M. Alain Vasselle, rapporteur. Quatre CHU sont en difficulté !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je tiens à réaffirmer devant le Sénat que le déficit des établissements hospitaliers n’est pas une fatalité !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Très bien !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. À structures égales, certains établissements sont déficitaires, mais d’autres ne le sont pas et présentent un budget équilibré ou excédentaire.
M. Alain Vasselle, rapporteur. Poitiers, par exemple !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le déficit global des établissements atteint 745 millions d’euros pour 2007, dont à peu près la moitié, soit 369 millions d’euros, relève des CHU.
Cependant, le déficit des CHU n’est pas lui non plus une fatalité ! On me dit que vingt-neuf des trente et un CHU sont en déficit.
M. François Autain. Ils sont mal gérés !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. En réalité, les niveaux des déficits sont extrêmement variables. (M. Guy Fischer approuve.)
M. Alain Vasselle, rapporteur. Oui !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Plus de la moitié du déficit global des CHU est due à seulement cinq établissements : l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille, l’AP-HM, l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, le CHU de Nice, les hospices civils de Lyon, le CHU de Nantes. Le déficit de chacun de ces établissements est compris entre 30 millions et 50 millions d’euros, voire davantage !
M. François Autain. Pourquoi ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le CHU de Caen présente un déficit de 24 millions d’euros, six autres CHU affichent un déficit compris entre 10 millions et 20 millions d’euros, et pour dix-sept établissements le déficit est inférieur à 10 millions d’euros, ce qui relève plutôt de l’écriture comptable que d’autre chose. Enfin, rendons hommage aux CHU de Limoges et de Poitiers qui, quant à eux, présentent un léger excédent ! Par conséquent, même pour les CHU, le déficit n’est pas inéluctable, bien au contraire.
Le Gouvernement est donc déterminé à tout mettre en œuvre pour parvenir à une réduction des déficits des établissements de santé. C’est pour cette raison que j’ai prévu de renforcer le cadre juridique des procédures de redressement, à l’article 40 du PLFSS.
Il faut aider les établissements à revenir à l’équilibre. C’est parfois leur histoire, leur structuration géographique ou topographique qui peuvent expliquer ces déficits. C’est pourquoi j’ai constitué, s’agissant des CHU, un groupe de travail placé sous l’égide de la directrice de la Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins, la DHOS, en y associant la conférence des directeurs généraux de CHU, la conférence des présidents de commission médicale d’établissement et les directeurs des agences régionales de l’hospitalisation.
Ce groupe doit identifier les difficultés des CHU en distinguant ce qui relève des choix de gestion et ce qui relève d’insuffisances du modèle de financement. Bien entendu, il élaborera des propositions, et je suis déterminée à mettre en œuvre, chaque fois que cela sera nécessaire, les dispositions que j’ai inscrites à l’article 40 du PLFSS.
Cela étant, une aide pourra être apportée par l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux, l’ANAP, et éventuellement, si nécessaire, par des dotations financières. Toutefois, je n’ouvrirai pas un guichet sans contrepartie : je mets les établissements en situation de responsabilité. J’aiderai ceux d’entre eux qui sont décidés à revenir sur la voie de l’équilibre !
M. Alain Vasselle, rapporteur. Parfait !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Concernant les activités financées par la dotation des MIGAC, j’indiquerai à Mme Payet et à M. Jégou qu’un effort très important a été réalisé par le ministère afin de rendre plus objectifs les choix de financement. Ces travaux ont été décrits très précisément dans le troisième rapport annuel au Parlement. J’espère que M. Autain aura l’occasion de le lire ! (Sourires.)
À titre d’illustration, je soulignerai que les missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation, les MERRI, ont vu leur financement rénové. Désormais, les ressources seront allouées sur la base d’indicateurs de résultats portant sur le nombre d’étudiants, de brevets et de publications. Ce dispositif incitera fortement les établissements à améliorer leurs performances.
J’ai par ailleurs demandé l’accélération du développement des systèmes d’information à l’hôpital, comme la « e-santé » et les systèmes d’information de santé. C’est un outil indispensable de notre politique de santé : nous reviendrons sur ce sujet lors de l’examen du projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires. J’ai fait une communication, en conseil des ministres, sur la « e-santé », qui constitue une des grandes priorités de mon action sanitaire.
