M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Kouchner, ministre. Compte tenu de ces arguments, le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée !
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Grâce à l'action d'Unifrance (Exclamations sur les travées de l'UMP.) ... Peu importe si je défends des causes perdues !
Grâce à l'action d'Unifrance, dis-je, le cinéma français a pu passer en un an de 350 000 à 3 millions de spectateurs dans certains pays ; c'est le cas de la Chine entre 2003 et 2004. En Russie, on compte entre 3 millions et 5 millions de spectateurs actuellement, contre 45 000 spectateurs en 1999.
Unifrance n'est peut-être pas très bien financée par tous les producteurs. Il n'empêche que, sans Unifrance et sans une aide de l'État pour des pays où l'action de l'association n'est pas rentable immédiatement, nous cesserions de nous développer dans les pays émergents ou difficiles !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. On veut simplement responsabiliser les acteurs !
M. Jean-Louis Carrère. Quand on veut tuer son chien, on l'accuse d'avoir la rage !
M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Action extérieure de l'État » figurant à l'état B, modifiés.
(Ces crédits sont adoptés.)
Article additionnel avant l'article 41
M. le président. L'amendement n° II-41, présenté par M. Gouteyron, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I.- Avant l'article 41, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Quel que soit leur auteur, tous les télégrammes diplomatiques à caractère financier, budgétaire et fiscal sont transmis pour information aux commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat, réserve faite des sujets à caractère secret concernant la défense nationale et la sécurité intérieure ou extérieure de l'État et du respect du secret de l'instruction et du secret médical.
II.- En conséquence, faire précéder cet article de la rubrique :
Action extérieure de l'État
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Depuis longtemps, je demande que me soient transmis les télégrammes diplomatiques. Il y va de l'information du Parlement. Il est vrai que j'en ai reçu un paquet hier !
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Tout à fait !
Je retire cet amendement, mais je souhaite, monsieur le ministre, que vous fassiez le nécessaire pour que vos services assurent l'information du rapporteur spécial.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Je vous remercie, monsieur le ministre !
M. le président. L'amendement n° II-41 est retiré.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures vingt-cinq,
est reprise à quinze heures trente, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.)
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale.
Sécurité sanitaire
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission : « Sécurité sanitaire ».
La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le ministre, je souhaite formuler quelques observations générales sur la mission « Sécurité sanitaire » et sur les deux programmes qui la composent.
D'abord, pour la troisième année consécutive, je ne peux que réitérer les griefs habituels concernant le caractère artificiel de cette mission : l'interministérialité, qui est pourtant l'une des caractéristiques de cette mission, ne fonctionne pas, du moins sur le plan budgétaire ; les responsables de programme n'ont pas de marge de manoeuvre ; enfin, les principes de la LOLF ne s'appliquent pas aux nombreux opérateurs qui agissent au sein de la mission.
Cela signifie que l'avenir de la mission elle-même est en débat. La révision générale des politiques publiques engagée depuis le mois de juillet 2007 par l'administration vous a-t-elle permis d'apporter des éléments de réponse concernant la réorganisation de la mission et des programmes qui la composent ?
S'agissant du programme « Veille et sécurité sanitaire », j'insisterai sur la principale innovation pour 2008 : la création de l'établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, l'EPRUS. Cet établissement, qui est piloté par le ministère de la santé, devrait permettre une meilleure politique d'acquisition et de gestion des stocks des produits de santé nécessaires en cas de crise.
Il appelle de ma part trois remarques, que partage, du reste, la commission des finances.
L'EPRUS est une agence de plus au sein du dispositif déjà très complexe de gestion des crises sanitaires. Je rappelle que l'EPRUS, créé par la loi du 5 mars 2007, fait lui-même suite au fonds de prévention des risques sanitaires, le FOPRIS, créé six mois avant par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007. Reconnaissez qu'il s'agit quand même d'une gestion particulière ! Qui plus est, ce transfert de compétences donne lieu à la création de dix-sept postes en 2008. Il aurait été préférable d'accompagner ce transfert de compétences relevant auparavant de la direction générale de la santé par un transfert de personnel.
Par ailleurs, je m'interroge sur la gestion des crédits qui sont destinés à l'EPRUS. L'exécution 2007 laisse en effet apparaître un risque de report de crédits, ainsi que la constitution d'un important fonds de roulement. Comme vous le savez, la commission des finances de notre assemblée, notamment son rapporteur général, n'aime pas beaucoup les fonds dormants.
