M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. Adopter la mesure proposée alourdirait la procédure et confronterait les CPP aux résultats de la recherche, alors qu’il est prévu de leur confier un rôle exclusivement éthique.
La commission vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement, monsieur Autain.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le Gouvernement était favorable à cet amendement… (Mme la présidente de la commission des affaires sociales rit.)
En effet, cette proposition me semble de qualité, dans la mesure où il est effectivement essentiel que l’information délivrée soit intelligible pour les participants à la recherche. Cette extension de compétence s’inscrit pleinement dans les missions des CPP.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. À la suite des observations de Mme la ministre, la commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. L’amendement n° 23 rectifié bis, qui doit maintenant être appelé en discussion, a été déposé très tardivement par le Gouvernement. Je vous demande, monsieur le président, de bien vouloir suspendre la séance quelques minutes, afin que la commission puisse l’étudier.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures trente, est reprise à vingt-trois heures quarante.)
M. le président. La séance est reprise.
L'amendement n° 23 rectifié bis, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 60
Insérer six alinéas ainsi rédigés :
« Le comité de protection des personnes peut, par exception au premier alinéa de l'article L. 1122-1-1, autoriser qu'au sein des recherches mentionnées au quatrième alinéa de l'article L. 1121-1, une recherche en santé publique soit réalisée sous réserve que les conditions suivantes soient réunies :
« - la recherche a pour objet d'améliorer la santé publique ;
« - la recherche ne porte pas sur un produit mentionné à l'article L. 5311-1 ;
« - la recherche n'est effectuée ni sur des personnes qui font l'objet d'une mesure de protection légale, ni sur des personnes majeures hors d'état d'exprimer leur consentement, ni sur des personnes privées de liberté, ni sur des personnes hospitalisées sans leur consentement, ni sur des personnes admises dans un établissement sanitaire et social à d'autres fins que la recherche ;
« - le recueil du consentement individuel, écrit et exhaustif pour l'ensemble des personnes concernées est rendu matériellement quasi impossible du fait de la nature de la recherche ou de ses exigences méthodologiques ;
« - les personnes concernées doivent être informées collectivement, préalablement au début de la recherche, de la nature de la recherche, de leur possibilité de refuser d'y participer. »
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. En imposant de recueillir l’avis d’un comité de protection des personnes pour toutes les recherches impliquant la personne humaine, cette proposition de loi marque un vrai progrès.
Bien entendu, il est indispensable que les modalités de recueil du consentement soient adaptées à la nature de la recherche et aux risques que les personnes encourent éventuellement. Nous en avons déjà longuement débattu : il n’y a aucune raison de prévoir les mêmes exigences pour les recherches interventionnelles, qui comportent un degré de risque certain, et pour des recherches en santé publique, pour lesquelles ces dangers sont minimes, pour ne pas dire nuls.
Il ne faut pas que des contraintes disproportionnées rendent impossibles certaines recherches, par exemple celles qui porteraient sur l’évaluation de campagnes d’information, d’éducation ou d’application de règles d’hygiène. Il serait tout de même extravagant d’exposer les investigateurs à trois ans de prison s’ils ne respectent pas strictement les modalités formelles de recueil du consentement ! Nous risquerions même d’étouffer ces recherches en créant des barrières presque infranchissables.
Je propose donc que le CPP puisse autoriser les recherches impliquant la personne humaine, et uniquement celles-ci, à la condition que les personnes concernées bénéficient d’une information collective sur la recherche, à laquelle elles auront bien évidemment la possibilité de ne pas participer.
L’amendement a pour objet de préciser que ces recherches ne peuvent porter, bien entendu, ni sur les produits de santé ni sur les populations vulnérables. Par ailleurs, grâce à l’adoption d’un amendement de Mme le rapporteur le 23 octobre dernier, si le protocole prévoit une séquence comportant une intervention individuelle, telle qu’une vaccination ou un traitement, un consentement écrit sera automatiquement requis pour cette séquence.
En outre, la proposition de loi prévoit que le niveau de risque est apprécié par les CPP, qui ont ainsi la possibilité de requalifier la recherche si celle-ci ne remplit pas les conditions énoncées dans l’amendement en question, après avoir interrogé l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l’AFSSAPS, s’ils le souhaitent.
Ainsi, puisque cette catégorie de recherche n’est soumise pour l’instant à aucun comité de protection, l’amendement vise à élever le niveau d’exigence par rapport à la législation en vigueur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. Cet amendement me semble complexe et plein de sous-entendus.
