M. Gérard Longuet. Rapport très intéressant !
M. Alain Lambert. Dommage que personne n'en ait tenu compte ! (Sourires.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. En effet !
Par ailleurs, la qualité éminente des personnalités auxquelles le Gouvernement confie des missions ne saurait en aucun cas conduire le Parlement à se dessaisir de ses prérogatives.
Je me tourne vers nos collègues socialistes pour leur demander quelles conséquences ils tirent de la majoration du plafond à 20 000 euros. Cela ne change rien ! Les intérêts et les dépôts peuvent s'accumuler sur le compte, on n'en tire aucune conséquence et on laisse courir l'avantage fiscal sans limitation.
Vous êtes bien conscients, mes chers collègues, que pour les gestionnaires de patrimoine, c'est devenu un mode de placement extrêmement intéressant, surtout si, dans les semaines qui viennent, le taux d'intérêt du livret A est révisé à la hausse, ce qui ne fera qu'accroître la dépense fiscale.
Je comprends bien la nécessité de laisser à la disposition de nos compatriotes un outil d'épargne très populaire. Toutefois, comme le démontrent les chiffres qu'a rappelés M. le rapporteur général, les épargnants qui saturent leur livret A ne sont pas très nombreux. Il ne faut pas créer un effet d'aubaine qui serait dépourvu de vraie légitimité.
Sans doute conviendrait-il que les quatre auteurs de l'amendement demandent une suspension de séance pour prendre une décision quant au sort de leur proposition. (Sourires.) On peut toutefois considérer que le débat a eu lieu et que nous pouvons retirer notre amendement. (MM. Lambert et Marini font un signe d'assentiment.)
M. Gérard Longuet. La mort dans l'âme !
M. le président. L'amendement n° II-186 est retiré.
La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote sur l'amendement no II-242.
M. Michel Charasse. J'ai trouvé la démarche des auteurs de l'amendement no II-186 qui vient d'être retiré assez intéressante au plafond près. Puisque, au fond, il reste encore l'amendement n° II-242 du groupe socialiste qui tend à revaloriser ce plafond, nous restons dans le sujet.
Comme chacun le sait, en France, le livret A, qui est une vieille création, finance le logement social. La question qui se pose est de savoir s'il faut prendre le risque de détourner l'épargne au-delà de ce plafond. C'était un peu ce que prévoyait l'amendement n° II-186, et la question accessoire est la suivante : avons-nous trop d'argent pour le logement social ? C'est un tout !
Mais compte tenu de ce qu'ont indiqué le ministre et le rapporteur général, que va-t-il se passer à Bruxelles - Mme Bricq en a parlé - dans les jours qui viennent ou dès maintenant et que dira le rapport Camdessus ?
Il semble bien que ce rapport devrait conclure sur une certaine forme de banalisation. Donc, nous prenons un risque grave, étant entendu que, jusqu'à présent, les pauvres finançaient par leur épargne le logement des pauvres et que je ne suis pas certain que, demain, les riches financeront de la même manière le logement des pauvres. C'est une question évidente !
Par ailleurs, je connais bien M. Camdessus. Je sais que c'est un homme de haute conscience. Je ne partage pas toujours la philosophie qui est la sienne, mais il peut avoir une vision expérimentale qui le conduira après à aller se repentir selon les voies qu'il emprunte habituellement, mais la confession ne remplacera pas le logement pour les mal logés.
Cela étant dit, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, je pense que vous avez soulevé un lièvre avec la revalorisation du plafond, parce que si l'on part de 1991, qui est la date de fixation du plafond à 15 300 euros, comme l'a dit Marc Massion tout à l'heure, si l'on applique en gros l'inflation intervenue depuis cette époque, on arrive à 20 000 euros
C'est la raison pour laquelle, si nous voulons maintenir l'effort et les ressources en faveur du logement social, compte tenu de ce qui va se passer à Bruxelles et du fait que le Gouvernement semble dire qu'après tout il pourrait accepter la banalisation, nous devons « engranger , si je puis dire, à la Caisse d'épargne Par conséquent, les 20 000 euros constituent une sage précaution.
Je suis donc tout à fait partisan, vous vous en doutez, d'autant plus que j'en suis signataire, de l'adoption de l'amendement no II-242, qui remet les compteurs à jour.
Évidemment, on peut regretter que ce débat soit peut-être prématuré par rapport aux décisions définitives qu'on nous annoncera côté Bruxelles et du rapport Camdessus. Mais il y a encore une navette - nous sommes au Parlement, nous faisons ce que nous voulons - et il y a aussi un collectif budgétaire. Donc, on peut toujours se rattraper.
