablement, à l’avenir, l’existence de ce type de bases de données ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. Madame la sénatrice, à travers la question que vous avez adressée à Mme Kosciusko-Morizet, qui ne pouvait être présente ce matin, vous soulignez la difficulté de trouver un équilibre, dans l’utilisation du courrier électronique, entre le droit légitime des citoyens de s’adresser à leurs élus et l’abus qui peut parfois résulter du recours à de tels messages pour envoyer des pétitions.
À ma connaissance, ce problème n’a pas donné lieu à jurisprudence, mais des pistes existent.
Toutefois, l’article L. 34-5 du code des postes et des communications électroniques, que vous avez cité, vise à encadrer la prospection commerciale, c’est-à-dire l’offre de biens ou de services. Il ne constitue donc pas une base juridique applicable aux pétitions en ligne, sur lesquelles porte votre question et qui n’ont pas un but commercial.
En outre, concernant cet article, la CNIL a estimé, lors de sa séance du 17 février 2005, qui a donné lieu à un communiqué en date du 2 mars 2005, que « des personnes physiques peuvent être prospectées par courrier électronique à leur adresse électronique professionnelle […] sans leur consentement préalable », si le message leur est envoyé « au titre de la fonction qu’elles exercent dans l’organisme privé ou public qui leur a attribué cette adresse ».
Or les adresses électroniques des parlementaires à l’Assemblée nationale et au Sénat sont bien de nature professionnelle, et recevoir une pétition envoyée par un citoyen entre pleinement dans le cadre de la fonction d’un élu, même si cette pétition n’est pas personnalisée. On peut également considérer que le parlementaire, en communiquant sa biographie et son adresse électronique pour qu’elles soient mises en ligne, a consenti à leur utilisation par les électeurs.
Pour conclure, diffuser une pétition par voie électronique à partir des adresses des parlementaires collectées sur les sites des assemblées me semble parfaitement légal. Néanmoins, comme vous le soulignez, madame la sénatrice, cette pratique peut aboutir à encombrer la messagerie des élus et à entraver leur travail. Il est nécessaire de trouver une solution, qui pourra être sinon juridique, du moins organisationnelle.
Par exemple, il est peut-être envisageable d’encadrer le processus de pétition, en créant sur les sites des deux assemblées une fonctionnalité ad hoc reliée à une application spécifique qui dépouillerait les courriers électroniques et présenterait à l’élu un résultat global, car c’est le nombre de pétitionnaires qui importe.
En prenant ainsi l’initiative de développer la procédure de pétition, les assemblées donneraient un nouvel exemple de leur engagement en faveur de la participation des citoyens à la démocratie et au débat public.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse sur ce sujet, qui vous concerne indirectement. J’apprécie qu’elle comporte des pistes de solutions. Il conviendra de nous tourner vers les assemblées pour créer la fonctionnalité que vous avez évoquée, mais aussi, éventuellement, d’intervenir de nouveau auprès de ces sites qui, sans scrupules, proposent aux internautes d’envoyer un message à quelque mille élus, sans vérifier d'ailleurs qu’une même personne ne signe pas plusieurs fois la pétition présentée !
Je le répète, c’est notre travail de parlementaires qui est en jeu ici : à cause de ce type de pratiques, les messages importants ou personnels que nous recevons ne sont plus visibles, noyés qu’ils sont dans quatre cents ou cinq cents courriers ! Je m’adresserai donc aux autorités du Sénat pour que soit mis en place un dispositif permettant d’assurer à la fois le respect du droit de pétition et celui du travail parlementaire.
création de la mission interministérielle de coordination nationale sur la traite des êtres humains
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, auteur de la question n° 728, adressée à M. le secrétaire d'État à la justice.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Madame la ministre, je regrette l’absence de M. le secrétaire d'État à la justice, car la question que je vais aborder est particulièrement sensible et actuelle.
Le 7 janvier dernier, la Cour européenne des droits de l'homme a rendu son premier arrêt dans le domaine de la lutte contre la traite des êtres humains.
Cette décision, importante pour le droit interne des États membres du Conseil de l’Europe, traduit une appréhension par le droit du phénomène de la traite des êtres humains de plus en plus poussée, mais cependant encore insuffisante.
Le 18 décembre 2009, donc quelques semaines avant la décision de la Cour, la Commission nationale consultative des droits de l’homme a adopté un avis sur ce même thème, appelant à clarifier et à renforcer les mesures normatives françaises en matière de lutte contre la traite des êtres humains.