Si certaines difficultés sont effectivement liées à la mise en place très récente de cet établissement, reconnaissez toutefois que de telles techniques de gestion entravent la sincérité des inscriptions en loi de finances.
S'agissant du second programme, « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation », je ferai deux remarques.
La première, qui est d'ailleurs récurrente, a trait à la sous-budgétisation des mesures concernant la fièvre catarrhale ovine, FCO, dite maladie de la langue bleue. Les 2 millions d'euros inscrits pour 2008 à ce titre seront insuffisants compte tenu, vous le savez, monsieur le ministre, de l'évolution rapide de la maladie. L'année dernière, j'avais déjà attiré l'attention sur ce risque de sous-budgétisation et nous avons dû avaliser, en octobre dernier, le décret d'avance. J'ai donc eu raison et, avec moi, la commission des finances.
Monsieur le ministre, j'ai entendu dire ce matin que vous étiez très attaché à la filière ovine. Dans un contexte financier contraint, comment comptez-vous financer les mesures de lutte contre la fièvre catarrhale ovine, notamment l'achat de vaccins qui devraient être disponibles à la mi-2008 et qui entraînera évidemment des coûts supplémentaires ?
Je dois également rappeler qu'est toujours pendant le problème de l'équilibre financier du service public de l'équarrissage. Compte tenu des aléas financiers que sa gestion a connus ces dernières années, qui ont été soulignés lors de l'audition que nous avons organisée le 26 septembre 2007, je doute du caractère réaliste des prévisions proposées, notamment de la faculté de l'État à faire participer tous les éleveurs.
À la suite de l'audition organisée par la commission des finances, nous avons proposé trois sujets d'investigation au ministère de l'agriculture : étudier les différents modèles européens et internationaux ; réfléchir aux gains pouvant résulter d'une valorisation accrue des sous-produits issus de l'équarrissage ; explorer la voie qui consisterait à séparer le transport des cadavres, du marché public de l'équarrissage.
Quelles suites entendez-vous donner à ces propositions ? Que comptez-vous faire pour apurer la dette du service public de l'équarrissage qui s'élève à 50 millions d'euros et faire face aux contentieux, qui sont toujours pendants, qui portent potentiellement sur 1,7 milliard d'euros ?
En conclusion, monsieur le ministre, j'ai proposé à la commission des finances d'adopter les crédits de la mission « Sécurité sanitaire ». Je précise toutefois que, si aucune amélioration n'est apportée sur les trois points que j'ai évoqués en préambule de mon intervention, ce sera la dernière fois que je proposerai l'adoption des crédits de cette mission, qui, je le répète, est artificielle au regard des grands principes de l'architecture budgétaire nouvellement mise en oeuvre.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis.
M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après la présentation très complète de la mission « Sécurité sanitaire » par notre collègue Nicole Bricq, je limiterai mon propos au programme « Veille et sécurité sanitaires », qui entre dans le champ de compétences de notre commission des affaires sociales puisqu'il regroupe les moyens destinés à la prévention des crises sanitaires touchant la santé humaine.
Ce programme sera doté, en 2008, de plus de 166 millions d'euros. Apparemment, c'est une hausse sans précédent - de près de 60 % - des crédits. Mais, en réalité, celle-ci résulte d'un nouveau mode de financement des urgences et de la création de l'établissement de préparation et de réponses aux urgences sanitaires, l'EPRUS.
C'est sur ce nouvel établissement que portera la première partie de mon intervention.
Sa création constitue le dernier avatar d'une sorte de feuilleton du financement de la gestion des crises, dont je vais détailler les épisodes.
D'abord, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 a créé un fonds de concours commun à 1'État et à l'assurance maladie, initialement destiné à l'achat, au stockage et à la livraison de traitements pour les pathologies résultant d'actes terroristes.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 a ensuite étendu la mission à l'ensemble des menaces sanitaires graves. Progressivement, l'assurance maladie est devenue l'unique contributeur régulier de ce fonds, alors que sa participation devait, à l'origine, rester exceptionnelle.
Puis le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 15 décembre 2005, a contesté ce dispositif car, selon la LOLF, les versements aux fonds de concours doivent avoir un caractère volontaire et non pas obligatoire.
La loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 a alors créé le fonds de prévention des risques sanitaires, le FOPRIS, sous la forme d'un établissement public, dont les recettes étaient constituées d'une contribution annuelle à la charge de l'assurance maladie et d'une subvention de l'État. La commission a alors pris l'initiative de rendre obligatoire un minimum de 50 % d'intervention de l'État dès lors qu'il s'agit bien d'une mission régalienne lui incombant.
Toutefois, il ne s'agissait là que d'une solution transitoire. Une solution définitive a été trouvée par la loi du 5 mars 2007, qui a créé l'EPRUS et lui a confié une triple mission : tout d'abord, la gestion administrative et financière de la réserve sanitaire ; ensuite, l'organisation d'exercices pour valider ou améliorer les plans de réponse aux risques sanitaires ; enfin, l'acquisition, la fabrication, l'importation, le stockage, la distribution et l'exportation de produits et services nécessaires à la protection de la population face à des menaces sanitaires graves, mais permettant aussi de répondre â des besoins de santé publique non couverts en raison d'une rupture de commercialisation de certains produits.
Nous approuvons cette clarification des modalités de financement de la politique de gestion des crises. Pourriez-vous toutefois nous préciser, monsieur le ministre, l'état actuel des stocks de précaution de l'État en médicaments, vaccins, masques, etc. ? Quels sont les besoins de renouvellement identifiés pour 2008 ? Est-il possible de recycler les produits périmés ? Je pense en particulier au Tamiflu, dont les stocks vont arriver à échéance de péremption très prochainement. Allez-vous autoriser le reconditionnement du Tamiflu ?
La deuxième partie de mon propos portera sur la subvention de l'État aux agences. Ce poste de dépenses représente environ 140 millions d'euros en 2008. L'EPRUS mis à part, c'est une dotation équivalente à celle de l'an dernier.
Or, après plusieurs années de ponction sur les fonds de roulement des agences pour financer leurs investissements, ce qui a permis à l'État de les subventionner a minima, les réserves seront réduites, à la fin de l'année 2008, à leur niveau prudentiel, soit environ un mois de fonctionnement pour chaque agence. Cette mesure d'économie ne pourra donc plus être réitérée.
Pouvez-vous nous confirmer, monsieur le ministre, que l'État prendra ses responsabilités dès la prochaine loi de finances et augmentera alors sa subvention aux agences pour répondre à leurs besoins de financement courant ?
J'aborderai pour finir un sujet qui préoccupe la commission : la complexité des structures chargées de la gestion des produits sanguins. Ce dossier, monsieur le ministre, nous tient véritablement à coeur.
Trois établissements y sont impliqués aujourd'hui : l'établissement français du sang, l'EFS, qui est l'opérateur unique des activités de transfusion et de distribution des produits sanguins sur le territoire national ; l'Institut national de la transfusion sanguine, l'INTS, chargé d'une mission de formation universitaire et de recherche ; le laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies, seul habilité à produire les médicaments dérivés du plasma.
Ce dernier opérateur a vocation à fonctionner comme un laboratoire pharmaceutique indépendant, bien qu'il assure la mission de santé publique consistant à fournir les établissements de santé en médicaments de ce type. Or tel n'est pas exactement le cas de l'EFS ni de l'INTS. De fait, l'INTS est financé aux deux tiers par l'assurance maladie et par l'EFS. On comprend donc mal ce qui empêche celui-ci d'intégrer en son sein les activités de l'INTS. Une réforme de ce type éviterait une déperdition d'énergie et de moyens dans le domaine de la gestion des produits sanguins. Quel est votre sentiment sur ce sujet, monsieur le ministre ?
Sous réserve de ces quelques observations, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Veille et sécurité sanitaires » de la mission « Sécurité sanitaire ».
Mme Nicole Bricq, rapporteur spécial. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Claude Biwer, rapporteur pour avis.
M. Claude Biwer, en remplacement de M. Daniel Soulage, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Daniel Soulage, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, étant indisponible, il m'a demandé de le remplacer et je vous prie de bien vouloir excuser son absence.
Mission interministérielle, la mission « Sécurité sanitaire » avait pour ambition de permettre de « visualiser » la politique de sécurité sanitaire de notre pays, politique publique essentielle pour nos compatriotes, pour la santé publique et pour l'équilibre économique de notre pays ; je pense, par exemple, à la lutte contre la grippe aviaire.
