M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Monsieur le rapporteur, vous avez rappelé l’historique de cette journée de solidarité, qui fut instaurée en 2004. Comme les Allemands, nous avons choisi de travailler un jour de plus, mais à leur différence, nous n’avons pas décidé de supprimer un jour férié, puisque le lundi de Pentecôte est toujours resté légalement chômé.
Aujourd'hui, toutefois, il nous faut apporter plus de souplesse et plus de lisibilité à ce dispositif original, pour que chaque entreprise puisse se l’approprier ; c’est la raison pour laquelle il nous fallait revenir devant le Parlement.
Vous avez soulevé, à juste titre, la question de la place des partenaires sociaux dans le dispositif. Peu d’accords de branche – dix-sept exactement – ont été conclus, qui couvrent deux millions de salariés, mais un grand nombre d’accords d’entreprises ont pu être négociés. Avec cette proposition de loi, nous souhaitons renforcer le rôle des partenaires sociaux dans la mise en œuvre de la journée de solidarité.
Vous exprimez également une crainte légitime quant au dévoiement du principe de solidarité. Certes, cette journée de solidarité devient moins visible, mais donner plus de souplesse aux salariés pour leur permettre de travailler sept heures de plus au profit des personnes âgées et handicapées, c’est rendre la solidarité concrète et effective.
Monsieur Détraigne, vous soulignez que la présente proposition de loi permet un nécessaire assouplissement du dispositif, et je ne puis que partager votre analyse.
S'agissant de la fonction publique, l’ensemble des salariés du secteur public seront concernés. Cette mesure se traduira, selon les experts, par une augmentation de dix millions d’heures de travail pour les fonctionnaires de l’État, soit l’équivalent de 6 000 emplois ; pour la fonction publique hospitalière, elle représentera quelque 3600 emplois. Il s'agit donc non pas de charges nouvelles, mais d’un geste de solidarité à l’égard de nos concitoyens, par un accroissement des services publics qui leur seront rendus.
Monsieur Domeizel, vous avez souligné que la mise en œuvre de l’APA était un succès grâce à l’action résolue des départements. La journée de solidarité, qui repose sur un effort de tous en faveur des personnes âgées, se trouvera confortée par ce texte, car les partenaires sociaux disposeront de davantage de souplesse pour la mettre en œuvre.
Pour ce qui est du financement de la dépendance, je vous rappellerai que le produit de la journée de solidarité ne constitue qu’une partie des financements de l’ONDAM médico-social, qui représente quant à lui 13 milliards d'euros supplémentaires. Par ailleurs, je tiens à souligner que les revenus du patrimoine et des placements sont soumis à une cotisation de 0,3 % au titre de la contribution de solidarité pour l’autonomie.
Enfin, conformément à l’engagement du Président de la République, Xavier Bertrand et moi-même avons lancé la semaine dernière le chantier du cinquième risque. Nous avons reçu l’ensemble des partenaires sociaux, afin de recueillir leurs propositions, de même que, hier matin, les représentants de l’ADF, l’Assemblée des départements de France.
Mesdames, messieurs les sénateurs, dans quelques mois, lorsque le projet de loi relatif au cinquième risque sera soumis à votre assemblée, nous verrons qui, sur ces travées, souhaite réellement améliorer la situation des personnes les plus en difficulté, et de quelle façon !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Bravo ! Bien envoyé !
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Ce sera aussi l’occasion de déterminer quelle est la meilleure, la plus juste et la plus équitable manière de mobiliser les moyens nécessaires à la mise en œuvre de cette réforme. Enfin, ce débat permettra d’en définir le contenu. Faut-il augmenter le nombre de places dans les établissements de retraite ? Et quels types de places ? Faut-il prendre en compte la question du reste à charge pour les personnes qui sont tenues aujourd'hui, en raison de leur état de grande dépendance, d’entrer en établissement ?
Toutes ces questions doivent être abordées et nous avons commencé de le faire avec les partenaires sociaux. Il nous faut conforter cette démarche en venant devant le Parlement, afin d’enrichir au maximum ce débat, qui répond à un véritable enjeu de société.