Mais je pense que ce serait une sage précaution, pour préserver les ressources du logement social et étant donné ce qui se prépare conjointement à Bruxelles et chez M. Camdessus, de se rallier à la proposition du groupe socialiste en portant le plafond à 20 000 euros. On aura toujours le temps de voir après.
Je vais vous faire une ultime confidence : le rapporteur général a proposé 16 000 euros. Nous, nous proposons 20 000 euros. Ne le répétez pas : la mesure est d'ordre réglementaire ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur Charasse, permettez-moi tout d'abord de vous faire observer que les sommes qui sont affectées aux prêts au logement ne représentent qu'une fraction relative - 50 % environ - de l'ensemble des dépôts.
M. Michel Charasse. Qui sont ce qu'ils sont.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Par ailleurs, il m'est arrivé de constater que les bailleurs sociaux trouvent plus intéressant de faire appel au marché que de solliciter les prêts de la Caisse des dépôts et consignations.
En effet, eu égard au mode de rémunération de la collecte, les taux du marché sont souvent inférieurs à ceux qui sont pratiqués par la Caisse des dépôts et consignations.
Il s'agit là d'un argument supplémentaire pour tendre vers une révision de ces politiques.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-242.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles additionnels avant l'article 39
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-165, présenté par MM. Marini et Arthuis, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Avant l'article 39, insérer un article additionnel rédigé comme suit :
I. - L'article L. 232-19 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigé :
« Art. L. 232-19. - Les sommes servies au titre de l'allocation personnalisée d'autonomie ne font pas l'objet d'un recouvrement sur la succession du bénéficiaire, sur le légataire ou sur le donataire lorsque la valeur de l'actif net successoral est inférieure à 100 000 euros. Ce montant est actualisé chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu et arrondi au millier d'euros le plus proche.
« Le recouvrement sur la succession du bénéficiaire s'exerce sur la partie de l'actif net successoral qui excède le montant mentionné au premier alinéa. »
II. - Le I s'applique aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 2009.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avec cet amendement, nous abordons un autre domaine, que nous aurons l'occasion d'approfondir notamment dans le cadre de la mission commune d'information que le Sénat va constituer ces jours-ci sur la dépendance, l'autonomie des personnes âgées et l'émergence du cinquième risque.
Aux termes de l'article L. 232-19 du code de l'action sociale et des familles, les sommes servies au titre de l'allocation personnalisée d'autonomie, l'APA, ne font pas l'objet d'un recouvrement sur la succession du bénéficiaire, sur le légataire ou sur le donataire.
L'amendement no II-165 vise à limiter le bénéfice de cet article aux successions inférieures à 100 000 euros. En d'autres termes, lorsque l'actif net successoral excédera ce montant, les sommes servies au titre de l'APA feront l'objet d'une récupération sur succession.
Avec cet amendement, la commission souhaite insister sur la solidarité entre les générations : la société a besoin de solidarité, en particulier entre les générations. On ne peut pas considérer que le sort des vieux parents, grands-parents ou arrière-grands-parents est entièrement assumé par la collectivité.
Il est des devoirs qui s'imposent à toute époque, sous toutes les législations.
M. le président. L'amendement n° II-228, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Avant l'article 39, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article L. 232-19 du code de l'action sociale et des familles est complété par un membre de phrase et un alinéa ainsi rédigés :
« lorsque la valeur de l'actif successoral est inférieure à 50 000 euros.
« Cette somme varie chaque année comme le taux prévisionnel d'augmentation des prix à la consommation (hors tabac). »
II. Le I s'applique aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 2009.
La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Mon amendement s'inscrit dans le même esprit que celui de M. le rapporteur général.
Dans un souci de simplification, je vais déposer un sous-amendement à l'amendement no II-165, ce qui me permettra de retirer mon amendement et ainsi d'accélérer les débats. Comme vous pouvez le constater, monsieur le président, je m'efforce de faire gagner du temps au Sénat.
Mon sous-amendement à un double objet.
En premier lieu, il vise à remplacer, dans le paragraphe I de l'amendement no II-165, la somme : « 100 000 euros » par la somme : « 50 000 euros ».
En second lieu, il tend, dans le paragraphe II de l'amendement, à remplacer la mention : « successions ouvertes » par la mention : « allocations attribuées ».