En outre, j’ai recentré le Groupement pour la modernisation du système d’information hospitalier, le GMSIH, sur des missions prioritaires telles que l’interopérabilité, la sécurité, l’assistance à la maîtrise d’ouvrages. J’ai également inscrit la création de l’agence des systèmes d’information partagés, l’ASIP, et de l’ANAP dans le PLFSS pour 2009.
Enfin, j’ai fixé pour priorité, s’agissant du plan Hôpital 2012, l’amélioration de l’efficience hospitalière. Sur les 10 milliards d’euros de crédits d’investissement, 1,5 milliard d’euros seront consacrés à l’amélioration ou à la création de systèmes d’information hospitaliers.
La T2A a suscité des interrogations sur de nombreuses travées. Je souhaiterais tout particulièrement répondre à M. Milon, en le remerciant de ses propos très positifs et constructifs.
Quatre ans après la mise en place de cette réforme majeure, où en sommes-nous ?
On entend dire que des établissements seraient en difficulté à cause de la T2A. Cependant, la T2A permet de redistribuer les crédits, il ne s’agit pas de réduire le montant des enveloppes ! Je note d’ailleurs que les établissements assujettis à la T2A ont été plus nombreux à voir leur financement augmenter qu’à le voir diminuer. Mais il est vrai que les premiers sont beaucoup plus silencieux que les seconds !
Le passage à la tarification à l’activité est une réforme majeure. Après quatre années d’application, je souhaite insister de nouveau sur ses principes fondamentaux.
La tarification à l’activité a d’abord pour objet une allocation plus juste des moyens. Cette réforme concerne les activités de médecine, de chirurgie, d’obstétrique et d’odontologie, y compris l’hospitalisation à domicile et la dialyse hors centres. Elle comporte des tarifs de séjour correspondant à la répartition des cas traités dans des groupes homogènes issus de la classification en GHM, des tarifs de prestation, notamment pour les urgences ou les greffes, le paiement en sus des tarifs de médicaments et dispositifs médicaux implantables coûteux, un financement, par la dotation nationale de financement des MIGAC, des activités qui pourraient difficilement être financées selon le principe de la tarification à l’activité, car non décrites au sein d’une nomenclature ou non liées à un volume d’activité. Par ailleurs, le service de santé des armées, actuellement financé par la dotation globale, passera au régime de la T2A le 1er janvier prochain pour ses activités de médecine, de chirurgie et d’obstétrique. La T2A doit s’élargir aux soins de suite ou de réadaptation, les SSR, et à la psychiatrie. Des travaux, complexes, sont en cours sur ce point.
Une période de transition est prévue jusqu’en 2012. La réforme implique une redistribution des moyens financiers au sein de chaque secteur entre les établissements. Un dispositif de transition a été prévu pour permettre aux établissements de s’adapter.
Toutes choses égales par ailleurs, pour le secteur privé, la réforme représente une redistribution de 140 millions d’euros sur la période considérée. Pour le secteur public, cette réallocation des moyens est plus importante : 1,3 milliard d’euros sur la période 2005-2012, dont 540 millions d’euros de 2008 à 2012. Je rappelle que le passage à la T2A à 100 % depuis le 1er janvier a eu pour effet de rendre l’ensemble des recettes au titre de la T2A du secteur public proportionnelles à l’activité réalisée. Nous avons substitué au système antérieur, qui conjuguait un financement par les tarifs et un financement par une dotation forfaitaire, un financement à 100 % par les tarifs modulés selon des coefficients de transition.
Aujourd’hui, nous avons parcouru les deux tiers du chemin menant à la convergence intrasectorielle.
La T2A n’est pas un modèle figé. Je vous ai indiqué quelles modulations je souhaitais mettre en place avec le coefficient de précarité et le coefficient de sévérité.
La T2A n’est pas davantage une réforme isolée. Elle s’inscrit dans un plan plus vaste de soutien à l’investissement, de réforme de la gouvernance de l’hôpital, de démarche d’amélioration de la qualité des soins. La tarification à l’activité est un levier pour développer l’efficience des établissements de santé.