Monsieur Souvet, vous avez, vous aussi, évoqué le bien-fondé de la journée de la solidarité, des moyens qu’elle permettait de mobiliser et des actions qu’elle rendait possible. Vous avez également rappelé pourquoi nous avions décidé cette mesure : comme vous l’avez souligné, lors de la canicule de 2003, ce sont 15 000 personnes, soit l’équivalent de la population d’une ville moyenne, qui ont perdu la vie en quelques semaines. Il nous fallait donc agir !
Grâce à cette journée de solidarité, nous n’avons pas seulement mobilisé des moyens supplémentaires ; nous avons aussi engagé une véritable politique de prévention, en multipliant les mesures d’accompagnement et en développant les bonnes pratiques professionnelles, ce qui nous a permis d’avancer très rapidement dans la bonne direction.
Vous l’avez également rappelé, la présente proposition de loi introduit dans ce dispositif une souplesse qui est tout à fait nécessaire et qui sera effective dès cette année. Vous avez raison d’insister sur ce point : les entreprises seront libres de travailler, ou non, dès le lundi de Pentecôte de 2008, c’est-à-dire le 12 mai prochain.
Comme cette échéance est très proche, l’Assemblée nationale a souhaité introduire une disposition transitoire permettant aux employeurs de fixer des modalités d’accomplissement de la journée de solidarité dès les toutes prochaines semaines, après consultation du comité d’entreprise ou des délégués du personnel. Avec Xavier Bertrand, j’ai demandé au directeur général du travail de diffuser dans les jours prochains une instruction afin d’en informer les entreprises.
Enfin, madame David, vous avez raison de souligner que la présente proposition de loi constitue une adaptation technique destinée à introduire davantage de souplesse dans la mise en œuvre de la journée de solidarité : tel est bien l’objectif que nous visons aujourd'hui.
De ce point de vue, je me réjouis que ce texte n’appelle guère de remarques de votre part. Pour le reste, comme je l’ai précisé en répondant à M. Domeizel, les questions que vous soulevez seront débattues dans le cadre du chantier du cinquième risque.
Je suis tout à fait désireuse de connaître les contributions que votre groupe pourra, sans esprit partisan, apporter à ce débat, de même que j’attends les propositions qui émaneront de l’ensemble des forces politiques. Je vous donne donc rendez-vous ici-même dans quelque mois, afin de pouvoir encore enrichir notre réflexion commune. (Applaudissements sur les travées de l’UC-UDF et de l’UMP.)
M. le président. Nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
I. - Le code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail (partie législative), est ainsi modifié :
1° Dans le 2° de l'article L. 3133-7, la référence : « article 11 de la loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées » est remplacée par la référence : « article L. 14-10-4 du code de l'action sociale et des familles » ;
2° L'article L. 3133-8 est ainsi rédigé :
« Art. L. 3133-8. - Les modalités d'accomplissement de la journée de solidarité sont fixées par accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par accord de branche.
« L'accord peut prévoir :
« 1° Soit le travail d'un jour férié précédemment chômé autre que le 1er mai ;
« 2° Soit le travail d'un jour de réduction du temps de travail tel que prévu aux articles L. 3122-6 et L. 3122-19 ;
« 3° Soit toute autre modalité permettant le travail de sept heures précédemment non travaillées en application de dispositions conventionnelles ou des modalités d'organisation des entreprises.
« À défaut d'accord collectif, les modalités d'accomplissement de la journée de solidarité sont définies par l'employeur, après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent.
« Toutefois, dans les départements de la Moselle, du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, l'accord ou, à défaut, la décision de l'employeur ne peut déterminer ni le premier et le second jour de Noël ni, indépendamment de la présence d'un temple protestant ou d'une église mixte dans les communes, le Vendredi Saint comme la date de la journée de solidarité. » ;
3° L'article L. 3133-9 est abrogé.
II. - 1. À compter de la publication de la présente loi et à titre exceptionnel pour l'année 2008, à défaut d'accord collectif, l'employeur peut définir unilatéralement les modalités d'accomplissement de la journée de solidarité après consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent.
2. Le cinquième alinéa de l'article L. 212-16 du code du travail est supprimé.
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Lardeux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter le cinquième alinéa (3°) du texte proposé par le 2° du I de cet article pour l'article L. 3133-8 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007, par les mots :
, sans possibilité de fractionner cette durée sur plus de deux jours
La parole est à M. le rapporteur.