En effet, lorsque l'APA a été instituée, le projet de loi prévoyait, à l'origine, la récupération sur succession, comme c'était le cas pour la prestation spécifique dépendance, la PSD.
À la suite d'un dialogue entre le gouvernement de M. Lionel Jospin et le groupe communiste à l'Assemblée nationale, la récupération sur succession a disparu.
Ce ne fut pas une décision des plus heureuses. En effet, aujourd'hui, des gens qui n'ont aucun bien payent des impôts pour permettre à des enfants qui attendent tranquillement la mort de leur ascendant de passer à la caisse sans avoir eu, à aucun moment, quoi que ce soit à payer. C'est parfaitement immoral !
J'ai été très heureux d'entendre le Président de la République, s'adressant au Sénat à la presse sociale voilà quelques semaines, déclarer que pour financer la dépendance il faudrait faire appel au patrimoine. Nous sommes au coeur du sujet.
Il n'est pas normal que l'APA ne donne pas lieu à récupération sur succession alors que, les conseillers généraux présents dans cet hémicycle le savent bien, cette pratique est courante et ne soulève pas de difficulté en matière d'aide sociale départementale.
C'est pourquoi, monsieur le président, je me propose de retirer l'amendement no II-228 au bénéfice du sous-amendement dont l'objet, je le rappelle, est double.
D'une part, il vise à abaisser à 50 000 euros - au lieu de 100 000 euros dans l'amendement no II-165 - la valeur de l'actif net successoral, car c'est en moyenne le montant des récupérations sur successions. Ce montant est en réalité aujourd'hui de 46 000 euros et cela ne trouble personne.
Si nous adoptons la valeur proposée par M. le rapporteur général, nous nous condamnons à réviser à la hausse le barème de récupération sur succession qui joue dans les autres cas, notamment pour l'aide sociale départementale. Il en résulterait des pertes de recettes très importantes pour les départements.
D'autre part, il tend, dans le paragraphe II de l'amendement, à remplacer les mots : « successions ouvertes » par les mots : « allocations attribuées ».
Je souhaite en effet que cette mesure s'applique non pas au stock, mais au flux, c'est-à-dire que les demandes qui ont été admises et qui sont actuellement dispensées de récupération sur succession ne soient pas remises en question. En revanche, il faut que la règle s'applique aux allocations nouvellement attribuées.
C'est pourquoi je propose de remplacer les mots : « successions ouvertes à compter du 1er janvier 2009 » par les mots : « allocations attribuées à compter du 1er janvier 2008 ». Il faut que la mesure joue tout de suite, mais pour les seules allocations à attribuer. Le stock, on le laisse de côté ! Franchement, il s'agit de personnes âgées dont les familles ont déposé en toute bonne foi un dossier qui a été agréé : nous n'allons pas revenir en arrière !
Tel est l'objet de mon sous-amendement. Bien sûr, je retire l'amendement n° II-228.
M. le président. L'amendement n° II-228 est retiré.
Je suis saisi d'un sous-amendement n° II-276, présenté par M. Charasse, et ainsi libellé :
I. - À la fin de la première phrase du texte proposé par le I de l'amendement n° II-165 pour l'article L. 232-19 du code de l'action sociale et des familles, remplacer le montant « 100 000 euros » par le montant « 50 000 euros ».
II. - Dans le II du même amendement, après le mot : « aux », rédiger comme suit la fin de la phrase : « allocations attribuées à compter du 1er janvier 2008 ».
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission, comme toujours, salue l'ingéniosité de notre collègue Michel Charasse. En ce qui concerne le montant minimal de la succession soumise à récupération, nous préférons en rester à 100 000 euros, car ce seuil - je ne sais pas si c'est un très bon argument, mais il est souvent utilisé - correspond au patrimoine médian et, surtout, il est bien lisible.
En ce qui concerne le second élément de ce sous-amendement, on peut le suivre sur le plan technique. En revanche, sur le plan politique, une bonne partie de l'année 2008 sera consacrée à l'émergence du cinquième risque.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ne serait-il pas préférable de maintenir la rédaction initiale de la commission, qui fait référence au 1er janvier 2009, car, à cette date, toute la législation relative au cinquième risque aura été mise en place ?
Concrètement, les deux formulations ne sont pas très différentes. Le fait d'afficher le 1er janvier 2009 s'inscrit mieux dans un continuum de réformes. Depuis le début de l'après-midi, nous nous efforçons, monsieur le ministre, de contribuer à la démarche réformatrice du Gouvernement. Mais il faut laisser aux choses le temps d'évoluer.
