M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. La position du Gouvernement se fondant sur un présupposé différent, je ne peux qu’émettre un avis défavorable sur les amendements autres que le sien.
Je voudrais apporter une information sur les apports en industrie. Au cours des trois dernières années, dix dossiers ont été déposés : cinq concernaient des apports exclusivement en capital, cinq comportaient aussi des apports en industrie très minoritaires, qui ont été rapidement convertis en capitaux.
Par ailleurs, je voudrais souligner que l’adoption de l'amendement n° 39 rectifié soulèverait une difficulté. Certes, dans l’hypothèse où l’on opterait pour le recours au juge de l’expropriation, l’unité de jurisprudence ne pourrait être garantie que si un seul tribunal est compétent. Toutefois, je voudrais attirer l’attention sur le fait que le tribunal de grande instance de Paris est l’un des plus surchargés de France. En lui confiant de surcroît l’ensemble du contentieux de l’indemnisation des avoués, on risquerait qu’il soit débordé et que les délais de procédure s’en trouvent allongés.
Je persiste à penser qu’il vaut mieux s’en remettre à la commission prévue à l’article 16 et que le régime d’’indemnisation qui a été défini à l'Assemblée nationale est satisfaisant. Nous pouvons trouver des solutions spécifiques au problème des archives, relevant davantage de l’organisation que de l’indemnisation.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des lois.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. L’article 13 tient une place centrale dans le projet de loi portant réforme de la représentation devant les cours d’appel.
Madame la ministre d’État, pourquoi, en fin de compte, avons-nous choisi la procédure de l’expropriation, dont nous voyons les inconvénients, notamment sa lenteur, alors que, incontestablement, le recours à une commission ad hoc paraît tout à fait adapté, à l’instar de ce qui a été institué dans des situations comparables, en particulier lors de la suppression du monopole des commissaires-priseurs ?
Ce qui nous sépare, c’est que vous envisagez une indemnisation à 100 % pour le seul préjudice causé par la perte du droit de présentation, alors que nous vous avons longuement expliqué qu’il convenait de prendre également en compte le préjudice de carrière, le cas échéant, ainsi que le préjudice économique et les préjudices accessoires, qui ont été objectivement reconnus.
La commission que vous souhaitez mettre en place devrait avoir la possibilité de moduler l’indemnisation en fonction de l’ampleur du préjudice. Pour l’avoué qui part à la retraite, le préjudice de carrière est nul, et le préjudice économique, s’il existe, minime. En revanche, l’avoué débutant ou en milieu de carrière deviendra avocat, certes, mais un avocat sans clients ; il devra, du jour au lendemain, recommencer une carrière de zéro. Je rappelle que le préjudice de carrière a toujours été indemnisé.
C’est l’unique point qui nous différencie, madame la ministre d’État. Nous avons opté, pour notre part, pour l’intervention du juge de l’expropriation, car il est certain qu’il tiendra compte de toutes les causes de préjudice, comme le souhaitent les auteurs des amendements nos 1 rectifié bis et 45 rectifié.
Nous pourrions être d’accord sur le principe de la commission que vous envisagez de créer, à condition qu’elle ne se limite pas à l’indemnisation de la perte du droit de présentation. La position de la commission des lois à cet égard est claire et ferme. Les amendements qui vont dans ce sens sont cohérents.
Votre amendement n° 50 rectifié, monsieur Mézard, pourrait s’inscrire dans la démarche de modulation de la commission des lois, puisque vous proposez une majoration de l’indemnité à hauteur de 20 % de la valeur de l’office. Cependant, à trop vouloir préciser, nous risquerions d’omettre certains éléments.
En tout état de cause, la navette permettra d’approfondir la réflexion.
Je reconnais, madame la ministre d’État, qu’en portant l’indemnisation à 100 %, vous avez amélioré le texte initial, qui était compliqué, totalement insuffisant et susceptible d’être frappé d’inconstitutionnalité. Cette mesure représente un progrès considérable. Son financement par une « taxe de postulation », si je puis dire, perçue sur une certaine période, permettrait une indemnisation convenable des avoués. Nous ferions œuvre de justice en adoptant un tel dispositif, sans compter que nous serions insoupçonnables devant la Cour européenne des droits de l’homme. Au vu de son arrêt Lallement du 12 juin 2003 et de l’article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme relatif au droit de propriété, il y aurait un risque à ne pas indemniser correctement des professionnels qui ne sont pour rien dans cette réforme.
Telle est la synthèse de la position que la commission a adoptée à la suite d’un travail très approfondi, vous en conviendrez, monsieur Godefroy.