M. André Lardeux, rapporteur. Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps les amendements nos 1 et 2, car ils ont le même objet.
Mme la secrétaire d'État souhaite que la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées soit effective et concrète. Or la commission s’est interrogée sur le caractère concret de cette solidarité.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Et sur son effectivité !
M. André Lardeux, rapporteur. Certes, monsieur le président de la commission, mais on peut espérer que les financements dégagés garantissent cette effectivité !
Ce qui nous pose problème, c’est le morcellement de la journée de solidarité, certaines entreprises publiques constituant à cet égard des cas extrêmes. On nous affirme que ce n’est pas exact et que l’interprétation de la commission n’est pas la bonne. Toutefois, lorsque je lis la note interne de la SNCF sur le fractionnement de la journée de solidarité, qui figure dans le rapport de la commission, le scepticisme me gagne, je dois l’avouer : d'abord, ce texte est difficile à comprendre ; ensuite, il n’est pas transparent ; enfin, j’ai l’impression que le temps de travail supplémentaire prévu par la SNCF – une minute et onze ou douze secondes – n’existe même pas !
C'est pourquoi, mes chers collègues, la commission vous propose d’encadrer la journée de solidarité, en faisant en sorte que celle-ci soit répartie sur deux jours au maximum dans l’année, au choix bien sûr des partenaires sociaux ou des entreprises concernées.
J'ajoute que je suis sceptique aussi s'agissant du dialogue social, car les accords de branche sont très rares et les accords d’entreprises ne semblent guère plus nombreux, comme l’a souligné M. Besson dans son rapport.
M. Paul Blanc. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. En visant à empêcher le fractionnement de la journée de solidarité au-delà de deux demi-journées, cet amendement contrevient à l’esprit de la proposition de loi, dont l’objet est avant tout de répondre au besoin de souplesse mis en évidence par le rapport Besson.
La réforme proposée doit en effet permettre que l’accomplissement de la journée de solidarité soit réalisé de la manière la plus souple possible, afin que les modalités de mise en œuvre s’adaptent au plus près des besoins de notre pays, des entreprises et des salariés.
Instaurer en amont des limites de principe à la possibilité de fractionner la journée de solidarité apparaîtrait comme une rigidité inutile, nuisant dans les faits au bon déroulement de celle-ci. De surcroît, cela risquerait de remettre en cause des accords collectifs déjà conclus prévoyant un fractionnement plus important et qui étaient basés, au moment de leur conclusion, sur des souplesses antérieurement permises par le législateur.
Dans l’esprit du texte, il revient donc aux partenaires sociaux, en aval, de mettre en place un fractionnement plus important, s’ils l’estiment utile compte tenu des contraintes auxquelles ils sont confrontés. La souplesse et l’adaptation restent les clefs du bon déroulement de la journée de solidarité nationale. C’est pourquoi le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
Pour les entreprises qui ont fait certains choix, toute modification rendra difficile la mise en place de la journée de solidarité. Monsieur le rapporteur, vous avez mentionné la SNCF. Cette entreprise n’a pas pris en considération de façon uniforme l’articulation que vous avez décrite : d’autres schémas ont été trouvés et mis en œuvre. Il faut permettre aux entreprises de tenir compte des réalités du terrain.
M. Jean-Pierre Godefroy. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Madame la secrétaire d'État, vous avez l’art de présenter les choses ! (Sourires.)
Pour reprendre l’exemple de la SNCF, celle-ci a adopté cette mesure de façon très hétérogène, à tel point que, sur un grand nombre de sites, l’accomplissement de la journée de solidarité équivaut à une minute quarante ou deux minutes de travail supplémentaire par jour.
M. Pierre Bordier. C’est grotesque !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C’est à peine le temps de se laver sérieusement les mains ! Est-ce l’image que nous voulons donner de la solidarité, en particulier quand il s’agit d’une entreprise qui coûte si cher à la nation ? La mesure importante que nous avons voulu mettre en place mérite notre respect.
Je ne peux retirer cet amendement, parce qu’il a été adopté par la commission. Je m’en remets donc à la sagesse de notre assemblée. (Applaudissements sur les travées de l’UC-UDF et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote.