Même si je comprends bien l'intention de Michel Charasse, que j'approuve dans une très large mesure, le fait d'afficher la date du 1er janvier 2008 me semble en contradiction par rapport aux évolutions attendues au cours du premier semestre 2008.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse.
M. Michel Charasse. Monsieur le président, je souhaite modifier mon sous-amendement dans un souci de conciliation.
Il me paraît tellement important que nous adoptions cette mesure de justice que je suis prêt à me rallier à M. le rapporteur général sur le chiffre de 100 000 euros, même si je le conteste, parce que je pense qu'il va créer un précédent pour les autres récupérations sur succession et qu'il faudra s'aligner un jour ou l'autre.
Mais je ne cède pas sur les « successions ouvertes » ; je préfère la référence aux « allocations attribuées ». Si vous prenez en compte les successions ouvertes, vous touchez le stock des bénéficiaires de l'allocation. Des familles, qui ont obtenu un accord aujourd'hui, compte tenu d'une certaine situation, vont devoir payer demain : elles ne comprendront pas !
Il faut donc que vous acceptiez absolument de remplacer le critère de la succession ouverte par celui de l'allocation attribuée. Je maintiens donc mon sous-amendement sur ce point précis !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. L'idée de substituer aux successions ouvertes la notion d'allocation attribuée est bonne, car elle écarte tout risque de rétroactivité. Je m'y rallie donc volontiers.
En revanche, je crois qu'il faut spécifier : « aux allocations attribuées pour la première fois à leur bénéficiaire ». En effet, les attributions sont constamment révisées et nous risquerions de créer une ambiguïté.
M. Michel Charasse. Je suis d'accord dès lors que l'on ne touche pas au stock des bénéficiaires existants.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° II-276 rectifié, présenté par M. Charasse, et ainsi libellé :
Dans le II de l'amendement n° II-165, remplacer les mots :
successions ouvertes
par les mots :
allocations attribuées pour la première fois à leurs bénéficiaires
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Le Gouvernement n'est pas favorable à l'amendement n° II-165, pour des raisons non pas de fond, mais de calendrier.
Le Président de la République s'est prononcé en septembre, vous l'avez dit, pour une meilleure prise en compte des capacités contributives des personnes ainsi que de leur patrimoine. L'orientation a donc été donnée.
Par ailleurs, Xavier Bertrand réfléchit, en liaison avec le ministère du budget et des comptes publics, à la mise en place d'une cinquième branche. Nous risquerions de porter préjudice à l'équilibre financier de la branche à créer en anticipant, avec l'adoption de cet amendement, sur la discussion de fond à laquelle les parlementaires seront associés. (Mme Marie-Thérèse Hermange fait un signe d'approbation.) Vous avez du reste fait référence à la mission commune d'information qui doit avoir lieu à cet égard.
Ce sujet va venir en discussion dans les mois qui viennent ; il sera envisagé dans une perspective beaucoup plus large que la seule récupération sur succession, à l'encontre de laquelle le Gouvernement ne soulève pas d'objection de principe, conformément aux déclarations du Président de la République.
Pour cette raison, et afin de laisser toute sa place au débat, je souhaite le retrait de cet amendement ; à défaut, j'émettrais un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote sur le sous-amendement n° II-276 rectifié.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Je comprends les arguments du rapporteur général et de Michel Charasse relatifs à la solidarité entre les générations.
Mais dans la mesure où cette disposition ne s'appliquerait qu'à partir du 1er janvier 2009, elle me semble prématurée. En effet, nous mettons en place, mercredi prochain, la mission commune d'information sur la prise en charge de la dépendance et la création du cinquième risque ; il me paraîtrait préférable que les travaux de cette mission s'effectuent normalement et que nous votions éventuellement cette mesure l'année prochaine, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Sur le fond, nous avons déjà eu l'occasion, dans le passé, d'exposer les raisons qui nous amènent à considérer avec quelques réserves le dispositif faisant l'objet de cet amendement et de son sous-amendement.
Depuis la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie se pose un problème récurrent : cette allocation procède pleinement de la responsabilité des collectivités territoriales, alors même qu'il nous semble naturel que cette prestation entre dans le champ d'action de la sécurité sociale.
Mon ami et collègue Guy Fischer le disait déjà en 2001, lors de la discussion du projet de loi relatif à la prise en charge de la perte d'autonomie des personnes âgées et à l'allocation personnalisée d'autonomie : « La question fondamentale me semble bien être de savoir si, oui ou non, nous voulons considérer la dépendance comme une pathologie, justifiant son inscription dans le dispositif des risques prévus par la sécurité sociale. Pour notre part, nous nous prononçons pour une intégration dans la branche maladie.
