Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi, après M. Karoutchi, de vous demander de bien vouloir excuser Mme Christine Lagarde, qui aurait souhaité participer à ce débat, mais qui est retenue à Luxembourg pour une réunion importante.

Je me félicite de la pertinence des questions qui ont été soulevées par tous les orateurs, questions légitimes que l’on est en effet en droit de se poser.

Je tiens tout d’abord à remercier M. le rapporteur, qui, fidèle à son habitude, nous a présenté ce texte avec une grande clarté. Tant dans son rapport écrit que dans son intervention, il a fort bien dégagé les enjeux de ce projet de loi nécessaire au rapprochement des groupes Caisse d’épargne et Banque populaire.

Comme vous l’avez souligné, monsieur le rapporteur, cette opération se déroule dans des délais très serrés. De nombreux intervenants ont également pointé du doigt l’urgence dans laquelle s’inscrit cette fusion, soit pour en contester la légitimité, soit pour l’approuver

Cette opération a été calibrée pour placer l’ensemble de ce groupe à un ratio Tier One d’environ 9 %, c’est-à-dire à un niveau de rentabilité égal ou proche de celui de ses principaux concurrents européens.

Monsieur le rapporteur, vous avez comparé cette opération avec le rachat des titres de la CDC dans le capital des caisses d’épargne.

Je vous rappelle, mais vous le savez, qu’en l’occurrence comparaison ne vaut pas totalement raison. Lors du rachat des titres de la CDC, seul un des deux groupes était concerné alors que, dans l’opération actuelle, l’apport de l’État de 7 milliards d’euros porte sur les deux groupes.

Madame Bricq, je voulais tout d’abord vous dire que j’ai peu apprécié la manière dont vous avez décrit la nomination de François Pérol, parce que vous avez mis en cause sa compétence,…

Mme Nicole Bricq. J’ai parlé non pas de sa nomination, mais de sa légitimité, monsieur le secrétaire d’État !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. … ce que d’autres n’ont pas fait. On peut critiquer tel ou tel aspect de cette affaire, mais vous êtes une des rares personnes à nier la compétence de François Pérol.

Mme Nicole Bricq. Effectivement !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Ensuite, vous vous êtes interrogée, avec d’autres, sur l’urgence du rapprochement. Eh bien, oui, il est des circonstances qui exigent l’urgence.

En octobre dernier, alors que tout le secteur financier était au bord du précipice, le Gouvernement a pris ses responsabilités et a agi dans l’urgence pour éviter que la crise financière ne sclérose entièrement les possibilités de financement de notre économie.

Ce rapprochement est en germe depuis 2006 ; nous n’avons pas décidé subitement d’accompagner le désir de ces groupes. Simplement, la crise financière a accéléré le processus.

Aujourd’hui, la procrastination n’est plus de mise. Il y a urgence, car il faut que les collaborateurs du groupe puissent se concentrer le plus rapidement possible sur le développement de leur groupe et non sur un processus interne.

Il y a urgence pour que les fonds propres du groupe soient consolidés et pour que celui-ci participe pleinement au financement de l’économie française.

Un certain nombre d’intervenants, dont Mme Bricq, ont évoqué le processus de consultation des institutions représentatives du personnel, et plus largement leur association aux organes de décision.

Ce processus a été engagé à la fin du mois de mars, c’est-à-dire voilà maintenant plus de deux mois. Dire que tout cela s’est fait dans la précipitation ne résiste pas à l’analyse. L’ensemble des informations disponibles et l’état des réflexions menées jusqu’à ce jour ont été transmis au comité d’entreprise.

Les dirigeants du groupe, sous l’influence des travaux du Sénat, ont amendé le protocole d’accord pour renforcer la représentation des salariés au conseil de surveillance en prévoyant une représentation des deux réseaux.

S’agissant des conséquences de ce rapprochement sur l’emploi, je voudrais indiquer très clairement que les chiffres qui ont été cités par certains ne correspondent à aucune réalité. Il n’est pas question de fusionner les réseaux. Au contraire, il s’agit de tirer parti de leur complémentarité. Dans une lettre qui a été envoyée ce jour aux organisations syndicales du nouveau groupe, François Pérol a pris des engagements clairs. Tout projet d’adaptation d’effectifs sera conduit uniquement sur une base volontaire afin d’éviter tout départ contraint dans les entités du groupe susceptibles d’être concernées.

Monsieur Jégou, vous avez longuement parlé de Natixis, et vous avez eu raison. Ce groupe a effectivement été durement affecté par la crise. Il a également été handicapé, vous l’avez dit et je le confirme, par une gouvernance défaillante à la suite de laquelle des décisions ont été prises : la création du nouvel organe central dont vous délibérez permettra, me semble-t-il, d’éviter les errements du passé et de clarifier la gouvernance de l’ensemble.