M. Claude Domeizel. J’ai écouté avec attention M. le rapporteur et Mme la secrétaire d'État. Pour ma part, j’avancerai au moins deux autres arguments pour justifier notre opposition à cet amendement.
Tout d’abord, l’adoption de cette mesure aurait pour effet de remettre en cause tous les accords qui ont déjà été conclus.
Pour ne prendre que l’exemple de la fonction publique territoriale, de tels accords doivent être soumis au comité technique paritaire. Je préside un comité technique paritaire départemental : les deux cents communes ont proposé le fractionnement de la journée de solidarité. Si cet amendement était voté, il faudrait que ces communes saisissent leur conseil municipal, négocient et soumettent une nouvelle proposition au comité technique paritaire départemental.
Ensuite, si l’accomplissement de la journée de solidarité doit être réparti sur deux jours, cela suppose au moins trois heures et demie de travail quotidien supplémentaires. Dans certains cas, cela peut entraîner un dépassement de la durée légale de la journée de travail, qui est de dix heures, ou celle de la semaine, qui est en moyenne de quarante-quatre heures sur douze semaines ou de quarante-huit heures sur une semaine. En outre, dans un certain nombre de professions, ce maximum est déjà atteint.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il y a les jours de RTT !
M. Claude Domeizel. Cela pourrait mettre certains employeurs en difficulté.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On travaille trop en France !
M. Claude Domeizel. C'est la raison pour laquelle, ne souhaitant pas ajouter le ridicule au ridicule, nous voterons contre cet amendement.
M. Dominique Leclerc. Ridicule !
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.
M. Yves Détraigne. Lors de la discussion générale, j’ai formulé le vœu que les employeurs utilisent intelligemment la souplesse que leur accordera cette proposition de loi et qu’ils ne recréent pas de vraies fausses journées de solidarité, comme c’est le cas depuis trois ans.
Certes, l'amendement proposé par la commission des affaires sociales n’est peut-être pas parfait, mais il vise à empêcher ces vraies fausses journées de solidarité, telles qu’elles peuvent être organisées dans certains services de la SNCF, pour reprendre ce fameux exemple cité à de multiples reprises. Il s’agit donc, me semble-t-il, d’un bon amendement. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. L'amendement de la commission tend à répondre au souhait de ne pas voir la journée de solidarité trop morcelée, par exemple en travaillant dix minutes de plus par jour. Pour un certain nombre d’entre nous, monsieur Domeizel, la solidarité n’est pas une corvée !
M. Claude Domeizel. Nous n’avons pas de leçons de solidarité à recevoir de votre part !
Mme Catherine Procaccia. C’est un geste généreux ! Je suis encore salariée, même si mon contrat de travail est actuellement suspendu, et je ne me considère pas comme un serf : c’est avec plaisir que je participerai à cette journée de solidarité, car la dépendance et les personnes âgées, c’est important.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Les personnes âgées, c’est l’avenir !
Mme Catherine Procaccia. Puisque nous cherchons, avec ce débat, à rendre plus facile l’accomplissement de la journée de solidarité, je profite de cette explication de vote pour évoquer une difficulté concernant la compatibilité de celle-ci avec une journée de RTT. La proposition de loi prévoit que la journée de solidarité peut revêtir trois formes différentes : soit un jour férié précédemment chômé, soit un jour de réduction du temps de travail, soit toute autre modalité permettant le travail de sept heures précédemment non travaillées.
Or la durée d’un jour férié peut être de sept heures, de huit heures, ou même de dix heures, c’est-à-dire la durée maximale d’une journée de travail. Mais, s’agissant des jours de RTT, leur durée dépend des conventions d’entreprise : celle-ci peut être de sept heures six minutes, sept heures dix-huit minutes, sept heures vingt-quatre minutes…
Un certain nombre de directeurs des ressources humaines se demandent comment cette journée de solidarité, dont la durée n’avait pas été précisée dans le texte initial, mais qui a été ensuite fixée à sept heures, pourra prendre la forme d’un jour de RTT. Ainsi, si une convention d’entreprise prévoit que la journée de RTT correspond à sept heures six minutes de travail – sa durée est donc supérieure à celle de la journée de solidarité – il faudra élaborer un mécanisme extraordinairement compliqué pour payer ces six minutes supplémentaires.