MM. René Garrec et Jean-Pierre Vial. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour explication de vote sur l’amendement n° 50 rectifié.
M. Alain Anziani. Nous sommes en présence de deux logiques différentes.
Celle de la chancellerie consiste à en revenir au texte de l’Assemblée nationale : un « forfait administratif » serait attribué par une commission. Cette solution présente certes des avantages, mais aussi des inconvénients.
Une autre logique, suivie par la commission, est celle de la personnalisation judiciaire. Elle présente le grand avantage de permettre la prise en compte des préjudices précis subis par chaque avoué. C’est une appréciation sur mesure du préjudice, la seule qui puisse nous convaincre.
À cette seconde logique du « sur mesure », Mme la ministre d’État oppose trois arguments.
Premièrement, ce ne serait pas une logique juridique. Nous pensons le contraire. À cet égard, M. Gélard, dans son rapport, cite notamment l’arrêt Lallement de la Cour européenne des droits de l’homme, portant sur l’indemnisation de la perte de l’outil : que celui-ci soit agricole ou non, c’est un outil de travail, dont la perte représente un préjudice patrimonial, qu’il convient de réparer intégralement. Nous sommes donc bien dans une logique juridique.
Deuxièmement, la position de la commission ne serait pas réaliste. Or quoi de plus réaliste que de s’en remettre, pour apprécier chaque préjudice, au juge de l’expropriation, déjà expérimenté en une telle matière ?
Troisièmement, la proposition de la commission des lois ne serait pas pragmatique, car la procédure envisagée durerait trop longtemps. Pourquoi ne pas accorder des provisions, comme cela a d’ailleurs été suggéré ? Cela permettrait de répondre à l’urgence, sans porter atteinte à l’équité de l’indemnisation. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Monsieur Mézard, l’amendement n° 50 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Mézard. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je constate que cet amendement a été repoussé à l’unanimité des présents.
Je mets aux voix l'amendement n° 1 rectifié bis.
(L'amendement est adopté à l’unanimité des présents.)
M. le président. En conséquence, l’amendement n° 45 rectifié n’a plus d’objet.
Monsieur Détraigne, l’amendement n° 5 rectifié est-il maintenu ?
M. Yves Détraigne. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 5 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 39 rectifié.
(L'amendement est adopté à l’unanimité des présents.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 13, modifié.
(L'article 13 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 13
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 27 rectifié, présenté par MM. Fouché, P. Blanc, Chatillon, Bernard-Reymond, Houpert, Lefèvre et Beaumont, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les avoués près les cours d'appel en exercice à la date de publication de la présente loi ont droit à une indemnité destinée à compenser le préjudice de carrière résultant de la perte de leur outil de travail.
Cette indemnité est calculée :
1° En prenant pour base la différence entre la moyenne des revenus annuels imposables du bénéficiaire sur les trois derniers exercices comptables dont les résultats sont connus de l'administration fiscale à la date de publication de la présente loi et la somme de 73.000 €, correspondant au revenu annuel imposable moyen des avocats ;
2° En multipliant ce résultat par :
- 1 pour les bénéficiaires ayant plus de 65 ans au jour de la publication de la présente loi ;
- 2 pour les bénéficiaires ayant entre 60 et 64 ans au jour de la publication de la présente loi ;
- 3 pour les bénéficiaires ayant entre 55 et 59 ans au jour de la publication de la présente loi ;
- 4 pour les bénéficiaires ayant entre 50 et 54 ans au jour de la publication de la présente loi ;
- 5 pour les bénéficiaires ayant entre 45 et 49 ans au jour de la publication de la présente loi ;
- 6 pour les bénéficiaires ayant entre 40 et 44 ans au jour de la publication de la présente loi ;
- 7 pour les bénéficiaires ayant entre 35 et 39 ans, au jour de la publication de la présente loi ;
- 8 pour les bénéficiaires ayant entre 30 et 34 ans, au jour de la publication de la présente loi ;
- 9 pour les bénéficiaires ayant entre 25 et 29 ans, au jour de la publication de la présente loi ;
- 10 pour les bénéficiaires ayant moins de 25 ans, au jour de la publication de la présente loi.
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 28 rectifié, présenté par MM. Fouché, Beaumont, P. Blanc, Chatillon, Houpert, Bernard-Reymond et Lefèvre, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les avoués près les cours d'appel en exercice à la date de publication de la présente loi ont droit en outre à une indemnité destinée à compenser le préjudice de carrière résultant de la perte de leur outil de travail. Cette indemnité est égale à 10 % de la valeur de l'office mentionnée au premier alinéa de l'article 13 pour chaque année séparant, à la date de publication de la présente loi, le bénéficiaire de l'âge de soixante-cinq ans.