J’ajoute, et c’est un élément majeur, que la T2A place le malade au centre du dispositif hospitalier. Auparavant, le système de la dotation globale entraînait des dérives et des effets pervers qui étaient dénoncés de façon unanime.
M. François Autain. Et les effets pervers de la T2A ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Avec la dotation globale, dispositif à enveloppe fermée, lorsqu’un malade arrivait à l’hôpital au mois de novembre, il arrivait qu’il ne puisse être traité, faute de crédits. La tarification à l’activité est plus juste, car elle place le malade au centre du système de soins. J’ai donc bien du mal à m’expliquer les critiques dont elle fait l’objet sur certaines travées de cette assemblée…
Comme vous l’avez rappelé, monsieur Autain, l’hôpital public est la clé de voûte du système de santé. Voilà au moins un point sur lequel nous sommes en parfait accord ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. François Autain. Vous voyez bien !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L’hôpital public est même le joyau de notre système de santé, et, pour le sauvegarder, nous devons le transformer.
Vous avez dénoncé la possibilité de confier des missions de service public aux établissements privés. Il me paraît très important de définir ces missions de service public.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est ce qui prime !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Certains établissements privés, je pense notamment aux établissements à but non lucratif, remplissent des missions indispensables.
M. François Autain. Nous sommes d’accord !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. La définition des missions de service public doit s’accompagner d’une définition des obligations des établissements qui se voient confier de telles missions. J’y reviendrai lors de la discussion du projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires.
Que les établissements soient publics ou privés, ces obligations liées aux missions de service public sont au nombre de trois : tout d’abord, assurer la permanence des soins ; ensuite, garantir l’accueil des publics en difficulté, notamment des bénéficiaires de la CMU ou de l’aide médicale d’État, l’AME, et bannir les refus de soins (Mme Marie-Thérèse Hermange applaudit) ; enfin, assurer à la population desservie un certain pourcentage, à fixer avec l’agence régionale de l’hospitalisation, devenue agence régionale de santé, de prestations intégralement remboursées par la sécurité sociale.
Madame Escoffier, vous m’avez interrogée sur les restructurations hospitalières. Je tiens à vous remercier d’avoir mis l’accent sur le concept d’égalité dans l’accès à des soins de qualité.
Je l’ai dit et je le répète : chacun, dans notre pays, doit avoir accès à des soins de qualité. Ma responsabilité est d’assurer la qualité et la sécurité des soins. Je le redis, je ne fermerai aucun hôpital !
M. Guy Fischer. Ah !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L’hôpital de proximité assure des missions absolument indispensables, au service de nos concitoyens. Cependant, il doit le faire dans le respect des exigences qui s’imposent à nous. Nous devons, pour de multiples raisons, réformer les services de chirurgie et d’obstétrique.
Dans certains cas, la pratique de la chirurgie peut être dangereuse. Avant que je prenne la décision de fermer le service de chirurgie d’un hôpital dont je ne citerai pas le nom, on opérait des patients pour des pathologies digestives avec un taux de mortalité de 50 %, contre 12 % sur le plan national !
M. Guy Fischer. Pour quelle raison ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous rendez-vous compte que, en 2006, sur vingt-huit patients opérés dans cet hôpital, quatorze sont décédés ? Dans un hôpital du Centre, une trop faible activité a conduit à des erreurs à répétition.
Certes, le risque zéro n’existe pas ! Néanmoins, les expertises et les rapports d’inspection le montrent tous : pour assurer la sécurité des patients, il faut qu’un nombre d’actes suffisant soit réalisé. Ce qui est vrai pour la chirurgie l’est aussi pour l’obstétrique : dans une ville de la Nièvre, plus aucun pédiatre n’était affecté à temps plein à la maternité.
Par ailleurs, il peut être difficile d’assurer la permanence des soins. Les médecins, si admirables et si dévoués soient-ils, ne peuvent pas être de garde toutes les nuits ! Dans un petit centre hospitalier de la région Rhône-Alpes, un chirurgien a été de garde deux cents jours d’affilée ! Il n’était remplacé que par des intérimaires. Comment un médecin pourrait-il être réellement opérationnel dans ces conditions ?
