Sommaire
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
2. Service public de l'emploi. - Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire
Discussion générale : Mmes Catherine Procaccia, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire ; Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi ; Christiane Demontès, Annie David.
Mme la ministre.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire
M. Robert del Picchia.
Adoption du projet de loi.
Suspension et reprise de la séance
3. Pouvoir d'achat. - Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire
Discussion générale : M. Nicolas About, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire ; Mmes Raymonde Le Texier, Annie David.
Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville.
Clôture de la discussion générale.
Texte élaboré par la commission mixte paritaire
M. Robert del Picchia.
Adoption du projet de loi.
4. Accord relatif à l'organisation internationale ITER. - Adoption d'un projet de loi en procédure d'examen simplifiée
Adoption de l'article unique du projet de loi.
Suspension et reprise de la séance
5. Candidatures à une commission mixte paritaire
6. Rétention de sûreté. - Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence
Amendement n° 16 rectifié de la commission. - M. Jean-René Lecerf, rapporteur de la commission des lois ; Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice ; Pierre-Yves Collombat, Richard Yung, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Retrait.
Amendements nos 44, 46 et 42 de Mme Alima Boumediene-Thiery. - Mme Alima Boumediene-Thiery, M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Rejet des trois amendements.
Amendements nos 70 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et 17 à 20 de la commission. - Mme Josiane Mathon-Poinat, M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux, M. Pierre-Yves Collombat. - Rejet de l'amendement no 70 ; adoption des amendements nos 17 à 20.
Amendements nos 71 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et 21 de la commission. - Mme Josiane Mathon-Poinat, M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux, M. Pierre-Yves Collombat. - Rejet de l'amendement no 71 ; adoption de l'amendement no 21.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 1er
Amendement n° 36 de Mme Alima Boumediene-Thiery. - Mmes Alima Boumediene-Thiery, M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Rejet.
Amendements nos 77 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, 41 de Mme Alima Boumediene-Thiery, 29 de la commission et sous-amendements nos 78 rectifié ter de M. Hugues Portelli et 92 du Gouvernement ; amendement no 89 de la commission. - Mmes Nicole Borvo Cohen-Seat, Alima Boumediene-Thiery, MM. le rapporteur, Hugues Portelli, Mme le garde des sceaux, MM. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois ; Pierre-Yves Collombat, Pierre Fauchon, Robert Badinter, Christian Cointat, Robert del Picchia. - Rejet des amendements nos 77 et 41 ; adoption des sous-amendements nos 78 rectifié ter, 92 et des amendements nos 29, modifié, et 89.
Adoption de l'article modifié.
Demande de priorité des articles 5 à 8. - M. le président de la commission. - La priorité est ordonnée.
Article 5 (priorité). - Adoption
Amendements nos 27 et 28 de la commission. - M. le rapporteur, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports ; MM. le président de la commission, Richard Yung, Pierre-Yves Collombat. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 7 (priorité). - Adoption
Amendement n° 76 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - Mme Josiane Mathon-Poinat, M. le rapporteur, Mme la ministre. - Rejet.
Adoption de l'article.
Amendements identiques nos 54 de M. Robert Badinter et 72 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat ; amendements nos 38 et 88 de Mme Alima Boumediene-Thiery. - M. Richard Yung, Mmes Josiane Mathon-Poinat, Alima Boumediene-Thiery, M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Rejet des quatre amendements.
Adoption de l'article.
Mme Josiane Mathon-Poinat.
Amendements identiques nos 55 de M. Robert Badinter et 73 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat ; amendements nos 22 à 26 de la commission, 57 de M. Robert Badinter et 74 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. - M. Richard Yung, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. le rapporteur, Robert Badinter, Mme le garde des sceaux. - Rejet des amendements nos 55, 73, 57 et 74 ; adoption des amendements nos 22 à 26.
Adoption de l'article modifié.
Amendements identiques nos 56 de M. Robert Badinter et 75 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat ; amendement n° 58 de M. Robert Badinter. - M. Richard Yung, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Rejet des trois amendements.
Adoption de l'article.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Amendements nos 60 de M. Robert Badinter et 79 rectifié ter de M. Hugues Portelli. - MM. Richard Yung, Robert del Picchia, le rapporteur, Mme le garde des sceaux, M. le président de la commission. - Rejet de l'amendement no 60 ; adoption de l'amendement no 79 rectifié ter rédigeant l'article.
Article additionnel après l'article 12 ter
Amendement n° 30 de la commission. - M. le rapporteur, Mmes le garde des sceaux, Nicole Borvo Cohen-Seat. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 31 de la commission. - M. le rapporteur, Mme le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Mmes Nicole Borvo Cohen-Seat, Alima Boumediene-Thiery, MM. Richard Yung, Nicolas Alfonsi, Robert del Picchia, Pierre Fauchon.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi.
Mme le garde des sceaux.
7. Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
8. Retrait de l'ordre du jour d'une question orale
9. Transmission d'un projet de loi
10. Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
12. Ordre du jour
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
vice-président
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Service public de l'emploi
Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire
M. le président. L'ordre du jour appelle l'examen des conclusions du rapport (n° 183) de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi.
Dans la discussion générale, la parole est à Mme le rapporteur.
Mme Catherine Procaccia, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire qui s'est réunie hier au Sénat pour élaborer un texte commun sur les dispositions du projet de loi restant en discussion est parvenue à un accord.
Elle a adopté au total une trentaine d'amendements, la plupart aux fins de coordination.
De nombreuses modifications apportées au code du travail en vigueur n'avaient pas été introduites dans le nouveau code, ce à quoi nous avons remédié.
En ce qui concerne les modifications de fond, la commission mixte paritaire a tout d'abord accepté, sur proposition du rapporteur de l'Assemblée nationale, d'autoriser, à titre expérimental, dans deux régions, une coprésidence des conseils régionaux de l'emploi par le préfet et le président du conseil régional.
Je rappelle que les conseils régionaux de l'emploi sont une nouvelle structure, à vocation consultative, instituée par le présent projet de loi. Cette coprésidence est susceptible de favoriser une meilleure coordination sur les questions d'emploi entre les services de l'État et ceux des conseils régionaux, qui sont compétents, comme vous le savez, en matière de formation professionnelle.
La commission mixte paritaire a ensuite supprimé l'obligation, introduite par l'Assemblée nationale, de recueillir l'avis des maisons de l'emploi avant de conclure la convention prévue, chaque année, entre le préfet de région et le directeur régional du nouvel opérateur.
Il nous a semblé que cette contrainte risquait d'être excessivement lourde, dans la mesure où l'on pourrait compter, à terme, une dizaine ou une quinzaine de maisons de l'emploi dans chaque région.
Enfin, la commission mixte paritaire a supprimé la date butoir que nous avions assignée à la durée de validité de la convention collective applicable aux ASSEDIC. En première lecture, nous avions fixé au 30 septembre 2010 au plus tard la date à laquelle cette convention cesserait de produire ses effets. Notre objectif était d'encourager les partenaires sociaux à trouver rapidement un accord sur la nouvelle convention collective applicable au personnel de l'opérateur.
La commission mixte paritaire a fait un autre choix. Elle s'est ralliée, en majorité, à la proposition de notre collègue député M. Yves Albarello pour que les partenaires sociaux déterminent eux-mêmes la date d'expiration de la convention applicable aux ASSEDIC.
Ce n'était pas ma position, car je craignais que cette disposition bien peu contraignante n'incite guère à conclure rapidement un nouvel accord. Vous l'avez compris, c'était dans l'intérêt des salariés que je souhaitais qu'on mette rapidement fin à une période d'incertitudes, mais tel est le choix de mes collègues, que je respecte au nom de la démocratie. J'espère que le sens des responsabilités de chacun finira par l'emporter et rendra mes craintes infondées. C'est mon souhait le plus cher.
Je signale enfin que la commission mixte paritaire a confirmé la suppression de l'article 8 ter, que le Sénat avait adopté sur l'initiative du président de notre commission des affaires sociales, pour lutter contre certaines formes de fraudes aux ASSEDIC. Elle a estimé que ce projet de loi ne constituait pas le bon vecteur pour résoudre ce problème. Néanmoins, ses membres ont admis, dans leur grande majorité, que M. About avait soulevé là une vraie difficulté, qu'il conviendra de réexaminer à l'occasion, par exemple, d'un prochain projet de loi tendant à réformer le marché du travail.
Les autres apports du Sénat ont été préservés, notamment la possibilité offerte au conseil d'administration de voter une « motion de défiance » contre le directeur général du nouvel opérateur, la création d'une quatrième section dans son budget ou encore le choix du nom de baptême, qui sera l'une des premières compétences de la future institution
Au total, le texte que nous vous proposons devrait permettre de mettre en oeuvre, dans des conditions satisfaisantes, la réforme de structure ambitieuse que le Président de la République et Mme le ministre ont souhaitée pour répondre aux besoins et aux attentes légitimes des demandeurs d'emploi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l'emploi. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, vous allez dans quelques instants, je l'espère, voter un texte que je crois important.
Je voudrais en préalable vous remercier, madame le rapporteur, du travail considérable que vous avez accompli sur ce projet de loi à une période où chacun d'entre nous aurait préféré passer du temps en famille. Vous avez néanmoins procédé à des auditions et engagé un véritable travail de fond. Vous avez cru à ce projet et, jusque dans la dernière ligne droite, vous avez défendu des thèses et des causes qui nous étaient chères à l'une et à l'autre. Je voudrais ici vous en rendre hommage.
Le nouvel opérateur sera la charpente du service public de l'emploi que le Gouvernement entend mettre en place. Il sera l'un des outils, il y en aura d'autres, qui nous permettront d'atteindre les deux objectifs qui nous ont été fixés : un taux de chômage réduit à 5 % et un taux d'emploi de 70 % en 2012.
La fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC ne suffira pas à atteindre ces objectifs. Elle n'est ni l'alpha ni l'oméga de la réforme ; elle est l'un des trois piliers déterminants pour modifier de façon significative les relations dans le monde du travail.
Cette réforme s'inscrit dans une politique beaucoup plus globale. Il y a bien sûr une politique de création d'emplois, une politique de croissance, avec notamment les dispositions concernant les heures supplémentaires votées cet été, et d'autres mécanismes qui modifieront les relations au sein de l'entreprise.
Il y a aussi le chantier considérable de la réforme du marché du travail afin d'instaurer une flexibilité accrue tout en préservant la sécurité, ce qui est parfaitement compatible avec le développement des emplois.
L'accord interprofessionnel qui a été signé le 11 janvier dernier constitue une étape importante dans l'évolution des relations au sein de l'entreprise. À cet égard, la réforme de la formation professionnelle sera essentielle. Elle nous amènera à examiner en profondeur tout à la fois l'apprentissage, la formation professionnelle continue, et à prendre des mesures d'anticipation pour permettre l'employabilité des salariés.
Ce texte permettra d'améliorer l'adéquation entre l'offre et la demande et, grâce à la mise en place de plateformes polyvalentes de services, d'inciter les acteurs concernés à rendre des services de meilleure qualité aux entreprises à la recherche de salariés - certaines offres d'emploi sont non pourvues - comme, bien entendu, à tous les demandeurs d'emploi, qu'ils soient indemnisés ou non.
Je me félicite des améliorations qui ont été apportées au texte à l'occasion des débats que nous avons eus dans cet hémicycle.
Un certain nombre de propositions, formulées sous forme d'amendements, n'ont pas été retenues dans la version finale.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est regrettable !
Mme Christine Lagarde, ministre. Elles ont toutefois permis d'ouvrir un débat de fond dont je suis sûre qu'il se poursuivra, car il est déterminant, sur la disponibilité et la qualification des demandeurs d'emploi.
C'est un début. Les agents de l'ANPE, les salariés de l'UNEDIC et des ASSEDIC vont, dans les jours qui viennent, grâce à l'instance de préfiguration, mettre en oeuvre le projet ambitieux soumis à votre vote ce matin.
Par ailleurs, nous allons lancer rapidement les travaux de préparation de la convention tripartite que l'État et l'UNEDIC concluront avec le nouvel opérateur.
Il faudra définir les objectifs assignés à l'opérateur, les publics prioritaires qui bénéficieront d'un accompagnement renforcé, et ses modes d'action : intervention directe, cotraitance, sous-traitance, recours à des opérateurs privés, pour l'accompagnement de publics à déterminer et selon des modalités à fixer. L'impératif sera toujours de rendre le meilleur service aux deux publics fondamentaux que sont les demandeurs d'emploi et les entreprises.
La réflexion se poursuivra également sur le contenu précis de l'offre de services du nouvel opérateur, notamment le bon niveau d'accompagnement et la qualité des prestations proposées.
Il faudra également définir les modes opératoires avec les autres services publics de l'emploi, notamment les maisons de l'emploi, longuement évoquées lors du débat parlementaire, l'association nationale pour la formation professionnelle des adultes, ou AFPA, l'association pour l'emploi des cadres, ou APEC, les missions locales ou encore les Cap Emploi. Le Gouvernement espère que tous ces acteurs pourront travailler en synergie, sachant que certains d'entre eux - en particulier les maisons de l'emploi - ne remplissent pas du tout la même fonction que la nouvelle institution ANPE-ASSEDIC.
Cette étape législative ne clôt pas le chantier, elle lui donne une impulsion et une direction.
La préparation du projet a donné lieu à une intense concertation avec l'ensemble des partenaires sociaux et les représentants des collectivités locales.
Ces étapes ont chaque fois permis d'enrichir le projet, de rapprocher les points de vue et nous avons pu obtenir un avis favorable de la grande majorité des partenaires sociaux.
De nombreux amendements ont été adoptés, y compris d'ailleurs de l'opposition, qui ont permis de mieux qualifier l'institution et d'enrichir ses missions. Nos débats se sont inscrits sans cesse dans l'esprit du projet de loi initial : la concertation, l'écoute, la recherche d'un meilleur service à rendre tant aux demandeurs d'emploi qu'aux entreprises.
Je tenais à vous remercier tous les membres de la commission que vous représentez, monsieur le président de la commission, et à rendre hommage au travail accompli par Mme le rapporteur. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès.
Mme Christiane Demontès. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous voici arrivés au terme des discussions sur le projet de loi relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi, qui deviendra donc loi après le vote du Sénat puis, tout à l'heure, de l'Assemblée nationale.
Je veux d'abord redire que la discussion en urgence de ce projet de loi ne se justifiait pas et que le débat ayant eu lieu hier en commission mixte paritaire l'a démontré. Certaines modifications apportées au texte après son examen par nos collègues députés auraient mérité un débat et un examen approfondis, qu'une deuxième lecture tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale aurait permis.
Nous avons eu l'occasion d'aborder des points importants qui n'étaient pas dans la logique du projet de loi, mais qui auraient eu toute leur place dans un texte portant sur les politiques de l'emploi et de la formation et sur leur mise en oeuvre par le service public de l'emploi réformé. Vous avez abordé ces questions par le petit bout de la lorgnette. J'espère - mais je n'en suis pas tout à fait sûre - que vous n'avez pas ainsi créé une nouvelle complexité organisationnelle. Au moins est-il acté que nous avons un texte sur la réforme non pas du service public de l'emploi, mais de son organisation.
Ce n'est pas cette réforme qui répondra aux difficultés rencontrées par un grand nombre de nos concitoyens, notamment les allocataires de minima sociaux, de plus en plus nombreux dans certains de nos territoires, ainsi que les 600 salariés mosellans qui vont sans doute devoir changer d'emploi et en trouver un autre, alors que leur entreprise a dégagé près de 6,5 milliards d'euros de bénéfices et que le directeur général et sa famille devraient percevoir à eux seuls environ 640 millions d'euros.
La situation économique et sociale de notre pays est inquiétante ; nos concitoyens sont préoccupés, ils ne sont pas satisfaits de leur Président de la République et de son gouvernement. Il n'est pas question pour nous de valider le fait que, si les choses vont mal, c'est à cause des chômeurs et des professionnels des différentes institutions qui les reçoivent et les accompagnent.
Venons-en donc à cette fusion entre l'ANPE et les ASSEDIC, pour laquelle nos débats ont permis d'obtenir quelques avancées.
Il en est ainsi de l'intitulé du projet de loi, qui reflète désormais plus précisément le contenu du texte : je le répète, il s'agit évidemment d'une réforme non pas du service public de l'emploi, mais bien de sa seule organisation.
Nous avons également levé les ambiguïtés qui pesaient sur la nature juridique de l'organisme issu de la fusion des ASSEDIC et de l'ANPE. Il s'agira bien d'une institution publique nationale, certains ayant même évoqué l'idée d'un établissement public administratif. Nous avons pu préciser le rôle de son conseil d'administration en matière d'attribution annuelle des dépenses.
Notre groupe a par ailleurs enregistré d'autres sujets de satisfaction. Je pense notamment à l'introduction, au sein du conseil d'administration, d'un représentant des collectivités territoriales. Je songe aussi à l'adoption d'un amendement de précision à l'article 3, qui, dans la logique de la création d'une quatrième section fongible dans le budget de la nouvelle l'institution, permet de spécifier la ventilation de la participation du régime d'assurance chômage au fonctionnement et à l'investissement de cette institution.
L'examen à l'Assemblée nationale et en commission mixte paritaire ont permis d'obtenir quelques nouvelles avancées ou rectifications. Il a ainsi été confirmé que les collectivités territoriales auront une place de titulaire et de suppléant au conseil d'administration. Bien que la disposition paraisse insuffisamment ambitieuse et peu cohérente avec les lois de décentralisation, y compris celle d'août 2004 qui confie aux régions la compétence en matière de formation professionnelle et de coordination du développement économique, la commission mixte paritaire a validé le principe d'une expérimentation par deux régions. Dans ce cadre, il s'agira, d'une part, de mieux articuler les politiques de l'emploi et de la formation professionnelle à l'échelon régional, et, d'autre part, d'établir dans les deux régions concernées une coprésidence du conseil régional de l'emploi par le président du conseil régional et le préfet de région.
La commission mixte paritaire a également supprimé la possibilité pour les maisons de l'emploi d'émettre un avis sur la convention annuelle conclue au niveau régional. Cela générait, de fait, une inégalité entre les territoires, dans la mesure où les maisons de l'emploi n'existent pas dans tous les territoires, même pas de France métropolitaine, et que les promesses sur la pérennisation de ces organismes, que vous avez réaffirmées à l'instant, madame la ministre, ne nous apparaissent pas comme des certitudes. En effet, je le rappelle, la commission d'habilitation, présidée par notre collègue député Jean-Paul Anciaux, ne s'est plus réunie depuis mars 2007, pour des raisons que je qualifierai de « mystérieuses ».
Les personnels des ASSEDIC restent régis par la convention collective qui leur est applicable jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle convention ou, à défaut, jusqu'à la date prévue par l'accord de méthode, et non jusqu'à une date fixée arbitrairement par le législateur, ce dont nous sommes satisfaits.
Néanmoins, certaines inquiétudes subsistent.
Ainsi, aucune précision n'a été apportée aux agents de l'UNEDIC et des ASSEDIC quant à leur devenir professionnel. Par ailleurs, près d'un quart des agents de l'ANPE sont actuellement en CDD et l'article 9 de la convention de l'Organisation internationale du travail, l'OIT, prévoit que les agents bénéficient de la stabilité de l'emploi « sous réserve des besoins de service ». Si l'on ajoute à cela les hypothèses qui laissent à penser ou, plutôt, qui permettent d'affirmer que le nombre d'agences pourra passer de 1 600 à 1 200, ce sont autant de raisons pour légitimer la question de la pérennisation de ces emplois, plus spécifiquement de ceux qui dépendent d'un contrat précaire.
Quant à la nature de l'activité professionnelle, elle est, elle aussi, source d'inquiétudes. En effet, la rédaction retenue ne garantit nullement l'indépendance des agents. Madame la ministre, vous nous l'aviez vous-même précisé, il sera utile que chaque agent comprenne les attentes de tous les usagers, demandeurs d'emploi et entreprises, et connaisse tous les métiers.
Mais quelles sont les modalités prévues pour parvenir à ce que cette révolution s'opère de la meilleure façon possible ? De quelle manière des agents travaillant aux ASSEDIC, notamment ceux qui sont chargés du recouvrement, deviendront, demain, des conseillers pour les entreprises ? Nous n'en savons rien, et les salariés non plus. Dans le même ordre d'idées, ces derniers s'interrogent également sur la mise en oeuvre et les finalités d'un outil informatique commun.
La négociation de la nouvelle convention collective, nous le savons tous, s'inscrit d'ores et déjà dans un cadre complexe, pour ne pas dire préoccupant. Madame la ministre, vous nous l'avez expliqué, compte tenu du fait que les agents de l'ANPE avaient un statut de droit public fixé par décret, le Gouvernement avait fait le choix, dans le respect des dispositions de la convention C88 de l'OIT, de prévoir une convention collective, cette dernière, une fois négociée, devant faire l'objet d'un agrément gouvernemental.
Si le respect de la convention C88 de l'OIT est un préalable essentiel, affirmer que le Gouvernement donnera son agrément ne saurait apaiser les inquiétudes des agents. Ceux-ci ne croient absolument pas que ce seront les atouts de la convention collective de l'UNEDIC conjugués à ceux du statut des agents de l'ANPE qui constitueront, in fine, la base de la future convention collective.
Le dernier motif de satisfaction est la suppression par l'Assemblée nationale, confirmée par la commission mixte paritaire, de l'article 8 ter relatif à la démission de fait du salarié ayant quitté son poste de travail, qui avait d'ailleurs été introduit au Sénat sur votre initiative personnelle, monsieur le président de la commission.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cet amendement visait à dénoncer une association de malfaiteurs !
Mme Christiane Demontès. Or, vous l'avez vous-même souligné hier, cette disposition relève plus du code du travail. On peut estimer que l'accord qui vient d'être signé récemment par les partenaires sociaux, comme vous l'avez rappelé, madame la ministre, est de nature à régler cette question, dans le cadre de la rupture négociée du contrat de travail entre l'employeur et le salarié. Nous aurons sans doute l'occasion d'y revenir lorsque nous aurons à inscrire dans la loi un tel accord.
Par ailleurs, je voudrais de nouveau évoquer la question de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l'AFPA.
Devant l'indécision dont fait preuve le Gouvernement quant à la place et au devenir de cet organisme, les salariés se mobilisent. Les organisations syndicales, désormais organisées en « Comité de défense de l'AFPA et de son personnel », se sont réunies il y a quarante-huit heures.
Elles constatent que « le démantèlement de l'Association est engagé : cession du patrimoine à la SOVAFIM, prévision de transfert des services d'orientation, dangers sur l'ingénierie, fermetures d'établissements, de sections de formations, augmentation de la précarité des personnels. » Comme elles le précisent, ce qui est en jeu, et vous le savez bien, madame la ministre, « c'est l'effectivité du droit à la qualification pour les salariés - actifs ou demandeurs d'emploi - en premier lieu les moins qualifiés d'entre eux. » Dès lors que l'on réforme le marché du travail et que l'on entend mettre en oeuvre la sécurisation du parcours professionnel, cette dimension est on ne peut plus centrale.
Aussi, nous ne pouvons que nous inquiéter du devenir de l'AFPA et de ses personnels. Toujours à ce sujet, madame la ministre, je vous avais interrogée lors des débats sur l'éventualité de la prorogation de la période transitoire qui permet aux régions de subventionner les actions de formation de l'AFPA. Vous vous étiez alors engagée - le compte rendu intégral des débats l'atteste - à travailler avec l'Association des régions de France, l'ARF, pour aider les régions à « trouver les mécanismes appropriés ». Vous aviez ajouté : « Si nous n'y arrivons pas dans les délais, c'est-à-dire avant la fin de l'année 2008, il sera temps de prévoir alors une extension de délai. »
Or, dans un courrier que vous avez adressé dès le lendemain de nos débats au président de l'ARF, il me semble que vous fermez la porte en précisant : « Les conseils régionaux pourront appliquer à compter de la date initialement prévue, le 1er janvier 2009, les règles de la commande publique. » Ai-je eu tort, madame la ministre, de vous faire confiance ? J'espère que vous allez me démentir !
En conclusion, malgré les quelques avancées que j'ai rappelées, nous sommes loin d'avoir réglé toutes les questions posées par ce projet de loi. Mon groupe votera donc contre de nouveau. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Madame la ministre, nous sommes réunis ce matin pour adopter deux textes hautement symboliques de votre volonté de modeler notre société à la sauce libérale. Vous le savez, les sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen ne veulent pas de cette société-là.
Nous débutons donc cette matinée par le projet de loi relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi, qui est, vous l'avez précisé, l'un des trois piliers de la réforme de l'emploi.
Je dois le dire, les hasards du calendrier font parfois bien les choses. Alors que nous nous apprêtons à adopter ce texte, la presse dévoile, depuis quelques jours déjà, un scandale financier et boursier sans précédent dans notre pays : vous aurez reconnu l'affaire de la Société générale.
Cette banque, considérée par de nombreux économistes et spécialistes du marché boursier comme l'une des plus sérieuses, a perdu près de 2,9 milliards d'euros dans la crise des subprimes à la française et plus de 5 milliards d'euros dans cette immense affaire de détournement de fonds. Un trader, comme il est convenu de l'appeler, a, à lui seul, nous dit-on, fait perdre 5 milliards d'euros à cet établissement bancaire. Il aurait seul, nous dit-on encore, contourné toutes les procédures, violé toutes les protections et manipulé jusqu'à 50 milliards d'euros.
Il faudra tout de même nous expliquer comment, en France, un seul homme peut « boursicoter », car il n'y a pas d'autres termes, avec une somme équivalente au déficit cumulé de notre régime de protection sociale.
Madame la ministre, je devine que vous ne voyez pas le lien avec le sujet qui nous préoccupe aujourd'hui. Il est pourtant bien réel.
Lors de l'examen du projet de loi initial, mon collègue Guy Fischer et moi-même avions dénoncé une politique de culpabilisation des demandeurs d'emploi. Nous critiquions alors, et continuons à le faire, le regard que vous portez sur les demandeurs d'emploi, les considérant plus comme des « clients », pour la part solvable, et comme des « coûts », pour ce qui relève de l'indemnisation, que comme des salariés privés d'emploi.
De la même manière, nous dénoncions et dénonçons encore votre insistance à vouloir « chasser » les fraudeurs. L'esprit de votre réforme et des lois successives votées par la majorité, « loi de cohésion sociale » en tête, n'ont pour seul objectif que d'organiser méthodiquement, trop d'ailleurs, une telle chasse.
C'est un constat que nous faisions déjà lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, par lequel, au nom encore de la lutte contre la fraude, à l'assurance maladie cette fois-ci, vous organisiez la privatisation des missions de contrôle, confiant aux médecins pratiquant pour l'employeur la contre-visite la mission de donner une évaluation sur la possible réintégration du salarié et, donc, sur le maintien du versement de ses indemnités journalières.
Par conséquent, c'est, pour vous, tout le temps la même logique : la coercition pour les uns, victimes de votre politique libérale, et la tranquillité, pour ne pas dire l'impunité, pour les autres, grands maîtres en matière de libéralisme.
Ce que nous affirmions durant l'examen de ce texte se vérifie aujourd'hui : pour vous, les fraudeurs sont toujours des salariés, jamais des employeurs ou des dirigeants.
Les propos tenus par le Président de la République confirment d'ailleurs notre analyse. Il veut revenir, sans réelle concertation, sur la notion d'offre valable d'emploi, en lui substituant celle, plus floue et, on le devine, plus libérale, d'offre acceptable d'emploi. Ce faisant, il revient sur une définition issue de l'Organisation internationale du travail et strictement encadrée par la jurisprudence, pour lui privilégier une nouvelle définition, issue non des normes internationales, mais de la « boîte à idée » du MEDEF. Je regrette d'ailleurs sincèrement que certains sénateurs aient repris l'esprit de ce glissement sémantique.
Notre Haute Assemblée, dont on reconnaît souvent la qualité des travaux, n'a toutefois pas résisté à la tentation de la culpabilisation des demandeurs d'emplois, et il aura fallu la sagesse des députés pour que l'amendement de M. About soit supprimé. Il s'agissait de revenir sur un dispositif utile et protecteur pour le salarié.
Ainsi votre majorité a-t-elle voté, en ces lieux, pour que la non-présentation du salarié à son poste soit qualifiée démission plutôt que licenciement, rompant avec la jurisprudence constante de la Cour de cassation, selon laquelle, rappelons-le, la démission ne se présume pas. Cet amendement n'avait en fait qu'un objectif, celui de durcir plus encore les conditions d'accès au régime d'indemnisation du chômage des demandeurs d'emplois.
La réalité, nous la connaissons. Le Président de la République veut, d'ici à 2012, parvenir au plein emploi et réduire le chômage jusqu'au taux particulièrement bas de 5 %. Or, comme il ne peut compter ni sur la relance économique ni sur sa propre politique en matière d'emploi, il lui faut nécessairement trouver des stratagèmes. La solution réside ni plus ni moins dans la radiation massive des demandeurs d'emplois. Les deux exemples préalablement cités, à savoir l'amendement déposé par M. About, fort heureusement retiré, ...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Madame David, vous n'êtes pas gentille ! (Sourires.)
Mme Annie David. ... et le recours à l'offre acceptable d'emploi, en sont des instruments.
Pour parvenir à vos fins, il vous fallait modeler l'organisme en charge de l'indemnisation des chômeurs et de leur conseil. C'est toute la raison d'être de votre projet de loi. Autant dire que l'adoption de notre amendement n° 40 tendant à réaffirmer le caractère public et national de la future institution, le seul amendement de notre groupe adopté par cette assemblée, ne nous rassure pas.
Au Sénat comme à l'Assemblée nationale, votre majorité a refusé nos amendements visant à préciser que l'institution nouvelle devait être un établissement public administratif. Rien ne garantit donc ce statut et, contrairement à vos propos, cela ne se déduit pas de l'absence de vente de services ou de produits.
Ce que nous redoutons, c'est la création d'un établissement public sui generis, à mi-chemin entre l'établissement public et la société privée. Ce doute, vous l'entretenez, en précisant dans l'article 2 du présent projet de loi que la comptabilité de la future institution sera soumise aux règles applicables aux entreprises industrielles et commerciales. Il n'est donc plus fait référence à un établissement public, fût-il un établissement public industriel et commercial, ou EPIC ; il s'agit bel et bien d'une entreprise industrielle, ce qui nous renvoie irrémédiablement dans la sphère privée.
Il en est de même du sort réservé aux salariés. S'il est vrai que les agents issus de feue l'ANPE auront un droit d'option, ils relèveront en tout état de cause du code du travail, comme les salariés du privé.
Madame la ministre, lors de la recodification du code du travail, nous avions cru comprendre que vous souhaitiez simplifier le droit. Je m'étonne alors de la curieuse opacité qui entoure le statut de cette institution et qui ne peut que dissimuler la réalité de vos projets.
Vous voulez, ni plus ni moins, privatiser le service public de l'emploi. Quand bien même la structure de l'institution serait publique, rien ne garantit que vous ne privatiserez pas, en partie ou en totalité, sa mission. Rien n'interdit que, sous l'apparence d'une structure publique, le privé soit roi. Tel est déjà le cas, et je le regrette, à l'ANPE, qui sous-traite une partie de son activité à des sociétés privées de placement. Ce recours va d'ailleurs toujours grandissant.
On comprend mal pourquoi ce qui était la règle hier serait l'exception demain. Vous vous êtes même refusée à préciser si la future institution aura ou non recours à de telles pratiques.
Les propos que vous avez tenus devant l'Assemblée nationale ne nous rassurent pas. Vous avez parlé non plus d'un service public de l'emploi, conformément à l'intitulé du projet de loi dont nous débattons aujourd'hui, mais d'un « marché public de l'emploi ».
On redoute les propos que vous tiendrez demain, après l'adoption de ce projet de loi ! Sans doute finirez-vous par parler d'un « marché du service de l'emploi », niant définitivement le caractère public de ce service, et l'ouvrant en grand à la concurrence et aux structures privées.
Avant de conclure, je souhaite évoquer le sort que votre gouvernement et sa majorité complice entendent réserver à l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l'AFPA, dont vient de parler Mme Demontès. Par le jeu d'un amendement déposé par Mme Procaccia et tendant à insérer un article additionnel après l'article 8, ...
Mme Catherine Procaccia, rapporteur. C'est mon initiative et celle de personne d'autre !
Mme Annie David. ... il est prévu dans le projet de loi que « dans un délai de douze mois après la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur les modalités du transfert éventuel à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail des personnels de l'association pour la formation professionnelle des adultes chargés de l'orientation professionnelle des demandeurs d'emploi ».
La rédactrice de cet amendement a pris soin de recourir au terme « éventuel ». Mais les salariés ne savent que trop, depuis le rapport Marimbert de 2004 et celui, plus récent, de nos collègues Seillier et Carle, quel sort leur sera réservé. Ils savent que votre majorité veut en finir avec le service public de l'emploi et que, pour ce faire, il faut tout démanteler. Ils savent pertinemment que vous souhaitez détricoter la structure actuelle en séparant la formation et l'orientation.
Comment soutenir un seul instant que ce projet puisse être viable ? Comment soutenir que ces deux missions, pourtant très liées l'une à l'autre, puissent être exercées par des structures différentes ? Je comprends d'ailleurs mal votre logique. D'un côté, celui de l'ANPE et des ASSEDIC, il faut fusionner, de l'autre, celui de l'AFPA, il faut au contraire dissocier.
Pour mon groupe, la cohérence est totale. Nous sommes pour un service public de l'emploi, qui recouvre toutes les missions et soit un outil utile à l'employeur, au salarié actif et à celui privé d'emploi. Les salariés ne s'y sont d'ailleurs pas trompés et ils étaient nombreux à rejoindre leurs collègues qui manifestaient devant le Sénat durant nos travaux.
Comment ne pas mettre en corrélation cet amendement avec ce que les salariés de l'AFPA ont constaté ? Le 24 janvier dernier, les salariés élus du comité d'établissement ont interrogé la direction de l'AFPA sur la présence de la SOVAFIM « dans les murs de l'AFPA ». Je rappelle, pour mémoire, que la SOVAFIM est la société de valorisation foncière et immobilière, dont la mission est de valoriser et de vendre le patrimoine immobilier des agences ou institutions de l'État. À ce jour, les représentants élus des salariés n'ont reçu aucune réponse de la part de leur direction.
Je me tourne donc vers vous, madame la ministre, afin que vous nous confirmiez si l'État entend poursuivre et amplifier les ventes du patrimoine immobilier de l'AFPA, comme l'annonçait M. Jean-François Copé, alors ministre délégué au budget.
Ce que nous redoutons, et les faits sont têtus à cet égard, c'est la privatisation de la future institution, tout au moins de sa mission d'orientation. Aujourd'hui, vous vendez ses biens et transférez son personnel. Et demain ? Il ne restera plus qu'à vendre aux plus offrants la mission d'orientation.
Il en sera de même pour la mission de placement de la future institution et le risque est grand que les agents de l'AFPA n'aient plus pour mission, à l'avenir, que le contrôle et la lutte contre la fraude. D'ailleurs, je fais mienne la question posée dans le journal Le Figaro : qui va payer ?
Nous le savons, la réforme de la formation professionnelle qui va s'engager pose de vraies questions. Mais les salariés et leurs organisations ne sont pas les seuls à s'y intéresser. Le MEDEF y regarde aussi de près. Nul doute que la question de la part patronale du financement viendra en débat. Et si les déclarations récentes sur le financement de la part « formation professionnelle » par les employeurs ne sont pas de nature à nous rassurer totalement, autant dire que le silence sur la part « orientation » nous inquiète.
Je m'étais opposée à cet amendement lors de sa présentation en séance. Je regrette donc fortement que les députés ne soient pas revenus sur l'article en question et que celui-ci soit finalement adopté.
Madame la ministre, je souhaite, en conclusion, vous poser une question, à laquelle je ne doute pas que vous apporterez une réponse.
Le journal Les Échos en date du 30 janvier 2008 titrait : « À l'ANPE, plus d'un agent sur cinq est en contrat précaire ». On apprend, dans cet article, que l'Inspection générale des affaires sociales, l'IGAS, et la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle, la DGEFP, ont remis un rapport conjoint faisant état de la précarisation des salariés de l'ANPE. Ce ne sont pas moins de 3 400 contrats à durée déterminée, 2 000 contrats aidés et 900 contrats temporaires qui se cumulent dans le service public de l'emploi. Pour Régis Dauxois, secrétaire général de Force Ouvrière-ANPE, « c'est une question structurante ».
D'après l'auteur de l'article, vous vous seriez engagée, madame la ministre, à requalifier tous les CDD de plus de dix-huit mois en CDI de droit privé. Or cela fait parfois plus de neuf ans que certains salariés sont en CDD, alors que la règle en la matière établit une limite de deux CDD maximum de trois ans, soit six ans tout au plus. À défaut, en cas de dépassement de ce délai, il conviendrait de requalifier ces contrats en contrats de droit public, à l'image de ceux de la majorité des agents.
Ce n'est pourtant pas ce que vous prévoyez. Vous proposez à ces salariés, qui ont participé au développement d'une structure publique, de bénéficier, après des années d'effort, non pas du statut de l'entreprise pour laquelle ils ont travaillé des années durant, mais de celui d'une agence à venir. Ne trouvez-vous pas socialement injuste de les renvoyer dans le secteur privé, quand leur activité professionnelle s'est déroulée pour l'essentiel dans le secteur public ? Vous connaissez notre opposition à votre projet de fusion. Mais, avec cette dernière mesure, vous méprisez les salariés et bafouez leur histoire personnelle au sein de ce service public.
La reconnaissance des salariés est un élément fondamental de la motivation, et nous en avons longuement débattu lors de l'examen de ce projet de loi et de celui pour le pouvoir d'achat. Il va sans dire que votre décision ne participe pas de ce mouvement de reconnaissance, et c'est fort regrettable.
Madame la ministre, quel sort entendez-vous réserver aux contrats atypiques et aux contrats temporaires dans la future institution ? Entendez-vous faire des salariés sous contrat précaire, comme cela semble se profiler à l'horizon, les leviers économiques de votre triste fusion ?
Je reste donc opposée, avec l'ensemble des sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, à ce projet de loi qui, au final, ne sera pas créateur de droits nouveaux pour les demandeurs d'emplois et privatisera plus encore ce qui reste du service public de l'emploi. J'émettrai donc, au nom de mon groupe, un vote d'opposition à votre projet de loi.
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
La parole est à Mme le ministre.
Mme Christine Lagarde, ministre. Je souhaite vous annoncer quelques bonnes nouvelles. En 2007, 312 000 emplois ont été créés, ainsi que 320 000 entreprises nouvelles. Le chômage poursuit sa baisse de mois en mois de manière régulière et nous sommes désormais passés sous le seuil des 7,9 % de la population active. Nous nous étions déjà réjouis de passer sous la barre des 2 millions de demandeurs d'emploi. Nous voici sous la barre des 1 900 000.
À la question concernant l'AFPA posée par Mme Demontès, qui se demandait si elle avait eu raison de me faire confiance, je répondrai par l'affirmative.
Sur l'avenir de l'AFPA, j'ai déjà dit que j'étais attachée, tout comme le Gouvernement, à l'importance d'un système de formation performant au service des salariés, notamment des plus fragiles et des moins qualifiés d'entre eux, ceux qui ont le plus besoin de qualification. L'AFPA est bien entendu une partie intégrante et prépondérante de ce dispositif, aux côtés d'autres acteurs publics et privés.
Madame Demontès, l'AFPA accomplit ses missions dans le cadre du droit communautaire. Les commandes qui sont passées à cet organisme par les régions ou les autres collectivités publiques sont donc soumises aux règles de la commande publique.
J'ai proposé à l'Association des régions de France, l'ARF, de travailler en étroite liaison avec mes services pour trouver les moyens techniques d'organiser cette commande publique dans de bonnes conditions. C'est précisément le sens de ma lettre du 10 janvier adressée au président de l'ARF, M. Alain Rousset. Si cet exercice s'avère trop complexe, ce que je ne pense pas, nous examinerons ensemble la possibilité d'allonger la période transitoire en cas de nécessité. Les premières réunions auront lieu dès le début du mois de février. Si vous en êtes d'accord, madame la sénatrice, je ferai le point avec vous dès la fin du mois de mars.
Plus globalement, je me félicite que le Sénat ait pris l'initiative de demander un rapport sur l'organisation des services d'orientation, et en particulier de l'AFPA. Ce rapport permettra de faire le bilan du contrat de progrès, qui arrivera à son terme, et de tracer des perspectives claires pour l'avenir en ce qui concerne, à la fois, les services d'orientation, sur lesquels nous nous sommes engagés à préparer un rapport, et la fonction plus générale de l'AFPA, que je n'ai, je tiens à vous rassurer sur ce point, aucun désir de voir démanteler. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement, étant appelé à se prononcer avant l'Assemblée nationale, le Sénat se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Article 1er
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - La section 1 du chapitre Ier du titre Ier du livre III du code du travail est ainsi modifiée :
1° L'article L. 311-1 est ainsi modifié :
aa) La première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée :
« Le service public de l'emploi a pour mission l'accueil, l'orientation, la formation, l'insertion ; il comprend le placement, le versement d'un revenu de remplacement, l'accompagnement des demandeurs d'emploi et l'aide à la sécurisation des parcours professionnels de tous les salariés. » ;
a) Dans la deuxième phrase du même alinéa, les mots : « Agence nationale pour l'emploi » sont remplacés par les mots : « institution publique mentionnée à l'article L. 311-7 » et, dans la dernière phrase du même alinéa, les mots : « les organismes de l'assurance chômage mentionnés à l'article L. 351-21 dans le cadre des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont propres » sont remplacés par les mots : « l'organisme chargé de la gestion de l'assurance chômage mentionné à l'article L. 351-21 dans le cadre des dispositions légales qui lui sont propres » ;
b) Les huit derniers alinéas sont supprimés ;
2° Après l'article L. 311-1, sont insérés deux articles L. 311-1-1 et L. 311-1-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 311-1-1. - Le Conseil national de l'emploi est présidé par le ministre chargé de l'emploi et comprend des représentants des organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs, des collectivités territoriales, des maisons de l'emploi, des administrations intéressées, des principaux opérateurs du service public de l'emploi, notamment l'institution publique mentionnée à l'article L. 311-7, l'organisme chargé de la gestion de l'assurance chômage mentionné à l'article L. 351-21 et l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, et des personnalités qualifiées.
« Le Conseil national de l'emploi concourt à la définition des orientations stratégiques des politiques de l'emploi. Il veille à la mise en cohérence des actions des différentes institutions et organismes mentionnés à l'article L. 311-1 et à l'évaluation des actions engagées.
« À cette fin, il émet un avis :
« 1° Sur les projets de loi, d'ordonnance et de décret relatifs à l'emploi ;
« 2° Sur le projet de convention pluriannuelle d'objectifs et de gestion définie à l'article L. 311-1-2 ;
« 3° Sur l'agrément de l'accord d'assurance chômage mentionné à l'article L. 351-8, dans des conditions fixées par décret ;
« 4° Sur l'adaptation et la cohérence des systèmes d'information du service public de l'emploi.
« Dans chaque région, un conseil régional de l'emploi est présidé par le préfet de région et comprend des représentants des organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs, du conseil régional et des principales collectivités territoriales intéressées, des administrations intéressées, des universités, des représentants d'organisations participant au service public local de l'emploi, notamment des maisons de l'emploi, ainsi que le directeur régional de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7. Il est consulté sur l'organisation territoriale du service public de l'emploi en région et émet un avis sur la convention prévue à l'article L. 311-7-9.
« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent article.
« Art. L. 311-1-2. - Une convention pluriannuelle conclue entre l'État, l'organisme chargé de la gestion de l'assurance chômage mentionné à l'article L. 351-21 et l'institution publique mentionnée à l'article L. 311-7 définit les objectifs assignés à celle-ci au regard de la situation de l'emploi et au vu des moyens prévisionnels qui lui sont alloués par l'organisme chargé de la gestion de l'assurance chômage et l'État.
« Elle précise notamment :
« 1° Les personnes devant bénéficier prioritairement des interventions de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 ;
« 2° Les objectifs d'amélioration des services rendus aux demandeurs d'emploi et aux entreprises et en particulier le nombre de demandeurs d'emploi suivis en moyenne par conseiller et les objectifs de réduction de ce ratio ;
« 3° L'évolution de l'organisation territoriale de l'institution ;
« 4° Les conditions de recours aux organismes privés exerçant une activité de placement mentionnés à l'article L. 311-1 ;
« 5° Les conditions dans lesquelles les actions de l'institution sont évaluées, à partir d'indicateurs de performance qu'elle définit.
« Un comité de suivi veille à l'application de la convention et en évalue la mise en oeuvre.
« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent article.
« II. - À titre expérimental et pour une durée maximale de trois ans à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, il peut être dérogé dans deux régions aux dispositions de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 311-1-1 du code du travail prévoyant que le conseil régional de l'emploi est présidé par le préfet de région. Cette expérimentation, dont les modalités de mise en oeuvre et d'évaluation sont définies par décret en Conseil d'État, a pour objet de mieux articuler les politiques de l'emploi et de la formation professionnelle à l'échelon régional en établissant une coprésidence par le président du conseil régional et le préfet de région. »
Article 2
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - La section 4 du chapitre Ier du titre Ier du livre III du code du travail est ainsi rédigée :
« Section 4
« Placement et accompagnement des demandeurs d'emploi
« Art. L. 311-7. - Une institution nationale publique dotée de la personnalité morale et de l'autonomie financière a pour mission de :
« 1° Prospecter le marché du travail, développer une expertise sur l'évolution des emplois et des qualifications, procéder à la collecte des offres d'emploi, aider et conseiller les entreprises dans leur recrutement, assurer la mise en relation entre les offres et les demandes d'emploi, participer activement à la lutte contre les discriminations à l'embauche et pour l'égalité professionnelle ;
« 2° Accueillir, informer, orienter et accompagner les personnes, qu'elles disposent ou non d'un emploi, à la recherche d'un emploi, d'une formation ou d'un conseil professionnel, prescrire toutes actions utiles pour développer leurs compétences professionnelles et améliorer leur employabilité, favoriser leur reclassement et leur promotion professionnelle, faciliter leur mobilité géographique et professionnelle, et participer aux parcours d'insertion sociale et professionnelle ;
« 3° Procéder aux inscriptions sur la liste des demandeurs d'emploi, tenir celle-ci à jour dans les conditions prévues aux articles L. 311-5 et L. 311-5-1 et assurer à ce titre le contrôle de la recherche d'emploi dans les conditions prévues à l'article L. 351-18 ;
« 4° Assurer, pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage, le service de l'allocation d'assurance et, pour le compte de l'État ou du Fonds de solidarité créé par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982 relative à la contribution exceptionnelle de solidarité en faveur des travailleurs privés d'emploi, le service des allocations de solidarité mentionnées aux articles L. 351-9, L. 351-10, L. 351-10-1, L. 351-10-2 et L. 351-13-1, de la prime de retour à l'emploi mentionnée à l'article L. 322-12 pour les bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique, de la prime forfaitaire mentionnée à l'article L. 351-20, ainsi que de toute autre allocation ou aide dont l'État lui confierait le versement par convention ;
« 5° Recueillir, traiter, diffuser et mettre à la disposition des services de l'État et de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage les données relatives au marché du travail et à l'indemnisation des demandeurs d'emploi ;
« 6° Mettre en oeuvre toutes autres actions qui lui sont confiées par l'État, les collectivités territoriales et l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage en relation avec sa mission.
« L'institution nationale agit en collaboration avec les instances territoriales intervenant dans le domaine de l'emploi, en particulier les maisons de l'emploi, ainsi qu'avec les associations nationales et les réseaux spécialisés d'accueil et d'accompagnement, par des partenariats adaptés.
« Art. L. 311-7-1. - L'institution mentionnée à l'article L. 311-7 est administrée par un conseil d'administration et dirigée par un directeur général.
« Art. L. 311-7-2. - Le conseil d'administration comprend :
« 1° Cinq représentants de l'État ;
« 2° Cinq représentants des employeurs et cinq représentants des salariés ;
« 3° Deux personnalités qualifiées choisies en raison de leurs compétences dans les domaines d'activité de l'institution ;
« 4° Un représentant des collectivités territoriales, désigné sur proposition conjointe des associations des collectivités concernées.
« Les représentants des employeurs et les représentants des salariés sont désignés par les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel mentionnées à l'article L. 352-2.
« Les personnalités qualifiées sont désignées par le ministre chargé de l'emploi.
« Le président est élu par le conseil d'administration en son sein.
« Art. L. 311-7-3. - Le conseil d'administration règle par ses délibérations les affaires relatives à l'objet de l'institution.
« Les décisions relatives au budget et aux emprunts, ainsi qu'aux encours maximaux des crédits de trésorerie, sont prises à la majorité des deux tiers des membres présents.
« Le conseil d'administration désigne en son sein un comité d'audit et un comité d'évaluation.
« Art. L. 311-7-4. - Le directeur général exerce la direction de l'institution dans le cadre des orientations définies par le conseil d'administration ; il prépare les délibérations de ce conseil et en assure l'exécution.
« Le directeur général est nommé par décret, après avis du conseil d'administration. Le conseil d'administration peut adopter, à la majorité des deux tiers de ses membres, une délibération demandant sa révocation.
« Art. L. 311-7-5. - Le budget de l'institution comporte quatre sections non fongibles qui doivent chacune être présentées à l'équilibre :
« 1° La section «Assurance chômage» retrace en dépenses les allocations d'assurance prévues aux articles L. 351-3 et suivants, qui sont versées pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage, ainsi que les cotisations sociales afférentes à ces allocations dans les conditions prévues par les lois et règlements en vigueur, et en recettes une contribution de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage, dans les conditions déterminées par la convention d'assurance chômage prévue à l'article L. 351-8, permettant d'assurer l'équilibre ;
« 2° La section «Solidarité» retrace en dépenses les allocations et aides versées pour le compte de l'État ou du Fonds de solidarité créé par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982 précitée, ainsi que les cotisations sociales afférentes à ces allocations dans les conditions prévues par les lois et règlements en vigueur, et en recettes une contribution de l'État et du Fonds de solidarité susmentionné permettant d'assurer l'équilibre ;
« 3° La section «Intervention» comporte en dépenses les dépenses d'intervention concourant au placement, à l'orientation, à l'insertion professionnelle, à la formation et à l'accompagnement des demandeurs d'emploi ;
« 4° La section «Fonctionnement et investissement» comporte en dépenses les charges de personnel et de fonctionnement, les charges financières et les charges exceptionnelles et les dépenses d'investissement.
« Le financement de ces deux dernières sections est assuré par une contribution de l'État et une contribution de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage dans les conditions prévues à l'article L. 354-1, ainsi que, le cas échéant, les subventions des collectivités territoriales et autres organismes publics et les produits reçus au titre des prestations pour services rendus, toutes autres recettes autorisées par les lois et règlements en vigueur, les produits financiers et les produits exceptionnels.