En effet, il est sous-tendu par la nécessité d’un recueil du consentement, puisqu’il fait référence au cas où le recueil du consentement individuel est rendu matériellement quasiment impossible. D’ailleurs, qu’est-ce, dans un tel cas, qu’une quasi-impossibilité matérielle ?
En outre, je suis très réservée sur le principe de l’information collective des participants. Est-ce à dire que le temps des chercheurs est trop précieux pour être consacré à expliquer précisément aux patients ce à quoi ils s’engagent ?
Enfin, la dérogation prévue au profit des recherches présentant un risque minimal revient sur le fondement même des principes posés par la commission. Cette dernière a indiqué que le consentement écrit ne serait pas nécessaire quand une recherche comporte un volet interventionnel, mais qu’il serait obligatoire quand elle implique une intervention sur la personne.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 31, présenté par Mme Hermange, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 74
Supprimer la référence :
L. 1123-6,
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. Il s'agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par Mme Hermange, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 75
Remplacer les mots :
des articles
par les mots :
de l'article
et supprimer la référence :
et L. 1123-6
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. Il s'agit également d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 39 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 93
Remplacer les mots :
« impliquant la personne humaine »
par les mots :
« interventionnelles à l'exception de celles mentionnées au second alinéa du 1° de l'article L. 1121-1 ».
II. - Après l'alinéa 93
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...° Le premier alinéa de l'article L. 1123-10 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les évènements et les effets indésirables, définis pour chaque type de recherches mentionnées au second alinéa du 1°) de l'article L. 1121-1 et pour les recherches non-interventionnelles, sont notifiés respectivement de l'investigateur au promoteur et par le promoteur à l'autorité compétente. »
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J’ai déjà longuement évoqué le rôle des CPP. Ceux-ci donnent des avis sur les recherches, mais ils n’ont pas pour mission de suivre ces dernières.
S’ils sont aujourd'hui destinataires des informations relatives aux événements indésirables graves, les CPP sont incapables d’exploiter utilement ces notifications, dont ils sont d’ailleurs submergés.
De surcroît, il s'agit d’une procédure redondante, puisque l’AFSSAPS est déjà destinataire de toutes les informations relatives à la vigilance, y compris donc celles qui portent sur les événements et les effets indésirables, et dispose seule de pouvoirs d’inspection et de police sanitaires.
Il convient donc de mieux cibler cette obligation de notification, tout en respectant la directive européenne de 2001, qui impose la notification des effets indésirables graves aux CPP et à l’autorité compétente, uniquement pour les recherches interventionnelles à risque.
Très logiquement, l’amendement que je vous présente, mesdames, messieurs les sénateurs, a donc pour objet de limiter l’obligation de notification aux CPP des événements et des effets indésirables au seul périmètre des recherches interventionnelles à risque. Il s'agit d’un amendement de simple bon sens !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer l’information des comités de protection des personnes sur les événements indésirables survenus lors des recherches interventionnelles à risque minime ou des recherches observationnelles.
La commission n’a pas souhaité limiter ainsi l’information des comités de protection des personnes sur les événements indésirables, puisque celle-ci doit, le cas échéant, leur permettre de s’assurer que les personnes participant au protocole de recherche ont bien été informées et que leur consentement est maintenu, même si le risque est minime – par exemple, s’il existe un risque d’infarctus de l’ordre de 1 %.
Il est vrai, madame la ministre, que les comités de protection des personnes sont techniquement désarmés pour traiter un à un les événements indésirables qui leur sont notifiés, contrairement à l’AFSSAPS, mais cette observation est valable pour tous les types de recherche. Il faut que les comités de protection des personnes puissent se prononcer sur des synthèses.
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. La commission des affaires sociales a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L’abondance des notifications de cas individuels noie les comités de protection des personnes sous un déluge d’informations !
M. François Autain. Ils ne se plaignent pas !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ces données sont totalement inutilisables !
Il n’est pas question de priver les comités de protection des personnes d’information ! Les cas d’effets indésirables provoqués par des recherches sont notifiés à l’AFSSAPS, qui transmet une synthèse aux comités de protection des personnes. Il va de soi que ceux-ci sont informés s’agissant des recherches interventionnelles.
M. le président. L'amendement n° 22 rectifié, présenté par Mmes Procaccia, Desmarescaux, Giudicelli et Debré, MM. Milon, Laménie et Lardeux et Mme Bout, est ainsi libellé :
Alinéa 113
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Cet arrêté est pris dans les deux mois à compter de la publication de la présente loi.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Je le reprends au nom de la commission, monsieur le président !