Nous sommes nombreux ici à prêter une attention particulière à cette question et à penser qu’elle doit être prise en compte de façon beaucoup plus précise et marquée dans le droit national.
À ce titre, j’ai pu prendre connaissance des conclusions des travaux du groupe interministériel à composante élargie relatifs à la prise en charge et à l’identification des victimes de la traite des êtres humains, mis en place le 2 décembre 2008 sous la double tutelle du ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales et du ministère de la justice. Ce dernier a proposé un certain nombre de mesures, dont la publication d’un décret portant création d’une structure de coordination nationale sur la traite des êtres humains ayant vocation à définir, à coordonner et à mettre en œuvre la stratégie nationale de lutte contre cette pratique.
M. le secrétaire d’État à la justice, je le sais, est très sensible à cette question. Il a d’ailleurs participé, le 20 octobre 2009, à la conférence de Stockholm relative à la lutte contre le crime organisé et à la traite des êtres humains. À cette occasion, il a évoqué la réflexion du groupe de travail, ainsi que la mise en place prochaine d’une mission de coordination nationale sur la traite des êtres humains, placée sous l’autorité du Premier ministre.
Madame la ministre, quand le Gouvernement entend-il publier le décret, qui existe déjà, portant création de cette mission de coordination nationale sur la traite des êtres humains ? Quels seront la composition et le domaine d’intervention de cette structure ?
Vous le savez, la mise en place de cette mission sera un acte fort, qui permettra d’améliorer la prise en charge des victimes tout en garantissant une poursuite efficace de la traite des êtres humains et une sanction effective de ses auteurs.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. Madame la sénatrice, je voudrais excuser M. Jean-Marie Bockel, qui, malheureusement, ne pouvait être présent aujourd'hui pour vous répondre.
Le groupe de travail relatif à la protection et à la prise en charge des victimes de la traite des êtres humains, qui est, comme vous l’avez rappelé, piloté conjointement par le ministère de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales et par le ministère de la justice et des libertés, est chargé d’élaborer un plan national de lutte contre la traite des être humains. Il consacre ses travaux à améliorer l’identification des victimes, à élaborer un dispositif de prise en charge pluridisciplinaire de ces dernières et à étudier des moyens d’action pour la prévention de cette infraction.
Ce groupe de travail s’est vu confier par le secrétariat général des affaires européennes une mission de réflexion relative au respect, par la France, de la convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains.
Adoptée le 16 mai 2005, signée par notre pays le 22 mai 2006 et entrée en vigueur le 1er mai 2008, cette convention prévoit que « chaque partie prend des mesures pour établir ou renforcer la coordination au plan national entre les différentes instances chargées de la prévention et de la lutte contre la traite des êtres humains ». Les parties doivent ainsi adopter « les mesures nécessaires pour assurer la coordination de la politique et de l’action des services de [leur] administration et des autres organismes publics luttant contre la traite des êtres humains, le cas échéant en mettant sur pied des instances de coordination ».
En vue de satisfaire à cette obligation, le groupe de travail a élaboré un projet de décret portant création d’une mission interministérielle de coordination pour la prévention et la lutte contre la traite des êtres humains et la protection des victimes. Ce texte a été transmis au secrétariat général des affaires européennes et au cabinet du Premier ministre. Conformément aux engagements internationaux souscrits par la France, cette mission interministérielle devrait être créée dans les prochains mois.
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Madame la ministre, j’aurais aimé obtenir des précisions sur la date de publication du décret, qui existe déjà, sur les outils et les moyens qui seront mis en place, sur la composition et les champs d’intervention de l’instance. Tous ces éléments nous permettraient de savoir dans quelles conditions cette mission de coordination nationale sera mise en place et comment elle jouera effectivement son rôle.
En effet, la traite des êtres humains est bien plus qu’une infraction : elle constitue un crime, contre lequel nous devons nous doter très vite des moyens de lutte nécessaires.
mise en application dans la creuse du plan de soutien aux agriculteurs
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, auteur de la question n° 718, adressée à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
M. Jean-Jacques Lozach. Je souhaite attirer l’attention de M. le ministre de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche sur la situation de l’agriculture en général, et sur les difficultés des éleveurs du Massif central en particulier.
En effet, les agriculteurs subissent la crise la plus violente que leur secteur, toutes productions confondues, ait connue depuis de très nombreuses années. La situation des campagnes est préoccupante, par exemple dans la Creuse. Le désespoir des éleveurs est profond et beaucoup d’entre eux ne peuvent plus vivre de leur métier ; en particulier, on constate que le nombre d’agriculteurs demandant à bénéficier du RSA s’accroît de manière très significative.