M. Guy Fischer. Sur ce point, nous sommes d’accord !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Devant cette situation, les patients ont choisi. Certains établissements connaissent un « taux de fuite » de plus de 90 %. Les malades qui en relèvent théoriquement, du fait de leur lieu de résidence, refusent d’y être hospitalisés. En quelque sorte, ils votent avec leurs pieds ! (Sourires.)
L’objet du projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires est de remédier à de telles situations. Il convient de définir une véritable gradation des soins.
L’hôpital de proximité doit assurer les urgences, les soins courants, les soins post-aigus.
L’hôpital de deuxième niveau est doté de plateaux techniques. Un service de chirurgie regroupe aujourd’hui plusieurs blocs opératoires, servis par plus de cent professionnels hautement qualifiés et spécialisés.
M. Bernard Cazeau. Et les cliniques ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Enfin, au troisième niveau, se situe le CHU, l’hôpital de référence. On peut même définir, peut-être, un quatrième niveau, encore plus pointu.
Il faut assurer la qualité et la sécurité des soins avec des hôpitaux qui travaillent en partenariat dans une communauté hospitalière territoriale.
L’hôpital doit en outre être dirigé par un véritable patron, dont la tâche principale sera de mettre en œuvre un projet médical d’établissement. La gestion n’est qu’un instrument au service d’une finalité médicale, madame Escoffier. Nous voulons, grâce à des coopérations territoriales renforcées, rendre l’hôpital attractif pour les professionnels de santé. Tel est l’objet de la réforme de l’hôpital que j’aurai l’honneur de vous présenter dans quelques semaines, mesdames, messieurs les sénateurs. Dans cette attente, je vous remercie encore une fois pour la richesse de ce débat. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Nous en venons maintenant aux questions-réponses.
Je rappelle que chaque intervention ne devra pas dépasser deux minutes et demie.
Après la réponse de Mme la ministre, chaque orateur pourra reprendre la parole pour une minute.
La parole est à Mme Jacqueline Chevé.
Mme Jacqueline Chevé. Au nom de la réduction des coûts, le Gouvernement entend regrouper un certain nombre d’hôpitaux de proximité pour concentrer les infrastructures hospitalières au sein de grands plateaux techniques.
Cette logique s’applique au détriment de l’égal accès à des soins de qualité pour tous. Implantés dans de petites villes, souvent au centre de territoires ruraux, les hôpitaux de proximité sont progressivement écartés d’un système qui se recentre sur des capitales régionales déjà engorgées.
Élue du centre de la Bretagne, je m’interroge avec inquiétude sur les conditions brutales et souvent anarchiques dans lesquelles sont conduites ces réorganisations. Je garde ainsi en mémoire la forte mobilisation des villes de Carhaix et de Guingamp pour sauver leur hôpital.
Ces réorganisations démotivent les médecins libéraux qui voudraient s’installer en campagne. Plusieurs enquêtes ont en effet montré que la présence d’un hôpital de proximité était un facteur déterminant dans le choix de leur lieu d’installation par les jeunes médecins. Pour eux, les hôpitaux de proximité constituent un renfort indispensable : les urgences et les SMUR évitent que ne pèse sur leurs épaules la responsabilité de situations graves. En outre, pour de nombreux spécialistes, un hôpital proche est un point d’appui indispensable à une pratique médicale de qualité.
Ces réorganisations déstabilisent les territoires. Elles ont des effets collatéraux dramatiques dans les régions qui les subissent. On assiste à des délocalisations de services comme on assiste à des délocalisations d’entreprises.
Pour une petite ville, la fermeture d’un hôpital, d’un service d’urgence ou d’une maternité signifie la perte directe de dizaines, voire de centaines d’emplois. C’est aussi une perte d’attractivité, surtout lorsque la réorganisation d’un hôpital s’accompagne de la fermeture d’une gendarmerie, d’une sous-préfecture ou d’un tribunal d’instance…
Ces réorganisations désorientent enfin les patients, qui sont obligés de parcourir de longues distances avant de trouver un hôpital ou un spécialiste. Avec le vieillissement de la population de nos campagnes, cela pose de vrais problèmes aux personnes âgées et à leurs familles, souvent éloignées. L’accès aux soins devient de plus en plus compliqué pour tous nos concitoyens vivant en zone rurale.