En intégrant Natixis dans un groupe au profil de risques plus diversifiés, ce rapprochement aura pour effet de consolider la situation de cette filiale et de l’intégrer dans un modèle qui semble beaucoup plus solide au regard de la crise : le modèle de la banque universelle.

En outre, la nouvelle direction a cantonné les actifs à risque de Natixis, nous en avons longuement parlé au cours de la discussion générale, et a adopté une politique de gestion extinctive de ces actifs pour réduire les risques.

Il est vrai, comme vous l’avez dit, monsieur Jégou, que nous ne savons pas de quoi l’avenir sera fait et que nous ne sommes par à l’abri de nouvelles dépréciations d’actifs. Mais le montant de l’apport de fonds propres de l’État a été calibré, en accord avec le gouverneur de la banque de France, pour permettre au nouveau groupe de disposer d’un ratio de fonds propres de 9 %, en tenant compte des pertes de Natixis.

S’agissant des sanctions concernant un certain nombre de dirigeants auxquels vous avez fait allusion, je voudrais vous indiquer que l’un des deux dirigeants des caisses d’épargne a déjà quitté le groupe,…

M. Jean-Jacques Jégou. Il coule des jours heureux !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. … et que l’autre le quittera au mois de juillet.

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. M. Foucaud s’est interrogé sur l’opportunité d’une loi dont la finalité n’est pas le respect de l’intérêt général. Je lui répondrai que, comme l’a souligné M. Marini, le rapprochement des caisses d’épargne et des banques populaires procède de la volonté des deux groupes.

Ce projet de loi n’est pas le signe d’une ingérence de l’État dans le secteur bancaire. Il est nécessaire pour créer le nouvel organe central commun aux deux réseaux et fixer ses prérogatives, notamment en matière de gestion de liquidités et de solvabilité de l’ensemble. Le recours à la loi est le droit commun. Je voulais le rappeler s’agissant de la définition des missions des organes centraux.

Monsieur Foucaud, vous avez aussi parlé des paradis fiscaux. L’Assemblée nationale, il est vrai, a adopté, avec le plein soutien du Gouvernement, un amendement qui renforce la transparence des établissements bancaires sur leurs activités dans les juridictions non coopératives.

Cet amendement est inspiré des travaux que la Haute Assemblée et l’Assemblée nationale ont conduits sur la crise financière.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Et le G 24 !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Vos travaux vont dans le sens des propositions qu’a faites le Président de la République dans le cadre du G 20.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Absolument !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Je me réjouis, pour ma part, que ces travaux aient pu aboutir à un amendement qui place la France au premier rang en matière de lutte contre les paradis fiscaux. Cette initiative a également donné lieu à des engagements des banques françaises pouvant aller jusqu’au retrait des paradis fiscaux.

Monsieur Foucaud, là où vous voyez une rupture, nous voyons une continuité, puisque ce texte s’inscrit pleinement dans le cadre de la loi de 1999 sur l’organisation des caisses d’épargne. Il renforce même la représentation des sociétaires en garantissant qu’ils soient majoritaires au sein du conseil de surveillance du nouvel organe central.

Monsieur Bourdin, je vous remercie de votre soutien et de celui du groupe UMP. Vous avez exposé avec une grande clarté les enjeux du rapprochement entre les caisses d’épargne et les banques populaires, et insisté avec justesse sur la complémentarité entre les deux réseaux. Ils partagent des valeurs communes, qui s’incarnent dans les banques coopératives, et se distinguent par leur forte présence sur le marché domestique et par l’importance de la banque de détail dans leur activité.

Les banques populaires disposent d’une forte présence auprès des professionnels et des entreprises, alors que les caisses d’épargne sont les partenaires privilégiés des particuliers et des collectivités locales. Cette forte complémentarité sera un atout pour le nouveau groupe et cela renforcera son positionnement auprès d’une clientèle très diversifiée.

Vous avez également insisté, à juste titre, sur l’urgence du rapprochement, qui a été voulu par les deux groupes. L’État accompagne simplement l’ensemble dans ce processus. La mise en œuvre rapide de ce rapprochement est une condition nécessaire pour assurer la solidité du groupe, notamment la réduction des risques de Natixis, et pour que ses collaborateurs et ses dirigeants puissent se concentrer sur le développement du nouvel ensemble.

Enfin, vous avez insisté sur l’originalité de ce rapprochement. Je voudrais insister, pour ma part, sur le pragmatisme dont le Gouvernement fait preuve dans la façon dont il souhaite accompagner ce rapprochement. Le nouveau groupe bénéficiera de la souscription, par l’État, de 3 milliards d’euros d’actions de préférence pour lui permettre de disposer d’un niveau de fonds propres élevés et pour tenir compte de l’impact de la création du nouvel organe central sur le niveau de ses fonds propres. Cet effort supplémentaire a une contrepartie, une présence au conseil d’administration et la possibilité de convertir ces actions de préférence en actions ordinaires.