Les agriculteurs subissent les soubresauts des marchés et pâtissent de relations déséquilibrées avec l’industrie agro-alimentaire et la grande distribution, laquelle est depuis 2007 la grande bénéficiaire des faveurs gouvernementales. Les charges des exploitants n’ont fait qu’augmenter et les trésoreries sont à sec. L’avenir est sombre ; de nombreux jeunes seront acculés à la cessation d’activité.
Le 27 octobre dernier, le Président de la République a prononcé à Poligny un discours intitulé « Un nouvel avenir pour notre agriculture ». Il a alors évoqué un effort massif, comparable à celui qui a été accompli en faveur de l’industrie automobile. Or il est question ici d’hommes et de femmes touchés, pour la deuxième année consécutive, par une chute de leurs revenus de près d’un quart, situation qu’aucune autre catégorie de la population ne connaît actuellement.
Les agriculteurs veulent une réponse structurelle à leurs difficultés. Or le plan du Président de la République vise à accorder 1 milliard d’euros de prêts bonifiés, à consacrer 650 millions d’euros à des allégements fiscaux et sociaux et à prendre en charge des intérêts d’emprunts. « Au fond, quand on prête un milliard d’euros à la profession agricole, comme on l’a fait pour l’industrie automobile ou pour les PME, c’est que l’on a confiance en l’avenir de l’agriculture », a déclaré récemment le Premier ministre.
Toutefois, ces mesures, étant conjoncturelles, ne sont pas à même de restructurer durablement les trésoreries et de permettre aux exploitants agricoles d’investir dans l’avenir. La mobilisation générale auprès de nos partenaires européens en vue d’une régulation rénovée constitue un autre volet du plan présidentiel, les prix devant redevenir plus stables et plus rémunérateurs.
Cependant, le Conseil européen des 29 et 30 octobre 2009, tant attendu sur ce sujet, a déçu. Le document final se contente d’apporter les brèves indications suivantes :
« Le Conseil européen salue les initiatives que la Commission a prises en vue de stabiliser le marché européen des produits laitiers, répondant ainsi à l’invitation qu’il lui avait adressée en juin 2009. Dans ce contexte, il prend note de la proposition de la Commission visant à atténuer les problèmes de liquidité les plus urgents que connaît ce secteur en débloquant 280 millions d’euros sur le budget de 2010.
« Le Conseil européen encourage la Commission à continuer de rechercher activement des solutions aux problèmes auxquels est confronté le secteur laitier. Il note que la Commission a mis sur pied un groupe de haut niveau chargé de l’importante mission d’examiner les perspectives à moyen et à long terme. »
Par conséquent, madame la ministre, mon interrogation portera tant sur le volet conjoncturel que sur le volet structurel. Le Gouvernement a déclaré faire en sorte que les sommes annoncées parviennent le plus rapidement possible dans les exploitations. Pourriez-vous faire le point sur la mise en œuvre, au bénéfice des éleveurs de la Creuse, des mesures de soutien à la trésorerie annoncées par le chef de l’État ?
Enfin, vous serait-il possible de préciser quelles actions la France mène avec ses partenaires en vue d’une refondation de la politique agricole commune permettant d’assurer une plus grande régulation des marchés et une rémunération décente des agriculteurs, afin que ces derniers puissent vivre du fruit de leur labeur, grâce à des prix rémunérateurs ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser M. Bruno Le Maire, actuellement retenu à l'Assemblée nationale.
Vous avez raison de souligner que l’agriculture traverse la crise la plus grave de ces trente dernières années, marquée par une dégradation sans précédent du revenu des agriculteurs. La réponse du Gouvernement à cette crise a été immédiate.
Tout d’abord, un plan d’urgence a été annoncé le 27 octobre dernier par le Président de la République. D’une ampleur exceptionnelle, il prévoit l’octroi de 1 milliard d’euros de prêts et une aide de l’État de 650 millions d’euros. Aujourd’hui, plus de 25 000 agriculteurs ont déjà bénéficié de 500 millions d’euros de prêts aidés. Dans le département dont vous êtes l’élu, monsieur le sénateur, ce sont d’ores et déjà 4,7 millions d’euros de prêts de trésorerie qui ont été accordés aux agriculteurs qui rencontrent le plus de difficultés. Dans quelques semaines, l’allégement des charges sociales interviendra avec les appels de cotisations : 50 millions d’euros seront aussi mobilisés.