« Je m'appuierai sur le rapport de M. Pascal Terrasse, qui énonce que l'APA correspond à un besoin social nouveau qui exige qu'il soit fait appel à la solidarité nationale. Avec la proposition que nous formulons, la solidarité nationale pourra pleinement s'exprimer.
« Nous ne pouvons que déplorer - et c'est le point majeur de divergence entre nous - que la prestation demeure gérée par les conseils généraux, même si c'est en coopération avec les organismes de sécurité sociale. Ainsi, la notion de subsidiarité est maintenue. Nous sommes donc encore en partie dans la logique de l'action sociale, et non dans celle de la véritable solidarité nationale au sens où nous l'entendons.
« Même si nous comprenons la nécessité d'aller par étapes vers cette prestation universelle - et nous reconnaissons qu'est établie pour la première fois une prestation universelle - nous aurions cependant apprécié que la ?clause de rendez-vous? introduite dans ce projet de loi garantisse la volonté du Gouvernement d'aller jusqu'au bout de sa volonté de traiter dignement, globalement et sur le long terme, l'importante question de la dépendance. »
Au demeurant, le Sénat vient de constituer une mission commune d'information sur la question du cinquième risque. Donc, avant de s'interroger sur la récupération sur succession destinée à aider les départements à payer les frais inhérents au versement de l'allocation personnalisée d'autonomie, il conviendrait sans doute de se demander s'il ne serait pas plus important de changer le caractère même de cette allocation. Nous sommes tout de même, depuis 2001, dans cette contradiction irrésolue : une prestation de caractère universel dont la distribution et la mise en oeuvre dépendent, pour beaucoup, du niveau local.
Nous ne voterons donc ni le sous-amendement n° II-276 rectifié ni l'amendement n° II-165. Si tant est qu'on en accepte le principe, nous pourrions suggérer à la commission - n'y voyez aucune malice ! - de relever le montant minimal des successions soumises à récupération à 150 000 euros, seuil retenu par la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, dite loi TEPA, pour l'application des droits sur les donations ou les successions.
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote.
M. Yann Gaillard. Cette discussion est très intéressante. Même si elle n'aboutit pas, le compte rendu de nos débats servira certainement aux commissions qui vont étudier ce problème sur le fond.
C'est pour cette raison que je partage l'avis de Marie-Thérèse Hermange, qui semble avoir été impressionnée par la déclaration de M. le ministre. Peut-être vaudrait-il mieux attendre, même si la souveraineté parlementaire nous permet de décider par nous-mêmes. Étant donné que l'ensemble de la question va être revu, il n'y a pas péril en la demeure.
Personnellement, je m'abstiendrai sur ce sous-amendement et sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Lorsqu'on affronte des sujets délicats, il est toujours urgent d'attendre : il y a une commission qui va se réunir, etc.
La date proposée est le 1er janvier 2009. Le Président de la République l'a dit, il faudra solliciter les patrimoines. Permettez-moi de vous rappeler, mes chers collègues, que les successions inférieures à 100 000 euros ne paient plus de droits de succession depuis le mois d'août 2008. Si nous ne profitons pas de ces circonstances pour régler la question, comme elle l'est dans beaucoup d'autres cas - en matière d'aide sociale, médicale ou autre, et Marie-Thérèse Hermange le sait -, nous n'avancerons pas !
Si l'amendement est adopté - je souhaite que le sous-amendement le soit aussi, pour une question de précision technique - et si, dans le courant de 2008, on décide de créer le cinquième risque, comme disait M. Foucaud, cela impliquera, à mon sens, une cotisation obligatoire, sinon ce n'est pas un cinquième risque : si on le rattache à un risque existant, il y aura un supplément, mais pas de cotisation nouvelle.
En tout état de cause, si on crée le cinquième risque, on supprimera, le moment venu, la disposition en question ; si on ne le crée pas, comme ce sera à mon avis le cas, on aura au moins cela à se mettre sous la dent au 1er janvier 2009.
C'est la raison pour laquelle je considère qu'il n'y a aucun inconvénient à voter cette disposition aujourd'hui, même si elle doit être revue ensuite à la lumière des travaux qui seront conduits sur le financement de la dépendance. Ce serait un signal selon lequel le Sénat - et peut-être l'Assemblée nationale avec lui, on verra plus tard ! - considère qu'il ne peut y avoir de gratuité en ce qui concerne le financement du risque dépendance.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° II-276 rectifié.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, avant l'article 39.