« L'institution peut en outre créer toute autre section pour compte de tiers.
« La contribution de l'État et la contribution de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage sont fixées à un niveau compatible avec la poursuite des activités de l'institution, compte tenu de l'évolution du marché du travail.
« L'institution est autorisée à placer ses fonds disponibles dans des conditions fixées par les ministres chargés de l'emploi et du budget.
« Art. L. 311-7-6. - L'institution est soumise en matière de gestion financière et comptable aux règles applicables aux entreprises industrielles et commerciales.
« Elle est soumise à l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics.
« Art. L. 311-7-7. - Les agents de l'institution nationale, qui sont chargés d'une mission de service public, sont régis par le présent code dans les conditions particulières prévues par une convention collective étendue agréée par les ministres chargés de l'emploi et du budget. Cette convention comporte des stipulations, notamment en matière de stabilité de l'emploi et de protection à l'égard des influences extérieures, nécessaires à l'accomplissement de cette mission.
« Les règles relatives aux relations collectives de travail prévues au titre III du livre Ier, aux titres I à III, V, VI et VIII du livre IV et au titre II du livre V du présent code s'appliquent à tous les agents de l'institution, sous réserve des garanties justifiées par la situation particulière de ceux qui restent contractuels de droit public. Ces garanties sont définies par décret en Conseil d'État.
« Art. L. 311-7-8. - L'institution est organisée en une direction générale et des directions régionales.
« Au sein de chaque direction régionale, une instance paritaire, composée de représentants des employeurs et des salariés désignés par les organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel, mentionnées à l'article L. 352-2, veille à la bonne application de l'accord d'assurance chômage prévu à l'article L. 351-8 et est consultée sur la programmation des interventions au niveau territorial.
« Art. L. 311-7-9. - Une convention annuelle est conclue au nom de l'État par l'autorité administrative et le représentant régional de l'institution.
« Cette convention, compte tenu des objectifs définis par la convention prévue à l'article L. 311-1-2, détermine la programmation des interventions de l'institution au regard de la situation locale de l'emploi et du marché du travail et précise les conditions dans lesquelles elle participe à la mise en oeuvre des actions prévues à l'article L. 322-1. Elle fixe également les conditions d'évaluation de son action et encadre les conditions dans lesquelles l'institution coopère avec les maisons de l'emploi, les missions locales, l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes et les autres intervenants du service public de l'emploi.
« Art. L. 311-7-10. - Les litiges relatifs aux prestations dont le service est assuré par l'institution, pour le compte de l'organisme chargé de la gestion du régime d'assurance chômage, de l'État ou du Fonds de solidarité créé par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982 précitée sont soumis au régime contentieux qui leur était applicable antérieurement à la création de cette institution.
« Art. L. 311-7-11. - Les biens immobiliers de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 relèvent en totalité de son domaine privé. Sont déclassés les biens immobiliers qui lui sont transférés, lorsqu'ils appartiennent au domaine public. Lorsqu'un ouvrage ou terrain appartenant à l'institution est nécessaire à la bonne exécution de ses missions de service public ou au développement de celles-ci, l'État peut s'opposer à sa cession, à son apport, sous quelque forme que ce soit, à la création d'une sûreté sur cet ouvrage ou terrain, ou subordonner la cession, la réalisation de l'apport ou la création de la sûreté à la condition qu'elle ne soit pas susceptible de porter préjudice à l'accomplissement de ces missions. Est nul de plein droit tout acte de cession, apport ou création de sûreté réalisé sans que l'État ait été mis à même de s'y opposer, en violation de son opposition ou en méconnaissance des conditions fixées à la réalisation de l'opération.
« Art. L. 311-7-12. - Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application de la présente section. »
II. - Dans les articles L. 311-5, L. 311-5-1 et L. 311-6 du même code, les mots : « Agence nationale pour l'emploi » sont remplacés par les mots : « institution mentionnée à l'article L. 311-7 ».
III. - Dans le deuxième alinéa de l'article L. 311-10-1 du même code, les mots : « l'Agence nationale pour l'emploi, les organismes mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 ».
IV. - Dans le premier alinéa de l'article L. 351-17 du même code, après les mots : « de l'article L. 311-5 », sont insérés les mots : « par l'autorité de l'État ».
V. - L'article L. 351-18 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 351-18. - Le contrôle de la recherche d'emploi est exercé par les agents de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7.
« Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article, notamment les conditions dans lesquelles les agents chargés du contrôle ont accès, pour l'exercice de leur mission, aux renseignements détenus par les administrations sociales et fiscales. »
Article 2 bis
(Texte de l'Assemblée nationale)
L'article L. 311-10 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 311-10. - Les maisons de l'emploi, dont le ressort, adapté à la configuration des bassins d'emploi, ne peut excéder la région ou, en Corse, la collectivité territoriale, concourent à la coordination des politiques publiques et du partenariat local des acteurs publics et privés qui agissent en faveur de l'emploi, de la formation, de l'insertion et du développement économique.
« À partir d'un diagnostic partagé, elles exercent notamment une mission d'observation de la situation de l'emploi et d'anticipation des mutations économiques.
« Elles contribuent à la coordination des actions du service public de l'emploi, et participent en complémentarité avec l'institution mentionnée à l'article L. 311-7, les réseaux spécialisés et les acteurs locaux dans le respect des compétences des régions et des départements :
« - à l'accueil, l'information, l'orientation et l'accompagnement des personnes à la recherche d'une formation ou d'un emploi ;
« - au maintien et au développement de l'activité et de l'emploi ainsi qu'à l'aide à la création et à la reprise d'entreprise.
« En lien avec les entreprises, les partenaires sociaux, les chambres consulaires et les branches professionnelles, elles contribuent au développement de la gestion territorialisée des ressources humaines. Elles mènent également des actions d'information et de sensibilisation aux phénomènes des discriminations à l'embauche et dans l'emploi ainsi que relatives à l'égalité professionnelle et à la réduction des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes.
« Les maisons de l'emploi qui respectent les missions qui leur sont attribuées bénéficient d'une aide de l'État selon un cahier des charges dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. »
Article 3
(Texte de l'Assemblée nationale)
I. - La section 5 du chapitre Ier du titre V du livre III du code du travail est ainsi modifiée :
1° Les cinq premiers alinéas de l'article L. 351-21 sont remplacés par treize alinéas ainsi rédigés :
« Les parties signataires de l'accord prévu à l'article L. 351-8 confient la gestion du régime d'assurance chômage à un organisme de droit privé de leur choix.
« Le service de l'allocation d'assurance est assuré, pour le compte de cet organisme, par l'institution mentionnée à l'article L. 311-7.
« Le recouvrement des contributions mentionnées aux articles L. 321-4-2 et L. 351-3-1 est assuré, pour le compte de cet organisme, par les unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales et les caisses générales de sécurité sociale mentionnées aux articles L. 213-1 et L. 752-1 du code de la sécurité sociale.
« Par dérogation, le recouvrement de ces contributions est assuré pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage :
« a) Par un organisme de recouvrement mentionné à l'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale désigné par le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, lorsqu'elles sont dues au titre des salariés expatriés, des travailleurs frontaliers résidant en France et ne remplissant pas les conditions pour bénéficier des dispositions du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, notamment en matière d'assurance chômage, et des marins embarqués sur des navires battant pavillon d'un État étranger autre qu'un État membre de l'Union européenne, de l'Espace économique européen ou de la Confédération helvétique, ressortissants de ces États, inscrits à un quartier maritime français et admis au bénéfice de l'Établissement national des invalides de la marine ;
« b) Par les organismes mentionnés à l'article L. 723-1 du code rural, lorsqu'elles sont dues au titre de l'emploi de salariés mentionnés à l'article L. 722-20 du même code ;
« c) Par la Caisse nationale de compensation des cotisations de sécurité sociale des voyageurs, représentants et placiers de commerce à cartes multiples travaillant pour deux employeurs au moins, lorsque les contributions sont dues pour ces salariés ;
« d) Par la caisse de prévoyance sociale prévue par l'ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales, lorsqu'elles sont dues au titre de l'emploi de salariés à Saint-Pierre-et-Miquelon ;
« e) Par l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du présent code, lorsqu'elles sont dues au titre des salariés engagés à titre temporaire qui relèvent des professions de la production cinématographique, de l'audiovisuel ou du spectacle, lorsque l'activité exercée bénéficie de l'aménagement des conditions d'indemnisation mentionnées à l'article L. 351-14.
« Les agents des services des impôts, ainsi que ceux des organismes de sécurité sociale, peuvent communiquer à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 les renseignements nécessaires au calcul des prestations. Les agents des services des impôts peuvent également communiquer aux organismes de sécurité sociale les renseignements nécessaires à l'assiette des contributions.
« Les informations détenues par les organismes de sécurité sociale peuvent être rapprochées de celles détenues par l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 pour garantir le respect des règles d'inscription et vérifier les droits des salariés au revenu de remplacement prévu à l'article L. 351-2.
« Pour procéder à la vérification des droits des salariés au revenu de remplacement prévu à l'article L. 351-2, les informations détenues par la caisse de congés payés des professions de la production cinématographique et audiovisuelle et des spectacles ainsi que par les institutions des régimes complémentaires de retraite de ces professions peuvent être rapprochées de celles détenues par l'institution mentionnée à l'article L. 311-7.
« La caisse de congés payés des professions de la production cinématographique et audiovisuelle et des spectacles, les institutions des régimes complémentaires de retraite de ces professions et les organismes de sécurité sociale se communiquent les informations nécessaires à la vérification des droits des salariés, des demandeurs d'emploi et des obligations des employeurs. » ;
2° Dans le premier alinéa de l'article L. 351-22, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « premier ».
II. - L'article L. 354-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 354-1. - Les contributions des employeurs et des salariés mentionnées aux articles L. 351-3-1 et L. 351-14 financent, pour la part définie par l'accord mentionné à l'article L. 351-8 qui ne peut être inférieure à 10 % des sommes collectées, une contribution globale versée à la section «Fonctionnement et investissement» et à la section «Intervention» du budget de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7, dont la répartition est décidée annuellement par le conseil d'administration de cette institution. »
Article 4
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - Le code du travail est ainsi modifié :
1° L'article L. 143-11-4 est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa est complété par les mots : « et avec l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations mentionnées à l'article L. 143-11-6 » ;
b) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« En cas de dissolution de cette association, le ministre chargé du travail confie à l'organisme prévu à l'article L. 351-21 la gestion du régime d'assurance institué à l'article L. 143-11-1, à l'exception du recouvrement des cotisations mentionnées à l'article L. 143-11-6 confié aux organismes mentionnés à l'article L. 351-5-1. » ;
2° Le second alinéa de l'article L. 143-11-6 est ainsi rédigé :
« Le recouvrement, le contrôle de ces cotisations et leur contentieux suivent les règles prévues à l'article L. 351-5-1. » ;
3° L'article L. 351-6 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « dans les quinze jours » sont supprimés ;
b) Les deuxième, troisième, quatrième et cinquième alinéas sont supprimés ;
4° Après l'article L. 351-5, il est inséré un article L. 351-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 351-5-1. - Les contributions prévues aux articles L. 321-4-2, L. 351-3-1 et L. 351-14 sont recouvrées et contrôlées par les organismes chargés du recouvrement mentionnés à l'article L. 351-21 pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionné à ce même article, selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations du régime général de la sécurité sociale assises sur les rémunérations. Les différends relatifs au recouvrement de ces contributions relèvent du contentieux général de la sécurité sociale.
« Par dérogation à l'alinéa précédent :
« 1° Les contributions dues au titre de l'emploi des salariés mentionnés à l'article L. 722-20 du code rural sont recouvrées et contrôlées selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations dues au titre des assurances sociales agricoles obligatoires, dans des conditions définies par convention entre l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage et la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole ;
« 2° Les différends relatifs au recouvrement des contributions dues au titre de l'emploi de salariés à Saint-Pierre-et-Miquelon relèvent de la compétence des juridictions mentionnées à l'article 8 de l'ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales.
« Une convention conclue entre l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale et l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionné à l'article L. 351-21 précise les conditions garantissant à ce dernier la pleine autonomie de gestion, notamment de sa trésorerie grâce à une remontée quotidienne des fonds, ainsi que l'accès aux données nécessaires à l'exercice de ses activités. Elle fixe également les conditions dans lesquelles est assuré le suivi de la politique du recouvrement et définit les objectifs de la politique de contrôle et de lutte contre la fraude. Elle prévoit enfin les modalités de rémunération du service rendu par les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général. » ;
5° L'article L. 351-6-1 est abrogé ;
6° Dans le premier alinéa de l'article L. 351-8, après les mots : « de la présente section », sont insérés les mots : «, à l'exception des articles L. 351-5 à L. 351-6, » ;
7° Dans le dernier alinéa de l'article L. 351-12 et le dernier alinéa du 4° du IV de l'article L. 620-9, les mots : « relèvent de la compétence des tribunaux judiciaires » sont remplacés par les mots : « suivent les règles de compétence prévues à l'article L. 351-5-1 ».
II. - Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L'article L. 114-12 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les organismes chargés de la gestion d'un régime obligatoire de sécurité sociale, les caisses assurant le service des congés payés et l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail se communiquent les renseignements qui : » ;
b) Dans le 2°, le mot : « ressortissants » est remplacé par le mot : « personnes » ;
2° Dans le second alinéa de l'article L. 142-1, le mot : « donne » est remplacé par le mot : « donnent », et sont ajoutés les mots : «, ainsi que le recouvrement mentionné au 5° de l'article L. 213-1 » ;
3° Le premier alinéa de l'article L. 142-2 est complété par les mots : « ainsi que de ceux relatifs au recouvrement des contributions et cotisations mentionnées aux articles L. 143-11-6, L. 321-4-2, L. 351-3-1 et L. 351-14 du code du travail » ;
4° L'article L. 213-1 est ainsi modifié :
a) Le 5° est ainsi rédigé :
« 5° Le recouvrement des contributions et cotisations mentionnées aux articles L. 321-4-2, L. 351-3-1 et L. 143-11-6 du code du travail ; » ;
b) Après le 5°, il est inséré un 6° ainsi rédigé :
« 6° Le contrôle et le contentieux du recouvrement prévu aux 1°, 2°, 3° et 5°. » ;
5° L'article L. 243-7 est ainsi modifié :
a) La première phrase du deuxième alinéa est ainsi rédigée :
« Les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général sont également habilités dans le cadre de leurs contrôles à vérifier l'assiette, le taux et le calcul des cotisations destinées au financement des régimes de retraites complémentaires obligatoires mentionnés au chapitre Ier du titre II du livre IX pour le compte des institutions gestionnaires de ces régimes. » ;
b) Dans le troisième alinéa, les mots : «, d'une part, » et les mots : « et, d'autre part, l'organisme national qui fédère les institutions gestionnaires mentionnées à l'article L. 351-21 du code du travail » sont supprimés.
III. - Les I et II entrent en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2012.
À compter de la création de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail, dans les conditions prévues à l'article 8 de la présente loi, et jusqu'à la date mentionnée au premier alinéa du présent III, le recouvrement des contributions mentionnées aux articles L. 321-4-2, L. 351-3-1 et L. 351-14 du code du travail est assuré pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage par l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 dudit code dans les formes et conditions et sous le régime contentieux en vigueur avant la publication de la présente loi. Celle-ci assure également le recouvrement des cotisations prévues à l'article L. 143-11-6 du même code pour le compte du régime d'assurance prévu à l'article L. 143-11-1 dudit code, en application d'une convention passée avec l'association mentionnée à l'article L. 143-11-4 du même code et dans les formes et conditions et sous le régime contentieux en vigueur avant la publication de la présente loi.
Pendant la période mentionnée au deuxième alinéa du présent III, les contributions et cotisations mentionnées aux articles L. 321-4-2, L. 351-3-1, L. 351-14 et L. 143-11-6 du même code exigibles avant la création de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du même code sont recouvrées par l'institution mentionnée au même article L. 311-7.
Les contributions et cotisations mentionnées aux articles L. 321-4-2, L. 351-3-1, L. 351-14 et L. 143-11-6 du même code exigibles avant la date mentionnée au premier alinéa du présent III continuent à être recouvrées, à compter de cette date, par l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du même code, dans les formes et conditions applicables selon les dispositions en vigueur avant cette date.
Pendant la période mentionnée au deuxième alinéa du présent III :
1° Les agents des services des impôts ainsi que ceux des organismes de sécurité sociale peuvent communiquer à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du même code les renseignements nécessaires à l'assiette des cotisations et contributions ;
2° Les informations détenues par les organismes de sécurité sociale peuvent être rapprochées de celles détenues par l'institution mentionnée au même article L. 311-7 pour la vérification du versement des contributions et cotisations ;
3° Pour procéder à la vérification du versement des contributions et cotisations leur incombant, la caisse de congés des professions de la production cinématographique et audiovisuelle et des spectacles, les institutions des régimes complémentaires de retraite de ces professions et l'institution mentionnée au même article L. 311-7 peuvent rapprocher leurs informations.
Article 5
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - Une instance nationale provisoire est chargée de préparer la mise en place de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail. À cette fin, elle élabore notamment le projet d'organisation des services de cette institution et engage la procédure aboutissant au choix du nom de l'institution. Elle veille à la mise en oeuvre des procédures obligatoires d'information et de consultation des instances représentatives du personnel concernées, notamment en application du livre IV du même code.
Cette instance nationale est composée d'un conseil et d'un délégué général.
II. - Le conseil de l'instance nationale comprend :
1° Cinq représentants de l'État ;
2° Cinq membres représentant les employeurs et cinq membres représentant les salariés ;
3° Deux personnalités qualifiées choisies en raison de leurs compétences dans les domaines d'activité de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du même code ;
4° Un représentant des collectivités territoriales, désigné sur proposition conjointe des associations des collectivités concernées.
Les représentants des employeurs et les représentants des salariés sont désignés par les organisations syndicales de salariés et d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel mentionnées à l'article L. 352-2 du même code.
Les personnalités qualifiées sont désignées par le ministre chargé de l'emploi.
Les membres du conseil sont nommés par arrêté du ministre chargé de l'emploi. Leur mandat prend fin à la date de la première réunion du conseil d'administration de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du même code.
Le président est élu par le conseil en son sein.
III. - Le délégué général est nommé par décret, après avis du conseil. Pour accomplir les missions que lui confie le conseil, dans la limite des missions dévolues à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du même code, il dispose des services de l'Agence nationale pour l'emploi et des services de l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce et des Associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce. Il reçoit mandat du conseil pour négocier et, le cas échéant, conclure la convention prévue au deuxième alinéa de l'article 7 de la présente loi et la convention collective prévue à l'article L. 311-7-7 du même code ainsi qu'un accord préalable à la négociation de cette convention collective qui en fixe le cadre, et tous autres accords ou conventions nécessaires à la mise en place de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du même code, notamment concernant les conditions de reclassement des salariés de l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce et des Associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce chargés du recouvrement des contributions d'assurance chômage. L'accord préalable fixe notamment la date à laquelle, à défaut de conclusion de la convention collective mentionnée à l'article L. 311-7-7 du même code, la convention collective applicable aux salariés des organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage cesse de produire effet.
IV. - À compter de sa création, l'institution prévue à l'article L. 311-7 du même code reprend les engagements souscrits au nom de l'instance nationale prévue au I, qui sont alors réputés avoir été dès l'origine contractés par celle-là.
V. - Le budget du premier exercice, qui commence à la date de la création de l'institution, est préparé par le délégué général et adopté par le conseil de l'instance nationale provisoire à la majorité des deux tiers des membres présents.
Si le niveau de la contribution visée à l'article L. 354-1 du code du travail n'a pu être défini à cette date par l'accord visé à l'article L. 351-8 du même code, le montant de celle-ci s'élève à 10 % des sommes collectées au titre du dernier exercice des institutions gestionnaires mentionnées à l'article L. 351-21 du même code, rapporté, à due proportion, à la durée du premier exercice de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du même code.
En l'absence d'adoption à la date de la création de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du même code, le budget est arrêté conjointement par le ministre chargé de l'emploi et le ministre chargé du budget.
VI. - Toute convention ou tout acte de l'instance nationale provisoire qui engage la nouvelle institution est soumis au visa du contrôle économique et financier de l'État.
Article 6
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - À la date de création de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail, les agents de l'Agence nationale pour l'emploi sont transférés à celle-ci. Ils restent régis par le décret n° 2003-1370 du 31 décembre 2003 fixant les dispositions applicables aux agents contractuels de droit public de l'Agence nationale pour l'emploi et par les dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'État prévues par le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986.
Ils peuvent opter pour la convention collective prévue à l'article L. 311-7-7 du même code dans un délai d'un an suivant son agrément.
II. - À la date de création de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du même code, les salariés des organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage qui participent à l'accomplissement des missions de l'institution mentionnée audit article L. 311-7 et de la mission de recouvrement des contributions et cotisations mentionnées aux articles L. 143-11-6, L. 321-4-2, L. 351-3-1 et L. 351-14 du même code sont transférés à celle-ci. Ce transfert s'effectue conformément aux articles L. 122-12 et L. 122-12-1 dudit code. Par dérogation au dernier alinéa de l'article L. 132-8 du même code, ils restent régis par la convention collective qui leur est applicable au jour du transfert, jusqu'à l'entrée en vigueur de la convention collective mentionnée à l'article L. 311-7-7 du même code ou, à défaut, jusqu'à la date prévue par l'accord préalable visé à l'article 5 de la présente loi. La convention collective mentionnée à l'article L. 311-7-7 du même code garantit les avantages individuels afférents à leur statut acquis par ces salariés.
III. - Jusqu'à la date d'entrée en vigueur de la convention collective mentionnée au même article L. 311-7-7, les personnes recrutées par l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du même code bénéficient de la convention collective applicable aux salariés des organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage.
IV. - Pour leur régime de retraite complémentaire, les agents visés au I qui n'ont pas opté pour la convention collective prévue à l'article L. 311-7-7 du code du travail demeurent affiliés à l'institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques.
Article 7
(Texte de l'Assemblée nationale)
L'ensemble des biens, droits et obligations, créances et dettes de l'Agence nationale pour l'emploi ainsi que les biens mobiliers de ses services sont transférés de plein droit et en pleine propriété à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail. Ce transfert s'effectue à titre gratuit à la date définie à l'article 8 de la présente loi.
Une convention conclue avant le 31 décembre 2008 entre les deux organismes définit les conditions dans lesquelles l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage prévu à l'article L. 351-21 du même code met à disposition de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 dudit code les biens de toute nature, notamment les immeubles et les applications informatiques, nécessaires à l'exercice des missions transférées à celle-ci. Cette convention prévoit, le cas échéant, les conditions de transfert des droits et obligations, créances et dettes relatifs aux activités transférées, ainsi que la création d'un fonds permettant de financer les actions de réorganisation des implantations territoriales. Cette convention peut être passée par l'instance nationale provisoire définie à l'article 5 de la présente loi pour le compte de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du même code.
Les transferts de biens meubles ou immeubles prévus au présent article ne donnent lieu ni à un versement de salaires ou honoraires au profit de l'État, ni à perception de droits ou de taxes.
Article 8
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
L'institution prévue à l'article L. 311-7 du code du travail est réputée créée à la date de la première réunion de son conseil d'administration.
Article 8 bis A
(Texte de l'Assemblée nationale)
I. - Dans le 1° du I de l'article 32 de la loi n° 2006-339 du 23 mars 2006 relative au retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre ».
II. - Dans le premier alinéa de l'article 1er de l'ordonnance n° 2006-433 du 13 avril 2006 relative à l'expérimentation du contrat de transition professionnelle, le mot : « mars » est remplacé par le mot : « décembre ».
III. - Dans le dernier alinéa de l'article 2 de la même ordonnance, la date : « 23 mars » est remplacée par la date : « 10 décembre ».
Article 8 bis B
(Texte de l'Assemblée nationale)
L'ordonnance n° 2006-433 du 13 avril 2006 précitée est ainsi modifiée :
1° Après le mot : « recouvrées », la fin du quatrième alinéa de l'article 9 est ainsi rédigée : « et contrôlées par l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail pour le compte de la filiale de l'organisme mentionné à l'article 2 de la présente ordonnance selon les règles applicables aux contributions mentionnées à l'article L. 351-3-1 du même code. » et, à compter de la date prévue au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi, elle est ainsi rédigée : « et contrôlées par les organismes chargés du recouvrement mentionnés à l'article L. 351-21 du code du travail pour le compte de la filiale de l'organisme mentionné à l'article 2 de la présente ordonnance selon les règles applicables aux contributions mentionnées à l'article L. 351-3-1 du même code. Les différends relatifs au recouvrement de ces contributions suivent les règles de compétence prévues à l'article L. 351-5-1 du même code. » ;
2° Le sixième alinéa de l'article 9 est ainsi rédigé :
« L'organisme mentionné à l'article L. 351-21 du code du travail participe au financement du contrat de transition professionnelle dans les conditions fixées par une convention qu'il conclut avec l'État. » ;
3° Après le mot : « recouvrée », la fin de la dernière phrase du premier alinéa de l'article 11 est ainsi rédigée : « et contrôlée par l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail pour le compte de la filiale de l'organisme mentionné à l'article 2 de la présente ordonnance selon les règles applicables aux contributions mentionnées à l'article L. 351-3-1 du même code. » et, à compter de la date prévue au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi, elle est ainsi rédigée : « et contrôlée par les organismes chargés du recouvrement mentionnés à l'article L. 351-21 du code du travail, pour le compte de la filiale de l'organisme mentionné à l'article 2 de la présente ordonnance selon les règles applicables aux contributions mentionnées à l'article L. 351-3-1 du même code. Les différends relatifs au recouvrement de ces contributions suivent les règles de compétence prévues à l'article L. 351-5-1 du même code. » ;
4° Dans la dernière phrase de l'article 13, les mots : « des organismes mentionnés » sont remplacés par les mots : « de l'organisme mentionné ».
....................................................................................................
Article 8 ter
Suppression maintenue par la commission mixte paritaire
Article 8 quater
(Texte de l'Assemblée nationale)
I. - L'article L. 365-1 du code du travail est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le fait de faire obtenir frauduleusement ou de tenter de faire obtenir frauduleusement les allocations et primes susmentionnées est passible des mêmes peines. »
II. - Le code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail (partie législative), est ainsi modifié :
1° L'article L. 5124-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le fait de faire obtenir frauduleusement ou de tenter de faire obtenir frauduleusement ces allocations est puni de la même peine. » ;
2° L'article L. 5135-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le fait de faire obtenir frauduleusement ou de tenter de faire obtenir frauduleusement cette prime est puni de la même peine. » ;
3° L'article L. 5429-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le fait de faire obtenir frauduleusement ou de tenter de faire obtenir frauduleusement les allocations et la prime susmentionnées est puni de la même peine. »
Article 9
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - Dans tous les textes législatifs en vigueur, les mots : « Agence nationale pour l'emploi » sont remplacés par les mots : « institution mentionnée à l'article L. 311-7 du code du travail ».
II. - Dans tous les textes législatifs en vigueur, les mots : « institutions gestionnaires du régime d'assurance chômage » et « organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage », sous réserve des dispositions suivantes :
1° L'article L. 124-11 du code du travail est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « aux organismes mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
b) Dans le deuxième alinéa, les mots : « les organismes mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
2° Dans le deuxième alinéa de l'article L. 143-11-4 du même code, les mots : « les institutions gestionnaires » sont remplacés par les mots : « l'organisme gestionnaire » ;
3° Supprimé......................................................................
4° L'article L. 143-11-7 du même code est ainsi modifié :
a) Dans le septième alinéa, les mots : « aux institutions mentionnées » sont remplacés par les mots : « à l'organisme mentionné », les mots : « ces institutions » sont remplacés par les mots : « cet organisme », et les mots : « Elles peuvent » sont remplacés par les mots : « Il peut » ;
b) Dans le huitième alinéa, les mots : « Les institutions susmentionnées versent » sont remplacés par les mots : « L'organisme susmentionné verse » ;
c) Dans le onzième alinéa, les mots : « aux organismes gestionnaires mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 », jusqu'à la date mentionnée au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi. À compter de cette date, ils sont remplacés par les mots : « aux organismes chargés du recouvrement mentionnés à l'article L. 351-21 » ;
d) Dans le treizième alinéa, les mots : « Les institutions mentionnées ci-dessus doivent » sont remplacés par les mots : « L'organisme susmentionné doit » ;
e) Dans la première phrase du dernier alinéa, les mots : « Elles doivent » sont remplacés par les mots : « Il doit » et, dans la dernière phrase du même alinéa, les mots : « aux institutions mentionnées » sont remplacés par les mots : « à l'organisme mentionné » ;
5° Dans l'article L. 143-11-8 du même code, les mots : « des institutions mentionnées » sont remplacés par les mots : « de l'organisme mentionné » ;
6° L'article L. 143-11-9 du même code est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« L'organisme mentionné à l'article L. 143-11-4 est subrogé dans les droits des salariés pour lesquels il a effectué des avances : » ;
b) Dans la deuxième phrase du b, le mot : « leur » est remplacé par le mot : « lui » et, dans la dernière phrase du même b, les mots : « Elles bénéficient » sont remplacés par les mots : « Il bénéficie » ;
7° Supprimé......................................................................
8° L'article L. 321-4-2 du même code est ainsi modifié :
a) Dans la deuxième phrase du cinquième alinéa du I, les mots : « les organismes mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 351-21 » et, dans la dernière phrase du même alinéa, les mots : « versement à ces organismes » sont remplacés par les mots : « versement à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » et, à compter de la date mentionnée au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi, par les mots : « versement aux organismes chargés du recouvrement mentionnés à l'article L. 351-21 » ;
a bis) Dans le sixième alinéa du I, les mots : « les mêmes organismes » sont remplacés par les mots : « l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage » ;
b) Dans le dernier alinéa du I, les mots : « les organismes mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « l'organisme mentionné à l'article L. 351-21 » ;
c) Dans le II, les mots : « aux organismes mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » et, à compter de la date mentionnée au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi, par les mots : « aux organismes chargés du recouvrement mentionnés à l'article L. 351-21 » ;
9° Dans le premier alinéa de l'article L. 321-13 du même code, les mots : « aux organismes visés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
10° Dans l'article L. 322-4-6-3 du même code, les mots : « aux institutions mentionnées à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
11° Dans le deuxième alinéa du II de l'article L. 322-4-12 et le dernier alinéa du I de l'article L. 322-4-15-6 du même code, les mots : « à l'un des organismes visés au premier alinéa de l'article L. 351-21 du présent code » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du présent code » ;
12° Dans le cinquième alinéa de l'article L. 322-12 du même code, les mots : « aux institutions gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
13° Dans la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 325-3 du même code, les mots : « et les institutions gestionnaires de l'assurance chômage » sont supprimés ;
14° L'article L. 351-6-2 du même code est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « des organismes mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « de l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
b) Dans le deuxième alinéa, les mots : « les organismes mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
15° Dans l'article L. 351-9-4 du même code, les mots : « les institutions mentionnées à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
16° L'article L. 351-10-1 du même code est ainsi modifié :
a) Dans la dernière phrase du cinquième alinéa, les mots : « les organismes gestionnaires des allocations de solidarité mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
b) Dans le dernier alinéa, les mots : « les organismes gestionnaires visés à l'article L. 351-21 du présent code reçoivent » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 du présent code reçoit » ;
17° Dans le septième alinéa de l'article L. 351-12 du même code, les mots : « les institutions gestionnaires du régime d'assurance » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 351-21 » ;
18° Dans le deuxième alinéa de l'article L. 351-13-1 du même code, les mots : « les organismes mentionnés à l'article L. 351-21 du présent code et dans les conditions prévues par une convention conclue entre ces derniers et l'État » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 et dans les conditions prévues par une convention conclue entre cette dernière et l'État » ;
19° Dans l'article L. 352-5 du même code, les mots : « les organismes visés à l'article L. 351-2 » sont remplacés par les mots : « l'organisme gestionnaire mentionné à l'article L. 351-21 » ;
20° Dans le deuxième alinéa de l'article L. 365-3 du même code, les mots : « aux organismes visés au premier alinéa de l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
21° Le deuxième alinéa de l'article L. 961-1 du même code est ainsi rédigé :
« L'institution mentionnée à l'article L. 311-7 y concourt également, le cas échéant pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 351-21, notamment dans les conditions prévues à l'article L. 321-4-2. » ;
22° Dans le cinquième alinéa de l'article L. 961-2 du même code, les mots : « aux institutions mentionnées à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
23° Dans le second alinéa de l'article L. 983-2 du même code, les mots : « les organismes gestionnaires mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 351-21 » ;
24° Dans le quatrième alinéa du I et le premier alinéa du V de l'article L. 214-13 du code de l'éducation, les mots : « les organismes mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés, deux fois, par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
24° bis Dans le dernier alinéa du III de l'article L. 313-1 du code rural, les mots : « aux institutions mentionnées » sont remplacés par les mots : « à l'organisme mentionné » ;
24° ter Dans le premier alinéa de l'article L. 114-12-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « qu'aux organismes mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « qu'à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
25° Dans le 3° de l'article 2 de l'ordonnance n° 2005-893 du 2 août 2005 relative au contrat nouvelles embauches, les mots : « par les organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « par l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 » ;
26° Dans le dernier alinéa du I de l'article 3 de l'ordonnance n° 2005-893 du 2 août 2005 précitée, les mots : « aux organismes mentionnés à l'article L. 351-21 » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 311-7 ».
III. - 1. Dans le neuvième alinéa de l'article L. 322-10 et dans le deuxième alinéa de l'article L. 352-2 du code du travail, les mots : « Comité supérieur de l'emploi mentionné à l'article L. 322-2 » et les mots : « comité supérieur de l'emploi prévu à l'article L. 322-2 » sont remplacés par les mots : « Conseil national de l'emploi mentionné à l'article L. 311-1-1 ».
2. Dans l'article L. 101-2 et, par deux fois, dans l'article L. 322-4 du même code, les mots : « Comité supérieur de l'emploi » et « comité supérieur de l'emploi » sont remplacés par les mots : « Conseil national de l'emploi ».
3. Dans la première phrase du quatrième alinéa de l'article L. 322-7 du même code, les mots : « Comité supérieur » sont remplacés par les mots : « Conseil national ».
4. L'article L. 352-2-1 du même code est ainsi modifié :
1° Dans les premier et deuxième alinéas, les mots : « Comité supérieur de l'emploi » sont remplacés par les mots : « Conseil national de l'emploi » ;
2° Dans le premier alinéa, les mots : « ce comité » sont remplacés par les mots : « ce conseil » ;
3° Dans le troisième alinéa, le mot : « comité » est remplacé par le mot : « conseil ».
5. Dans la première phrase du quatrième alinéa de l'article 1er de la loi n° 96-126 du 21 février 1996 portant création d'un fonds paritaire d'intervention en faveur de l'emploi, les mots : « comité supérieur de l'emploi prévu à l'article L. 322-2 du code du travail » sont remplacés par les mots : « Conseil national de l'emploi ».
IV. - 1. L'article L. 351-14 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La contribution spécifique est recouvrée et contrôlée selon les règles applicables aux contributions mentionnées à l'article L. 351-3-1. »
2. À compter de la date mentionnée au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi, le dernier alinéa de l'article L. 351-14 précité tel qu'il résulte du 1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les différends relatifs au recouvrement de cette contribution suivent les règles de compétence prévues à l'article L. 351-5-1. »
.................................................................................................
Article 11
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
I. - Le code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 relative au code du travail (partie législative), à compter de l'entrée en vigueur de cette ordonnance, est ainsi modifié :
1° Les mots : « Agence nationale pour l'emploi » sont remplacés par les mots : « institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » ;
2° Les mots : « institutions gestionnaires du régime d'assurance chômage » et « organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage », sous réserve du II.
II. - Le même code du travail est ainsi modifié à compter de l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 précitée :
1° Dans le dernier alinéa de l'article L. 1134-4, les mots : « aux organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1, pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1, » ;
2° Dans le dernier alinéa de l'article L. 1144-3, les mots : « aux organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1, pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1, » ;
3° L'article L. 1233-68 est ainsi modifié :
a) Dans le 5°, les mots : « les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1 » ;
b) Dans le septième alinéa, les mots : « ces organismes » sont remplacés par les mots : « l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage » ;
4° L'article L. 1233-69 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1 », les mots : « à ces derniers » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » et, à compter de la date mentionnée au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi, par les mots : « aux organismes chargés du recouvrement mentionnés à l'article L. 5427-1 » ;
b) Dans le second alinéa, les mots : « les organismes gestionnaires du régime de l'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1 » ;
5° Dans l'article L. 1235-16, les mots : « aux organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » et, à compter de la date mentionnée au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi, par les mots : « aux organismes chargés du recouvrement mentionnés à l'article L. 5427-1 » ;
6° Dans le deuxième alinéa de l'article L. 1236-2, les mots : « les organismes gestionnaires du régime d'assurance-chômage conformément aux articles L. 5422-15 à L. 5422-19 » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 conformément aux articles L. 5422-15 à L. 5422-19 » et, à compter de la date mentionnée au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi, par les mots : « les organismes chargés du recouvrement mentionnés au troisième alinéa de l'article L. 5427-1 selon les règles et sous les garanties, sanctions et régime contentieux applicables au recouvrement des cotisations du régime général de la sécurité sociale assises sur les rémunérations » ;
7° Dans le premier alinéa de l'article L. 1251-46, les mots : « aux organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » et, dans le dernier alinéa du même article, les mots : « Ces organismes communiquent » sont remplacés par les mots : « Cette institution communique » ;
8° Dans le 2° de l'article L. 1274-2, les mots : « aux organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 », jusqu'à la date mentionnée au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi. À compter de cette date, ces mots sont supprimés ;
9° Dans l'article L. 2211-2, les mots : « Comité supérieur de l'emploi » sont remplacés par les mots : « Conseil national de l'emploi » ;
10° L'article L. 3253-14 est ainsi modifié :
a) Dans le deuxième alinéa, les mots : « les organismes gestionnaires » sont remplacés par les mots : « l'organisme gestionnaire » ;
b) Dans le troisième alinéa, les mots : « ces organismes » sont remplacés par les mots : « cet organisme » ;
c) Dans le quatrième alinéa, les mots : «, dans le cas prévu au troisième alinéa, les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « l'organisme précité » ;
11° à 14° Suppressions maintenues par la commission mixte paritaire.
15° Dans le quatrième alinéa de l'article L. 3253-21, les mots : « aux institutions de garantie mentionnées à l'article L. 3253-14 » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 », jusqu'à la date mentionnée au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi. À compter de cette date, ils sont remplacés par les mots : « aux organismes chargés du recouvrement mentionnés à l'article L. 5427-1 » ;
16° La section unique du chapitre II du titre Ier du livre Ier de la cinquième partie est ainsi rédigée :
« Section unique
« Conseil national de l'emploi
« Art. L. 5112-1. - Le Conseil national de l'emploi est présidé par le ministre chargé de l'emploi et comprend des représentants des organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs, des collectivités territoriales, des maisons de l'emploi, des administrations intéressées, des principaux opérateurs du service public de l'emploi, notamment l'institution publique mentionnée à l'article L. 5312-1, l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionné à l'article L. 5427-1 et l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, et des personnalités qualifiées.
« Le Conseil national de l'emploi concourt à la définition des orientations stratégiques des politiques de l'emploi. Il veille à la mise en cohérence des actions des différentes institutions et organismes mentionnés à l'article L. 5311-2 et à l'évaluation des actions engagées.
« À cette fin, il émet un avis :
« 1° Sur les projets de loi, d'ordonnance et de décret relatifs à l'emploi ;
« 2° Sur le projet de convention pluriannuelle d'objectifs et de gestion définie à l'article L. 5312-3 ;
« 3° Sur l'agrément de la convention d'assurance chômage mentionnée à l'article L. 5422-20, dans des conditions fixées par décret ;
« 4° Sur l'adaptation et la cohérence des systèmes d'information du service public de l'emploi.
« Dans chaque région, un conseil régional de l'emploi est présidé par le préfet de région et comprend des représentants des organisations professionnelles d'employeurs et de travailleurs, du conseil régional et des principales collectivités territoriales intéressées, des administrations intéressées, des universités, des représentants d'organisations participant au service public local de l'emploi, notamment des maisons de l'emploi, ainsi que le directeur régional de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1. Il est consulté sur l'organisation territoriale du service public de l'emploi en région et émet un avis sur la convention prévue à l'article L. 5312-11.
« Art. L. 5112-2. - Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application de la présente section. » ;
17° Dans le deuxième alinéa de l'article L. 5133-5, les mots : « aux institutions gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » ;
18° Dans le quatrième alinéa de l'article L. 5134-51 et dans l'article L. 5134-97, les mots : « à l'un des organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » ;
19° L'article L. 5134-61 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est complété par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 ou à toute autre personne morale de droit public » ;
b) Les 1° et 2° sont abrogés ;
20° Dans le deuxième alinéa de l'article L. 5212-7, les mots : « les institutions gestionnaires de l'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » ;
20° bis L'article L. 5311-1 est ainsi rédigé :
« Le service public de l'emploi a pour mission l'accueil, l'orientation, la formation, l'insertion ; il comprend le placement, le versement d'un revenu de remplacement, l'accompagnement des demandeurs d'emploi et l'aide à la sécurisation des parcours professionnels de tous les salariés. » ;
21° L'article L. 5311-2 est ainsi modifié :
a) Le 2° est ainsi rédigé :
« 2° L'institution publique mentionnée à l'article L. 5312-1 ; » ;
b) Dans le dernier alinéa, les mots : « les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage dans le cadre des dispositions légales qui leur sont propres » sont remplacés par les mots : « l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionné à l'article L. 5427-1 dans le cadre des dispositions légales qui lui sont propres » ;
22° L'article L. 5311-5 est abrogé ;
23° Le chapitre II du titre Ier du livre III de la cinquième partie est ainsi rédigé :
« CHAPITRE II
« Placement et accompagnement des demandeurs d'emploi
« Art. L. 5312-1. - Une institution nationale publique dotée de la personnalité morale et de l'autonomie financière a pour mission de :
« 1° Prospecter le marché du travail, développer une expertise sur l'évolution des emplois et des qualifications, procéder à la collecte des offres d'emploi, aider et conseiller les entreprises dans leur recrutement, assurer la mise en relation entre les offres et les demandes d'emploi, participer activement à la lutte contre les discriminations à l'embauche et pour l'égalité professionnelle ;
« 2° Accueillir, informer, orienter et accompagner les personnes, qu'elles disposent ou non d'un emploi, à la recherche d'un emploi, d'une formation ou d'un conseil professionnel, prescrire toutes actions utiles pour développer leurs compétences professionnelles et améliorer leur employabilité, favoriser leur reclassement et leur promotion professionnelle, faciliter leur mobilité géographique et professionnelle, et participer aux parcours d'insertion sociale et professionnelle ;
« 3° Procéder aux inscriptions sur la liste des demandeurs d'emploi, tenir celle-ci à jour dans les conditions prévues au titre Ier du livre IV de la présente partie et assurer à ce titre le contrôle de la recherche d'emploi dans les conditions prévues au chapitre VI du titre II du livre IV ;
« 4° Assurer, pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage, le service de l'allocation d'assurance et, pour le compte de l'État ou du Fonds de solidarité prévu à l'article L. 5423-24, le service des allocations de solidarité prévues à la section 1 du chapitre III du titre II du livre IV de la présente partie, de la prime de retour à l'emploi mentionnée à l'article L. 5133-1 pour les bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique, de la prime forfaitaire mentionnée à l'article L. 5425-3, des allocations mentionnées à l'article L. 5424-21 ainsi que de toute autre allocation ou aide dont l'État lui confierait le versement par convention ;
« 5° Recueillir, traiter, diffuser et mettre à la disposition des services de l'État et de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage les données relatives au marché du travail et à l'indemnisation des demandeurs d'emploi ;
« 6° Mettre en oeuvre toutes autres actions qui lui sont confiées par l'État, les collectivités territoriales et l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage en relation avec sa mission.
« L'institution nationale agit en collaboration avec les instances territoriales intervenant dans le domaine de l'emploi, en particulier les maisons de l'emploi, ainsi qu'avec les associations nationales et les réseaux spécialisés d'accueil et d'accompagnement, par des partenariats adaptés.
« Art. L. 5312-2. - L'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 est administrée par un conseil d'administration et dirigée par un directeur général.
« Art. L. 5312-3. - Une convention pluriannuelle conclue entre l'État, l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionné à l'article L. 5427-1 et l'institution publique mentionnée à l'article L. 5312-1 définit les objectifs assignés à celle-ci au regard de la situation de l'emploi et au vu des moyens prévisionnels qui lui sont alloués par l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage et l'État.
« Elle précise notamment :
« 1° Les personnes devant bénéficier prioritairement des interventions de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 ;
« 2° Les objectifs d'amélioration des services rendus aux demandeurs d'emploi et aux entreprises et en particulier le nombre de demandeurs d'emplois suivis en moyenne par conseiller et les objectifs de réduction de ce ratio ;
« 3° L'évolution de l'organisation territoriale de l'institution ;
« 4° Les conditions de recours aux organismes privés exerçant une activité de placement mentionnés à l'article L. 5311-4 ;
« 5° Les conditions dans lesquelles les actions de l'institution sont évaluées à partir d'indicateurs de performance qu'elle définit.
« Un comité de suivi veille à l'application de la convention et en évalue la mise en oeuvre.
« Art. L. 5312-4. - Le conseil d'administration comprend :
« 1° Cinq représentants de l'État ;
« 2° Cinq représentants des employeurs et cinq représentants des salariés ;
« 3° Deux personnalités qualifiées choisies en raison de leurs compétences dans les domaines d'activité de l'institution ;
« 4° Un représentant des collectivités territoriales, désigné sur proposition conjointe des associations des collectivités concernées.
« Les représentants des employeurs et les représentants des salariés sont désignés par les organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel, mentionnées à l'article L. 5422-22.
« Les personnalités qualifiées sont désignées par le ministre chargé de l'emploi.
« Le président est élu par le conseil d'administration en son sein.
« Art. L. 5312-5. - Le conseil d'administration règle par ses délibérations les affaires relatives à l'objet de l'institution.
« Les décisions relatives au budget et aux emprunts, ainsi qu'aux encours maximaux des crédits de trésorerie, sont prises à la majorité des deux tiers des membres présents.
« Le conseil d'administration désigne en son sein un comité d'audit et un comité d'évaluation.
« Art. L. 5312-6. - Le directeur général exerce la direction de l'institution dans le cadre des orientations définies par le conseil d'administration ; il prépare les délibérations de ce conseil et en assure l'exécution.
« Le directeur général est nommé par décret, après avis du conseil d'administration. Le conseil d'administration peut adopter, à la majorité des deux tiers de ses membres, une délibération demandant sa révocation.
« Art. L. 5312-7. - Le budget de l'institution comporte quatre sections non fongibles qui doivent chacune être présentées à l'équilibre :
« 1° La section «Assurance chômage» retrace en dépenses les allocations d'assurance prévues à la section 1 du chapitre II du titre II du livre IV de la présente partie qui sont versées pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage, ainsi que les cotisations sociales afférentes à ces allocations dans les conditions prévues par les lois et règlements en vigueur, et en recettes une contribution de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage prévue à l'article L. 5422-20 permettant d'assurer l'équilibre ;
« 2° La section «Solidarité» retrace en dépenses les allocations et aides versées pour le compte de l'État ou du Fonds de solidarité prévu à l'article L. 5423-24, ainsi que les cotisations sociales afférentes à ces allocations dans les conditions prévues par les lois et règlements en vigueur, et en recettes une contribution de l'État et du Fonds de solidarité susmentionné permettant d'assurer l'équilibre ;
« 3° La section «Intervention» comporte en dépenses les dépenses d'intervention concourant au placement, à l'orientation, à l'insertion professionnelle, à la formation et à l'accompagnement des demandeurs d'emploi ;
« 4° La section «Fonctionnement et investissement» comporte en dépenses les charges de personnel et de fonctionnement, les charges financières et les charges exceptionnelles et les dépenses d'investissement.
« Le financement de ces deux dernières sections est assuré par une contribution de l'État et une contribution de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage dans les conditions prévues à l'article L. 5422-24, ainsi que, le cas échéant, les subventions des collectivités territoriales et autres organismes publics et les produits reçus au titre des prestations pour services rendus, toutes autres recettes autorisées par les lois et règlements en vigueur, les produits financiers et les produits exceptionnels.
« L'institution peut en outre créer toute autre section pour compte de tiers.
« La contribution de l'État et la contribution de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage sont fixées à un niveau compatible avec la poursuite des activités de l'institution, compte tenu de l'évolution du marché du travail.
« L'institution est autorisée à placer ses fonds disponibles dans des conditions fixées par les ministres chargés de l'emploi et du budget.
« Art. L. 5312-8. - L'institution est soumise en matière de gestion financière et comptable aux règles applicables aux entreprises industrielles et commerciales.
« Elle est soumise à l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics.
« Art. L. 5312-9. - Les agents de l'institution nationale, qui sont chargés d'une mission de service public, sont régis par le présent code dans les conditions particulières prévues par une convention collective étendue agréée par les ministres chargés de l'emploi et du budget. Cette convention comporte des stipulations, notamment en matière de stabilité de l'emploi et de protection à l'égard des influences extérieures, nécessaires à l'accomplissement de cette mission.
« Les règles relatives aux relations collectives de travail prévues par la deuxième partie du présent code s'appliquent à tous les agents de l'institution, sous réserve des garanties justifiées par la situation particulière de ceux qui restent contractuels de droit public. Ces garanties sont définies par décret en Conseil d'État.
« Art. L. 5312-10. - L'institution est organisée en une direction générale et des directions régionales.
« Au sein de chaque direction régionale, une instance paritaire composée de représentants des employeurs et des salariés désignés par les organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives au niveau national et interprofessionnel veille à l'application de l'accord d'assurance chômage prévu à l'article L. 5422-20 et est consultée sur la programmation des interventions au niveau territorial.
« Art. L. 5312-11. - Une convention annuelle est conclue au nom de l'État par l'autorité administrative et le représentant régional de l'institution.
« Cette convention, compte tenu des objectifs définis par la convention prévue à l'article L. 5312-3, détermine la programmation des interventions de l'institution au regard de la situation locale de l'emploi et du marché du travail et précise les conditions dans lesquelles elle participe à la mise en oeuvre des actions prévues à l'article L. 5111-1. Elle fixe également les conditions d'évaluation de son action et encadre les conditions dans lesquelles l'institution coopère avec les maisons de l'emploi, les missions locales, l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes et les autres intervenants du service public de l'emploi.