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 29 rectifié, présenté par MM. Fouché, Beaumont, Bernard-Reymond, Chatillon, Houpert, Lefèvre et P. Blanc, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'indemnité prévue au titre de la perte du droit de présentation est majorée d'une indemnité de remploi égale à 20 % de la valeur de l'office déterminée selon les modalités fixées au I de l'article 13.
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 49 rectifié, présenté par MM. Mézard et Collin, Mme Escoffier et MM. Alfonsi, Fortassin et Plancade, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'indemnité perçue conformément à l'article 13 est soumise au régime d'imposition des plus-values ou moins-values professionnelles à long terme quelle que soit la durée de détention de l'office.
II. - Faute pour l'ancien avoué d'exercer la profession d'avocat ou l'une des activités prévues à l'article 21 de la présente loi, les plus-values soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies du code général des impôts constatées lors de la perception de l'indemnité de l'article 13, entrent dans le champ d'application, selon le cas, soit de l'article 151 septies A du même code en cas de départ en retraite, soit de l'article 238 quindecies du même code et ce quelle que soit la date à laquelle a été entreprise la nouvelle activité.
III. - En cas de poursuite de l'activité d'avocat ou de l'une des activités prévues à l'article 21, les plus-values nettes soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies font l'objet d'un report d'imposition jusqu'à la date de la cessation de l'activité entreprise.
Par dérogation à l'article 39 quindecies, en cas de moins-value, celle-ci sera déductible des résultats de l'exercice en l'absence de poursuite de l'activité d'avocat ou de l'une des activités prévues à l'article 21.
IV. - Les associés des sociétés civiles professionnelles ou les sociétés d'exercice libéral, décidant de continuer l'exercice sous forme de société d'avocats, seront soumis aux dispositions suivantes :
- les reports d'imposition des plus-values d'apport prévues sous les articles 93-2 et 151 octies du même code, continueront de s'appliquer ;
- les plus-values nettes constatées en cas de perception de l'indemnité font l'objet d'un report d'imposition jusqu'à la date de cessation de l'associé ou des associés exerçant au sein de la structure.
V. - La déclaration de cessation d'exercice de l'activité prévue à l'article 202 du même code doit intervenir dans le délai de douze mois de la date du versement des indemnités prévues à l'article 13.
VI. - Les plus-values à court terme ou à long terme constatées à l'occasion de la cession d'activité ne sont pas soumises aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine. »
VII. - Les pertes de recettes résultant pour l'État des I à VI ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Il apparaît nécessaire de préciser, dans un article additionnel, le régime applicable à la perception de l’indemnité allouée au titre de la suppression du droit de présentation prévue au I de l’article 13.
Il s’agit, d’abord, d’étendre le bénéfice des exonérations en cas de départ à la retraite ou de cession de branche complète d’activité en cas de cessation d’activité.
Il s’agit, ensuite, d’instaurer un régime de report d’imposition des plus-values constatées en cas de poursuite d’activité en qualité d’avocat ou de membre d’une des professions mentionnées à l’article 21. Le report de l’imposition est destiné à faciliter la reconversion des professionnels concernés. L’imposition deviendrait alors effective lors de la cessation d’exercice.
Les dispositions prévues seraient applicables quel que soit le mode d’exercice de l’office, en nom personnel ou sous le couvert d’une société d’exercice professionnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement tend à préciser le régime fiscal des indemnités versées aux avoués. Il semble largement satisfait par les dispositions adoptées par la commission à l’article 13, alinéa 7, afin d’exonérer de toute imposition les plus-values qui seraient réalisées à l’occasion du versement des indemnités. Par conséquent, je sollicite son retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Lors de précédentes réformes concernant les avoués de première instance ou les commissaires-priseurs judiciaires, le Sénat avait décidé d’appliquer le droit commun.
En l’occurrence, cela signifierait que les avoués qui deviendront avocats seront considérés comme continuant l’exercice de leur activité : dès lors, la réforme est fiscalement neutre. Ceux qui partent à la retraite bénéficieront des mêmes exonérations d’imposition de plus-values que s’ils avaient cédé leur office dans la perspective de la retraite, en application des dispositions qui viennent d’être adoptées dans le cadre de la loi de finances rectificative.