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 22 rectifié bis.
Vous avez la parole pour le présenter, madame la présidente de la commission.
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. L'enjeu, pour les sociétés du secteur des cosmétiques ou de l'alimentaire, est suffisamment important pour qu'un délai de parution de l'arrêté prévu à l’alinéa 113 de l’article soit fixé.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Si Mme Procaccia avait été là, je lui aurais demandé de retirer cet amendement, qui vise à imposer au pouvoir réglementaire de prendre dans un délai de deux mois, à compter de la publication de la loi, l’arrêté qui exemptera certains types de tests de produits cosmétiques ou alimentaires de l’examen d’un comité de protection des personnes.
Je partage le souci de l’auteur de l'amendement et le vôtre, madame la présidente de la commission, de voir les textes d’application de la loi publiés rapidement, car il faut que tous les acteurs, y compris les promoteurs et les patients, puissent bénéficier des avancées permises par le texte.
Toutefois, je ne peux pas m’engager à ce que cet arrêté paraisse dans un délai aussi court ! Certains d’entre vous connaissent certainement le mécanisme de publication des textes réglementaires, notamment les impératifs à observer en matière de concertation. J’en appelle à votre bon sens, car nous ne pouvons avoir une approche complètement théorique et déconnectée de la réalité !
M. le président. Madame la présidente de la commission, l'amendement n° 22 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales. Ayant entendu l’appel au bon sens de Mme la ministre, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 22 rectifié bis est retiré.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote sur l'article 1er.
M. Jean-Pierre Godefroy. En procédant à un mélange des genres entre des recherches de nature différente, cet article tend à banaliser les recherches biomédicales, ce qui risque d’être préjudiciable à la protection des personnes, en raison notamment de la dénaturation du rôle des CPP.
En effet, si ce texte crée bien un socle commun à l’ensemble des recherches sur la personne, il ne permettra pas pour autant, aux termes du rapport de Mme Hermange, « aux comités de protection des personnes de juger du caractère éthique de toutes les recherches menées et [ne] mettra [pas] fin aux contournements possibles par le jeu des qualifications entre recherche biomédicale, recherche en soins courants et recherche observationnelle ».
Pour les recherches interventionnelles qui ne portent pas sur les médicaments et ne comportent que des risques et des contraintes minimes – nous vous avons d’ailleurs interrogée sur la notion de « contraintes minimes », madame la ministre –, comme pour les recherches non interventionnelles, les chercheurs pourront saisir à leur guise les comités de protection des personnes. En effet, si ces derniers auront peut-être besoin d’un avis favorable du comité de protection des personnes pour publier les résultats de leurs recherches, il n’en ira pas de même pour mettre celles-ci en œuvre !
La raison en est simple : si l’article 1er complète bien l’article L. 1121-4 du code de la santé publique, en prévoyant que ces recherches ne peuvent être mises en œuvre qu’après avis favorable du comité de protection des personnes, en revanche aucune sanction pénale n’est prévue en cas de manquement à cette obligation ! La proposition de loi limite le champ de l’infraction aux seules recherches interventionnelles, qui comportent une intervention sur la personne non justifiée par la prise en charge habituelle. Est-ce un oubli ? L’absence de sanction ne peut que rendre nulle la volonté que vous affichez de protéger les personnes participant à des recherches impliquant la personne humaine et rétablira l’opacité qui entoure certaines pratiques.
Par ailleurs, un amendement tendant à ouvrir, par voie dérogatoire, la possibilité d’effectuer des recherches sur des personnes non affiliées à un régime de sécurité sociale a été adopté à l’article 1er. Nous avons souligné que nous ne pouvons l’accepter. En effet, il s’agira bien souvent de personnes migrantes ou sans papiers. Comment pourra-t-on les identifier et les retrouver pendant la durée de la recherche, qui pourra atteindre plusieurs mois ? Ces personnes auront-elles la certitude de pouvoir rester sur le territoire français pendant cette période ou seront-elles toujours expulsables ? De deux choses l’une : ou bien elles sont expulsables, et à quoi bon alors les intégrer au protocole de recherche ; ou bien elles ne le sont pas, ce qui risque de les amener à accepter de participer à un protocole de recherche pour bénéficier d’un traitement, d’une part, et pour éviter d’être reconduites à la frontière, d’autre part.