« Art. L. 5312-12. - Les litiges relatifs aux prestations dont le service est assuré par l'institution, pour le compte de l'organisme chargé de la gestion du régime d'assurance chômage, de l'État ou du Fonds de solidarité prévu à l'article L. 5423-24 sont soumis au régime contentieux qui leur était applicable antérieurement à la création de cette institution.
« Art. L. 5312-13. - Les biens immobiliers de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 relèvent en totalité de son domaine privé. Sont déclassés les biens immobiliers qui lui sont transférés, lorsqu'ils appartiennent au domaine public. Lorsqu'un ouvrage ou terrain appartenant à l'institution est nécessaire à la bonne exécution de ses missions de service public ou au développement de celles-ci, l'État peut s'opposer à sa cession, à son apport, sous quelque forme que ce soit, à la création d'une sûreté sur cet ouvrage ou terrain, ou subordonner la cession, la réalisation de l'apport ou la création de la sûreté à la condition qu'elle ne soit pas susceptible de porter préjudice à l'accomplissement de ces missions. Est nul de plein droit tout acte de cession, apport ou création de sûreté réalisé sans que l'État ait été mis à même de s'y opposer, en violation de son opposition ou en méconnaissance des conditions fixées à la réalisation de l'opération.
« Art. L. 5312-14. - Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'application du présent chapitre. » ;
23° bis L'article L. 5313-1 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 5313-1. - Les maisons de l'emploi, dont le ressort, adapté à la configuration des bassins d'emploi, ne peut excéder la région ou, en Corse, la collectivité territoriale, concourent à la coordination des politiques publiques et du partenariat local des acteurs publics et privés qui agissent en faveur de l'emploi, de la formation, de l'insertion et du développement économique.
« À partir d'un diagnostic partagé, elles exercent notamment une mission d'observation de la situation de l'emploi et d'anticipation des mutations économiques.
« Elles contribuent à la coordination des actions du service public de l'emploi, et participent en complémentarité avec l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1, les réseaux spécialisés et les acteurs locaux dans le respect des compétences des régions et des départements :
« - à l'accueil, l'information, l'orientation et l'accompagnement des personnes à la recherche d'une formation ou d'un emploi ;
« - au maintien et au développement de l'activité et de l'emploi ainsi qu'à l'aide à la création et à la reprise d'entreprise.
« En lien avec les entreprises, les partenaires sociaux, les chambres consulaires et les branches professionnelles, elles contribuent au développement de la gestion territorialisée des ressources humaines. Elles mènent également des actions d'information et de sensibilisation aux phénomènes des discriminations à l'embauche et dans l'emploi ainsi que relatives à l'égalité professionnelle et à la réduction des écarts de rémunération entre les femmes et les hommes.
« Les maisons de l'emploi qui respectent les missions qui leur sont attribuées bénéficient d'une aide de l'État selon un cahier des charges dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État. » ;
24° Dans l'article L. 5313-2, les mots : « Agence nationale pour l'emploi, les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » ;
25° Dans les articles L. 5411-1, L. 5411-2 et L. 5411-4, les mots : « Agence nationale pour l'emploi » sont remplacés par les mots : « institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » et, dans le deuxième alinéa de l'article L. 5411-4, le mot : « agence » est remplacé par le mot : « institution » ;
26° L'article L. 5422-4 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, les mots : « des organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » ;
b) Dans le second alinéa, les mots : « les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » ;
27° L'article L. 5422-24 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5422-24. - Les contributions des employeurs et des salariés mentionnées aux articles L. 5422-9, L. 5422-11 et L. 5424-20 financent, pour la part définie par la convention mentionnée à l'article L. 5422-20 et qui ne peut être inférieure à 10 % des sommes collectées, une contribution globale versée à la section « Fonctionnement et investissement » et à la section « Intervention » du budget de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1, dont la répartition est décidée annuellement par le conseil d'administration de cette institution. » ;
28° Dans l'article L. 5423-14, les mots : « les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage, avec lesquels » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1, avec laquelle » ;
29° Dans l'article L. 5423-17, les mots : « aux organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » ;
30° La seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 5424-2 est ainsi rédigée :
« Ceux-ci peuvent, par convention conclue avec l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1, pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1, lui confier cette gestion. » ;
30° bis a) L'article L. 5424-20 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La contribution spécifique est recouvrée et contrôlée par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 selon les règles applicables aux contributions mentionnées à l'article L. 5422-9. » ;
b) À compter de la date mentionnée au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi, le dernier alinéa de l'article L. 5424-20 tel qu'il résulte du a ci-dessus est ainsi rédigé :
« La contribution spécifique est recouvrée et contrôlée par les organismes chargés du recouvrement mentionnés à l'article L. 5427-1 selon les règles applicables aux contributions mentionnées à l'article L. 5422-9. Les différends relatifs au recouvrement de cette contribution suivent les règles de compétence prévues à l'article L. 5422-16. » ;
31° Dans la deuxième phrase du quatrième alinéa de l'article L. 5424-21, les mots : « les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 » ;
32° L'article L. 5426-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5426-1. - Le contrôle de la recherche d'emploi est exercé par les agents de l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1. » ;
32° bis Les articles L. 5426-3 et L. 5426-4 sont abrogés ;
32° ter L'article L. 5426-9 est ainsi modifié :
a) Dans le 1°, les mots : «, ainsi que par les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont supprimés ;
b) Le 3° est abrogé ;
33° Les articles L. 5427-1 à L. 5427-5 sont ainsi rédigés :
« Art. L. 5427-1. - Les parties signataires de l'accord prévu à l'article L. 5422-20 confient la gestion du régime d'assurance chômage à un organisme de droit privé de leur choix.
« Le service de l'allocation d'assurance est assuré, pour le compte de cet organisme, par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1.
« Le recouvrement des contributions mentionnées aux articles L. 1233-69, L. 1235-16, L. 5422-9 et L. 5422-11 est assuré, pour le compte de cet organisme, par les unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales et les caisses générales de sécurité sociale mentionnées aux articles L. 213-1 et L. 752-1 du code de la sécurité sociale.
« Par dérogation, le recouvrement de ces contributions est assuré pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage :
« a) Par un organisme de recouvrement mentionné à l'article L. 213-1 du code de la sécurité sociale désigné par le directeur de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, lorsqu'elles sont dues au titre des salariés expatriés, des travailleurs frontaliers résidant en France et ne remplissant pas les conditions pour bénéficier des dispositions du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, notamment en matière d'assurance chômage, et des marins embarqués sur des navires battant pavillon d'un État étranger autre qu'un État membre de l'Union européenne, de l'Espace économique européen ou de la Confédération helvétique, ressortissants de ces États, inscrits à un quartier maritime français et admis au bénéfice de l'Établissement national des invalides de la marine ;
« b) Par les organismes mentionnés à l'article L. 723-1 du code rural, lorsqu'elles sont dues au titre de l'emploi de salariés mentionnés à l'article L. 722-20 du même code ;
« c) Par la Caisse nationale de compensation des cotisations de sécurité sociale des voyageurs, représentants et placiers de commerce à cartes multiples travaillant pour deux employeurs au moins, lorsque les contributions sont dues pour ces salariés ;
« d) Par la caisse de prévoyance sociale prévue par l'ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales, lorsqu'elles sont dues au titre de l'emploi de salariés à Saint-Pierre-et-Miquelon ;
« e) Par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 du présent code, lorsqu'elles sont dues au titre des salariés engagés à titre temporaire qui relèvent des professions de la production cinématographique, de l'audiovisuel ou du spectacle et lorsque l'activité exercée bénéficie de l'aménagement des conditions d'indemnisation mentionné à l'article L. 5424-20.
« Art. L. 5427-2. - Les agents des services des impôts, ainsi que ceux des organismes de sécurité sociale, peuvent communiquer à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 les renseignements nécessaires au calcul des prestations. Les agents des services des impôts peuvent également communiquer aux organismes de sécurité sociale les renseignements nécessaires à l'assiette des contributions.
« Art. L. 5427-3. - Les informations détenues par les organismes de sécurité sociale peuvent être rapprochées de celles détenues par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 pour garantir le respect des règles d'inscription et vérifier les droits des salariés au revenu de remplacement prévu à l'article L. 5421-2.
« Art. L. 5427-4. - Pour procéder à la vérification des droits des salariés au revenu de remplacement prévu à l'article L. 5421-2, les informations détenues par la caisse de congés payés des professions de la production cinématographique et audiovisuelle et des spectacles ainsi que par les institutions des régimes complémentaires de retraite de ces professions peuvent être rapprochées de celles détenues par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1.
« Art. L. 5427-5. - La caisse de congés payés des professions de la production cinématographique et audiovisuelle et des spectacles, les institutions des régimes complémentaires de retraite de ces professions et les organismes de sécurité sociale se communiquent les informations nécessaires à la vérification des droits des salariés et des demandeurs d'emploi, et des obligations des employeurs. » ;
34° Dans le premier alinéa de l'article L. 5427-7, le mot : « deuxième » est remplacé par le mot : « premier » ;
35° Dans l'article L. 5427-9, les mots : « sont soumis les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont remplacés par les mots : « est soumis l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1 » ;
36° Dans le second alinéa de l'article L. 6332-17, les mots : « les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage peuvent » sont remplacés par les mots : « l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1, pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1, peut » ;
37° Le second alinéa de l'article L. 6341-1 est ainsi rédigé :
« L'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 y concourt également, le cas échéant pour le compte de l'organisme mentionné à l'article L. 5427-1, notamment dans les conditions prévues aux articles L. 1233-68 et L. 1233-69. » ;
38° Dans l'article L. 6341-6, les mots : «, aux organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont supprimés ;
39° Dans le deuxième alinéa de l'article L. 8272-1, les mots : « et les organismes gestionnaires du régime d'assurance chômage » sont supprimés.
Article 12
(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)
Le code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007 précitée, à compter de la date prévue au premier alinéa du III de l'article 4 de la présente loi et au plus tôt à compter de l'entrée en vigueur de cette ordonnance, est ainsi modifié :
1° L'article L. 3253-14 est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa est complété par les mots : « et avec l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations mentionnées à l'article L. 3253-18 » ;
b) Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« En cas de dissolution de cette association, l'autorité administrative confie à l'organisme prévu à l'article L. 5427-1 la gestion du régime d'assurance institué à l'article L. 3253-6, à l'exception du recouvrement des cotisations mentionnées à l'article L. 3253-18 confié aux organismes mentionnés à l'article L. 5422-16. » ;
2° Le second alinéa de l'article L. 3253-18 est ainsi rédigé :
« Le recouvrement, le contrôle de ces cotisations et leur contentieux suivent les règles prévues à l'article L. 5422-16. » ;
3° Suppression maintenue par la commission mixte paritaire............
3° bis L'intitulé de la section 4 du chapitre II du titre II du livre IV de la cinquième partie est ainsi rédigé : « Modalités de recouvrement et de contrôle des contributions » ;
4° L'article L. 5422-16 est ainsi rédigé :
« Art. L. 5422-16. - Les contributions prévues aux articles L. 1233-69, L. 1235-16, L. 5422-9, L. 5422-11 et L. 5424-20 sont recouvrées et contrôlées par les organismes chargés du recouvrement mentionnés à l'article L. 5427-1 pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionné à ce même article, selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations du régime général de la sécurité sociale assises sur les rémunérations. Les différends relatifs au recouvrement de ces contributions relèvent du contentieux de la sécurité sociale.
« Par dérogation à l'alinéa précédent :
« 1° Les contributions dues au titre de l'emploi des salariés mentionnés à l'article L. 722-20 du code rural sont recouvrées et contrôlées selon les règles et sous les garanties et sanctions applicables au recouvrement des cotisations dues au titre des assurances sociales agricoles obligatoires, dans des conditions définies par convention entre l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage et la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole ;
« 2° Les différends relatifs au recouvrement des contributions dues au titre de l'emploi de salariés à Saint-Pierre-et-Miquelon relèvent de la compétence des juridictions mentionnées à l'article 8 de l'ordonnance n° 77-1102 du 26 septembre 1977 portant extension et adaptation au département de Saint-Pierre-et-Miquelon de diverses dispositions relatives aux affaires sociales.
« Une convention conclue entre l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale et l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage mentionné à l'article L. 5427-1 précise les conditions garantissant à ce dernier la pleine autonomie de gestion, notamment de sa trésorerie grâce à une remontée quotidienne des fonds, ainsi que l'accès aux données nécessaires à l'exercice de ses activités. Elle fixe également les conditions dans lesquelles est assuré le suivi de la politique du recouvrement et définit les objectifs de la politique de contrôle et de lutte contre la fraude. Elle prévoit enfin les modalités de rémunération du service rendu par les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général. » ;
5° Les articles L. 5422-17 à L. 5422-19 sont abrogés ;
6° Suppression maintenue par la commission mixte paritaire............
7° Dans le premier alinéa de l'article L. 5422-20, après les mots : « du présent chapitre », sont insérés les mots : « à l'exception des articles L. 5422-14 à L. 5422-16 » ;
8° Dans les articles L. 5424-5 et L. 7122-27, les mots : « relèvent de la compétence du juge judiciaire » sont remplacés par les mots : « suivent les règles de compétence prévues à l'article L. 5422-16 ».
M. le président. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un de ces articles ?...
Le vote est réservé.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.
M. Robert del Picchia. Vous l'avez indiqué à juste titre, madame le ministre, ce projet de loi est d'une grande importance - mais il est aussi d'une réelle complexité - puisqu'il vise à placer le demandeur d'emploi au centre du service public de l'emploi, en réalisant une fusion des différents intervenants.
Le groupe UMP se réjouit que ce projet ambitieux, évoqué depuis de nombreuses années, voie enfin le jour. Comme l'a souligné le Président de la République, « le devoir d'un chômeur, c'est de rechercher un emploi, pas de supporter le fardeau de la complexité administrative, et le devoir de la collectivité nationale, c'est de mobiliser ses moyens au service du retour du chômeur à l'emploi ».
Quel est l'enjeu ? Il s'agit de donner à chaque chômeur un point d'accueil unique et polyvalent, où il trouvera l'ensemble des services.
Il s'agit également d'aller vers davantage d'efficacité, de mieux mettre en relation l'offre et la demande de travail. Il n'est pas normal que l'on compte aujourd'hui près de 2 millions de demandeurs d'emploi alors que plus de 400 000 offres d'emploi ne sont pas satisfaites.
La réforme engagée sera donc l'un des éléments permettant d'atteindre l'objectif fixé par le Président de la République : parvenir au plein emploi en cinq ans, ce qui signifie un taux de chômage inférieur à 5 %, et un taux d'emploi proche de 70 %.
Je me félicite que notre assemblée, examinant le texte en première lecture, ait pu l'enrichir sur plusieurs points importants, et je tiens, à cet égard, à remercier particulièrement notre rapporteur de son travail, à la qualité exemplaire.
La commission mixte paritaire n'a pas bouleversé l'équilibre trouvé sur ce texte. Elle a confirmé notre attachement à certaines dispositions, notamment en ce qui concerne la représentation des collectivités territoriales au sein de la nouvelle institution ou l'implication des maisons de l'emploi.
Ainsi, la Haute Assemblée a créé des conseils régionaux à l'image du Conseil national de l'emploi. Je vous rappelle qu'une expérimentation a été prévue dans deux régions, instituant une coprésidence du préfet de région et du président du conseil régional. Nous nous attacherons à étudier les résultats de cette expérimentation.
Nous avons modifié la composition du conseil d'administration de la nouvelle institution pour inclure un représentant des collectivités territoriales.
Nous avons aussi associé les maisons de l'emploi au projet, en prévoyant que les conditions d'une coopération seraient fixées par la convention annuelle entre le préfet de région et le directeur régional de l'institution.
L'Assemblée nationale a pu compléter notre réflexion sur ce sujet, en s'appuyant sur les propositions du député Jean-Paul Anciaux. Elle a ainsi précisé la nature des missions des maisons de l'emploi et prévu qu'un de leurs représentants siégerait au sein du Conseil national de l'emploi.
Mes collègues, en tant qu'élus locaux, se réjouissent de l'ensemble de ces dispositions. Ils sont, en effet, nombreux à avoir soutenu la création des maisons de l'emploi.
Sans revenir sur l'ensemble des autres mesures contenues dans ce texte, je voudrais simplement insister sur notre voeu de voir la réforme annoncée de la formation professionnelle menée à bonne fin.
Notre commission des affaires sociales a proposé que le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur les modalités d'un transfert éventuel de l'AFPA à la nouvelle institution. Nos débats - et, dernièrement, une question orale posée par notre collègue Jean-Claude Carle - ont souligné les enjeux de cette réforme.
Je terminerai mon propos en soulignant que la politique du Gouvernement commence à porter ses fruits. La baisse continue du chômage depuis deux ans s'est en effet accélérée au troisième trimestre de 2007, madame le ministre vient de rappeler les chiffres.
Le présent projet de loi est donc une étape essentielle. Les prochains travaux législatifs et les chantiers menés par les partenaires sociaux vont permettre de réformer plus largement le marché du travail.
Nous tenons à saluer, madame le ministre, cette politique active de lutte contre le chômage, et notre groupe votera bien entendu ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. Mme la ministre du logement et de la ville, qui doit représenter le Gouvernement lors de l'examen du texte suivant de l'ordre du jour, étant encore retenue à l'Assemblée nationale, nous allons interrompre nos travaux.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix heures trente-cinq, est reprise à onze heures cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
3
Pouvoir d'achat
Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixe paritaire
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour le pouvoir d'achat (n° 180).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire qui s'est réunie ce mardi pour examiner les dispositions restant en discussion du projet de loi pour le pouvoir d'achat a décidé de retenir dans son intégralité le texte adopté par le Sénat. Aucune des dispositions votées par notre assemblée la semaine passée n'a donc été remise en cause.
Je rappelle que le Sénat avait apporté au texte quatre modifications principales.
Nous avons d'abord prolongé jusqu'au 31 décembre 2009 la période de rachat des jours de RTT, allant sur ce point plus loin que l'Assemblée nationale, qui avait fixé son terme au 30 juin 2008. La commission mixte paritaire a approuvé cette extension du dispositif.
Le Sénat a ensuite adopté un article additionnel tendant à prévoir que les salariés pourront verser à un fonds de mutualisation, mis en place par leur entreprise, le gain retiré de la monétisation de jours de RTT, afin de financer le maintien de la rémunération d'un de leurs collègues parti accomplir une activité caritative ou humanitaire.
Ce dispositif généreux et original, à l'élaboration duquel le haut-commissariat aux solidarités actives contre la pauvreté a largement contribué, devrait permettre aux associations de bénéficier du concours de salariés expérimentés qui hésitent aujourd'hui à s'engager dans la mesure où ils n'ont pas la garantie du maintien de leur rémunération.
Cet article a occasionné un débat technique particulièrement complexe en commission mixte paritaire sur la question du régime fiscal applicable aux dons effectués dans ce cadre. Nous nous sommes demandé, en particulier, si le salarié devait ou non bénéficier de la réduction d'impôt habituellement prévue en cas de don à des oeuvres caritatives.
Selon l'administration fiscale, semble-t-il, le bénéfice de cette réduction d'impôt est exclu, dans la mesure où les sommes concernées sont déjà exonérées d'impôt sur le revenu. Il y aurait donc un cumul d'avantages, contraire aux principes de notre législation fiscale. J'ai été heureux de l'entendre dire... (Mme la ministre sourit.)
Si je dis « semble-t-il », c'est parce que les explications qui nous avaient été fournies, à notre demande, pour préparer la commission mixte paritaire n'étaient pas d'une limpidité convaincante. En effet, et je l'ai fait observer, le rachat de jours de RTT donne déjà droit à une exonération d'impôt sur le revenu, lorsqu'il entre dans le cadre défini par la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, dite « loi TEPA ».
Dans ce cas, le fait pour le salarié d'effectuer un don ne lui procure aucun avantage fiscal supplémentaire par rapport à ce qu'il aurait obtenu de toute façon. Les salariés n'auront donc pas intérêt à utiliser le dispositif proposé : il sera dans certains cas plus avantageux pour eux de racheter des jours de RTT ou de repos compensateur en application de l'article 1 ter, puis effectuer un don à une oeuvre caritative quelconque, sans passer par le fonds créé dans leur entreprise. Dans cette hypothèse, ils cumuleront sans difficulté exonération d'impôts et réduction de 66 % au titre des dons aux oeuvres.
Nous restons donc, sur ce point, dans une incertitude qui, madame la ministre, continue à aiguiser ma curiosité, je l'avoue. (Sourires.)
Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Cela ne m'étonne pas ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Nicolas About, rapporteur. Par ailleurs, sur l'initiative de la commission des finances saisie pour avis, le Sénat a également obtenu que le Gouvernement remette au Parlement, avant la fin du premier semestre 2008, un rapport traitant de la politique d'intéressement dans le secteur public. Nos collègues députés ont réservé un très bon accueil à cette initiative, y voyant un levier utile pour la réforme de l'État.
La dernière mesure importante concerne le volet logement. Le Sénat avait donné aux bailleurs la possibilité de recevoir directement, à leur demande, les allocations logement perçues par leur locataire. La commission mixte paritaire a confirmé cette mesure, ce qui a permis de rééquilibrer un texte au départ seulement centré sur les préoccupations des locataires.
Après ce rapide rappel des apports du Sénat, je tiens à saluer la qualité du travail de l'Assemblée nationale, qui a abouti à plusieurs avancées significatives. Je pense notamment, à la possibilité, ouverte sur l'initiative du président Méhaignerie, de convertir des repos compensateurs en majoration salariale ou encore à la prorogation de l'exonération de la redevance dont bénéficient les retraités à revenus modestes.
Je vous invite, mes chers collègues, à adopter le texte élaboré par la commission mixte paritaire afin de répondre au plus vite aux attentes de nos concitoyens en matière de relance du pouvoir d'achat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier.
Mme Raymonde Le Texier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous avons déjà eu l'occasion de dire ici tout le mal que nous pensions de ce texte ; les débats et les conclusions de la commission mixte paritaire ne nous ont pas fait changer d'avis.
Cette loi est une supercherie qui, en guise d'amélioration du pouvoir d'achat, ne propose aux salariés que la possibilité de vendre leurs jours de repos ou de puiser dans leur propre épargne. Mais la seule question qui vaille, elle, n'est jamais posée : pourquoi un salarié ordinaire ne peut-il plus faire face à ses dépenses de base, logement, transport, chauffage, nourriture, santé ?
Il conviendrait pourtant de se poser la question puisque, malgré le triomphalisme du Gouvernement sur l'envolée des heures supplémentaires et le prétendu succès de la loi TEPA, jamais l'indicateur de l'INSEE chargé de mesurer le moral des ménages n'est tombé aussi bas depuis sa création, c'est-à-dire depuis 1987. Précisons que ce sondage a été fait avant la crise boursière et qu'il ne s'agit donc pas d'une réaction d'angoisse conjoncturelle.
Ce gouvernement voulait créer un choc de confiance dans le pays ; c'est un traumatisme qu'il a suscité !
Vous n'avez à la bouche que le respect du travail, mais il ne vous est jamais venu à l'idée que, respecter le travail, c'était d'abord le payer ; qu'augmenter le pouvoir d'achat, c'était d'abord relancer les négociations salariales ; que susciter la confiance ne passe pas par la destruction des protections sociales et la multiplication tous azimuts des taxes.
Vous vous rengorgez face à l'explosion du nombre d'heures supplémentaires et le succès annoncé du rachat des RTT, sans vous interroger sur ce que cette situation révèle de l'état de notre société. Mais, quand les fins de mois arrivent de plus en plus tôt, quand les salaires stagnent et que les prix s'envolent, quel autre choix a le salarié que de faire des heures supplémentaires et de sacrifier ses récupérations puisqu'on ne lui propose rien d'autre ?
Vous employez à tort et à travers le mot « liberté » et le mot « choix ». Est-il décent de les appliquer au rapport employeur-employé en période de chômage de masse, de précarisation du travail, d'augmentation de la pauvreté ? Est-on libre quand on sait que, sur le marché de l'emploi, ils sont des centaines à pouvoir prétendre au poste que l'on occupe ? Est-on libre de choisir de prendre ou non ses RTT quand on sait que c'est le seul moyen de boucler ses fins de mois ? Bien sûr que non !
Votre politique, en misant seulement sur l'allongement de la durée du travail, pèse sur l'emploi et accentue encore la pression sur les salariés.
Elle développe également les phénomènes d'inégalités entre les salariés. Ainsi, les femmes, qui prennent souvent leurs RTT le mercredi pour éviter des frais de garde ou faute de mode de garde, seront pénalisées. Pourtant, ce sont elles qui perçoivent les salaires les plus bas.
À cette aune, les quelques modifications issues de la commission mixte paritaire paraissent dérisoires.
Le fait de prolonger l'expérimentation jusqu'à la fin de 2009 présente comme intérêt majeur de prolonger l'effet d'aubaine pour les entreprises et d'accentuer encore le manque à gagner pour la sécurité sociale. Mais la perspective de ce déficit ne vous inquiète guère, tant l'habitude a été prise de faire assumer aux assurés sociaux les avantages accordés aux entreprises. À défaut de payer le travail, vous oubliez rarement de taxer le salarié, avec une vraie préférence pour les plus modestes des classes moyennes !
Mais en prolongeant la durée de l'expérience jusqu'à la fin de 2009, peut être voulez-vous tout simplement gagner le temps nécessaire pour revenir sur la durée légale du temps de travail,...
M. Nicolas About, rapporteur. Non !
Mme Raymonde Le Texier. ...pour légiférer sur la représentativité des syndicats...
M. Nicolas About, rapporteur. Oui !
Mme Raymonde Le Texier. ...et, enfin, pour mettre en place un opting out directement inspiré du modèle anglo-saxon.
Enfin, j'en viens à la mesure sur le congé humanitaire. Celle-ci n'a rien à voir avec le pouvoir d'achat et alourdit le texte,...
M. Nicolas About, rapporteur. Peut-être un peu...
Mme Raymonde Le Texier. ...alors qu'elle ne concerne qu'une infime minorité de personnes. J'en suis désolée, monsieur About, mais cet article-là est de pure démagogie...
M. Nicolas About, rapporteur. Mais non...
Mme Raymonde Le Texier. ...et vise uniquement à donner bonne conscience à peu de frais. Est-ce vraiment le rôle de la loi ?
Il est dommage que vos bonnes intentions se limitent à cet article de pure charité, quand vous ignorez le mal-être et les difficultés quotidiennes de nos concitoyens.
Pourtant, quand le moral des ménages est aussi déprimé, qu'il s'agisse de leur présent ou de leur avenir, il est temps de sortir de l'idéologie libérale pour essayer d'agir enfin sur la réalité. Car de cette confiance en berne on ne peut escompter une consommation en hausse.
D'ailleurs, à la suite de cette étude, M. Alexander Law, économiste au cabinet Xerfi, a largement revu à la baisse les perspectives de croissance de l'économie française, en estimant à 1,4 % la progression du PIB en 2008.
M. Nicolas About, rapporteur. Il est pessimiste !
Mme Raymonde Le Texier. À l'occasion de ce débat, le groupe socialiste a émis des propositions concrètes en faveur du pouvoir d'achat. Vous les avez rejetées, préférant persévérer dans une politique vouée à l'échec.
J'ai parlé à l'instant de traumatisme ; en réalité, le choc de croissance que nous promettait le Président de la République semble se transformer en commotion. Notre groupe n'aura, hélas, pas d'autre choix que de voter contre ce mauvais texte.
M. le président. La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, nous en arrivons au deuxième texte de cette matinée. Non moins que le précédent, il est emblématique de votre volonté de mettre en oeuvre une politique des plus libérales.
En effet, votre majorité adoptera sans doute, dans quelques instants, le texte intitulé abusivement - j'insiste sur ce terme, car tel est bien mon point de vue ainsi que celui de l'ensemble des sénatrices et sénateurs de mon groupe -, « Pour le pouvoir d'achat ».
Bien sûr, certains salariés, celles et ceux qui disposent d'une monnaie d'échange, à savoir de RTT en trop ou de primes d'intéressement ou de participation - et ils sont loin d'être les plus nombreux, vous le savez - pourront les faire monétiser. Mais il s'agit en réalité d'un échange, car cet argent leur est dû, ni plus ni moins !
Malheureusement - je ne me faisais au demeurant aucune illusion à cet égard -, la commission mixte paritaire, réunie mardi dernier, n'aura pas permis de modifier l'esprit de votre projet de loi. Celui-ci sort de la CMP identique à ce qu'il était après son passage au Sénat, M. About l'a d'ailleurs souligné. Vous vous doutez donc du sort que lui réservera mon groupe !
Madame le ministre, je souhaite néanmoins expliciter les raisons de notre profond désaccord.
En premier lieu, pour mon groupe et pour moi, l'augmentation du pouvoir d'achat passe par un accroissement des revenus mensuels - car c'est bien à chaque fin de mois que bon nombre de nos concitoyennes et concitoyens se trouvent en difficulté - et donc par une revalorisation de leur travail, c'est-à-dire une augmentation de leur salaire, seule source de revenu pour beaucoup d'entre eux.
Nous avons eu à ce propos un échange intéressant lors de la CMP. Je tiens d'ailleurs à rassurer M. Dassault, même s'il n'est pas parmi nous ce matin : je fais bien la différence entre les salaires et les primes ! Je ne possède certes pas son expérience en matière de « management » d'entreprise, mais il n'a pas la mienne en tant que salariée, et l'une vaut l'autre, étant entendu que chacune forge toutefois un point de vue fort différent sur la société à construire !
M. Dassault ainsi que d'autres sénatrices et sénateurs du groupe UMP me parlaient d'esprit d'entreprise et de motivation. Mais quoi de plus motivant et de plus gratifiant pour un salarié que la reconnaissance de son travail par une rémunération à la hauteur de sa tâche ? Une juste rémunération c'est une rétribution respectueuse de chaque individu. Le partage des richesses ne doit pas se faire entre quelques privilégiés, mais bien entre tous les salariés qui ont contribué, à la hauteur de leur classification, à la production de ces richesses.
Lorsque j'évoque une augmentation des salaires, je vise la rémunération de tous les salariés, dans le privé comme dans le public. Il s'agirait d'une mesure beaucoup plus équitable que celle que vous proposez.
En effet, le niveau des salaires reste bien la vraie question. Comme je le soulignais à l'instant, les salaires sont tellement bas et les prix tellement hauts que la fin du mois, pour beaucoup, est plus proche du 15, voire du 10, que du 30 !
Si vous me permettez une petite digression, j'ajouterai que celles et ceux qui pourraient quelque peu épargner le feront à un taux d'intérêt très réduit, puisque votre gouvernement a plafonné l'augmentation du taux du livret A. Les banques ont donc tout loisir pour proposer des placements à risques, y compris aux retraités, en promettant des bénéfices records, et avec le résultat qu'on sait - mais je n'évoquerai pas de nouveau l'affaire de la Société générale !
J'en reviens à la question du pouvoir d'achat, dont je ne m'étais d'ailleurs pas vraiment éloignée.
Lorsqu'on les interroge, un grand nombre de salariés nous affirment avoir l'impression que leur travail n'est pas correctement rémunéré. Or ce sentiment est confirmé par les chiffres : la répartition entre le capital et le travail s'est inversée au cours des dernières décennies. La Commission européenne, dont vous ne pouvez raisonnablement affirmer qu'elle est proche de nos positions, nous donne d'ailleurs raison puisqu'elle précise que la part des salaires dans le PIB a diminué plus fortement en France que dans les autres pays d'Europe, perdant 9,3 points entre 1983 et 2006.
Ce constat se précise à la lecture du « portail sociétal » réalisé par l'INSEE en 2007 : la masse des salaires et des traitements bruts progresserait moins vite en 2005 et 2006 que les années précédentes, alors que, dans le même temps, les revenus patrimoniaux augmentent considérablement, à l'image des revenus locatifs, qui progressent de 8,6 %. Pour augmenter le pouvoir d'achat pour toutes et tous, il faut donc relancer les salaires !
Du reste, les salariés ne s'y trompent pas. Si certains souhaitent monétiser leurs RTT au motif qu'ils n'arrivent pas à les consommer toutes, ce ne sont pas ceux dont le pouvoir d'achat est le plus bas, nous en sommes d'accord ! Ce sont les cadres, qui sont soumis à de telles conditions de travail qu'ils ne peuvent bénéficier des accords sur les 35 heures, et c'est bien dommage pour eux.
Quant aux salariés dont la rémunération est tellement basse que leur pouvoir d'achat a besoin d'un coup de pouce, ces femmes et ces hommes dans la difficulté seront forcément d'accord pour faire racheter leurs RTT. Toutefois, proposez-leur une augmentation de salaire, et elle sera acceptée, c'est sûr ! Tout l'art est donc dans la manière de formuler la question !
À ce propos, je voudrais revenir sur le référendum organisé dans la société Continental, dont vous nous avez beaucoup parlé, les uns et les autres.
Le nombre des entreprises qui ferment augmente chaque jour. En toute occasion, les gouvernants et le patronat assènent leurs discours sur le travail et sur la course à la flexibilité et à l'enrichissement des actionnaires. Or, derrière ces discours, il y a un chantage insidieux ou sournois à la délocalisation, les salariés ne le savent que trop.
Aussi, ne croyez-vous pas que si l'employeur avait organisé à Continental un autre référendum, dont la question aurait été : « êtes-vous favorable à une meilleure répartition des bénéfices entre le capital et les revenus du travail », les salariés n'auraient pas massivement voté « oui » ? Pour ma part, j'en suis convaincue.
Ne croyez-vous pas qu'en sacrifiant leurs RTT et en revenant sur la durée de leur temps de travail, les salariés de Continental n'ont pas simplement demandé plus d'argent pour boucler des fins de mois difficiles, preuve s'il en est que les salaires ne suffisent plus ? N'ont-ils pas, en outre, craint une délocalisation ?
En réalité, votre projet de loi n'a qu'une mission : servir d'écran de fumée devant la véritable préoccupation des salariés. Je regrette d'ailleurs que votre gouvernement ait rejeté tous nos amendements sur le sujet et préféré élargir plus encore les conditions d'ouverture au droit de rachat en allongeant considérablement la durée de ce dispositif.
Ainsi, non seulement vous prévoyez le rachat des heures restantes, mais, ce qui est pis encore, vous incitez les salariés à ne pas prendre, dans l'avenir, leurs journées de récupération, en leur promettant une rémunération accessoire. Tant pis si cela pèse sur la santé du travailleur, tant pis si cela affecte son équilibre familial : ce qui compte, c'est de faire fonctionner, même artificiellement, le slogan présidentiel du « travailler plus pour gagner plus » !
En commission mixte paritaire, nous avons eu un débat qui a été, là encore, fort intéressant. En effet, les conventions de rachat des RTT se négocieront au moment des NAO, les négociations annuelles obligatoires, un détail, si je puis dire, qui m'avait échappé lors du débat parlementaire, mais qu'un député de votre majorité a pointé du doigt mardi matin.
En effet, s'il a vu juste, c'est-à-dire si les accords de rachat de RTT se font bien au moment des NAO, je nourris les plus grandes craintes quant à la bonne tenue de ces négociations. Madame le ministre, pouvez-vous nous éclairer sur ce point ? Je pensais voir ce matin M. Xavier Bertrand, mais peut-être serez-vous en mesure me répondre.
En effet, les NAO constituent pour les salariés la seule occasion d'évoquer leur rémunération. Y intégrer le rachat des RTT c'est, de fait, donner à celles-ci une valeur - au moins symbolique - égale aux salaires. C'est faire croire aux salariés que la monétisation des RTT organisée par votre dispositif fait partie intégrante de leur salaire, et cela nous ne pouvons que le dénoncer.
En effet, que proposeront les directions d'entreprise ? À l'évidence, l'augmentation du temps de travail des salariés, par le rachat des RTT, qui répondra aux demandes pourtant bien légitimes d'augmentation de salaires. Ainsi, la boucle sera bouclée !
Quant aux autres dispositifs de votre texte, nous n'y sommes pas non plus favorables, car leur application reste toujours éventuelle. Peut-être le salarié qui bénéficie d'une épargne salariale pourra-t-il en demander le déblocage. Sans doute l'obtiendra-t-il. Mais quelle sera l'incidence de cette mesure sur le pouvoir d'achat ? Nul ne le sait !
Ce qui est certain, en revanche, c'est que ses effets seront très limités. Lorsqu'un gouvernement précédent, que soutenait votre majorité, avait eu recours à ce mécanisme, un tiers seulement des sommes débloquées avait alimenté la consommation, le reste se dirigeant vers l'épargne, notamment vers les plans d'épargne en actions.
Autant dire que ceux qui se frottent les mains aujourd'hui, ce sont, une nouvelle fois, les banquiers.
Le Président de la République voulait être, prétendait-il, le président des ruptures. Il est, en la matière, celui de la continuité !
Quant à la prime de 1 000 euros, c'est pratiquement le néant ! Elle repose sur la seule bonne volonté des employeurs. Rien de précis, rien de garanti : il y a juste l'espoir que les employeurs participeront à la relance du pouvoir d'achat en faisant appel à leur bon coeur. On connaît pourtant le sort réservé aux mesures volontaires !
Une fois dénoncés ces mécanismes, il ne reste plus que de l'affichage.
Ce que vous vous gardez bien de dire, c'est que votre projet de relance du pouvoir d'achat n'aura rien coûté à l'État. Je le rappelle, avec la loi TEPA, vous avez exonéré les droits de successions, défiscalisé encore plus ce qui pouvait l'être, exempté les patrons de cotisations sociales, pour un coût total de 15 milliards d'euros. Mais, pour les salariés, il n'y a plus d'argent, les caisses sont soudainement vides ! Les Français apprécieront...
Que reste-t-il, alors, de votre projet de loi ? Un curieux dispositif, longuement discuté et auquel on donne le nom d'« amendement Hirsch ». Celui-ci prévoit qu'un salarié pourra, en quelque sorte, faire don de ses journées de RTT à un fonds destiné à rémunérer d'autres salariés participant à une action désintéressée. À n'en pas douter, rares seront les salariés à recourir à ce dispositif, comme l'ont d'ailleurs fortement souligné les parlementaires de votre majorité en commission mixte paritaire.
Passe encore qu'il s'agisse là d'un pur cavalier législatif. Passe encore que ce dispositif soit très largement inspiré des pratiques du secteur bancaire, qui font que le client ayant acquis des points grâce à l'utilisation de sa carte bleue ou de certains services peut les offrir à une association caritative, qui en bénéficiera sous forme d'espèces. Il demeure que cet article est incomplet, car les sommes données sous formes de jours de RTT n'ouvriront pas droit à l'abattement fiscal qui est de règle en cas de dons. Les salariés généreux préféreront donc se faire payer leurs RTT et bénéficier des exonérations prévues par la loi TEPA, puis faire un chèque à une association et bénéficier ainsi de l'abattement fiscal que ce projet de loi leur dénie.
Le débat en commission mixte paritaire a, de ce point de vue, été très éclairant : les parlementaires de votre majorité n'ont pas tous adopté cet article, et M. About a même présenté un amendement, qu'il a finalement retiré.
Décidément, ce n'est pas seulement ce projet de loi qui a été conçu dans l'urgence : les amendements soutenus par le Gouvernement et habilement déposés par certains sénateurs l'ont été également !
De ce texte, il reste encore trois articles sur le logement. Le premier instaure un nouvel indice d'indexation des loyers, le deuxième réduit à un mois le dépôt de garantie et le dernier permet aux loueurs privés de recevoir l'APL, l'aide personnalisée au logement, due à leur locataire.
Autant dire que ces articles, même s'ils sont les bienvenus, ne modifieront pas substantiellement la vie de nos concitoyens. Tel aurait pu être le cas, pourtant, si les amendements déposés par mon groupe, qui visaient à exonérer les étudiants de la taxe d'habitation ou encore à geler les prix des loyers, avaient été adoptés.
Je regrette également que votre gouvernement n'ait pas profité de ce texte pour encadrer la vente des logements sociaux. En effet, au nom du « parcours résidentiel » que vous vantez tant, certains maires, très souvent dans les communes gérées par votre majorité, procèdent à la vente des logements sociaux.
Certaines communes cèdent d'ailleurs une partie de leur patrimoine social alors même qu'elles ne respectent pas la loi SRU - solidarité et renouvellement urbain -, qui impose 20 % de logements sociaux, et qu'elles ne prévoient pas de plan de construction pour les années à venir.
Pourtant, nous constatons, dans nos permanences et sur les marchés, que le nombre des demandeurs croît considérablement. Les publics se modifient : ce ne sont plus seulement les plus pauvres qui sont demandeurs ; ce sont aussi les catégories moyennes et les jeunes, pour qui le loyer constitue la première charge, représentant parfois 45 % des revenus d'un couple. Cette évolution est la conséquence d'un double phénomène : l'augmentation considérable des loyers et la stagnation des salaires. Là encore, la boucle est bouclée !
S'agissant en particulier de l'article 6 du texte, il vise un dispositif qui existait déjà auparavant, mais dont le locataire pouvait refuser l'application. Si nous pouvons comprendre la philosophie qui l'anime, nous serons très vigilants sur la question du logement insalubre.
Mme Annie David. Madame le ministre, vous avez pris des engagements en la matière. Nous veillerons donc à ce que la parole du Gouvernement soit tenue, et vite.
De mesures partiellement efficaces en dispositions totalement inappropriées, le caractère précipité de l'élaboration de ce texte ne fait plus de doute !
Pourtant, la situation est grave : nos concitoyens s'appauvrissent de jour en jour, la crainte dans l'avenir va grandissant, la précarisation de la société pèse lourd sur le moral des ménages et sur l'économie.
Pis encore, vos politiques aggravent la situation en imposant aux retraités une augmentation de leur pension correspondant à peine à la moitié du taux de l'inflation, en instaurant les franchises médicales et, nous l'avons constaté avec le projet de loi relatif à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi, en durcissant considérablement les conditions permettant de bénéficier d'une indemnisation du chômage.
Lorsque l'on parle de « politique de civilisation », on devrait se demander à quelle civilisation on fait référence ou, pour le moins, s'il s'agit d'une civilisation ou de plusieurs. À l'évidence, en effet, vos projets de loi nous mènent directement à une société à deux vitesses. C'est le choix de société voulu et organisé aux États-Unis. On sait aujourd'hui où cela conduit ! Il est donc grand temps de revenir sur ce processus.
C'est pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen s'opposera à ce texte.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Je prierai d'abord Mme David de m'excuser de ne pas être M. Xavier Bertrand ! (Sourires.)
M. Nicolas About, rapporteur. C'est un débat de femmes ! (Rires.)
Mme Christine Boutin, ministre. Je suis désolée, madame la sénatrice, de vous décevoir sur ce point, comme sur tous les autres d'ailleurs, puisque, si j'ai bien compris, ce que nous vous proposons ne vous convient pas du tout !
Afin que vous obteniez les informations très précises que vous souhaitez, en particulier sur le problème de l'accord de monétisation des RTT, dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire, je demanderai à M. Xavier Bertrand de vous répondre personnellement !
Mme Annie David. Je vous remercie !
Mme Christine Boutin, ministre. Pour le reste, je tenterai de le suppléer.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite appeler votre attention sur le fait que ce projet de loi pour le pouvoir d'achat est porteur de deux valeurs fondamentales, celles qui permettent à tout homme d'être debout : le travail et la nécessité d'un logement. C'est pour nous une force et un symbole importants.
Depuis le mois de mai dernier, notre priorité, c'est le travail : la valorisation du travail, la promotion du travail, le retour vers le travail. Il s'agit d'une valeur essentielle que le Président de la République a mise en avant durant toute sa campagne et à laquelle les Français ont pleinement souscrit. Cela signifie donc qu'il nous faut porter toute notre attention sur ceux qui travaillent.
Je tiens ici à vous remercier, au nom de M. Xavier Bertrand et de Mme Christine Lagarde ainsi qu'en mon nom propre, de la qualité du travail accompli pour répondre à une préoccupation majeure de nos concitoyens.
Valoriser le travail, nous l'avons fait avec le dispositif relatif aux heures supplémentaires adopté cet été. Nous poursuivons cette démarche avec ce projet de loi pour le pouvoir d'achat, notamment avec la monétisation des jours de RTT.
Valoriser le travail, c'est aussi redonner du travail. Les chiffres montrent que le chômage continue de reculer pour atteindre un taux jamais atteint depuis de nombreuses années, notamment grâce à l'action déterminée de Mme Christine Lagarde. Or, ne l'oublions pas, plus de personnes qui retrouvent du travail, c'est nécessairement plus de pouvoir d'achat distribué.
Aujourd'hui, nous voulons élargir encore les possibilités d'augmenter le pouvoir d'achat en concentrant nos efforts sur le travail. Quand on donne aux entreprises et aux salariés les moyens de travailler plus, cela marche, nous en sommes convaincus. Xavier Bertrand l'a annoncé : 50 % des entreprises au mois de novembre - des entreprises de toutes tailles et de tous secteurs d'activité -, contre 40 % au mois d'octobre, ont eu recours aux heures supplémentaires et ont bénéficié de la loi TEPA.
Le projet de loi que vous avez examiné, amendé et renforcé s'inscrit dans ce cadre et apporte une réponse nouvelle et complémentaire, avec des mesures concrètes et d'effet rapide pour le pouvoir d'achat des Français.
Vous le savez, ce texte comprend cinq mesures fortes qui, ajoutées les unes aux autres, créeront une dynamique nouvelle en faveur du pouvoir d'achat.
La première mesure permettra au salarié de répondre à une question simple : repos supplémentaire ou augmentation de pouvoir d'achat ?
Nous voulons permettre à tous les salariés qui ne veulent pas ou qui ne peuvent pas prendre leurs jours de RTT de les traduire par plus de travail, donc plus de rémunération.
Quant aux employeurs, nous leur demandons de jouer le jeu de cette mesure. Pourquoi ? Parce que cette mesure a été souhaitée par nombre d'entre eux. Nous ne l'avons pas inventée dans nos bureaux : elle nous a été proposée. Et nous savons qu'elle est efficace ! Si nous mettons en place un tel dispositif, c'est non seulement parce qu'il a été demandé par les employeurs, mais aussi parce qu'il a vocation à être utilisé.
Aujourd'hui, les entreprises provisionnent forcément les sommes relevant d'un compte épargne-temps. Mais nombre d'entre elles provisionnent également des jours de RTT. Nous leur offrons en plus de la simplicité en termes d'organisation, ce qu'elles apprécient.
Mme Annie David. Évidemment !
Mme Christine Boutin, ministre. Chacun, employeur comme salarié, pourra donc faire référence à ce texte pour instaurer au sein de l'entreprise un dialogue renforcé, susceptible d'engendrer davantage de pouvoir d'achat. Et vous savez combien M. Xavier Bertrand est attaché à la réalité, à la sincérité et à la profondeur du dialogue social.
Ainsi un ouvrier au SMIC qui monétiserait cinq jours de RTT verrait-il sa rémunération augmenter d'environ 370 euros, soit 340 euros net, et de 740 euros pour dix jours de RTT.
Mme Annie David. Par an ! Cela correspond à 70 euros pas mois : ce n'est rien !
Mme Christine Boutin, ministre. Un cadre payé 3 800 euros environ par mois qui monétiserait dix jours de RTT percevrait 1 950 euros de salaire en plus, soit près de 1 000 euros pour cinq jours.
Pour l'employeur, les exonérations de cotisations patronales seront suffisamment attractives pour qu'un jour de RTT majoré coûte moins cher qu'une journée normale. Ainsi, pour un salarié payé deux fois le SMIC, soit 2 600 euros, une journée de RTT revient actuellement 170 euros à l'employeur avec les charges, sans les majorations, contre 148 euros avec la majoration de 25 % et les exonérations prévues par ce texte.
M. Nicolas About, rapporteur. Et la sécurité sociale ?
Mme Christine Boutin, ministre. Je rappelle que les jours de RTT concernent 38 % des salariés, soit près de 7 millions de Français, les comptes épargne-temps 6 % des salariés, soit plus de 1 million de Français, les forfaits-jour près de 2 millions de Français.
Ce sont donc des mesures dont pourront bénéficier de nombreux salariés, de l'ouvrier jusqu'au cadre. Voilà une réponse concrète et précise à la question du pouvoir d'achat.
Enfin, je tiens à souligner les apports de la représentation nationale à ce dispositif.
L'examen du texte à l'Assemblée nationale avait permis d'améliorer celui-ci, notamment en portant à six mois la période couverte par les possibilités de rachat de jours de RTT et en supprimant le plafond de dix jours qui encadrait cette disposition. Le Sénat a encore consolidé cette approche en proposant de prolonger le dispositif jusqu'au 31 décembre 2009, ce qui a été retenu par la commission mixte paritaire réunie mardi dernier.
La deuxième mesure permettra de faire profiter plus rapidement les salariés des sommes dont ils disposent au titre de la participation, qu'ils travaillent à temps complet ou à temps partiel.
Ce déblocage pourra également avoir lieu sur demande du salarié, ce qui lui permettra de disposer de sommes pouvant aller jusqu'à 10 000 euros en fonction de son épargne accumulée. Ce retrait ne sera soumis ni aux cotisations sociales ni à l'impôt sur le revenu, mais restera soumis à la CSG et à la CRDS.
En même temps, nous voulons préserver l'épargne salariale investie dans l'entreprise et ne permettre le déblocage de cette épargne qu'après une négociation entre les partenaires sociaux au niveau des entreprises.
Nous sommes également soucieux de préserver les sommes que les salariés ont investies en vue de leur retraite. Ainsi, les sommes investies dans les plans d'épargne pour la retraite collectifs, les PERCO, sont exclues du dispositif, afin de privilégier l'épargne longue.
La moitié des salariés sont aujourd'hui couverts par un accord de participation. Ce dispositif profitera donc au plus grand nombre, car, sur ce point, nous savons que les mesures votées sont très attendues.
Toutefois, nous n'oublions pas non plus les 7 millions de personnes qui travaillent dans les entreprises de moins de cinquante salariés et qui ne sont pas concernées par la participation obligatoire.
Je connais l'attachement politique fort que vous portez à la participation - je pense notamment à Serge Dassault, Isabelle Debré, Catherine Procaccia et Alain Gournac - et je veux vous remercier de la qualité des échanges que nous avons eus à ce sujet.
Pour les entreprises qui ne sont pas soumises à l'accord de participation obligatoire, nous voulons permettre le versement d'une prime exceptionnelle d'un maximum de 1 000 euros, car nous tenons à penser à tous. Les remarques qu'a formulées Mme Annie David sur ce sujet me surprennent donc un peu !
Cette prime sera soumise au régime fiscal de l'intéressement. Sa mise en place se fera dans le cadre du dialogue social et de manière simple : soit par un accord collectif, soit par un référendum d'entreprise.