Mais l'efficacité et la coordination de la politique de sécurité sanitaire imposaient-elles le regroupement, sur le plan budgétaire, de deux programmes gérés par deux ministères différents au sein d'une mission particulière ? La question préoccupe d'éminents experts... Par ailleurs, nous avons vu, l'an passé, que la situation était loin d'être satisfaisante au regard des avantages que devait apporter la LOLF pour l'examen du budget par le Parlement.
Daniel Soulage a présenté, dans son rapport écrit, les raisons pour lesquelles le Comité interministériel d'audit des programmes, le CIAP, qualifie la mission « d'artificielle ». Sans appeler expressément à sa suppression, ce CIAP évoque la création d'un document de politique transversale et la fusion du programme « Veille et sécurité sanitaires » avec un autre programme du ministère de la santé.
De son côté, notre collègue Daniel Soulage observe que la configuration actuelle de la mission entrave les pouvoirs conférés au Parlement par la LOLF. Il est impossible d'évaluer le nombre d'agents nécessaires à l'efficacité de la mission, ni les crédits réellement mis en oeuvre par l'État au titre de la sécurité sanitaire.
Il est aussi impossible en pratique, pour nous parlementaires, de transférer par amendement des crédits d'un programme vers l'autre, du simple fait qu'ils relèvent des budgets de deux ministères différents. Nos deux rapporteurs en ont fait l'amère expérience, l'an dernier.
Enfin, il est avéré que la collaboration entre les services concernés par la sécurité sanitaire, à Paris comme sur le terrain, n'a pas besoin d'un regroupement budgétaire pour être efficace, puisque, par exemple, les crédits de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, ne relèvent pas de cette mission budgétaire.
Il semble donc indispensable, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques actuellement menée par le Gouvernement, de conduire une réflexion de fond sur le format de la mission « Sécurité sanitaire ». Je vous remercie, monsieur le ministre, de bien vouloir nous le confirmer, tout en prenant note que, pour sa part, Daniel Soulage croit à l'efficacité de l'affichage budgétaire d'une politique, même au sein d'une mission composite et peu orthodoxe au regard de la LOLF.
S'agissant des crédits demandés pour l'exercice 2008, je ne reviendrai pas sur les explications très claires données par vous-même, monsieur le ministre, et par Mme le rapporteur spécial. Je soulignerai simplement l'importance de l'EPRUS, ce nouvel établissement chargé d'anticiper toutes les grandes épidémies - et, en particulier, la grippe aviaire, objet de toutes nos inquiétudes -, d'organiser la gestion des crises et d'activer la réserve sanitaire en cours de constitution.
Le rapporteur pour avis m'a également demandé d'insister sur la nécessité de disposer, dès l'an prochain, dans les documents remis aux parlementaires, d'informations sur l'origine et l'affectation des importants fonds de concours qui alimentent le programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation ».
Quoi qu'il en soit, la commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Sécurité sanitaire ».
J'en viens à la lutte contre la fièvre catarrhale ovine, la FCO, qu'on appelle aussi la maladie de la langue bleue. La reprise de cette épizootie, l'été dernier, après une première alerte connue en 2006, a conduit Daniel Soulage à lui consacrer la troisième partie de son rapport pour avis. Cette maladie préoccupe du reste nombre d'entre nous : les départements que nous représentons font en effet face aux graves difficultés qui affectent depuis six mois les éleveurs d'ovins et de bovins.
Dans son rapport écrit, notre collègue a rappelé les caractéristiques de la FCO, ses effets sanitaires et économiques sur le cheptel, l'historique de son apparition en Europe et l'état actuel de sa diffusion : en France, nous en sommes aujourd'hui à plus de 10 000 foyers dénombrés, à 80 % de bovins, et la zone dite « réglementée » couvre désormais les deux tiers du territoire ; mon propre département est évidemment concerné.
Le rapport détaille également les mesures de lutte adoptées en 2006 et reconduites en 2007, les dérogations aux interdictions de mouvements entre zone réglementée et zone indemne, mises en oeuvre pour éviter l'écroulement de l'activité commerciale, et les difficultés de l'application du récent accord communautaire qui devait notamment permettre de régler le problème de l'envoi des « broutards » français à l'engraissement dans la plaine du Pô, en Italie.