Cet amendement étant donc très largement satisfait, j’en demande le retrait, faute de quoi je devrai émettre un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Mézard, l’amendement n° 49 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Mézard. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 49 rectifié est retiré.
Article 14
Tout licenciement survenant en conséquence directe de la présente loi entre la publication de celle-ci et le 31 décembre 2012 est réputé licenciement économique au sens de l’article L. 1233-3 du code du travail.
Dès lors qu'ils comptent un an d'ancienneté ininterrompue dans la profession, les salariés perçoivent du fonds d’indemnisation prévu à l’article 19 des indemnités calculées à hauteur d'un mois de salaire par année d'ancienneté dans la profession.
Le licenciement ne prend effet qu’au terme d’un délai de préavis de deux mois à compter de la transmission par l’employeur de la demande de versement des indemnités de licenciement adressée à la commission nationale prévue à l’article 16. L’employeur notifie au salarié le contenu de la demande et la date de sa transmission à la commission.
À compter de six mois après la promulgation de la présente loi, l’employeur signifie, par lettre recommandée avec accusé de réception, à tout salarié qui en fait la demande, s’il est susceptible ou non de faire l’objet d’une mesure de licenciement répondant aux conditions définies au premier alinéa. Dans l’affirmative, le salarié concerné qui démissionne par anticipation perçoit du fonds d’indemnisation prévu à l’article 19 une indemnité exceptionnelle de reconversion égale au montant le plus favorable des indemnités de licenciement auxquelles il pourrait prétendre en vertu de l’article L. 1234-9 du code du travail ou de la convention collective nationale du travail du 20 février 1979 réglant les rapports entre les avocats et leur personnel.
L’employeur qui s’abstient de répondre à la demande du salarié ou qui lui indique qu’il n’est pas prévu qu’il fasse l’objet d’une mesure de licenciement perd le droit de voir versé par le fonds d’indemnisation prévu à l’article 19, la part de l’indemnité majorée de licenciement correspondant aux indemnités légales ou conventionnelles de licenciement qu’il lui appartient de verser à l’intéressé au titre de la rupture du contrat de travail.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, sur l'article.
M. Jacques Mézard. Il est rappelé, dans cet article qui constitue à n’en pas douter un des éléments clés de la réforme, que tout licenciement survenant en conséquence directe de cette loi sera réputé économique.
Sans revenir sur les explications qui ont été données lors de la discussion générale, je tiens à redire que nous sommes placés devant le fait du prince : une loi tout à fait contestable entraînera des licenciements et aura de graves conséquences pour un nombre important de salariés des études d’avoués.
Certes, les dispositions proposées par la commission des lois constituent un progrès considérable par rapport à celles du projet de loi initial ou du texte de l’Assemblée nationale. Ainsi, le versement d’un mois de salaire par année de présence représente certainement une avancée importante.
Toutefois, je le répète, les conséquences sociales de l’application de cette loi seront catastrophiques, surtout en cette période de crise économique : pourquoi provoquer le licenciement de plus de 1 600 salariés dans des conditions à nos yeux inacceptables ?
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer les mots :
entre la publication de celle-ci et le 31 décembre 2012
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement vise à supprimer toute limite temporelle susceptible de restreindre le nombre de bénéficiaires d’une indemnisation. À l’heure actuelle, le projet de loi ne prévoit rien en faveur des personnes qui, à la suite de l’annonce de cette réforme, ont décidé d’anticiper la loi en démissionnant. Leur situation a pourtant été bouleversée en raison de la réforme et elles doivent également être indemnisées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer toute limitation de temps pour la prise en charge par l’État des indemnités majorées de licenciement des salariés ayant perdu leur emploi en raison de l’application de la présente loi. Or, il n’est pas forcément souhaitable qu’un avoué ayant changé d’activité puisse bénéficier indéfiniment du dispositif de prise en charge par l’État des indemnités de licenciement pour les salariés de son office qu’il aurait gardés à son service après la disparition de la profession d’avoué.
En effet, il est préférable que les avoués qui se reconvertiront dimensionnent correctement leur nouveau cabinet et procèdent d’emblée aux licenciements nécessaires, sans renvoyer cette décision à plus tard. De plus, un tel mécanisme serait susceptible de troubler les règles normales de concurrence.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. M. le rapporteur a exprimé très justement et très complètement les raisons pour lesquelles on ne peut être favorable à cet amendement. Une telle proposition ne me paraît vraiment pas raisonnable. Le projet de loi permet déjà, je le rappelle, d’étaler les licenciements sur trois années, ce qui est beaucoup. J’émets également un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 3 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mme Dini, M. Dubois, Mme N. Goulet, MM. Merceron, Amoudry, J. Boyer, Deneux, Borotra et Soulage et Mmes Morin-Desailly et Payet, est ainsi libellé :
Alinéa 1
après les mots :
31 décembre 2012
insérer les mots :
, ou le 31 décembre 2014 pour les personnels de la chambre nationale des avoués près les cours d'appel,
La parole est à M. Yves Détraigne.