Je tiens à souligner que cette prime ne se substitue pas à une augmentation de salaire et qu'elle a vocation à être versée à tous les salariés, qu'ils exercent leur activité à temps complet ou à temps partiel.
Par ailleurs, vous avez fait le choix, partagé par le Gouvernement, de prolonger l'exonération totale de redevance audiovisuelle pour les foyers âgés qui ne paient pas l'impôt sur le revenu.
M. Nicolas About, rapporteur. Y renoncer aurait été malvenu !
Mme Christine Boutin, ministre. Je vous en remercie. Là encore, je rappelle - car nous avons trop tendance à l'oublier - qu'il s'agit d'une mesure claire et concrète en faveur du pouvoir d'achat.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'en viens maintenant aux dispositions sur le logement que contient ce projet de loi et auxquelles je porte une attention particulière.
Tout d'abord, les loyers seront indexés sur le seul indice des prix à la consommation et non plus sur l'indice composite actuel, au sein duquel l'indice des prix à la consommation ne représente que 60 %.
Avec cette évolution, ce sont plus de 600 millions d'euros qui seront économisés pour les locataires tous les ans.
Ce nouvel indice de référence des loyers, dont seule la composition change - le nom demeure -, s'appliquera aux nouveaux contrats de location comme aux baux en cours, sans qu'il soit nécessaire d'établir un avenant au bail.
Il s'appliquera, comme l'actuel indice de référence des loyers, aux locations de logements utilisés à titre de résidence principale, loués vides ou meublés.
Un amendement déposé par la commission des affaires sociales prévoit utilement que cet indice fera l'objet d'une évaluation dans un délai de trois ans. (M. le rapporteur acquiesce.)
Le dépôt de garantie est réduit à un mois, contre deux mois aujourd'hui. Selon nos estimations, avec cette évolution du dépôt de garantie, ce sont également près de 600 millions d'euros qui seront remis en circulation pour le pouvoir d'achat.
Le dispositif législatif adopté est à rapprocher de l'accord sur la généralisation de l'avance Loca-pass à tous les locataires, que j'ai signé avec les partenaires sociaux le 21 décembre dernier. Je vous rappelle que cette convention étend l'avance du dépôt de garantie, qui était jusqu'alors réservée à certaines catégories de personnes, à tous les locataires signant un bail et entrant dans un logement appartenant à un bailleur privé ou social. Cette possibilité repose naturellement sur le volontariat et ne constitue pas une obligation.
Ainsi, le dépôt de garantie peut être versé au bailleur par le locataire ou directement par un organisme du « 1 % logement », le locataire remboursant ensuite à l'organisme prêteur le montant du dépôt de garantie qui lui a été ainsi avancé, sans intérêt, et sur trois ans au maximum.
Cela témoigne bien de notre volonté d'assainir les relations entre locataire et propriétaire : le locataire qui a des revenus modestes a la possibilité de lisser le versement du dépôt de garantie sur trois ans avec un prêt à taux zéro, tandis que le propriétaire perçoit dès le premier mois le dépôt de garantie.
Cette mesure d'extension de l'avance Loca-pass sera applicable dès la promulgation de ce texte et s'appuie sur l'initiative des députés Jérôme Chartier et Frédéric Lefebvre, qui ont accompagné la mise en oeuvre de ce dispositif en proposant un amendement à l'article 5, dont la rédaction a été précisée par un sous-amendement gouvernemental et qui prévoit désormais que « le dépôt de garantie est versé au bailleur directement par le locataire ou par l'intermédiaire d'un tiers ».
Enfin, je veux saluer l'initiative de M. le rapporteur, Nicolas About, qui a proposé un dispositif de nature à rassurer les propriétaires bailleurs : ils en avaient besoin, je le reconnais. Il s'agit du nouvel article 6, prévoyant la généralisation du paiement en tiers-payant pour l'allocation de logement, à l'instar de ce qui existe pour l'aide personnalisée au logement dans le parc social. Cela permettra non seulement d'harmoniser les modalités de versement des aides personnelles au logement, mais aussi de mieux garantir le caractère dédié de l'allocation de logement au paiement des charges de loyer et au remboursement des prêts à l'accession, et de réduire par là même les risques d'impayé.
Cette faculté donnée aux propriétaires privés, qui hésitent parfois à se lancer dans la location sociale, est donc de nature à les rassurer. Je souhaite vraiment qu'ils utilisent cette excellente disposition contenue dans l'amendement déposé par M. About.
Les mesures que je viens d'évoquer enrichissent le texte initial et je me réjouis de ces apports du Parlement, qui répondent aux attentes de nos concitoyens, qu'ils soient locataires ou propriétaires bailleurs.
D'autres dispositifs sont à l'étude et nous nous retrouverons à l'occasion de l'examen d'un projet de loi fondateur en matière de politique du logement, que je souhaite vous proposer au cours du premier semestre de cette année. Il y sera notamment question de la mise en oeuvre d'une garantie généralisée des risques locatifs, à laquelle nous travaillons activement. C'est une priorité.
Ces mesures participent à une évolution des rapports entre les locataires et les bailleurs, et la mise en place rapide de cette garantie généralisée des risques locatifs va constituer un élément majeur de cette réforme. Celle-ci devrait permettre, enfin, de trouver une alternative aux expulsions locatives, qui nous préoccupent tous, quelle que soit notre tendance politique, et placent trop souvent les bailleurs et les locataires dans des situations inextricables.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de la qualité des débats que nous avons eus.
Ce projet de loi répond à une très forte attente de nos concitoyens ; il faut donc bien l'appréhender pour ce qu'il est. Une majorité importante d'entre eux se montre très favorable aux mesures proposées : c'est ce qui ressort des résultats de sondages portant sur les questions que nous étudions ce matin.
Je suis certaine que vous aurez à coeur, vous aussi, d'être à ce rendez-vous que nous vous proposons, au seul bénéfice des Français, dans le respect des engagements pris devant et avec eux. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l'article 42, alinéa 12, du règlement, lorsqu'il examine après l'Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, le Sénat se prononce par un seul vote sur l'ensemble du texte.
Je donne lecture du texte de la commission mixte paritaire.
Article 1er
(Texte du Sénat)
I. - Par exception aux dispositions du II de l'article 4 de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005 portant réforme de l'organisation du temps de travail dans l'entreprise :
1° Le salarié, quelle que soit la taille de l'entreprise, peut, sur sa demande et en accord avec l'employeur, renoncer à tout ou partie des journées ou demi-journées de repos acquises au 31 décembre 2007 en application de l'article L. 212-9 du code du travail. Les demi-journées ou journées travaillées à la suite de l'acceptation de cette demande donnent lieu à une majoration de salaire au moins égale au taux de majoration de la première heure supplémentaire applicable à l'entreprise. Les heures correspondantes ne s'imputent pas sur le contingent légal ou conventionnel d'heures supplémentaires prévu aux articles L. 212-6 du code du travail et L. 713-11 du code rural.
2° Lorsque l'accord prévu au III de l'article L. 212-15-3 du code du travail ne définit pas les conditions dans lesquelles le salarié qui le souhaite peut, en accord avec le chef d'entreprise, renoncer à une partie de ses jours de repos acquis au titre de périodes antérieures au 31 décembre 2007 en contrepartie d'une majoration de son salaire, le salarié, quelle que soit la taille de l'entreprise, peut adresser une demande individuelle au chef d'entreprise. Le décompte des journées et demi-journées travaillées et de prise des journées ou demi-journées de repos intervient dans les conditions prévues par la convention de forfait mentionnée au même article. La majoration de rémunération, qui ne peut être inférieure à 10 %, est négociée entre le salarié et le chef d'entreprise.
3° a. Le salarié, quelle que soit la taille de l'entreprise, peut, sur sa demande et en accord avec l'employeur, renoncer à tout ou partie des journées ou demi-journées de repos acquises au titre des périodes postérieures au 1er janvier 2008 et jusqu'au 31 décembre 2009 en application de l'article L. 212-9 du code du travail. Les demi-journées ou journées travaillées à la suite de l'acceptation de cette demande donnent lieu à une majoration de salaire au moins égale au taux de majoration de la première heure supplémentaire applicable à l'entreprise. Les heures correspondantes ne s'imputent pas sur le contingent légal ou conventionnel d'heures supplémentaires prévu aux articles L. 212-6 du code du travail et L. 713-11 du code rural.
b. Lorsque l'accord prévu au III de l'article L. 212-15-3 du code du travail ne définit pas les conditions dans lesquelles le salarié qui le souhaite peut, en accord avec le chef d'entreprise, renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d'une majoration de son salaire, le salarié, quelle que soit la taille de l'entreprise, peut, sur sa demande et en accord avec l'employeur, renoncer à une partie de ses jours de repos acquis au titre des périodes postérieures au 1er janvier 2008 et jusqu'au 31 décembre 2009 en contrepartie d'une majoration de son salaire. Le décompte des journées et demi-journées travaillées et de prise des journées ou demi-journées de repos intervient dans les conditions prévues par la convention de forfait mentionnée au même article. La majoration de rémunération, qui ne peut être inférieure à la valeur d'une journée majorée de 10 %, est négociée entre le salarié et le chef d'entreprise.
II. - Lorsque l'accord prévu à l'article L. 227-1 du code du travail ne définit pas les conditions dans lesquelles les droits affectés sur le compte épargne-temps sont utilisés, à l'initiative du salarié, pour compléter la rémunération de celui-ci, le salarié peut, sur sa demande et en accord avec l'employeur, utiliser les droits affectés au 31 décembre 2009 sur le compte épargne-temps pour compléter sa rémunération.
Lorsque les accords prévus à l'article L. 227-1 et au III de l'article L. 212-15-3 du code du travail ont déterminé les conditions et modalités selon lesquelles un salarié peut demander à compléter sa rémunération en utilisant les droits affectés à son compte épargne-temps, ou selon lesquelles un salarié peut renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d'une majoration de son salaire, les demandes portant sur les droits affectés au 31 décembre 2009 sont satisfaites conformément aux stipulations de l'accord.
Toutefois, cette utilisation du compte épargne-temps sous forme de complément de rémunération ne peut s'appliquer à des droits versés sur le compte épargne-temps au titre du congé annuel prévu à l'article L. 223-1 du même code.
III. - Le rachat exceptionnel prévu aux I et deux premiers alinéas du II est exonéré, pour les journées acquises ou les droits affectés au 31 décembre 2007 et rémunérés au plus tard le 30 septembre 2008, de toute cotisation et contribution d'origine légale ou d'origine conventionnelle rendue obligatoire par la loi, à l'exception des contributions définies aux articles L. 136-2 du code de la sécurité sociale et 14 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale. Pour le calcul de l'exonération, le taux de la majoration visée aux 1° et 2° du I est pris en compte dans la limite du taux maximal de majoration des heures supplémentaires applicable dans l'entreprise.
IV. - Les exonérations prévues au III s'appliquent aux demandes des salariés formulées au plus tard le 31 juillet 2008.
Le rachat exceptionnel prévu au I ouvre droit, pour les journées acquises à compter du 1er janvier 2008, au bénéfice des dispositions prévues par l'article 81 quater du code général des impôts et des articles L. 241-17 et L. 241-18 du code de la sécurité sociale au-delà des seuils fixés par ces articles.
Le rachat exceptionnel prévu au III n'ouvre pas droit pour les journées acquises ou les droits affectés au 31 décembre 2007 au bénéfice des dispositions de l'article 81 quater du code général des impôts et des articles L. 241-17 et L. 241-18 du code de la sécurité sociale.
V. - Un bilan de l'application du présent article est transmis au Parlement avant le 1er octobre 2008, permettant de préciser le nombre de jours réellement rachetés dans ce cadre et le nombre de salariés concernés.
VI. - Le présent article s'applique, dans le cadre des dispositions qui le régissent et selon des modalités prévues par décret, aux salariés dont la durée du travail ne relève pas des dispositions du chapitre II du titre Ier du livre II du code du travail ou du chapitre III du titre Ier du livre VII du code rural.
Article 1er bis A
(Texte du Sénat)
I. - Un salarié peut, sur sa demande et en accord avec l'employeur, renoncer à tout ou partie des journées ou demi-journées de repos accordées en application de l'article L. 212-9 ou du III de l'article L. 212-15-3 du code du travail, y compris dans le cadre du rachat exceptionnel prévu au I de l'article 1er de la loi n° du pour le pouvoir d'achat, ainsi qu'aux jours de repos compensateur de remplacement dus en application du II de l'article L. 212-5 du même code, afin de financer le maintien de la rémunération d'un ou plusieurs autres salariés de l'entreprise au titre d'un congé pris en vue de la réalisation d'une activité désintéressée pour le compte d'une oeuvre ou d'un organisme d'intérêt général au sens de l'article 200 du code général des impôts.
Les sommes correspondant à la monétisation des jours mentionnés au premier alinéa sont versées directement par l'entreprise, au nom et pour le compte du salarié, à un fonds spécifique mis en place par celle-ci à l'effet de maintenir la rémunération des salariés concernés dans les conditions prévues au même alinéa. Cette rémunération est soumise à l'impôt sur le revenu et aux cotisations et contributions sociales selon les règles de droit commun applicables aux salaires établis au nom ou dus au titre des bénéficiaires.
II. - Un décret fixe les conditions et modalités d'application du I.
III. - Le I est applicable du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010.
Article 1er ter
(Texte du Sénat)
À titre expérimental et pour une durée de deux ans à compter du 1er janvier 2008, le salarié peut, en accord avec l'employeur, décider que le repos compensateur de remplacement qui lui serait applicable en application du II de l'article L. 212-5 du code du travail ou de l'article L. 713-7 du code rural soit pour tout ou partie converti, à due concurrence, en une majoration salariale dont le taux ne peut être inférieur à celui qui lui serait applicable en application du I des articles L. 212-5 du code du travail ou L. 713-6 du code rural.
Les I à IX, XII et XIII de l'article 1er de la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat s'appliquent aux rémunérations ainsi versées. Cette expérimentation fera l'objet d'un bilan avant le 31 décembre 2009.
Article 2
(Texte du Sénat)
I. - Les droits au titre de la participation aux résultats de l'entreprise qui ont été affectés au plus tard le 31 décembre 2007 en application de l'article L. 442-5 du code du travail sont négociables ou exigibles avant l'expiration des délais prévus aux articles L. 442-7 et L. 442-12 du même code, sur simple demande du bénéficiaire pour leur valeur au jour du déblocage.
Dans les entreprises ayant conclu un accord dans les conditions prévues à l'article L. 442-6 du même code, l'application des dispositions de l'alinéa précédent à tout ou partie de la part des sommes versées aux salariés au titre de la participation aux résultats de l'entreprise supérieure à la répartition d'une réserve spéciale de participation calculée selon les modalités définies à l'article L. 442-2 du même code est subordonnée à un accord négocié dans les conditions prévues aux articles L. 442-10 et L. 442-11 du même code.
Lorsque l'accord de participation prévoit l'acquisition de titres de l'entreprise ou d'une entreprise qui lui est liée au sens du deuxième alinéa de l'article L. 444-3 du code du travail ou de parts ou d'actions d'organismes de placement collectif en valeurs mobilières relevant des articles L. 214-40 et L. 214-40-1 du code monétaire et financier, ou l'affectation des sommes à un fonds que l'entreprise consacre à des investissements en application du 2° de l'article L. 442-5 du code du travail, le déblocage de ces titres, parts, actions ou sommes est subordonné à un accord négocié dans les conditions prévues aux articles L. 442-10 et L. 442-11 du code du travail. Cet accord peut prévoir que le versement ou la délivrance de certaines catégories de droits peut n'être effectué que pour une partie des avoirs en cause.
II. - Le salarié peut demander le déblocage de tout ou partie des titres, parts, actions ou sommes mentionnés au I. Il doit être procédé à ce déblocage en une seule fois. La demande doit être présentée par le salarié au plus tard le 30 juin 2008.
III. - Les sommes versées au salarié au titre du I ne peuvent excéder un plafond global, net de prélèvements sociaux, de 10 000 €.
IV. - Les sommes mentionnées aux I et II bénéficient des exonérations prévues à l'article L. 442-8 du code du travail.
V. - Le présent article ne s'applique pas aux droits à participation affectés à un plan d'épargne pour la retraite collectif prévu par l'article L. 443-1-2 du même code.
VI. - Dans un délai de deux mois après la publication de la présente loi, l'employeur informe les salariés des droits dérogatoires créés par l'application du présent article.
Article 2 bis
(Texte du Sénat)
L'article 15 de la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006 pour le développement de la participation et de l'actionnariat salarié et portant diverses dispositions d'ordre économique et social est ainsi modifié :
1° Les mots : « Dans un délai d'un an suivant la date de promulgation de la présente loi » sont remplacés par les mots : « Avant le 30 juin 2008 » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Ce rapport examine, notamment, dans quelles conditions juridiques leurs agents pourraient être intéressés aux résultats et aux performances, en particulier les économies de gestion réalisées. Il présente les mesures prises ou envisagées dans la fonction publique d'État, la fonction publique hospitalière, la fonction publique territoriale et le secteur public. »
Article 4
(Texte du Sénat)
I. - Les deux premières phrases du deuxième alinéa du d de l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :
« L'augmentation du loyer qui en résulte ne peut excéder la variation d'un indice de référence des loyers publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques chaque trimestre et qui correspond à la moyenne, sur les douze derniers mois, de l'évolution des prix à la consommation hors tabac et hors loyers. »
I bis. - La seconde phrase du deuxième alinéa de l'article L. 411-11 du code rural est ainsi rédigée :
« Ce loyer ainsi que les maxima et les minima sont actualisés, chaque année, selon la variation de l'indice de référence des loyers publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques chaque trimestre et qui correspond à la moyenne sur les douze derniers mois de l'évolution des prix à la consommation hors tabac et hors loyers. »
II. - Le I est applicable aux contrats en cours. La valeur moyenne sur quatre trimestres de l'indice de référence des loyers résultant de l'article 35 de la loi n° 2005-841 du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale est remplacée par la valeur de l'indice de référence des loyers issu de la présente loi à la date de référence de ces contrats.
III. - L'indice défini au I fait l'objet d'une évaluation dans un délai de trois ans à compter de la publication de la présente loi. Cette évaluation porte notamment sur les effets de cet indice sur le marché du logement et la construction de nouveaux logements.
IV. - L'article 7 de la loi n° 84-595 du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière est ainsi rédigé :
« Art. 7. - La révision prévue aux 2° et 5° de l'article 5 ne peut excéder la variation d'un indice de référence des loyers publié par l'Institut national de la statistique et des études économiques chaque trimestre et qui correspond à la moyenne sur les douze derniers mois de l'évolution des prix à la consommation hors tabac et hors loyers. »
V. - Le IV est applicable aux contrats en cours. La variation de l'indice national mesurant le coût de la construction établi suivant des éléments de calcul fixés par le décret n° 85-487 du 3 mai 1985 relatif au calcul de l'indice national prévu à l'article 7 de la loi n° 84-595 du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière est remplacée par la valeur de l'indice de référence des loyers issu de la présente loi à la date de référence de ces contrats.
Article 6
(Texte du Sénat)
I. - L'article L. 553-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le II est ainsi rédigé :
« II. - L'allocation de logement prévue à l'article L. 542-1 est versée, s'il le demande, au prêteur lorsque l'allocataire est emprunteur et au bailleur lorsque l'allocataire est locataire.
« Le prêteur ou le bailleur déduit l'allocation du montant du loyer et des dépenses accessoires de logement ou de celui des charges de remboursement. Il porte cette déduction à la connaissance de l'allocataire. Lorsque le bailleur ou le prêteur ne pratique pas cette déduction, l'allocation est versée à l'allocataire.
« L'allocation ne peut être versée au bailleur que si le logement répond aux exigences prévues au 2° de l'article L. 542-2. Pour les logements compris dans un patrimoine d'au moins dix logements dont le propriétaire ou le gestionnaire est un organisme d'habitations à loyer modéré, une société d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux ou l'établissement public de gestion immobilière du Nord-Pas-de-Calais et les sociétés à participation majoritaire de cet établissement, le bailleur peut continuer à percevoir l'allocation s'il s'engage par convention avec l'État à rendre le logement décent dans un délai fixé par cette convention. Le bailleur adresse une copie de la convention aux organismes payeurs de l'allocation de logement. » ;
2° Dans le premier alinéa du III, le mot : « dernier » est remplacé par le mot « deuxième ».
II. - L'article L. 835-2 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 835-2. - La créance du bénéficiaire de l'allocation de logement est incessible et insaisissable.
« L'allocation est versée, s'il le demande, au prêteur lorsque l'allocataire est emprunteur et au bailleur lorsque l'allocataire est locataire.
« Le prêteur ou le bailleur déduit l'allocation du montant du loyer et des dépenses accessoires de logement ou de celui des charges de remboursement. Il porte cette déduction à la connaissance de l'allocataire. Lorsque le bailleur ou le prêteur ne pratique pas cette déduction, l'allocation est versée à l'allocataire.
« L'allocation ne peut être versée au bailleur que si le logement répond aux exigences prévues au premier alinéa de l'article L. 831-3. Pour les logements compris dans un patrimoine d'au moins dix logements dont le propriétaire ou le gestionnaire est un organisme d'habitations à loyer modéré, une société d'économie mixte de construction et de gestion de logements sociaux ou l'établissement public de gestion immobilière du Nord-Pas-de-Calais et les sociétés à participation majoritaire de cet établissement, le bailleur peut continuer à percevoir l'allocation s'il s'engage par convention avec l'État à rendre le logement décent dans un délai fixé par cette convention. Le bailleur adresse une copie de la convention aux organismes payeurs de l'allocation de logement.
« Lorsque l'organisme payeur a versé une allocation indue et que le bailleur ou le prêteur justifie avoir procédé à la déduction prévue au troisième alinéa, le trop-perçu est recouvré auprès de l'allocataire. »
M. le président. Sur les articles de ce texte, je ne suis saisi d'aucun amendement.
Quelqu'un demande-t-il la parole sur l'un de ces articles ?
Le vote est réservé.
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.
M. Robert del Picchia. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs mois, le Président de la République a fait du pouvoir d'achat l'un des axes prioritaires de sa politique.
Estimant qu'une politique de revalorisation du pouvoir d'achat ne peut passer que par la réhabilitation du travail, le Gouvernement a fait adopter la loi TEPA, qui permet la défiscalisation des heures supplémentaires.
Le présent texte poursuit cette logique en donnant au salarié la possibilité de racheter, s'il le souhaite, des jours de RTT. Le dispositif, attractif pour l'employeur grâce à des exonérations de cotisations et incitatif pour le salarié, qui bénéficiera d'une majoration de salaire, respecte la liberté de choix de l'un et l'autre.
Une deuxième mesure en faveur du pouvoir d'achat est le déblocage anticipé de la participation, qui va permettre aux ménages d'utiliser librement une partie de leur épargne. Le Gouvernement s'est également soucié de la situation des salariés qui ne pourront profiter de cette mesure, en leur donnant la possibilité de bénéficier d'une prime de 1 000 euros, exonérée de cotisations sociales.
Le projet de loi comprend, par ailleurs, deux mesures se rapportant au secteur du logement. À ce sujet, madame la ministre, vous venez d'évoquer un nouveau projet de loi, qui sera soumis au Sénat. Nous serons bien évidemment heureux de l'étudier ultérieurement.
Revenons-en aux deux dispositions que je viens d'évoquer. Tout d'abord, l'indexation des loyers sur le seul indice des prix à la consommation permettra de ralentir le rythme d'augmentation des loyers ; ensuite, la réduction du dépôt de garantie de deux mois à un mois de loyer aura des effets bénéfiques immédiats sur la trésorerie des ménages.
Il était important d'inclure ces dispositions sur le logement. Je rappelle, en effet, que si, dans les années soixante-dix, le logement représentait 15 % des dépenses de consommation des ménages, les Français lui consacrent aujourd'hui un quart de leur budget.
Nous nous réjouissons de la pleine entente qui a caractérisé les travaux de la commission mixte paritaire. En accord avec nos collègues députés, nous avons conservé l'ensemble des dispositions adoptées par les deux assemblées.
Sans vouloir citer toutes les améliorations apportées au texte, je rappelle que l'Assemblée nationale a introduit un article permettant de maintenir, en 2008, le dégrèvement de redevance audiovisuelle pour les personnes âgées de plus de soixante-cinq ans dont les revenus sont modestes.
En ce qui concerne le rachat des RTT - sujet dont nous avons beaucoup parlé ce matin -, les députés ont supprimé la limite fixée à dix jours de RTT qui figurait initialement dans le texte. Il était important par ailleurs, de prévoir un bilan de l'application du dispositif, qui permettra de préciser le nombre de jours réellement rachetés et de connaître le nombre de salariés qui auront bénéficié de la mesure.
Je citerai encore, au sujet de l'évolution des loyers, la mise en place d'une évaluation du nouvel indice.
Enfin, le versement du dépôt de garantie par tout moyen à la convenance du locataire ayant été autorisé, le développement du LOCA-PASS a été encouragé.
Lors de son examen par la Haute Assemblée, le projet de loi a également été amélioré. Je tiens à remercier tout particulièrement les rapporteurs pour la qualité de leurs propositions. Leurs interrogations ont également contribué à alimenter nos débats et à prendre acte des engagements du Gouvernement.
La commission des affaires sociales a complété et précisé le dispositif de rachat des RTT. Les membres de mon groupe se réjouissent qu'un amendement de l'un d'entre eux, Mme Procaccia, ait permis d'étendre le dispositif en élargissant la période de rachat jusqu'au 31 décembre 2009.
En outre, le texte était très favorable aux locataires. La commission des affaires sociales a donc proposé une mesure en faveur des propriétaires, ce dont je vous remercie, monsieur le rapporteur. En effet, elle a relevé que certains locataires refusaient de payer leur loyer tout en percevant une allocation. Dorénavant, les bailleurs ou les prêteurs pourront percevoir directement l'allocation de logement à caractère social et l'allocation de logement à caractère familial, qui étaient versées jusqu'à présent aux locataires. De plus, nous avons bien noté la volonté du Gouvernement d'aboutir prochainement à un système de garantie des risques locatifs.
Je terminerai mon propos en saluant la détermination du Gouvernement, qui a souhaité apporter rapidement plusieurs mesures simples et concrètes en faveur du pouvoir d'achat des Français, ce que nous attendions.
Bien évidemment, comme je le disais tout à l'heure à Mme David, en m'avançant quelque peu bien qu'il n'y ait aucun suspens en la matière, les membres de mon groupe voteront en faveur de ce projet de loi.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l'article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l'ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
(Le projet de loi est adopté.)
M. le président. Je constate que le projet de loi est adopté définitivement.
4
Accord relatif à l'organisation internationale ITER
Adoption d'un projet de loi en procédure d'examen simplifiée
M. le président. L'ordre du jour appelle l'examen du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Organisation internationale ITER pour l'énergie de fusion relatif au siège de l'Organisation ITER et aux privilèges et immunités de l'Organisation ITER sur le territoire français (153, 173).
Pour ce projet de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure simplifiée.
Article unique
Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Organisation internationale ITER pour l'énergie de fusion relatif au siège de l'Organisation ITER et aux privilèges et immunités de l'Organisation ITER sur le territoire français (ensemble une annexe), signé à Saint-Paul-lez-Durance (Cadarache) le 7 novembre 2007, et dont le texte est annexé à la présente loi.
M. le président. Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à quinze heures.)
M. le président. La séance est reprise.
5
Candidatures à une commission mixte paritaire
M. le président. J'informe le Sénat que la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale m'a fait connaître qu'elle a d'ores et déjà procédé à la désignation des candidats qu'elle présentera si le Gouvernement demande la réunion d'une commission mixte paritaire en vue de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion sur le projet de loi relatif à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental actuellement en cours d'examen.
Ces candidatures ont été affichées pour permettre le respect du délai réglementaire.
6
Rétention de sûreté
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental (nos 158, 174).
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'amendement n° 16 rectifié au sein de l'article 1er, dont je rappelle les termes.
Article 1er (suite)
I. - Après l'article 706-53-12 du code de procédure pénale, il est inséré un chapitre III ainsi rédigé :
« CHAPITRE III
« De la rétention de sûreté
« Art. 706-53-13. - Lorsque la juridiction a expressément prévu dans sa décision le réexamen de la situation de la personne qu'elle a condamnée à une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à quinze ans, pour l'un des crimes suivants commis sur un mineur :
« 1° Meurtre ou assassinat ;
« 2° Torture ou actes de barbarie ;
« 3° Viol ;
« 4° Enlèvement ou séquestration,
« cette personne peut, à compter du jour où la privation de liberté prend fin, faire l'objet d'une rétention de sûreté lorsqu'elle présente, en raison d'un trouble grave de la personnalité, une particulière dangerosité caractérisée par la probabilité très élevée de commettre à nouveau l'une de ces infractions.
« Cette mesure consiste dans le placement de la personne intéressée dans un centre socio-médico-judiciaire de sûreté dans lequel lui est proposée, de façon permanente, une prise en charge médicale et sociale destinée à permettre la fin de la rétention.
« Le présent article est également applicable aux personnes condamnées à une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour les crimes, commis sur une victime majeure, d'assassinat ou de meurtre aggravé, de torture ou actes de barbarie aggravés, de viol aggravé ou d'enlèvement ou de séquestration aggravé, prévus par les articles 221-2, 221-3, 221-4, 222-2, 222-3, 222-4, 222-5, 222-6, 222-24, 222-25, 222-26, 224-2, 224-3 et 224-5-2 du code pénal.
« Art. 706-53-14. - La situation des personnes mentionnées à l'article 706-53-13 est examinée, au moins un an avant la date prévue pour leur libération, par la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté prévue par l'article 763-10, afin d'évaluer leur dangerosité.
« À cette fin, cette commission rassemble tous les éléments d'information utiles et fait procéder à une expertise médicale, réalisée par deux experts, ainsi qu'aux enquêtes nécessaires.
« Si la commission conclut à la particulière dangerosité du condamné, elle peut proposer, par un avis motivé, que celui-ci fasse l'objet d'une rétention de sûreté dans le cas où :
« 1° Les obligations résultant de l'inscription dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes, ainsi que les obligations résultant d'une injonction de soins ou d'un placement sous surveillance électronique mobile, susceptibles d'être prononcés dans le cadre d'un suivi socio-judiciaire ou d'une surveillance judiciaire, apparaissent insuffisantes pour prévenir la commission des crimes mentionnés à l'article 706-53-13 ;
« 2° Et si cette rétention constitue ainsi l'unique moyen de prévenir la commission, dont la probabilité est très élevée, de ces infractions.
« Si la commission estime que les conditions de la rétention de sûreté ne sont pas remplies mais que le condamné paraît néanmoins dangereux, elle renvoie le dossier au juge de l'application des peines pour qu'il apprécie l'éventualité d'un placement sous surveillance judiciaire.
« Art. 706-53-15. - La décision de rétention de sûreté est prise par la commission régionale de la rétention de sûreté territorialement compétente. Cette commission est composée d'un président de chambre et de deux conseillers de la cour d'appel, désignés par le premier président de cette cour pour une durée de trois ans.
« Cette commission est saisie à cette fin par le procureur général, sur proposition de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté prévue par l'article 763-10, au moins trois mois avant la date prévue pour la libération du condamné. Elle statue après un débat contradictoire au cours duquel le condamné est assisté par un avocat choisi ou commis d'office. La contre-expertise sollicitée par le condamné est de droit.
« La décision de rétention de sûreté doit être spécialement motivée au regard des dispositions de l'article 706-53-14.
« Cette décision est exécutoire immédiatement à l'issue de la peine du condamné.
« Elle peut faire l'objet d'un recours devant la Commission nationale de la rétention de sûreté, composée de trois conseillers à la Cour de cassation désignés pour une durée de trois ans par le premier président de cette cour.
« La commission nationale statue par une décision motivée qui n'est pas susceptible de recours, à l'exception d'un pourvoi devant la Cour de cassation.
« Art. 706-53-16. - La décision de rétention de sûreté est valable pour une durée d'un an.
« La rétention de sûreté peut être renouvelée selon les modalités prévues par l'article 706-53-15 et pour la même durée, dès lors que les conditions prévues par l'article 706-53-14 sont toujours remplies.
« Art. 706-53-17. - Supprimé.
« Art. 706-53-18. - La personne qui fait l'objet d'une rétention de sûreté peut demander à la commission régionale de la rétention de sûreté qu'il soit mis fin à cette mesure. Il est mis fin d'office à la rétention si cette commission n'a pas statué dans un délai de trois mois à compter de la réception de la demande. En cas de rejet de la demande, aucune autre demande ne peut être déposée avant l'expiration d'un délai de trois mois.
« La décision de cette commission peut faire l'objet du recours prévu à l'article 706-53-15.
« Art. 706-53-19. - La commission régionale de la rétention de sûreté ordonne d'office qu'il soit mis fin à la rétention de sûreté dès lors que les conditions prévues par l'article 706-53-14 ne sont plus remplies.
« Art. 706-53-20. - Si la rétention de sûreté n'est pas prolongée ou s'il y est mis fin en application des articles 706-53-18 ou 706-53-19 et si la personne présente des risques de commettre les infractions mentionnées à l'article 706-53-13, la commission régionale de la rétention de sûreté peut, par la même décision et après débat contradictoire, soumettre celle-ci pendant une durée d'un an aux obligations résultant du placement sous surveillance électronique mobile conformément aux articles 763-12 et 763-13 ainsi qu'à des obligations similaires à celles prévues dans le cadre de la surveillance judiciaire mentionnées à l'article 723-30, et notamment à une injonction de soins prévue par les articles L. 3711-1 à L. 3711-5 du code de la santé publique.
« À l'issue de ce délai, la commission régionale peut prolonger tout ou partie de ces obligations, pour une même durée, par une décision prise après un débat contradictoire au cours duquel le condamné est assisté par un avocat choisi ou commis d'office. Cette décision peut faire l'objet du recours prévu à l'article 706-53-15. Ces obligations peuvent à nouveau être prolongées pour une même durée et selon les mêmes modalités.
« Si la méconnaissance par la personne des obligations qui lui sont imposées fait apparaître que celle-ci présente à nouveau une particulière dangerosité caractérisée par le risque particulièrement élevé de commission des infractions mentionnées à l'article 706-53-13, le président de la commission régionale peut ordonner en urgence son placement provisoire dans un centre socio-médico-judiciaire de sûreté. Ce placement doit être confirmé dans un délai maximal de trois mois par la commission régionale statuant conformément à l'article 706-53-15, après avis favorable de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, à défaut de quoi il est mis fin d'office à la rétention.
« Art. 706-53-21. - Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables à la personne qui bénéficie d'une libération conditionnelle, sauf si cette mesure a fait l'objet d'une révocation.
« Lorsque la rétention de sûreté est ordonnée à l'égard d'une personne ayant été condamnée à un suivi socio-judiciaire, celui-ci s'applique, pour la durée fixée par la décision de condamnation, à compter du jour où la rétention prend fin.
« Art. 706-53-22. - Un décret en Conseil d'État précise les conditions et les modalités d'application du présent chapitre.
« Ce décret précise les conditions dans lesquelles s'exercent les droits des personnes retenues dans un centre socio-médico-judicaire de sûreté, en matière notamment de visites, de correspondances, d'exercice du culte et de permissions de sortie sous escorte ou sous surveillance électronique mobile. Il ne peut apporter à l'exercice de ces droits que les restrictions strictement nécessaires aux exigences de l'ordre public.
« La liste des cours d'appel dans lesquelles siègent les commissions régionales prévues au premier alinéa de l'article 706-53-15 et le ressort de leur compétence territoriale sont fixés par arrêté du garde des sceaux. »
I bis. - L'article 362 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les cas prévus par l'article 706-53-13, elle délibère aussi pour déterminer s'il y a lieu de se prononcer sur le réexamen de la situation du condamné avant l'exécution de la totalité de sa peine conformément à l'article 706-53-14. »
II. - L'article 717-1 du même code est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Deux ans avant la date prévue pour la libération d'un condamné susceptible de relever des dispositions de l'article 706-53-13, celui-ci est convoqué par le juge de l'application des peines auprès duquel il justifie des suites données au suivi médical et psychologique adapté qui a pu lui être proposé en application des deuxième et troisième alinéas du présent article. Au vu de ce bilan, le juge de l'application des peines lui propose, le cas échéant, de suivre un traitement dans un établissement pénitentiaire spécialisé.
« Les agents et collaborateurs du service public pénitentiaire transmettent aux personnels de santé chargés de dispenser des soins aux détenus les informations utiles à la mise en oeuvre des mesures de protection des personnes. »
III. - L'article 723-37 du même code devient l'article 723-39 et, après l'article 723-36 du même code, il est rétabli un article 723-37 et inséré un article 723-38 ainsi rédigés :
« Art. 723-37. - Lorsque le placement sous surveillance judiciaire a été prononcé à l'encontre d'une personne faisant l'objet de l'une des condamnations visées à l'article 706-53-13, la commission régionale mentionnée à l'article 706-53-15 peut, selon les modalités prévues par cet article, décider d'en prolonger les effets, au-delà de la limite prévue à l'article 723-29, pour une durée d'un an.
« La commission régionale de la rétention de sûreté est saisie par le juge de l'application des peines ou le procureur de la République six mois avant la fin de la mesure.
« Cette prolongation ne peut être ordonnée, après expertise médicale constatant la persistance de la dangerosité, que dans le cas où :
« 1° Les obligations résultant de l'inscription dans le fichier judicaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes apparaissent insuffisantes pour prévenir la commission des crimes mentionnés à l'article 706-53-13 ;
« 2° Et si cette prolongation constitue l'unique moyen de prévenir la commission, dont la probabilité est très élevée, de ces infractions.
« Cette prolongation peut être renouvelée selon les mêmes modalités et pour la même durée si les conditions prévues par le présent article demeurent remplies.
« Les articles 723-30, 723-33 et 723-34 sont applicables à la personne faisant l'objet de cette prolongation.
« Les dispositions du dernier alinéa de l'article 706-53-20 sont applicables en cas de méconnaissance par la personne de ses obligations.
« Art. 723-38. - Lorsque le placement sous surveillance électronique mobile a été prononcé dans le cadre d'une surveillance judiciaire à l'encontre d'une personne faisant l'objet de l'une des condamnations visées à l'article 706-53-13, il peut être renouvelé tant que la mesure de surveillance judiciaire est prolongée. »
IV. - L'article 763-8 du même code est ainsi rétabli :
« Art. 763-8. - Lorsqu'un suivi socio-judiciaire a été prononcé à l'encontre d'une personne faisant l'objet de l'une des condamnations visées à l'article 706-53-13, la commission régionale de la rétention de sûreté peut, selon les modalités prévues par l'article 706-53-15, décider d'en prolonger les effets, au-delà de la durée prononcée par la juridiction de jugement et des limites prévues à l'article 131-36-1 du code pénal, pour une durée d'un an.
« Les dispositions des deuxième à cinquième et septième alinéas de l'article 723-37 du présent code sont applicables, ainsi que celles de l'article 723-38. »
M. le président. L'amendement n° 16 rectifié, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après les mots :
traitement dans
rédiger comme suit la fin de la dernière phrase du deuxième alinéa du II de cet article :
l'un des établissements pénitentiaires spécialisés dont la liste est précisée par décret.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, le projet de loi prévoit que deux ans avant la date de la libération le juge de l'application des peines peut décider au vu du dossier médical et psychologique du condamné de lui proposer de recevoir un traitement dans un établissement pénitentiaire spécialisé.
Outre que cette initiative intervient bien tardivement - mais l'amendement n° 14 de la commission a déjà répondu à cette objection -, la nature de l'établissement spécialisé dont il est question demeure indécise.
En effet, aux termes de l'article 717-1 du code de procédure pénale, les personnes condamnées pour une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru doivent actuellement exécuter leur peine dans des « établissements pénitentiaires permettant d'assurer un suivi médical et psychologique adapté ».
Or, la définition précise de ces établissements n'a jamais été apportée et il semble que l'administration pénitentiaire considère peu ou prou tous les établissements pénitentiaires comme étant à même de dispenser un suivi médical et psychologique adapté. De nombreuses visites dans les prisons laissent pourtant penser que tel n'est pas le cas.
Aussi, nous proposons, par cet amendement, d'encourager l'administration à définir une liste précise d'établissements spécifiques et ainsi d'inciter sur le fond à une véritable spécialisation de certaines structures.
Lors d'un débat récent avec un psychiatre, celui-ci m'a dit que l'une des solutions serait peut-être, après que l'évaluation a pu repérer la dangerosité d'un certain nombre de personnes condamnées - cette première évaluation dans l'année qui suit leur incarcération -, de faire en sorte que les personnes considérées comme étant particulièrement dangereuses fassent l'objet d'un regroupement afin de pouvoir être suivies dans un établissement adapté. Il ajoutait - il n'engageait que lui - que si nous prenions ce type d'initiative, la rétention de sûreté deviendrait inutile parce que le traitement permettrait de faire disparaître la dangerosité à la fin de la peine.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux, ministre de la justice. Je comprends tout à fait l'objectif de cet amendement, qui permet de savoir où sont les structures et d'inciter à en créer d'autres.
Cependant, dans les faits, les établissements se sont spécialisés.
Dans certains établissements, le personnel est volontaire. Si je prends le cas de Melun, cela s'est fait avec des dispositifs expérimentaux mais aussi avec la volonté du secteur sanitaire local de développer des structures pluridisciplinaires ou de créer les fameuses commissions pluridisciplinaires qui, aujourd'hui, ne sont qu'expérimentales.
Si l'on est obligé d'attendre un arrêté ou un décret, cela rigidifie la situation en freinant les bonnes volontés. Si l'on veut placer des détenus adaptés à ces structures, cela empêche de le faire rapidement parce qu'il faudra attendre que le décret ou l'arrêté reconnaisse l'établissement concerné comme étant spécialisé. Il est vrai qu'il faudra un jour arriver à spécialiser les établissements.
Cela permettrait aussi - cette mesure figurera également dans la loi pénitentiaire - d'avoir des statistiques sur la récidive, de savoir pourquoi certains établissements ont de meilleurs résultats en matière de réinsertion, sans remettre en cause les personnels, mais simplement en étudiant les structures qu'ils mettent en place à titre expérimental, car toutes les innovations ou expérimentations ne remontent pas forcément jusqu'à la Chancellerie.
Pour ma part, je comprends tout à fait l'intérêt d'établir par arrêté ou par décret une liste de tous les établissements spécialisés, sauf que cela peut freiner les bonnes volontés et accroître les délais. À Melun, par exemple, cela s'est fait de manière expérimentale, sur la bonne volonté et très rapidement. Si l'on avait été obligé de passer par un décret, il aurait fallu attendre l'avis du ministère de la santé et cela aurait ralenti la spécialisation.
En résumé, il s'agit d'un amendement incitatif, qui permet de voir l'évolution et donc d'évaluer. Comme, dans les faits, nous ne sommes pas encore totalement au point, cela permet également d'encourager les dispositifs expérimentaux et les bonnes volontés.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Je comprends les objections de Mme le garde des sceaux. Toutefois, le problème que nous posons est réel. Il m'est arrivé de lire que tel établissement - je pense à Mauzac et à Casabianda - était un établissement adapté. Je me suis rendu aussi bien à Casabianda qu'à Mauzac. J'ai pu voir, en effet, l'intérêt du régime qui était appliqué aux détenus, un régime très souple, une assez grande liberté dans l'enceinte pénitentiaire, liberté très respectueuse de la dignité des personnes. Mais en dehors de cela, ce ne sont pas des établissements spécialisés pour un traitement psychologique ou psychiatrique adapté. Les horaires des psychiatres y étaient « homéopathiques », c'est le moins que l'on puisse dire.
En revanche, je comprends que vous ayez besoin d'un peu de temps pour organiser les choses. (Mme le garde des sceaux s'exclame.) Je n'ai pas vu cité Melun qui est spécialisé, j'ai vu cités d'autres établissements qui ne le sont pas. Ce n'est pas de chance !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est le paradoxe !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Madame le garde des sceaux, je préfère retenir de votre intervention le fait que vous considérez que cela pose un vrai problème, que cela permettrait d'aller vers une spécialisation des établissements et puisque nous allons nous revoir très prochainement avec le projet de loi pénitentiaire, je prends la responsabilité de retirer cet amendement.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Attendre, toujours attendre la loi pénitentiaire...
M. le président. L'amendement n° 16 rectifié est retiré.
Je vous donne néanmoins la parole, monsieur Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. J'aurais pu reprendre cet amendement, monsieur le président.
Je suis très étonné de l'argumentation de Mme le garde des sceaux. En effet, l'un des nombreux problèmes que pose ce texte, c'est que l'on n'a aucune structure pour évaluer sérieusement la dangerosité criminologique, et encore moins pour la traiter. M. le rapporteur attire notre attention sur le fait qu'il faudrait peut-être se donner les moyens intellectuels et matériels d'appliquer les textes que l'on vote.
On me dit qu'il faut attendre que le décret... Je croyais que nous étions pressés, qu'il y allait avoir de nombreuses victimes si on n'agissait pas tout de suite. Si la situation est urgente, on peut prendre les décrets et donner un minimum de moyens. L'argumentation du Gouvernement est vraiment très étonnante.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Je me reconnais dans les propos de mon collègue Pierre-Yves Collombat. J'ajouterai simplement que l'on n'ouvre pas un établissement spécialisé tous les mois, malheureusement d'ailleurs compte tenu de la situation de notre réseau en France.
Par conséquent, l'argument des délais ne me semble pas très convaincant. Compte tenu du nombre d'ouvertures d'établissement, on doit avoir le temps de fixer par arrêté la liste de ces établissements spécialisés, sans que cela porte préjudice aux malades qui attendent une prise en charge.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame le garde des sceaux, je n'ai pas compris vos propos de la même façon, même si le résultat est le même. J'ai cru comprendre que ce n'était pas la peine d'établir cette liste car, dans la pratique, les établissements se spécialisent, que le fait d'attendre une reconnaissance administrative ne faisait qu'accroître la bureaucratie...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. ...et que cela décourageait les bonnes volontés.
Ce n'est pas, me semble-t-il, une bonne façon d'aborder le problème. En effet, ce que nous observons actuellement, c'est qu'il n'y a pas les moyens correspondants à une prise en charge suivie pour les personnes concernées. Il est donc nécessaire de créer des endroits où ce suivi individualisé et cette prise en charge pourront réellement être faits et de concentrer le maximum de moyens correspondants.
Sans approuver pour autant le reste, je considère que l'idée de prévoir des établissements spécialisés, c'est le minimum pour contrebalancer le fait que nous n'en avons pas aujourd'hui.
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Monsieur Collombat, vous avez parlé de l'évaluation de la dangerosité. Aux termes de la loi de 2005, la commission pluridisciplinaire évalue la dangerosité sur la foi d'expertises.
M. Pierre-Yves Collombat. Donnez les moyens !
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Ce que propose M. le rapporteur, c'est d'établir par décret la liste des établissements spécialisés en matière de soins avec une prise en charge sanitaire continue.
Il y a donc deux choses : d'une part, l'évaluation de la dangerosité, qui ne pose pas de problème en soi parce qu'elle existe déjà, et, d'autre part, le programme de soins auquel je suis très favorable.
Madame Borvo Cohen-Seat, je n'ai pas dit qu'il s'agissait de bureaucratie et que donc je m'y opposais. Mais si l'on établit une liste par décret, on fige les établissements. Si on doit affecter demain un détenu considéré comme dangereux et pour lequel il faut une prise en charge spécifique, je crains que l'affectation ne soit retardée au motif qu'il n'y a pas de place dans l'établissement qui est inscrit dans le décret. Je crains également qu'un autre établissement, qui pourrait être aussi adapté, ne le prenne pas en charge car il existe un établissement spécialisé.
Pour autant, je suis favorable à l'objectif visé par cet amendement, parce que cela permet d'identifier clairement les établissements. J'ai parlé tout à l'heure de Melun qui n'est jamais cité, alors que 80% à 90 % des détenus sont des délinquants sexuels lourdement condamnés, récidivistes.
Attendre une modification du décret pour ajouter un établissement sur la liste présente un caractère bureaucratique car les personnels, notamment en ce qui concerne la psychiatrie et la psychologie, pourront décider de ne pas se rendre dans cet établissement au motif qu'ils préféreront travailler dans un établissement reconnu comme étant spécialisé.
Nous donnons la possibilité aux établissements pénitentiaires de signer des conventions et de développer des partenariats avec le secteur psychiatrique local. À cet égard, Melun travaille, grâce à la bonne volonté des uns et des autres, en coordination avec le secteur sanitaire et psychiatrique local, et ce n'est pas M. le président Hyest qui me contredira.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il y a un hôpital psychiatrique à Melun.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Fixer la liste des établissements spécialisés par décret pourra entraîner un retard dans l'affectation des personnels et, donc, dans le travail.
Sur le fond, je le répète, je suis totalement favorable à l'objectif visé par cet amendement, car les établissements seront identifiés. De plus, le travail des magistrats sera facilité pour ce qui concerne l'affectation de certains détenus.
Mais, en l'occurrence, on parle de la rétention de sûreté. Dans l'amendement, il s'agit de deux types d'établissements distincts : d'un côté, les établissements pénitentiaires et, de l'autre, les établissements de rétention, qui sont des hôpitaux.
M. le président. Cette discussion était intéressante, mes chers collègues, mais je vous rappelle que l'amendement n° 16 rectifié a été retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Ces deux amendements sont présentés par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller.
L'amendement n° 44 est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le dernier alinéa du II de cet article :
« Les agents et collaborateurs du service public pénitentiaire ne peuvent transmettre aux personnels de santé chargés de dispenser les soins aux détenus que les informations strictement nécessaires à la mise en oeuvre des mesures de protection des personnes. »
L'amendement n° 46 est ainsi libellé :
Au début du dernier alinéa du II de cet article, ajouter les mots :
Après avoir dûment recueilli le consentement du détenu,
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery pour présenter ces deux amendements.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le président, je souhaiterais présenter en même temps l'amendement no 42, car tous les trois concernent le secret médical.
M. le président. J'appelle donc en discussion l'amendement n° 42, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, et ainsi libellé :
Compléter le II de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« L'article 226-13 du code pénal est applicable aux informations mentionnées à l'alinéa précédent. »
Veuillez poursuivre, madame Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Le dernier alinéa du paragraphe II de cet article porte atteinte au secret médical et est contraire à l'article 72 du code de déontologie. Celui-ci fait obligation au médecin de « veiller à ce que les personnes qui l'assistent dans son exercice soient instruites de leurs obligations en matière de secret professionnel et s'y conforment ».
Ce texte s'applique au personnel administratif et à la secrétaire médicale, lesquels sont donc soumis au secret médical. Il concerne également les agents et collaborateurs du service public pénitentiaire qui ont connaissance du dossier médical du condamné. Ils sont donc tenus de respecter le secret médical dans l'exercice de leurs fonctions, notamment en vertu de l'article 226-13 selon lequel « la révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ». Le projet de loi ne prévoit pas de déroger à cette disposition.