Faisant état des perspectives de mise sur le marché l'an prochain d'un vaccin adapté, le rapporteur pour avis a évoqué les interrogations qui demeurent quant à sa date de disponibilité, à la capacité de l'offre à satisfaire la demande, aux règles de son administration, ou encore au rôle éventuel de l'Union européenne.
Enfin, il a expliqué comment s'était organisée l'aide aux filières ovine et bovine, depuis la contribution de 6,6 millions d'euros apportée par la Fédération nationale des groupements de défense sanitaire du bétail dans le cadre de la solidarité professionnelle, jusqu'au plan de soutien de 13,5 millions d'euros annoncé par vous-même, monsieur le ministre, le 19 septembre dernier.
Daniel Soulage a cependant relevé que les crédits demandés pour 2008 au titre de la lutte contre la FCO dans le programme « Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation » sont totalement déconnectés des besoins probables : achat de 33,5 millions de doses de vaccin, frais de la campagne de vaccination, mesures de soutien économique et de lutte sanitaire en cas de reprise de l'épidémie, etc. Aussi m'a-t-il chargé de vous demander, monsieur le ministre, quand et comment ces crédits indispensables seront abondés. (M. le président de la commission des finances applaudit.)
M. le président. Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.
Je vous rappelle également qu'en application des décisions de la conférence des présidents aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite du débat, la parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la veille sanitaire et la gestion des crises, d'une part, la sécurité alimentaire, d'autre part, constituent les deux volets majeurs de la mission interministérielle « Sécurité sanitaire ».
Les moyens affectés en 2008 à la politique de sécurité alimentaire s'inscrivent globalement dans la continuité des priorités fixées les années précédentes, tandis que ceux qui sont affectés à la politique de veille sanitaire et de réaction aux urgences font un véritable bond, avec une augmentation de crédits de 60 % ; cette forte augmentation est due en grande partie, comme l'a dit le rapporteur spécial, à des reports de crédits non consommés : les fonds de concours rattachés au programme jusqu'en 2006.
Au cours de la dernière décennie, les productions animales ont été touchées par des crises sanitaires majeures, accentuées par l'augmentation des échanges à l'échelle de la planète, qui deviennent des facteurs prédominants de déstabilisation. Les épizooties d'influenza aviaire et de fièvre catarrhale ovine en sont des exemples plus que jamais d'actualité, malheureusement.
Il faut donc se réjouir, mes chers collègues, des efforts notables déjà accomplis et de l'importance des crédits réservés dans ce projet de loi de finances pour 2008, compte tenu du contexte de forte incertitude sur l'éventualité d'une crise.
Je voudrais, à cet égard, faire trois observations.
La première concerne la nécessaire adaptabilité de la mission « Sécurité sanitaire ». En effet, celle-ci est sujette à d'importantes fluctuations budgétaires en cours d'année, avec notamment des ouvertures de crédits en urgence pour faire face à l'apparition de nouvelles épidémies ou de risques de pandémies. L'exercice de prévision budgétaire pour cette mission s'avère donc périlleux. Il convient de distinguer la part du financement de la politique de sécurité sanitaire qui doit relever de la prévision de celle qui relève de l'ajustement en gestion.
Ma deuxième observation portera sur les missions et les périmètres d'intervention respectifs de l'État et des acteurs économiques. En effet, si la prise en charge sanitaire doit naturellement relever de l'État, en revanche, les coûts économiques induits pour les professionnels devront peut-être être assumés par des caisses de solidarité professionnelle.
Ma troisième observation concerne la nouvelle mission assignée à l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l'AFSSA, en liaison avec l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l'AFSSAPS, et les industriels du médicament : la réalisation d'un inventaire des niveaux de contamination, par un panel de molécules, des eaux destinées à la consommation humaine.
Nous le savons tous, la qualité des cours d'eau se détériore d'une manière extrêmement préoccupante. La lutte contre la pollution par les nitrates est donc un enjeu majeur pour la qualité des eaux de surface utilisées pour la production d'eau potable. Par ailleurs, une incertitude pèse sur les risques liés à la présence de résidus médicamenteux dans l'eau destinée à la consommation humaine. En outre, les pesticides sont potentiellement mutagènes et donc potentiellement cancérigènes.