Aujourd’hui, avec la désertification médicale, il faut parfois attendre plus de six mois avant de pouvoir consulter un spécialiste. Je peux témoigner, pour le vivre au quotidien, que la réorganisation d’une maternité en centre de périnatalité n’apporte pas de réponse supplémentaire en termes de prévention et de suivi médical. Aujourd’hui, il faut sept ou huit mois pour obtenir un rendez-vous en gynécologie médicale. Est-ce tolérable ?
Madame la ministre, est-il normal, sous couvert de rationaliser l’offre de soins, de perdre la proximité, la sécurité sanitaire pour les habitants, l’égalité de l’accès aux soins pour tous, et d’accentuer encore un peu plus la désertification de nos territoires ? Quel avenir est réservé à nos hôpitaux publics de proximité, et quelles activités pourront-ils exercer ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Mes chers collègues, je vous rappelle que les questions ne doivent pas excéder deux minutes trente.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Madame la sénatrice, je crois avoir déjà répondu à votre question, mais je vais revenir sur certains points.
Je ne fermerai pas d’hôpital.
M. Bernard Cazeau. Vous allez les étouffer !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L’hôpital de proximité est absolument indispensable, mais il doit être recentré sur ses véritables missions. J’observe que non seulement les hôpitaux ayant été restructurés n’ont pas perdu d’emplois, mais qu’ils en ont au contraire gagné.
J’ai à l’esprit les témoignages éloquents de certains maires qui, après avoir défilé derrière des banderoles pour s’opposer aux restructurations, doivent reconnaître, au bout de quelques mois ou de quelques années, que ces mêmes restructurations ont en fait sauvé leur hôpital de proximité. En effet, le public fait de nouveau confiance à celui-ci, parce qu’il a été recentré sur ses véritables missions.
À cet égard, les urgences constituent une des fonctions dévolues à l’hôpital de proximité. Madame la sénatrice, j’envisage, vous le savez, de renforcer le service des urgences de l’hôpital de Carhaix, notamment de moderniser l’hélistation, afin que cet établissement puisse traiter les urgences dans de bonnes conditions.
De même, la gériatrie est typiquement un service de proximité. Nous sommes dans une phase de transition démographique marquée par un vieillissement de la population. Les personnes âgées doivent bien sûr pouvoir être soignées le plus près possible de leur domicile, afin que leur famille puisse leur rendre visite. Mais si elles doivent subir une intervention sérieuse, pour la pose d’une prothèse de hanche par exemple, elles seront tout naturellement dirigées vers un plateau technique bien équipé, où exercent des praticiens compétents.
Le chirurgien qui pratique toutes les opérations appartient définitivement au passé.
M. Guy Fischer. C’est terminé !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Désormais, la victime d’un accident de la route souffrant d’un traumatisme crânien, d’un éclatement de la vessie et de fractures sera opérée par trois chirurgiens différents, dans un plateau hospitalier regroupant près de cent professionnels : infirmières-anesthésistes, anesthésistes, spécialistes de l’asepsie, infirmières spécialisées… Comment l’hôpital d’une petite ville de quelques milliers d’habitants pourrait-il garantir une telle sécurité chirurgicale ?
Les mêmes observations valent pour les maternités. Dans notre pays, nous n’envisageons la fermeture d’une maternité qu’en deçà du seuil de 300 accouchements par an. Dans les faits, nous ne déclenchons les procédures de transformation d’une maternité en centre périnatal de proximité que si l’établissement pratique moins de 200 accouchements par an… Or, tous les spécialistes s’accordent à reconnaître que le seuil de sécurité se situe entre 900 et 1 200 accouchements par an.
Mme la présidente. Veuillez conclure, madame la ministre.
M. Guy Fischer. La ministre s’emporte !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Nous sommes donc très en dessous des seuils de sécurité.
Madame la sénatrice, la politique que nous menons assure le maintien de la vitalité des territoires. Non, vous ne verrez pas votre hôpital fermer ! C’est si vous n’agissez pas, si vous laissez dispenser des soins de mauvaise qualité que vous handicaperez la survie de votre hôpital, parce que les malades le fuiront ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Jacqueline Chevé.