Afin de limiter les informations susceptibles de circuler entre les agents du service public pénitentiaire et le personnel des établissements pénitentiaires spécialisés, il convient de les circonscrire aux seules informations strictement nécessaires à la mise en oeuvre des mesures de protection des personnes condamnées.
Par la même occasion, cet amendement vise à remplacer l'adjectif « utiles » par l'adjectif « nécessaires » qui est juridiquement plus approprié.
Par ailleurs, le principe du respect du secret médical n'est pas absolu : le malade a le pouvoir de délier le praticien du secret médical.
Le consentement du malade à la levée du secret supprime le caractère confidentiel de l'information. En réalité, les informations visées par cet article vont plus loin que celles qui sont relatives à la santé du détenu. Il y a donc là une violation du principe du respect de la vie privée, ce qui constitue une ingérence que seul le consentement du condamné peut justifier.
En se fondant sur cette dérogation, l'amendement n° 46 prévoit que la transmission des informations relatives au condamné sera soumise à son consentement.
Quant à l'amendement n° 42, il tend à limiter le champ des informations relatives au condamné susceptibles d'être transmises, conformément à l'article 226-13 du code pénal.
L'obligation du secret médical a un caractère général et absolu, ce qui interdit toute révélation à un tiers, même s'il s'agit d'un professionnel, lui aussi assujetti au secret.
Il convient, en effet, de rappeler le principe selon lequel la révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est susceptible de poursuites pénales.
Or le dernier alinéa du II ne prévoit aucune articulation entre les dispositions du code pénal et le contenu des informations qui peuvent être transmises. La référence aux « informations utiles » recouvre une variété importante d'informations, qui peuvent être de nature médicale, mais également de nature personnelle.
Cette restriction au droit de transmettre les informations relatives au détenu vise au respect du droit à la vie privée de chacun, garanti par l'article 9 du code civil.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission estime que l'amendement n° 44 restreindrait de manière excessive l'obligation fixée par le projet de loi aux agents et collaborateurs du service public pénitentiaire de transmettre aux personnels de santé les informations utiles à la protection des personnes.
Cette disposition, qui consacre une pratique très courante au sein des établissements pénitentiaires, est d'ailleurs le pendant de la mesure prévue à l'article 8 du projet de loi, qui fixe aux personnels de santé une obligation de signaler au directeur de l'établissement un risque pour la sécurité des personnes.
Il nous semble utile de permettre une transmission plus grande des informations relatives à la sécurité des personnes au sein des prisons.
Dans ces conditions, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
La commission émet également un avis défavorable sur l'amendement n° 46. Il nous semble ni nécessaire ni même souhaitable de recueillir l'accord de l'intéressé. La nature des informations concernées touche non pas au secret médical, mais seulement au risque que peut présenter le comportement d'un détenu. Je serais même tenté de dire que ce risque concerne aussi bien un codétenu que le détenu lui-même.
En effet, il est difficile de demander à un détenu que l'on pense suicidaire son autorisation pour transmettre cette information à l'administration pénitentiaire. Or, s'il a des tendances suicidaires, la première précaution à prendre est de faire en sorte qu'il ne se retrouve pas seul en cellule.
S'agissant de l'amendement n° 42, la commission partage sur le fond les propos de Mme Boumediene-Thiery, mais la précision demandée nous semble inutile.
En effet, l'article 226-13 du code pénal, qui prévoit une sanction en cas de révélation d'une information à caractère secret, s'applique de fait aux informations mentionnées à l'alinéa précédent sans qu'il soit nécessaire de s'y référer expressément. Au lieu de renforcer la portée de cet article, cette référence expresse aurait plutôt pour conséquence de l'affaiblir.
Dans ces conditions, la commission vous demande, madame la sénatrice, de bien vouloir retirer cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Pour les mêmes raisons, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces trois amendements.
S'agissant de l'amendement n° 44, je vous indique, madame la sénatrice, que nous avons transmis ce projet de loi au Conseil national de l'ordre des médecins, qui a estimé que la formulation retenue n'entachait pas la notion du secret médical. L'expression « informations utiles », très différente de la formule « informations strictement nécessaires », permet notamment d'éviter que la responsabilité du personnel pénitentiaire ne soit mise en cause pour non-assistance à personne en danger.
Dès lors que le personnel pénitentiaire détient des informations sur des détenus très fragiles, soit au cours des entretiens qu'il peut avoir avec eux, soit lors des activités que ceux-ci pratiquent au sein de l'établissement, il importe qu'il puisse les communiquer à l'autorité médicale. Il s'agit donc bien d'informations utiles.
Concernant l'amendement n° 42, je rejoins les propos de M. le rapporteur. L'administration pénitentiaire est soumise au secret professionnel. Si elle détient des informations de nature médicale, elle sera également, d'un point de vue juridique, soumise au secret professionnel. Comme l'a indiqué M. le rapporteur, la précision que vous proposez, madame la sénatrice, ne ferait qu'affaiblir la portée même de l'article 226-13.
M. le président. Madame Boumediene-Thiery, l'amendement n° 42 est-il maintenu ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 70, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le III de cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. En application des articles 723-37 et 723-38 du code de procédure pénale, la commission régionale de la rétention de sûreté, ou plus exactement la juridiction régionale de la rétention de sûreté - cette nouvelle dénomination ayant été adoptée hier - pourra prolonger une décision de placement sous surveillance judiciaire ou sous surveillance électronique mobile, et ce indéfiniment.
Jusqu'à présent, ces obligations ne pouvaient excéder la durée correspondant aux réductions de peine.
Sur le plan des faits, la commission des lois n'a pas manqué de souligner les difficultés, pour une personne, de demeurer, dans la durée, sous surveillance électronique. Du point de vue du droit, elle n'a pas manqué de pointer les contradictions et les risques d'inconstitutionnalité, notamment au regard du principe de non-rétroactivité des lois.
Cependant, tenant malgré tout à valider ce projet de loi, elle a tenté de contourner la difficulté en proposant de modifier les dispositions de ce paragraphe III. Toutefois, - et c'est inévitable - on demeure dans la confusion.
Je rappelle que si, dans sa décision en date du 8 décembre 2005, le Conseil constitutionnel a indiqué que la surveillance judiciaire pouvait être rétroactive, c'est parce qu'elle est « limitée à la durée des réductions de peine dont bénéficie le condamné, qu'elle constitue ainsi une modalité d'exécution de la peine qui a été prononcée par la juridiction de jugement ». On sort pourtant ici de ce cadre, puisque la commission régionale pourra prolonger ce qui est donc une modalité d'exécution de cette peine, après le jugement.
La commission des lois propose donc de reconnaître la spécificité des décisions prises après la peine, en supprimant la notion de « prolongation » et en définissant le dispositif comme une « surveillance de sûreté ».
Ainsi, même dans le cas où la juridiction qui est à l'origine de la condamnation aura prévu, en fin de peine, la possibilité d'appliquer la mesure de sûreté envisagée, l'appréciation fondant la décision de la commission régionale ne se fera pas sur la base d'un fait commis au moment de cette décision. Retenir cette disposition reviendrait à accepter que la juridiction d'origine, en l'occurrence la cour d'assises, délègue une partie de son pouvoir à une commission, même si cette dernière est désormais dénommée « juridiction ».
J'ajoute qu'il est pour le moins bien difficile, pour une cour d'assises, d'apprécier au moment du jugement la dangerosité et la nécessité de soins au moins quinze années plus tard. Qu'est-ce qui prévaudra ? Le principe de précaution ou le risque d'erreur de l'estimation ?
En tout état de cause, la mission de la justice, et donc son intervention, s'arrête quand prend fin la peine, en ayant apporté une réponse à l'infraction commise. En l'occurrence, aucune infraction n'est exigée et la peine est achevée.
En conséquence, la juridiction régionale, même composée de trois magistrats de l'ordre judiciaire, ne saurait être considérée comme une juridiction à proprement parler : elle relève du domaine administratif. Or une instance administrative ne saurait remettre en cause une décision juridictionnelle.
Par ailleurs, les manquements à l'obligation de la surveillance judiciaire pourront être sanctionnés par la rétention de sûreté. Seront donc concernées les personnes actuellement détenues. Voilà une autre manière de faire revenir la rétroactivité de cette loi par la petite porte !
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons, mes chers collègues, de supprimer le paragraphe III.
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article 723-37 du code de procédure pénale, remplacer les mots :
faisant l'objet de l'une des condamnations
par les mots :
condamnée à une réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'une des infractions
La parole est à M. le rapporteur.
M. le président. L'amendement n° 18, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Après le mot :
décider
rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article 723-37 du code de procédure pénale :
de prolonger tout ou partie des obligations auxquelles est astreinte la personne, au-delà de la limite prévue à l'article 723-29, en la plaçant sous surveillance de sûreté pour une durée d'un an.
II. - Rédiger comme suit le début du troisième alinéa du même texte :
Le placement sous surveillance de sûreté ne peut être ordonné, ...
III. - Dans le cinquième alinéa (2°) du même texte, remplacer le mot :
prolongation
par le mot :
mesure
IV. Rédiger comme suit le début du sixième alinéa du même texte :
La surveillance de sûreté peut être prolongée selon ...
V. Supprimer le septième alinéa du même texte.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Cet amendement est plus important.
Lorsqu'une personne entrant dans le champ d'application de la rétention de sûreté a été soumise à une surveillance judiciaire, le projet de loi autorise la commission régionale à prolonger les obligations de la surveillance judiciaire pour une durée d'un an renouvelable.
La prolongation des obligations de la surveillance judiciaire ne paraît pas conforme à la nature juridique de ce dispositif que le législateur avait en effet considéré en 2005 comme une modalité d'exécution de la peine, puisque sa durée est limitée à celle qui correspond aux réductions de peine obtenues.
Sans nier l'intérêt de garder une personne dangereuse sous certaines obligations au terme de la surveillance judiciaire, il est donc préférable que ce dispositif de contrôle présente un caractère spécifique qui ne se confond pas avec la surveillance judiciaire. Sans doute lui emprunte-t-il ses obligations, mais il relève d'un autre régime juridique au regard tant de l'autorité qui le décide, en l'occurrence la juridiction régionale et non le juge de l'application des peines, que de sa durée, renouvelable dès lors que les conditions prévues par l'article 723-37 sont réunies.
Ce dispositif relève en fait de la même catégorie que celui qui est susceptible de s'appliquer après la levée d'une rétention de sûreté. Il est donc logique de lui appliquer la même dénomination, « surveillance de sûreté ».
M. le président. L'amendement n° 19, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
À la fin du dernier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article 723-37 du code de procédure pénale, supprimer les mots :
en cas de méconnaissance par la personne de ses obligations
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer une mention inutile.
M. le président. L'amendement n° 20, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le III de cet article pour l'article 723-38 du code de procédure pénale, remplacer les mots :
faisant l'objet de l'une des condamnations
par les mots :
condamnée à une réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'une des infractions
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Pour les raisons avancées par la commission, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 70, qui vise à supprimer la surveillance judiciaire prolongée, devenue surveillance de sûreté, laquelle va bien au-delà de la peine.
En revanche, le Gouvernement est favorable aux amendements nos 17, 18, 19 et 20.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je suis d'accord, il vaut mieux appeler les choses par leur nom. La dénomination proposée par notre rapporteur est plus claire. Cela dit, une fois désignée par sa nouvelle appellation, cette mesure n'en est pas plus conforme à notre ordre juridique que par le passé !
En fait, de quoi s'agit-il ? Encore une fois, il s'agit non pas d'une peine, mais d'une mesure de police visant à priver de liberté quelqu'un qui n'est pas atteint de troubles mentaux, qui a toute sa responsabilité, et cela non pour ce qu'il a commis ou ce qu'il s'apprête à commettre, mais pour ce qu'il est !
Par conséquent, le problème de la rétention de sûreté reste entier et nous n'avons pas avancé d'un pas en changeant les étiquettes, même si la dernière est un peu plus précise.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 71, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le IV de cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement étant dans le même ordre d'idées, il appellerait les mêmes observations et les mêmes critiques.
Cela étant dit, madame le garde des sceaux, j'aimerais connaître le nombre de médecins coordonnateurs. Ils sont très peu nombreux ; il est donc urgent d'en doubler, voire d'en tripler, le nombre.
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après le mot :
décider
rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte proposé par le IV de cet article pour l'article 763-8 du code de procédure pénale :
de prolonger tout ou partie des obligations auxquelles est astreinte la personne, au-delà de la durée prononcée par la juridiction de jugement et des limites prévues à l'article 131-36-1 du code pénal, en la plaçant sous surveillance de sûreté pour une durée d'un an.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 71.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. L'Assemblée nationale a introduit une disposition permettant, pour les personnes condamnées à un suivi socio-judiciaire pour une infraction entrant dans le champ d'application de la rétention de sûreté, de prolonger les effets de ce suivi socio-judiciaire pour un an renouvelable.
Ces dispositions soulèvent les mêmes difficultés que celles qui ont été relevées à propos de la prolongation de la surveillance judiciaire. En effet, le suivi socio-judiciaire est une peine complémentaire dont la durée est fixée par la juridiction de jugement.
S'il peut être souhaitable de maintenir les obligations au-delà de la durée du suivi socio-judiciaire, ce dispositif de contrôle relève non plus du suivi socio-judiciaire, mais du régime spécifique de « surveillance de sûreté » que proposent d'instaurer les amendements précédents.
J'en viens à l'amendement n° 71. Je remarque que l'argumentation développée dans son objet est un peu moins convaincante depuis hier, c'est-à-dire depuis que nous avons transformé la nature de la commission en juridiction. Désormais, c'est bien une juridiction qui va décider de prolonger la durée du suivi socio-judiciaire. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.)
Permettez-moi de faire observer aussi que la surveillance de sûreté ou, si vous préférez, le suivi socio-judiciaire prolongé, ce qui est en fait la même chose, préserve la liberté de la personne et permet éventuellement d'éviter la rétention de sûreté. Cela peut donc être favorable à la personne et lui permettre, si elle respecte les obligations qui lui sont imposées, de ne pas retourner en détention.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 21 et, pour les raisons que vient d'indiquer M. le rapporteur, défavorable à l'amendement n° 71.
Madame Mathon-Poinat, pour répondre à votre question sur les médecins coordonnateurs, comme je l'avais dit dans mon discours liminaire, ils sont aujourd'hui 203, alors qu'ils étaient moins de 150 voilà quelques mois. L'objectif sur lequel nous nous sommes engagés est qu'ils soient 500 avant la fin de l'année.
Quant au montant de la vacation, il est passé, depuis l'arrêté signé le 24 janvier dernier, de 470 euros à 700 euros. L'été dernier, lors de l'examen du projet de loi renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs, nous nous étions engagés à revaloriser cette indemnité.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. En fait, je souhaite faire une remarque à M. le rapporteur.
Certes, il s'agit d'une juridiction, mais il n'empêche que les décisions qu'elle va prendre sont des mesures de police. Comme le dit le procureur général Jean-Olivier Viou, c'est la confusion des genres ! Par conséquent, nous ne sortons pas de la contradiction générale.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On change les mots, pas le fond !
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article additionnel après l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 36, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 763-14 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° - La deuxième phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « et garantit le caractère pluridisciplinaire de cette commission » ;
2° - Après ladite phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Il précise notamment les différentes professions susceptibles de figurer dans cette commission, ainsi que les modalités de nomination de ses membres. »
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement concerne le caractère pluridisciplinaire de la commission.
Le nouvel article 706-53-14 prévoit que la situation des personnes qui peuvent, en application de l'article 706-53-13, faire l'objet d'un placement en rétention de sûreté doit être examinée au moins un an avant la date prévue pour leur libération afin d'évaluer leur dangerosité.
C'est la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, visée à l'article 763-10-1 du code de procédure pénale, qui est chargée de cette évaluation.
Eu égard au profil des personnes concernées, l'évaluation de la dangerosité criminologique du condamné nécessite un renforcement du caractère pluridisciplinaire de cette commission. C'est pourquoi il convient de modifier la composition de cette dernière, afin d'y intégrer des spécialistes de la criminologie.
Le décret en Conseil d'État qui en fixe les attributions doit donc assurer une pluridisciplinarité plus poussée, une expérience et une spécialisation plus importantes de ses membres que ce qui est actuellement prévu.
Afin de mieux appréhender toutes les difficultés d'évaluation de la dangerosité criminologique du condamné devraient figurer parmi les membres de la commission pluridisciplinaire un magistrat honoraire expérimenté dans le domaine du droit pénal et relevant d'une autre juridiction que celle qui est compétente pour statuer sur la mesure de rétention de sûreté, un expert psychologue ayant suivi une formation et titulaire d'un diplôme en criminologie ou en psycho-criminologie et des intervenants n'exerçant pas des fonctions expertales, par exemple des éducateurs ou des comportementalistes.
Par ailleurs, les membres de ces commissions devraient être nommés par décision conjointe du ministère de la justice et du ministère de la santé, après établissement d'une liste à l'échelon national des différentes catégories professionnelles représentées au sein des équipes.
Ce n'est qu'à ce prix que l'évaluation de la dangerosité sera objective et complète, évaluation qui va bien au-delà d'une double expertise psychiatrique.
Si le médecin psychiatre dispose d'une compétence et d'outils d'évaluation pour appréhender la dangerosité psychiatrique d'un détenu, il est moins sûr de la dangerosité criminologique ou sociale. De plus, confier cette mission au médecin psychiatre, comme le fait le projet de loi, procède d'une confusion dangereuse entre maladie mentale et délinquance. Or tous les fous ne sont pas criminels et tous les criminels ne présentent pas forcément des pathologies mentales !
Tous les pays étrangers ayant adopté un dispositif de défense sociale équivalent à la rétention de sûreté ont élaboré un système beaucoup plus soucieux d'une meilleure évaluation de la dangerosité sociale, mettant la pluridisciplinarité au centre de leur démarche.
Madame le garde des sceaux, puisque vous citez volontiers les systèmes étrangers, assurez à cette commission une pluridisciplinarité équivalente à celle du Pieter Baan Centrum aux Pays-Bas.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Je peine à suivre l'argumentation de Mme Alima Boumediene-Thiery, qui se préoccupe du caractère pluridisciplinaire de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté.
Cela pourrait être une attention tout à fait intéressante.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Merci !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Mais, très honnêtement, ce n'est qu'une commission administrative. Les membres qui la composent sont le préfet de région, le directeur interrégional des services pénitentiaires compétent, un expert psychiatre, un avocat, un représentant d'une association nationale d'aide aux victimes... De plus, son rôle est assez formel.
Ce n'est pas au sein de cette commission qu'il faut rechercher les spécialisations nécessaires, dont vous avez tout à fait raison de noter le caractère indispensable. Mais nous avons déjà réglé ce problème par le biais de l'évaluation de six semaines qui sera réalisée par des psychiatres, des médecins, des psychologues, des criminologues, des travailleurs sociaux. Toutes les disciplines seront représentées et donneront à cette évaluation sa véritable valeur.
Par conséquent, notre différend ne concerne pas le fond. Il s'agit seulement de savoir ce sur quoi doit porter le caractère pluridisciplinaire. Selon nous, il doit s'appliquer plus à l'évaluation elle-même qu'à la commission. Certes, mieux vaut que celle-ci soit la plus compétente possible, mais la décision de ses membres sera largement conditionnée par l'évaluation qui aura été faite. Ce ne sont pas eux qui rencontreront les détenus pendant six semaines !
Pour ces raisons, je souhaite le retrait de cet amendement n° 36 ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Pour les raisons qui viennent d'être invoquées par M. le rapporteur, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Madame Alima Boumediene-Thiery, l'amendement n° 36 est-il maintenu ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Oui, monsieur le président, car cette commission est importante.
En effet, son travail va permettre de compléter l'évaluation qui sera faite. Si celle-ci nécessite une équipe pluridisciplinaire, la commission elle-même doit comporter en son sein toutes les compétences réunies.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 12 (priorité)
I. - Le I de l'article 1er est immédiatement applicable aux personnes faisant l'objet d'une condamnation prononcée après la publication de la présente loi, y compris pour des faits commis avant cette publication.
II. - Le même I est également immédiatement applicable aux personnes condamnées avant la publication de la présente loi et exécutant une peine privative de liberté à la date du 1er septembre 2008, lorsque ces personnes ont fait l'objet soit de plusieurs condamnations pour les crimes mentionnés à l'article 706-53-13 du code de procédure pénale, dont la dernière à une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à quinze ans, soit d'une condamnation unique à une telle peine pour plusieurs de ces crimes commis sur des victimes différentes.
III. - Le III de l'article 1er est applicable à compter du 1er septembre 2008 aux personnes faisant l'objet d'une mesure de surveillance judiciaire.
L'article 2 est applicable aux personnes exécutant une peine privative de liberté à la date de publication de la présente loi.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 77, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ces derniers jours, l'article 12 du projet de loi a fait couler beaucoup d'encre, et peut-être cela va-t-il continuer !
Madame le garde des sceaux, le projet de loi initial ne prévoyait pas la rétroactivité s'agissant de la rétention de sûreté, et ce, je le suppose, pour des raisons juridiques.
La seule rétroactivité envisagée concernait la surveillance judiciaire et les mesures relatives aux réductions de peine.
Les députés, sur l'initiative de la commission des lois de l'Assemblée nationale, qui avaient beaucoup réfléchi à la question - peut-être avez-vous participé à cette réflexion, mes chers collègues -, se sont empressés d'adopter un amendement rendant applicables les dispositions relatives à la rétention de sûreté aux condamnations qui seront prononcées après l'entrée en vigueur de la loi, même si les faits ont été commis antérieurement à sa promulgation.
Sur l'initiative du Gouvernement, les députés ont également adopté un amendement rendant d'application quasi immédiate les dispositions relatives à la rétention de sûreté pour les personnes qui ont fait l'objet de plusieurs condamnations pour des crimes mentionnés à l'article 1er. Cela montre bien que l'intention du Gouvernement était, dès le départ, de rendre la rétention de sûreté rétroactive. Mais peut-être ne savait-il pas comment s'y prendre...
Quels que soient les arguments utilisés - et vous les avez tous avancés -, cette rétention de sûreté n'est comparable ni à une mesure de sûreté ni à l'hospitalisation d'office.
M. le rapporteur de la commission des lois a bien essayé de gommer les contours anticonstitutionnels de l'article 12, convaincu, selon ses propres termes, de la « nécessité de respecter les principes fondamentaux de notre droit et, en particulier, la règle de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère ». Il a donc déposé un amendement visant à subordonner la libération conditionnelle, pour les criminels condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité, à un avis favorable de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté.
Par ailleurs, il propose que les personnes ayant fait l'objet de plusieurs condamnations pour les crimes mentionnés à l'article 1er puissent être soumises, à l'issue de l'exécution de leur peine d'emprisonnement, dans le cadre de la surveillance judiciaire, puis, le cas échéant, de la surveillance de sûreté, à deux obligations nouvelles et spécifiques : l'assignation à domicile sous le régime du placement sous surveillance électronique et l'obligation de déplacement surveillé sous le contrôle d'un agent de l'administration pénitentiaire. Ces deux mesures, il est vrai, sont d'application difficile ; néanmoins, elles respectent le droit.
Les deux amendements déposés par M. le rapporteur lui ont valu de passer pour le « sauveur » de la loi, du moins au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Même s'ils ne changent pas, à nos yeux, le fond du projet de loi, ils vous ont suffisamment hérissé, chers collègues de la majorité, pour que vous déposiez un sous-amendement, adopté de justesse hier matin en commission des lois, tendant à revenir à la rétroactivité totale de la loi.
Dans la foulée, madame le garde des sceaux, vous avez déposé un sous-amendement destiné à entériner définitivement cette rétroactivité.
Ainsi, vous passez outre le respect d'un droit aussi fondamental que celui de la non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère pour faire passer le message suivant à l'opinion : « Le Gouvernement a enfin fait adopter une loi permettant d'enfermer immédiatement et à vie les ? prédateurs sexuels ? - ce sont vos propres termes -, pour vous protéger contre toute récidive ! »
Franchement, je me demande, mes chers collègues, comment vous concevez votre devoir de législateur ! Vous vous contentez de répéter à l'envi que le principe de non-rétroactivité ne s'appliquerait pas en l'occurrence puisque la rétention de sûreté serait non pas une peine, mais une mesure de sûreté, ce qui ne suffit pas à lui en donner les caractéristiques !
On ne peut pas se résoudre au sacrifice des principes constitutionnellement garantis pour une loi certes d'affichage, mais lourde de conséquences, puisqu'elle ouvre la porte à d'autres violations des principes constitutionnels, alors que le problème posé est celui de l'efficacité des mesures que nous avons prises très récemment, et qui ne sont pas, pour la plupart, appliquées. En effet, soit elles sont trop récentes, soit, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, elles n'ont pas bénéficié des moyens nécessaires. Pour qu'elles soient réellement efficaces, il faudrait les améliorer, mais surtout prendre le problème à l'endroit, c'est-à-dire revoir notre curieuse conception de la détention, qui, finalement, constitue une exception négative au sein de l'Europe, dont nous aimons à vanter les mérites et l'unité de culture, voire de religion.
Nous aurions donc pu nous interroger longuement sur les raisons de l'incapacité de notre pays, comme d'autres, à trouver des moyens plus efficaces pour prendre en charge les détenus. Mais non, vous préférez violer un principe fondamental, celui de la non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère. C'est tout à fait regrettable.
M. le président. L'amendement n° 41, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Supprimer les I, II et le premier alinéa du III de cet article.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Cet amendement a pour objet la suppression d'une partie de l'article 12, qui est, selon moi, l'un des articles les plus importants et les plus dangereux de ce projet de loi.
Il vise en effet à inscrire le principe de la rétroactivité de la loi dans le temps, dans le mépris le plus total de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
La mesure concernée est non pas une mesure, mais une peine. Tant que le système que vous nous proposez, madame le garde des sceaux, ne remplira pas les conditions qui en feront une modalité d'exécution de la peine, la rétroactivité de la loi pénale sera anticonstitutionnelle.
Dans sa décision relative au placement sous surveillance électronique mobile, le Conseil constitutionnel avait considéré, je vous le rappelle, que cette mesure n'était pas contraire au principe de non-rétroactivité de la loi pénale garanti par l'article 8 de la Déclaration de droits de l'homme et du citoyen, en se fondant sur trois critères.
Tout d'abord, le but de la mesure est de prévenir une récidive. Elle repose non pas sur la culpabilité du condamné, mais sur sa dangerosité.
Ensuite, la mesure est limitée à la durée des réductions de peine dont a bénéficié le condamné, ce qui en fait une modalité d'exécution de la peine initiale.
Enfin, la mesure est ordonnée par la juridiction de l'application des peines.
Ainsi, ces critères cumulatifs, si nous les appliquons à la mesure de rétention de sûreté que vous nous proposez, nous permettent de conclure que cette dernière est anticonstitutionnelle.
Elle s'ajoute en effet au quantum de la peine prononcée par la juridiction de jugement. Elle est donc non pas une modalité d'exécution de la peine, mais bien une peine supplémentaire.
Je citerai, pour conclure, le rapport intitulé « Réponses à la dangerosité » de M. Jean-Paul Garraud, député de l'UMP, à propos de la mise en place de centres fermés de protection sociale, soit l'équivalent des centres que vous souhaitez créer : « Le placement en centre fermé de protection sociale présente plusieurs caractéristiques qui sont de nature à le faire entrer dans la catégorie des ? sanctions ayant le caractère d'une punition ? au sens de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, ce qui aurait pour effet de soumettre la loi nouvelle à l'exigence de non-rétroactivité des peines et des sanctions résultant de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. » Ce n'est pas moi, mais c'est un député de votre majorité qui le dit mot pour mot !
Or, dans le projet de loi, il s'agit bien d'une privation totale de liberté qui s'ajoute à la peine initiale. Cela signifie qu'une rétroactivité s'applique, ce qui est contraire à nos principes.
M. le président. L'amendement n° 29, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le I et le II de cet article :
I. Le dernier alinéa de l'article 729 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La personne condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité ne peut bénéficier d'une libération conditionnelle qu'après avis favorable de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté dans les conditions prévues par le deuxième alinéa de l'article 706-53-14. »
II. Après l'article 723-30 du code de procédure pénale, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Les personnes qui ont fait l'objet soit de plusieurs condamnations pour les crimes mentionnés à l'article 706-53-13, dont la dernière à une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à 15 ans, soit d'une condamnation unique à une telle peine pour plusieurs de ces crimes commis sur des victimes différentes, peuvent être soumises à l'obligation d'assignation à domicile sous le régime du placement sous surveillance électronique prévu par l'article 132-26-2 du code pénal et à l'obligation de déplacement surveillé sous le contrôle d'un agent de l'administration pénitentiaire.
« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent article. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Cet amendement représente une tentative de conciliation entre deux impératifs qui pouvaient sembler opposés : d'une part, faire en sorte que la rétention de sûreté puisse s'appliquer le plus rapidement possible et, d'autre part, éviter tout risque au regard du principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère.
D'ores et déjà, le projet de loi prévoit des modalités de nature à permettre une application immédiate de la rétention de sûreté, et non à une échéance de quinze ans ou de douze ans si on prend en compte les réductions de peine. Ces modalités ne me semblent pas discutables constitutionnellement.
Cela passe par le biais de la surveillance judiciaire. Il est prévu qu'un manquement aux obligations de la surveillance judiciaire permettrait, si ce manquement révèle une dangerosité particulière, de faire « basculer » la personne de la surveillance judiciaire à la rétention de sûreté.
Par cet amendement, la commission des lois souhaite ajouter deux autres cas qui entraîneraient l'application aussi immédiate que possible de la rétention de sûreté.
Il s'agit tout d'abord du problème des personnes condamnées à la réclusion criminelle à perpétuité. Celles-ci ne représentent pas simplement quelques individus dans les prisons de la République, puisqu'on compte aujourd'hui entre 500 et 600 personnes dans ce cas. Elles sont censées être les plus dangereuses.
La commission vous propose donc, mes chers collègues, de prévoir qu'avant toute libération conditionnelle, une fois leur période de sûreté accomplie, il leur faudra obtenir l'avis conforme de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté. Autrement dit, il s'agit de placer la personne dans la case « rétention de sûreté », ce qui n'entraîne pas de difficultés particulières.
L'application immédiate du dispositif posait problème pour les personnes condamnées de quinze ans d'emprisonnement à la réclusion criminelle à perpétuité. Cet amendement vise donc à « muscler » la surveillance judiciaire, que nous avons rebaptisée « surveillance de sûreté », en prévoyant qu'elle pourrait inclure l'assignation à résidence et la sortie sous surveillance pénitentiaire. Ces mesures sont similaires à celles qui sont prévues pour les personnes qui seront placées dans les centres socio-médico-judiciaires.
Ainsi, il nous semblait avoir à peu près répondu aux deux impératifs que j'ai évoqués tout à l'heure : protéger la société et éviter le risque d'inconstitutionnalité pour rétroactivité.
M. le président. Le sous-amendement n° 78 rectifié ter, présenté par MM. Portelli, Gélard, Garrec, Courtois, Saugey, Béteille, J. Gautier et Buffet, Mme Troendle et M. Othily, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le II de l'amendement n° 29 :
II. Les personnes exécutant, à la date du 1er septembre 2008, une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à 15 ans à la suite, soit de plusieurs condamnations, dont la dernière à une telle peine, pour les crimes mentionnés à l'article 706-53-13 du code de procédure pénale, soit d'une condamnation unique à une telle peine pour plusieurs de ces crimes commis sur des victimes différentes, peuvent être soumises à une assignation à domicile sous le régime du placement sous surveillance électronique mobile, selon la procédure prévue par l'article 723-37 de ce code.
À titre exceptionnel, si le placement sous surveillance électronique apparaît insuffisant pour prévenir la récidive, ils peuvent être soumis à un placement en rétention de sûreté.
La mise en oeuvre de cette procédure doit être précédée d'une décision de la chambre de l'instruction avertissant la personne condamnée qu'elle pourra faire l'objet d'un réexamen de sa situation dans les conditions ci-après indiquées.
Le procureur général saisit, après avis du juge de l'application des peines du lieu de détention de la personne condamnée, la chambre de l'instruction de la cour d'appel dans le ressort de laquelle se trouve la cour d'assises ayant prononcé la condamnation.
La chambre de l'instruction statue en chambre du conseil après avoir fait comparaître la personne condamnée assistée par un avocat choisi ou commis d'office.
Si elle constate qu'il résulte de la ou des condamnations prononcées une particulière dangerosité de l'intéressé en raison d'un trouble grave de sa personnalité susceptible de justifier à l'issue de sa peine un placement en rétention de sûreté, elle avertit la personne condamnée qu'elle pourra faire l'objet d'un examen de dangerosité pouvant entraîner son placement en rétention de sûreté.
La rétention de sûreté est ensuite décidée suivant la procédure indiquée aux articles 706-53-14 et 706-53-15 du même code nonobstant, le cas échéant, les délais prévus par ces dispositions.
La parole est à M. Hugues Portelli.
M. Hugues Portelli. Pour comprendre ce sous-amendement, il est nécessaire de rappeler la façon dont le débat s'est déroulé au sein de la commission des lois et de notre propre groupe parlementaire.
Nous voilà face à un texte adopté par l'Assemblée nationale sur l'initiative du Gouvernement, et sur la constitutionnalité duquel nous avons quelques doutes.
Tout d'abord, c'est clair et net, nous sommes d'accord avec la finalité de cette disposition. Toutefois, nous ne voulons pas courir le risque d'inconstitutionnalité, non pas parce que nous avons une dévotion particulière pour le Conseil constitutionnel, mais parce que nous sommes respectueux de la Constitution.
Mme Isabelle Debré. Absolument !
M. Hugues Portelli. Même à l'époque où le Conseil constitutionnel ne s'était pas arrogé les pouvoirs dont il dispose depuis 1971, nous étions respectueux de la Constitution.
Mme Isabelle Debré. Effectivement !
M. Hugues Portelli. Je rappelle que, de tous les principes constitutionnels qui nous régissent, le plus important est le devoir qu'a l'État de protéger ses ressortissants, notamment les plus faibles.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Avec la police administrative ?
M. Hugues Portelli. Dans cet État de droit, les citoyens ont des droits qui sont, notamment, la liberté, la sûreté - vous connaissez aussi bien que moi la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
Nous avons accepté l'amendement n° 29 proposé par le rapporteur afin de disposer d'un peu de temps pour réfléchir aux améliorations à apporter au texte issu de l'Assemblée nationale. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'esclaffe.) Pourquoi avons-nous travaillé sur ce dernier plutôt que sur celui qui a été présenté par M. le rapporteur - que je respecte, il le sait bien - ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. La commission a complété le texte de l'Assemblée nationale !
M. Hugues Portelli. À nos yeux, l'amendement du rapporteur s'apparente au suivi socio-judiciaire, mais ne correspond pas véritablement à la mesure de sûreté que nous appelons de nos voeux s'agissant de ces criminels particulièrement dangereux.
Même s'ils représentent un nombre extrêmement restreint, l'État de droit, je le répète, a le devoir de protéger l'ensemble de la société contre ces individus et ne doit pas s'abstraire de tous les moyens dont il dispose.
Lors des débats qui ont précédé la présente discussion, nous avons défini clairement la mesure de rétention comme étant une mesure de sûreté. (Mme Nicole Borvo s'exclame.)
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est tout le débat !
M. Hugues Portelli. Pour nous, c'est clair et, de notre point de vue et de celui de la majorité de cette assemblée, toutes les dispositions qui ont été votées par le Sénat à l'article 1er vont dans ce sens.
Dès lors que la notion est bien clarifiée et qu'elle se situe dans le champ de la mesure de sûreté, la question de la rétroactivité éventuelle de cette mesure peut être posée constitutionnellement.
Tel est l'objet de ce sous-amendement, qui prévoit une série de dispositions visant à aménager la mise en oeuvre de cette mesure de sûreté dès septembre 2008, donc y compris pour ceux qui ont fait l'objet d'une condamnation.
Elles précisent que c'est une juridiction et non une commission qui prend la décision, qu'elle s'appuie sur l'évaluation d'une commission d'experts, qu'elle respecte toutes les règles de la défense du condamné, donc de sa représentation, notamment la règle du débat contradictoire, et qu'elle avertit la personne condamnée que celle-ci pourra faire l'objet d'un réexamen de sa situation.
Pourquoi inscrire cet avertissement dans la loi ? Pour une raison très simple : au moment où la procédure est lancée, celui qui est encore détenu a le temps d'accepter les mesures qu'il a refusées jusqu'alors. S'il les accepte, c'est-à-dire s'il consent à faire l'objet d'un suivi médical, psychiatrique, mais aussi éducatif, selon l'ajout voté hier, on entrerait dans le cadre de ce que l'on souhaite et la question de lui appliquer la mesure de sûreté ne se pose plus.
Si, au contraire, malgré cet avertissement, la personne en question refuse le traitement qui lui est proposé, elle donne une preuve supplémentaire de sa dangerosité, et la mesure de sûreté doit alors s'appliquer de plein droit.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. Hugues Portelli. Tel est le sens de notre sous-amendement, et j'espère que nous serons nombreux à le soutenir ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Le sous-amendement n° 92, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par l'amendement n° 29 par deux alinéas ainsi rédigés :
... - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
IV. Le I et le I bis de l'article 1er sont applicables aux personnes faisant l'objet d'une condamnation prononcée après la publication de la présente loi pour des faits commis avant cette publication.
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Par souci de cohérence, il est nécessaire de maintenir l'application des dispositions nouvelles pour les condamnations qui seront prononcées après la promulgation de la loi.
L'amendement n° 29 de la commission « écrase », si je puis dire, le I de l'article 12.
Or la disposition est indispensable, puisqu'elle permet l'application de la loi nouvelle aux condamnations futures, même si les faits sanctionnés sont antérieurs à la loi.
Je le répète, il s'agit là non pas de rétroactivité, mais d'une entrée en vigueur immédiate du dispositif de sûreté.
Il faudra impérativement que les personnes qui seront condamnées sous l'empire de la loi nouvelle soient averties du fait que, à la fin de leur peine, leur dangerosité pourra être évaluée, si leur personnalité le justifie. À défaut, ni le dispositif transitoire ni le dispositif définitif ne s'appliqueraient à ceux qui n'auraient pas été avertis au moment de la condamnation en cour d'assises. Malgré leur particulière dangerosité, ces condamnés pourraient ainsi échapper à la rétention de sûreté, alors même que leur dangerosité serait encore avérée lors de la fin de leur peine. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. L'amendement n° 89, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Rédiger comme suit le premier alinéa du III de cet article :
La surveillance de sûreté instaurée par le III de l'article 1er est immédiatement applicable après la publication de la présente loi. Si la méconnaissance par la personne des obligations qui lui sont imposées fait apparaître que celle-ci présente à nouveau une particulière dangerosité caractérisée par le risque particulièrement élevé de commission des infractions mentionnées à l'article 706-53-13, la personne peut être placée jusqu'au 1er septembre 2008, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article 706-53-20, dans un établissement mentionné au premier alinéa de l'article L. 6141-5 du code de la santé publique.
II. - Compléter cet article par un IV ainsi rédigé :
IV. - L'évaluation prévue par le I ter de l'article 1er est également applicable aux personnes condamnées avant la publication de la présente loi à une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'une des infractions visées à l'article 706-53-13.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre cet amendement et pour donner l'avis de la commission sur les amendements nos 77 et 41 ainsi que sur les sous-amendements nos 78 rectifié ter et 92.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Cet amendement comporte deux dispositions à caractère transitoire, dont la seconde est d'ailleurs plus importante que la première.
En premier lieu, cet amendement adapte la mesure qui prévoit que les dispositions relatives à la prolongation des obligations de la surveillance judiciaire sont applicables à compter du 1er septembre 2008.
Le choix de cette date est lié au délai de mise en place du centre socio-médico-judiciaire de sûreté, structure dont l'ouverture est prévue le 1er septembre 2008 au sein de l'Établissement public de santé national de Fresnes.
Cependant, on ne peut exclure que, dans l'intervalle qui sépare l'entrée en vigueur de la loi et le 1er septembre 2008, la surveillance judiciaire imposée à certaines personnes entrant dans le champ d'application du texte arrive à son terme, la durée correspondant aux réductions de peine étant écoulée.
Il ne serait plus possible alors de placer ces personnes sous surveillance de sûreté, puisque cette procédure constitue une prolongation des obligations de la surveillance judiciaire, mais ne saurait en revanche être imposée à une personne qui ne serait plus sous ce dispositif de contrôle.
Afin d'éviter que des personnes, pourtant très dangereuses, puissent échapper à tout dispositif de contrôle dans les mois à venir, il nous semble souhaitable de permettre l'application immédiate de la surveillance de sûreté.
En cas de manquement grave à ces obligations, la personne pourrait être placée jusqu'au 1er septembre 2008 dans un établissement visé par l'article L. 6141-5 du code de la santé publique, c'est-à-dire un établissement public de santé spécifiquement destiné à l'accueil des personnes incarcérées. Il pourrait s'agir de l'établissement public de Fresnes ou d'une unité d'hospitalisation sécurisée interrégionale, UHSI.
En second lieu, point sur lequel la commission est plus vigilante car il lui paraît plus important, cet amendement permet, à titre transitoire, d'imposer une observation, dans un centre chargé de l'observation des détenus, aux personnes qui sont condamnées à une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour l'une des infractions visées par l'article 706-53-13 du code de procédure pénale.
Autrement dit, nous avons voté hier une disposition prévoyant la nécessité de procéder à une évaluation dans l'année qui suit l'incarcération, disposition judicieuse pour ceux qui seront incarcérés demain. Mais il serait dommage que les personnes déjà incarcérées, qui ont été condamnées à une peine de réclusion criminelle d'une durée égale ou supérieure à quinze ans pour les crimes visés par le présent projet de loi, échappent à cette évaluation, à laquelle, je le rappelle, chacun a intérêt, la société tout autant que le condamné.
C'est la raison pour laquelle la commission propose d'adapter cette obligation d'évaluation pour les personnes déjà condamnées.
J'en viens à l'avis de la commission sur les différents amendements et sous-amendements.
En ce qui concerne l'amendement n° 77, qui tend à la suppression totale de l'article 12, la commission émet un avis défavorable. Même ceux qui n'adhèrent pas à l'ensemble de cet article estiment cependant que certaines de ses dispositions méritent d'être retenues.
L'amendement n° 41 est contraire à la position de la commission car il vise à supprimer des paragraphes pour lesquels elle propose une nouvelle rédaction. Aussi, la commission émet un avis défavorable.
Le sous-amendement n° 78 rectifié ter, qui propose une nouvelle rédaction du II de l'amendement n° 29, présente deux mérites incontestables.
En premier lieu, il tient partiellement compte de l'amendement de la commission, puisqu'il prévoit que la personne peut être soumise à une assignation à domicile. En outre, s'il ne retient pas le principe de la mesure de déplacement surveillé figurant dans l'amendement de la commission, il lui substitue le régime du placement sous surveillance électronique mobile, ce qui peut parfaitement se concevoir. Il maintient néanmoins la faculté d'appliquer la rétention de sûreté immédiatement après la peine de réclusion pour les personnes actuellement détenues pour des faits commis avant l'entrée en vigueur de la loi.
En second lieu, ce sous-amendement s'efforce de maintenir un lien de causalité entre la décision de condamnation et la rétention de sûreté afin de respecter, notamment, les dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme. En effet, la rétention de sûreté ne serait applicable que si la chambre de l'instruction avertit la personne condamnée que sa situation pourra faire l'objet d'un réexamen en vue d'une telle rétention.
Le sous-amendement ne règle pas le problème de la rétroactivité, si ce n'est en considérant que, s'agissant d'une mesure de sûreté, cette question ne se pose pas.
Les auteurs du sous-amendement ayant fait valoir l'impérieuse nécessité de protéger les victimes potentielles des criminels les plus dangereux, une majorité des membres de la commission se sont ralliés à ce point de vue.
En conséquence, la commission émet un avis favorable.
Le sous-amendement n° 92 n'ayant pas été examiné par la commission, je me permettrai de donner mon point de vue personnel.
À la différence du sous-amendement n 78 rectifié ter qui concerne les personnes condamnées à la date d'entrée en vigueur de la loi, le sous-amendement n° 92 s'applique aux personnes qui ont commis les faits avant l'entrée en vigueur de la loi, mais n'ont pas encore été condamnées.
Si l'hypothèse visée par ces deux sous-amendements est différente, il s'agit bien, dans les deux cas, d'une dérogation à l'application du principe de non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère, puisque ce principe interdit l'application d'une disposition plus sévère aux personnes condamnées pour des faits commis avant l'entrée en vigueur de cette loi.
Cependant, le sous-amendement n° 92 ne prévoit pas d'appliquer aux personnes ayant commis des faits avant l'entrée en vigueur de la loi le dispositif qui est retenu par le sous-amendement n° 78 rectifié ter. En effet, pour cette catégorie de personnes, contrairement à celles qui ont déjà été condamnées, la juridiction de jugement pourra prévoir le réexamen de leur situation en vue d'une rétention de sûreté.
Le sous-amendement n° 92 n'envisage pas davantage, et c'est peut-être la petite critique que je me permettrai de lui faire, de limiter l'application immédiate de la rétroactivité aux criminels récidivistes les plus dangereux, à la différence du sous-amendement n° 78 rectifié ter. La restriction du champ d'application de la rétention de sûreté prévue par ce dernier contrebalance, d'une certaine manière, le caractère immédiat de l'application de la rétention de sûreté. Cette restriction n'est pas retenue par le sous-amendement n° 92. Dès lors qu'ils répondront aux critères de droit commun - les critères prévus par l'article 706-53-13 du code de procédure pénale -, les criminels concernés pourront se voir appliquer la rétention de sûreté, même si les faits ont été commis avant l'entrée en vigueur de la loi. Il y a là, de mon humble point de vue, un risque accru d'inconstitutionnalité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. S'agissant de l'amendement n° 77, j'ai eu l'occasion de m'expliquer longuement sur ce qui justifie l'application immédiate de la rétention de sûreté aux personnes qui seront incarcérées dès l'entrée en vigueur du présent texte.
En opportunité, à dangerosité égale, il est impératif que les détenus soient traités de la même façon. Constitutionnellement, s'agissant d'une mesure de sûreté, la question de la rétroactivité ne se pose pas puisqu'il ne s'agit pas d'une peine.
Au regard de la Convention européenne des droits de l'homme, la cour d'assises n'a évidemment pas pu se prononcer sur l'éventualité d'une rétention de sûreté en fin de peine avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle. Il est donc important de prévoir cette disposition.
Le sous-amendement n° 78 rectifié ter permettra, s'il est adopté, d'avertir explicitement le condamné avant la mise en oeuvre de la procédure d'évaluation de la dangerosité. Le Gouvernement est favorable à cette amélioration du dispositif transitoire, adopté par l'Assemblée nationale, qui paraît plus conforme aux exigences de la Convention européenne des droits de l'homme.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 77, ainsi que sur l'amendement n° 41.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 29, sous réserve de l'adoption des sous-amendements nos 78 rectifié ter et 92.
Le Gouvernement est tout à fait favorable au premier volet de cet amendement, qui vise à subordonner le bénéfice d'une libération conditionnelle pour les condamnées à la réclusion criminelle à perpétuité à l'avis favorable de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, au terme d'un examen approfondi et aussi complet que possible. L'utilité de cette mesure de précaution est incontestable.
En revanche, le Gouvernement ne peut qu'être défavorable au second volet de cet amendement. Pour les raisons que je viens de rappeler, il souhaite en effet que la rétention de sûreté puisse s'appliquer dès son entrée en vigueur aux criminels les plus dangereux, ceux qui auront été lourdement condamnés pour plusieurs crimes graves.
Toutefois, le sous-amendement n° 78 rectifié ter de MM. Portelli et Gélard reprend l'idée d'une assignation à résidence et d'une surveillance électronique à distance du respect de l'obligation prévue à l'amendement n° 29, tout en permettant, lorsque cette surveillance est insuffisante, une possibilité de rétention de sûreté.
Enfin, concernant l'amendement n° 89, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat, tout en demandant une rectification formelle consistant à remplacer le « IV » par un « V ».
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. On peut parfaitement considérer que la rétention de sûreté est une nécessité pour un certain nombre de criminels particulièrement dangereux. Pour l'avenir, il n'y a pas de problème : la rétention, qu'on en approuve ou pas le principe, qu'on la considère comme une peine ou comme une mesure de sûreté, aura en effet été fixée préalablement. La question, en revanche, se pose pour ceux qui sont aujourd'hui en détention et qui vont sortir.
Pour ma part, je pencherais plutôt en faveur de la théorie de mon ami Pierre Fauchon qui considère que la rétention de sûreté est une mesure de sûreté.
M. Pierre-Yves Collombat. Cette mesure de sûreté est-elle bien légale ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Monsieur Collombat, cessez donc vos interruptions permanentes et insupportables ! Respectez un peu les autres ! Quand vous parlez, nous vous écoutons !
M. Pierre-Yves Collombat. Nous en reparlerons quand vous nous respecterez autant que nous vous respectons ! Voyez ce qu'il s'est passé hier en commission ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Gournac. Aboyeur !
M. Pierre-Yves Collombat. Les leçons de morale...
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il ne s'agit pas d'une leçon de morale, monsieur Collombat !
D'ailleurs, je ne regarde plus M. Collombat, car il n'est pas intéressant. Il interrompt les orateurs plus qu'il ne les écoute. Je préfère regarder Jean-Pierre Raffarin, qui me paraît être un auditeur bien plus attentif. (Sourires.)
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement. Et le Gouvernement ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Bien entendu, monsieur le secrétaire d'État !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il ne s'adresse plus à nous !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous devons bien mesurer la portée des premier et deuxième alinéas de l'article 12, qui ne figuraient pas dans le projet de loi initial. Autrement dit, nous devons réfléchir à la nature de la mesure qui serait applicable aux personnes déjà condamnées ou, madame le garde des sceaux, à celles qui seraient auteurs de faits commis avant la publication de la loi.
La rétroactivité s'applique non pas à la condamnation, mais aux faits incriminés. Dans un premier temps, la commission des lois a considéré qu'il planait un doute sur la nature de la mesure qui pouvait être applicable aux faits commis avant la publication de la loi. Partant, elle s'est efforcée, pour éviter tout risque d'inconstitutionnalité, de définir des mesures de sûreté, telle l'assignation à domicile ou l'obligation de déplacement surveillé sous le contrôle d'un agent de l'administration pénitentiaire.