L'amendement n° II-257, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 39, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les articles 150-0 D bis et 150-0 D ter du code général des impôts sont abrogés.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement vise à revenir sur une question que nous avions déjà soulevée lors de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2008.
Le régime d'imposition séparée des plus-values sur cessions d'actifs a connu, à la fin de 2005, une mutation essentielle avec l'adoption des nouveaux articles 150-0 D bis et 150-0 D ter du code général des impôts, conduisant notamment à pratiquer, à compter de la cinquième année de détention des titres cédés, un abattement sur le montant de l'imposition due.
Ce régime est en phase de montée en charge, puisqu'il est relativement récent, et son coût, en termes de dépense fiscale, n'est pas véritablement estimé.
Ce qui est évident, au-delà de cette incertitude, c'est qu'il va coûter d'autant plus cher qu'il concerne d'abord et avant tout des contribuables dont les revenus les amènent à être imposés au taux le plus élevé du barème. La pratique des montages financiers les plus « juteux », les mieux optimisés, permettant de réduire l'imposition au minimum, pourra se répandre. On a vu, par exemple, ce qui s'est passé lors de la sortie du capital d'EADS de Jean-Luc Lagardère et de cadres dirigeants du groupe, réalisée de manière progressive afin d'échapper à toute imposition de la plus-value.
Je n'en dirai pas davantage sur ce sujet, puisque nous avions défendu un amendement à peu près identique lors du débat sur la première partie du projet de loi de finances.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. J'espère que nos collègues du groupe CRC ne m'en voudront pas de ne pas faire un commentaire détaillé sur leur amendement, mais dès lors que la commission des finances ne s'inscrit pas du tout dans la même logique économique et de compétitivité, elle ne peut qu'émettre un avis tout à fait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° II-256, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 39, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 200 quaterdecies du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art.... La somme des réductions et crédits d'impôts visés aux articles 199 ter à 200 quaterdecies du code général des impôts ne peut excéder 7 500 euros par foyer fiscal. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Nous avions présenté, à l'occasion de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, un amendement assez proche de celui que je vais maintenant exposer, tendant à plafonner les effets des réductions d'impôt, et seulement de celles-ci.
Il faut dire que la série des réductions et des crédits d'impôt visés aux articles concernés doit, à notre sens, amener à s'interroger.
Le total de la dépense fiscale associée à ces différentes mesures s'élève en effet, selon l'évaluation des voies et moyens, à 13,5 milliards d'euros environ, ce qui représente plus du cinquième du produit attendu de l'impôt sur le revenu.
Dans l'absolu, c'est un peu comme si nous fixions le taux marginal supérieur de l'impôt sur le revenu non pas à 40 %, mais à quelque 31 %, à cette nuance près que les réductions et les crédits d'impôt concernés ont, bien entendu, une incidence fort différenciée selon qu'ils sont ou non cumulatifs. Que l'on ne s'y trompe pas, ce sont les bénéficiaires des plus hauts revenus qui font jouer le plus grand nombre de dispositifs de réduction et de crédit d'impôt ; ils y ont en tout cas bien davantage recours que les titulaires de revenus salariaux moyens ou modestes.
En moyenne, la réduction d'impôt liée à la prise en compte des intérêts des emprunts immobiliers représente 500 euros par foyer concerné, contre 1 300 euros s'agissant des emplois à domicile, 3 000 euros pour les acquisitions de parts de fonds d'investissement de proximité, et plus de 55 000 euros pour les investissements outre-mer...
Il s'agit donc de situations et de mesures fort diverses, ce qui ne peut que nous inciter à nous interroger sur l'utilité sociale et l'efficacité économique de chacune de ces dispositions dérogatoires au droit commun.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement n'est pas du tout en accord avec les orientations de la majorité de la commission des finances, puisque celle-ci pense qu'il faut supprimer des niches fiscales, et ne pas se contenter d'en plafonner les avantages, élargir l'assiette et abaisser les taux.
Ce n'est pas exactement la direction que vous envisagez, monsieur Foucaud. Le plafonnement des avantages liés aux niches fiscales est une voie erronée, même une mauvaise voie, et Alain Lambert aurait pu dire, s'il était encore présent parmi nous à cet instant, que c'est une voie hypocrite.
Par conséquent, la commission des finances est tout à fait défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?