Si l'amendement est voté et que le texte est examiné en commission mixte paritaire, je souhaite que ce point soit précisé – Mme la secrétaire d'État a évoqué des directives émanant des services de Xavier Bertrand – pour éviter de rendre la situation plus complexe encore.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. On verra cela en commission mixte paritaire !
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Le souhait du Gouvernement est de laisser aux entreprises et aux partenaires sociaux la possibilité de discuter, de négocier et de trouver des accords, afin de s’adapter à la réalité de chaque entreprise.
Madame Procaccia, je m’engage à apporter très rapidement une réponse précise à la question plus technique que vous venez de me poser. Notre souci premier est de favoriser la simplicité et la lisibilité de cette mesure.
À ce titre, en 2004, pour permettre aux entreprises de mettre en œuvre la journée de solidarité a été réalisé un document de type « questions-réponses » mis en ligne sur Internet, qui est régulièrement actualisé. Le problème que vous soulevez et qui ne nous avait jamais été soumis à ce jour y trouvera sa place, ainsi qu’une réponse très précise, ce qui intéressera les directeurs des ressources humaines de toutes les entreprises.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Godefroy. Je souhaite établir un parallèle.
Mes chers collègues, en votant cet amendement, vous remettez en cause un principe que vous voulez appliquer dans d’autres textes. Nous examinerons prochainement le projet de loi portant modernisation du marché du travail. À ce titre, il nous est demandé de respecter les accords déjà passés entre les partenaires sociaux. Avec cette proposition de loi, nous ne sommes pas en terrain vierge : des accords ont été conclus dans les entreprises, qu’ils soient formalisés ou tacites. Or vous prenez aujourd'hui le risque de les remettre en question ! (M. Dominique Leclerc rit.) C’est pourquoi cet amendement est contre-productif.
Je comprends bien que l’on puisse être agacé par certains procédés ; pour ma part, je ne porte pas de jugement sur les modalités mises en place par la SNCF. Toutefois, je crains fort que ce type d’amendements ne maintienne le désordre que vous cherchiez justement à supprimer avec ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Claude Domeizel. Bien sûr !
M. le président. La parole est à M. Dominique Leclerc, pour explication de vote.
M. Dominique Leclerc. J’ai essayé de prendre un peu de recul en écoutant cet échange. Pourtant, sans être ironique, quand j’entends parler de remise en cause des accords des partenaires sociaux ou de directeurs des ressources humaines qui s’arracheront les cheveux pour mettre en place cette journée de solidarité, je ne peux m’empêcher de m’interroger : qui connaît la réalité du travail dans cet hémicycle ? La France au travail, ce n’est pas que la SNCF, et heureusement !
Mme Annie David. Justement !
M. Dominique Leclerc. Cela marcherait moins bien !
La France au travail, ce sont les PME, les PMI, les artisans, les commerçants,...
Mme Annie David. Oui !
M. Jean-Pierre Godefroy. Absolument !
M. Dominique Leclerc. ...qui emploient un, deux ou trois salariés.
Je peux modestement vous faire part de mon expérience : avec dix salariés, j’ai mis en œuvre la journée de solidarité la première année, mais, au bout de deux ans, ce n’était plus possible ! Ces salariés ont des conjoints, et quand vous laissez libres les modalités d’accomplissement de la journée de solidarité, celle-ci devient inapplicable !
Pour la majorité des PME et des PMI, la journée de solidarité se résume à une contribution supplémentaire.
Faisons preuve de réalisme, mes chers collègues ! Si une trop grande liberté est laissée, la journée de solidarité sera un échec !
M. Jean-Pierre Godefroy. C’est vous qui la conduisez à l’échec !
M. Dominique Leclerc. Nous sommes vraiment loin de l’esprit qui a prévalu quand a été créée cette journée de solidarité !
M. Claude Domeizel. Alors, votez contre !
M. Dominique Leclerc. Non, je suis réaliste !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. André Lardeux, rapporteur. Il est bien difficile, dans ce pays, d’encourager les gens à travailler. Une fois de plus, nous sommes en train de faire la démonstration qu’en France il faut absolument bannir le travail...