Un débat digne et approfondi s'est ensuivi. Certains ont estimé que la rétention de sûreté était une peine, à laquelle devait s'appliquer le principe de non-rétroactivité. D'autres, au contraire, ont considéré qu'il s'agissait là d'une mesure de sûreté, par conséquent applicable non seulement pour l'avenir, mais encore aux personnes déjà condamnées ou qui seraient auteurs de faits commis antérieurement à la publication de la loi.
Dans tous les cas, il est bien entendu que, afin de respecter la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toute mesure privative de liberté doit procéder d'une décision judiciaire.
Je reconnais qu'il n'est pas aisé de prévoir, lors du prononcé de la peine initiale, si, dans quinze, vingt, trente ou quarante ans, le condamné demeurera dangereux ou non. (M. Robert Badinter lève les bras au ciel.) Soit on prévoit un examen systématique de son cas à cette échéance, soit on ne le prévoit pas. En revanche, toute mesure de sûreté doit faire l'objet d'une décision judiciaire, qui peut être prononcée à n'importe quel moment. Cette décision appartient le cas échéant au juge de l'application des peines, dans le cadre de la peine restant à courir en cas de surveillance judiciaire.
Je suis frappé que personne, sauf vous, sans doute, madame le garde des sceaux, n'ait jamais clairement souligné que les établissements pour soins n'étaient pas des prisons. Je vous rappelle que dans leur rapport d'information consacré aux délinquants dangereux atteints de troubles psychiatriques, nos collègues Philippe Goujon et Charles Gautier concluaient à la nécessité absolue des établissements spécialisés pour ces personnes, non seulement à leur sortie de prison, mais encore dès lors que l'évaluation de leur dangerosité faisait apparaître que seuls ces établissements permettaient à ces personnes de recevoir des soins, d'évoluer favorablement et de prendre conscience de leurs actes ou de bénéficier d'autres dispositifs qui, bien que en vigueur dans d'autres pays, demeurent inutilisés chez nous.
Il ne faut pas attendre le dernier jour de leur détention pour soigner ces personnes ; elles doivent l'être dès le départ !
J'insiste sur le fait qu'il s'agit d'établissements socio-médico-judiciaires. Ce sont des établissements judiciaires parce les personnes qui y séjournent sont, bien légitimement, soumises à une surveillance.
Compte tenu du risque calculé de rétroactivité, nous prenons l'extrême précaution de réserver l'application immédiate de la mesure de rétention de sûreté aux cas les plus graves. (M. Pierre Fauchon opine.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pour l'instant !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Madame Borvo Cohen-Seat, nous ne visons dans le cas présent que les cas les plus graves parmi les cas graves, c'est-à-dire les cas extrêmes.
Je suis attaché au principe de non-rétroactivité de la loi pénale. Pour autant, dès lors qu'on estime, après une évaluation rigoureuse et en s'entourant de multiples précautions, qu'une personne, compte tenu de son passé, des motifs de sa condamnation, de son comportement et de son état psychologique et psychiatrique, risque de récidiver, il convient d'adopter toute mesure utile pour y obvier, comme on le ferait pour un malade mental, qu'on peut hospitaliser d'office à sa sortie de prison.
Cela étant posé, on peut parfaitement estimer qu'il s'agit d'une mesure de sûreté qui peut être appliquée immédiatement.
Après avoir longuement réfléchi à la question, en tenant compte des travaux réalisés sur cette question et de ce qui se pratique dans d'autres pays, je suis parvenu à la conclusion que la rétention de sûreté ne violait probablement aucun principe constitutionnel. Malgré tout, si tel ne devait pas être le cas, il resterait toujours la solution de l'assignation à domicile. Il est important de le souligner.
Néanmoins, madame le garde des sceaux, j'aurais souhaité que le sous-amendement du Gouvernement prévoie les mêmes garde-fous que ceux qui sont contenus dans le sous-amendement présenté par M. Portelli. Pourquoi ? Parce que s'il subsiste un doute quant à la rétroactivité, seuls les faits sont concernés, et non les condamnations.
Je comprends que vous vouliez appliquer le dispositif général aux personnes qui ont commis les faits avant l'entrée en vigueur de la loi mais n'ont pas encore fait l'objet d'une condamnation. Toutefois, ce faisant, vous affaiblissez quelque peu la portée du dispositif que nous avons voulu mettre en place, en donnant un avis favorable au sous-amendement de M. Portelli.
C'est la seule petite réserve que j'exprimerai, même si, je le répète, votre position, à laquelle je me range, est cohérente. Pourquoi ce qui vaudrait pour les personnes déjà condamnées ne vaudrait pas pour celles qui, bien qu'elles aient commis des actes illégaux, n'ont pas encore fait l'objet d'une condamnation ?
Dans votre logique, votre sous-amendement est cohérent avec le sous-amendement présenté par M. Portelli. Mais j'aurais préféré qu'il eût le même champ d'application.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote sur l'amendement n° 77.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Toutes vos contorsions pour nous convaincre que cette mesure n'est pas rétroactive nous confortent dans l'idée que la voie que vous nous proposez de suivre n'est pas la bonne.
Sans doute êtes-vous lassés, mes chers collègues de la majorité, de nous entendre défendre nos idées sur la question de la détention. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Robert del Picchia. Vous nous les avez déjà exposées !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Votre lassitude transparaît !
Par conséquent, considérons que ce problème a déjà été évoqué. Cela étant, rien ne vous empêche d'y réfléchir plus avant et de vous demander pourquoi la détention ne permet pas de soigner les détenus malades et pourquoi cette question ne fait pas l'objet d'un traitement prioritaire.
Considérons une personne qui a purgé une peine de quinze à vingt ans de prison pour un crime très grave. Au terme de sa détention, il apparaît que cette personne, en dépit de sa prise en charge thérapeutique, n'est absolument pas guérie et qu'elle ne maîtrise pas ses pulsions, sexuelles ou autres. De surcroît, elle ne veut ni aide, ni soins, ni traitement et refuse de se soumettre à un suivi socio-judiciaire. Bien qu'un tel refus l'expose à passer sa vie en rétention, cette personne s'en « moque ». Bien entendu, elle a fait l'objet d'une évaluation psychiatrique censée mesurer sa dangerosité et ses risques de récidive, puisque c'est ce que prévoit votre projet de loi.
Excusez-moi - que les psychiatres m'excusent aussi, car leur tâche n'est pas facile -, mais si cette personne n'est pas victime d'une altération mentale grave, je ne sais pas qui en souffre !
Cette dissociation entre troubles mentaux et troubles de la personnalité, alors que les uns sont des schizophrènes et les autres des psychotiques, est due au fait que la psychiatrie n'est pas capable - on peut le comprendre - de prendre en charge un certain nombre de troubles mentaux que l'on pourrait qualifier de troubles de la personnalité, parce qu'ils s'ajoutent aux troubles du comportement. Je considère pour ma part que, quoi qu'il en soit, cet individu présente certainement une altération grave de son cerveau.
Il existe l'hospitalisation d'office, car la société veut se prémunir, se protéger. Il faut avoir le courage de prendre ses responsabilités et ne pas demander à un détenu qui termine une peine de prison d'en refaire une autre !
Vous dites, en outre, que ces individus seront placés dans un hôpital, qui ne sera pas tout à fait une prison. Or l'hospitalisation d'office est soumise à des règles spécifiques et à des garanties, et est sous le contrôle du juge des libertés et de la détention.
Ayez donc le courage de prévoir, par une mesure administrative, l'hospitalisation dans un hôpital psychiatrique comprenant éventuellement, si vous le souhaitez, une unité spéciale. Mais il est inadmissible que l'on ne se serve pas de ce qui existe - pour des raisons profondes assez complexes que j'aimerais connaître et que je crois pouvoir deviner - et que l'on viole le principe de non-rétroactivité de la loi pénale en maintenant en détention une personne qui a déjà purgée sa peine de vingt ans de prison !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Non !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est le point de vue de la justice !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est votre point de vue !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est inadmissible !
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je vais essayer de ne pas énerver M. le président de la commission des lois... (Sourires.)
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Vous ne m'énervez jamais quand vous parlez ; je suis juste un peu agacé lorsque vous m'interrompez !
M. Pierre-Yves Collombat. Pardonnez-moi !
Mes chers collègues, deux cas de figure se présentent à nous.
Lorsqu'une condamnation à perpétuité a été prononcée, les mesures prises, quelles qu'elles soient, peuvent parfaitement s'appliquer. La rétention de sûreté est une modalité d'application de la peine.
Tout se complique à partir du moment où nous parlons de peine à durée déterminée, à la différence des Anglo-Saxons, qui prononcent des peines à durée indéterminée, et des Néerlandais, qui, eux, ne font pas la différence entre les malades mentaux et les personnes atteintes de troubles de la personnalité, qui ne les jugent pas mais qui les soignent.
Depuis hier soir, on essaie de nous faire croire que la privation de liberté ad vitam aeternam, quand la personne ne relève pas de l'hospitalisation d'office, non pas pour ce qu'elle a fait mais pour ce qu'elle risque de faire, est compatible avec notre ordre républicain. Et pour envelopper le tout, on maquille juridiquement l'affaire en créant des juridictions qui peuvent rendre des mesures de police, de sûreté.
Jusque là, c'est déjà un peu fort ! Mais on va encore plus loin en nous faisant discuter en urgence de décisions qui ne seront applicables que dans quinze ou seize ans ! C'est tout de même un peu curieux ; cela ressemble à de la gesticulation !
Il fallait évidemment penser à pouvoir appliquer directement la mesure, d'où les mécanismes qui ont été inventés. Ils sont plus ou moins compliqués ; sur le plan pratique, ils sont plus ou moins privatifs de liberté. Mais le problème théorique reste le même, sauf que, en plus, on nous propose une application des dispositions à titre rétroactif.
Donc, quelles que soient les modifications qui nous sont soumises, elles tombent sous le coup de la même critique. C'est pourquoi la seule chose à faire, c'est de supprimer cet article 12.
Cela dit, si nous n'avons le choix qu'entre le pire et le moins pire, je préfère l'amendement de M. le rapporteur, Jean-René Lecerf, qui au moins ne va pas jusqu'à prévoir une privation totale de liberté.
Quant à l'invention d'un délit annexe pour justifier l'utilisation de la rétention de sûreté alors que les peines sont accomplies, franchement, je sais que nous avons affaire à d'excellents juristes, mais ce sont vraiment de grands acrobates !
M. le président. La parole est à M. Pierre Fauchon, pour explication de vote.
M. Pierre Fauchon. S'il est permis à un « acrobate » d'intervenir dans ce débat en toute modestie (Sourires), je le ferai maintenant pour présenter de nouveau ma position sur cette affaire, en l'adaptant au cas particulier de l'article 12 et en me situant à peu près dans la ligne de réflexion de M. le président de la commission.
Le problème qui se pose est celui de la rétroactivité. On n'est pas sûr de s'en tirer, monsieur le président de la commission, en affirmant, comme je le crois absolument, qu'il s'agit d'une mesure de sûreté et pas du tout d'une peine, parce que la gravité de l'atteinte à la liberté est la racine de l'exigence de non-rétroactivité, même si la mesure prise n'est pas une sanction pénale. Donc attention, la situation est dangereuse !
Pour moi, en réalité, ce problème n'en est pas vraiment un, puisque nous sommes en présence d'un concept nouveau, la rétention, et que, à chaque fois que l'on découvre un concept autonome fondé sur la dangerosité, on a tendance non pas à imaginer et à créer les données relatives à cette notion nouvelle, mais à se rattacher à des concepts antérieurs déjà connus et à transposer nos acquis dans ce nouveau domaine. C'est la raison pour laquelle on se réfère obstinément au concept de peine pour aborder la rétention.
J'en suis convaincu, l'essentiel de ce texte - c'est ce qui le justifie et c'est pourquoi j'en suis peut-être, au fond, son meilleur supporter -, consiste à dire que la notion de rétention est une notion autonome, qui s'apparente d'une certaine façon à la détention provisoire - je l'ai déjà évoqué et Mme le garde des sceaux a d'ailleurs repris les mêmes termes -, dont l'une des causes est d'éviter la répétition des faits, je le rappelle au passage, mais qui s'apparente surtout à une hospitalisation d'office.
Quand on voit les choses sous cet angle - et c'est tout simple, semble-t-il -, on se dit que la rétroactivité doit s'apprécier à partir du fait qui cause et qui justifie la rétention, c'est-à-dire non pas la condamnation intervenue quinze ans auparavant, qui est une condition, mais le diagnostic des experts qui se réunissent au sein d'une commission pluridisciplinaire, postérieurement au vote de la loi bien entendu.
Les membres de la commission compétente tiennent compte de tous les éléments dont ils disposent pour donner un avis sur un individu qui répond naturellement à la condition originelle d'avoir déjà été condamné, sinon il faudrait examiner tout le monde. S'ils considèrent, hic et nunc, que la personne concernée présente un risque de dangerosité, ils rendent une décision en conséquence, laquelle ne pose pas de problème du point de vue de l'exigence de non-rétroactivité, puisque sa cause est bien postérieure à la loi.
Voilà le fond de ma pensée. Je trouve aussi que l'on se complique exagérément la vie, avouons-le, en ayant cru obligatoire, à mon avis à tort, d'introduire dans l'article 1er l'exigence de la prévision initiale selon laquelle les personnes condamnées à des peines privatives de liberté d'une durée égale ou supérieure à quinze ans devaient être réexaminées à l'issue de leur détention.
En conséquence, on a ajouté ce malheureux alinéa 2, qui prévoit que la rétention de sûreté ne peut être prononcée que si la cour d'assises, statuant quinze ans auparavant, a expressément prévu que la personne pourra faire l'objet à la fin de sa peine d'un réexamen de sa situation et de son éventuelle dangerosité.
Entre nous soit dit, vous voyez le côté farfelu de la prévision qui se situe quinze ans avant l'échéance et qui n'est assortie d'aucune sanction ! J'ai déjà eu l'occasion de dire que ce dispositif était très mal bâti. Mais il paraît qu'on y trouve, à la demande du Conseil d'État, une sécurité juridique par rapport à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales...
J'ai déjà expliqué hier que je croyais que ce n'était pas exact, et je me suis penché sur le texte de la Convention. Là encore, on en fait, me semble-t-il, une lecture tout simplement insuffisante.
Que dit la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ? Vous voudrez bien m'excuser d'être un peu long, mais cette question délicate autorise quand même une explication un peu plus précise. Elle dispose : « Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales : s'il est détenu régulièrement après condamnation par un tribunal compétent... ».
C'est à cause de cette exigence de la Convention européenne que l'on va nous obliger à avoir quinze ans auparavant non pas une condamnation, mais une prévision ! C'est en tout cas ce que dit en toutes lettres l'avis du Conseil d'État. À mon avis, celui-ci n'a pas lu complètement les différentes hypothèses prévues.
La deuxième éventualité est celle où l'individu « a fait l'objet d'une arrestation ou d'une détention régulières... ».
La troisième hypothèse est la détention provisoire, sur laquelle on aurait peut-être pu s'arrêter dans la mesure où l'une de ses raisons d'être est d'éviter la répétition des faits. Cette disposition suffisait, et l'on n'avait pas besoin de condamnation antérieure.
L'éducation surveillée, ensuite, ne nous concerne pas.
Le paragraphe suivant est beaucoup plus large, et c'est dans cette largeur que se situe notre hypothèse de rétention. Est visée « la détention régulière d'une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d'un aliéné,...
M. Pierre-Yves Collombat. Pourquoi me regardez-vous comme cela ?
M. Pierre Fauchon. Parce que vous m'inquiétez !
M. Pierre-Yves Collombat. Ainsi, nous sommes deux ! (Sourires.)
M. Pierre Fauchon. Je disais donc qu'il s'agit « de la détention régulière d'une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d'un aliéné, d'un alcoolique, d'un toxicomane ou d'un vagabond ».
Concernant les aliénés, notre langage et nos concepts doivent évoluer en tenant compte des avancées de la science. Nous nous trouvons dans l'hypothèse d'une personne qui est aliénée au sens profond du terme, puisqu'elle ne se domine pas et qu'elle est dangereuse.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Absolument !
M. Pierre Fauchon. La dangerosité est une variante de l'aliénation.
Je me suis référé tout à l'heure au dictionnaire culturel Le Robert, qui est une référence. Il commence par citer La Bruyère - vous savez que j'aime les citations -, qui dit en parlant de quelqu'un : « Il se déconcerte, il s'étourdit, c'est une courte aliénation. » Le petit crime, soit dit en passant, c'est une courte aliénation. Et le texte de définir ensuite l'aliénation comme « un dérèglement permanent ou passager des facultés intellectuelles, un désordre mental qui met le sujet dans l'impossibilité de mener une vie sociale normale ».
Puisque nous nous trouvons dans une variété d'aliénation, il n'est nul besoin d'avoir cette condamnation initiale. Cet alinéa 2 est de trop ; si on le supprimait, on serait beaucoup plus à l'aise et cela permettrait de faire l'économie de ce débat.
Tous ces amendements sont passablement le résultat de contorsions et dépassent les limites du raisonnable. Je n'en dirai pas plus, parce que j'ai beaucoup d'amitié et de considération pour ceux qui les ont rédigés.
Au demeurant, je ne veux pas mêler ma voix à celle des opposants au principe de la rétention. Moi, je suis foncièrement pour ; je la crois tout à fait nécessaire et urgente, et c'est la raison pour laquelle je ne participerai pas au vote.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. Je serai d'une concision exemplaire et constante, car, comme l'écrivait Paul Éluard à propos d'un texte comme celui-là : « Le tout est de tout dire, et je manque de mots, et je manque de temps, et je manque d'audace... » Je n'ai pas le temps, les mots peut-être, l'audace sûrement, mais la voix fait défaut. C'est ainsi.
Je formulerai mes observations amendement par amendement, pour être le plus clair possible.
L'amendement de suppression est lié à la question de la non-rétroactivité de la loi pénale. Monsieur Portelli, j'ai été surpris d'apprendre cette nouveauté extraordinaire : la sécurité se trouverait dorénavant dans notre ordre constitutionnel alors qu'elle est simplement, je le rappelle, un objectif de valeur constitutionnelle. Je vous renvoie à la grande décision rendue en la matière et au rapport Vedel.
La liberté vient en tête de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de la devise républicaine. Il ne faut jamais l'oublier, même si ce principe doit se concilier avec les autres objectifs.
Dans la défense de la liberté, la non-rétroactivité de la loi pénale - question bien posée par M. Fauchon -, je l'ai rappelé, est un fondement essentiel.
Il me suffirait de rappeler ce qui est advenu lorsque l'on a méconnu ce principe, en des circonstances heureusement radicalement différentes, mais pour la honte perpétuelle de ceux qui l'ont violé !
Peu importe qu'il s'agisse d'une mesure de sûreté ou d'une peine. L'aspect majeur, et je rejoins M. Fauchon sur ce point, c'est l'importance de l'atteinte à la liberté individuelle. Que l'on utilise le terme de rétention, qui existe déjà, de détention ou d'enfermement, lorsqu'une personne est, pour quelque motif que ce soit, retenue dans un lieu clos gardé par l'administration pénitentiaire, d'où elle ne sort qu'escortée, elle n'a plus de liberté individuelle. L'atteinte à la liberté individuelle est alors majeure et le principe de non-rétroactivité trouve sa place.
Voilà ce que je voulais dire. Vous aurez à en tenir compte. Reste à évoquer les différentes conséquences qu'il faut en tirer. Pour ma part, je suis convaincu que quelques-uns des excellents esprits de la commission des lois - je n'ai pas voulu utiliser le comparatif - partagent ce point de vue. Sinon, pourquoi M. Lecerf aurait-il déposé les amendements qu'il a déposés, et qui ont été votés par la commission ?
M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 78 rectifié ter.
M. Christian Cointat. Nous sommes confrontés à deux questions.
Tout d'abord, peut-on laisser sortir de prison un criminel dont on sait pertinemment qu'il va récidiver ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est ce que l'on suppose !
M. Christian Cointat. La réponse est négative.
Ensuite, pour atteindre l'objectif visé, peut-on ne pas respecter les garanties constitutionnelles et les textes des conventions internationales auxquelles la France est partie ? La réponse est également négative. Nous devons respecter le droit et les engagements internationaux, quel que soit l'objectif que nous voulons atteindre.
Considérons le sous-amendement de M. Portelli en fonction de ces deux questions.
Première question : permet-il de ne pas laisser sortir un criminel qui va récidiver ? La réponse est positive, et je m'en félicite.
Seconde question : respecte-t-il les contraintes du droit, les obligations que nous imposent la Constitution et la Convention européenne des droits à l'homme ? Je ne suis pas juriste mais, à mon sens, la réponse est négative. Et c'est bien là toute la difficulté.
Ce sous-amendement est le fruit d'une réflexion approfondie. Il prévoit l'intervention de la chambre d'instruction, du procureur général, du juge de l'application des peines, ce qui place la décision de rétention dans le cadre judiciaire, et c'est important. Toutefois, et je rejoins M. Fauchon sur ce point, il s'écarte du principe, fondamental à mes yeux, énoncé dans l'article 1er.
Comme je l'ai indiqué hier soir, je voterai ce projet de loi parce qu'on a maintenu l'article 1er dans son « entièreté », selon un terme cher à nos amis belges. L'objet de cet article est de lier le jugement et la mesure de rétention. Or, avec ce sous-amendement, brusquement, ce lien disparaît.
En effet, dans quinze ans - douze ans peut-être, avec les remises de peine - le problème ne se posera plus, puisque le texte aura trouvé son champ d'application. En revanche, que faire pendant la période transitoire ? On ne peut bien évidemment pas dire à nos concitoyens que, pendant douze ans, la loi ne pourra pas s'appliquer ; ce serait inacceptable !
Pour remédier à cette situation, M. le rapporteur, à qui je tiens à rendre hommage publiquement, avait trouvé une solution qui me paraissait répondre aux deux questions que j'ai posées tout à l'heure, donc à l'attente de nos concitoyens.
Le sous-amendement de M. Portelli va plus loin. Mais ne va-t-il pas trop loin ? Ne risque-t-il pas de nous mettre en difficulté devant le Conseil constitutionnel ou pire, s'il passe ce filtre, dans quelques années, devant la Cour européenne des droits de l'homme. (Murmures sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et surtout avec votre conscience !
M. Christian Cointat. Je suis désolé, mes chers collègues, mais si dans quatre ans, dans une période sensible, nous sommes condamnés par la Cour européenne des droits de l'homme, nous ne serons pas très à l'aise !
M. Louis de Broissia. Il faut savoir choisir !
M. Christian Cointat. Certes ! Les dispositions proposées par M. le rapporteur, et adoptées par la commission des lois, répondaient véritablement à l'enjeu en permettant de régler 99 % des cas.
Faut-il aller plus loin ? Si le Sénat le souhaite, je m'inclinerai. Je tiens toutefois à souligner que les décisions de rétention sont, par définition, liées à la peine. Allez dire à quelqu'un qui est resté enfermé quinze ans, qui est placé dans un centre de rétention, qui voit sa durée de rétention prolongée année après année, qui risque de rester enfermé jusqu'à la fin de ses jours : « mon cher monsieur, vous ne faites pas l'objet d'une peine, vous êtes soumis à une mesure de rétention ». Je ne suis pas persuadé qu'il fera bien la différence ! Ce qui est sûr, c'est qu'il ne pourra pas sortir. Et c'est pour cela que, même si nous franchissons le cap du Conseil constitutionnel, nous risquons d'être condamnés par la Cour européenne des droits de l'homme.
Ce sous-amendement va dans le sens de l'objectif que nous recherchons mais, selon moi, il soulève des difficultés juridiques que je ne suis pas à même de trancher. Si je souscris à l'objectif, je conteste la méthode. Je préférais la solution qu'avait préconisée M. le rapporteur. Aussi, dans un souci de cohérence, je ne prendrai pas part au vote sur ce sous-amendement.
Mais rassurez-vous, madame le ministre, je voterai l'ensemble du projet de loi. En ce moment décisif, ma voix ne vous manquera pas, car votre texte répond au principe cher à Clemenceau - M. Fauchon sera sans doute ravi de cette citation - selon lequel le Gouvernement a le devoir de faire en sorte que les bons citoyens soient tranquilles et que les mauvais ne le soient pas !
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. Je salue l'esprit inventif des auteurs de ce sous-amendement. Le dispositif qui nous est proposé est assurément l'une des plus remarquables usines à gaz juridiques de ces dernières années !
Permettez-moi, mes chers collègues, de vous dire quel est, selon moi, le sens de la démarche de M. Portelli.
Ce sous-amendement se fonde sur la méconnaissance de l'obligation de surveillance de sûreté.
Le juge de l'application des peines saisit, ou avise, le procureur général, lequel se tourne vers la chambre d'instruction, laquelle se réfère, tenez-vous bien, à une décision rendue sous l'empire d'une loi antérieure qui ne prévoyait ni la rétention de sûreté ni l'avertissement. Et c'est dans cette décision que, à partir d'un avertissement de rétention, la chambre d'instruction trouve le motif de déclencher la procédure !
Mais au titre de quelles compétences une chambre d'instruction peut-elle interpréter une décision devenue définitive ? D'autant que cette décision ne soulevait pas de difficulté d'exécution : le condamné est bien en prison.
Ainsi, afin de pouvoir mettre en oeuvre le dispositif que l'on a inventé, on va chercher rétroactivement une décision rendue sous l'empire d'une loi qui ignorait ledit dispositif. Et on trouve dans cette décision antérieure le motif de mettre en oeuvre la loi nouvelle ! Je vous laisse juge de ce que cela signifie.
Un tel procédé, qui n'est que le moyen détourné de faire accepter la rétention immédiatement applicable, ne saurait en aucun cas être utilisable. On ne peut pas jouer ainsi avec des concepts aussi fondamentaux. Je crois volontiers qu'il faut céder aux exigences de la sécurité mais, de grâce, pas au détriment de principes aussi essentiels !
Chercher, après coup, dans une décision rendue sous le régime d'une loi antérieure, un moyen de mettre en oeuvre une disposition que cette loi ne prévoyait pas ! Je m'arrête là ! On ne peut que voter contre ce sous-amendement.
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.
M. Robert del Picchia. Je ne suis pas juriste, vous le savez, et je n'ai pas la prétention de l'être.
J'ai écouté avec attention les juristes qui se sont prononcés et les fioritures juridiques qui nous ont été présentées.
M. Cointat a indiqué, à raison, que voter ce texte nous exposerait à des risques : une censure du Conseil constitutionnel d'une part, une condamnation de la Cour européenne des droits de l'homme, d'autre part.
Pour ma part, je serai simple et pragmatique. Je considère que le risque encouru par la société, par les familles des victimes et futures victimes est bien plus grand qu'une éventuelle condamnation de la Cour européenne des droits de l'homme ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.) Je me moque d'une telle condamnation si on protège d'éventuelles victimes.
C'est la raison pour laquelle, sans aucune arrière-pensée et en pleine conscience, je voterai ce sous-amendement.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Sans remord !
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 78 rectifié ter.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 12, modifié.
(L'article 12 est adopté.)
Demande de priorité
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Monsieur le président, pour une meilleure organisation des travaux tant du Sénat que du Gouvernement, je demande l'examen par priorité des articles 5 à 8, constituant le titre II du projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur cette demande de priorité formulée par la commission ?
M. le président. La priorité est de droit.
TITRE II
DISPOSITIONS MODIFIANT LE CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE
Article 5 (priorité)
Dans le premier alinéa de l'article L. 3213-7 du code de la santé publique, les mots : « d'un non-lieu, d'une décision de relaxe ou d'un acquittement en application des dispositions de l'article 122-1 du code pénal » sont remplacés par les mots : « d'un classement sans suite motivé par les dispositions de l'article 122-1 du code pénal, d'une décision d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ou d'un jugement ou arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ». - (Adopté.)
Article 6 (priorité)
Le livre VII de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° L'article L. 3711-1 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Pour la mise en oeuvre de l'injonction de soins prévue par les articles 131-36-4 et 132-45-1 du code pénal et les articles 723-30 et 731-1 du code de procédure pénale, le juge de l'application des peines désigne, sur une liste de psychiatres établie par le procureur de la République, un médecin coordonnateur qui est chargé : » ;
a bis) Dans le 4°, les mots : « est arrivé à son terme, » sont remplacés par les mots : «, le sursis avec mise à l'épreuve ou la surveillance judiciaire est arrivé à son terme, ou le condamné qui a bénéficié d'une libération conditionnelle, » ;
b) Il est ajouté un 5° ainsi rédigé :
« 5° De coopérer à la réalisation d'évaluations périodiques du dispositif de l'injonction de soins ainsi qu'à des actions de formation et d'étude. » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les médecins ayant suivi une formation appropriée et qui ont exercé pendant au moins deux ans la fonction de médecin coordonnateur à la date de publication de la loi no du relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental peuvent être inscrits sur la liste mentionnée au premier alinéa. » ;
2° Après le premier alinéa de l'article L. 3711-2, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sans que leur soient opposables les dispositions de l'article 226-13 du code pénal, les praticiens chargés de dispenser des soins en milieu pénitentiaire communiquent les informations médicales qu'ils détiennent sur le condamné au médecin coordonnateur afin qu'il les transmette au médecin traitant. » ;
3° Le dernier alinéa de l'article L. 3711-3 est ainsi rédigé :
« Le médecin traitant est habilité à prescrire au condamné, avec le consentement écrit et renouvelé, au moins une fois par an, de ce dernier, un traitement utilisant des médicaments qui entraînent une diminution de la libido. » ;
4° Le premier alinéa de l'article L. 3711-4-1 est ainsi rédigé :
« Si la personnalité du condamné le justifie, le médecin coordonnateur peut inviter celui-ci à choisir, en plus du médecin traitant, un psychologue titulaire des diplômes précisés par arrêté du ministre chargé de la santé. »
M. le président. L'amendement no 27, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Dans le second alinéa du a du 1° de cet article, après le mot :
psychiatres
insérer les mots :
ou de médecins ayant suivi une formation appropriée,
II. - Supprimer les huitième et neuvième alinéas (c du 1°) de cet article.
L'amendement no 28, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Supprimer les deux derniers alinéas (4°) de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Le droit en vigueur prévoit que les médecins coordonnateurs peuvent être choisis parmi les psychiatres ou parmi des médecins ayant suivi une formation appropriée.
Le ministre de la santé a souhaité réserver cette possibilité aux seuls psychiatres, jugeant que ces derniers étaient mieux à même de garantir la qualité du suivi de l'injonction de soins.
On compterait aujourd'hui 150 médecins coordonnateurs, parmi lesquels 9 médecins non-psychiatres. L'Assemblée nationale a jugé opportun de permettre à ceux-ci d'être maintenus dans leur fonction dès lors qu'ils justifient d'une ancienneté d'au moins deux ans - condition que, dans les faits, ils remplissent tous.
Il est cependant difficile de comprendre pourquoi l'on devrait se priver de la faculté de faire appel à des non-psychiatres dès lors qu'ils ont reçu une formation appropriée, qu'en pratique certains médecins coordonnateurs ont été recrutés avec ce profil et qu'enfin ils n'ont pas démérité, puisque le Gouvernement a accepté l'amendement de l'Assemblée nationale prévoyant leur maintien en fonction.
Le vivier des médecins psychiatres n'est pas tel que l'on puisse se passer d'autres sources de recrutement, dès lors que les garanties de formation sont exigées.
L'amendement no 27 a donc pour objet d'en rester, en la matière, au droit en vigueur.
J'en viens à l'amendement no 28.
Le projet de loi, tout en maintenant la faculté pour les psychologues de participer à la prise en charge des personnes soumises à une injonction de soins, interdit qu'ils puissent se substituer au médecin traitant.
La faculté de recourir à un psychologue à la place du médecin traitant constituait l'une des propositions de la mission d'information de la commission des lois de l'Assemblée nationale consacrée au traitement de la récidive des infractions pénales ; elle avait été reprise par la loi du 12 décembre 2005.
Toutefois, le décret d'application auquel renvoyait la loi n'a jamais été pris : la direction générale de la santé a mis en avant la difficulté de déterminer les formations qualifiant un psychologue pour la prise en charge d'un auteur d'infractions sexuelles.
On peut de nouveau regretter, compte tenu de la pénurie de psychiatres, que soit supprimée la faculté donnée aux psychologues, de manière encadrée, d'intervenir seuls comme médecins traitants. Il convient de se demander si tous les efforts ont été faits par le ministère de la santé pour déterminer les qualifications requises permettant à un psychologue de prendre en charge un auteur d'infraction sexuelle. On doit d'ailleurs constater qu'au Canada, par exemple, les personnes chargées de mettre en oeuvre les programmes destinés aux délinquants sexuels se recrutent principalement parmi les psychologues.
Enfin, le champ d'application du suivi socio-judiciaire ayant été largement étendu, l'injonction de soins peut, par exemple, s'appliquer aux auteurs de violences au sein du couple, qui peuvent tout à fait être suivis par des psychologues.
Aussi l'amendement no 28 vise-t-il également à en rester, sur ce point, au droit en vigueur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé, de la jeunesse et des sports. Monsieur le rapporteur, je mesure, bien sûr, la portée de vos amendements et de votre argumentation : vous souhaitez que tous les médecins puissent exercer la fonction de médecin coordonnateur. Néanmoins, je suis obligée d'exprimer mon désaccord et de vous demander de bien vouloir retirer ces amendements.
En effet, en l'état actuel du droit, les médecins non-psychiatres qui ont suivi une formation spécifique - dont le contenu doit être défini par arrêté ministériel - peuvent être médecins coordonnateurs.
Cette souplesse avait été voulue, à l'origine, pour faciliter la mise en oeuvre du dispositif créé voilà dix ans. Aujourd'hui, elle n'est plus adaptée à la gravité des infractions commises par les personnes relevant d'une injonction de soins ; je crois, à cet égard, que tout le débat parlementaire a bien montré à quelle population nous nous adressions.
Les connaissances requises pour accompagner les personnes condamnées ne se limitent plus à la clinique des auteurs d'infractions sexuelles, car il faut désormais pouvoir suivre indifféremment des catégories de personnes présentant des troubles très hétérogènes qui nécessitent une compétence très large.
Compte tenu de ces difficultés et de l'extension du champ de responsabilité des médecins coordonnateurs, il est indispensable de cibler ces pratiques sur des médecins dont la spécialité est la plus appropriée.
Vous savez, par ailleurs, que le médecin coordonnateur doit transmettre au juge de l'application des peines ou au travailleur social les éléments nécessaires au contrôle de l'injonction de soins. À cette fin, il doit être capable de suivre l'évolution fine du patient condamné, qu'il convoque périodiquement, ainsi que son adhésion aux soins et l'impact de ceux-ci. Dresser un tel bilan requiert des connaissances tout à fait spécifiques.
De surcroît, les médecins coordonnateurs sont impliqués dans le choix du médecin traitant, à l'égard de qui ils jouent également un rôle de conseil : leur magistère doit donc être reconnu par ce dernier, dont ils sont les confrères. Tous ces éléments, ajoutés à la participation aux centres de ressources, plaident en faveur d'une professionnalisation accrue de la fonction de médecin coordonnateur qui s'accorderait mal avec une formation limitée, aussi intéressante soit-elle.
Le projet de loi tend à renforcer les missions des médecins coordonnateurs, qui devront coopérer à la réalisation d'évaluations périodiques du dispositif de l'injonction de soins ainsi qu'à des formations et à des études. Cela justifie de réserver cette fonction aux seuls psychiatres.
Pour autant, je n'entends pas priver du dispositif les médecins ayant acquis au cours des dernières années une expérience précieuse. C'est pourquoi j'ai accepté que l'Assemblée nationale les autorise à y prendre part.
Pour toutes ces raisons, monsieur le rapporteur, je suis défavorable à l'amendement no 27.
Pour ce qui concerne l'amendement no 28, le même souci de rigueur, appliqué cette fois-ci à la prise en charge thérapeutique des personnes condamnées, implique d'exiger au minimum un suivi médical de ces personnes ; celui-ci est même indispensable, notamment, en cas de prescription de médicaments. C'est pourquoi le projet de loi entend garantir à tous les patients suivis dans le cadre de l'injonction de soins une prise en charge médicale.
Pour autant, bien entendu, je ne désire pas écarter non plus les psychologues du dispositif. En effet, leur intervention peut s'avérer éminemment souhaitable. Elle doit cependant se concevoir dans le cadre d'un suivi pluridisciplinaire, après établissement d'un diagnostic médical et fixation d'un protocole thérapeutique et de prise en charge établis par un médecin. Comme actuellement, il appartiendra au médecin coordonnateur de recommander la prise en charge par un psychologue en fonction de la personnalité de la personne condamnée.
Compte tenu de ces éléments, monsieur le rapporteur, j'émets un avis défavorable sur ces deux amendements, que je vous demande de bien vouloir retirer.
M. le président. Monsieur le rapporteur, les amendements nos 27 et 28 sont-ils maintenus ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Sur le fond, on ne peut qu'être d'accord avec les propos que vient de tenir Mme la ministre de la santé. Mais - et le mais est considérable - le problème demeure de la réalité de la profession de psychiatre, notamment de psychiatre opérant dans le secteur public, plus particulièrement dans le secteur hospitalier.
Je passe beaucoup de temps dans les établissements pénitentiaires. C'est ainsi qu'à Caen, par exemple - je l'évoquais encore hier -, le responsable du service médico-psychologique régional m'a indiqué qu'il fallait plus de un an pour qu'un rendez-vous demandé par un détenu auprès d'un psychiatre puisse être honoré.
Je précise, en outre, que notre intention est non pas d'obliger à nommer des médecins agréés ou des psychologues - permettez-moi de réunir les deux amendements, puisque le problème est de même nature -, mais simplement de poser le principe selon lequel, s'il n'y a pas de psychiatre, mieux vaut avoir un médecin agréé et formé que personne ; de même, s'il n'y a pas de médecin coordonnateur, il vaut mieux avoir un psychologue que rien, d'autant plus que, le suivi socio-judiciaire ayant été largement étendu, le psychologue est certainement à même de répondre à un certain nombre de problèmes qui se posent en ce qui concerne les auteurs de violences sexuelles.
N'étant pas moi-même médecin, mais étant plutôt juriste, j'ai été très intéressé hier par l'intervention de M. About, qui, en sa qualité de président de la commission des affaires sociales, a manifesté son appui total à nos deux amendements.
Il y a deux jours, au cours d'un débat auquel je participais sur la chaîne Public Sénat, un psychiatre de haute renommée - il sera facile de retrouver qui ! - s'interrogeait : il ne comprenait vraiment pas pourquoi, dans ce pays, on tient absolument à un mieux qui est finalement l'ennemi du bien.
Pour l'ensemble de ces raisons, et tout en reconnaissant que, sur le fond, Mme la ministre aurait raison si le vivier des psychiatres était suffisamment important, je préfère maintenir les deux amendements. Je souhaite que la mesure proposée s'applique au moins pendant la période nécessaire pour que les efforts réalisés par le Gouvernement, que je salue, portent leurs fruits et que davantage de psychiatres se préoccupent de missions en secteur public. Le temps doit leur être donné de se former. Or la formation d'un psychiatre ne se fait pas en quelques mois, ni même en quelques années !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. On constate sur le terrain que le frein essentiel au recrutement de médecins psychiatres coordonnateurs n'est pas, en réalité, la démographie des psychiatres : c'est l'attrait financier de la fonction de médecin coordonnateur.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Eh bien, il faut les payer !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Pour résoudre cette question, j'ai augmenté de 65 % la rémunération des médecins coordonnateurs en la portant de 426 euros à 700 euros. J'entends ainsi régler le problème d'une fonction finalement trop peu attractive au regard des responsabilités assumées, sans pour autant désigner des personnes non compétentes.
Véritablement, monsieur le rapporteur, je vous en supplie : attirons vers ces fonctions qui, j'y insiste, sont extrêmement difficiles à exercer, des praticiens compétents en les rémunérant convenablement au lieu d'y appeler des médecins qui n'auront pas les compétences requises !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Je ne suis pas du tout médecin, et je suis un tout petit peu juriste. Quand les médecins, surtout quand ils s'occupent du cerveau,...
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Oui, les psychiatres s'occupent de tout. Mais, généralement, tout cela trouve son origine dans le cerveau !
Madame la ministre, je comprends très bien votre position. Cependant, vous avez beau affirmer que les médecins sont en nombre, l'expérience montre que nous manquons de médecins, et partout.
J'ai, bien entendu, voté en son temps la loi par laquelle les services médicaux des prisons sont devenus du ressort de l'administration de la santé. Elle a marqué un progrès considérable, et l'on peut affirmer aujourd'hui que globalement, pour les soins somatiques, la situation est satisfaisante, même si des difficultés subsistent parfois du fait que certains établissements pénitentiaires sont très éloignés des centres hospitaliers qui sont en mesure de fournir des équipes.
Pour la psychiatrie, veuillez m'excuser, il n'en va pas de même ! À partir du moment où les psychiatres sont en nombre insuffisant, que fait-on ? On ne fait rien !
Peut-être nous sommes-nous mal compris, madame la ministre, peut-être est-il possible d'améliorer la rédaction de nos amendements : nous proposons une mesure qui, dans notre esprit, est temporaire. Faut-il, s'il n'y a pas de psychiatre, qu'il n'y ait pas de coordonnateur ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il est fait référence à un médecin coordinateur qui sera psychiatre ou médecin agréé !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Si cela peut être un médecin agréé, alors nous sommes d'accord !
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Ce ne sera plus possible, dorénavant ! Quant aux psychologues, leur intervention est régie par la loi du 12 décembre 2005.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. La discussion va sans doute se poursuivre. Néanmoins, pour toutes les raisons qui viennent d'être évoquées, et en me référant également aux arguments du président de la commission des affaires sociales, par précaution, j'incite mes collègues à soutenir la position de la commission des lois.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.
M. Richard Yung. N'étant ni juriste ni psychologue, je vois cela de l'extérieur. Il s'agit, selon moi, d'un problème de bon sens.
Il est indéniable, tout d'abord, que les chiffres de la démographie psychiatrique sont mauvais : les psychiatres en formation sont en nombre insuffisant et, même si des cohortes d'étudiants s'inscrivaient aujourd'hui, comme cela serait nécessaire, ce n'est que dans dix ans qu'ils seraient opérationnels.
Par ailleurs, nous savons que les psychiatres sont mal répartis sur le territoire : ils sont soit dans la région parisienne, soit sur la Côte d'azur, le reste de la France devenant progressivement une espèce de désert psychiatrique.
M. Richard Yung. Il convient de répondre à cette pénurie. Si, dans quelques années, des psychiatres en nombre suffisant arrivent sur le marché et sont prêts à assumer les fonctions de médecin coordonnateur, alors, nous pourrons revoir le dispositif, mais, aujourd'hui, il faut faire face.
M. le rapporteur et moi-même avons visité une prison très sensible, celle de Clairvaux. J'ai été frappé de ce que l'on m'y a dit : une seule journée de vacation de psychiatres - soit environ sept heures de travail - est prévue par semaine, pour 160 détenus. Telle est la réalité des soins psychiatriques dans une centrale !
Il faut résoudre ce problème. Or, Mme la ministre n'y apporte pas de réponse.
Que des psychologues extérieurs au milieu carcéral y interviennent n'est pas forcément mauvais, le fait d'avoir une expérience large de la société ne pouvant être que bénéfique.
Enfin, dans beaucoup d'autres pays européens, le système pénitentiaire a recours à des psychiatres vacataires qui ont reçu une formation appropriée pour travailler dans le secteur psychiatrique des hôpitaux.
Pour l'ensemble de ces raisons, je voterai ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Je ne comprends plus grand-chose ! Depuis le début de ce débat, il nous est dit que, la fin justifiant les moyens, nous devons accepter que soient détenus des gens ad vitam aeternam, même si cela nous met en délicatesse avec le droit - nous nous en préoccuperons plus tard - et même si nous ne disposons pas vraiment des moyens d'évaluer les conséquences d'une telle politique. Or, soudain, il nous est dit l'inverse - le droit, c'est le droit ! -, ce alors que nul n'ignore la crise gravissime que traverse le secteur psychiatrique en milieu carcéral, non plus que le nombre insuffisant de personnels psychiatriques soignants.
M. Pierre-Yves Collombat. Cette situation n'est pas spécifique à la France. M. le rapporteur et moi-même avons constaté, au Canada, que le même problème se posait. Quels remèdes les Canadiens ont-ils trouvés ? Ils ont mis en place un réseau de soutien, composé, bien sûr, de psychiatres, mais aussi de psychologues qui, progressivement, se sont formés à tout ce qui concerne la criminologie.
La proposition de la commission est de bon sens et permettra peut-être de passer d'une conception stratosphérique de l'application de la loi à la réalité. Franchement, madame la ministre, j'avoue ne pas comprendre vos réticences à l'accepter.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je veux - pardonnez-moi l'expression ! - « tordre le cou à un certain nombre de canards » !
La France n'est pas un désert psychiatrique : avec 14 000 psychiatres, elle compte l'un des taux les plus élevés du monde. Il faut revenir à la raison ! Les psychiatres sont suffisamment nombreux dans notre pays pour exercer les fonctions de médecin coordonnateur.
En fait, je le répète, le problème tient, non pas au nombre de médecins, mais à l'attractivité de la fonction de médecin coordonnateur, insuffisamment rémunérée, compte tenu de la complexité de la tâche et du sentiment d'insécurité dans lequel elle s'accomplit.
J'ai veillé à y remédier. J'ai donc tenu à créer des centres de ressources et à leur accorder des crédits : ainsi, le médecin coordonnateur ne se sentira plus isolé et travaillera dans une équipe pluridisciplinaire, au sein de laquelle des psychologues auront leur place, mais sous le contrôle d'un médecin psychiatre, cette tâche étant extrêmement difficile.
Vous me demandez pourquoi je tiens à ce que ce soit des psychiatres qui exercent cette fonction. C'est parce qu'elle est très ardue et que, en tant que ministre de la santé, je suis garante de la santé publique.
Il n'y a pas de crise psychiatrique quantitative en milieu carcéral ; il y a une crise qualitative, que j'entends résoudre par des mesures tendant à renforcer l'attractivité financière de cette profession et de son exercice.
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7 (priorité)
La première phrase du dernier alinéa de l'article L. 6112-1 du code de la santé publique est complétée par les mots : « et aux personnes retenues dans les centres socio-médico-judiciaires de sûreté ». - (Adopté.)
Article 8 (priorité)
L'article L. 6141-5 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° La première phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « ou des personnes faisant l'objet d'une rétention de sûreté » ;
2° Après le deuxième alinéa, il est inséré deux alinéas ainsi rédigés :
« Dès lors qu'il existe un risque sérieux pour la sécurité des personnes au sein des établissements mentionnés au premier alinéa du présent article, les personnels soignants intervenant au sein de ces établissements et ayant connaissance de ce risque sont tenus de le signaler dans les plus brefs délais au directeur de l'établissement en lui transmettant, dans le respect des dispositions relatives au secret médical, les informations utiles à la mise en oeuvre de mesures de protection.
« Les mêmes obligations sont applicables aux personnels soignants intervenant au sein des établissements pénitentiaires. »
M. le président. L'amendement n° 76, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. L'article 8 tend à modifier l'article L. 6141-5 du code de la santé publique en posant deux exigences a priori contradictoires : en cas de risque sérieux pour la sécurité des personnes au sein d'un centre de rétention de sûreté et des établissements pénitentiaires, les personnels soignants auront l'obligation de le signaler dans les plus brefs délais au directeur de l'établissement ; toutefois, ces personnels devront le faire dans le respect des dispositions relatives au secret médical.
Se pose donc ici une question cruciale : comment transmettre des informations sur un patient et respecter le secret médical, auquel sont, d'ailleurs, tenus les personnels soignants, et sans lequel le lien de confiance entre un médecin et son patient ne peut s'établir ?
La logique de l'ordre public l'emporte donc sur la logique de soins. Les personnels soignants seront soumis à une obligation de transmission et devront agir contre l'intérêt de leurs patients, pour des raisons de sauvegarde de l'ordre public ou, plus simplement, pour des nécessités de bon fonctionnement du service public pénitentiaire.
Cette disposition, si elle était adoptée, placerait les personnes détenues ou retenues en centre de rétention en dehors du champ d'application des articles L. 1110-4 et R. 41-27-4 du code de la santé publique, qui visent à garantir le secret des informations médicales vis-à-vis des personnes étrangères à l'équipe soignante.
Nous nous demandons pourquoi les règles de déontologie auxquelles les médecins et les personnels soignants sont astreints ne s'appliqueraient pas dans les établissements pénitentiaires et dans les centres de rétention de sûreté.
Les conditions de détention, trop souvent qualifiées de traitements inhumains et dégradants par le Comité européen pour la prévention de la torture et les différents commissaires européens aux droits de l'homme, ne suffisent-elles pas pour faire de nos prisons des zones de non-droit ? Faut-il que, de surcroît, les prisonniers ne puissent bénéficier de ce droit élémentaire qu'est le respect du secret médical, qui devrait être indissociable de l'acte de soigner ?
Pourtant, aussi bien les règles pénitentiaires européennes que les normes édictées par le Comité européen pour la prévention de la torture...
Mme Josiane Mathon-Poinat. ...exigent le respect des règles ordinaires du secret professionnel.
Manifestement, ces règles dérangent le Gouvernement. Cela rappelle tristement la loi sur la prévention de la délinquance, qui a remis en cause, elle aussi, un secret professionnel, celui auquel sont soumis les travailleurs sociaux, en créant la notion de « secret partagé ».
Le médecin sera obligé de transmettre au directeur d'établissement des informations sur son patient, mais dans le respect des dispositions relatives au secret médical. Il y a là une contradiction si ce n'est incompréhensible, du moins inexplicable.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. De quoi s'agit-il ? L'article 8 vise simplement à autoriser les médecins à signaler à l'administration pénitentiaire les risques éventuels liés à l'évolution de l'état de santé d'un détenu.
Nombre de faits divers particulièrement dramatiques ont appelé l'attention sur cette absolue nécessité de communication : il est donc temps de reconnaître que, parfois, une conception par trop stricte, de la part des médecins de l'administration pénitentiaire, non pas du secret médical - je ne vais pas jusque là - mais simplement de la communication d'informations opérationnelles, a eu des effets tragiques et a pu conduire à la mort de certains détenus.
L'avis de la commission est donc totalement défavorable.
Il me paraît important de préciser, à l'intention des médecins, qui, parfois, se sont inquiétés, que l'obligation pour les personnels soignants de signaler un risque pour la sécurité des personnes ne fixe qu'un devoir d'alerte sur un risque dont ces personnels auraient connaissance, sans - cela va de soi - impliquer une obligation de détecter un tel risque : la responsabilité du médecin, si celui-ci n'a pas su ou n'a pas pu déceler ce risque, ne saurait donc être engagée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L'explication de M. le rapporteur est excellente.