Madame Escoffier, vous avez rappelé l’attachement des Français aux caisses d’épargne et aux banques populaires. C’est cet attachement qui justifie le maintien des deux réseaux et des deux marques. C’est le choix qui a été fait, et il me semble parfaitement justifié.

M. Alain Gournac. C’est très important !

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Le rapprochement recentrera les activités des deux groupes sur les activités de banque de détail les moins risquées.

Sur la centralisation, M. le rapporteur a montré que le texte reprend pour l’essentiel les prérogatives des deux organes centraux des caisses d’épargne et des banques populaires.

Enfin, la question de la représentation des sociétaires désignés par les présidents de conseil de surveillance et les présidents de conseil d’administration est réglée par le texte de la commission, qui a repris le texte de l’Assemblée nationale.

Monsieur Desessard, vous vous êtes interrogé sur les moyens de rembourser l’État.

Rappelons que l’État a laissé cinq ans au groupe pour rétablir sa situation. Le remboursement de l’État sera rendu possible, à la fois par le retour à la profitabilité du groupe et par le remplacement des fonds de l’État par des fonds privés comme des titres subordonnés ne donnant pas accès au capital.

Enfin, il ne faut pas oublier que le groupe pourrait céder des actifs jugés non stratégiques. Tous les éléments sont donc réunis pour que la situation de Natixis devienne satisfaisante et pour que notre pays, plus particulièrement son économie, tire parti de la création de ce nouvel ensemble.

Telles sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les observations que je souhaitais formuler. L’ensemble des questions que vous avez posées étaient, je le répète, parfaitement légitimes et appelaient des réponses aussi circonstanciées que possible. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

J’informe le Sénat que le groupe CRC-SPG a retiré sa motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

Conformément à la décision de la conférence des présidents, nous entamerons la discussion des articles de ce projet de loi demain après-midi.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'organe central des caisses d'épargne et des banques populaires
Discussion générale (suite)

3

Ordre du jour

Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 9 juin 2009 :

À neuf heures trente :

1. Questions orales.

(Le texte des questions figure en annexe).

À quinze heures et le soir :

2. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord de stabilisation et d’association entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République du Monténégro, d’autre part (n° 353, 2008-2009).

Rapport de M. Didier Boulaud, fait au nom de commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 374, 2008 2009).

Texte de la commission (n° 375, 2008-2009).

3. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Croatie relatif à la coopération en matière de sécurité intérieure (n° 348, 2008-2009).

Rapport de M. Didier Boulaud, fait au nom de commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 382, 2008 2009).

Texte de la commission (n° 383, 2008-2009).

4. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’avenant à l’accord de siège du 11 janvier 1965 entre le Gouvernement de la République française et le bureau international des expositions relatif au siège du bureau international des expositions et à ses privilèges et immunités sur le territoire français (n° 350, 2008-2009).

Rapport de M. Raymond Couderc, fait au nom de commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 384, 2008 2009).

Texte de la commission (n° 385, 2008-2009).

5. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres relatives à la garantie des investisseurs entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Son Altesse Sérénissime le Prince de Monaco (n° 354, 2008-2009).

Rapport de M. Jacques Blanc, fait au nom de commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 386, 2008 2009).

Texte de la commission (n° 387, 2008-2009).

6. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de la convention d’entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l’État des Émirats Arabes Unis (n° 351, 2008-2009).

Rapport de M. Michel Boutant, fait au nom de commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 399, 2008 2009).

Texte de la commission (n° 400, 2008-2009).

7. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation des amendements aux articles 25 et 26 de la convention sur la protection et l’utilisation des cours d’eau transfrontières et des lacs internationaux (n° 352, 2008-2009).

Rapport de M. André Vantomme, fait au nom de commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 419, 2008 2009).

Texte de la commission (n° 420, 2008-2009).

8. Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à l’organe central des caisses d’épargne et des banques populaires (n° 424, 2008 2009).

Rapport de M. Philippe Marini, fait au nom de commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (n° 444, 2008-2009).

Texte de la commission (n° 445, 2008-2009).

9. Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, tendant à favoriser l’accès au crédit des petites et moyennes entreprises (texte de la commission, n° 443, 2008-2009)

Rapport de M. Philippe Marini, fait au nom de commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (n° 380, 2008 2009).

Texte de la commission (n° 375, 2008-2009).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt-trois heures trente.)

La Directrice

du service du compte rendu intégral,

MONIQUE MUYARD