M. Jean-Pierre Godefroy. Personne n’a dit cela !
M. André Lardeux, rapporteur. ...et le réserver aux Chinois et à quelques autres peuples !
Mme Annie David et M. Jean-Pierre Godefroy. C’est inacceptable !
M. Claude Domeizel. Ce n’est pas ce que nous avons dit !
M. André Lardeux, rapporteur. Vous ne l’avez pas énoncé sous cette forme, mais j’ai cru comprendre que, pour vous, il convenait de supprimer le travail, ou au moins de le réduire le plus possible. Peu importe la façon dont sera financée cette journée de solidarité !
Pour ce qui est des modalités d’application, il nous est reproché de vouloir remettre en cause le dialogue social. Je constate, et le rapport Besson le confirme, que, s’agissant de la journée de solidarité, le dialogue social n’a jamais existé, sauf de façon ponctuelle. Nous sommes d’ailleurs tout à fait d’accord sur ce point, mes chers collègues, contrairement à ce que vous affirmez. Donc, ne nous abritons pas derrière le dialogue social !
Par ailleurs, j’ai entendu des discours sur la revalorisation du rôle du Parlement, notamment sur le dialogue entre les deux assemblées. Or je m’aperçois que, une fois de plus, on veut museler le Parlement. Mes chers collègues, tirons-en les conclusions : à l’avenir, il sera inutile de voter certaines réformes !
M. le président. J’informe le Sénat que j’ai été saisi, par le Gouvernement, d’une demande de scrutin public sur l’amendement n° 1.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Je veux simplement faire remarquer que l’urgence n’a pas été déclarée sur ce texte, dont nous sommes saisis en première lecture. Nous avons l’audace de formuler une proposition… Celle-ci pourra être modifiée lors de la navette ou de la CMP. Entre-temps, des éléments plus complets relatifs aux modalités de mise en œuvre de la journée de solidarité nous seront peut-être communiqués. Je ne comprends donc pas les raisons pour lesquelles il serait urgent d’obtenir un vote conforme sur ce texte.
M. Claude Domeizel. La Pentecôte, c’est quasiment demain !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Si la disposition n’est pas applicable cette année, elle le sera peut-être l’année prochaine !
Quoi qu’il en soit, je m’associe aux propos de M. le rapporteur.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 87 :
Nombre de votants | 327 |
Nombre de suffrages exprimés | 320 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 161 |
Pour l’adoption | 40 |
Contre | 280 |
Le Sénat n'a pas adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
La parole est à M. Paul Blanc, pour explication de vote sur l’article 1er.
M. Paul Blanc. Bien entendu, je voterai en faveur de cet article 1er. Je considère en effet que c’est un premier pas vers le règlement définitif du problème du financement de la solidarité.
Au cours de la discussion, nous avons beaucoup parlé de la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées. Je tiens à rappeler que la loi du 11 février 2005 – à l’élaboration de laquelle le Sénat a pris une part prépondérante – dispose que la solidarité nationale doit financer la compensation du handicap. Par conséquent, je ne voudrais pas que ce financement soit oublié.
Au départ, lorsque la loi a instauré cette journée de solidarité, la destination des fonds a été quelque peu déviée en raison de la canicule de l’été 2003 et un effort important a été accompli en faveur des personnes âgées dépendantes.
Il aurait fallu déterminer la façon de financer la solidarité à l’égard des handicapés. Lors de la discussion de la loi du 11 février 2005, notre assemblée avait particulièrement insisté sur la nécessaire solidarité vis-à-vis des personnes handicapées.
Par ailleurs, j’estime que la solidarité doit s’exprimer différemment selon qu’il s’agit de la dépendance des personnes âgées ou du handicap. Qu’on le veuille ou non, chacun d’entre nous à vocation à devenir dépendant. Cette affirmation peut paraître simpliste à certains, mais elle correspond à la réalité. Je m’explique : lorsque vous achetez une voiture, vous avez vocation, si vous permettez l’expression, à avoir un jour un accident. C’est la raison pour laquelle la loi vous oblige à souscrire une assurance. A partir d’un certain âge, on a aussi vocation, malheureusement, à devenir un jour dépendant. Il faudra donc étudier cette problématique, qui est totalement différente de la solidarité nationale à l’égard des personnes handicapées.