Vous l’avez bien compris, l’ambition de ce plan est de ne laisser aucun agriculteur sur le bord du chemin : la palette de mesures est large et permettra de répondre à toutes les situations. C’est d’ailleurs dans cet esprit que le Premier ministre a nommé, aux côtés de Bruno Le Maire, Nicolas Forissier en tant que médiateur national pour le plan d’urgence en faveur de l’agriculture. À ce titre, il suit toutes les demandes des agriculteurs en difficulté.
Monsieur le sénateur, vous avez également raison d’affirmer que l’agriculture et les jeunes agriculteurs ont besoin de perspectives.
Aussi, pour répondre plus spécifiquement à la situation des jeunes agriculteurs, des efforts importants ont été consentis pour soulager la trésorerie des producteurs. Depuis le mois de juin 2009, 60 millions d’euros ont été affectés à des aides en trésorerie pour les jeunes agriculteurs et les récents investisseurs, qui ont en outre bénéficié, en septembre 2009, du déblocage par les banques de 250 millions d’euros pour des prêts de trésorerie à des taux préférentiels dont le remboursement ne commencera qu’en 2011. Enfin, 70 % du montant des aides directes attribuées aux agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune ont pu être versées dès le 16 octobre, au lieu du 1er décembre.
Par ailleurs, le Gouvernement apporte une réponse structurelle et de plus long terme à travers le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche qui vient d’être déposé sur le bureau du Parlement. Il s’agit de garantir une plus grande stabilité du revenu des agriculteurs, qui a baissé de 20 % en 2008 et de 30 % en 2009. Plusieurs dispositions du projet de loi ont cet objet, notamment le renforcement de l’organisation économique des agriculteurs, avec la reconnaissance du rôle des interprofessions dans la gestion des filières, l’obligation de contractualisation entre l’agriculteur et son premier acheteur, l’amélioration de la couverture des aléas climatiques, sanitaires et environnementaux, complétant l’élargissement de la dotation pour aléas aux risques économiques que le Parlement a introduit dans la loi de finances, enfin l’extension du champ de compétence de l’Observatoire des prix et des marges à l’ensemble des produits agricoles.
Enfin, les perspectives de notre agriculture s’inscrivent nécessairement dans un cadre communautaire. La refondation de la politique agricole commune passe par la mise en œuvre d’une régulation européenne de l’agriculture, que Bruno Le Maire a déjà engagée avec l’Allemagne dans le secteur du lait, en rassemblant vingt et un États membres pour défendre auprès de la Commission européenne le principe d’une nouvelle régulation. De même, un groupe de haut niveau a été chargé de proposer des perspectives à moyen terme. Ce groupe, qui se réunit chaque mois, rendra ses conclusions au plus tard au mois de juin 2010.
Monsieur le sénateur, vous pouvez compter sur l’engagement du Gouvernement pour que la régulation européenne s’étende à l’ensemble des secteurs agricoles.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.
M. Jean-Jacques Lozach. Madame la ministre, je vous remercie de la précision de votre réponse. Cependant, étant donné la gravité de la situation et l’urgence d’y remédier, je ne suis pas convaincu qu’elle soit à la hauteur. En effet, nous sommes aujourd'hui confrontés à une véritable désespérance sociale dans les campagnes, la crise que traverse le monde agricole, et en particulier l’élevage, qu’il s’agisse des filières ovine, bovine ou porcine, étant absolument sans précédent.
En attendant la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche et la réforme de la politique agricole commune en 2013, il importerait d’apporter des réponses plus appropriées et plus fortes à la chute brutale des revenus agricoles.
dématérialisation des documents administratifs d'accompagnement douaniers
M. le président. La parole est à M. Rachel Mazuir, auteur de la question n° 722, adressée à M. le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État.
M. Rachel Mazuir. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la future application du programme européen EMCS, Excise movement and control system, qui consiste en l’informatisation du suivi des mouvements de produits soumis à accises – alcools, boissons alcoolisées, tabacs et produits énergétiques – circulant en suspension de droits à l’intérieur de l’Union européenne.
En France, la mise en œuvre de ce projet est opérée grâce à la téléprocédure nationale Gamma – gestion de l’accompagnement des mouvements de marchandises soumises à accises – créée à cet effet. Concrètement, les opérateurs devront remplir en ligne leurs documents administratifs d’accompagnement, les DAA, en utilisant un formulaire électronique accessible sur le portail internet dédié aux téléprocédures douanières.