Des études récentes dénoncent l'utilisation massive de pesticides fortement toxiques comme le chlordécone, polluant organique, extrêmement rémanent dans l'environnement. Ce pesticide a été classé comme cancérogène possible chez l'homme dès 1979, son autorisation de vente a été officiellement retirée en 1990, mais son utilisation s'est poursuivie jusqu'en 1993, alors qu'il a été interdit aux États-Unis dès 1976.
Cet exemple montre clairement qu'il faut intégrer la sécurité sanitaire dans une dimension environnementale beaucoup plus vaste. La prise de conscience par les pouvoirs publics de l'importance du risque lié aux pesticides est récente et les outils d'analyse utilisés jusqu'à une date proche présentaient un caractère rudimentaire.
C'est la raison pour laquelle les travaux de recherche et l'acquisition des connaissances sur les sources de contamination de l'eau doivent être encouragés. En ce sens, la mission d'animation d'une politique de recherche publique intégrée, confiée à l'AFSSA, en appui à l'évaluation des risques liés à l'eau destinée à la consommation humaine, est essentielle et doit être confortée.
Les réformes engagées demandent plus que jamais à être poursuivies et menées à terme pour, d'une part, assurer une meilleure réactivité face aux crises sanitaires et, d'autre part, renforcer la veille et le suivi, tout en maintenant une expertise de qualité dans un domaine qui suscite une attention croissante de la part des citoyens.
Le projet de loi de finances pour 2008, en préservant l'essentiel des crédits affectés à la politique de sécurité et de qualité sanitaires de l'alimentation et en dégageant d'importants moyens supplémentaires en faveur des objectifs prioritaires de veille sanitaire, répond mieux aujourd'hui aux attentes de nos concitoyens. C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, mes collègues du groupe de l'UMP et moi-même nous lui apporterons notre total soutien. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je circonscrirai mon propos à la sécurité sanitaire du médicament, en évoquant certains aspects du fonctionnement de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.
Je remercie M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales d'avoir souligné que le mode de financement actuel de l'Agence n'était pas satisfaisant, car il ne lui permettait pas d'être totalement indépendante de l'industrie pharmaceutique. Il reste en cela fidèle aux conclusions de la mission d'information qu'il présidait, ce dont je ne peux que me réjouir.
En effet, la subvention de l'État n'a cessé de décroître au fil des années et ne représente plus, en 2008, que 8 % du budget de l'Agence. Ce n'est même pas à la hauteur du coût des missions qu'elle doit mener à bien pour le compte de l'État.
Ce désengagement a pour conséquence un autofinancement de l'Agence, ce qui ne va pas sans risque. On peut en effet redouter que la recherche d'une augmentation des ressources par la multiplication des dossiers d'autorisations de mise sur le marché, les AMM, ne conduise l'AFSSAPS à en négliger les effets sur la santé des patients et ne nuise à la mise en oeuvre d'activités qui, quoique moins rentables, sont néanmoins nécessaires à la préservation de la sécurité sanitaire.
En ce qui concerne la transparence, je suis d'accord avec vous, monsieur Barbier, pour considérer que des progrès ont été accomplis. Il est vrai que l'AFSSAPS y était tenue par la loi puisque, enfin, la directive adoptée en 2003 par le Parlement européen a été transposée, en février dernier, dans le droit français.
Pourtant, si les publications des comptes rendus de la commission d'AMM sont à jour, ceux de la commission nationale de pharmacovigilance ne le sont pas. On n'en compte que trois pour 2007, dont le dernier remonte au 29 mai. Cette observation vaut aussi pour la commission chargée du contrôle de la publicité et de la diffusion de recommandations sur le bon usage des médicaments, qui se réunit en principe une fois par mois et pour laquelle seuls trois comptes rendus sont disponibles en ligne.
Ne vous en déplaise, monsieur Barbier, je ne suis pas du tout d'accord avec vous en ce qui concerne l'expertise. En effet, le contrôle des conflits d'intérêts des experts auxquels l'AFSSAPS fait appel n'est pas mieux assuré que par le passé. Certes, nous disposons cette année, annexé au rapport d'activité, d'un magnifique fascicule vert de 235 pages, presque luxueux, très bien présenté, dédié aux déclarations d'intérêts des membres des conseils, des commissions et des groupes de travail ayant siégé en 2006. Cependant, les données qu'il contient n'apportent pas de changement notable par rapport à la situation qu'a eu à connaître, en son temps, la mission sénatoriale que vous présidiez.