Mme Jacqueline Chevé. Madame la ministre, mes craintes demeurent. Vous réaffirmez que vous ne fermerez pas d’hôpitaux, mais je pense que vous allez les étouffer petit à petit.
M. Bernard Cazeau. Tout à fait !
Mme la présidente. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Madame la ministre, ma question porte sur la convergence tarifaire dans le secteur hospitalier : les difficultés de sa mise en œuvre remettent en cause les effets vertueux de la tarification à l’activité.
En effet, l’ancien mode de financement des établissements hospitaliers, la dotation globale pour les établissements publics et la tarification à la journée ou à la prestation pour les cliniques privées, figeait les situations et ne prenait pas suffisamment en compte l’activité médicale et le service rendu. La mise en place de la T2A a été une excellente mesure, permettant que le financement des établissements reflète mieux leur activité réelle.
Le processus de convergence tarifaire entre les établissements de santé publics et privés constitue un volet préalable et spécifique de la mise en œuvre de la T2A. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, à son article 33, en a fixé l’échéance à 2012. Or, aujourd’hui, ce processus semble en panne.
Par volontarisme politique, les pouvoirs publics ont fait en 2003 le choix de mettre en œuvre la T2A sans attendre de disposer d’une échelle de coûts du secteur privé. Quatre ans plus tard, ces outils semblent faire défaut, et la mise en place du dispositif paraît quelque peu compromise.
Le Gouvernement, en obtenant que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 n’impose aucun objectif intermédiaire chiffré, a donné le sentiment qu’il consentait à un recul. Ainsi, à l’automne dernier, il a précisé que la convergence se ferait en direction des tarifs les plus efficients, et non des tarifs moyens.
En tout état de cause, l’objectif d’un achèvement de la convergence tarifaire en 2012 semble difficile à atteindre.
Comment comptez-vous, madame la ministre, relancer la convergence tarifaire ? A-t-on déjà enregistré quelques progrès en la matière ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Madame la sénatrice, je vous remercie de me donner l’occasion de m’exprimer une nouvelle fois sur la convergence tarifaire.
La loi a en effet posé le principe de cette convergence. Celle-ci suscite de nombreuses inquiétudes, au motif que l’hôpital privé n’a pas les mêmes missions, ne reçoit pas les mêmes malades, ne subit pas les mêmes contraintes que l’hôpital public, et l’on redoute que je crée un lit de Procuste pour ce dernier. Mais, je l’ai rappelé tout à l’heure, convergence ne signifie pas identité ! Si les tarifs convergent, c’est toutes choses égales par ailleurs, et il est tenu compte des obligations différentes auxquelles les établissements sont soumis.
Des travaux très importants ont été réalisés par mes services, par la DHOS, par la Mission tarification à l’activité et par l’ATIH, l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation, avec le concours de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, la DREES, de l’assurance maladie et des fédérations hospitalières. Le rapport présentant ces travaux vous sera bien sûr transmis : il n’y a aucune raison que seul M. Autain en dispose ! (Sourires.)
Bien que la convergence n’ait été jusqu’à présent réalisée que de manière très partielle, les choses vont néanmoins dans le bon sens eu égard à la difficulté et à la complexité du processus. De nouveaux travaux seront engagés en 2009, en particulier la production, pour chaque secteur, de coûts complets moyens par GHM et l’analyse des écarts inter et intrasectoriels. Nous disposerons ainsi d’un outil d’aide à la décision.
J’ai déjà évoqué les critères de modulation que nous avons introduits : la prise en compte de la sévérité des cas, la prise en charge de la précarité, l’étude de l’incidence des coûts sur la permanence des soins hospitalière et la prise en charge des internes. J’ai également désigné les travaux dont les résultats seront utilisés pour les prochaines campagnes tarifaires.
Dès 2009, les tarifs des établissements de santé reflèteront la prise en compte de l’ensemble de ces critères, ce qui permettra au moins cinq points de convergence. Cette démarche correspond d’ailleurs au principe posé dans le projet de loi portant réforme de l'hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires, dont l’article 1er précise que, quel que soit leur statut, tous les établissements de santé peuvent exercer des missions de service public dans des conditions définies par les agences régionales de santé.
Le chantier que vous nous confiez, madame la sénatrice, est mené d’une main ferme !