Après avoir été contrôlés et validés automatiquement, les DAA électroniques seront immédiatement visibles par les bureaux de douane de départ et d’arrivée, ainsi que par le destinataire. Un certificat de réception sera établi en ligne par ce dernier ou par le bureau de douane de sortie en cas d’exportation vers un pays tiers. Cela devrait permettre un apurement du titre de mouvement plus sûr et plus rapide.
Le dispositif Gamma se déploie progressivement. Depuis le 1er avril 2009, certains opérateurs français peuvent utiliser cette téléprocédure pour établir, valider et apurer leurs titres de mouvement, mais ils continuent en parallèle d’imprimer ces documents pour répondre aux attentes d’autres partenaires non encore équipés. À compter du 1er avril 2010 débutera la phase transitoire communautaire : tout document administratif électronique émis dans un État membre devra obligatoirement faire l’objet d’un certificat de réception dans l’État membre de destination. Enfin, le système EMCS deviendra obligatoire pour tous les opérateurs effectuant des échanges intracommunautaires de produits en suspension de droits le 1er janvier 2011.
S’il est opportun d’engager une harmonisation des procédures actuelles à l’échelon européen dans un souci de simplification et de sécurisation des données, la dématérialisation des DAA inquiète les entrepreneurs qui doutent de la fiabilité de leur réseau internet. En effet, dans de nombreuses communes rurales – plus de la moitié de la population de notre pays réside dans des zones à faible densité – de vastes secteurs restent très mal desservis.
Aussi souhaiterais-je savoir si des dérogations seront accordées aux entreprises qui ne pourront appliquer la procédure de dématérialisation pour des raisons techniques indépendantes de leur volonté.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Marie-Luce Penchard, ministre chargée de l'outre-mer. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser M. Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, qui ne pouvait être présent ce matin pour vous répondre.
Le projet de dématérialisation des documents administratifs d’accompagnement à la circulation concerne les entreprises qui pratiquent le commerce de vins, de boissons alcooliques, de tabacs manufacturés ou de produits énergétiques en suspension de droits d’accises. Le projet communautaire EMCS, auquel est rattachée cette procédure, vise essentiellement les flux entre États membres de l’Union européenne et vers les pays tiers. Les flux de marchandises à l’échelon national bénéficient également de ces facilités grâce à la téléprocédure douanière Gamma.
Le public ciblé est composé exclusivement d’entreprises, le plus souvent équipées en matériel informatique et connectées à internet dans le cadre de leur activité commerciale. Une étude de l’INSEE a montré, au début de l’année 2007, que pratiquement toutes les entreprises d’au moins dix salariés étaient reliées à internet, dans neuf cas sur dix par une connexion à haut débit. Les trois quarts des entreprises qui ne sont pas connectées à internet sont de petites structures indépendantes exerçant leur activité principalement dans l’hôtellerie et la restauration. À l’intérieur du périmètre économique adopté par Eurostat, 93 % des entreprises européennes accèdent à internet, ce taux atteignant même 96 % pour les entreprises françaises.
La téléprocédure Gamma a été testée en connexion à bas débit, et même si ce mode de connexion n’offre pas le même confort de navigation, il est possible de l’utiliser. Il est important de préciser que si les opérateurs effectuant des mouvements nationaux de produits en suspension de droits d’accises auront la possibilité d’utiliser la téléprocédure Gamma à partir du 1er avril 2010, il ne leur sera pas imposé d’y recourir pour ces mouvements. Les autres modes de validation des documents de circulation sur support papier demeureront donc en vigueur.
En tout état de cause, monsieur le sénateur, soyez assuré que la Direction générale des douanes et droits indirects, engagée dans une démarche globale de dématérialisation des procédures, soutiendra tout projet visant à promouvoir l’accès à internet d’opérateurs qui en seraient dépourvus, bien qu’elle n’envisage pas de mettre à leur disposition des moyens d’accès à internet au sein de ses propres structures.
M. le président. La parole est à M. Rachel Mazuir.
M. Rachel Mazuir. Madame la ministre, cette réponse ne me rassure qu’à moitié. Dans le département de l’Ain, dont je préside le conseil général, le passage obligatoire à la nouvelle procédure à compter du 1er janvier 2011 posera un véritable problème aux producteurs viticoles qui ne disposent pas encore d’une connexion performante à internet. C’est pourquoi j’aurais souhaité qu’une dérogation puisse leur être accordée, afin de laisser au département le temps d’achever d’équiper l’ensemble des négociants concernés.
Information des pouvoirs adjudicateurs en matière de certification des produits utilisés pour le transport de l'eau et l'assainissement
M. le président. La parole est à M. René Beaumont, auteur de la question n° 734, adressée à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.