Enfin, comment, en cas de problème, retrouvera-t-on les personnes ayant participé à un protocole de recherche une fois qu’elles auront été reconduites à la frontière ? Quels seront leurs moyens de recours ? Comment pourront-elles faire valoir leurs droits en cas de problème lié au protocole de recherche ?
Comme nous n’avons obtenu aucune réponse à ces questions, et même si nous reconnaissons que, grâce au travail de la commission des affaires sociales, ce texte contient des avancées très importantes par rapport au texte de l’Assemblée nationale, nous nous abstiendrons sur cet article. Toutefois, il s’agit d’une abstention plutôt positive. (M. Robert del Picchia s’exclame.)
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Je souhaite rendre hommage au travail de la commission des affaires sociales, en particulier de Mme le rapporteur, qui a permis d’améliorer considérablement cet article.
Ainsi, les recherches non interventionnelles ont été tirées du vide juridique dans lequel elles se trouvaient. Il s’agit là d’une avancée réelle.
Cela étant, il faut prendre en considération les inquiétudes légitimes exprimées par M. Godefroy. Je reconnais qu’intégrer à un protocole de recherche des personnes qui ne sont pas couvertes par l’assurance maladie présente un risque. Néanmoins, dans la mesure où ce ne pourra être qu’à titre dérogatoire, après avis motivé du comité de protection des personnes, nous disposons à mon sens d’une garantie suffisante. C'est la raison pour laquelle le groupe CRC-SPG votera cet article.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
L’article L. 1121-16-1 du code la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 1121-16-1. – On entend par recherches à finalité non commerciale, les recherches interventionnelles dont les résultats ne sont pas exploités à des fins lucratives, qui poursuivent un objectif de santé publique et dont le promoteur ou le ou les investigateurs sont indépendants à l’égard des entreprises qui fabriquent ou qui commercialisent les produits faisant l’objet de la recherche.
« Pendant la durée de la recherche interventionnelle, le promoteur fournit gratuitement les médicaments expérimentaux et, le cas échéant, les dispositifs médicaux utilisés pour les administrer, ainsi que, pour les recherches portant sur des produits autres que les médicaments, les produits faisant l’objet de la recherche.
« Les caisses d’assurance maladie prennent en charge les produits faisant l’objet de recherches à finalité non commerciale dans les conditions suivantes :
« 1° Les médicaments bénéficiant d’une autorisation de mise sur le marché ou faisant l’objet d’une autorisation temporaire d’utilisation mentionnée au a de l’article L. 5121-12, inscrits sur la liste mentionnée à l’article L. 5123-2 ou sur la liste prévue à l’article L. 5126-4, ainsi que les produits inscrits sur la liste mentionnée à l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale ou pris en charge au titre des prestations d’hospitalisation mentionnées à l’article L. 162-22-6 du même code, lorsqu’ils sont utilisés dans le cadre d’une recherche à finalité non commerciale autorisée dans les conditions ouvrant droit au remboursement ;
« 2° À titre dérogatoire, les médicaments ou produits faisant l’objet d’une recherche interventionnelle autorisée à finalité non commerciale ou d’une recherche mentionnée au 2° de l’article L. 1121-1, ayant reçu l’avis favorable d’un comité de protection des personnes, à finalité non commerciale, lorsqu’ils ne sont pas utilisés dans des conditions ouvrant droit au remboursement, sous réserve de l’avis conforme de la Haute Autorité de santé et de l’avis conforme de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie. Ces instances s’assurent de l’intérêt de ces recherches pour la santé publique et notamment pour l’amélioration du bon usage et pour l’amélioration de la qualité des soins et des pratiques. La décision de prise en charge est prise par arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.
« Dans les cas mentionnés aux 1° et 2° du présent article, le promoteur de la recherche s’engage à rendre publics les résultats de sa recherche.
« Lorsque la recherche ayant bénéficié d’une prise en charge ne répond plus à la définition d’une recherche à finalité non commerciale, le promoteur reverse les sommes engagées pour les recherches concernées aux régimes d’assurance maladie selon les règles prévues à l’article L. 138-8 du code de la sécurité sociale. Le reversement dû est fixé par décision des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale après que le promoteur concerné a été mis en mesure de présenter ses observations. Le produit du reversement est recouvré par les organismes mentionnés à l’article L. 213-1 du même code désignés par le directeur de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Le recours présenté contre la décision fixant ce reversement est un recours de pleine juridiction. Les modalités d’application du présent alinéa sont fixées par décret. »
M. le président. L'amendement n° 13, présenté par MM. Godefroy et Le Menn, Mmes Schillinger, Printz, Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Alquier et Campion, M. Cazeau, Mmes Chevé et Demontès, MM. Daudigny et Desessard, Mme Ghali, MM. Gillot, Jeannerot et S. Larcher, Mme San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy. L’article L. 1121-16-1 du code de la santé publique définit les conditions de prise en charge par l’assurance maladie des médicaments utilisés dans le cadre d’une recherche biomédicale.