L'article 8 est simple : « Dès lors qu'il existe un risque sérieux pour la sécurité des personnes » au sein des établissements publics de santé spécifiquement destinés à l'accueil des personnes incarcérées ou des personnes faisant l'objet d'une rétention de sûreté, « les personnels soignants intervenant au sein de ces établissements et ayant connaissance de ce risque sont tenus de le signaler dans les plus brefs délais au directeur de l'établissement en lui transmettant, dans le respect des dispositions relatives au secret médical, les informations utiles à la mise en oeuvre de mesures de protection. »
M. le rapporteur a, en outre, précisé que les mêmes obligations sont applicables au personnel soignant intervenant au sein des établissements pénitentiaires.
Rappelez-vous, madame la sénatrice, l'affaire Evrard ! Comment ne pas être frappé de voir à quel point la chaîne de l'information a été gravement perturbée ? Des drames épouvantables auraient sans doute pu être évités.
Il est indispensable de réfléchir à la meilleure manière de concilier le respect du secret médical avec le secours à personnes en danger et la nécessaire information des personnels intervenant en milieu carcéral sur la dangerosité des personnes détenues.
Il est question ici non pas de remettre en cause le secret médical - il reste préservé - mais d'inviter les praticiens à opérer un transfert d'informations opérationnelles à destination de l'administration chargée des lieux de détention ou de rétention, ce dans le seul souci de garantir la sécurité des personnels et des personnes privées de liberté.
Imaginez, madame la sénatrice, que vous êtes médecin, que vous suivez un malade, et que vous vous rendez compte que son état de santé met en danger la vie de ses codétenus, ainsi que celle des personnels : pourriez-vous ne pas transmettre cette information capitale ?
Mme Marie-Thérèse Hermange. Exact !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. J'insiste : cette information capitale pour la vie des gens, vous ne la transmettriez pas ? Ce serait une attitude totalement insoutenable !
M. le président. Nous en revenons au chapitre II.
CHAPITRE II
Dispositions relatives aux réductions de peines
Article 2
I. - Après la première phrase du troisième alinéa de l'article 721 du code de procédure pénale, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Il peut également ordonner le retrait lorsque la personne a été condamnée pour les crimes ou délits, commis sur un mineur, de meurtre ou assassinat, torture ou actes de barbarie, viol, agression sexuelle ou atteinte sexuelle et qu'elle refuse pendant son incarcération de suivre le traitement qui lui est proposé par le juge de l'application des peines, sur avis médical, en application des articles 717-1 ou 763-7. »
II. - Le deuxième alinéa de l'article 721-1 du même code est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque la personne a été condamnée pour les crimes ou délits, commis sur un mineur, de meurtre ou assassinat, torture ou actes de barbarie, viol, agression sexuelle ou atteinte sexuelle, la réduction ne peut excéder deux mois par an ou quatre jours par mois ou, si elle est en état de récidive légale, un mois par an ou deux jours par mois, dès lors qu'elle refuse les soins qui lui ont été proposés. »
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 54 est présenté par MM. Badinter, Collombat, Frimat, C. Gautier, Mermaz, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 72 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l'amendement n° 54.
M. Richard Yung. Il s'agit d'un amendement de suppression de l'article 2 relatif aux réductions de peine, sujet sur lequel le Parlement a déjà légiféré à plusieurs reprises ces dernières années, à l'occasion de l'examen de la loi Perben II en 2004, prévoyant certaines mesures de sûreté, et de la loi du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs.
À chaque fois que l'opportunité s'est présentée, le travail législatif a abouti à diminuer les réductions de peine ou à aggraver, en quelque sorte, leurs conditions d'accès.
Il nous est ici proposé, dans le I de cet article, de « réduire » la réduction de peine elle-même en cas de refus de suivre le traitement proposé par le juge de l'application des peines, le JAP. Au vu de la situation actuelle, où le juge peut retirer la réduction de peine à hauteur de trois mois maximum par an, l'application pour les cas visés à ce paragraphe aboutira à la suppression complète de ladite réduction.
Il s'agit de revenir sur une réforme, positive, qui avait supprimé toute distinction en matière de réduction de peine en fonction de la gravité de celle-ci. Tout le monde était ainsi mis sur le même plan, ce qui avait été très bien perçu et très bien vécu dans les prisons, comme pourront vous le confirmer l'ensemble des personnels pénitentiaires.
Le II du même article vise un cas similaire quoique un peu différent, c'est-à-dire les réductions de peine supplémentaires qui étaient octroyées aux condamnés manifestant des efforts sérieux de réadaptation par le travail ou les études. Autrement dit, ils étaient encouragés à suivre une telle voie. Là encore, on va diminuer ces réductions de peine supplémentaires jusqu'au point où elles seront finalement supprimées.
Certes, je comprends une partie de la philosophie qui sous-tend le dispositif. Il s'agit de contraindre le condamné à accepter tel ou tel traitement qui lui est proposé, car son refus peut signifier, ce qui est effectivement choquant, qu'il n'a aucune envie de s'amender ni d'aller vers la guérison.
Or, ce n'est exact qu'en apparence. Au fond de moi, je me dis que nul ne peut contraindre quelqu'un à se soigner. Après tout, le refus est un choix fondamental, un choix personnel ; sans doute est-ce un mauvais choix, sur lequel nous-mêmes portons un regard négatif, mais c'est le choix du détenu.
Le danger qui se profile derrière est réel. Nombre de psychopathes et de criminels endurcis ne manquent malheureusement pas de subtilité et vont très bien comprendre le fonctionnement de cette mécanique. Pour éviter les suppressions de réduction de peine, pour être bien considérés, il leur suffira de faire semblant, en acceptant de suivre le traitement recommandé par le juge de l'application des peines, mais seulement en apparence. Ils n'iront pas dans le sens de la guérison parce qu'ils resteront à la surface des choses. Ils ne participeront pas au traitement de tout leur coeur et de toute leur âme. En réalité, il y aura une apparence de traitement, un non-soin et, donc, une non-guérison.
Par ailleurs, tous les personnels pénitentiaires vous le diront, les réductions de peine sont un élément extrêmement important dans la vie des condamnés et leur diminution, que le projet de loi tend à introduire, aura certainement pour conséquence de tendre les relations dans les prisons, voire d'y accroître la violence.
Pour toutes ces raisons, nous proposons la suppression de l'article 2.
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 72.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Aujourd'hui, l'article 2 modifie les articles 721 et 721-1 du code de procédure pénale, qui régissent le régime des réductions de peines. Je rappelle que ceux-ci ont déjà été modifiés, le premier par la loi de décembre 2005 et le second, tout dernièrement, par celle d'août 2007, dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle est d'application trop récente pour que l'on puisse juger de ses effets et sans compter qu'elle avait, elle aussi, été adoptée dans l'urgence.
Nous avions, pour notre part, contesté ces lois, alors que vous renforcez une nouvelle fois la logique d'enfermement. C'est ainsi que l'article 2 étend les exceptions au principe figurant à l'article 721 du code de procédure pénale et selon lequel « chaque condamné bénéficie d'un crédit de réduction de peine calculé sur la durée de la condamnation ».
Il procède, ce faisant, à des assimilations pour le moins peu pertinentes : le refus de se soumettre à des soins serait traité de la même manière qu'une « mauvaise conduite » ou une récidive. À cet égard, je rappelle les réserves émises en 2005 par notre collègue, François Zocchetto.
De plus, la limitation des réductions de peines toucherait ici des personnes non récidivistes, mais considérées en quelques sorte comme des « récidivistes potentiels ».
En juillet dernier, lors de l'examen du projet de loi renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs, nous avions rappelé l'unanimité des médecins pour dire que le principe du consentement aux soins est nécessaire si l'on veut que ceux-ci aient une chance de réussir et que ce consentement ne doit pas être contraint.
Nous avions également souligné, comme le fait d'ailleurs la commission des lois, l'exigence d'effectivité de ces soins ; c'est, évidemment, un minimum. Or, il est fortement à craindre que le problème ne reste posé, toujours en raison de l'insuffisance des moyens.
Surtout, les réductions de peines font partie des outils qui, à l'instar de la libération conditionnelle, doivent être favorisés, car ils ont une influence positive sur la réinsertion des détenus.
C'est aussi l'avis de la CNCDH, la Commission nationale consultative des droits de l'homme, qui considère que « Les nouvelles limites envisagées dans le présent texte sont autant d'obstacles aux possibilités de réinsertion durable et réelle du condamné dans la société ». Elles les jugent donc toutes « contreproductives ».
C'est au bénéfice de ces explications que nous vous proposons la suppression de cet article 2.
M. le président. L'amendement n° 38, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Supprimer le II de cet article.
L'amendement n° 88, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - L'article 721 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque, en raison de sa particulière dangerosité, le condamné est susceptible de faire l'objet d'une rétention de sûreté dans les conditions mentionnées à l'article 706-3-14, la juridiction régionale de la rétention de sûreté visée à l'article 706-53-15 peut décider du retrait de la réduction de peine dont a bénéficié le condamné aux fins de son placement en rétention de sûreté ».
2° Dans le dernier alinéa, après les mots : « en cas », sont insérés les mots : « de décision de placement en rétention de sûreté, ».
... - Dans le quatrième alinéa de l'article 721-1 du même code, après les mots : « de l'application des peines », sont insérés les mots : « ou de la juridiction régionale de la rétention de sûreté, ».
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Nous reprenons ici la même logique que celle qui sous-tendait l'amendement que nous avons défendu à propos de la substitution de la rétention de sûreté à la période correspondant aux crédits de peine dont le condamné a bénéficié.
En fait, au premier abord, l'article 2 corrobore en partie le dispositif que nous proposons, en ce que son I prévoit le retrait des crédits de peine du condamné visé à l'article 706-53-12. Cela va donc dans le sens de notre démarche, mais c'est pour nous insuffisant.
En effet, le retrait des crédits de peine doit être prononcé par la commission régionale de la rétention de sûreté, afin de garantir l'unicité de la décision. Si le juge de l'application des peines décide du retrait des crédits de peine en raison du refus de suivre le traitement proposé, ce sera pour ce motif et non en fonction de la dangerosité du condamné. Il nous paraît donc plus utile de confier le soin du retrait des crédits de peine à la commission régionale, dans le cadre de la décision de placement en rétention de sûreté.
Les deux systèmes ne nous semblent pas incompatibles. Il ne faudrait pas, en effet, créer une confusion entre la procédure de rétention de sûreté, encadrée par la commission régionale de la rétention de sûreté, et cette nouvelle procédure de retrait, confiée au juge de l'application des peines, en raison du refus de soins.
La commission régionale pourra, par ailleurs, s'appuyer sur la décision du JAP pour confirmer le retrait des crédits de peine un an avant la libération prévue du condamné, afin d'étayer sa décision de placement en rétention de sûreté.
Par ailleurs, le II de cet article a pour effet d'amoindrir les jours de crédits de peine, qui pourront être en quelque sorte convertis en une mesure de rétention de sûreté. En effet, la rétention de sûreté étant égale à celle du crédit de peine, l'article réduit en conséquence sa durée théorique. Il faudrait peut-être, au contraire, favoriser les crédits de réductions de peine supplémentaires, car, pour le type de condamnés visés, ils permettront dans tous les cas d'être convertis en un placement en rétention de sureté. Cela vaudrait mieux puisque, après tout, la prise en charge médicale et sociale serait meilleure que dans le cas d'un simple emprisonnement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur les amendements identiques nos 54 et 72 de suppression de l'article 2.
La réduction de peine doit être considérée non pas nécessairement comme un droit, mais comme une reconnaissance des efforts faits par le détenu pour sa réinsertion. À nos yeux, le refus de suivre un traitement et d'accéder aux soins est effectivement une attitude contre laquelle il convient de lutter. Si l'on ne peut pas forcer une personne à se soigner, on peut au moins l'y inciter vivement, et l'une des techniques possibles est justement la diminution des réductions de peine.
De même, pour ceux qui choisiraient délibérément d'aller jusqu'au bout de la peine et de refuser à la fois tout traitement et tout aménagement, la rétention de sûreté pourra être une manière de les inciter à accepter les soins.
En ce qui concerne les amendements nos 38 et 88, l'argumentation de Mme Boumediene-Thiery est quelque peu différente, puisqu'elle reprend la logique de l'un de ses amendements présentés précédemment, dans lequel elle prévoyait que la rétention de sûreté pouvait être appliquée dans le cadre de la durée correspondant aux réductions de peine obtenues.
Dans cette perspective, il pouvait s'avérer utile de ne pas limiter de telles réductions. Mais cette logique n'étant pas celle du projet de loi, la commission y est également défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 54 et 72. Le principe même de la réduction de peine, c'est d'être la conséquence d'une bonne conduite ou d'un gage de réinsertion ; ce n'est pas un droit automatique. Or elle a souvent été dévoyée.
S'agissant du type de délinquants visés, il est extrêmement important que la réduction de peine prenne tout son sens. Par conséquent, mieux vaut la prévoir en contrepartie de soins ou d'une autre mesure de réinsertion.
Pour les même raisons, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 38.
Par ailleurs, le Gouvernement émet le même avis défavorable sur l'amendement n° 88 que sur l'amendement n° 49 rectifié bis, qui a été examiné hier.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 54 et 72.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
CHAPITRE III
Dispositions applicables en cas d'irresponsabilité pénale en raison d'un trouble mental
Article 3
Après l'article 706-118 du code de procédure pénale, il est inséré un titre XXVIII ainsi rédigé :
« TITRE XXVIII
« DE LA PROCÉDURE ET DES DÉCISIONS D'IRRESPONSABILITÉ PÉNALE POUR CAUSE DE TROUBLE MENTAL
« CHAPITRE IER
« Dispositions applicables devant le juge d'instruction et la chambre de l'instruction
« Art. 706-119. - Si le juge d'instruction estime, lorsque son information lui paraît terminée, qu'il est susceptible d'appliquer le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal relatif à l'irresponsabilité pénale d'une personne en raison d'un trouble mental, il en informe les parties lorsqu'il les avise ainsi que le procureur de la République lorsqu'il lui communique le dossier, en application du premier alinéa de l'article 175.
« Le procureur de la République, dans ses réquisitions, et les parties, dans leurs observations, indiquent s'ils demandent la saisine de la chambre de l'instruction afin que celle-ci statue sur l'application du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal conformément aux articles 706-122 à 706-127 du présent code.
« Art. 706-120. - Lorsqu'au moment du règlement de son information, le juge d'instruction estime, après avoir constaté qu'il existe contre la personne mise en examen des charges suffisantes d'avoir commis les faits reprochés, qu'il y a des raisons plausibles d'appliquer le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal, il ordonne, soit d'office soit si le procureur de la République ou une partie en a formulé la demande, que le dossier de la procédure soit transmis par le procureur de la République au procureur général près la cour d'appel aux fins de saisine de la chambre de l'instruction.
« À défaut de cette transmission, il rend une ordonnance d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental qui précise qu'il existe des charges suffisantes établissant que l'intéressé a commis les faits qui lui sont reprochés.
« Art. 706-121. - L'ordonnance d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental met fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire.
« L'ordonnance de transmission de pièces rendue en application de l'article 706-120 ne met pas fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire, qui se poursuit jusqu'à l'audience de la chambre de l'instruction, sans préjudice de la possibilité pour le juge d'instruction, par ordonnance distincte, d'ordonner la mise en liberté ou la levée du contrôle judiciaire. S'il n'a pas été mis fin à la détention provisoire, la chambre de l'instruction doit statuer dans un délai de six mois en matière criminelle ou quatre mois en matière correctionnelle à compter de la date de l'ordonnance de transmission de pièces, à défaut de quoi la personne mise en examen est remise en liberté si elle n'est pas détenue pour une autre cause.
« Art. 706-122. - Lorsque la chambre de l'instruction est saisie en application de l'article 706-120, son président ordonne, soit d'office soit à la demande de la partie civile, du ministère public ou de la personne mise en examen, la comparution personnelle de cette dernière si son état le permet. Si celle-ci n'est pas assistée d'un avocat, le bâtonnier en désigne un d'office à la demande du président de la juridiction. Cet avocat représente la personne même si celle-ci ne peut comparaître.
« Les débats se déroulent et l'arrêt est rendu en audience publique, hors les cas de huis clos prévus par l'article 306.
« Le président procède à l'interrogatoire de la personne mise en examen, si elle est présente, conformément à l'article 442.
« Les experts ayant examiné la personne mise en examen doivent être entendus par la chambre de l'instruction, conformément à l'article 168.
« Sur décision de son président, la juridiction peut également entendre au cours des débats, conformément aux articles 436 à 457, les témoins cités par les parties ou le ministère public si leur audition est nécessaire pour établir s'il existe des charges suffisantes contre la personne d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés ou déterminer si le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal est applicable.
« Le procureur général, l'avocat de la personne mise en examen et l'avocat de la partie civile peuvent poser des questions à la personne mise en examen, à la partie civile, aux témoins et aux experts, conformément à l'article 442-1.
« La personne mise en examen, si elle est présente, et la partie civile peuvent également poser des questions par l'intermédiaire du président.
« Une fois l'instruction à l'audience terminée, l'avocat de la partie civile est entendu et le ministère public prend ses réquisitions.
« La personne mise en examen, si elle est présente, et son avocat présentent leurs observations.
« La réplique est permise à la partie civile et au ministère public, mais la personne mise en examen, si elle est présente, et son avocat auront la parole les derniers.
« Art. 706-123. - Si elle estime qu'il n'existe pas de charges suffisantes contre la personne mise en examen d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés, la chambre de l'instruction déclare qu'il n'y a lieu à suivre.
« Art. 706-124. - Si elle estime qu'il existe des charges suffisantes contre la personne mise en examen d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés et que le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal n'est pas applicable, la chambre de l'instruction ordonne le renvoi de la personne devant la juridiction de jugement compétente.
« Art. 706-125. - Dans les autres cas, la chambre de l'instruction rend un arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental par lequel :
« 1° Elle déclare qu'il existe des charges suffisantes contre la personne d'avoir commis les faits qui lui sont reprochés ;
« 2° Elle déclare la personne irresponsable pénalement en raison d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes au moment des faits ;
« 3° Si la partie civile le demande, elle renvoie l'affaire devant le tribunal correctionnel compétent pour qu'il se prononce sur la responsabilité civile de la personne, conformément à l'article 489-2 du code civil, et statue sur les demandes de dommages et intérêts ;
« 4° Elle prononce, s'il y a lieu, une ou plusieurs des mesures de sûreté prévues au chapitre III du présent titre.
« Art. 706-126. - L'arrêt de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental met fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire.
« Il peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation.
« Art. 706-127. - Les articles 211 à 218 sont applicables aux décisions prévues aux articles 706-123 à 706-125.
« Art. 706-128. - Les articles 706-122 à 706-127 sont applicables devant la chambre de l'instruction en cas d'appel d'une ordonnance d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ou en cas d'appel d'une ordonnance de renvoi lorsque cet appel est formé par une personne mise en examen qui invoque l'application du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal.
« CHAPITRE II
« Dispositions applicables devant le tribunal correctionnel ou la cour d'assises
« Section 1
« Dispositions applicables devant la cour d'assises
« Art. 706-129. - Lorsqu'en application des articles 349-1 et 361-1, la cour d'assises a, au cours du délibéré, répondu positivement à la première question relative à la commission des faits et positivement à la seconde question portant sur l'application du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal, elle déclare l'irresponsabilité pénale de l'accusé pour cause de trouble mental.
« Art. 706-130. - Lorsque la cour d'assises rentre dans la salle d'audience en application de l'article 366, le président prononce un arrêt portant déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.
« Cet arrêt met fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire.
« Art. 706-131. - En application de l'article 371 du présent code et conformément à l'article 489-2 du code civil, la cour, sans l'assistance du jury, statue alors sur les demandes de dommages et intérêts formées par la partie civile.
« Elle prononce s'il y a lieu une ou plusieurs des mesures de sûreté prévues au chapitre III du présent titre.
« Art. 706-132. - Le procureur général peut faire appel des arrêts portant déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. La cour d'assises statuant en appel est alors désignée conformément aux articles 380-14 et 380-15.
« L'accusé et la partie civile peuvent faire appel de la décision sur l'action civile. L'appel est alors porté devant la chambre des appels correctionnels, conformément à l'article 380-5.
« Section 2
« Dispositions applicables devant le tribunal correctionnel
« Art. 706-133. - S'il estime que les dispositions du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal sont applicables, le tribunal correctionnel rend un jugement de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental par lequel :
« 1° Il déclare que la personne a commis les faits qui lui étaient reprochés ;
« 2° Il déclare la personne irresponsable pénalement en raison d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes au moment des faits ;
« 3° Il se prononce sur la responsabilité civile de la personne auteur des faits, conformément à l'article 489-2 du code civil, et statue, s'il y a lieu, sur les demandes de dommages et intérêts formées par la partie civile ;
« 4° Il prononce, s'il y a lieu, une ou plusieurs des mesures de sûreté prévues au chapitre III du présent titre.
« Le jugement de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental met fin à la détention provisoire ou au contrôle judiciaire.
« Art. 706-134. - Les dispositions de l'article 706-133 sont applicables devant la chambre des appels correctionnels.
« Elles sont également applicables, à l'exception du 4°, devant le tribunal de police ou la juridiction de proximité.
« CHAPITRE III
« Mesures de sûreté pouvant être ordonnées en cas de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental
« Art. 706-135 A. - Sans préjudice de l'application des articles L. 3213-1 et L. 3213-7 du code de la santé publique, lorsque la chambre de l'instruction ou une juridiction de jugement prononce un arrêt ou un jugement de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, elle peut ordonner, par décision motivée, l'hospitalisation d'office de la personne dans un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 du même code s'il est établi par une expertise psychiatrique figurant au dossier de la procédure que les troubles mentaux de l'intéressé nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Le représentant de l'État dans le département ou, à Paris, le préfet de police est immédiatement avisé de cette décision. Le régime de cette hospitalisation est celui prévu pour les hospitalisations ordonnées en application de l'article L. 3213-1 du même code, dont le deuxième alinéa est applicable. L'article L. 3213-8 du même code est également applicable.
« Art. 706-135. - Lorsque la chambre de l'instruction ou une juridiction de jugement prononce un arrêt ou un jugement de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, elle peut ordonner à l'encontre de la personne les mesures de sûreté suivantes, pendant une durée qu'elle fixe et qui ne peut excéder dix ans en matière correctionnelle et vingt ans si les faits commis constituent un crime ou un délit puni de dix ans d'emprisonnement :
« 1° Interdiction d'entrer en relation avec la victime de l'infraction ou certaines personnes ou catégories de personnes, et notamment les mineurs, spécialement désignées ;
« 2° Interdiction de paraître dans tout lieu spécialement désigné ;
« 3° Interdiction de détenir ou de porter une arme ;
« 4° Interdiction d'exercer une activité professionnelle ou sociale spécialement désignée, dans l'exercice de laquelle ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise, sans faire préalablement l'objet d'un examen psychiatrique déclarant la personne apte à exercer cette activité ;
« 5° Suspension du permis de conduire ;
« 6° Annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d'un nouveau permis.
« Ces interdictions, qui ne peuvent être prononcées qu'après une expertise psychiatrique, ne doivent pas constituer un obstacle aux soins dont la personne est susceptible de faire l'objet.
« Si la personne est hospitalisée en application des articles L. 3213-1 et L. 3213-7 du code de la santé publique, les interdictions dont elle fait l'objet sont applicables pendant la durée de l'hospitalisation et se poursuivent après la levée de cette hospitalisation, pendant la durée fixée par la décision.
« Art. 706-136. - La personne qui fait l'objet d'une interdiction prononcée en application de l'article 706-135 peut demander au juge des libertés et de la détention du lieu de la situation de l'établissement hospitalier ou de son domicile d'ordonner sa modification ou sa levée. Celui-ci statue en chambre du conseil sur les conclusions du ministère public, le demandeur ou son avocat entendus ou dûment convoqués. Il peut solliciter l'avis préalable de la victime. La levée de la mesure ne peut être décidée qu'au vu du résultat d'une expertise psychiatrique. En cas de rejet de la demande, aucune demande ne peut être déposée avant l'expiration d'un délai de six mois.
« Art. 706-137. - Lorsque l'interdiction prévue au 1° de l'article 706-135 est prononcée, la partie civile peut demander à être informée par le procureur de la République de la levée de l'hospitalisation d'office dont cette personne aura pu faire l'objet en application des articles L. 3213-1 et L. 3213-7 du code de la santé publique.
« La partie civile peut, à tout moment, indiquer au procureur de la République qu'elle renonce à cette demande.
« Art. 706-138. - La méconnaissance par la personne qui en a fait l'objet des interdictions prévues par l'article 706-135 est punie, sous réserve des dispositions du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal, de deux ans d'emprisonnement et 30 000 € d'amende.
« Art. 706-139. - Un décret précise les modalités d'application du présent titre. »
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, sur l'article.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous abordons, avec l'article 3, le volet du projet de loi relatif à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental.
Cette irresponsabilité pénale est aujourd'hui régie par le principe posé à l'article 122-1 du code pénal, qui opère une distinction entre l'abolition et l'altération du discernement, afin de déterminer si la personne est pénalement irresponsable ou, au contraire, responsable.
La personne poursuivie fait l'objet d'une expertise psychiatrique au moment de l'instruction, une telle expertise étant de toute façon obligatoire lorsqu'elle a commis un crime.
Mais, de façon surprenante, l'irresponsabilité mentale est de moins en moins retenue par les juges d'instruction : ainsi, le nombre d'ordonnances de non-lieu rendues pour ce motif est passé de 444 en 1987 à 233 en 2003, soit une diminution de moitié environ.
Ces chiffres viennent confirmer le constat que faisait déjà la commission d'enquête parlementaire sur les prisons en 2000, qui indiquait ainsi : « les psychiatres, s'appuyant sur le deuxième alinéa de l'article 122-1 du nouveau code pénal, ont interprété la loi dans un sens univoque. À leur sens, peu de troubles psychiques ou neuropsychiques abolissent le discernement de la personne ou entravent le contrôle de ses actes. En conséquence, le nombre d'accusés jugés ? irresponsables au moment des faits ? est passé de 17 % au début des années quatre-vingt à 0,17 % pour l'année 1997 ».
Dans ces conditions, il n'est pas étonnant de retrouver ces personnes souffrant de troubles mentaux dans nos prisons : 30 % environ des détenus seraient concernés. L'augmentation du nombre de ceux qui nécessitent l'application de l'article D. 398 du code de procédure pénale permettant aux établissements pénitentiaires de procéder à des hospitalisations d'office dans les hôpitaux psychiatriques est un signe de cette évolution.
Ce n'est donc pas tant l'application de cet article 122-1 du nouveau code pénal qui pose problème, mais c'est bien la médiatisation des faits divers se rapportant à des cas d'irresponsabilité pénale et l'instrumentalisation de la souffrance des victimes. D'ailleurs, ce sont bien deux faits divers qui sont à l'origine de ce projet de loi, dont l'un concerne un jeune homme ayant tué deux infirmières de l'hôpital psychiatrique de Pau et ayant bénéficié d'un non-lieu pour raison psychiatrique.
Nous entendions le Président de la République déclarer, le 20 août 2007, que « le premier des droits de l'homme à défendre, c'est celui des victimes ». Pourtant, la loi n'est pas muette s'agissant des droits des victimes dans les cas d'irresponsabilité pénale. Depuis 1995, l'ordonnance de non-lieu motivée par un trouble mental est notifiée oralement dans le cabinet du juge d'instruction et la contre-expertise sollicitée par la partie civile est de droit.
La loi du 9 mars 2004 a introduit l'obligation faite au juge, en cas d'application de l'article 122-1, de préciser dans son ordonnance de non-lieu s'il existait des charges suffisantes établissant que l'intéressé a commis les faits qui lui sont reprochés. Pourquoi, par conséquent, vouloir réformer dans l'urgence cette procédure ?
Cette loi est donc clairement une loi d'affichage et non, évidemment, une loi destinée à améliorer le traitement des personnes irresponsables pénalement et à soutenir le secteur de la psychiatrie dans les hôpitaux et dans les établissements pénitentiaires.
Ce que le Gouvernement ne comprend pas, c'est qu'en donnant davantage de moyens à la prévention et au suivi des personnes malades mentales, que ce soit en prison ou en hôpital psychiatrique, on favorise la lutte contre les actes violents et la récidive et, de fait, on agit bien plus efficacement pour la réinsertion de ces personnes dans la société. Faire en sorte qu'il y ait moins de victimes, n'est-ce pas le meilleur moyen d'agir en leur faveur ?
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 55 est présenté par MM. Badinter, Collombat, Frimat, C. Gautier, Mermaz, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 73 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l'amendement n° 55.
M. Richard Yung. Je souhaite présenter quelques remarques sur la nouvelle procédure instaurée à l'article 3.
Je ferai deux types d'observations, les unes concernant la procédure applicable, les autres l'introduction de « mesures de sûreté pouvant être ordonnées en cas d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ».
En premier lieu, la participation du malade mental, atteint au point de ne pas être responsable de ses actes, à une forme de procès public qui aboutit à la déclaration d'irresponsabilité porte de sérieuses atteintes aux règles de procédure.
Elle entraîne, tout d'abord, une confusion entre la juridiction d'instruction et la juridiction de jugement, cette dernière devant se prononcer sur la réalité et l'imputabilité des actes. J'ai déjà développé ce point en défendant la motion d'irrecevabilité déposée par mon groupe. Il s'agit d'un problème lourd sur lequel le Conseil constitutionnel devra se prononcer.
Apparaît, ensuite, une confusion entre l'audience de jugement et l'instruction, alors même que, durant l'instruction, l'individu demeure présumé innocent.
En second lieu, l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dite Convention européenne des droits de l'homme, dispose que « tout accusé a droit notamment à [...] se défendre lui-même ». Or, dans la procédure envisagée, il existe un cas dans lequel l'accusé ne serait pas convoqué par le président de la chambre d'instruction, peut-être à juste titre s'il n'est pas en état de comparaître, mais aussi dans d'autres situations. En tout état de cause, cet accusé doit être représenté par son avocat, ce qui constitue une remise en cause de son droit à se défendre lui-même.
Un autre point est plus préoccupant. Cette nouvelle procédure, dont l'organisation est compliquée, ne représentera pas nécessairement un grand progrès pour les victimes et leurs familles. En effet, la confrontation physique avec un auteur de crime malade ne constituera pas une explication ou une réparation, mais sera plutôt un drame ajouté au drame, une confrontation de souffrances.
Dans un cas, si la personne présumée coupable est dans un état normal, ce qui peut arriver au cours des cycles de maladie mentale, la famille, les ayants droit ou la victime en tireront la conclusion négative que la déclaration d'irresponsabilité n'est qu'un artifice de procédure, que la personne dispose en réalité de toutes ses capacités, qu'elle est donc vraiment coupable et qu'elle échappe au véritable jugement en faisant semblant d'être malade.
Dans un autre cas, si le coupable présumé est dans un état tel que sa maladie mentale apparaît clairement, il n'y aura pas de dialogue possible. On verra probablement se jouer une mauvaise scène de théâtre, douloureuse pour chaque partie, et les familles n'en tireront pas un grand réconfort.
Une autre variante possible consisterait à prévoir la représentation du coupable présumé par son avocat, comme cela se fait, dans un certain nombre de cas, en cour d'assises. Ainsi, le président de la cour d'assises de Paris nous a dit avoir organisé, à plusieurs reprises, des réunions entre des familles de victimes et les avocats des deux parties concernées, ce qui a permis de faire le tour de l'affaire, sans rien cacher, et de dégager la vérité sur la situation. J'ai cru comprendre que ceux qui avaient participé à ces réunions en étaient sortis plus réconfortés que si le coupable présumé avait été présent.
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons la suppression de l'article 3.
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 73.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement vient d'être défendu.
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 706-119 du code de procédure pénale, remplacer les mots :
il en informe les parties lorsqu'il les avise ainsi que le procureur de la République lorsqu'il lui communique le dossier
par les mots :
il en informe le procureur de la République lorsqu'il lui communique le dossier ainsi que les parties lorsqu'il les avise
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de cohérence rédactionnelle.
M. le président. L'amendement n° 23, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après les mots :
il ordonne,
rédiger comme suit la fin du premier alinéa et le début du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 706-120 du code de procédure pénale :
si le procureur de la République ou une partie en a formulé la demande, que le dossier de la procédure soit transmis par le procureur de la République au procureur général aux fins de saisine de la chambre de l'instruction. Il peut aussi ordonner d'office cette transmission.
« Dans les autres cas, il rend ordonnance...
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de clarification rédactionnelle, qui vise à distinguer clairement l'hypothèse dans laquelle le juge d'instruction a une compétence liée pour renvoyer un dossier à la chambre de l'instruction en vue d'une déclaration d'irresponsabilité pénale - c'est-à-dire lorsque le procureur de la République ou une partie le demande - des autres cas dans lesquels ce juge conserve sa liberté d'appréciation.
Je souhaite cependant modifier légèrement cet amendement en supprimant les trois derniers mots du dernier alinéa, « il rend ordonnance », qui n'ont pas à y figurer.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 23 rectifié, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, et ainsi libellé :
Après les mots :
il ordonne,
rédiger comme suit la fin du premier alinéa et le début du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 706-120 du code de procédure pénale :
si le procureur de la République ou une partie en a formulé la demande, que le dossier de la procédure soit transmis par le procureur de la République au procureur général aux fins de saisine de la chambre de l'instruction. Il peut aussi ordonner d'office cette transmission.
« Dans les autres cas, ...
L'amendement n° 24, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le cinquième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 706-122 du code de procédure pénale, après les mots :
qui lui sont reprochés
remplacer le mot :
ou
par le mot :
et
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Je présenterai en même temps les amendements nos 24, 25 et 26.
L'amendement n° 24 est un amendement de clarification rédactionnelle.
L'amendement n° 25 est un amendement d'harmonisation rédactionnelle par rapport à l'article 131-36-2 du code pénal.
L'amendement n° 26 vise à préciser l'une des interdictions à laquelle peut être soumise une personne reconnue irresponsable pénalement, celle d'exercer l'activité professionnelle à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise.
Il s'agit d'indiquer, sur le modèle de l'interdiction prévue par un autre article du code pénal, l'article 131-36-2, relatif au suivi socio-judiciaire, que l'interdiction peut aussi viser toute activité au contact de mineurs.
M. le président. L'amendement n° 57, présenté par MM. Badinter, Collombat, Frimat, C. Gautier, Mermaz, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le 3° du texte proposé par cet article pour l'article 706-125 du code de procédure pénale, remplacer le mot :
correctionnel
par le mot :
civil
La parole est à M. Robert Badinter.
M. Robert Badinter. Cet amendement tend à améliorer la procédure instaurée ainsi que la condition des victimes.
Une fois intervenue la décision de la chambre d'instruction de prononcer l'irresponsabilité pénale se pose la question de la réparation des dommages causés aux victimes, que la loi permet et que la pratique doit favoriser. Or, dans le texte qui nous est soumis, il est prévu de renvoyer l'affaire devant le tribunal correctionnel pour arbitrer les dommages-intérêts. Cette procédure est singulière, dans la mesure où les juridictions pénales ne peuvent plus être saisies de l'infraction.
Autant la logique commande, dans la foulée du débat, lorsqu'une juridiction pénale s'est prononcée sur les faits, que cette juridiction, connaissant ceux-ci, statue sur les dommages-intérêts, autant cette logique disparaît en matière de dommages-intérêts civils, dès lors qu'il n'y a plus de compétence de la juridiction pénale. Il faut alors se rendre devant le tribunal civil, et plus exactement devant la chambre civile spécialisée dans les problèmes de responsabilité civile.
Puisqu'il faut aller devant une juridiction, il convient de choisir la plus compétente en la matière, c'est-à-dire au premier chef la juridiction civile, et non le tribunal correctionnel, qui n'aura pas connu de l'affaire. J'ajoute que la juridiction civile se montre à la fois plus cohérente et souvent plus généreuse envers les victimes.
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le cinquième alinéa (4°) du texte proposé par cet article pour l'article 706-135 du code de procédure pénale, remplacer le mot :
sociale
par le mot :
bénévole
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 26, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le cinquième alinéa (4°) du texte proposé par cet article pour l'article 706-135 du code de procédure pénale, après les mots :
a été commise
insérer les mots :
ou impliquant un contact habituel avec les mineurs,
Cet amendement a déjà été défendu.
L'amendement n° 74, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le texte proposé par cet article pour l'article 706-138 du code de procédure pénale.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cet amendement n'a pour objet que de signaler l'incohérence consistant à prévoir des sanctions pénales à l'encontre d'une personne déclarée irresponsable pénalement.
Les mesures de sûreté susceptibles d'être prononcées à l'encontre de cette personne sont déjà suffisamment source de confusion et d'ambiguïté ; elles ne sont pas véritablement la conséquence d'un procès pénal et ne correspondent pas non plus à des mesures qui pourraient être prescrites à tout malade dans le respect de ses droits.
Prévoir, comme vous le faites, d'inscrire la personne malade mentale dans une procédure judiciaire, avec un jugement en audience publique et la possibilité de prononcer des mesures de sûreté assorties de sanctions pénales en cas de non-respect de ces mesures, ne fait que renforcer l'assimilation de ce malade à un criminel responsable.
C'est, d'ailleurs, sur cette assimilation entre maladie mentale et délinquance que s'appuie ce projet de loi. Or le traitement de la maladie mentale ne peut et ne doit pas se confondre avec la prévention de la délinquance. Ce traitement relève de la santé publique et non de l'ordre public. Confondre les deux aboutit à une incohérence, comme celle consistant à sanctionner pénalement une personne déclarée irresponsable pénale en cas de non-respect d'une mesure de sûreté.
C'est pourquoi nous demandons la suppression du texte proposé par cet article pour l'article 706-138 du code de procédure pénale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. L'avis de la commission est défavorable sur les amendements de suppression nos 55 et 73. Lors des auditions que nous avons menées, tant les associations de victimes que les associations de familles de patients en psychiatrie se sont montrées assez favorables aux nouvelles dispositions prévues dans le projet de loi.
L'amendement n° 57 a largement retenu l'attention de la commission des lois. La possibilité de donner au tribunal correctionnel la compétence de statuer sur les intérêts civils répond d'abord au souci de simplifier la procédure pour les victimes. Cependant, le caractère inédit de cette disposition doit être relativisé, puisque cette juridiction peut actuellement, même en cas de relaxe, statuer sur les dommages-intérêts concernant les infractions non intentionnelles.
On ne voit pas, enfin, pourquoi serait interdit au tribunal correctionnel ce qui est autorisé à la cour d'assises qui, lorsqu'elle acquitte un accusé déclaré irresponsable en raison d'un trouble mental, statue, en application de l'article 371 du code de procédure pénale, sans l'assistance du jury, sur les demandes de dommages-intérêts formées par la partie civile.
Plusieurs des membres de la commission ont cependant estimé qu'il incombait à une juridiction civile de se prononcer sur les intérêts civils et ont donc approuvé l'amendement que vient de défendre M. Badinter.
C'est la raison pour laquelle la commission souhaite connaître sur ce point l'avis du Gouvernement.
En ce qui concerne l'amendement n° 74, Mme Borvo Cohen-Seat a raison de dire que la disposition qu'il vise à supprimer présente un caractère paradoxal. En effet, par mesure de sûreté, on va éventuellement condamner à 30 000 euros d'amende et à deux ans d'emprisonnement des personnes qui ont été déclarées pénalement irresponsables pour cause de trouble mental.
Cependant, une lecture plus approfondie du texte fait apparaître que le paradoxe n'est qu'apparent : le projet de loi lui-même prévoit que les sanctions ne sont possibles que sous réserve du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal. Elles ne seraient donc pas applicables si la personne manque aux obligations qui lui sont fixées alors que son discernement est aboli.
L'hypothèse visée est celle où la personne ayant retrouvé toute sa raison après une crise passagère, les sanctions pourraient éventuellement lui être appliquées.
L'avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Je commencerai par l'amendement n° 55, qui vise à supprimer l'article 3 prévoyant une procédure nouvelle d'irresponsabilité pénale.
Avec cet article, nous avons voulu clarifier, pour les personnes concernées, notamment les victimes, le sens d'une décision de non-lieu. Pendant longtemps, les parties civiles recevaient par courrier ou notification une décision de non-lieu sans explication. Pour certaines victimes, et même pour l'auteur lui-même, d'ailleurs, un non-lieu, c'est un non-lieu à poursuivre. Dès lors, il peut s'ensuivre une confusion. (M. Badinter manifeste son désaccord.)
Monsieur Badinter, pensez à ceux qui ne sont pas aussi fins juristes que vous ! Certains imaginent que le non-lieu à poursuivre revient à dire que les faits n'ont pas existé. C'est aussi la vocation de la justice et du droit d'expliquer, à l'intention des personnes concernées, auteurs et parties civiles, que le non-lieu à poursuivre est une décision d'irresponsabilité pénale pour trouble mental.
Le Gouvernement est donc défavorable aux amendements identiques nos 55 et 73.
Il est favorable aux amendements nos 22, 23 et 24, qui améliorent la rédaction du texte.
L'amendement n° 57 tend à supprimer une disposition critiquée par M. Badinter, pourtant très importante pour les victimes en ce qu'elle simplifie considérablement leurs démarches.
En vertu de l'article 498-2 du code civil, la personne reconnue pénalement irresponsable doit réparer civilement les conséquences de son acte.
Si la partie civile en fait la demande, la chambre de l'instruction renverra l'affaire devant le tribunal correctionnel, éventuellement formé d'un juge unique, pour qu'il statue sur son dédommagement. Tel est déjà le cas aujourd'hui.
Monsieur Badinter, vous voulez substituer à cette compétence donnée au tribunal correctionnel celle d'une juridiction civile. Vous le savez parfaitement, il est traditionnel qu'une juridiction pénale se prononce sur les demandes de dommages et intérêts, même en l'absence de condamnation pénale.
M. Robert Badinter. Mais il n'y a pas de juridiction pénale compétente !
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Bien sûr que si ! D'ailleurs, la cour d'assises statuant en formation réduite à trois magistrats professionnels peut accorder des dommages et intérêts, même en cas d'acquittement.
M. Robert Badinter. Mon amendement concerne le cas où il n'y a pas de juridiction pénale compétente. La chambre de l'instruction ne peut donc pas la saisir !
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Non, mais la chambre de l'instruction renvoie à une juridiction correctionnelle, comme dans le cadre de la cour d'assises. C'est ce que prévoit l'article 470-1 pour le tribunal correctionnel !
Faut-il vous rappeler, monsieur Badinter, que c'est vous, alors garde des sceaux, qui, à l'origine, avez défendu cette disposition lors du vote de la loi du 8 juillet 1983 consacrée au renforcement de la protection des victimes d'infractions pénales ? Vous vous contredisez donc quelques années après ! Vous admettrez que rien ne justifie que nous abandonnions en 2008 les objectifs légitimes que vous avez défendus en 1983 ? (M. Badinter proteste.)
Les objectifs sont exactement les mêmes ! Nous avons eu hier un débat analogue au sujet de l'hospitalisation psychiatrique d'office. Je vous ai transmis les dispositions y afférentes, que vous n'avez pas commentées. Acceptez que d'autres aient parfois raison !
M. Robert Badinter. Madame le garde des sceaux, me permettez-vous de vous interrompre ?
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, avec l'autorisation de Mme le garde des sceaux.
M. Robert Badinter. Madame le garde des sceaux, puisque je n'ai pas l'avantage, n'étant plus garde des sceaux, de pouvoir à volonté prendre la parole, vous trouverez dans votre courrier une consultation en date du 8 janvier qui vous éclairera sur la distinction que vous semblez omettre, pour je ne sais quelle raison, entre ce que l'on appelle la dangerosité psychiatrique, qui relève des juridictions administratives, et la dangerosité criminologique, objet de nos discussions ; ces deux notions ne sont pas identiques.
Mon amendement visait évidemment le cas où la cour d'assises n'est pas saisie, l'irresponsabilité pénale ayant été constatée. La chambre de l'instruction doit saisir la juridiction civile, qui a pleine compétence. Bien entendu, si la juridiction pénale se prononce sur l'irresponsabilité, elle statue sur les intérêts civils. Mais si la décision est prise au niveau de la chambre de l'instruction, aucune juridiction ne sera saisie. C'est une question non pas de principe, mais de commodité.
M. Robert Badinter. Puisque vous avez mentionné ce que j'ai fait en 1983, force m'est de rappeler que je ne m'en suis pas tenu à cela. Dès l'instant où l'on essaie de rappeler des principes juridiques, l'on vous renvoie aux victimes virtuelles, ce qui vous contraint à revenir sur tout ce que l'on a fait pour elles.
Madame le garde des sceaux, le malheur des victimes, je l'ai vu toute ma vie ! Et je l'ai vu non pas dans les journaux ou à la télévision, mais dans mes bureaux, dans les cabinets des juges d'instruction et en cour d'assises ! La douleur et le malheur des victimes, je les connais !
Quand j'exerçais les responsabilités qui sont aujourd'hui les vôtres, j'ai fait progresser, avec les excellents collaborateurs de la Chancellerie, le droit des victimes pour le porter au niveau le plus élevé en Europe, celui de la Suède.
Je terminerai en disant que la seule loi qui porte mon nom dans les revues juridiques, c'est, vous le savez, la loi en faveur des victimes, et pas une autre !
M. le président. Veuillez poursuivre, madame le garde des sceaux.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Monsieur. Badinter, nous n'avons jamais remis en cause ce que vous avez pu faire !
Hier, vous avez dit que l'hospitalisation d'office était limitée au quantum de la peine. Non, l'hospitalisation d'office est maintenue tant que les psychiatres considèrent que la dangerosité psychiatrique de l'intéressé subsiste, au-delà de la peine. Acceptez, monsieur le sénateur, que vous puissiez aussi, parfois, vous tromper !
J'en viens à l'amendement n° 74. Le Gouvernement y est défavorable, car il faut tirer toutes les conséquences de l'infraction commise, même si la personne est déclarée irresponsable.
M. Robert del Picchia. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 55 et 73.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
I. - La première phrase de l'article 167-1 du code de procédure pénale est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Lorsque les conclusions de l'expertise sont de nature à conduire à l'application des dispositions du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal prévoyant l'irresponsabilité pénale de la personne en raison d'un trouble mental, leur notification à la partie civile est effectuée dans les conditions prévues par le premier alinéa de l'article 167, le cas échéant en présence de l'expert ou des experts. En matière criminelle, cette présence est obligatoire si l'avocat de la partie civile le demande. »
II. - Dans le deuxième alinéa de l'article 177 du même code, les mots : « le premier alinéa de l'article 122-1, » sont supprimés.
III. - L'article 199-1 du même code est abrogé.
IV. - L'article 361-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Si elle a répondu positivement à la première question et positivement à la seconde question portant sur l'application des dispositions du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal, il est fait application des articles 706-129 et suivants relatifs à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. »
V. - Après l'article 470-1 du même code, il est inséré un article 470-2 ainsi rédigé :
« Art. 470-2. - Le tribunal correctionnel ne peut relaxer le prévenu en raison d'une des causes d'irresponsabilité pénale prévues par les articles 122-2, 122-3, 122-4, 122-5 et 122-7 du code pénal qu'après avoir constaté que celui-ci avait commis les faits qui lui étaient reprochés.
« Dans le cas où il estime qu'est applicable le premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal, il statue conformément à l'article 706-133 relatif à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. »
V bis. - Le 4° de l'article 706-53-2 du même code est ainsi rédigé :
« 4° D'une décision d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ; ».
V ter. - Dans l'avant-dernier alinéa de l'article 706-113 du même code, après les mots : « d'acquittement », sont insérés les mots : «, d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, ».
VI. - L'article 768 du même code est complété par un 10° ainsi rédigé :
« 10° Les décisions d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. »
VII. - Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 769 du même code, après les mots : « des condamnations », sont insérés les mots : « ou des décisions d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental ».
VIII. - Après le 15° de l'article 775 du même code, il est inséré un 16° ainsi rédigé :
« 16° Les décisions de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, sauf si ont été prononcées des interdictions prévues par l'article 706-135 du présent code tant que ces interdictions n'ont pas cessé leurs effets. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 56 est présenté par MM. Badinter, Collombat, Frimat, C. Gautier, Mermaz, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 75 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat, Assassi et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l'amendement n° 56.
M. Richard Yung. Par coordination avec notre amendement tendant à supprimer l'article 3 relatif à l'irresponsabilité pénale, nous demandons la suppression de l'article 4.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour défendre l'amendement n° 75.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L'article 4 nous pose deux types de problèmes.
D'une part, il procède à des coordinations correspondant à la nouvelle procédure de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental. Opposés à cette nouvelle procédure, nous demandons la suppression de cet article.
D'autre part, cet article 4 prévoit que la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental pourra être inscrite au casier judiciaire, alors qu'elle ne constitue pas une condamnation de justice Une telle inscription porte en elle-même atteinte à la conception que l'on peut avoir du casier judiciaire.
En outre, l'insertion de données à caractère personnel mentionnées dans la déclaration d'irresponsabilité est un traitement informatisé sans lien avec l'objet du casier judiciaire.
Par conséquent, l'inscription de la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental constitue un détournement de la fonction initiale du casier judiciaire. Celui-ci, qui ne doit contenir que les condamnations pénales ou commerciales, ne saurait servir à ficher les irresponsables pénaux.
Cette volonté de les ficher n'est pas nouvelle. Je vous rappelle que le Sénat avait dû déjà rejeter, en décembre 2005, lors des débats sur la proposition de loi relative au traitement de la récidive des infractions pénales, un article introduit par les députés tendant à inscrire les irresponsables pénaux dans le fichier judiciaire des auteurs d'infractions sexuelles.
Aujourd'hui, une nouvelle tentative de fichage nous est proposée, et, cette fois, par le biais du casier judiciaire. Nous l'avons bien vu lors de l'examen de l'article 3, la procédure de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental est loin d'offrir toutes les garanties du jugement pénal. Or cette déclaration figurera au casier judiciaire. C'est une option que nous ne pouvons retenir.
M. le président. L'amendement n° 58, présenté par MM. Badinter, Collombat, Frimat, C. Gautier, Mermaz, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer les VI, VII et VIII de cet article.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Finalement abandonné lors de l'adoption de la loi relative à la prévention de la délinquance, le fichage des personnes atteintes de troubles mentaux est réintroduit dans ce texte.
Ces mesures ont notamment pour objet d'accorder aux juridictions la possibilité de prononcer des jugements et arrêts de déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, et non plus uniquement une ordonnance de non-lieu, un acquittement ou une relaxe.
Pour compléter cette réforme, le projet de loi prévoit que les décisions reconnaissant l'irresponsabilité pénale seront désormais inscrites au casier judiciaire.