Pour un nombre d'experts référencés inchangés, à savoir 1 170, la part de ceux qui ont un lien d'intérêts est passée de 68 % à 73 %, tandis que la part de ceux qui sont en retard dans la mise à jour de leur déclaration est passée de 40 % à 35 % ; près de 10 % d'entre eux n'ont fait aucune déclaration. Et l'on peut regretter que les experts n'ayant aucun lien d'intérêts soient toujours aussi peu nombreux, soit 20 %.
Dès lors, il est permis de s'interroger sur l'attitude qu'a adoptée l'Agence face aux experts en infraction avec la loi sur les conflits d'intérêts, question à laquelle ne répond pas le directeur général de l'AFSSAPS dans son propos introductif au rapport.
Faut-il rappeler que, en cours de mandat, les déclarations doivent être actualisées, sur l'initiative des experts nommés, au moins une fois par an, et que l'Agence doit, en cas d'absence de dépôt de déclaration d'intérêts, suspendre provisoirement la participation aux travaux des commissions de l'expert défaillant ?
Il y a quelques raisons de craindre que l'AFSSAPS ne fasse pas respecter la loi et continue de s'adjoindre la collaboration d'experts qui n'ont pas actualisé leur déclaration d'intérêts ou, tout simplement, ne l'ont pas faite.
Ce laxisme ne peut pas ne pas avoir de conséquence sur le travail et les avis des commissions. Il ne peut que nourrir les suspicions qui pèsent sur l'indépendance de l'expertise à l'égard de l'industrie pharmaceutique et sur la rigueur scientifique des décisions prises par l'AFSSAPS.
La sécurité sanitaire en matière de médicaments n'est pas optimale, loin s'en faut. On estime en effet que 134 000 personnes sont hospitalisées chaque année à la suite d'un accident lié à la prise de médicaments. En 2003, le professeur Lucien Abenhaïm, ancien directeur général de la santé, écrivait ceci dans son livre Canicule : « Chaque année, en France, 18 000 personnes environ meurent de l'effet secondaire d'un médicament. » C'est considérable ! Un tel fléau mériterait, au même titre que d'autres, la mise en oeuvre d'un plan d'action, d'autant que 40 % à 60 % de ces accidents pourraient être évités.
Il est instructif, à cet égard, de consulter le bilan d'activité national de l'AFSSAPS depuis 1999, présenté dans son rapport d'activité pour 2006. On y constate que le nombre de médicaments retirés chaque année du marché non seulement est très faible, mais encore qu'il a tendance à décroître depuis 1999, alors que le nombre de notifications d'effets indésirables lors de la prise de médicaments ne fait qu'augmenter.
Ainsi, depuis 2002, le nombre de retraits est resté stable, en dépit d'une augmentation importante des notifications. Cela tend à démontrer que les mesures prises par l'AFSSAPS, qui découlent de ces notifications, sont inadaptées. Elles sont souvent timides et tardives. Il en va ainsi du retrait de spécialités à base de fluor, quatorze ans après les premiers signaux d'alerte. Il en va ainsi du retrait du Desuric, un médicament contre la goutte, huit ans après le signalement d'hépatites parfois mortelles.
Je pourrais multiplier les exemples ! Est-il compatible avec le principe de précaution que le Celebrex, médicament de la famille du Vioxx, dont on se souvient dans quelles conditions il fut retiré de la vente, soit encore commercialisé ? Est-il normal que de nombreux médicaments interdits pour des raisons sanitaires dans de nombreux pays européens ne le soient pas en France ?
La commission d'AMM de l'AFSSAPS prend très rarement l'initiative d'un retrait. Elle défend systématiquement le principe d'un meilleur encadrement de la prescription du médicament incriminé au lieu d'un retrait, alors que l'on sait que cette prescription est fortement influencée par les visiteurs médicaux et les revues financées par l'industrie pharmaceutique, dont la fonction est non pas de dispenser une information neutre et objective sur le médicament, mais d'en assurer la promotion. Et vous savez que, pour ce faire, l'industrie mobilise des crédits considérables : 3 milliards d'euros par an !