Actuellement, cette prise en charge intégrale ne s’applique que si le promoteur de la recherche est public.
Or, selon le rapport Jardé sur la médecine légale, cette disposition, introduite par la loi de programme pour la recherche du 18 avril 2006, serait contraire au droit communautaire, notamment à l’article 87 du traité instituant la Communauté européenne, puisqu’elle se fonde sur une distinction de catégorie juridique pour justifier une aide d’État.
L’article prévoit donc de substituer à la notion de promoteur public celle d’essai non commercial. En s’attachant à la finalité de la recherche plutôt qu’à la nature du promoteur, l’article permettra que la prise en charge intégrale par l’assurance maladie s’applique que le promoteur soit public ou privé.
On comprend bien la démarche : pour rendre le promoteur privé éligible à la prise en charge par l’assurance maladie et pour faire taire les suspicions, il est créé une catégorie des recherches à finalité non commerciale.
Or définir ce que sont des « recherches à finalité non commerciale » n’est pas évident. Le concept est même assez incohérent.
Faire référence à des recherches à finalité non commerciale sous-entend qu’il existe des recherches à finalité commerciale. Par ailleurs, la catégorie des recherches à finalité non commerciale au sens strict exclut a priori tout dépôt de brevet. Le flou qui entoure cette définition ne risque-t-il pas d’aboutir à un élargissement du champ de prise en charge par l’assurance maladie à l’ensemble des promoteurs ?
Face à ce risque, qui n’est pas neutre pour une sécurité sociale dont on connaît déjà l’ampleur du déficit, peut-on se contenter d’invoquer l’intérêt d’une telle disposition pour la recherche institutionnelle, notamment pour les recherches comparatives entre médicaments ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Marie-Thérèse Hermange, rapporteur. Il s’agit d’un problème complexe.
La suppression de cet article serait une perte pour la recherche institutionnelle. En effet, la notion de recherche à finalité non commerciale, catégorie dont le régime est défini par cet article, découle d’une directive européenne relative aux essais cliniques sur les médicaments.
Le Parlement européen a estimé qu’à côté des recherches destinées à déboucher sur une autorisation de mise sur le marché, il fallait prévoir un cadre légal simplifié pour les recherches médicales qui, sans aboutir à une commercialisation, permettent cependant un gain en matière de santé publique.
Certains estiment que les recherches à finalité non commerciale ne produisent pas d’innovations et ne sont donc pas de la véritable recherche. Pourtant, cette catégorie recouvre toutes les recherches que les laboratoires n’ont aucun intérêt à mener, par exemple des études comparant les effets de deux médicaments pour une même pathologie ou tendant à déterminer la forme de prise en charge la plus efficace pour une pathologie.
De telles recherches sont rarement sources de profits, mais elles sont sources d’économies et de mieux-être pour les malades. De fait, presque toutes sont prises en charge par les acteurs institutionnels de la recherche, comme les CHU. Il n’est donc pas anormal que des dispositions financières spécifiques leur soient consacrées.
Par ailleurs, les recherches qui aboutiraient à une découverte ayant un potentiel commercial peuvent parfaitement être achetées par un laboratoire qui remboursera alors l’assurance maladie du financement de la recherche.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable et sollicite le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Alors que nous venons à peine d’achever l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, je suis, à l’évidence, extrêmement attentive, tout comme M. Godefroy, à préserver les ressources de l’assurance maladie.
Pour autant, comme l’a excellemment souligné Mme le rapporteur, un certain nombre de recherches qui ne seront jamais financées par les laboratoires peuvent revêtir un intérêt très important pour l’assurance maladie.
En tout état de cause, la commission prévoit que, lorsqu’une recherche initialement non commerciale devient commerciale, le promoteur académique qui demande une AMM pour un produit qu’il a développé remboursera à l’assurance maladie les charges qu’elle a supportées.
Cet amendement, qui part certainement d’une bonne intention, est superflu, voire contre-productif. Aussi, le Gouvernement émet un avis défavorable.