M. Yves Détraigne. Cet amendement a pour objet de prévoir, en faveur du personnel de la Chambre nationale des avoués, une exception à la date butoir du 31 décembre 2012. En effet, l’article 29 du projet de loi prévoit le maintien de cette chambre jusqu’au 31 décembre 2014. Il s’agit donc de prévoir que le licenciement de ses salariés soit réputé économique jusqu’à cette échéance.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Patrice Gélard, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur cet amendement, qui permet de combler un oubli de sa part. Cette disposition ne concerne qu’une demi-douzaine de personnes, mais il convient de prendre leur situation en compte.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Je comprends bien l’intention de M. Détraigne. Néanmoins, il semble difficile de faire bénéficier de mesures de reclassement des salariés licenciés au moment de la dissolution de la Chambre nationale des avoués, alors qu’il appartient précisément à celle-ci de suivre l’application de ces mesures. Peut-être pourrions-nous profiter de la poursuite de la navette pour réfléchir à cette difficulté, dont je ne nie pas la réalité. Dans l’immédiat, la solution proposée n’est pas satisfaisante à mes yeux. Pour cette raison, je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, je m’en remettrai à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Monsieur Détraigne, retirez-vous l’amendement ?
M. Yves Détraigne. Non, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié bis.
(L'amendement est adopté à l'unanimité des présents.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 58, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
dans la limite de trente mois
II. - Alinéa 3, première phrase
Remplacer les mots :
délai de préavis de deux mois
par les mots :
délai de trois mois
La parole est à Mme la ministre d'État.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Cet amendement témoigne d’une nouvelle avancée, de la part du Gouvernement, en faveur des salariés des études d’avoués. Il est le résultat d’échanges approfondis avec le rapporteur et la commission des lois.
Le Gouvernement avait déjà consenti, devant l’Assemblée nationale, à un effort particulier pour tenir compte de la situation, très bien décrite tout à l’heure par plusieurs intervenants, de salariés relativement âgés qui pourraient rencontrer des difficultés pour retrouver une situation. Nous avions donc choisi délibérément de privilégier ces salariés, en leur accordant une indemnisation beaucoup plus forte que celle qui est allouée ordinairement.
Après discussion avec M. le rapporteur, nous avons opté pour une autre solution, consistant à faire bénéficier les salariés des offices d’avoués d’une indemnité de licenciement d’un mois de salaire par année d’ancienneté dans la profession, dans la limite de trente mois de salaire. Un dispositif analogue avait été instauré en faveur des salariés des commissaires-priseurs lors de la réforme du statut de ces derniers, en 2000.
M. le président. L'amendement n° 16, présenté par MM. Michel et Anziani, Mme Klès, M. Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 3, première phrase
Supprimer les mots :
de préavis
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. L'article 14 du projet de loi est relatif à l'indemnisation des salariés licenciés des offices d’avoués.
Jugeant insuffisant le dispositif inscrit dans le texte adopté à l'Assemblée nationale, la commission des lois du Sénat a adopté un amendement prévoyant la perception par les salariés, dès lors qu'ils comptent au minimum un an d'ancienneté ininterrompue dans la profession, d’indemnités de licenciement calculées sur la base d'un mois de salaire par année d'ancienneté. La commission a également prévu le versement direct par le fonds d'indemnisation des sommes dues au titre du licenciement des salariés des avoués.
Il s'agit là d'une amélioration incontestable, dont nous nous réjouissons. Toutefois, nous proposons, par cet amendement, une modification rédactionnelle.
En réalité, il nous paraît juridiquement impossible de faire prendre effet à une notification de licenciement après un préavis qui serait, en l'espèce, de deux mois à compter de la transmission par l'employeur de la demande de versement des indemnités de licenciement. La notion de préavis n'existe, selon le code du travail, qu'après la prise d'effet d'un licenciement, et non pas avant. Autrement dit, on ne peut pas être en préavis avant l'effet du licenciement. En revanche, on l’est assurément une fois que le licenciement est effectif.
L’usage du terme « préavis » nous paraît donc inapproprié à l’alinéa en question et pourrait être source de confusion et d’incompréhension, donc de contentieux.