Cela pose un certain nombre de problèmes lourds, notamment de principe, en particulier la question de la légitimité et de la proportionnalité de ce traitement au regard des garanties accordées à toute personne au titre de la loi Informatique et libertés.
Le ministère de la justice ne peut en principe collecter que les données à caractère personnel en lien avec des infractions, des condamnations ou des mesures de sûreté déjà prononcées.
Il est difficile, à cet égard, de considérer qu'une déclaration d'irresponsabilité pénale entre dans l'une ou l'autre de ces catégories de données. Sans vouloir la qualifier au regard du droit pénal, l'examen du présent projet de loi invite à penser que cette déclaration de justice ne porte ni sur l'infraction ni sur la condamnation ; elle s'en écarte.
Par ailleurs, la déclaration d'irresponsabilité pénale ne semble pas non plus pouvoir être confondue avec une mesure de sûreté, point dont nous avons déjà débattu et sur lequel je ne reviens pas.
Pour toutes ces raisons, il nous paraît inopportun d'inscrire les déclarations d'irresponsabilité au casier judiciaire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. La commission est défavorable aux amendements identiques nos 56 et 75.
L'inscription au casier judiciaire des déclarations d'irresponsabilité pénale est encadrée. Ces déclarations ne figurent qu'au bulletin n° 1, qui est consultable par les seules autorités judiciaires. Ce n'est que lorsqu'elles sont assorties de mesures de sûreté qu'elles figurent au bulletin n° 2 et peuvent, à ce titre, être communiquées à certaines autorités administratives pour des motifs limitativement énumérés, tels que l'accès à un emploi public ou à certaines professions.
En outre, cette inscription a un précédent, Mme Borvo Cohen-Seat le rappelait, puisque les décisions de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement fondées sur l'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental sont inscrites au FIJAIS, le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles, en application de l'article 706-53-2 du code de procédure pénale.
Il apparaît a fortiori assez logique que les déclarations figurent dans le casier judiciaire.
C'est la raison pour laquelle la commission est défavorable à la suppression des VI, VII et VIII de l'article 4, donc à l'amendement n° 58.
Cependant, je partage en partie la lecture de notre collègue Richard Yung sur un point à propos duquel je souhaite interroger Mme le garde des sceaux, car il me paraît soulever une petite difficulté - peut-être sera-t-il possible d'y remédier, si nécessaire, d'ici à la réunion de la commission mixte paritaire - ; je veux parler de l'encadrement très strict des pouvoirs du juge.
En effet, l'inscription au bulletin n° 1 est automatique et l'inscription au bulletin n° 2 l'est également dès lors que des mesures de sûreté ont été prononcées. Or une partie de la doctrine considère qu'il serait utile, pour garantir le caractère proportionné du traitement des données, que les juges disposent d'un pouvoir de modulation des conditions d'inscription au casier judiciaire, afin, notamment, qu'ils puissent traiter différemment une personne atteinte d'un trouble mental qui aurait commis une simple dégradation de biens par rapport à une personne qui aurait commis un crime tel qu'un homicide.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Le Gouvernement est défavorable aux amendements de coordination nos 56 et 73.
Il est également défavorable à l'amendement n° 58, car il est important de conserver la mémoire de la déclaration d'irresponsabilité pénale.
En cas de crime ou de délit, les faits doivent pouvoir être mentionnés dans le casier judiciaire même lorsque l'auteur a été déclaré irresponsable et qu'aucune condamnation n'a été prononcée ; c'est déjà le cas.
Les personnes atteintes de trouble mental ayant commis des faits graves peuvent en commettre à nouveau, éventuellement des années plus tard, et il faut pouvoir accéder au casier judiciaire pour avoir connaissance de ces faits, notamment au moment du placement en garde à vue.
S'agissant de l'inscription au bulletin n° 1 ou au bulletin n° 2 du casier judiciaire, je partage votre avis, monsieur le rapporteur.
Cependant, le code pénal prévoit que la dispense d'inscription au bulletin n° 2 peut être demandée lors de l'audience ; on peut rappeler que cette disposition est applicable. Mais il est important de garder la traçabilité non seulement des faits, mais aussi des mesures de sûreté, notamment l'interdiction de détenir une arme ou de fréquenter certains endroits.
Cela vaut aussi pour les concours administratifs, par exemple pour éviter le recrutement comme éducateur de la protection judiciaire de la jeunesse d'une personne qui aurait commis des actes graves, mais qui aurait été déclarée irresponsable pénalement.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 56 et 75.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 4.
(L'article 4 est adopté.)
TITRE III
DISPOSITIONS DIVERSES
Article 9
I. - L'intitulé de la section 9 du chapitre Ier du titre VIII du livre III du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé : « Détenus et personnes retenues dans un centre socio-médico-judiciaire de sûreté ».
II. - Après l'article L. 381-31 du code de la sécurité sociale, il est inséré une sous-section 3 ainsi rédigée :
« Sous-section 3
« Personnes retenues dans un centre socio-médico-judiciaire de sûreté
« Art. L. 381-31-1. - Les dispositions de la présente section s'appliquent aux personnes retenues dans un centre socio-médico-judiciaire de sûreté. » - (Adopté.)
Article 10
Après le 11° du I de l'article 23 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, il est inséré un 11° bis ainsi rédigé :
« 11° bis Les interdictions prononcées en application de l'article 706-135 du code de procédure pénale ; ». - (Adopté.)
Article 11
À compter du 1er janvier 2009, la référence à l'article 489-2 du code civil mentionnée aux articles 706-125, 706-131 et 706-133 du code de procédure pénale résultant respectivement des articles 3 et 4 de la présente loi est remplacée par la référence à l'article 414-3 du code civil. - (Adopté.)
Article 12
M. le président. L'article 12 a été examiné en priorité.
Article 12 bis
L'article 706-53-7 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les présidents des conseils généraux et les maires peuvent également consulter le fichier, par l'intermédiaire des préfets, pour l'examen des demandes d'emploi ou d'agrément concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs ainsi que pour le contrôle de l'exercice de ces activités ou professions. »
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l'article.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame le garde des sceaux, mes chers collègues, je vais vous lire un extrait de l'intervention de M. Pascal Clément, alors garde des sceaux, inaugurant le 8 juillet 2005 le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles : « [...] pour que la justice soit efficace, elle se doit d'être fidèle à ses valeurs. Elle doit en particulier garantir le respect de la vie privée.
« [...] ce nouveau fichier est conforme à nos principes. Il nous permettra de mieux assurer la sécurité des Français et il nous permettra de garder ces informations confidentielles.
« Ce fichier est, en effet, exclusivement destiné aux professionnels en charge de la prévention et de la répression de la délinquance sexuelle.
« Il concerne donc les autorités judiciaires, les officiers de police judiciaire et les préfets. La liste des autres administrations de l'État autorisées par la loi à consulter le FIJAIS fera l'objet d'un décret complémentaire au terme de travaux interministériels. »
Or l'article 12 bis vise à étendre la liste des personnes habilitées à consulter le fichier aux présidents de conseils généraux et aux maires, autrement dit aux administrations territoriales. Dois-je en conclure que ce qui était présenté par le garde des sceaux en 2005 comme une garantie de respect de nos principes ne l'est plus moins de trois ans plus tard ou que cet article ne respecte pas nos principes ?
Le FIJAIS a été créé par la loi du 9 mars 2004, loi dont les modalités d'application ont été fixées par un décret du 30 mai 2005 pris après avis de la CNIL, peu de temps après la mise en place de celle-ci.
La loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales a étendu substantiellement son contenu et sa finalité.
La CNIL, relevant que les préfets et certaines administrations de l'État pourraient utiliser le fichier pour contrôler l'exercice des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs, soulignait alors qu'il n'était pas précisé si ce contrôle concernait uniquement les activités soumises à agrément ou si l'extension concernait l'exercice de l'ensemble des professions impliquant un contact avec des mineurs.
Le fichier est ainsi profondément modifié avant qu'un bilan ait pu être tiré de sa première version et sans que la CNIL ait pu se prononcer sur les modifications envisagées.
Or, je ne vois pas dans l'article 12 bis tel qu'il nous est proposé une quelconque prise en compte des inquiétudes de la CNIL.
Je constate en revanche qu'une fois de plus on nous demande d'accroître le nombre de personnes habilitées à consulter un fichier, en tentant de nous faire croire que cela va régler tous les problèmes. Or nous savons tous que cette multiplication permanente des fichiers et des personnes pouvant les consulter n'a absolument rien réglé.
J'ajoute que, pour ceux qui emploient des personnes susceptibles d'avoir des contacts avec les enfants, la formule est à l'évidence inopérante : y compris en matière de service public, du fait des délégations de service public, dans beaucoup de cas, ce ne sont pas les maires qui emploient directement ces personnes.
S'il s'agissait de permettre à tous les employeurs de consulter le fichier, ce serait un autre problème. Là, on adopte une solution bancale qui, à mon avis, ne résoudra pas le problème censé devoir être résolu, mais qui va en revanche multiplier encore le nombre de personnes habilitées à consulter le fichier.
C'est la raison pour laquelle je souhaiterais, madame le garde des sceaux, que vous nous donniez l'avis de la CNIL, si vous l'avez.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 60, présenté par MM. Badinter, Collombat, Frimat, C. Gautier, Mermaz, Peyronnet, Sueur et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Je serai bref, Mme Borvo Cohen-Seat ayant exprimé nombre de nos préoccupations, la principale étant évidemment l'extension considérable du nombre de personnes ayant accès aux fichiers, ne serait-ce que parce que, comme chacun sait, le nombre des maires en France est de l'ordre de 36 000.
Jusqu'à ce jour, c'était l'autorité d'État - sous ses différentes formes, police ou justice - qui pouvait interroger le fichier, ce qui, au fond, constituait une garantie quant à la nature même de ceux qui étaient habilités à le faire ; là, on franchit un pas de plus, puisque l'accès au fichier est étendu aux élus, que, certes, nous respectons tous, mais il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'une extension considérable.
On peut d'ailleurs se demander si ne devraient pas être également concernés d'autres catégories d'élus, au-delà des présidents de conseils généraux et des maires, et d'autres cas que celui de personnes travaillant avec les enfants.
Il y a donc là tous les éléments d'une augmentation considérable de l'accès au fichier, qui mérite réflexion et impose que la CNIL soit saisie pour avis. Pour l'heure, en tout cas, nous ne sommes pas favorables à cette proposition.
M. le président. L'amendement n° 79 rectifié bis, présenté par MM. Portelli, del Picchia et Béteille, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
L'article 706-53-7 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Au quatrième alinéa (3°), les mots : « pour l'examen des demandes d'agrément » sont remplacés par les mots : « pour les décisions administratives de recrutement, d'affectation, d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation » ;
2° Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : « par la demande d'agrément » sont remplacés par les mots : « par la décision administrative » ;
3° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les maires sont également destinataires, par l'intermédiaire des préfets, des informations contenues dans le fichier, pour les décisions administratives mentionnées au 3° concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs ainsi que pour le contrôle de l'exercice de ces activités ou professions. »
La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. L'article 12 bis a été ajouté par l'Assemblée nationale afin de permettre que les collectivités territoriales aient accès au FIJIAIS par l'intermédiaire des préfets, pour contrôler les personnes dont l'activité ou le travail implique un contact avec des mineurs, comme c'est le cas pour les administrations de l'État.
Il convient toutefois de revoir la rédaction de cet article afin de mettre en évidence que l'accès au fichier, tant pour les administrations de l'État que pour les collectivités territoriales, est non pas limité aux demandes d'agrément, mais concerne toutes les décisions administratives de recrutement, d'affectation, d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation.
C'est en effet principalement pour le recrutement de personnels travaillant dans les écoles ou les collèges, comme divers cas malheureux l'ont démontré au cours des dernières années, que les maires doivent pouvoir consulter le fichier.
Par ailleurs, il convient de mieux respecter les rédactions traditionnellement retenues par le Conseil d'État et la CNIL pour définir les destinataires d'un fichier lorsque ceux-ci reçoivent des données sans pour autant accéder directement, bien sûr, à l'application informatique, ce qui sera le cas des collectivités territoriales, qui devront interroger les préfets pour connaître les données enregistrées dans le FIJAIS.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Sur l'amendement de suppression n° 60, la commission émet un avis défavorable, car elle estime que la possibilité pour les autorités territoriales, les maires notamment, mais peut-être aussi les présidents de conseils généraux et les présidents de conseils régionaux, d'accéder à des fichiers qui leur permettent de vérifier les données relatives aux collaborateurs dont ils s'entourent et à qui ils confieront des fonctions les mettant en contact avec des enfants, par exemple dans les écoles maternelles, les centres aérés ou les centres de loisirs, est utile.
Nombre de faits divers démontrent que des personnes ont pu travailler dans de tels lieux - Michel Fourniret, par exemple - sans que les maires ne sachent quel était leur passé pénal.
En revanche, la commission est favorable à l'amendement n° 79 rectifié bis.
Il lui semblerait toutefois souhaitable que les présidents de conseils généraux et de conseils régionaux soient mentionnés, en plus des maires, au nombre des destinataires des informations ; Mme la ministre voudra peut-être donner son avis sur l'opportunité d'une telle modification.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. L'amendement n° 79 rectifié bis vise les maires. Nous considérions, en effet, que si les personnels des écoles entraient naturellement dans ce dispositif, ceux des collèges et des lycées, eux, relevaient de l'éducation nationale, et qu'il n'y avait donc aucune raison de mentionner les présidents de conseils généraux et de conseils régionaux dans ce texte.
Toutefois, des transferts de compétence sont intervenus. J'aurais dû y penser, moi qui ai conseillé de mentionner seulement les maires ; je fais amende honorable ! (Sourires.)
Désormais, les présidents de conseils généraux gèrent les personnels ATOSS, c'est-à-dire administratifs, techniciens, ouvriers et de service, notamment, et il en va de même pour les présidents de conseils régionaux. Nous pourrions même considérer, à la limite, que les présidents de conseils généraux gèrent une autre catégorie de personnel qui est en contact permanent avec les enfants, à savoir les assistantes maternelles.
Il faut donc mentionner dans le texte de cet amendement non seulement les maires, mais aussi les présidents de conseils généraux et les présidents de conseils régionaux. Telle est la rectification que nous proposons.
M. le président. Monsieur del Picchia, acceptez-vous cette rectification ?
M. Robert del Picchia. Tout à fait, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 79 rectifié ter, présenté par MM. Portelli, del Picchia et Béteille, et ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
L'article 706-53-7 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Au quatrième alinéa (3°), les mots : « pour l'examen des demandes d'agrément » sont remplacés par les mots : « pour les décisions administratives de recrutement, d'affectation, d'autorisation, d'agrément ou d'habilitation » ;
2° Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : « par la demande d'agrément » sont remplacés par les mots : « par la décision administrative » ;
3° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les maires, les présidents de conseil général et les présidents de conseil régional sont également destinataires, par l'intermédiaire des préfets, des informations contenues dans le fichier, pour les décisions administratives mentionnées au 3° concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs ainsi que pour le contrôle de l'exercice de ces activités ou professions. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. En ce qui concerne l'amendement n° 60, le Gouvernement émet un avis défavorable, pour les raisons qui ont été énoncées par M. le rapporteur.
S'agissant de l'amendement n° 79 rectifié ter, le Gouvernement émet un avis favorable.
M. le président. En conséquence, l'article 12 bis est ainsi rédigé.
Articles additionnels après l'article 12 bis
M. le président. L'amendement n° 61, présenté par M. Charasse et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 12 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le premier alinéa de l'article 2-19 du code de procédure pénale, après les mots : « d'outrages, », sont insérés les mots : « de diffamations, ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 62, présenté par M. Charasse et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 12 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 85 du code de procédure pénale est complétée par les mots : « ou lorsque les victimes sont des fonctionnaires ou agents publics dans l'exercice de leurs fonctions, y compris les élus du suffrage universel ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
Article 12 ter
Les conditions d'application de la présente loi font l'objet d'un rapport du Gouvernement au Parlement, remis au plus tard le 1er septembre 2009. - (Adopté.)
Article additionnel après l'article 12 ter
M. le président. L'amendement n° 30, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'article 12 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La présente loi fera l'objet d'un nouvel examen d'ensemble par le Parlement dans un délai maximum de cinq ans après son entrée en vigueur.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Compte tenu du caractère particulièrement novateur de la rétention de sûreté, il paraît essentiel de permettre une évaluation complète des dispositions de la loi, en vue d'éventuels ajustements.
C'est pourquoi cet amendement prévoit que la présente loi fera l'objet d'un nouvel examen d'ensemble par le Parlement dans un délai maximum de cinq ans après son entrée en vigueur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Cette demande est légitime. Le Gouvernement émet donc un avis tout à fait favorable.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je voterai, bien sûr, cet article additionnel. Toutefois, nous serions bien avisés de mentionner que l'évaluation aura lieu « avant toute nouvelle législation pénale ».
En effet, il y a fort à parier qu'avant cinq ans nous serons saisis d'un nouveau texte. Nous ferions donc bien de nous garder de cette éventualité et d'être prévoyants dans notre travail législatif, d'autant que j'ai entendu nombre de sénateurs, de toutes tendances, affirmer qu'avant d'adopter une loi nouvelle il fallait évaluer les précédentes.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12 ter.
Article 13
I. - Les articles 1er à 4, 6, 9 et 11 de la présente loi sont applicables dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.
II. - La présente loi est applicable à Mayotte.
M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Lecerf, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. Après les mots :
en Polynésie française
rédiger comme suit la fin du I de cet article :
et en Nouvelle-Calédonie.
II. Supprimer le II de cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-René Lecerf, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer les mentions expresses d'application de la loi à Mayotte et dans les Terres australes et antarctiques françaises, les TAAF, puisque ces deux collectivités sont soumises depuis le 1er janvier 2008 à un nouveau régime d'application des lois et règlements : à Mayotte, les lois s'appliquent directement en matière pénale ou de santé ; dans les TAAF, les lois pénales s'appliquent de plein droit.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 13, modifié.
(L'article 13 est adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis 2002, les textes sécuritaires n'ont cessé de s'accumuler, dans un sens toujours plus répressif, et alors que se posent à nous deux problèmes, qui d'ailleurs n'en font qu'un : d'une part, les moyens de la justice, qu'ils soient techniques ou humains, sont insuffisants ; d'autre part, notre conception de la détention est archaïque et insatisfaisante.
De façon générale, il est regrettable que nous légiférions une fois encore dans l'urgence, avant même d'avoir évalué les dispositifs précédents, puisque c'est d'évaluation qu'il était question avec l'amendement n° 30.
Cette logique peut malheureusement provoquer toutes les dérives. L'enfermement, après l'exécution de leur peine, et pour une durée indéfinie - de préférence à vie, diront certains ! - de personnes qui, certes, sont particulièrement dangereuses, mais pour lesquelles, après qu'elles ont commis un crime, on ne cherche aucune solution de rechange à la détention, ce n'est ni plus ni moins qu'un substitut à la peine de mort. Nous ne pouvons donc approuver cette mesure.
Ce projet de loi procède d'une philosophie contraire à notre État de droit, puisqu'il s'agit d'enfermer une personne qui aura purgé sa peine, non parce qu'elle aura récidivé, mais parce qu'elle sera susceptible de commettre une nouvelle infraction.
Madame la ministre, au cours de ces débats, vous n'avez cessé de répéter que la rétention de sûreté n'était pas attentatoire aux droits fondamentaux des personnes puisque l'hospitalisation d'office permettait déjà d'enfermer une personne contre son gré en raison du danger qu'elle pourrait constituer pour elle-même ou pour autrui.
Toutefois, vous oubliez que cette mesure est administrative et non judiciaire. En outre, dans ces conditions, pourquoi créer la rétention de sûreté ? Je le répète, nous disposons déjà d'un certain nombre de moyens, dont l'hospitalisation d'office.
Le législateur doit bien considérer ses actes. Pour cela, il peut s'appuyer sur des exemples étrangers intéressants. Vous souhaitez toujours aligner notre droit sur celui des autres pays comparables, notamment des pays européens, avec lesquels nous sommes engagés dans une destinée et une loi communes. Pourtant, quand il s'agit de prendre des mesures qui vont à l'encontre de la philosophie qui anime votre gouvernement, vous cessez de vous inspirer des exemples étrangers. C'est révélateur, mais tout à fait regrettable. Vous préférez créer une justice vengeresse, parce que c'est davantage payant politiquement dans certaines catégories de la population, semble-t-il.
Par ailleurs, le concept de dangerosité n'a pas fait l'objet en France d'un travail de définition sérieux. Nous l'avons vu, ni le Gouvernement ni les parlementaires de la majorité, que ce soit à l'Assemblée nationale ou au Sénat, ne parvenaient à s'expliquer lorsqu'il fallait distinguer la dangerosité d'un criminel ayant tué une victime mineure de celle d'un criminel ayant tué une victime majeure. La dangerosité est une notion très complexe.
De surcroît, nous ne sommes pas aidés par les déclarations à l'emporte-pièce émises par le Président de la République, alors qu'il était candidat, sur le caractère génético-hormonal du suicide ou des déviances sexuelles.
L'appréciation de la dangerosité est susceptible de varier dans le temps, en fonction des époques et du contexte. Pour s'en convaincre, il suffit d'observer à quel point le champ d'application du présent projet de loi s'est élargi entre le 8 janvier dernier, date du début de son examen par les députés, et aujourd'hui : alors qu'il visait au départ les criminels ayant commis des infractions graves sur des mineurs de quinze ans et qu'il n'était pas rétroactif, ce texte sera désormais applicable à presque tous les criminels et rétroactif.
Notre inquiétude est donc légitime quant à d'éventuels futurs élargissements du champ d'application de ce texte. Ce ne serait pas la première fois que le Gouvernement étendrait une législation répressive au fur et à mesure des textes, comme on l'a vu en matière de terrorisme ou de fichage.
Madame la ministre, vous avez pris la responsabilité d'établir une comparaison avec le terrorisme et les événements du 11 septembre 2001. Je me permets de vous rappeler que si ces actes ont justifié notre coopération judiciaire avec les États-Unis, ils ne légitiment en rien Guantanamo ! J'y insiste, car il s'agit d'un problème grave. Le législateur doit réfléchir à ces questions ; donc, efforçons-nous de le faire !
Décréter que la prise en charge des criminels dangereux ne peut intervenir qu'après quinze ou vingt ans de prison revient à admettre que la détention est un temps inutile pour certaines catégories de personnes. C'est peut-être le cas, mais il faut alors en tirer toutes les conséquences sur notre conception de la peine et de la détention, ce que nous ne faisons pas, hélas ! Surtout, cette mesure contredit vos politiques tendant à durcir les peines, qui sont toujours motivées par la lutte contre la récidive.
Certes, nous partageons ce souci ; à cet égard, accuser ceux qui ne sont pas d'accord avec vous de ne pas vouloir lutter contre la récidive est facile, mais ne participe pas d'une saine conception du débat. Toutefois, vous vous contredisez, car vous ne prenez pas le problème dans le bon sens.
Je rappellerai simplement que l'une des missions de l'administration pénitentiaire est la réinsertion des condamnés. Comment remplir au mieux cette mission si la personne concernée sait qu'elle risque d'être enfermée, après sa détention, pour une durée sans cesse renouvelée, si elle est inaccessible à la prison, à la sanction, et même aux coups de bâtons ? Dans ces conditions, comment considérer que la détention peut apporter une solution ?
On est en pleine contradiction ! Avec cette logique d'enfermement, si les présupposés sont justes, c'est une véritable relégation sociale qui est ici proposée. Le bagne existait, on en est revenu. Il est donc regrettable qu'on en soit là aujourd'hui !
Le deuxième volet du projet de loi, consacré à l'irresponsabilité pénale, est très lié au précédent : là encore, on multiplie les confusions.
En la matière, les Néerlandais, par exemple, qui font preuve de davantage de pragmatisme, qui ont mené une réflexion plus approfondie sur la détention et qui consacrent des moyens plus importants à leur justice sont plus proches de la réalité, me semble-t-il. Ils traitent les personnes qui ne sont pas irresponsables pénalement, mais dont les capacités de réflexion ou de compréhension sont altérées, comme des personnes qui ont besoin d'être prises en charge médicalement, psychologiquement, y compris, le cas échéant, en étant enfermées. Nous, nous multiplions les confusions et nous aboutissons à un dispositif qui est totalement hybride, mais aussi dangereux, car il peut concerner des gens qui ne méritent pas de subir un tel traitement.
En outre, des principes élémentaires de notre droit sont violés. Remettre en cause des principes constitutionnels qui fondent notre démocratie et des principes fondamentaux reconnus par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne semble pas poser de problèmes à certains de nos collègues. C'est dommage !
Pourquoi ne pas abolir la Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen et renoncer officiellement à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au nom de la sécurité de la société ?
Je le répète, puisque vous semblez apprécier les comparaisons : pour renoncer aux droits des personnes, les Américains créent des centres de détention en dehors de leur territoire. Nous pourrions faire de même ! Le bagne n'était rien d'autre que cela : nous pourrions y revenir !
Nous ne pouvons nous associer à un tel dispositif. C'est pourquoi le groupe CRC votera résolument contre ce projet de loi.
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je commencerai par saluer le travail de M. Lecerf et le courage dont il a fait preuve dans sa tentative, soigneusement avortée, d'apporter à ce texte les garde-fous juridiques nécessaires à sa mise en oeuvre.
L'intention du Gouvernement me paraît simple : ne rien céder et faire peser sur le Conseil constitutionnel la responsabilité de « retoquer » ce texte largement anticonstitutionnel.
De ce point de vue, madame la ministre, l'épisode de la rétroactivité a été symptomatique : vous avez laissé les députés décider de la rétroactivité, puis vous avez largement soutenu cette démarche, tout en précisant que vous n'en étiez pas l'initiatrice.
M. le rapporteur, dans sa sagesse, a tenté de trouver un moyen d'éviter que ne soit violé le principe fondamental de non-rétroactivité d'une loi pénale. Vous ne l'avez pas soutenu. Pis, vous avez émis un avis favorable sur un amendement de substitution déposé par M. Portelli, qui visait à rétablir ce système en l'édulcorant.
À quoi bon prétendre que la rétroactivité ne s'appliquera qu'à titre exceptionnel, puisque nous savons qu'aucun juge ne prendra le risque de ne pas y recourir ? C'est un piège à responsabilité que votre système met en place : de la même manière qu'aucun juge n'ose user de son pouvoir d'individualisation de la peine quand il s'agit de prononcer des peines planchers, aucun juge ne s'amusera à recourir à un autre dispositif que celui de la rétention de sûreté instauré par ce projet de loi à titre rétroactif.
Ce texte est une honte pour notre système pénal. Pour vous, la dangerosité équivaut désormais à la culpabilité. Vous balayez d'un revers de main des principes pourtant fondamentaux dans notre État de droit.
J'entends encore M. Portelli dire que l'État a un devoir de protection sociale à l'égard de tous les citoyens. La défense sociale est fondamentale, je ne le nie pas. Il n'en reste pas moins que, dans ce domaine, l'État a une obligation de résultat, pas de moyens.
En aucun cas cet objectif de défense sociale ne doit remettre en cause les principes constitutionnels qui régissent notre droit pénal. Dans ce domaine, les libertés individuelles ne peuvent faire l'objet de restrictions aussi graves et aussi désinvoltes que celles que votre projet de loi prévoit. Que des moyens soient mis en oeuvre, nul ne le conteste. Mais encore faut-il qu'ils soient respectueux du droit, de la liberté, de la sûreté et de tous nos principes.
Le dispositif de rétention de sûreté est une privation totale de liberté. Ce n'est pas un moyen conforme aux principes d'un État de droit : c'est une peine qui s'ajoute à la peine, une fois celle-ci purgée. En cela, il n'est pas acceptable.
Avec ce projet de loi, vous tentez de nous faire croire que l'enfermement est le moyen le plus efficace pour lutter contre les récidives des condamnés les plus dangereux. Personnellement, je ne le crois pas.
D'abord, il ne s'agit pas d'une mesure de sûreté ; le Conseil constitutionnel, je l'espère, en conviendra. Une mesure de sûreté ne peut être une privation totale de liberté. D'ailleurs, la privation de liberté est la peine la plus importante de notre système judiciaire. Détention ou rétention, c'est la même chose.
Ensuite, la mesure de sûreté ne peut s'exercer au-delà de la peine prononcée par la juridiction de jugement. Elle ne peut en aucun cas se traduire par une relégation du condamné pour une durée indéterminée, comme le prévoit ce projet de loi.
Madame la ministre, je refuse que l'on puisse enfermer une personne sur la simple base de sa dangerosité, en raison de son état et non à cause de ses actes. Ce qui vaut pour les personnes présentant des troubles mentaux ne vaut pas pour les personnes présentant des troubles de la personnalité. Pourtant, vous confondez les deux.
C'est d'ailleurs bien la confusion qui règne dans ce texte, confusion entre les mesures de sûreté, qui s'appliquent à des personnes jugées responsables, même si elles présentent des troubles de la personnalité, et les mesures d'hospitalisation d'office, qui concernent les aliénés et qui, je vous le rappelle, sont de nature administrative. Il n'est pas possible d'étendre ainsi la procédure de l'hospitalisation d'office, qui est autorisée par la Convention européenne des droits de l'homme pour les personnes dangereuses, à celles qui présentent seulement des troubles de la personnalité.
Cette extension déguisée est grave : elle criminalise la psychiatrie et elle psychiatrise la criminalité. Elle met tout le monde dans le même sac, les fous et les criminels. Elle nourrit une haine déplorable à l'égard des personnes dangereuses, qu'elle instrumentalise en monstres qu'il faut neutraliser.
À quoi servent tous les dispositifs que nous avons votés ces dernières années, comme le bracelet électronique, et qui auraient pu servir dans le cadre de ce projet de loi ? Que deviendront-ils si on leur substitue l'enfermement ? Quelle est aujourd'hui leur valeur si un dispositif aussi radical que la rétention de sûreté existe ? Je vais vous le dire : le principe de précaution l'emportera et l'enfermement sera la règle, les mesures de sûreté l'exception.
Ces outils juridiques auraient dû être adaptés, renforcés, mais jamais écrasés par un dispositif aussi inique et radical.
Nos propositions, pourtant nombreuses, n'ont pas reçu d'écho satisfaisant, et je le déplore. Pourtant, elles avaient le mérite de rendre le texte constitutionnel tout en maintenant le dispositif de rétention intact. Mais votre préoccupation n'était pas celle-là, madame la ministre : seul vous importait l'affichage et, de ce point de vue, vous êtes satisfaite.
Pour des raisons juridiques, philosophiques et humaines, les Verts voteront contre ce texte. Nous espérons qu'une décision du Conseil constitutionnel rendra honneur à notre droit positif et à la tradition des Lumières.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, le débat a été long et aussi complet que possible. Grâce au travail de la commission des lois et du rapporteur - cela a été souligné, à juste titre, à plusieurs reprises -, nous avons pu améliorer le projet de loi sur un certain nombre de points. La discussion qui a eu lieu au Sénat a donc permis une évolution significative du texte par rapport à la version issue des travaux de l'Assemblée nationale.
Je ne citerai que quelques mesures : le caractère pluridisciplinaire de la période d'observation, sa durée, la transformation de la commission régionale de la rétention de sûreté, et de la commission nationale, en une juridiction, le caractère public du débat contradictoire, le parcours individualisé proposé d'emblée par le juge de l'application des peines, etc.
Mais ces améliorations, aussi importantes soient-elles, ne changeront pas notre approche philosophique.
Ce projet de loi a été conçu sans cohérence, sans analyse sérieuse de la législation et de toutes les mesures qui ont été prises depuis quatre ou cinq ans. Je le répète, nous avons besoin d'une évaluation de toutes les dispositions - il y en a plus d'une dizaine - qui traitent de la même question pour savoir où nous en sommes.
Le débat aurait dû avoir lieu après l'examen du projet de loi pénitentiaire, et non avant. Avouez que cette démarche est assez curieuse : on marche sur la tête !
Malheureusement, le présent projet de loi témoigne, pour l'essentiel, d'une approche répressive, fondée sur l'enfermement, alors que celui-ci est déjà très lourd en France - il est même le plus lourd d'Europe - et semble la seule réponse possible aux problèmes de la société. Nous poursuivons là la chimère du risque zéro en imposant une législation de plus en plus répressive et attentatoire aux libertés.
Ce texte comporte également de nombreux ferments d'inconstitutionnalité. Certains ont soutenu que ce n'était pas très grave et que le Parlement n'avait pas à s'en soucier. D'autres ont reconnu que les risques existaient, mais ils les ont acceptés. N'est-il pas curieux de voir un Parlement voter un texte tout en se doutant qu'il comporte de tels risques ? Le Parlement se défausse sur le Conseil constitutionnel pour pouvoir ensuite affirmer qu'il a proposé ce qu'il fallait : c'est le Conseil constitutionnel qui a manqué de courage.
Ce projet de loi tourne le dos à deux grands principes fondamentaux du droit français depuis la Révolution.
D'une part, enfermer quelqu'un en prison, par une décision judiciaire, non pas à cause des faits qu'il a commis, mais parce qu'il est susceptible de commettre un acte de délinquance, bouleverse un principe fondamental de notre État de droit établi depuis la suppression de la lettre de cachet : une personne ne peut être condamnée sur une suspicion de dangerosité, sur une présomption de culpabilité future ou sur une dangerosité virtuelle ; elle ne peut l'être que sur un acte commis et prouvé par la justice. Le Gouvernement affirme qu'il s'agit là d'une mesure de sûreté. C'est faux : c'est une peine ; le débat ne nous a pas convaincus.
D'autre part, ce texte bafoue le principe de non-rétroactivité de la loi pénale la plus dure, consacré par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Ce n'est pas l'usine à gaz que constitue l'amendement n° 29, modifié par les sous-amendements nos 78 rectifié ter et 92, qui nous a rassurés sur ce point.
Ce projet de loi est une fuite en avant. Il permet d'enfermer à vie des gens qui n'ont pas commis d'infraction.
En plus d'être contestable en lui-même, le débat parlementaire a montré à quel point ce dispositif pouvait conduire à des dérives. Initialement, la rétention de sûreté ne devait s'appliquer qu'aux délinquants sexuels récidivistes sur mineurs. Elle a été progressivement élargie à toute une série de délinquants, que leurs crimes soient commis sur des majeurs ou sur des mineurs. Elle concerne même ceux qui n'ont pas récidivé. L'escalade risque de se poursuivre. Jusqu'où ?
Ce projet de loi contient en germe une grave menace pour les libertés et pour l'évolution de notre système pénal et pénitentiaire. Pour toutes ces raisons, notre groupe votera contre.
M. le président. La parole est à M. Nicolas Alfonsi.
M. Nicolas Alfonsi. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, mes chers collègues, à l'occasion du vote du projet de loi constitutionnelle modifiant le titre XV de la Constitution, j'ai souligné la grande unanimité du groupe du RDSE. Cet enthousiasme aura été de courte durée, puisque, aujourd'hui, les différentes sensibilités qui le composent s'expriment de manière différente : mon collègue Georges Othily a exposé la sienne hier ; celle que je représente est très réservée sur ce texte.
Tout d'abord, je veux rendre hommage à la commission des lois ; tous l'ont fait et je ne veux pas être en reste. Dans ce genre de circonstances, il vaut mieux se répéter que ne rien dire, surtout quand on connaît les efforts accomplis par la commission des lois pour surmonter les inconvénients de la procédure d'urgence. On sait bien qu'en matière pénale ce n'est pas toujours évident.
Je veux également souligner les efforts réalisés pour améliorer le texte ; je ne reviens pas sur les mesures que vient d'évoquer notre collègue M. Yung. Mais, qu'on le veuille ou non, tous ces efforts sont insuffisants pour compenser la volonté d'affichage - il faut bien appeler un chat un chat ! -du Gouvernement dans cette affaire.
Voilà quelques instants, M. del Picchia a évoqué un argument que l'on peut considérer comme recevable. Certes, il ne s'agit pas de se prosterner devant la Convention européenne des droits de l'homme ; nous devons conserver, les uns et les autres, notre liberté d'appréciation. Il n'en demeure pas moins que cette volonté d'affichage conduit généralement le Gouvernement à déposer des projets de loi sans se soucier des conséquences d'une saisine éventuelle du Conseil constitutionnel - nous n'avons pas non plus à nous en soucier, mais cela nous préoccupe quelque peu - et à se dire : « qui vivra verra ! ». Telle fut un peu la situation que nous avons connue cet été, avec la mesure concernant les intérêts d'emprunts. On fait un effort et, ensuite, on avise !
Si un doute pouvait subsister sur l'intérêt du bicamérisme, il serait aujourd'hui dissipé par la qualité des améliorations que la commission des lois a apportées au projet de loi que nous examinons. Elle a procédé à une réécriture de plusieurs dispositions, afin de corriger la mauvaise qualité d'un texte examiné en urgence.
Le principal argument qui doit nous guider est l'anticipation de la décision du Conseil constitutionnel, dont un membre éminent, son président, a dit un jour : « trop de loi tue la loi ».
M. Pierre Fauchon. Ce n'est qu'une formule !
M. Nicolas Alfonsi. Compte tenu de l'autorité de celui qui l'a prononcée, on peut peut-être la prendre en compte !
En l'espèce, nous aurions pu voter en faveur de l'amendement 29 de la commission, mais le sous-amendement n° 92 déposé par le Gouvernement a ruiné l'espoir que nous pouvions mettre dans ce texte.
M. Fauchon a quelque peu mis à mal les arguments relatifs à la Convention européenne des droits de l'homme. Effectivement, si l'on approfondit un peu le sujet, il y a beaucoup de choses à dire.
Aux termes du sous-amendement n° 92, certaines dispositions de l'article 1er « sont applicables aux personnes faisant l'objet d'une condamnation prononcée après la publication de la présente loi pour des faits commis avant cette publication ». Or, selon moi, il existe un principe intangible, qui prime sur toute autre considération.
C'est la raison pour laquelle la majorité des membres du groupe du RDSE votera contre le projet de loi, tandis que la minorité votera pour. Quant à la minorité de la minorité, j'ignore ce qu'elle fera... (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. Je veux tout d'abord apporter une précision : j'ai indiqué que, selon moi, le risque encouru par les victimes ou par les familles de futures victimes me paraissait plus grand que celui d'une éventuelle condamnation de la Cour européenne. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s'exclame.) Je persiste et signe ! Et de nombreux Français doivent penser comme moi.
Madame le ministre, les membres du groupe UMP voteront en faveur de ce projet de loi avec grand plaisir parce qu'il répond à une forte exigence de nos concitoyens, qui ne comprennent pas pourquoi des crimes particulièrement odieux ont été commis, alors qu'ils auraient pu et auraient dû être évités.
Il est donc de notre responsabilité de soutenir le dispositif que vous proposez, car il s'agit, à l'instar de ce qui existe déjà dans d'autres pays, de renforcer la prise en charge des criminels particulièrement dangereux dans des centres socio-médico-judiciaires.
Au nom de l'ensemble de mes collègues du groupe UMP, je souhaite saluer votre ferme détermination, madame le ministre. Comme vous l'avez souligné lors de la discussion générale, la rétention de sûreté constitue une innovation sans équivalent dans notre droit ; elle concerne certains criminels lourdement condamnés, d'une dangerosité intrinsèque rare.
Voilà pourquoi nous soutenons ce projet de loi, qui représente également une sérieuse avancée pour le droit des victimes, puisqu'il va permettre d'améliorer le traitement judiciaire des dossiers des personnes atteintes de troubles mentaux les rendant irresponsables sur le plan pénal.
Enfin, grâce à ce texte, l'efficacité du dispositif d'injonction de soins sera renforcée.
Pour conclure, je souhaite féliciter, au nom du groupe UMP, le président de la commission des lois, Jean-Jacques Hyest, et le rapporteur, Jean-René Lecerf, de leur travail de qualité, même si nous avons eu quelques petites divergences. Mais ce sont les règles du débat et de la démocratie !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Cela n'empêche pas d'apprécier le travail !
M. Robert del Picchia. Sous l'impulsion de M. le rapporteur, les dispositions adoptées par notre assemblée ont permis de clarifier utilement certains des aspects du dispositif ; en particulier, il a été précisé que la commission chargée de prononcer la rétention de sûreté était bien une juridiction.
Pour toutes ces raisons, les membres du groupe UMP voteront sans réserve en faveur de ce projet de loi, tel qu'il a été enrichi par les travaux de notre assemblée.
M. le président. La parole est à M. Pierre Fauchon.
M. Pierre Fauchon. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la grande majorité des membres du groupe de l'UC-UDF voteront bien volontiers ce texte.
Reprenant l'expression de notre excellent collègue Nicolas Alfonsi, il est certes possible que « trop de loi tue la loi », mais si cette loi aura servi à éviter quelques meurtres, elle sera bienvenue.
Ce texte a été caricaturé ; je n'y reviens pas. J'ai ainsi lu dans un journal que la rétention de sûreté était la prison à vie. Mais l'auteur de cette affirmation ne s'est sans doute pas donné la peine de lire le projet de loi. D'autres ont parlé de bagne. Toutefois, personne ne conteste que certains individus sont dangereux : tout le monde est d'accord sur ce point !
M. Pierre Fauchon. Certes, ma chère collègue, il n'existe nulle part, en ce bas monde, de certitude absolue ! Mais si, sous prétexte que les choses ne sont pas d'une certitude absolue, il ne fallait rien faire, alors on n'interviendrait pratiquement dans aucun domaine. Naturellement, il faut admettre qu'il existe une certaine marge d'erreur. Je crois que le texte comporte des précautions extrêmement sérieuses.
Vous ne pouvez pas nier la dangerosité de certains individus, pas plus que la très grande probabilité de la répétition de crimes. Quelle contre-proposition avez-vous faite au projet de loi ? Aucune ! Vous préconisez simplement de remettre en liberté les personnes visées, et advienne que pourra !
M. Richard Yung. Vous caricaturez !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Caricature !
M. Pierre Fauchon. Non, c'est bien ce que vous dites ! Considérer que ces gens-là puissent voir leur libre arbitre affecté porterait atteinte, selon vous, à la philosophie des Lumières.
Une certaine conception de l'homme transparaît au travers du débat que nous venons d'avoir. On a évoqué tout à l'heure l'époque des Lumières. Robert Badinter campe sur ses positions, décrivant l'homme idéal tel qu'il a été imaginé à la veille de la Révolution française, dans les écoles de Voltaire, de Rousseau : l'homme des Lumières, « maître de lui comme de l'univers », et qui a son libre arbitre.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Caricature !
M. Pierre Fauchon. Mais depuis cette époque, de l'eau est passée sous les ponts. Mes chers collègues, vous semblez ignorer totalement les données de la psychologie et de la psychanalyse et croire que tout un chacun est doté du libre arbitre. L'on ne pourrait avoir de jugement que moral. Je reprends les propos de M. Badinter : une faute a été commise, une sanction a été prononcée...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. M. Badinter n'est plus là !
M. Pierre Fauchon. Ma chère collègue, je vous ai écoutée attentivement et j'estime que vous avez dit beaucoup de choses justes. Alors, écoutez-moi un peu et vous constaterez que je ne dis peut-être pas que des bêtises, on ne sait jamais...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je vous écoute, mais vous caricaturez tellement !
M. Pierre Fauchon. Quoi qu'il en soit, nous avons beaucoup appris sur l'être humain. La référence à l'être humain idéal du XVIIIe siècle ne correspond plus à nos connaissances actuelles. Il faudrait peut-être un peu réviser notre position.
Cela étant, on a brandi, tel un épouvantail, la question de la rétroactivité. Mais, je le répète, selon moi, aucun problème ne se pose de ce point de vue parce que la condamnation d'origine, sans doute très ancienne, est la condition, et non la cause, de l'examen de l'état psychiatrique de la personne concernée. On évoque la rétroactivité sans donner d'explication. Il faut expliquer en quoi consiste cette rétroactivité ! La condamnation d'origine, qui sera bien sûr très antérieure, n'est que la condition.
Prenons un exemple simple. Imaginons l'adoption d'une loi prévoyant qu'une personne, qui, ayant atteint l'âge de la majorité, commet ensuite tel ou tel acte répréhensible, encourra telle ou telle punition. Va-t-on faire remonter l'appréciation de la rétroactivité à la date de sa majorité ? La majorité est la condition, mais non la cause de la condamnation. Ici, le fondement de cette dernière, c'est l'examen par une commission de l'état psychologique de la personne poursuivie, puis la décision de la juridiction. Telle est la cause de la mesure technique de sûreté, qui ne constitue pas une mesure morale de punition. La cause sera, par conséquent, forcément postérieure au vote de la loi. Donc, aucun problème de rétroactivité ne se pose.
J'ai déjà indiqué ce que je pensais de l'interprétation de la Convention européenne des droits de l'homme. On s'est trompé en ne retenant que la première hypothèse visée par ladite convention. En réalité, il faut plutôt se situer dans l'hypothèse d'une variante de l'aliénation, qui ne suppose pas de condamnation préalable.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous pouvons adopter ce texte avec sérénité.
Madame la ministre, je formule le voeu que nous trouvions le moyen pratique - indépendamment des discussions théoriques intéressantes que nous avons eues - de créer pour ces malheureux, que nous protégeons aussi contre eux-mêmes - on oublie de le dire ! -, des conditions de rétention telles que personne ne puisse soutenir qu'elles peuvent être confondues avec la détention.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 78 :
Nombre de votants | 326 |
Nombre de suffrages exprimés | 318 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 160 |
Pour l'adoption | 189 |
Contre | 129 |
Le Sénat a adopté.
La parole est à Mme le garde des sceaux.
Mme Rachida Dati, garde des sceaux. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite vous remercier de la qualité du débat que nous venons d'avoir. Une fois de plus, votre Haute Assemblée a montré tout l'attachement qu'elle porte aux grands débats de notre pays et à la qualité des lois qu'elle adopte.
Nous avons eu de nombreux échanges, nous n'avons pas toujours été d'accord, mais j'ai pu apprécier, sur l'ensemble des travées de cette assemblée, la qualité des arguments et la volonté d'apporter de vraies réponses sur un sujet qui nous concerne tous.
Je souhaite remercier tout particulièrement M. le rapporteur, Jean-René Lecerf, et M. le président de la commission des lois, Jean-Jacques Hyest. Leurs travaux ont permis d'améliorer ce texte et je suis sûr que ceux de la commission mixte paritaire seront fructueux.
Ce projet de loi améliore la protection de nos concitoyens et il répond également à leurs attentes, puisque 81 % des Français sont favorables à ce texte.
Je salue tout particulièrement votre volonté unanime d'assurer un suivi adapté des délinquants dangereux dès le début de leur peine.
Je salue également la volonté du Sénat de permettre l'application de la rétention de sûreté aux délinquants les plus dangereux qui sortiront de prison dans les années qui viennent. Je sais que les débats que nous aurons au moment de l'examen du projet de loi pénitentiaire seront tout aussi riches. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
7
Nomination de membres d'une commission mixte paritaire
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d'une commission mixte paritaire sur le texte que nous venons d'adopter.
La liste des candidats établie par la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale a été affichée conformément à l'article 12 du règlement.
Je n'ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jean-Jacques Hyest, Jean-René Lecerf, Patrice Gélard, Hugues Portelli, Pierre Fauchon, Robert Badinter et Mme Josiane Mathon-Poinat.
Suppléants : M. Nicolas Alfonsi, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. Christian Cointat, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, René Garrec et François Zocchetto.
8
Retrait de l'ordre du jour d'une question orale
M. le président. J'informe le Sénat que la question n° 155 de Mme Marie-France Beaufils est retirée de l'ordre du jour de la séance du mardi 25 mars 2008 à la demande de son auteur.
9
Transmission d'un projet de loi
M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi, modifié par l'Assemblée nationale, relatif à la nationalité des équipages de navires.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 190, distribué et renvoyé à la commission des affaires économiques.
10
Textes soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1234/2007 portant organisation commune des marchés dans le secteur agricole et dispositions spécifiques en ce qui concerne certains produits de ce secteur (règlement « OCM unique »).
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3766 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les nouveaux aliments et modifiant le règlement (CE) n° XXX/XXXX [procédure uniforme].
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3767 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux denrées alimentaires destinées à une alimentation particulière (Refonte).
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3768 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Proposition de décision du Parlement européen et du Conseil concernant la mobilisation du Fonds de solidarité de l'Union européenne.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3769 et distribué.
J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
- Avant projet de budget rectificatif n° 1 au budget général 2008 - État des dépenses par section - Section III - Commission.
Ce texte sera imprimé sous le n° E-3770-I et distribué.
12
Dépôt d'un rapport
M. le président. J'ai reçu de M. Jean-Claude Carle un rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi de M. Jean-Marc Todeschini, Mme Gisèle Printz, MM. Jean-Pierre Masseret, Jean-Pierre Bel, Serge Lagauche, Mme Christiane Demontès, MM. Simon Sutour, Bertrand Auban, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Yannick Bodin, Mme Claire-Lise Campion, MM. Jean-Louis Carrère, Pierre-Yves Collombat, Roland Courteau, Jean-Pierre Demerliat, Claude Domeizel, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard Dussaut, Jean-Pierre Godefroy, Alain Journet, Yves Krattinger, Alain Le Vern, Roger Madec, Philippe Madrelle, Jacques Mahéas, Marc Massion, Jean-Luc Mélenchon, Gérard Miquel, Jean-Marc Pastor, Bernard Piras, Marcel Rainaud, Daniel Raoul, Thierry Repentin, Mme Patricia Schillinger, MM. Michel Sergent, René-Pierre Signé, Michel Teston, Robert Tropeano, Richard Yung, Bernard Frimat, Michel Dreyfus-Schmidt, Claude Haut, Mme Bariza Khiari, MM. Jean-Claude Peyronnet, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Tasca, M. Jean-Pierre Michel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, tendant à abroger l'article 89 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales (n° 106, 2007-2008).
Le rapport sera imprimé sous le n° 191 et distribué.
12
ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 5 février 2008 :
À dix heures :
1. Dix-huit questions orales.
(Le texte des questions figure en annexe).
À seize heures et le soir :
2. Discussion de la proposition de loi (n° 136, 2007-2008), modifiée par l'Assemblée nationale, relative à la sécurité des manèges, machines et installations pour fêtes foraines ou parcs d'attraction.
Rapport (n° 162, 2007-2008) de M. Pierre Hérisson, fait au nom de la commission des affaires économiques.
3. Discussion du projet de loi (n° 149, 2007-2008) relatif aux organismes génétiquement modifiés (urgence déclarée).
Rapport (n° 181, 2007-2008) de M. Jean Bizet, fait au nom de la commission des affaires économiques.
Par ailleurs, je rappelle que le Parlement se réunira en Congrès le lundi 4 février, à seize heures, pour se prononcer sur le projet de loi constitutionnelle modifiant le titre XV de la Constitution.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures vingt.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD