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DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur les contrats d'objectifs et de moyens visant au développement de l'apprentissage, en application de l'article 34 de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Il sera transmis à la commission des affaires sociales et sera disponible au bureau de la distribution.
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Loi de finances pour 2007
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale.
Travail et emploi (suite)
M. le président. Dans la discussion des articles rattachés pour leur examen à la mission « Travail et emploi », nous en sommes parvenus à l'article 60 bis.
Article 60 bis
L'article L. 951-10-1 du code du travail est ainsi modifié :
1° Sous réserve des 2° et 5°, dans l'ensemble de l'article :
a) Le mot : « taxe » est remplacé par le mot : « cotisation » ;
b) Les mots : « comité central de coordination » sont remplacés par les mots : « comité de concertation et de coordination » ;
2° Le I est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Une cotisation créée par accord entre les organisations représentatives au niveau national des employeurs et des salariés du bâtiment et des travaux publics est versée au profit du comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics. Cette cotisation est due par les entreprises appartenant aux professions du bâtiment et des travaux publics entrant dans le champ d'application des articles L. 223-16 et L. 223-17 ainsi que du titre III du livre VII. » ;
b) Sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :
« 3° Au financement d'actions particulières visant d'une part, la préformation et l'insertion professionnelle des publics de moins de vingt-six ans, d'autre part, l'animation et l'accompagnement connexes à la formation des apprentis ;
« 4° Aux frais de fonctionnement du comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics dans la limite du taux du montant total de la collecte de cette cotisation fixé par arrêté du ministre en charge de la formation professionnelle, au regard de la mission particulière d'intérêt général du comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics ;
« 5° À la prise en charge des dépenses exposées pour la gestion paritaire de cette cotisation par les organisations, siégeant au comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics, dans la limite d'un pourcentage du montant des sommes collectées au titre de la cotisation.
« Un compte rendu annuel d'activités et des sommes consacrées à la prise en charge des dépenses mentionnées au 5° est adressé au commissaire du Gouvernement et au contrôleur général économique et financier de l'État placés auprès du comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics. » ;
3° Dans le II, les mots : « salaires évalués selon les règles » sont remplacés par les mots : « rémunérations versées pendant l'année en cours entendues au sens des règles » ;
4°Le 1° du III est ainsi modifié :
a) Dans le a, le taux : « 0,16 % » est remplacé par le taux : « 0,30 % » ;
b) Dans le b, le taux : « 0,08 % » est remplacé par le taux : « 0,22 % » ;
5° Le premier alinéa du IV est ainsi modifié :
a) À la fin de la deuxième phrase, le mot : « imposé » est remplacé par le mot : « assujetti » ;
b) La dernière phrase est ainsi rédigée :
« Pour l'année en cours, le montant de chaque acompte est égal au quart de la cotisation évaluée sur la base des rémunérations de l'année précédente calculée selon les modalités prévues au II. » ;
6° Après le mot : « contentieuse », la fin du deuxième et le dernier alinéas du VI sont ainsi rédigés : « relative au recouvrement de la cotisation affectée au bénéfice du comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics à l'encontre des entreprises redevables et défaillantes.
« À défaut, le recouvrement de cette cotisation est effectué selon les règles ainsi que sous les sûretés, garanties et sanctions applicables, telles qu'elles sont prévues par l'article L. 137-4 du code de la sécurité sociale pour la taxe visée à l'article L. 137-1 du même code » ;
7° Le VII est ainsi modifié :
a) Au début, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Le comité de concertation et de coordination de l'apprentissage, du bâtiment et des travaux publics est constitué sous la forme d'une association régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association. Il est géré paritairement par les organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives au plan national du bâtiment et des travaux publics.
« Les statuts du comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics sont élaborés par les organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives au plan national du bâtiment et des travaux publics.
« Les frais de gestion correspondant aux missions de ce comité ainsi que les dépenses liées à la gestion du paritarisme au sein de l'organisme, sont respectivement fixés par arrêté conjoint des ministres chargé de la formation professionnelle et de l'éducation nationale, dans la limite d'un plafond déterminé en pourcentage de la collecte annuelle encaissée par l'association. » ;
b) Dans l'avant-dernier alinéa, les mots : « d'État » sont remplacés par deux fois par les mots : « général économique et financier de l'État » ;
c) Sont ajoutés six alinéas ainsi rédigés :
« Les dispositions du I entrent en vigueur le 1er janvier 2006.
« L'arrêté du 15 juin 1949 sur le comité central de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics, du secrétaire d'État à l'enseignement technique, à la jeunesse et aux sports, est abrogé à compter du jour de la publication au Journal officiel de la déclaration de l'association constituée conformément aux dispositions des deux premiers alinéas du présent VII.
« La constitution du comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics en association n'emporte ni création de personne morale nouvelle, ni cessation de son activité, ni conséquence sur le régime juridique auquel sont soumis les personnels.
« Les biens, droits, obligations et contrats de l'association dénommée ? comité de concertation et de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics ? sont ceux du comité central de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics à la date de publication au Journal officiel de la déclaration de ladite association.
« Cette constitution en association ne permet aucune remise en cause de ces biens, droits, obligations et contrats et n'a, en particulier, aucune incidence sur les contrats conclus avec des tiers par le comité central de coordination de l'apprentissage du bâtiment et des travaux publics.
« Les opérations entraînées par cette constitution en association ne donnent pas lieu à la perception de droits, impôts ou taxes de quelque nature que ce soit. »
M. le président. Je mets aux voix l'article 60 bis.
(L'article 60 bis est adopté.)
Article 61
Il est institué en 2007, au bénéfice de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes mentionnée à l'article L. 311-1 du code du travail, un prélèvement exceptionnel de 175 millions d'euros sur le fonds national mentionné à l'article L. 961-13 du même code. Le recouvrement, le contentieux, les garanties et les sanctions relatifs à ce prélèvement sont régis par les règles applicables en matière de taxe sur les salaires.
M. le président. L'amendement n° II-98, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. L'article 61 du projet de loi de finances prévoyait initialement de compléter la subvention de l'État à l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l'AFPA, au moyen de ressources extrabudgétaires, dont une fraction de la taxe d'apprentissage due par les entreprises de plus de 250 salariés qui emploient un nombre de jeunes en contrat d'apprentissage ou de professionnalisation inférieur au seuil fixé.
Ce choix gouvernemental, loin de faire l'unanimité chez les députés, qui ont considéré, à juste titre d'ailleurs, qu'il s'agissait là d'un détournement des recettes de l'apprentissage, a été âprement discuté. Le Gouvernement a donc fait adopter par l'Assemblée nationale un amendement tendant à réécrire cet article. Ainsi, un prélèvement exceptionnel de 175 millions d'euros sera opéré sur le Fonds unique de péréquation, lequel gère les excédents financiers dont peuvent disposer les organismes collecteurs des fonds de la formation professionnelle.
Si, par cette nouvelle rédaction, le financement de l'apprentissage n'est plus confondu avec celui de la formation professionnelle pour les adultes, la question du financement de l'AFPA n'est en rien réglée au fond et de manière pérenne. Or, je rappelle tout de même que celle-ci concourt au service public de l'emploi et doit, à ce titre, être soutenue à hauteur par le budget de l'État.
D'une manière générale, nous ne pouvons accepter le fait que ce gouvernement bâtisse un budget avec une partie de ressources extrabudgétaires, dont, de surcroît, on ne connaît pas le montant exact.
Au sujet notamment du transfert au Fonds de solidarité d'une partie de la créance de l'État sur l'UNEDIC, le rapporteur spécial pour la mission « Travail et emploi » de l'Assemblée nationale s'est plaint de cet appel à des ressources extrabudgétaires faisant « ombre au tableau ». Cette remarque vaut également pour le mode de financement choisi pour l'AFPA.
Notre rapporteur spécial s'est également inquiété de la provenance des 175 millions d'euros affectés pour 2007 à l'AFPA et de la disponibilité des 25 millions d'euros manquants, dans la mesure où le projet de performance prévoyait de lui attribuer des ressources extrabudgétaires à hauteur de 200 millions d'euros.
Madame la ministre déléguée, il faut considérer cet amendement de suppression comme étant la manifestation d'un fort mécontentement à l'égard de l'État qui, en se désengageant de la formation professionnelle des adultes, élément clé pour lutter contre le chômage, met l'AFPA en grande difficulté.
Certes, il n'est pas question, pour nous, de priver, cette année, l'AFPA de ces 175 millions d'euros, mais nous voulons que vous nous éclairiez sur les raisons qui ont fondé vos arbitrages en faveur de ressources extrabudgétaires, sur les solutions que vous avez retenues pour obtenir le complément de budget dont l'AFPA a besoin et, comme le souhaite notre rapporteur spécial, sur vos intentions pour les années à venir.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Serge Dassault, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Cet amendement tend à supprimer une ressource de 175 millions d'euros destinée à l'AFPA en provenance du Fonds unique de péréquation, le FUP.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Je ne suis pas surpris des avis émis par la commission et par le Gouvernement. Toutefois, les explications sont un peu courtes !
Ce matin, plusieurs orateurs, y compris au sein de la majorité, sont intervenus pour savoir quelles décisions le Gouvernement compte prendre pour rendre pérennes les financements de l'AFPA. Madame la ministre déléguée, la moindre des choses aurait été que vous leur répondiez ! Reprenez-vous et donnez-nous des explications !
M. le président. Je mets aux voix l'article 61.
(L'article 61 est adopté.)
Article additionnel après l'article 61
M. le président. L'amendement n° II-38, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l'article 61, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remettra au Parlement, avant le 1er octobre 2007, un rapport sur les perspectives de réforme du service public de l'emploi, détaillant notamment les modalités d'une fusion de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC), de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) et du Fonds de solidarité.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Serge Dassault, rapporteur spécial. Il s'agit d'un problème très important.
Au fil des années, les interventions sur le marché du travail sont devenues complexes et de moins en moins lisibles tant pour les demandeurs d'emploi que pour les entreprises. À la complexité des mesures, des programmes et des dispositifs s'ajoute la diversité des intervenants : l'ANPE, l'UNEDIC, l'AFPA, sans oublier le Fonds de solidarité.
En janvier 2004, le rapport Marimbert relevait que le système d'intervention français sur le marché du travail était devenu, au cours des années, « de moins en moins lisible » et « le plus éclaté d'Europe ».
Cependant, selon ce rapport, deux obstacles s'opposaient à une fusion de l'UNEDIC et de l'ANPE : tout d'abord, l'attachement fort des personnels à l'identité de chaque organisme, ce qui pouvait se comprendre, mais ne constituait pas forcément un obstacle ; ensuite, la disparité des statuts sociaux, avec un surcoût annuel de 200 millions d'euros attendu de l'alignement du régime des agents de l'ANPE sur celui des agents de l'UNEDIC.
Le plan de cohésion sociale s'est ainsi contenté de procéder à un rapprochement, certes méritoire, de l'UNEDIC et de l'ANPE, notamment au travers des maisons de l'emploi, mais sans grande efficacité semble-t-il.
Le rythme de mise en place des maisons de l'emploi est lent. En effet, seules cinquante-huit d'entre elles sont ouvertes à ce jour sur trois cents programmées.
En outre, il est compliqué d'apprécier la performance du service public de l'emploi à cause de l'éclatement de ces deux organismes : l'ANPE est un opérateur de la mission « Travail », mais pas l'UNEDIC.
Enfin, les expérimentations d'accompagnement des demandeurs d'emploi menées par l'UNEDIC sont très utiles pour stimuler l'action de l'ANPE, et ne font que renforcer la pertinence du propos.
Nous sommes à la veille d'une nouvelle législature, et les réformes importantes qu'il est parfois difficile d'engager sont susceptibles d'être mieux accueillies. Il faut aujourd'hui relancer la perspective d'une réforme plus profonde du service public de l'emploi, qui doit être unifié.
De plus, les avancées en cours n'en seraient pas moins valorisées, qu'il s'agisse des maisons de l'emploi et, dans le cadre de la convention tripartite signée en mai 2006 entre l'État, l'UNEDIC et l'ANPE, de la mise en place d'une architecture commune des systèmes d'information de l'UNEDIC et de l'ANPE, dans la perspective du dossier unique du demandeur d'emploi.
L'objectif fondamental de l'ANPE et de l'UNEDIC est d'aider les chômeurs à trouver des emplois. Même si l'UNEDIC est plus efficace en la matière, ces deux organismes proposent les mêmes services. Les demandeurs d'emploi vont donc d'un guichet à l'autre, ne sachant plus finalement vers qui se tourner.
Il semblerait donc que le guichet unique, souhaité par M. Borloo, soit plus efficace pour trouver plus rapidement un emploi. Cela passe par une fusion entre l'UNEDIC et de l'ANPE, à condition que ce soit l'UNEDIC qui absorbe l'ANPE, l'ANPE étant un service public tandis que l'UNEDIC est une association.
Le rapport que nous demandons au Gouvernement nous permettrait d'examiner dans le détail cette fusion qui nous semble une solution efficace pour accroître l'efficacité de la recherche de l'emploi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Nous savons tous que la fusion de l'UNEDIC et de l'ANPE est un thème récurrent qui, comme vous venez de le rappeler, monsieur le rapporteur spécial, a fait l'objet de plusieurs rapports. Ce sont d'ailleurs ces rapports qui ont permis, dans la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, de définir le service public de l'emploi intégrant, dans le premier cercle, les services du ministère de l'emploi, l'ANPE, l'AFPA, l'UNEDIC et les ASSEDIC.
La loi a prévu la signature d'une convention tripartite pluriannuelle entre l'État, l'ANPE et l'UNEDIC, à laquelle est associée l'AFPA, dans l'objectif de renforcer l'action de l'État.
Cette convention a été élaborée au cours de l'année 2005 avec la participation de l'ensemble des acteurs. Elle a été soumise aux instances de l'UNEDIC, de l'ANPE et de l'AFPA au premier trimestre de 2006 et a été signée en présence des deux ministres et des directeurs généraux, le 5 mai dernier.
La rationalisation complète des systèmes d'information constitue l'un des enjeux cruciaux de cette convention, mais le chantier informatique est vraiment considérable. La convergence doit être achevée au plus tard en juillet 2008. Pendant cette période transitoire, une structure informatique unique aura été mise en place sous la forme d'un groupement d'intérêt économique, GIE.
La mise en oeuvre des dispositions de la convention fait l'objet d'un suivi par un comité tripartite. Les trois parties - ANPE, UNEDIC et État - y travaillent de concert.
Monsieur le rapporteur spécial, autant je comprends qu'il est important que la représentation nationale soit régulièrement informée de l'évolution de ces travaux, autant il me semble qu'un rapport sur les perspectives de réforme du service public de l'emploi n'est pas un document suffisamment précis. En conséquence, je vous propose plutôt de dresser, chaque année, un bilan sur les actions qui auront été réalisées. Pour l'exercice 2007, nous pourrions, par exemple, commencer par traiter la mise en place du dossier unique du demandeur d'emploi, qui passe par un système informatique commun.
En d'autres termes, j'aurais tendance à vous proposer de retirer votre amendement. Peut-être faudrait-il le sous-amender, mais je suis plutôt favorable à un suivi des travaux, car notre démarche est vraiment celle d'un rapprochement entre les organismes.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la ministre déléguée, j'ai bien entendu les précisions que vous nous avez apportées, mais je souhaite vous faire part d'une expérience personnelle.
Ayant eu à participer à la mise en place d'une maison de l'emploi dans mon département, la Mayenne, j'ai pu mesurer l'ampleur de l'inertie qui règne aussi bien du côté de l'ANPE que de celui de l'UNEDIC. Il y a donc un moment où le politique doit manifester son exaspération et sa volonté.
Le présent amendement avait surtout pour objet de souligner à quel point nous sommes impatients de sortir de ces tergiversations, de ces atermoiements insupportables. Nous avons l'obligation de gérer efficacement le service public de l'emploi.
Or, il est clair que la multiplication des guichets et des fichiers est source d'inertie, parfois de perte de substance ; elle favorise l'apparition de brèches, qui peuvent être utilisées pour des fraudes.
Nous voudrions donc que la volonté politique s'exprime avec force et engage le mouvement. Nous avons le sentiment qu'il a déjà fallu longtemps pour qu'une volonté s'exprime.
Je parle sous le contrôle de M. Dassault, mais je pense que nous pourrions retirer notre amendement après vous avoir entendue, madame la ministre déléguée. Reste que nous ne voulons plus être en situation d'attendre, année après année, des rapports pour savoir si oui ou non on va agir. Ce que nous voulons, c'est que l'on agisse maintenant !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Je voudrais bien sûr remercier M. le président de la commission des finances et lui dire que la proposition que je fais va exactement dans le sens de ce qu'il souhaite.
Plutôt que d'en rester aux déclarations d'intention, nous voulons pouvoir mesurer, année après année, le degré d'avancement et les éléments de progrès qui sont intervenus. Il s'agit bien de faire ce que vous suggérez, monsieur le président de la commission des finances : juger de l'efficacité et de l'effectivité de la mobilisation.
M. le président. Monsieur le président de la commission des finances, l'amendement n° II-38 est-il maintenu ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° II-38 est retiré.
Article 61 bis
I. - Après le mot : « sociétaires », la fin de la première phrase du premier alinéa de l'article L. 129-8 du code du travail est ainsi rédigée : «, assurés ou clients, ainsi que du chef d'entreprise dès lors que ce titre peut bénéficier également à l'ensemble des salariés de l'entreprise selon les mêmes règles d'attribution. »
II. - Les dispositions du I sont applicables aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2007.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° II-99 est présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° II-127 est présenté par Mmes Le Texier, Demontès et Jarraud-Vergnolle, M. Godefroy, Mmes Printz, Schillinger et San Vicente-Baudrin, MM. Madec, Michel, Domeizel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° II-99.
M. Roland Muzeau. À l'occasion de cet amendement de suppression, nous souhaitons rappeler que cette disposition, introduite par un amendement présenté par la commission des finances de l'Assemblée nationale, prévoit d'autoriser les entreprises à préfinancer, au bénéfice de leurs clients et assurés, mais aussi du chef d'entreprise, des chèques emploi-service universels, des CESU. Comme le note le rapporteur de la commission des affaires sociales, cette disposition change profondément la logique du CESU.
Nous considérons pour notre part qu'elle contribue dangereusement à « marchandiser » le dispositif du CESU. Il faut savoir que, désormais, des heures de travail pourront être « offertes » dans un cadre promotionnel. Pour un gouvernement qui prétend revaloriser la « valeur travail », c'est vraiment un comble !
Nous n'acceptons pas cette atteinte à la dignité des salariés travaillant au titre du chèque emploi-service universel, lesquels comptent déjà, par ailleurs, parmi les plus précaires qui soient.
Tel est le sens de notre amendement de suppression.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour présenter l'amendement n° II-127.
Mme Raymonde Le Texier. Mes chers collègues, je dois avouer que la lecture de cet article nous a laissés dans un premier temps quelque peu perplexes et, après analyse, scandalisés.
Nous nous demandions en effet comment il était possible de préfinancer des chèques emploi-service universels pour des clients d'entreprise. Pour les salariés, le système était connu depuis le chèque-restaurant et le chèque-vacances, mais, pour les clients, cela paraissait plus difficile.
Notre rapporteur nous a une nouvelle fois éclairés, en nous expliquant que cette disposition correspond en fait à une demande de la grande distribution.
M. Roland Muzeau. C'est vrai !
Mme Raymonde Le Texier. Ce secteur souhaite pouvoir distribuer des CESU à titre promotionnel à ses clients.
On pourra donc dorénavant, en achetant sa lessive ou ses fromages, participer à des offres promotionnelles, peut-être par concours, et gagner des heures de travail.
M. Roland Muzeau. Très bien !
Mme Raymonde Le Texier. Jusqu'à présent, on connaissait le système des promotions sur les produits, par exemple « deux pour le prix d'un », ou encore le système des points sur des cartes de fidélité, qui donnent droit à des bons d'achat ou à des cadeaux.
Avec cet article 61 bis, nous franchissons une nouvelle étape. Les enseignes de grande distribution, qui veulent prendre pied sur le marché des services à la personne, vont profiter de leurs surfaces commerciales pour s'attacher doublement les clients, les « ligoter », comme ont dit en marketing.
Peut-être en effet, compte tenu du faible coût des heures accomplies par les salariés en CESU et des avantages afférents pour l'entreprise sous forme d'exonérations, devient-il plus avantageux d'offrir des heures de travail que des ballons de football ou des verres à pied.
D'ailleurs, dans ce monde du libéralisme triomphant, le travail est une marchandise ; il est donc normal qu'il soit traité comme telle, et rien de plus.
Mais où sont donc vos discours sur la « valeur » du travail, sur la « dignité » du travail ? Ou bien peut-être ne s'agit-il que de la dignité du travail, et non de celle du travailleur ? Si le travail est une marchandise, le travailleur en est-il une lui aussi ?
Le préfinancement par l'employeur à destination de ses salariés par l'intermédiaire du comité d'entreprise est une mesure positive, même s'il reste le risque que ce dispositif ne se substitue au salaire. En revanche, cette idée de CESU promotionnel est purement et simplement commerciale. Le CESU, dès lors, n'a plus aucune dimension sociale.
Quel sera exactement le statut des personnes qui seront ainsi - comment le dire autrement - louées, vendues aux clients du supermarché ? Y aura-t-il des structures filiales de ces enseignes où les heureux bénéficiaires seront sûrs de pouvoir se « procurer » ces personnes ?
Une telle dérive nous inquiète très sérieusement et très profondément. En conséquence, nous demandons solennellement le retrait d'une disposition que nous considérons dangereuse et moralement scandaleuse.
M. Roland Muzeau. Très bien !
M. le président. L'amendement n° II-37, présenté par M. Dassault, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Dans le I de cet article, remplacer les mots :
assurés ou clients
par les mots :
adhérents ou assurés.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Serge Dassault, rapporteur spécial. L'Assemblée nationale a adopté un article tendant à compléter la liste des bénéficiaires du CESU préfinancé en y incluant les « assurés », les « clients » ainsi que les chefs d'entreprise.
La commission des finances est favorable à l'amélioration d'une mesure s'inscrivant dans un plan structuré destiné à un secteur à fort potentiel de créations d'emploi, mais elle émet des réserves quant à une « marchandisation » excessive du dispositif CESU.
Serait-il opportun que les enseignes de la grande distribution attribuent des CESU dans le cadre d'« opérations de promotion » ? L'État doit-il mettre en place un tel produit commercial ?
Une telle évolution, au terme d'une réflexion approfondie, pourrait se révéler intéressante, mais elle mérite une expertise que ne nous a pas permise un article additionnel introduit dans le cadre d'un texte promis à une seule navette. D'où le présent amendement, qui exclut les « clients » des nouveaux bénéficiaires du CESU.
L'amendement corrige, en outre, une erreur, les adhérents ayant été malencontreusement supprimés de la liste initiale des bénéficiaires.
En réalité, je ne suis pas si opposé que cela à cette disposition introduite par voie d'amendement, car elle vise à favoriser les clients, ce qui est important. Il s'agit d'une offre de fidélisation de la clientèle et d'une formule qui encourage l'accès des ménages modestes au CESU.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les deux amendements identiques de suppression ?
M. Serge Dassault, rapporteur spécial. Avis défavorable !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Je suis également défavorable aux deux amendements identiques de suppression et je tiens à expliquer les raisons pour lesquelles je souhaiterais que M. le rapporteur spécial retire son amendement.
Je pense qu'il faut revenir au principe qui a guidé le développement des services à la personne. Ce que le Gouvernement a voulu faire en développant ces services, c'est donner une organisation à un secteur qui, jusqu'à présent, n'en avait pas.
Nous savons tous qu'il s'agit d'un des secteurs dans lesquels - pour parler clair - le travail « au noir » est le plus important. Par ailleurs, les salariés de ce secteur ont des marges d'évolution extrêmement limitées. C'est pour cela que nous avons voulu mettre en place des sociétés de services permettant aux salariés d'être mieux encadrés et de se voir proposer des perspectives d'évolution professionnelles intéressantes.
En outre, nous savons tous que les services à la personne trouvent leur limite dans la solvabilité des clients. En effet, un certain nombre de particuliers ne demanderaient pas mieux que d'y avoir recours, sauf que le coût de ces services en limite évidemment l'usage.
Finalement, avec cette disposition introduite par l'Assemblée nationale sur l'initiative de M. Alain Joyandet, il ne s'agit de rien d'autre que d'étendre un dispositif favorable au développement des services à la personne.
En d'autres termes, quand vous achetez par exemple un ordinateur, l'idée est que le magasin où vous l'avez acheté vous offre deux heures de formation pour vous apprendre à vous en servir. Or, on sait bien que, pour un certain nombre de nos concitoyens, se servir d'un ordinateur ne va pas de soi. Grâce à cette disposition, vous avez donc en quelque sorte deux heures d'ores et déjà payées pour l'intervention d'une société de services.
Cela signifie que la personne qui fournira la prestation appartiendra dans l'immense majorité des cas à une société de services proposant - je poursuis mon exemple - d'expliquer aux personnes la façon d'utiliser un ordinateur. Pour l'utilisateur, ce sont deux heures qui ne lui coûtent rien, mais il peut toujours continuer de recourir à ce type de service, en payant cette fois, s'il estime que la formation initiale n'est pas suffisante.
Il s'agit donc d'offrir aux enseignes commerciales un nouveau moyen de fidéliser leur clientèle tout en solvabilisant le service à la personne, d'encadrer plus encore l'organisation de ces services à la personne et de les faire connaître d'un nouveau public.
Voilà l'esprit de la mesure. Aussi, monsieur le rapporteur spécial, je pense que, sur le fond, nous devrions pouvoir nous rejoindre et, par conséquent, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame la ministre déléguée, le CESU est comme ce couteau qui peut aussi bien être l'arme du crime que l'ustensile de cuisine indispensable pour la confection de la soupe familiale !
Dans le cas de la disposition que nous discutons, je vous avoue que la commission des finances a été très hésitante.
Il pourrait en effet s'agir d'une énième trouvaille pour permettre à la grande distribution de pratiquer des remises et de tenter de susciter l'adhésion du consommateur tout en se donnant bonne conscience. Et comment la grande distribution susciterait-elle ici de l'emploi de proximité, alors que, dans le même temps, elle exerce de telles pressions sur tous ses fournisseurs qu'ils s'en vont produire ailleurs à moindre coût, propageant ainsi le chômage ?
Le modèle français, madame la ministre déléguée, c'est bien souvent : « moins cher pour moins d'emploi ». Nous devons donc considérer cette extension avec ce qu'il faut de gravité.
Je ne vous cache pas que nous sommes un peu perplexes, car, si la grande distribution souhaite qu'il y ait un service après-vente, pourquoi ne gère-t-elle pas les relations contractuelles avec des prestataires qui prendraient en charge, par exemple, le démarrage de l'ordinateur et l'initiation de son nouveau propriétaire ?
Jusqu'où ira-t-on ? En distribuant ces CESU, les enseignes pourront dire à leurs clients : si vous achetez des vêtements, nous vous donnerons des CESU pour les faire repasser, et pourquoi pas aussi pour les faire laver ?
M. Roger Karoutchi. Oh !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. On risque de trouver là, en jouant sur les barèmes pratiqués, des arguments pour une concurrence dont la conséquence pourrait être directement la « balkanisation » de la production. Plus on fait de l'outsourcing - comme on dit en Chine ou ailleurs -, plus on a des marges pour distribuer des CESU et des unités de valeur de prestation de travail de proximité.
Mme Raymonde Le Texier. Oui, c'est tout à fait exact !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J'aurais donc souhaité malgré tout que le Sénat se prononce sur cette innovation, parce que je crois qu'elle est lourde de conséquences, ce qui explique la perplexité de la commission des finances.
Ne perdons pas de vue que c'est à la demande de la grande distribution, semble-t-il, que cet amendement a été introduit, ce qui doit nous rendre d'autant plus vigilants.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Monsieur le président de la commission des finances, je comprends vos réserves et vos observations quant à la nécessité d'un encadrement. C'est d'ailleurs sur le fondement de préoccupations identiques aux vôtres qu'avec Jean-Louis Borloo nous avons abordé le dossier des services à la personne, secteur qui, nous le savons tous, était fort peu organisé jusqu'à présent et offrait peu de chances de développement à ceux qui y travaillaient.
Il est bon qu'aujourd'hui cet outil nous donne la possibilité de développer en France des emplois de proximité qui ouvrent, notamment dans le secteur du vêtement auquel vous faisiez allusion, mais aussi dans celui des emplois familiaux, des débouchés qui permettront à certains de nos concitoyens de revenir vers l'emploi.
Dès lors qu'il y a un encadrement, et c'est le cas pour les services à la personne, la démarche reste intéressante, et c'est la raison pour laquelle le Gouvernement a accepté l'idée d'étendre le dispositif.
Mme Raymonde Le Texier. Je rêve !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-99 et II-127.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 66 :
Nombre de votants | 321 |
Nombre de suffrages exprimés | 321 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 161 |
Pour l'adoption | 127 |
Contre | 194 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° II-37.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 61 bis, modifié.
(L'article 61 bis est adopté.)
Article 61 ter
I. - Dans le premier alinéa de l'article L. 129-13 du code du travail, après les mots : « de celle-ci », sont insérés les mots : « ainsi que l'aide financière de la personne morale de droit public destinée à financer les chèques emploi service universels au bénéfice de ses agents et salariés et des ayants droit ».
II. - Les dispositions du I sont applicables aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2007.
M. le président. L'amendement n° II-100, présenté par MM. Muzeau, Fischer et Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Serge Dassault, rapporteur spécial. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Travail et emploi ».
Ville et logement
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Ville et logement » (et articles 62 et 62 bis).
La parole est à M. Philippe Dallier, rapporteur spécial.
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, la mission « Ville et logement », dont Roger Karoutchi et moi-même allons vous présenter les crédits, comprend quatre programmes.
Deux de ces programmes sont plus spécifiquement consacrés à la politique de la ville : « Rénovation urbaine » et « Équité sociale et territoriale et soutien ».
Les deux autres sont consacrés au logement : « Aide à l'accès au logement » et « Développement et amélioration de l'offre de logement ».
Pour 2007, la mission représente au total 11 milliards d'euros de dépenses fiscales, chiffre stable par rapport à l'an dernier ; les crédits budgétaires se montent à 7,3 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 7,2 milliards d'euros en crédits de paiement.
Il n'y a cependant pas de conclusion particulière à tirer de cette stabilité puisqu'elle résulte en grande partie de la fiscalisation du financement du prêt à taux zéro.
Voilà pour le cadre général de cette mission, étant rappelé, mes chers collègues, que les principales modifications par rapport à 2006 que vous constaterez résultent d'abord, et c'est bien normal, de la mise en oeuvre des deux lois de programmation, d'une part, la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, d'autre part, la loi de programmation pour la cohésion sociale, mais aussi, depuis cette année, de la loi portant engagement national pour le logement, dite « loi ENL », et de la loi pour l'égalité des chances.
J'en viens maintenant à la présentation plus détaillée du volet « ville » de cette mission en commençant par le programme 202 « Rénovation urbaine », dont le responsable est la Délégation interministérielle à la ville.
Les crédits inscrits se montent cette année à 400 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 386 millions d'euros en crédits de paiement, auxquels il faut ajouter une dépense fiscale rattachée au programme. Il s'agit du taux de TVA réduit à 5,5 % pour les logements en accession à la propriété réalisés dans le cadre des projets de rénovation urbaine. Cette dépense fiscale est estimée à 300 millions d'euros pour 2007, contre 100 millions d'euros en 2006.
L'augmentation résulte principalement de la disposition adoptée dans la loi ENL visant à accorder le bénéfice de ce taux réduit de TVA non plus seulement aux constructions réalisées dans les périmètres des projets de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU, mais également à celles qui sont situées dans un périmètre de 500 mètres en partant du dernier îlot INSEE concerné par le projet ANRU.
Je me permets de rappeler les réserves que j'avais émises à ce sujet lors du vote de la loi et je souhaiterais, madame la ministre déléguée, que le Parlement puisse disposer d'un bilan d'application de cette mesure faisant la part des choses entre les programmes directement situés dans les périmètres des projets ANRU et les autres, afin que nous puissions en mesurer la portée exacte.
En matière de crédits budgétaires, le programme « Rénovation urbaine » se décompose en deux actions : la première, intitulée « Programme national de rénovation urbaine », avec 356 millions d'euros en 2007 contre 133 millions d'euros en 2006 ; la seconde, intitulée « Grands projets de ville - opérations de renouvellement urbain », ou GPV et ORU, avec 30 millions d'euros en 2007 contre 100 millions d'euros en 2006.
Ces chiffres traduisent deux réalités : tout d'abord, la nécessité d'amener à l'ANRU les crédits nécessaires à la montée en puissance des projets, attendue pour la fin du premier semestre 2007 ; ensuite, la fin de vie des GPV et des ORU, dont c'est la dernière année d'existence.
Concernant l'ANRU, puisque nous sommes en fin de législature, je souhaiterais faire le point sur l'avancement de ses travaux et sur ses engagements financiers.
À la mi-octobre, 289 projets ont été étudiés en réunion de travail partenarial, dont 218 sont passés en comité d'engagement, et 140 conventions ont d'ores et déjà été signées.
Cela représente, tous types de financements confondus : 31 milliards d'euros pour les projets étudiés en réunion de travail partenarial ; 25,4 milliards d'euros pour ceux d'entre eux qui sont passés en comité d'engagement ; 16,7 milliards d'euros pour les conventions signées.
Selon les chiffres de l'ANRU, en volume de travaux, près de la moitié des projets ont donc fait l'objet d'une signature de convention et appellent déjà, ou appelleront très rapidement maintenant, des besoins de financement, puisque le ministre Jean-Louis Borloo a pris l'engagement que des avances pouvant aller jusqu'à 15 % du montant total des projets pourraient être sollicitées par les maires des communes concernées.
Face à cette réalité bien concrète des projets signés ou en passe de l'être, quels sont les moyens dont dispose de l'ANRU ?
Je rappellerai tout d'abord que la loi de programmation votée en 2003 prévoyait que l'État inscrirait au moins 465 millions d'euros par an en autorisations d'engagement, ce qui, pour les années 2004 à 2007, représentait 1,86 milliard d'euros.
Sur cette même période, ce sont en fait 1,99 milliard d'euros de moyens d'engagement qui ont été accordés à l'ANRU, dont 1,58 milliard d'euros de ressources budgétaires et 410 millions d'euros de ressources extrabudgétaires.
S'agissant de ces dernières, je rappelle qu'il avait été convenu entre les organismes gestionnaires du 1 % logement et l'État que le reliquat du FRU - le Fonds de renouvellement urbain, créé en 2000 - pouvait être versé à l'ANRU et imputé sur la part de l'État. C'est ainsi que, sur deux exercices, 150 millions d'euros ont été versés à l'Agence en déduction de la quote-part de l'État.
Toujours dans le projet de loi de finances pour 2006, 60 millions d'euros supplémentaires d'origine extrabudgétaire étaient annoncés sans plus de détail. Peut-être pourriez-vous, madame la ministre déléguée, profiter de cette discussion pour nous confirmer que cette somme sera maintenue et pour nous en indiquer l'origine.
Pour 2007, 200 millions d'euros d'origine extrabudgétaire sont inscrits dans le projet de loi de finances : je crois savoir que les 100 millions d'euros inscrits au titre des SACI, les sociétés anonymes de crédit immobilier, ont déjà été versés à l'ANRU, mais nous n'avions pas de précisions pour les 100 millions d'euros supplémentaires jusqu'à ce que, lundi dernier, Jean-François Copé nous annonce, sans beaucoup plus de détails, qu'ils proviendraient de la Caisse des dépôts et consignations.
Après les autorisations d'engagement, venons-en aux sommes qui auraient dû effectivement être versées à l'ANRU sur les exercices 2004, 2005 et 2006.
Ces sommes se montaient à 836 millions d'euros, dont 626 millions d'euros de crédits de paiement inscrits dans les différentes lois de finances initiales, le reste étant de nature extrabudgétaire.
L'ensemble de ces chiffres, qui retracent l'exécution de la loi de programmation, sur quatre exercices si l'on inclut 2007, pour les autorisations d'engagement, et sur trois exercices, pour les crédits de paiement, appellent deux commentaires de ma part.
Tout d'abord, les autorisations d'engagement sont bien supérieures aux engagements minima prévus par la loi de programmation, avec 1,99 milliard d'euros contre 1,86 milliard d'euros.
En revanche, la contribution effective de l'État à l'ANRU, qu'elle soit d'origine budgétaire ou extrabudgétaire et qui se monte, à la date d'aujourd'hui, donc sur trois exercices, à 357 millions d'euros, n'est pas à la hauteur des inscriptions en loi de finances initiale.
Cependant, il est important de le souligner, ces reports de versement n'ont jusqu'à présent posé aucun problème de trésorerie à l'ANRU, puisque celle-ci a toujours été largement excédentaire.
Pour l'instant, je dirai donc que tout va bien, car l'État n'a pas vocation à assurer aux agences, quelles qu'elles soient, une trésorerie surabondante.
Cela dit, le rapport sur l'ANRU que Roger Karoutchi et moi-même avons présenté en juillet dernier montre clairement la montée en puissance des besoins de l'Agence à partir du deuxième semestre 2007.
Il est maintenant reconnu par tous que celle-ci devra faire face à un pic de trésorerie, plus connu sous le nom de « bosse de l'ANRU », qui impliquera, à partir de 2008 et pour trois ou quatre ans, un besoin de financement supérieur à 1 milliard d'euros chaque année.
C'est pourquoi nous avons appelé à une « sanctuarisation » des crédits de l'ANRU, afin de rassurer les acteurs de la politique de la ville, qui ont besoin de visibilité.
J'aurais donc souhaité que l'État inscrive dans le projet de loi de finance les 465 millions d'euros de crédits budgétaires, au lieu des 400 millions d'euros prévus en autorisations d'engagement.
C'est pour cette même raison que, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, MM. Karoutchi, André et moi-même avions pris, à titre personnel, l'initiative de déposer un amendement tendant à la reconstitution d'un fonds de renouvellement urbain logé à la Caisse des dépôts et consignations.
Au départ, ce fonds aurait pu bénéficier, comme en 2000, d'une partie de la plus-value exceptionnelle réalisée cette année par la Caisse et, par la suite, être abondé chaque année en « fléchant » une partie des missions d'intérêt général de la Caisse.
Cette suggestion n'a pas été suivie. Elle avait pourtant été reprise à l'unanimité dans l'excellent rapport de M. Pierre André, rédigé au nom de la mission d'information commune sur le bilan et les perspectives d'avenir des politiques conduites envers les quartiers en difficulté.
Nous en prenons acte mais, madame la ministre déléguée, peut-être pourriez-vous nous réaffirmer les engagements de l'État ?
Peut-être pourriez-vous également nous en dire davantage sur les négociations en cours avec la Caisse des dépôts et consignations, notamment sur le caractère conventionnel ou non de l'apport des 100 millions pour 2007.
Ce « fléchage » des missions d'intérêt général, s'il s'agit bien de « fléchage », est il appelé à être reconduit ? Sur quelle durée et à quelle hauteur le serait-il ?
Pour ce qui est des indicateurs de performance relatifs à ce programme, je vous rappelle simplement qu'ils sont au nombre de quatre. Pour plus de détails, mes chers collègues, je vous renvoie au rapport écrit.
J'en viens maintenant au programme 147, « Équité sociale et territoriale et soutien », dont la DIV est également le responsable.
Ce programme regroupe les crédits destinés au volet économique et social de la politique de la ville, qui seront dorénavant - c'est la principale nouveauté - principalement mis en oeuvre dans le cadre des contrats urbains de cohésion sociale, les CUCS, et représenteront 400 millions d'euros en 2007.
Les crédits du programme atteignent cette année 795 millions d'euros. Ils sont stables par rapport à 2006, mais il est important de souligner qu'ils pérennisent les 181 millions d'euros ajoutés en cours de discussion du projet de loi de finances initiale pour 2006, sur proposition du Premier ministre.
Les dépenses fiscales liées aux ZFU paraissent en diminution. Cela pourrait sembler curieux, puisque je vous rappelle que, dans le cadre de la loi pour l'égalité des chances, nous avons adopté le projet de création de quinze nouvelles zones franches urbaines et l'extension du périmètre de certaines zones déjà existantes.
Cette diminution tient simplement au fait que, en 2006, on a surestimé le coût de ces exonérations de plus de 60 millions d'euros, d'après les informations que l'on nous a communiquées. Cette diminution n'est donc pas une sous-estimation de la dépense comme nous aurions pu le craindre.
Je vous indique enfin, mes chers collègues, que le rapport au Parlement a été déposé en temps et en heure sur le bureau des assemblées, en application de l'article 27 de la loi pour l'égalité des chances.
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Je vous renvoie à la lecture de ce document : vous pourrez constater que le bilan des ZFU est très positif, tant en termes d'installation d'entreprises que de création nette d'emplois, notamment depuis la relance de ce dispositif en 2003.
Venons en maintenant au détail du programme. Il comprend trois actions.
L'action n° 1, « Prévention et développement social », regroupe à la fois les moyens de la prévention de la délinquance et ceux des programmes de développement social.
Les crédits comprennent les crédits d'intervention déconcentrés et le financement d'opérations spécifiquement identifiées : « Ville-vie-vacances », « Adultes-relais » et « Réussite éducative ».
En ce qui concerne cette dernière action, nous ne pouvons qu'être particulièrement satisfaits de l'augmentation des crédits destinés à l'opération « Réussite éducative », considérant la place essentielle de l'éducation dans l'amélioration de la situation des jeunes des quartiers en difficulté.
Cette augmentation traduit notamment l'intérêt porté au dispositif par les équipes enseignantes.
Au total, ce sont 370 projets de réussite éducative qui auront été labellisés d'ici à la fin de 2006, avec la mise en place de 450 équipes de réussite éducative, soit 60 % de l'objectif prévu pour la fin de 2009.
Les crédits de l'action n° 2, «Revitalisation économique et emploi », comprennent pour l'essentiel la compensation des exonérations de charges sociales en ZFU, estimée cette année à 333 millions d'euros, les dépenses liées aux plans de lutte contre les discriminations et les dépenses liées aux dispositifs d'insertion professionnelle, aux équipes emploi-insertion, aux référents de jeunes placés sous main de justice bénéficiant d'un CIVIS, c'est-à-dire un contrat d'insertion dans la vis sociale, mais aussi aux écoles de la deuxième chance.
L'action n° 3, « Stratégie, ressources et évaluation », comprend les crédits liés à l'animation de la politique de la ville et à son évaluation.
Il s'agit principalement des crédits de fonctionnement de la DIV, auxquels s'ajoutent désormais le coût de la nouvelle Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, l'ANCSEC, et les crédits de financement du volet « Stratégie, ressources, évaluation » des CUCS.
À ce sujet, madame la ministre déléguée, je souhaiterais que vous nous éclairiez sur la forte progression des dépenses liées à la mise en place des contrats urbains de cohésion sociale Cette augmentation est en effet de 36 %.
De manière générale, la création de l'ANCSEC a soulevé certaines interrogations sur la coordination des différentes structures, sur le rôle réservé à la DIV, notamment sur sa capacité à exercer une tutelle efficace.
Le délégué interministériel nous a expliqué sa conception du partage de responsabilités envisagé entre la DIV et l'ANCSEC, la première continuant à contrôler les procédures expérimentales et la seconde étant chargée de la mise en oeuvre des dispositifs standardisés.
La traduction budgétaire de cette répartition des rôles nous semble un peu confuse. Pourriez-vous nous éclairer, madame la ministre déléguée ?
Pour terminer sur la mesure de la performance, je ne peux que regretter qu'aucun indicateur de performance relatif à l'action de l'ANCSEC n'ait encore été élaboré, alors que cette agence tiendra une place majeure dans la mise en oeuvre du programme « Équité sociale et territoriale et soutien ».
Quant aux indicateurs existants, je vous renvoie à mon rapport.
En conclusion, je veux souligner l'incontestable succès de la politique de rénovation urbaine.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Le programme national, lancé en 2003, rencontre une très forte adhésion des élus locaux, quelle que soit leur sensibilité et malgré le scepticisme dont il a parfois été l'objet à ses débuts.
Le volet humain de la politique de la ville n'est pas négligé pour autant.
La consolidation en 2007 des crédits réservés à l'action sociale et économique dans les quartiers, la création des nouvelles ZFU, la mise en place de l'ANCSEC et l'augmentation de la dotation de solidarité urbaine sont autant de marques de l'attention particulière que porte le Gouvernement à ce domaine, n'oublions pas de le rappeler.
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. L'effort de l'État et de ses partenaires, bailleurs sociaux et collectivités locales, sans lesquels il ne pourrait rien, est aujourd'hui considérable. Il doit s'inscrire dans la durée et privilégier l'efficacité.
Il faut également que, en contrepartie de cet engagement financier très important en faveur des quartiers en difficulté, l'action de l'État soit exemplaire en termes de transparence et de performance.
Je vous appelle, mes chers collègues, à adopter les crédits du volet « ville » de cette mission « Ville et logement ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial.
M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, après l'exposé de M. Dallier sur les programmes du volet « ville » de la mission « Ville et logement », je vous présenterai les observations de la commission des finances sur les deux autres programmes, qui concernent plus particulièrement le logement.
Selon une distinction dorénavant traditionnelle, qui n'est pas pour autant intellectuellement satisfaisante, ces deux programmes regroupent respectivement les aides personnelles et les aides à la pierre.
Comme je l'ai fait l'année dernière, et puisque la LOLF nous conduit à porter une appréciation plus qualitative sur les projets annuels de performance et à reporter notre examen chiffré des comptes et des résultats au débat sur la loi de règlement, je vous invite à vous reporter aux rapports écrits pour la description des actions des deux programmes et la justification des crédits demandés, et je centrerai mon propos sur quelques observations.
Je veux tout d'abord dire notre satisfaction, madame la ministre déléguée, de ce que certaines remarques et critiques que nous avions formulées l'année dernière ont été prises en compte.
Je pense en particulier à la répartition du rattachement des dépenses fiscales entre les deux programmes, qui ne nous avait pas convaincus l'année dernière, c'est le moins que l'on puisse dire.
Je constate qu'une remise en ordre a été effectuée cette année, qui rattache pour l'essentiel le coût fiscal du prêt à taux zéro au programme des aides à la pierre. Cette remise en ordre répond aux demandes formulées par notre commission.
La commission des finances continue par ailleurs de s'interroger quant au financement du Fonds national d'aide au logement, tel qu'il est proposé par le projet de loi de finances. Nous avons d'ailleurs déposé plusieurs amendements à ce sujet.
La contribution de l'État au FNAL est en diminution de 3,8 %, ce que vous expliquez par plusieurs raisons, notamment, dans le projet annuel de performance, par « l'évolution tendancielle des prestations marquée par une évolution plus modérée des loyers et une poursuite de la diminution du chômage ».
Je reconnais bien volontiers la réalité de ces facteurs, et je ne suis pas de ceux qui pensent qu'une bonne politique se mesure à l'augmentation des dépenses.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Très bien !
M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. Toutefois, cette diminution de la contribution de l'État résulte aussi de l'augmentation des cotisations des employeurs prévue à l'article 62 rattaché, qui permet à l'État de réaliser des économies par un report de charges sur les établissements publics et les collectivités territoriales, ainsi que d'une recette exceptionnelle de 150 millions d'euros sur 2007, provenant du versement d'une contribution de la chambre syndicale des sociétés anonymes de crédit immobilier, les SACI. Sur ce dernier point, vous conviendrez qu'il s'agit clairement d'une débudgétisation.
J'observerai ensuite qu'un audit de modernisation sur la « rationalisation de la gestion des aides personnelles au logement » a été engagé en avril 2006. Les résultats de cet audit ont été publiés il y a un peu plus d'un mois.
Il semble que la principale piste de rationalisation de la gestion des aides, qui pourrait conduire notamment à un meilleur contrôle et à une réduction sensible des fraudes et des erreurs, consisterait à permettre la mise en commun des données fiscales et des données dont disposent les caisses d'allocations familiales. Est-ce exact, et quelles suites comptez-vous donner à cet audit ?
Compte tenu des sommes en jeu - 13,8 milliards d'euros de prestations d'aides personnelles au logement pour plus de 6 millions de ménages -, l'amélioration de la gestion ne peut que permettre des économies substantielles. D'après nos sources, elles ont été évaluées à 65 millions d'euros. Pourriez-vous nous donner quelques précisions à ce sujet, madame la ministre déléguée ?
Je note encore, madame la ministre déléguée, que vous avez évoqué, au cours du débat à l'Assemblée nationale, la possibilité de revenir à la situation antérieure concernant le seuil de versement minimum de l'aide personnalisée au logement, soit 15 euros au lieu de 24 euros.
M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. M. Dallier et moi-même vous proposerons donc tout à l'heure un amendement visant à rendre cette mesure effective.
Mon avant-dernière observation portera sur les dépenses fiscales : 40 dépenses fiscales sont rattachées à titre principal au programme, dont deux sur impôts locaux qui sont prises en charge par l'État, pour un montant évalué à 10,59 milliards d'euros en 2007, soit dix fois le montant des crédits budgétaires du programme.
Il faut certes reconnaître que près de la moitié de cette dépense fiscale est constituée par l'application du taux de TVA à 5,5 % pour les travaux de rénovation. Cette mesure n'est pas réellement propre au budget du logement, puisqu'elle est destinée au moins autant à soutenir l'activité économique et à lutter contre le travail au noir qu'à jouer en faveur du logement.
Il serait pourtant souhaitable de développer l'évaluation de l'efficacité de ces mesures, évaluation qui est encore trop négligée.
J'observerai enfin, comme je le signalais déjà l'année dernière, que l'accession à la propriété est le parent pauvre de la mesure de la performance des deux programmes relatifs au volet « logement » de la mission.
M. Gérard Delfau. Eh oui...
M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. Je regrette en particulier l'absence d'indicateur sur le taux d'effort en accession à la propriété, et je souhaiterais que l'année prochaine les indicateurs relatifs à la part des ménages primo-accédants et à la proportion des ménages à bas revenus parmi les bénéficiaires du prêt à taux zéro soient déclinés selon les trois catégories de zones, afin d'affiner l'appréciation de la performance.
Telles sont, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, les principales observations de la commission des finances sur ces deux programmes, dont nous vous proposons d'adopter les crédits, sous réserve des amendements qui vous seront présentés.
En conclusion, je souhaite souligner deux points.
Je rappellerai premièrement que le bilan de la politique du logement initiée en 2002 est incontestablement positif, malgré une conjoncture difficile.
Les résultats des douze derniers mois sont, à cet égard, significatifs : on compte 432 000 mises en chantier, 80 000 logements sociaux financés, 28 000 logements conventionnés par l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, 200 000 prêts à taux zéro.
L'atténuation de la crise du logement peut être, dans ces conditions, envisagée à moyen terme, surtout si la tendance à la décélération des prix, donc des loyers, se confirme en 2007-2008.
Deuxièmement, j'insisterai sur deux axes d'action qui doivent, à notre sens, faire l'objet d'une attention particulière.
Tout d'abord, le soutien des « parcours résidentiels », qui nécessite d'écarter toute segmentation artificielle entre le secteur public et le secteur privé du logement pour, au contraire, favoriser la fluidité entre les deux.
Ensuite, le développement indispensable de l'offre foncière. Je pense, en particulier, à ma région, l'Île-de-France, mais cela vaut également pour toutes les grandes agglomérations.
Peut-être cette offre foncière pourrait-elle se voir stimulée par l'institution d'un prêt à taux zéro foncier, par le renforcement de l'action des agences foncières et par l'incitation ferme adressée aux grands détenteurs de réserves foncières, tels que RFF, Réseau ferré de France, la SNCF ou la RATP, de céder leurs terrains inutilisés à l'État et aux collectivités territoriales, afin de favoriser les constructions.
Madame la ministre déléguée, plusieurs rapports ont été remis sur ce sujet depuis quatre ou cinq ans : aucun d'entre eux n'a été réellement suivi ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Pierre André, rapporteur pour avis.
M. Pierre André, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, je ne m'attarderai pas sur les crédits consacrés, pour 2007, à la ville, mon collègue Philippe Dallier les a présentés avec brio.
D'ailleurs, ces chiffres parlent d'eux-mêmes : avec 1,15 milliard d'euros de crédits, le budget de la ville est en hausse de 15 % et atteint un niveau historique.
En outre, cet effort financier a été accompagné cette année de mesures fortes pour la politique de la ville, telles que la création de nouvelles zones franches urbaines, l'installation de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances et les dispositions nouvelles annoncées lors du comité interministériel des villes et du développement social urbain du 9 mars 2006.
J'insisterai toutefois sur le prolongement des travaux menés récemment par la mission d'information commune sur les quartiers en difficulté, qui a été créée par le Sénat et dont j'ai eu l'honneur d'être le rapporteur.
Tout d'abord, madame la ministre déléguée, merci d'avoir très rapidement pris en compte certaines de nos propositions, par exemple, notre souhait qu'une enquête soit lancée sans délai, au niveau national, sur les conditions du relogement des personnes concernées par des opérations de rénovation urbaine.
À cet égard, vous avez indiqué que vous feriez réaliser une analyse des opérations de relogement pour tous les programmes et sur l'ensemble du territoire, ce dont nous nous félicitons.
Nous souhaitons, par ailleurs, que des suites soient apportées rapidement à certaines de nos propositions. Par exemple, il faudrait véritablement pouvoir disposer d'un bilan de l'utilisation de la DSU, la dotation de solidarité urbaine, dont le montant a été considérablement augmenté en trois ans.
Dans cette perspective, nous avons demandé que les préfets établissent un bilan dans leurs départements, à partir des rapports transmis obligatoirement par les maires. Madame la ministre déléguée, pouvez-vous donner rapidement des instructions en ce sens ?
En outre, la mission a insisté sur la nécessité de mobiliser davantage les politiques de droit commun sur les territoires les plus en difficulté. En effet, de très nombreux acteurs interrogés par la mission ont estimé que la politique de la ville s'était trop souvent substituée aux crédits de droit commun. À l'avenir, il nous faudra être particulièrement vigilant sur ce point.
Madame la ministre déléguée, je souhaiterais, à l'instar de mon éminent collègue Philippe Dallier, que vous nous apportiez des précisions au sujet des dotations accordées à l'ANRU. En 2007, celle-ci devrait se voir doter de 600 millions d'euros, dont 400 millions d'euros ont été inscrits en loi de finances.
En revanche, pour 2006, l'Agence n'a reçu pour l'instant que 405 millions d'euros. Pouvez-vous nous indiquer précisément comment elle pourrait, d'ici à la fin de l'année, recevoir une dotation complémentaire permettant d'atteindre les 465 millions d'euros annuels prévus par la loi du 1er août 2003 programmation ?
J'en viens à présent aux crédits d'intervention en faveur du développement économique et social des quartiers qui, pour 2007, représentent 65 % du budget de la ville, ce qui atteste l'équilibre trouvé entre les volets urbain et humain de la politique de la ville.
Conformément au souhait émis par notre commission dans son rapport sur les contrats de ville, le comité interministériel des villes et du développement social urbain du 9 mars dernier a annoncé le lancement de nouveaux contrats urbains de cohésion sociale, dont la négociation, qui est en cours, suit un calendrier assez serré, puisque ceux-ci devraient, en principe, être signés avant le 15 janvier 2007.
Madame la ministre déléguée, vous nous avez indiqué à ce sujet qu'une phase transitoire serait prévue, afin d'assurer la continuité du financement de certaines actions. En conséquence, je souhaiterais qu'une certaine souplesse prévale au niveau local s'agissant de la date de signature de ces contrats, pour ne pas confondre vitesse et précipitation et laisser aux collectivités le temps d'élaborer un projet de qualité.
Enfin, dans le cadre de la nouvelle contractualisation, il a été demandé aux préfets de réviser la géographie prioritaire de la politique de la ville, à partir de trois catégories de quartiers, qui recevront de l'État un financement plus ou moins important selon le degré de difficultés qu'ils rencontrent.
À cet égard, madame la ministre déléguée, pouvez-vous nous apporter des indications plus précises sur le calendrier de mise en oeuvre de cette nouvelle géographie, ainsi que sur l'enveloppe financière moyenne qui pourra être accordée par contrat ?
En conclusion, la commission des affaires économiques se réjouit de la hausse des crédits de la politique de la ville pour 2007 et forme le voeu que cet effort ne se réduise pas dans l'avenir, quand se sera estompé le souvenir des explosions que nous avons connues.
En effet, je le rappelle, le revenu moyen des ménages vivant dans les quartiers difficiles est inférieur de plus de 40 % à celui qui prévaut dans d'autres unités urbaines.
Sous le bénéfice de ces observations, madame la ministre déléguée, j'ai la grande joie de vous annoncer - le suspens prend fin ! (Sourires.) - que la commission des affaires économiques s'est déclarée favorable à l'adoption du budget de la ville pour 2007. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, en remplacement de M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis.
M. Daniel Raoul, en remplacement de M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, je vous prie tout d'abord d'excuser Thierry Repentin. Celui-ci devait être le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur cette mission, mais il se trouve retenu par une réunion d'information, à destination des élus de son département, relative à la loi ENL.
M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis. Mais je ne vous apprends rien, madame la ministre déléguée. (Sourires.)
Je vous prie donc de m'excuser de vous imposer ma présence à cette tribune (Exclamations amusées), ...
M. Dominique Braye. Mais non, nous en sommes heureux !
M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis. ... mais c'est pour vous présenter l'avis de la commission des affaires économiques sur les deux programmes consacrés à la politique du logement dans le projet de loi de finances pour 2007.
S'agissant des aides à la personne, la dotation budgétaire en faveur du Fonds national d'aide au logement, qui assure le paiement des APL, les aides personnalisées au logement, et de l'ALS, l'aide au logement social, est en recul de 3,8 %. En effet, d'après vos services, madame la ministre déléguée, un ralentissement des versements de ces prestations est attendu, au cours de l'année 2007, en raison de l'entrée en vigueur de l'indice de référence des loyers et de la diminution du chômage.
Toutefois, l'équilibre du FNAL se trouve assuré grâce à d'autres évolutions budgétaires, comme l'affectation d'une partie de la taxe sur les tabacs ou de 150 millions d'euros prélevés sur les fonds propres des fameuses SACI, opération assez curieuse, car il s'agit d'une source de financement non reconductible et, pour ainsi dire, d'un fusil à un coup !
Surtout, l'article 62 du projet de loi de finances prévoit d'assujettir les employeurs publics, l'État, mais aussi les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs, à une cotisation sur leur masse salariale, ce qui permettra de dégager 236 millions d'euros en faveur du FNAL.
Mes chers collègues, la commission des affaires économiques saisie pour avis, s'est déclarée, à l'instar de la commission des finances, et à l'unanimité, défavorable à cette nouvelle charge imposée aux collectivités territoriales, d'où le dépôt par nos collègues MM. André et Repentin d'un amendement identique à celui de nos collègues MM. Karoutchi et Dallier - une fois n'est pas coutume ! (Sourires.)
Enfin, les aides au logement seront actualisées de 1,8 % au 1er janvier 2007, ce qui constitue un effort réel, mais qui doit être relativisé, car aucune revalorisation n'aura eu lieu en 2006, et celle-ci vaut donc pour deux années. Conjuguée aux hausses insuffisantes des dernières années, cette évolution ne permettra pas de diminuer le taux d'effort des ménages attributaires, notamment des plus modestes d'entre eux.
En ce qui concerne les aides à la pierre, près de 95 000 logements sociaux auront été financés en 2006, après 81 000 en 2005, ce qui constitue une belle progression. Pour 2007, l'objectif est fixé à 100 000 logements sociaux, et nous souhaitons tous qu'il soit atteint.
Toutefois, il faut le rappeler, en matière de financement, le budget des SACI a de nouveau été sollicité, là encore de façon non reconductible, puisque 250 millions d'euros issus des fonds propres de ces sociétés ont été utilisés afin de rembourser une partie de la dette HLM. Nous ne voyons donc pas quel est le financement pérenne de cette action.
Par ailleurs, l'équilibre financier des opérations locatives sociales pâtira de la hausse du taux du livret A du 1er août dernier : comme le montant de la subvention budgétaire par logement social construit reste stable, ce seront vraisemblablement les finances des collectivités territoriales, ou de leurs intercommunalités, qui seront sollicitées pour compenser ce surcoût.
Mes chers collègues, je profite de cette remarque pour ouvrir une brève parenthèse sur le livret A. Il s'agit d'un sujet d'actualité, puisque plusieurs établissements bancaires ont réclamé le droit de distribuer ce produit, qui constitue aujourd'hui une exclusivité de La Poste et des Caisses d'épargne.
Le livret A constitue un produit d'épargne très populaire, qui compte près de 46 millions de titulaires et qui permet de financer le logement social.
La plus grande partie de l'encours de ces fonds, soit 80 milliards d'euros sur un total de 113 milliards d'euros, se trouve utilisée par la Caisse des dépôts et consignations, afin de financer les prêts à long terme aux organismes d'HLM, le solde étant placé afin de dégager un résultat d'exploitation positif.
Il s'agit donc d'un système très ingénieux, qui permet de transformer une épargne liquide en prêts à très longue durée allant de trente à cinquante ans.
Par ailleurs, le livret A constitue le seul outil bancaire à la disposition d'un grand nombre de nos concitoyens démunis, La Poste et la Caisse d'épargne étant tenues d'accéder à toute demande d'ouverture d'un livret. Ainsi, pour cette dernière clientèle, ce sont plusieurs centaines d'opérations qui sont effectuées aux guichets chaque année pour des encours inférieurs à cent cinquante euros.
Finalement, comme le Gouvernement, la commission des affaires économiques saisie pour avis a estimé que le système actuel donnait toute satisfaction et qu'il ne convenait pas de le modifier. Nous formons des voeux pour que la Commission européenne soit sensible à ces arguments et nous vous demandons de défendre notre position, madame la ministre déléguée.
En conclusion, tout en reconnaissant qu'un certain nombre d'évolutions sont positives, Thierry Repentin et moi-même continuons à penser que la politique en matière d'aides à la personne, notamment à destination des plus modestes, est loin d'être satisfaisante. Par ailleurs, les dépenses fiscales considérables consacrées à des actions telles que l'amortissement Robien, même recalibré, ne nous semblent pas très judicieuses.
Ces raisons avaient conduit mon collègue à inviter la commission à rejeter ces crédits. Toutefois, madame la ministre - et, comme Pierre André, je mets fin au suspens ! (Sourires.) -, celle-ci n'ayant pas suivi M. Thierry Repentin, je vous indique, en tant que rapporteur pour avis par intérim, que la commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - M. Dominique Braye applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis.
Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, je ne m'attarderai pas sur la présentation chiffrée de ce budget, dont les grandes lignes nous ont déjà été présentées. Toutefois, il me semble que la mission « Ville et logement » présente deux caractéristiques qu'il convient de souligner.
Tout d'abord, la part des dépenses fiscales est importante : leur montant - plus de 11 milliards d'euros - est supérieur à celui des crédits de la mission, qui s'élèvent à 7,2 milliards d'euros. Elles contribuent, pour une large part, au développement et à l'amélioration de l'offre de logement grâce à des incitations fiscales.
Ensuite, chaque année, on constate la mobilisation de ressources extrabudgétaires : leur caractère ponctuel peut faire craindre la disparition, l'année suivante, des recettes budgétaires correspondantes. Je pense aux 500 millions d'euros apportés cette année par la réforme des sociétés anonymes de crédit immobilier.
Au total, les moyens de la mission « Ville et logement » s'élèvent donc à 18,6 milliards d'euros, soit près de 1,3 milliard d'euros de plus qu'en 2006.
J'aborderai d'abord les crédits consacrés à la politique de la ville.
Dans l'ensemble, l'État a respecté les engagements pris au titre du programme national de rénovation urbaine, le PNRU, et au titre du plan de cohésion sociale.
La mise en oeuvre du programme national de rénovation urbaine constitue en effet l'une des priorités de la politique de la ville. À cette fin, l'ANRU sera dotée pour 2007 de 625 millions d'euros en moyens d'engagement pour poursuivre un programme de rénovation sans précédent, qui mobilisera plus de 30 milliards d'euros jusqu'à son échéance, désormais fixée à 2013.
Toutefois, je m'inquiète que les crédits consacrés au financement de l'Agence dépendent, chaque année, d'apports extérieurs plus ou moins aléatoires. Il est en effet essentiel que les engagements de l'État soient tenus. Or, à ce jour, il manquerait à l'ANRU 60 millions d'euros pour boucler l'exercice 2006 en cours, qui plus est sur des recettes inscrites en loi de finances initiale pour 2006 dont l'origine n'a jamais été précisée au Parlement.
Je souhaite, madame la ministre déléguée, que vous nous éclairiez à ce sujet et que vous vous engagiez ici à sanctuariser les crédits requis chaque année pour respecter les objectifs du PNRU.
C'est d'autant plus important que l'ANRU va devoir faire face à un véritable « pic financier », qui résulte de la mise en oeuvre simultanée des différents projets de rénovation validés par le comité d'engagement. Quelle est la stratégie du Gouvernement pour faire en sorte que le lancement des chantiers ne soit pas retardé ? Un nouveau report de l'échéance du programme n'est pas, à mon sens, une solution acceptable.
De la même façon, il est indispensable que les crédits en faveur de la cohésion sociale soient pérennisés et renforcés : les futurs contrats urbains de cohésion sociale disposeront en 2007 de 380 millions d'euros pour soutenir l'action des associations et financer les dispositifs de prévention, d'encadrement des jeunes et de réussite éducative.
On aurait pu craindre que les mesures exceptionnelles prises l'année dernière ne soient pas reconduites. Tel n'est pas le cas, et c'est heureux, car la commission des affaires sociales est particulièrement attachée à la présence de ces dispositifs d'accompagnement social dans les quartiers, dispositifs sans lesquels toute politique ambitieuse de rénovation serait vouée à l'échec.
J'en profite pour saluer les propos de mon collègue Pierre André, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, qui rappelait à quel point il nous fallait non seulement mobiliser les crédits spécifiques de la politique de la ville, mais aussi ne jamais oublier les crédits de droit commun. C'est d'ailleurs par là qu'il faut commencer : les moyens de droit commun et les crédits tant en fonctionnement qu'en moyens humains doivent être présents partout, dans tous les quartiers, pour que l'action de la politique de la ville soit un véritable levier. Aujourd'hui, trop souvent, les crédits spécifiques ne viennent que pallier les insuffisances des moyens que l'État consacre.
Toutefois, des incertitudes subsistent dans plusieurs domaines : d'abord, sur les modalités de fonctionnement de l'ANCSEC, notamment dans ses rapports avec l'ANRU et la DIV ; ensuite, sur les critères de choix des territoires éligibles aux contrats urbains de cohésion sociale et sur les modalités du pilotage local de leur mise en oeuvre.
D'autres incertitudes pèsent sur les modalités de financement et de fonctionnement du fonds de prévention de la délinquance, créé par le projet de loi relatif à la prévention de la délinquance en cours de navette parlementaire. Cela nécessitera que l'on détermine avec plus de précision l'origine des moyens qui lui seront affectés, en espérant qu'ils ne viendront pas des budgets réservés à la politique de la ville.
Enfin, d'autres incertitudes subsistent sur la DSU. L'augmentation de 120 millions d'euros en 2007, conformément au plan de cohésion sociale, constitue certes un signal positif et fort ; mais il faut veiller à la bonne utilisation de cette dotation et améliorer l'effet de péréquation qu'elle produit pour les communes les plus défavorisées qui ne sont pas forcément éligibles aux politiques de la ville.
Plusieurs pistes mériteraient d'être explorées, notamment la prise en compte de la capacité d'ingénierie des communes et de la présence de services publics de proximité, ou encore la mise en place d'un contrat de sortie des dispositifs de la politique de la ville. Quel est votre sentiment sur ce point, madame la ministre déléguée ?
J'aborderai maintenant les crédits consacrés à la politique du logement.
Comme les années précédentes, les aides à la personne mobiliseront plus de 80 % des crédits disponibles. Pourtant, la situation économique des ménages se dégrade : malgré la revalorisation des aides de 1,8 % au 1er janvier 2007, l'augmentation des prix de l'immobilier ne sera pas compensée.
Nous l'avons déjà évoqué, des difficultés liées aux conditions de versement de ces aides subsistent : le maintien du mois de carence avant le versement des allocations ; la revalorisation des aides, qui devrait être annuelle et indexée sur le nouvel indice de référence des loyers, l'IRL ; les petites prestations logement qui jusque-là n'étaient plus versées ; le seuil minimal de perception des allocations fixé à 24 euros mensuels. Nous en reparlerons lors de l'examen de l'amendement n° II-149 de MM. Dallier et Karoutchi tendant à financer le retour du seuil du versement des aides personnelles au logement de 24 euros à 15 euros.
Ces mesures d'économie conduisent en réalité les familles à se reporter sur d'autres types d'aides, par exemple sur les fonds de solidarité logement, qui sont gérés désormais par les départements et dont les charges augmentent fortement. Du fait du délai de carence d'un mois pour le versement des aides au logement, les familles en difficulté se tournent systématiquement vers les FSL.
J'en viens enfin au second programme du volet concernant le logement au sein de la mission « Ville et logement ». Trois objectifs sont privilégiés.
Il s'agit, premièrement, du développement de l'accession à la propriété, que je crois essentiel pour encourager les parcours résidentiels ascendants ; il sera favorisé par l'extension des conditions d'octroi du prêt à taux zéro, le PTZ, et du prêt à l'accession sociale, le PAS.
Il s'agit, deuxièmement, de la lutte contre l'habitat indigne et de l'amélioration de l'accessibilité et de la sécurité des logements, auxquelles l'ANAH consacre près de la moitié de sa subvention annuelle.
Il s'agit, troisièmement, de la construction et de la rénovation du parc public et privé. Un effort exceptionnel a été consenti par l'État, mais l'offre destinée aux ménages les plus modestes demeure largement insuffisante, notamment pour la construction de logements financés à l'aide d'un PLUS, un prêt locatif à usage social, et, surtout, d'un PLA-I, un prêt locatif aidé d'intégration. Ne faut-il pas renforcer les objectifs du programme de cohésion sociale sur ce point, madame la ministre déléguée ?
Ces quelques observations n'affectent pas le soutien de la commission des affaires économiques sur les orientations politiques que vous proposez dans le cadre des crédits pour 2007, madame la ministre déléguée. Ce budget est ambitieux, il a le mérite d'apporter des réponses aux problèmes qui se posent depuis plusieurs décennies et de mobiliser des moyens sans précédent, ce qui incite les acteurs locaux à s'impliquer financièrement et politiquement.
Aussi, sous réserve des trois amendements qu'elle a déposés en faveur des aides au logement et espérant qu'un effort plus important sera accompli en direction du logement très social, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission et aux articles 62 et 62 bis qui lui sont rattachés. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 34 minutes ;
Groupe socialiste, 25 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 14 minutes ;
Groupe du rassemblement démocratique et social européen, 12 minutes.
Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.
Je vous rappelle également que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quarante minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Roger Madec.
M. Roger Madec. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, la mission « Ville et logement » concentre des enjeux essentiels en matière de cohésion sociale.
« Faire société » ne va plus aujourd'hui de soi. Notre pacte social et républicain est régulièrement confronté à ses failles et à ses échecs. La violence devient symptôme, notamment aux marges territoriales, économiques et sociales de notre République. Nos banlieues sont toujours vécues comme des zones de relégation et d'exclusion.
La ségrégation territoriale n'est pas qu'une expression. Elle renvoie très concrètement à des territoires dans lesquels les conditions d'emploi, de logement et d'éducation contredisent les promesses égalitaires de la République, et où les équipements, les services publics, les transports sont déficients.
La solidarité urbaine et l'égalité territoriale auraient dû constituer l'une des priorités de la législature, mais vous n'avez pris conscience de cet enjeu que très tardivement et, parce que vous avez préféré ne pas agir, il vous a fallu réagir sous la pression des événements.
Ainsi, les mesures prises à la suite des émeutes urbaines de l'automne 2005 ont consisté en un simple rattrapage des diminutions de crédits survenues lors des budgets précédents.
De même, l'augmentation de la dotation globale proposée cette année pour les programmes « Rénovation urbaine » et « Équité sociale et territoriale et soutien » n'est pas encore à la hauteur des besoins, en termes non seulement quantitatifs mais aussi qualitatifs. À ces crédits s'ajoutent d'ailleurs ceux de la DSU, dont la bonne utilisation et l'effet péréquateur ne sont pas pleinement garantis.
Votre échec est souligné par le dernier rapport de l'Observatoire national des zones urbaines sensibles, dans lequel on peut lire que « le processus de décrochage dans les zones urbaines sensibles n'est pas enrayé » et que « l'on constate même le creusement d'écarts entre les quartiers classés en ZUS et les autres quartiers des agglomérations auxquels ils appartiennent. »
Qu'il s'agisse d'emploi, de réussite scolaire ou de sécurité, les inégalités demeurent fortes. La carte de l'exclusion économique et sociale continue à recouvrir celle des territoires défavorisés.
Face à cette situation, le chantier de la rénovation urbaine exige une mobilisation forte et constante de ressources financières. À cet égard, le budget de la mission « Ville et logement » pour 2007n'est pas à la hauteur.
Comme l'année dernière, l'obligation de verser 465 millions d'euros à l'ANRU ne sera honorée que par le concours de recettes extrabudgétaires qui ne sont disponibles qu'à titre exceptionnel. L'absence d'un financement pérenne constitue un motif d'inquiétude répétée tant pour les parlementaires ayant à juger de la sincérité et de la cohérence d'un budget que pour les acteurs de terrain.
Ces crédits sont d'autant plus insuffisants que la situation économique, notamment la hausse du coût de la construction, n'est pas prise en compte.
Par ailleurs, la réalisation de l'ensemble des projets soutenus par l'ANRU n'est pas assurée, faute de ressources suffisantes. L'investissement à moyen et à long terme ne correspond pas aux ambitions affichées. Ainsi, au 1er novembre 2006, l'ANRU a déjà engagé 7,8 milliards d'euros, soit 70 % de ses ressources totales, pour subventionner 218 projets de rénovation. Or plus de 200 projets sont encore en attente de financement.
M. Yazid Sabeg, président du comité d'évaluation et de suivi de l'ANRU, juge ainsi qu'« il n'y a pas assez d'argent » et que « l'essentiel des crédits a été consommé ».
Au-delà du financement, ce sont les résultats de la politique de rénovation urbaine qui doivent être évalués au regard de leurs ambitions sociales.
La logique de démolition et de reconstruction, censée améliorer les conditions de vie, s'impose au détriment de l'offre de logements sociaux. Les reconstructions ne sont pas à la hauteur des démolitions : leur nombre demeure inférieur.
Ainsi, le taux de couverture des démolitions par les reconstructions n'a atteint que 53,6 % en 2005 et ne devrait pas dépasser 76 % en 2006. Nous sommes loin du taux de 100 % que vous aviez présenté comme une règle, celle du « un pour un », lors de la discussion de la loi de 2003. Réduire l'offre sociale, dans un contexte de crise du logement, ne permet pas à la rénovation urbaine de profiter en priorité aux plus défavorisés.
Plus généralement, les conditions de relogement ne sont pas toujours satisfaisantes. L'accompagnement humain fait parfois défaut. La notion de « parcours résidentiel » demeure trop souvent une expression vide de sens. Une politique de grands travaux, sans suivi individualisé des familles, ne produit pas de mieux-être économique et social.
De surcroît, la mixité sociale n'est pas non plus au rendez-vous. L'Union sociale pour l'habitat note ainsi que la moitié des reconstructions a lieu sur le site du quartier démoli, tandis que l'autre moitié est effectuée sur une autre partie de la commune. Si l'on reste dans des périmètres constants, en termes d'offre et de géographie, la mixité ne progressera pas. Seule une volonté politique forte, fondée sur le respect du principe de solidarité posé par l'article 55 de la loi SRU, pourra favoriser l'équilibre et la diversité sociale.
Enfin, la concentration de la politique de la ville sur les ZUS et l'ANRU s'accompagne d'effets pervers. De nombreuses villes, qui comptent pourtant des quartiers en grande difficulté, ne peuvent bénéficier des financements de l'ANRU et ne disposent pas non plus de DSU. Si la concentration des moyens est nécessaire à l'efficacité de l'action, elle ne peut pas se faire au détriment de l'effort général attendu dans tous les territoires. Contre les effets de seuil, des dispositifs intermédiaires sont nécessaires, afin de garantir la continuité de l'action publique.
Pour ce qui concerne les actions en faveur de la cohésion économique et sociale, votre engagement demeure insuffisant.
Ainsi, les crédits de paiement destinés à la prévention et au développement social ne bénéficient d'aucune revalorisation, au moment même où l'éducation à la citoyenneté et la prévention de la délinquance constituent des priorités affichées par votre gouvernement. Cela confirme vos réserves quant à l'action sociale préventive ainsi que la priorité que vous donnez au contrôle social et à une culture répressive médiatisée.
Dans le même esprit, l'effort consenti en direction des associations en 2006, qui ne constituait qu'un rattrapage partiel de votre désengagement, n'est pas maintenu : les autorisations d'engagement sont en baisse de 2,33 % pour 2007.
Lorsque les crédits sont en hausse, ils ne suffisent pas à honorer vos promesses : le financement de 633 nouveaux postes d'adultes-relais en 2006 ne suffira pas pour atteindre les 6 000 annoncés. De même, les 220 ateliers « santé-ville », qui seront en activité lors de l'exécution de la future loi de finances pour 2007, ne correspondent pas aux 300 qui avaient été annoncés comme objectif pour la fin de l'année 2006.
Pour ce qui concerne les mesures de relance économique, les moyens destinés au développement économique des territoires et à l'insertion professionnelle diminuent de 2,81 %.
Le bilan des ZFU se révèle contrasté : les entreprises se sont bien installées, mais leur contribution en matière d'emploi demeure bien modeste. Le taux de chômage reste deux fois supérieur dans les ZFU. La moitié des entreprises établies dans les 41 ZFU créées en 2004 n'emploient aucun salarié.
Rapporté au coût des avantages fiscaux consentis - 333 millions d'euros en 2007 -, le dispositif ne satisfait pas pleinement l'intérêt général. Les exonérations, dont la durée pourrait être modulée en fonction des nécessités du développement économique, devraient s'accompagner de conditions de recrutement plus exigeantes que celles qui sont pratiquées aujourd'hui. Un débat pourrait même s'ouvrir sur la nécessité de lier ces exonérations aux individus : la logique des « salariés francs » pourrait se substituer à la logique, purement géographique, de concentration des entreprises sur un seul territoire.
Enfin, la gouvernance de la politique de la ville suscite bien des interrogations. Alors que le ministère de la ville a plusieurs fois changé de nom, de périmètre et de visage, depuis 2002, vous multipliez les acteurs de cette politique au risque de la rendre difficilement lisible et moins efficace.
Ainsi l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, l'ANCSEC, qui se substitue notamment au Fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations, le FASILD, est désormais chargée de missions très diverses. Est-ce vraiment le principe de subsidiarité et le souci d'améliorer l'action publique qui ont guidé sa création ?
L' « agencisation » de l'État, pour reprendre le néologisme du rapporteur général, ne va pas sans poser des problèmes de dilution des responsabilités et des outils d'action.
La mise en place des contrats urbains de cohésion sociale sera, à ce titre, observée avec attention, notamment la transition avec les contrats de ville, les conditions de leur mise en oeuvre et les priorités géographiques affichées.
Plus généralement, la répartition des compétences entre l'ANRU, la DIV et l'ANCSEC devra être précisée. L'empilement des dispositifs, avec ses corollaires que sont l'inefficacité de l'action publique et la dépense inutile, sont à craindre.
Les enjeux de la politique de la ville sont devenus essentiels, car ils concernent directement la cohésion sociale et nationale. La solidarité urbaine et l'égalité territoriale devront constituer des priorités pour la prochaine législature.
Les politiques conduites depuis 2002 n'ont pris que très tardivement et très partiellement conscience de ces enjeux. Les crédits de la mission « Ville et logement », dans le cadre du projet de loi de finances pour 2007, ne sont pas à la hauteur de l'urgence sociale. Vous aurez compris, madame la ministre déléguée, qu'ils ne satisfont pas les membres du groupe socialiste. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, en ma double qualité de sénateur et de président de la Commission nationale consultative des gens du voyage, mon ambition, au-delà de l'accès au droit commun pour cette population, est de redonner à chaque type d'aire d'accueil sa vocation initiale.
En effet, les aires permanentes d'accueil, depuis l'adoption de l'amendement au projet de loi portant engagement national pour le logement, entrent progressivement dans le champ du logement social.
Il convient donc de respecter cette mission de première importance de stationnement, d'accueil et, surtout, d'habitat social. C'est pourquoi, je compte sur la mobilisation des élus, au même titre que pour l'application de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, pour permettre la réalisation de ces aires, comme le leur impose la loi de juillet 2000.
En effet, il est capital d'atteindre au plus vite, mais dans des conditions adaptées et pragmatiques, la mise à disposition de 40 000 emplacements, seul moyen pour mettre un terme aux stationnements illicites. Je rappelle qu'aujourd'hui seuls 8 000 emplacements ont été réalisés.
À ce titre, madame la ministre déléguée, je tiens à saluer l'effort du Gouvernement, qui a décidé d'allouer 40 millions d'euros pour la production d'aires d'accueil pour 2007, contre 30 millions d'euros prévus dans la loi de finances de 2006, soit 33 % d'augmentation.
Par ailleurs, il nous faut également prendre en compte un autre type d'aires de stationnement, qui répond à la problématique de sédentarisation des gens du voyage, à savoir les terrains familiaux, qui, je le rappelle, sont éligibles aux allocations logement. Aussi, à l'occasion des révisions des schémas, il apparaît nécessaire de renforcer leur prise en compte et d'introduire des dispositions concernant les gens du voyage dans le cadre des plans départementaux d'action pour le logement des personnes défavorisées, en lien avec les plans locaux d'habitat. De même, il nous faut rendre le lien plus opérationnel avec les documents d'urbanisme, par l'intermédiaire du schéma de cohérence territorial, et prendre en compte l'évolution de l'habitat.
Ces deux types de stationnement ont, je le rappelle, une vocation strictement permanente et sociale, à la différence des aires de grands passages. En effet, en ce qui concerne ces dernières, je souhaiterais que nous soyons dans une logique de mise à disposition d'un lieu répondant à une demande précise et ponctuelle, qui n'a pas de caractère permanent.
Madame la ministre déléguée, je tiens, à cet égard, à saluer les dispositions de l'article 89 de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, qui prévoient la possibilité pour le préfet, après avis de la commission consultative départementale, d'appliquer un taux maximal de subvention de 100 % du montant des dépenses engagées dans le délai légal, dans la limite du plafond de dépense « subventionnable ».
Toutefois, il conviendra de compléter la loi en définissant précisément ce type d'aire selon certains principes que je me permets d'indiquer.
En effet, je souhaite que l'organisation puisse être clarifiée et déclinée comme c'est le cas pour les grands rassemblements religieux, qui relèvent des services de l'État. Il me paraît donc pertinent que chacun des 342 arrondissements de notre territoire puisse disposer d'un terrain pouvant accueillir un maximum de 200 caravanes, suivant la règle d'un hectare pour 50 caravanes. C'est pourquoi je pense que l'organisation doit être confiée à chaque sous-préfecture, en lien avec la collectivité locale qui accueille, selon une procédure stricte et encadrée, alors que malheureusement, en l'état actuel de la législation, celle qui existe est insuffisante.
Par ailleurs, la compétence liée du représentant de l'État dans l'arrondissement et du maire concerné me paraît incontournable. Les demandes motivées par leur caractère cultuel ou économique devraient répondre à un certain nombre de normes infranchissables et être adressées au représentant de l'État par les organisateurs au moins deux mois avant le stationnement envisagé. Chaque groupe devrait avoir un référent responsable et identifié, engageant sa responsabilité civile et pénale, sur une période donnée ne pouvant dépasser quinze jours.
L'autorisation de stationnement pourrait prendre la forme d'un arrêté préfectoral et intervenir à la suite de la signature d'une convention entre les différentes parties.
Les infrastructures, n'ayant pas de caractère permanent, pourraient se limiter aux équipements nécessaires à l'alimentation en eau potable, en électricité, à la collecte des ordures ménagères, ce qui présenterait l'avantage d'avoir un coût moindre et serait donc incitatif pour les collectivités. Les tarifs seraient abordables, dans la mesure où le financement serait, pour partie, assuré par l'État. Il est entendu que ces aires devront être accessibles aux services publics de proximité.
Je tiens à préciser que les associations de gens du voyage, avec lesquelles nous travaillons dans le cadre de la commission précitée, partagent cette vision des choses. La création d'aires de grands passages permettrait d'accélérer le processus engagé, et ce à moindre coût. C'est ce que nous recherchons tous, à condition bien sûr que les exigences d'un confort minimal soient respectées.
Aussi, je crois fermement qu'une organisation encadrée des grands passages par les services de l'État serait de nature à rationaliser les équipements, à limiter le financement et les budgets de fonctionnement, donc à garantir l'équilibre du dispositif.
J'ai bien conscience de l'image négative qu'ont les élus et nos concitoyens des gens du voyage. Toutefois, seule la réalisation d'aires d'accueil permanentes aménagées permettra d'empêcher le stationnement illicite et d'identifier précisément les réalités quotidiennes de cette population pour permettre sa réelle insertion au sein de la République.
À ce titre, qu'il me soit permis de rappeler que les quelque 400 000 gens du voyage sont des citoyens français à part entière et qu'il nous appartient de ne pas les laisser sur le bord de la route - expression doublement adéquate en l'occurrence - au risque d'entretenir sinon un système parallèle.
Aussi, nous devons renforcer le sentiment de citoyenneté chez les gens du voyage. À ce sujet, je veux rappeler le problème de leur inscription sur les listes électorales, donc de leur droit de vote. Dans la mission qui est la vôtre, madame la ministre déléguée, vous comprenez bien l'importance que revêt le « donnant-donnant » pour la Commission nationale consultative des gens du voyage. En effet, un certain nombre de points doivent évoluer. Ainsi, par exemple, les jeunes gens du voyage constatent que leurs camarades sédentaires âgés de dix-huit ans sont inscrits d'office sur les listes électorales, alors qu'eux-mêmes doivent apporter la preuve de leur rattachement à une commune pendant trois années consécutives pour avoir droit à leur inscription sur les listes.
Concernant le soutien financier apporté par l'État, tant dans la création que dans la gestion, je salue une nouvelle fois le sérieux et l'efficacité avec lesquels vous avez traité ce point, madame la ministre déléguée. Il est nécessaire de développer, parallèlement, tous les moyens incitatifs à destination des élus et de ne pas se focaliser sur des dispositifs contraignants.
En conclusion, gardons à l'esprit que le respect des devoirs de chacun préserve les droits de tous. Une nouvelle fois, madame la ministre déléguée, je souhaite saluer les moyens que vous mettez à la disposition de cette action. Sachez que, bien entendu, je voterai les crédits inscrits dans ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, ce projet de budget est important, car il se situe au carrefour de deux crises majeures de notre société : la ségrégation urbaine, qui s'est révélée avec une acuité particulière lors des émeutes dans nos banlieues à l'automne 2005, et la pénurie de logements. L'échec de la politique menée par le Gouvernement sur ces deux fronts est patent.
Permettez-moi d'illustrer par quelques chiffres la situation du logement dans notre pays : 1 300 000 demandeurs sont en attente d'un logement social, 800 000 personnes, dont un tiers de jeunes, sont privées de domicile personnel, 450 000 adultes, hors étudiants et apprentis, vivent chez des proches, parfois avec des enfants, et entre 400 000 et 600 000 logements sont indignes, insalubres ou dangereux.
Pour des millions de personnes, toutes générations et tous territoires confondus, le logement est devenu un fardeau, mais aussi un luxe totalement inaccessible.
Peut-on accepter que des familles s'entassent dans des habitats de fortune, dans des conditions d'hygiène déplorables, que des personnes vivent à l'année dans des campings, que des salariés dorment dans leur voiture ?
Confronté à cette situation dramatique, le Gouvernement, sous l'impulsion de M. Jean-Louis Borloo et de vous-même, n'est certes pas resté inactif au cours de ces trois dernières années.
M. Dominique Braye. On peut le dire !
M. Gérard Delfau. Plan de cohésion sociale, loi pour l'égalité des chances, loi portant engagement national pour le logement : toutes ces initiatives montrent une volonté manifeste et contiennent des avancées certaines.
M. Dominique Braye. Très bien !
M. Gérard Delfau. Pour autant, votre politique ne me semble pas à la hauteur des enjeux et ce projet de budget pour 2007, malheureusement, ne permettra pas d'inverser la tendance.
M. Dominique Braye. Ah, c'est moins bien !
M. Gérard Delfau. Alors même que 300 000 nouveaux ménages arrivent chaque année sur le marché locatif, l'enveloppe consacrée au financement des aides à la personne diminue de 3,8 %. Après cinq années consécutives de baisse du nombre de bénéficiaires, cette nouvelle coupe claire n'est pas acceptable, d'autant que l'État sollicite les ressources des employeurs publics et des SACI pour alimenter le Fonds national d'aide au logement. Vous justifiez cette décision non seulement par l'évolution modérée des loyers mais aussi par la baisse du chômage.
S'agissant du chômage, il faut à mon sens se garder de tout triomphalisme, le nombre d'allocataires du RMI et celui des salariés en contrat précaire ne cessant en effet de progresser.
Quant aux loyers, parlons-en ! Au cours de cette année, ils ont augmenté en moyenne de 2,7 %, et les charges de 5 %. Selon la FNAIM, les loyers des appartements auraient même progressé de 4,6 % par an depuis 2000, soit largement le double de l'inflation. Il faut ajouter à ces chiffres la hausse des primes d'assurances et de la facture énergétique : le prix du gaz a augmenté de 25 % en 2005 tandis que celui du fioul a bondi de 43 % en deux ans.
Dans ce contexte, il n'est pas surprenant de constater que la part du logement n'a jamais été aussi élevée dans le budget des ménages, quelle que soit leur catégorie sociale. Selon les chiffres fournis par le bleu budgétaire, le taux d'effort net moyen des ménages est de 19,5 % pour les bénéficiaires de minima sociaux et de 27,4 % pour les salariés.
Mais la réalité est nettement plus inquiétante. La Fondation Abbé-Pierre estime que les plus bas salaires, c'est-à-dire un SMIC pour une personne isolée ou 1,5 SMIC pour un couple avec deux enfants, supportent un taux d'effort proche de 50 % dans le parc privé. Je vous laisse imaginer le montant du reste à vivre de ces ménages : le moindre incident peut les faire basculer dans une situation critique.
Dans le cadre de la discussion de ce qui allait devenir la loi ENL, j'avais proposé le blocage des loyers pendant une année et leur indexation sur les prix. Le nouvel indice, mis au point en 2005, est certes meilleur que le précédent, mais il n'est pas totalement satisfaisant, car il dépend toujours du coût de la construction.
Vous préférez répondre par une revalorisation de 1,8 % du barème des aides personnelles à compter du 1er janvier 2007, mais cela reste largement insuffisant pour compenser la hausse des loyers. Pourquoi ne pas envisager une indexation automatique de ce barème sur le nouvel indice du logement ?
Madame la ministre déléguée, il faut aussi rappeler le scandale que représente le seuil de non-versement de l'aide personnalisée au logement, que vous avez relevé, en 2004, pour le faire passer de 15 à 24 euros, privant ainsi 120 000 ménages d'une prestation qui pouvait atteindre jusqu'à 280 euros par an. Devant l'insistance de nombreux députés de tous bords, vous vous êtes engagée à proposer une solution « d'ici à l'examen du projet de budget au Sénat ». Nous y sommes ! Qu'avez-vous donc à nous annoncer ?
M. Gérard Delfau. Pour conclure sur ce point, j'aimerais dénoncer le mauvais procès que certains font aux aides personnelles, lesquelles auraient un coût trop élevé pour la collectivité. Certes, elles sont coûteuses, mais, au-delà de l'approche strictement financière, c'est en toile de fond l'incapacité des pouvoirs publics à maîtriser les loyers et à réguler le marché qui est en cause.
Ce débat souligne en tout cas que l'enjeu central est celui du développement d'une offre de logement accessible, mais diversifiée, c'est-à-dire correspondant à l'ensemble de la demande sociale.
Or, si je reconnais volontiers que le rythme de la construction s'est amélioré, la structure des logements financés est loin de correspondre aux besoins des ménages qui en ont le plus besoin. Ainsi, madame la ministre déléguée, vous projetez en 2007 la construction de 37 000 logements PLS contre seulement 6 500 logements PLA-I, alors que les deux tiers des demandeurs ont des ressources inférieures à 60 % des plafonds PLUS.
Cette tendance inquiétante n'est d'ailleurs pas nouvelle et elle devrait s'accentuer avec la mise en oeuvre du plan de cohésion sociale. Notre collègue Valérie Létard indique ainsi dans son rapport que la part des logements financés par des PLS, c'est-à-dire des logements intermédiaires, est passée de 9,7 % en 2000 à près de 30 % en 2005 et devrait même atteindre 40 % en 2008 et en 2009.
En outre, l'attribution de ces logements est trop faiblement encadrée pour les bailleurs privés. Si la première attribution est contrôlée, qu'en est-il ensuite ? Les difficultés de suivi risquent d'en faire des logements sociaux bien éphémères.
Quoi qu'il en soit, le nombre exorbitant de demandeurs de logement en attente - plus d'un million - appelle une mobilisation d'urgence en faveur d'un logement social à bon marché.
Dans le cadre de la loi portant engagement national pour le logement, nous avions été nombreux, à gauche et à l'UDF, à proposer d'affecter un coefficient supérieur aux logements PLA-I ou PST, pour inciter les communes qui entrent dans le champ de l'article 55 de la loi SRU à en construire.
Il nous a été opposé toute une batterie d'arguments, qui traduisent, au fond, le refus pur et simple de faire participer plus de communes aux efforts de mixité sociale. Malheureusement, ce principe semble en panne : sur les 740 communes concernées par l'application de la loi SRU, un tiers ont réalisé moins de 50 % de leurs objectifs et près d'une centaine n'ont strictement rien entrepris pour rattraper leur retard. Ce sont finalement les communes disposant déjà du plus fort taux de logements sociaux qui supportent l'effort de construction, masquant l'incurie des autres.
Une récente enquête menée par TNS-SOFRES l'a montré, une grande majorité de Français, surtout des sympathisants de droite, ont bien du mal à accepter l'idée que la mixité sociale se fasse dans leur environnement immédiat : cela ne devrait pas inciter certains élus à faire « chauffer » les pelleteuses... Pire encore, lors de l'examen du projet de loi ENL, nous avons dû batailler ferme pour empêcher le « détricotage » de l'article 55 de la loi SRU par la majorité.
Pour en revenir à ce projet de budget, je constate aujourd'hui la mutation du financement de la politique du logement, lequel s'oriente en effet de plus en plus vers des aides fiscales et implique toujours davantage les partenaires de l'État, notamment les collectivités territoriales et le 1 % logement.
Je ne suis pas opposé, par principe, aux dépenses fiscales, à condition que leur efficacité fasse l'objet d'une évaluation annuelle et qu'elles ne profitent pas exagérément aux plus favorisés. Or, comment justifier la réduction des aides à la personne, alors qu'explosent, dans le même temps, les avantages fiscaux accordés, sans contrepartie, aux investisseurs privés ?
Ainsi le coût du dispositif « Robien » est-il estimé à 400 millions d'euros en 2007, contre 300 millions d'euros l'année dernière. Ses effets pervers sur la construction de logements sociaux ne sont plus à démontrer. En favorisant notamment la hausse des prix, ce dispositif aura contribué, avec l'aide de l'État, à fabriquer une autre ségrégation sociale, par l'éviction des pauvres de toutes les zones urbanisées marquées par cette mécanique inflationniste.
Quant aux nouveaux dispositifs « Borloo », ils contiennent, certes, une contrepartie, mais ne répondent en rien aux besoins en logement des plus démunis puisqu'ils favorisent le parc locatif privé à loyers intermédiaires.
M. Roland Muzeau. Tout à fait !
M. Gérard Delfau. Pour conclure, madame la ministre déléguée, vous l'aurez sans doute compris, je n'approuve pas votre projet de budget.
Je reconnais vos efforts, mais votre politique du logement ne répond pas véritablement aux défis social et territorial auxquels elle est confrontée. Elle n'y répond pas, d'abord parce que l'effort de la collectivité publique est en baisse et qu'il est orienté vers les composantes les moins sociales de la construction. Elle n'y répond pas, ensuite, parce que la répartition de la construction ne corrige pas les déséquilibres territoriaux. Elle n'y répond pas, enfin, parce que l'État ne se donne pas les moyens d'assurer la cohérence de l'aide publique sur l'ensemble du territoire national et, notamment, dans les grandes agglomérations. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Monsieur le président, madame la ministre déléguée, mes chers collègues, depuis plusieurs années, les crédits de la mission « Ville et logement » connaissent un certain nombre d'évolutions pour le moins contrastées, d'autant que le champ des interventions qu'elle recouvre est lui-même soumis à des mouvements tout aussi sensibles.
Si nous prenons ce projet de budget à la lettre et que nous nous en tenons donc au montant des crédits engagés sur l'ensemble de la mission, le paradoxe est flagrant : les autorisations d'engagement et les crédits de paiement diminuent en effet respectivement de 1,03 % et de 7,32 %.
Une lecture programme par programme permet de constater que cette baisse globale trouve son origine dans la réduction des crédits dévolus au financement des aides personnelles au logement, pour à peu près 200 millions d'euros, et des crédits du programme « Développement et amélioration de l'offre de logement », pour environ 150 millions d'euros. Un redéploiement de crédits est mis en oeuvre en faveur du programme « Rénovation urbaine », qui voit sa dotation augmenter de 150 millions d'euros.
Une conclusion rapide semble donc s'imposer : hors du PNRU, point de salut ! Il semble en tout cas très difficile de développer réellement l'offre de logement en dehors des quartiers considérés comme prioritaires au titre de la politique de la ville.
On pourrait se féliciter de l'effort particulier que l'État semble accomplir, s'il ne s'agissait, en réalité, que de respecter la norme même du programme national de rénovation urbaine, dont les financements sont, pour une bonne part, gagés sur des ressources extrabudgétaires. En effet, comment ne pas pointer qu'une grande part des moyens de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine procèdent du prélèvement autoritaire de ressources sur les collecteurs du 1 % logement, sur les fonds de la Caisse des dépôts et consignations, ou même, comme une discussion récente l'a encore montré, sur les sociétés coopératives d'accession sociale à la propriété ?
En outre, au sein même du présent projet de loi de finances, le Gouvernement ajuste à la baisse les conditions d'attribution des aides personnelles au logement et met l'État en situation de se débarrasser d'une partie du financement du Fonds national d'aide au logement. Il n'est qu'à lire les articles 23 et 62 pour le constater, et c'est au travers des « économies » ainsi réalisées qu'il dégage les moyens pour financer la rénovation urbaine.
Loin de nous l'idée de ne pas considérer positivement l'importance de la politique de rénovation urbaine, mais force est de constater que le « bricolage » budgétaire et fiscal qui préside à son financement ne peut qu'inquiéter tous ceux qui, notamment au niveau local, sont attachés à la réussite de la politique de la ville et qui sont désireux de répondre aux graves problèmes de logement de nos concitoyens.
D'autant que, dans la documentation, à côté de la dépense budgétaire directe que retracent les crédits de la mission « Ville et logement », figure aussi la dépense fiscale associée aux différents programmes, dont le coût budgétaire est de plus en plus important. Pour 2007, l'ensemble de la dépense fiscale de la mission s'élèvera, en effet, à environ 11 249 millions d'euros, à la suite, entre autres, de la réduction des taux de TVA sur les travaux et du coût grandissant des dispositifs incitatifs à l'investissement immobilier, qu'il s'agisse du « Robien » ou du « Borloo populaire ».
Il faut cependant noter, alors même que ce caractère incitatif n'est pas retracé dans le cas qui nous intéresse, que le bleu budgétaire ne précise ni les conséquences financières du dispositif dit des « foncières » ni la globalité des ajustements de fiscalité découlant de l'application du régime des plus-values de cessions de logements.
La simple approche systémique de l'ensemble de la dépense fiscale liée au logement devrait donc intégrer, de notre point de vue, l'ensemble des conséquences du traitement fiscal de l'immobilier d'habitation, puisque tout cela participe de la constitution de l'offre de logement et des tensions qui peuvent apparaître dans ce secteur.
Qu'il s'agisse des modalités d'imposition des plus-values, de l'allégement des droits de mutation ou encore du mode de traitement des revenus fonciers, notamment l'imputation des déficits, bien des dispositions conduisent en réalité à majorer par principe la dépense publique pour le logement. Pour ne donner qu'un seul exemple, la réforme de l'impôt sur le revenu permettra aux contribuables qui se partagent les 17,3 milliards d'euros de revenus fonciers nets de bénéficier, comme pour tous les autres revenus, de la disparition de l'abattement de 20 % et de son intégration dans le barème de l'impôt sur le revenu. La même observation vaut pour les personnes qui perçoivent les 7 milliards d'euros de revenus imposés sous le régime du micro-foncier.
De fait, la dépense fiscale pour le logement est singulièrement plus importante que la dépense budgétaire directe et présente la caractéristique de s'appuyer, entre autres, sur le relèvement constant du niveau des loyers et sur le développement de la spéculation immobilière, dont les effets sur l'offre de logement sont désastreux.
Nous avons certes vu sortir de terre plus de logements ces derniers temps que lors des exercices budgétaires précédents.
M. Roland Muzeau. Mais il y a un problème de taille : le marché du logement s'est tendu ; des programmes de pure optimisation fiscale ont vu le jour sans que les logements ainsi construits dans certaines régions soient occupés ; les opérations de vente à la découpe se sont multipliées depuis l'adoption de l'amendement « Marini » sur les foncières. Je ne sais pas, monsieur le rapporteur général, si le statut des foncières a facilité le développement de l'activité du bâtiment, mais le fait est qu'il a au moins nourri l'actualité juridique avec le développement de la conflictualité en matière de droit au logement !
Il a aussi occasionné - devons-nous le souligner ? - un processus constant de hausse de l'immobilier, processus d'exclusion accentuée des plus modestes de l'exercice du droit au logement, ayant aussi mené, paradoxalement, à une réévaluation des actifs immobiliers, conduisant nombre de propriétaires à acquitter l'impôt de solidarité sur la fortune. L'ISF vous doit, monsieur le rapporteur général, une part de sa progression ces dernières années et les finances publiques peuvent vous en être reconnaissantes !
Mais, trêve d'ironie facile, la vérité est plus crue.
La location d'un appartement à Paris coûte aujourd'hui 19,5 euros le mètre carré, ce qui représente une hausse de 4,2 % par rapport à l'an dernier, et celle d'un appartement à Neuilly 20,5 euros le mètre carré, soit une hausse de 9,5 %, tandis que des hausses très élevées sont observées dans des communes de mon département, comme Antony, Puteaux ou La Garenne-Colombes.
L'explosion du niveau des loyers affecte même de plus en plus des communes pourtant moins huppées, comme Gentilly et le Kremlin-Bicêtre, dans le Val-de-Marne, ou la Courneuve, en Seine-Saint-Denis. Dans cette dernière localité, louer dans le secteur dit « libre » un logement de 70 mètres carrés coûte actuellement plus de 950 euros par mois !
C'est donc à partir de ces réalités, particulièrement difficiles à vivre pour les familles de salariés et de demandeurs de logement, que nous devrions discuter et débattre des crédits de la mission « Ville et Logement ».
L'application de la loi du marché génère aujourd'hui l'exclusion, la discrimination et les inégalités.
Ce sont là les objectifs que nous devrions nous fixer, et qui sont malheureusement par trop absents de la politique qui nous est présentée.
Nous regrettons enfin l'absence de toute prise de position sur le rapport rendu public par notre collègue Pierre André. Le Gouvernement n'a retenu aucune des soixante-dix propositions qu'il contient s'agissant de la politique de la ville. Cela est tout à fait regrettable, madame la ministre, d'autant qu'un certain nombre de ces propositions étaient d'ordre non pas financier, mais organisationnel.
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après de la mission « Travail et emploi », notre assemblée est invitée à se prononcer sur l'action publique de l'État en matière de logement. En une journée, nous aurons ainsi traité des deux plus importantes préoccupations de nos concitoyens : travailler et avoir un toit. Ces deux problématiques soeurs se rencontrent dans le même recul du pouvoir d'achat et la même difficulté de vie des Français aux revenus modestes et moyens.
Hélas ! je crains que les autorisations d'engagement proposées dans le présent budget n'apportent que des réponses insatisfaisantes, loin d'être à la hauteur de la crise du logement que notre pays traverse. Ainsi, j'évoquerai tout d'abord la fiscalisation croissante de l'effort de la nation en faveur du logement, avant d'aborder les déséquilibres des moyens consacrés à l'accroissement de l'offre de logements. Quant à la situation dramatique des aides à la personne, elle sera traitée tout à l'heure par mon collègue Jean-Pierre Caffet, lors des explications de vote.
S'agissant de la structure du financement public du logement, on observe une tendance régulière à la baisse des aides budgétaires, alors que les dépenses fiscales dans le domaine du logement ont sensiblement progressé, comme le démontre Thierry Repentin dans son rapport. Les aides fiscales s'élèveraient ainsi à 11,4 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2007, contre 8,9 milliards d'euros en 2001. C'est davantage que le total des aides budgétaires, qui représentent environ 9 milliards d'euros. C'est même 8,5 fois plus que les aides budgétaires à la pierre, qui s'élèvent à 1,3 milliard d'euros.
Pourtant, je ne saurais trop insister sur les effets néfastes d'un certain nombre d'avantages fiscaux, au premier rang desquels se trouvent les amortissements de défiscalisation, dont le rôle inflationniste sur l'évolution du marché immobilier ces dernières années n'est plus à démontrer. Rappelons par exemple qu'en Île-de-France, hors Paris intra-muros, les prix des logements ont doublé en sept ans.
En 2007, l'amortissement Robien devrait ainsi coûter à l'État 400 millions d'euros, soit quasiment le même montant que les sommes consacrées au financement des logements locatifs sociaux, c'est-à-dire 489,5 millions d'euros. C'est un comble quand on sait que la défiscalisation s'adresse exclusivement aux Français suffisamment aisés pour acheter un logement qu'ils n'habitent pas, le plus souvent d'ailleurs un logement haut de gamme loué à un prix élevé, à tel point que bon nombre des programmes sortis de terre avec précipitation peinent aujourd'hui à trouver des locataires.
J'ajoute qu'un logement financé en amortissement Robien coûte bien plus cher à la nation qu'un logement social. L'État consacre en effet au premier jusqu'à 33 300 euros par an - 41 500 pour un amortissement Borloo -, alors qu'un logement social type PLUS n'est financé par l'État qu'à hauteur de 20 300 euros, toutes aides confondues, fiscales, budgétaires et de taux.
Cette conception du logement en tant que produit financier destiné à des investisseurs fortunés ne correspond pas à notre conception d'une politique publique responsable en faveur du logement pour tous.
Un autre effet de structure que je souhaite souligner concerne la part que prennent aujourd'hui les collectivités territoriales dans le financement du logement. Le rapport de Thierry Repentin met ainsi en évidence que l'effort des collectivités territoriales a crû de manière spectaculaire entre 2001 et 2004 : leurs aides en la matière sont passées de 398 millions d'euros à 749 millions d'euros, soit un quasi-doublement.
Interpellés quotidiennement par les habitants et en prise directe avec les difficultés croissantes que ceux-ci rencontrent pour se loger, les élus locaux ont été amenés à intervenir massivement dans les politiques publiques de l'habitat.
Suppléant le désengagement de l'État, les collectivités territoriales ont investi tout à la fois l'aide à la personne - les fonds de solidarité pour le logement sont désormais essentiellement financés par les départements, après le retrait de l'État et des ASSEDIC - et l'aide à la pierre, notamment au travers du financement des surcharges foncières sans lesquelles, dans les zones les plus tendues, aucun programme de logement social ne pourrait voir le jour. Cette évolution doit interpeller les parlementaires que nous sommes : les budgets des collectivités territoriales sont de plus en plus difficiles à boucler et les arbitrages budgétaires locaux qui ne manqueront pas d'advenir s'annoncent bien délicats.
En tout état de cause, l'effort de la nation en faveur de la construction de logements est plus que jamais indispensable.
J'en viens à la deuxième partie de mon propos sur les aides à la pierre.
Le programme « Développement et amélioration de l'offre de logement » est le second de la mission consacrée à la politique du logement. Les crédits qui y sont affectés s'élèvent à 1,23 milliard d'euros, dont 1,03 milliard est consacré à la construction locative et à l'amélioration du parc de logements. La crise du logement que nous traversons étant notamment quantitative, ce volet du programme revêt une importance majeure et mérite un examen attentif.
Ainsi, l'objectif de construction neuve de logements sociaux est fixé pour 2007 à 100 000 unités, c'est-à-dire au même niveau qu'en 2006. Sur cette base, l'objectif est de financer 63 000 logements en PLUS ou PLAI et 27 000 logements en PLS, auxquels s'ajoutent 10 000 logements construits par l'Association Foncière Logement. Si le groupe socialiste se félicite de l'objectif général de construction, il reste néanmoins réservé sur la répartition des crédits entre PLUS et PLAI, d'une part, et PLS, d'autre part.
Sans dénier l'intérêt des PLS pour le développement d'une offre locative intermédiaire dans les zones les plus tendues ou dans les quartiers où il est nécessaire de promouvoir une certaine mixité sociale « par le haut », les sénatrices et sénateurs socialistes considèrent que l'urgence est à la réalisation de logements abordables, c'est-à-dire de logements PLUS et PLAI, dont l'objectif de construction nous semble insuffisant.
Je voudrais rappeler ici qu'un logement PLUS permet de proposer un loyer inférieur de 40 % environ au prix du marché, de 30 % lorsqu'il s'agit d'un PLAI, et est accessible à 68 % des Français. À l'inverse, le loyer d'un PLS est positionné à 60 % du prix de marché.
Notre conviction est que la très grande majorité des demandeurs de logements sociaux, estimés à 1,78 million en 2005, souhaitent avant tout acquitter un loyer abordable. À titre d'exemple, dans la boucle nord des Hauts-de-Seine, environ la moitié des demandeurs de logement social vivent en dessous du seuil de pauvreté. L'enjeu est donc bien de concentrer l'effort public sur la construction de logements sociaux en PLUS et PLAI.
Quant au financement des aides à la pierre, je regrette qu'il ne soit pas à la hauteur des montants prévus par le plan de cohésion sociale, montants qui, au surplus, étaient alors programmés en euros constants. Comme le montre le rapport de Thierry Repentin, l'évolution des autorisations d'engagement et des crédits de paiement, tout en se situant en dessous de la programmation de la loi, n'aura donc pas suivi, cette année encore, l'évolution de l'inflation.
Le budget des SACI a certes été mis à contribution pour 2007, puisque 250 millions d'euros de fonds propres de ces sociétés ont été utilisés pour rembourser une partie de la dette des HLM. Or, par définition, ce « coup de pouce » n'est évidemment pas pérenne et nous nous interrogeons quant aux sources de financement qui seront mobilisables l'an prochain afin de garantir un niveau élevé de crédits d'engagement.
Je ne veux pas terminer cette allocution sans vous faire part de toute mon inquiétude sur l'avenir du livret A.
Outre un produit d'épargne très populaire détenu par 46 millions de nos concitoyens pour un encours total de 113 milliards d'euros, le livret A est en effet la clef de voûte du financement du logement social dans notre pays. Le mécanisme est le suivant : la Caisse des dépôts et consignations centralise les fonds collectés par le livret A et les utilise, à hauteur de 75 % environ, pour effectuer les prêts à long terme qui permettent aux organismes d'HLM de réaliser des logements sociaux. Il s'agit donc de l'outil principal de financement du logement social.
Ce système particulièrement ingénieux, qui permet de transformer une épargne liquide en prêts à très longue durée, de trente à cinquante ans, est aujourd'hui menacé. Vous savez certainement que plusieurs établissements bancaires français et étrangers se sont regroupés pour déposer une plainte devant la Commission européenne afin d'obtenir le droit de distribuer le livret A, aujourd'hui disponible exclusivement dans les réseaux de La Poste et des caisses d'épargne.
Soyons clairs : si d'autres banques souhaitent distribuer le livret A, ce n'est sûrement pas pour attirer la clientèle modeste qui l'utilise comme un porte-monnaie, effectuant plusieurs centaines d'opérations, parfois de très faible montant et pour des encours qui peuvent être inférieurs à 150 euros, mais bel et bien les clients disposant d'une épargne importante.
Cette banalisation risque donc de déstabiliser le système. Il y a fort à parier en effet que les banques conseillent progressivement à leurs clients de réorienter leur épargne vers d'autres produits, ce qui diminuerait l'épargne disponible pour le logement social. Ajoutons enfin qu'avec 46 millions de titulaires les marges de développement de ce produit sont plus que limitées.
Un effet d'éviction est donc à craindre au détriment du logement social. Si une partie des 80 milliards de prêts octroyés par la Caisse des dépôts et consignations aux organismes d'HLM est détournée vers d'autres produits d'épargne et échappe ainsi au logement social, comment celui-ci sera-t-il financé ? Ce ne sera certes pas le milliard consacré aux aides à la pierre dans le budget de l'État qui compensera cette perte.
C'est pour défendre auprès de la Commission européenne ces deux arguments d'intérêt général - financement du logement social et accès de tous aux services bancaires - et, en conséquence, le maintien du duopole formé par La Poste et les caisses d'épargne, qu'une délégation de sénatrices et sénateurs socialistes de la commission des finances et de la commission des affaires économiques se rendra à Bruxelles le 5 décembre prochain. Je souhaite le plein succès de leur démarche.
En conclusion, j'aborderai le sujet du nouveau prêt à taux zéro. Son coût, 770 millions d'euros, est plus qu'important pour une efficacité sociale toute relative : s'appliquant trop largement en raison de plafonds de ressources très élevés, il conduit à un saupoudrage peu efficace de l'argent public sans pour autant constituer une aide déterminante pour les ménages qui rencontrent des difficultés à accéder à la propriété. Tout au plus constitue-t-il un soutien public onéreux à des ménages qui sont, de toute façon, en mesure d'acheter un logement au niveau de prix actuel du marché immobilier.
Ainsi, malgré quelques évolutions positives, la configuration des crédits logement dans le projet de loi de finances pour 2007 ne prend pas la mesure des besoins - des logements abordables, de qualité, pour tous - et ne permettra donc pas de répondre aux difficultés quotidiennes de logement que rencontrent la majorité des Français. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Dominique Braye.
M. Dominique Braye. Je crois, madame la ministre, que vous pouvez être légitimement fière du budget que vous nous présentez aujourd'hui. En effet, celui-ci s'inscrit pleinement dans le prolongement de l'ambitieuse politique de la ville et du logement initiée en 2002 par notre majorité et mise en oeuvre par plusieurs lois adoptées au cours de la présente législature.
Je fais bien sûr référence à la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine, à la loi de programmation pour la cohésion sociale et, tout récemment, à la loi portant engagement national pour le logement. Ces textes successifs ont tracé des perspectives claires et permis de concevoir des outils adaptés pour sortir notre pays de la grave crise du logement qu'il traverse. Ce budget démontre, cette année encore, que les moyens financiers sont à nouveau au rendez-vous.
En matière de rénovation urbaine, tout d'abord, le cap a été fixé par la loi du 1er août 2003, qui a créé l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, l'ANRU, chargée de mettre en oeuvre le programme national de rénovation urbaine, prolongé jusqu'en 2013 par la loi portant engagement national pour le logement. Cette agence, dotée de moyens financiers sans précédents, a la lourde tâche de permettre la requalification des quartiers les plus en difficulté.
Dans le domaine du logement, l'ANRU participe au financement des programmes de démolition-reconstruction.
Étant moi-même élu d'une agglomération qui concentre près de 37 % de logements sociaux et plus de 50 % dans sa ville-centre, Mantes-la-Jolie, et qui a procédé, au cours des deux dernières années, à la destruction de 753 logements sociaux anciens, je sais tout le précieux soutien que l'agence a pu apporter aux projets de rénovation urbaine menés sur notre communauté d'agglomération. Celle-ci doit détruire1 154 logements entre 2005 et 2008 et procéder aux reconstructions qui en découlent.
Je profite d'ailleurs de cette occasion, madame la ministre, pour vous faire part d'une difficulté rencontrée par les communes qui mènent ce type d'opérations. En effet, nombre d'entre elles ont obtenu, pour réaliser leurs projets de rénovation urbaine, des subventions importantes de l'ANRU. Or, dans de nombreux cas, on constate des retards importants de paiement, ce qui occasionne des difficultés de trésorerie parfois très préoccupantes pour ces collectivités locales.
Cela provient manifestement d'une lourdeur du système de gestion que les élus ont d'autant plus de peine à comprendre et à accepter que l'ANRU dispose d'une trésorerie confortable.
Pouvez-vous nous garantir, madame la ministre, que ce problème sera très rapidement pris en compte et qu'une solution pourra y être apportée très prochainement ?
S'agissant des crédits consacrés plus spécifiquement à la politique du logement, nous avons dans ce domaine toutes les raisons de nous féliciter. En effet, tant les réalisations que les moyens budgétaires affectés aux différentes actions sont, là aussi, au rendez-vous.
Pour ce qui est du parc locatif social, nous nous sommes fixé en 2005 un objectif ambitieux - j'ai toujours plaisir à le rappeler - en vertu duquel 500 000 logements locatifs sociaux seraient construits en cinq ans. Pour l'année 2005, les résultats ont déjà été très bons, puisque plus de 80 000 logements sociaux ont été construits. Pour l'année 2006, je serais tenté de dire qu'ils sont excellents puisque le chiffre record de 95 000 logements financés devrait être atteint.
La réalisation de ces bons résultats relève non pas d'un miracle, mais bel et bien d'une mobilisation sans précédent de tous les acteurs du monde du logement afin de participer au redressement de la construction dans notre pays, qu'il s'agisse des bailleurs sociaux, des collectivités territoriales, mais aussi du Gouvernement, en affectant des crédits budgétaires importants à cette action.
Ainsi, entre 2005 et 2007, les bailleurs sociaux auront reçu plus de 1,6 milliard d'euros de crédits de paiement, ce qui est parfaitement conforme à la programmation du plan de cohésion sociale.
En ce qui concerne l'équilibre financier des opérations locatives sociales, force est de constater - tous les élus ici le savent bien - que, dans un contexte de stabilité de la subvention budgétaire moyenne par logement social construit et de hausse du taux du livret A, les finances des collectivités territoriales sont sollicitées de manière plus importante.
Toutefois, nous ne devons pas oublier que la durée d'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties a été portée de quinze ans à vingt-cinq ans et que, surtout, grâce à la commission des affaires économiques de notre Haute Assemblée, les pertes de recettes pour les collectivités territoriales liées aux quinze premières années d'exonération sont désormais intégralement compensées pour les logements financés entre le 1er décembre 2005 et le 31 décembre 2009, à l'exception des PLS.
Par ailleurs, les efforts ont également porté sur le parc privé. Ainsi, l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, s'est vue attribuer des crédits supplémentaires afin de contribuer à la production de 200 000 logements locatifs à loyers maîtrisés ou réglementés et à la remise sur le marché de logements vacants.
De ce point de vue, les crédits de l'ANAH dans le projet de loi de finances pour 2007 sont encore une fois au rendez-vous, avec 527 millions d'euros en moyens d'intervention.
En outre, la loi portant engagement national pour le logement a amplifié cet effort avec la création d'avantages fiscaux, que je ne vous rappellerai pas puisque tout le monde les connaît.
Enfin, dernier maillon essentiel de la chaîne du logement, l'accession à la propriété a été stimulée au cours des dernières années. Je pense, bien entendu, au nouveau prêt à taux zéro qui a vu son champ d'application substantiellement élargi avec son ouverture à l'habitat ancien, et ce sans aucune condition.
Alors que seuls 80 000 prêts à taux zéro ont été émis en 2004, environ 200 000 prêts à taux zéro ont été accordés à nos concitoyens en 2005 et ce chiffre devrait atteindre 250 000 en 2006.
Comme je l'ai souligné à de nombreuses reprises à l'occasion de précédents débats, je ne considère pas sain qu'un pays comme le nôtre ait consacré pendant aussi longtemps autant de ressources financières au développement d'une offre de logements locatifs quand l'aspiration première de chacun de nos concitoyens est de parvenir, le plus rapidement possible, à l'accession à la propriété. De ce point de vue, je ne peux que me féliciter des outils mis récemment en place au service de cette politique.
À cet effet, avec la loi ENL, dans le cadre des opérations d'accession sociale à la propriété recevant une aide des collectivités territoriales, les ménages justifiant de ressources inférieures au plafond des PLUS ont droit à un prêt à taux zéro majoré de 15 000 euros.
En outre, le programme des maisons à 100 000 euros a lui aussi été facilité par une amélioration des conditions juridiques autorisant maintenant la dissociation de l'acquisition du bâti et du foncier.
Enfin, même si cette politique doit être strictement réfléchie et encadrée, nous avons, toujours avec la loi ENL, facilité l'acquisition des logements HLM par leurs occupants avec la création d'une décote pouvant atteindre jusqu'à 35 %.
Vous l'aurez compris, madame la ministre, mes chers collègues, j'accueille avec le plus grand enthousiasme ce budget qui vient prolonger l'effort entrepris depuis 2002.
Vous me permettrez toutefois, madame la ministre - car j'aurais certainement des remarques de la part de mes collègues si je n'abordais pas ce sujet - d'émettre un souhait : il m'apparaît nécessaire, dans le domaine du logement, de renforcer les actions en matière de développement durable.
Nous le savons tous, le secteur résidentiel en France constitue l'une des principales sources d'émission de gaz à effet de serre. L'isolation, les systèmes de chauffage de la plupart des logements anciens ont été conçus à une époque où ces problématiques n'étaient pas suffisamment prises en compte par les acteurs.
Je me réjouis, bien entendu, de la récente prise de conscience en la matière. Toutefois, il me semble indispensable d'aller encore plus loin s'agissant du niveau des aides pouvant être accordées tant aux propriétaires de logement qu'aux bailleurs privés ou sociaux.
Je formulerai également un regret : au moment de la discussion de la loi ENL, nous avions proposé, sans méconnaître les surcoûts liés à une telle suggestion, que les logements sociaux restant à construire dans le cadre du plan de cohésion sociale puissent respecter les normes de qualité environnementale. Nous n'avons malheureusement pas été suivis.
Toutefois, à mon sens, l'essentiel de nos efforts doit porter sur le parc ancien. Il s'agit d'un vaste chantier qu'il nous appartient de prendre à bras-le-corps.
Cette remarque étant faite, je tenais néanmoins à vous préciser, madame la ministre, que le groupe UMP votera en faveur des crédits inscrits au sein de la mission « Ville et logement ». (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité. Comme vous n'avez pas manqué de le souligner, madame, messieurs les rapporteurs, il s'agit, pour la deuxième année consécutive, d'un budget historique qui marque clairement la priorité donnée par notre gouvernement à la politique de la ville.
Avec 1,15 milliard d'euros en autorisations d'engagement et 1,18 milliard d'euros en crédits de paiement, le budget « Ville » connaît une progression de 15 % par rapport à 2006. Ce budget se caractérise ainsi par un effort significatif, aussi bien sur le volet humain que sur le volet urbain de la politique de la ville.
Deux priorités sont mises en avant.
La première concerne l'accélération de la réalisation du programme national de rénovation urbaine.
Pour faire face aux besoins, les moyens de paiement apportés à l'ANRU doublent quasiment par rapport à 2006 : aux 356 millions d'euros de l'État, il convient d'ajouter 100 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement qui proviendront de la Caisse des dépôts et consignations, 100 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement qui proviennent des SACI. D'ailleurs, ces crédits ont d'ores et déjà été versés, ce qui témoigne de notre volonté de tenir nos engagements.
Monsieur Dallier, ces engagements seront tenus également pour 2006 et les 60 millions d'euros auxquels vous faisiez allusion, et qui n'ont pas encore été versés à l'ANRU, le seront. Les autorisations d'engagement nécessaires seront déployées au profit du programme « Rénovation urbaine » d'ici à la fin de l'exercice. Elles proviendront des autorisations d'engagement non utilisées du programme « Équité sociale et territoriale et soutien » au titre des ZFU, dont le montant s'est effectivement révélé supérieur aux besoins.
Les différents rapporteurs ont également mis en avant la nécessité d'inscrire ces moyens dans la durée et de les sanctuariser pour faire face à l'augmentation prévisible des crédits de paiement.
L'idée de créer un fonds pour la rénovation urbaine, émise par la mission commune d'information dont le rapporteur était M. Pierre André, a effectivement été suivie, puisque j'ai demandé à la délégation interministérielle à la ville et au développement social urbain, la DIV, et à la direction générale de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction, la DGUHC, de déterminer les modalités de mise en place de ce fonds.
Monsieur Muzeau, il s'agit là d'une première application du rapport sénatorial. Le Gouvernement a d'ailleurs étudié d'autres propositions concernant l'évaluation de la politique de la ville et l'expertise du fonds de rénovation urbaine, qui ont été demandées à la DIV et à la DGUHC.
Pour en revenir à l'ANRU, les moyens alloués à l'Agence sont garantis dans la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine. C'était là, d'ailleurs, une nouveauté tout à fait importante de ce texte.
De plus, le comité interministériel des villes du 9 mars dernier a décidé, d'une part, que les autorisations d'engagement en faveur du programme national de rénovation urbaine ne pourraient être inférieures à 600 millions d'euros par an de 2007 à 2009 et, d'autre part, que les besoins de trésorerie de l'ANRU feraient l'objet d'une évaluation avant 2008.
Je voudrais également rappeler que les paiements à effectuer par l'ANRU seront totalement couverts en 2007.
La dernière estimation du fonds de roulement de l'Agence à la fin de l'année 2006 est de 679 millions d'euros, auxquels s'ajouteront les 456 millions d'euros de crédits de paiement inscrits au budget 2007, les 100 millions d'euros provenant des SACI ayant d'ores et déjà été versés.
L'ANRU recevra également, au cours de l'année 2007, 456 millions d'euros du 1 % logement. Grâce à l'article 62 bis du projet de loi de finances, qui prévoit un versement exceptionnel de 25 millions d'euros de la Caisse de garantie du logement locatif social, la CGLLS, la participation de la Caisse des dépôts et consignations et de la CGLLS atteindra, par ailleurs, 51 millions d'euros en 2007.
Les versements de trésorerie qui seront ainsi effectués au profit de l'ANRU atteindront au total 963 millions d'euros au cours de l'année 2007, pour un montant de paiements à effectuer estimé à 902 millions d'euros. Je précise que ce montant inclut l'effet, estimé à 300 millions d'euros, des avances de trésorerie qui seront désormais versées aux opérations de rénovation urbaine. Cela correspond tout à fait à ce que vous avez souligné, monsieur Braye.
Le fonds de roulement de l'Agence sera de 740 millions d'euros à la fin de l'année 2007. Cela permettra à l'ANRU d'aborder dans de bonnes conditions l'année 2008, au cours de laquelle nous savons qu'effectivement il y aura un pic du montant des paiements, puisque ce montant est d'ores et déjà estimé à 1 026 millions d'euros.
Notre souci, comme vous l'avez souligné, madame Létard, doit être bien sûr de mobiliser davantage les départements et les régions autour de cet enjeu de la rénovation urbaine. C'est d'ailleurs dans cet esprit que, lors des discussions des contrats de projet État-région en cours d'élaboration, nous avons souhaité que le sujet de la rénovation urbaine puisse être évoqué.
Des conventions de partenariat seront conclues entre les régions et l'ANRU pour la mise en oeuvre de ce volet. D'ores et déjà, quatre conventions régionales ont été signées : il s'agit du Nord-Pas-de-Calais, de la Bretagne, de la Basse-Normandie et de l'Auvergne ; votre région fait donc figure de modèle, madame Létard. Deux conventions ont également été signées sur le plan départemental et une convention avec la région Rhône-Alpes sera signée dans quelques jours.
Monsieur Madec, je vous ai écouté avec intérêt et je voudrais revenir sur les chiffres concernant les dossiers présentés à l'ANRU. La loi, qui a maintenant trois ans, est aujourd'hui en application, puisque 221 dossiers concernant 385 quartiers sont déjà passés en comité d'engagement et font l'objet de travaux. Cela concerne 2 460 000 habitants, et des réunions techniques partenariales, qui consistent à préparer les dossiers avant la commission d'engagement, ont eu lieu pour 292 dossiers relatifs à 484 quartiers.
C'est dire si, aujourd'hui, les dossiers présentés à l'ANRU sont étudiés, suivis, font l'objet d'engagements et permettent de démarrer des travaux importants.
S'agissant de la mise en oeuvre du programme, notre préoccupation est que le « guichet unique » créé avec l'ANRU se traduise par une véritable simplification pour les acteurs de terrain. C'est pourquoi, monsieur Braye, nous avons demandé à l'ANRU de s'employer à simplifier les procédures de paiement. Une procédure accélérée sera effectivement mise en place dès 2007 permettant le versement d'avances et d'acomptes représentant jusqu'à 70 % du coût du projet, dans le cadre d'une instruction extrêmement simplifiée. C'est là, je crois, une mesure attendue par tous. Elle permettra de lisser encore plus les besoins de paiement auprès de l'Agence.
Les conditions de relogement des habitants sont également une préoccupation forte du Gouvernement. C'est d'ailleurs dans cet esprit que je me suis engagée à réaliser une analyse des opérations de relogement sur l'ensemble des programmes de l'ANRU afin d'en mesurer les effets.
Cette enquête, conduite par la DIV, est en cours ; elle devrait donner ses premiers résultats d'ici à mai 2007.
Par ailleurs, une réflexion est menée au sein de l'ANRU afin d'améliorer les conditions de financement des reconstructions et faciliter le maintien des loyers au même niveau. Il s'agit, je tiens à le souligner, d'une suggestion émanant de la mission sénatoriale.
L'accompagnement humain des projets de rénovation urbaine est indispensable, et ce à toutes les étapes, qu'il s'agisse de la préparation, de la consultation des habitants ou du nécessaire travail de mémoire. Du reste, le règlement de l'ANRU prévoit la consultation obligatoire des habitants. *
J'insiste également sur la charte d'insertion, essentielle à mes yeux, qui a pour objectif de permettre à certains habitants d'être recrutés sur les chantiers de rénovation de leur quartier.
Beaucoup d'entre vous ont également souligné la nécessité, dans les quartiers faisant l'objet d'une rénovation urbaine, de parvenir à une réelle diversification de l'offre de logement. C'est la raison pour laquelle la règle est non pas de reconstruire l'ensemble des logements sociaux dans le même quartier, mais bien de réaliser une partie des reconstructions à l'échelle de l'agglomération.
C'est aussi dans le but de restaurer une certaine mixité et de favoriser les parcours résidentiels que le Gouvernement a décidé de renforcer l'accession sociale à la propriété dans les zones urbaines sensibles grâce à la baisse de la TVA à 5,5 % pour les constructions neuves.
La deuxième priorité de ce budget est la consolidation des moyens alloués à l'insertion sociale et professionnelle des habitants.
Les moyens exceptionnels inscrits au budget de 2006 sont consolidés et donc reconduits dans le projet de budget pour 2007. Le montant total des crédits atteint ainsi un niveau inégalé : près de 795 millions d'euros sont consacrés au programme « Équité sociale et territoriale et soutien ».
Sont affectés 190,9 millions d'euros au FIV et 93 millions d'euros, contre 83 millions d'euros en 2006, monsieur Madec, aux postes d'adultes-relais. En début d'année, nous disposions de 2 800 adultes-relais. Aujourd'hui, ils sont au nombre de 4 200. Le projet de budget pour 2007 prévoit 1 500 postes supplémentaires.
Par ailleurs, 112 millions d'euros, contre 99 millions d'euros, viendront soutenir la création des équipes de réussite éducative, avec un objectif de 500 projets en 2007, contre 380 en 2006. D'ores et déjà, 80 000 enfants bénéficient de ce programme.
En outre, 333 millions d'euros sont consacrés aux exonérations sociales en zones franches urbaines.
Enfin, l'augmentation de la dotation de solidarité urbaine atteindra 360 millions d'euros en 2007. Son impact se fait donc sentir très concrètement au niveau local.
Vous avez évoqué, madame Létard, le souhait de la commission de lancer une réflexion sur les règles de calcul de la DSU. Celui du Gouvernement est de conduire la réforme à son terme, en 2009, dans le cadre défini par la loi de programmation pour la cohésion sociale. Nous pensons en effet que la DSU a produit les résultats espérés en termes de péréquation, en améliorant considérablement la situation des communes à fortes charges et à faibles ressources, qui constituent la cible prioritaire de la réforme. Il s'agissait de rattraper des inégalités.
C'est pourquoi j'ai demandé aux préfets un bilan de l'utilisation de la DSU dans les communes de leur département. Les résultats sont en train de parvenir à la DIV. Nous avons pour projet, l'année prochaine, de travailler sur un cadre « standardisé » de rapport pour les collectivités locales, en cohérence avec le rapport prévu par la loi du 1er août 2003.
Par ailleurs, j'ai souhaité que la DSU soit « fléchée » dans les contrats urbains de cohésion sociale, afin de pouvoir mesurer son impact plus directement.
Afin de répondre à votre souci, monsieur André, de disposer d'un retour sur la ventilation des 80 millions d'euros supplémentaires qui ont abondé le FIV cette année, j'ai demandé à la DIV de réaliser, avec le concours des préfets, un bilan précis de l'affectation de ces crédits.
Ces éléments me conduisent naturellement à aborder la question des indicateurs et des objectifs de performance, qui a été soulevée par la plupart des rapporteurs : ils permettront de mettre en avant les résultats de la politique de la ville.
Force est de reconnaître que ces indicateurs ne sont pas complètement satisfaisants. Je souhaite, par conséquent, que la DIV poursuive son travail sur ce sujet, avec l'Observatoire des zones urbaines sensibles et les deux agences, afin de définir des indicateurs adaptés à l'action de ces dernières.
La centralisation de la gestion comptable au sein de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances devrait en effet permettre de disposer de données plus complètes et plus actualisées sur la mise en oeuvre des programmes.
Les moyens inscrits dans ce projet de budget seront mis en oeuvre dans un cadre totalement rénové, en application de la loi pour l'égalité des chances du 31 mars 2006.
L'année 2007 sera marquée par l'entrée en vigueur des nouveaux contrats urbains de cohésion sociale. Près de 400 millions d'euros de crédits seront contractualisés chaque année, sur trois ans, au travers de ces contrats, à comparer à l'annuité de 135 millions d'euros des contrats de ville sur la période 2000-2006.
Vous vous interrogiez, monsieur André, sur les enveloppes régionales prévisionnelles. Elles ont été déléguées à la fin du mois d'octobre aux préfets. Vous savez qu'elles comportent, en quelque sorte, plusieurs sous-enveloppes avec, d'un côté, le FIV, dont le montant est au moins équivalent à celui de l'année 2006 et, de l'autre, les crédits alloués aux équipes de réussite éducative et aux adultes-relais ; ceux-ci dépendent du contenu de chacun des projets. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je suis actuellement dans l'incapacité de vous indiquer le montant de l'enveloppe moyenne, puisque je ne connais pas encore les projets proposés.
Vous redoutez, madame Létard, que les moyens consacrés à la prévention de la délinquance soient détournés de leur objet avec la création du Fonds de prévention de la délinquance.
Je tiens à vous rassurer sur ce point : l'amendement gouvernemental, voté par l'Assemblée nationale, permet d'identifier clairement les moyens affectés à la prévention de la délinquance, sans remettre en cause le principe de « guichet unique » recherché au travers de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, puisque les crédits seront gérés par cette dernière.
Les crédits prévus pour les contrats urbains de cohésion sociale conserveront totalement leur vocation. Les ressources supplémentaires dont bénéficiera le fonds grâce à une partie du produit des amendes permettront de financer des actions de prévention au-delà de la géographie de la politique de la ville. Cette mesure faisait également partie des nombreuses demandes des parlementaires.
Les contrats urbains de cohésion sociale reposent sur quatre principes.
Premièrement, un cadre contractuel unique et une cohérence globale des actions menées à l'échelle de l'agglomération.
Deuxièmement, des priorités d'intervention qui s'articulent autour de cinq champs prioritaires : accès à l'emploi et développement économique, amélioration du cadre de vie, réussite éducative, prévention de la délinquance et citoyenneté, santé.
Troisièmement, une visibilité accrue des financements, en particulier pour les associations, avec la possibilité de conclure des contrats sur trois ans.
Enfin, quatrièmement, une évaluation systématique des actions, afin de s'assurer qu'elles sont opérationnelles et qu'elles ont une efficacité à moyen terme. Un pourcentage des financements sera réservé à cette évaluation.
Ces contrats sont l'occasion d'actualiser la géographie de la politique de la ville. La délégation interministérielle à la ville a réalisé à cet effet une véritable « photographie » de l'état des quartiers, qui a été transmise aux préfets. Ceux-ci peuvent ainsi déterminer la géographie des futurs contrats urbains de cohésion sociale.
Cette géographie vise à répondre à trois principes.
Il s'agit, d'abord, de prendre en compte non seulement des territoires marqués par un cumul de difficultés, exigeant un effort important de rattrapage, mais aussi des territoires présentant des signes de fragilité, et pour lesquels la politique de la ville a vocation à intervenir dans une optique préventive.
Il s'agit, ensuite, de préparer la sortie de la politique de la ville pour certains territoires.
Enfin, cette géographie doit être évolutive, d'où l'intérêt de l'évaluation et du suivi.
La signature des contrats est prévue pour la fin de cette année ou le début de l'année 2007. À l'évidence, l'élaboration de cette nouvelle contractualisation s'effectue dans le cadre d'un calendrier extrêmement serré. Une phase transitoire est donc prévue, afin de concilier ce calendrier et la nécessaire continuité des actions sur le terrain.
Les financements de ces contrats seront apportés par la nouvelle Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, dite ACSE, qui sera le pendant de l'ANRU pour la gestion des crédits relevant du volet « humain » de la politique de la ville.
Nous avons souhaité que la mise en oeuvre de la politique de la ville reste déconcentrée : le préfet de département ou le sous-préfet ville seront donc les délégués de l'Agence.
Pour autant, le niveau régional continue à jouer un rôle important dans la mise en oeuvre de la politique de la ville, notamment en termes d'animation de cette politique et de mobilisation, indispensable, des crédits de droit commun. C'est d'ailleurs l'une des missions de la DIV que d'être extrêmement active concernant la mobilisation des différents crédits de droit commun ; c'est le sens même d'une délégation interministérielle.
Une circulaire du 15 septembre prévoit que le comité administratif régional aura vocation à suivre régulièrement la mise en oeuvre des contrats urbains de cohésion sociale et que le préfet de région devra veiller à la prise en compte des enjeux liés aux quartiers en difficultés dans les différents budgets opérationnels de programme régionaux.
L'Agence disposera, en 2007, de plus de 500 millions d'euros de crédits d'intervention pour assurer ses missions. Ce montant agrège les crédits du Fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations, le FASILD, à hauteur de 115 millions d'euros environ, ceux de la politique de la ville, pour près de 400 millions d'euros, ainsi que ceux du Fonds social européen.
S'agissant des crédits européens, nous veillerons à ce qu'ils continuent à conforter les dispositifs majeurs de la politique de la ville, notamment en matière d'insertion et d'accompagnement vers l'emploi.
Ce nouvel opérateur permettra de poursuivre la simplification engagée dans l'attribution des financements de la politique de la ville.
Cette année, un effort particulier a été accompli s?agissant de la délégation des crédits et je souhaite que cet effort soit poursuivi l'année prochaine.
La création de l'Agence est l'occasion de repositionner la DIV sur sa mission première, à savoir la définition de la politique de la ville et son animation interministérielle.
Je souhaite également revenir sur l'animation et le suivi des contrats urbains de cohésion sociale, qui se feront bien évidemment dans un partenariat entre la DIV et l'Agence, la DIV ayant la tutelle aussi bien de l'ACSE que de l'ANRU. C'est pourquoi nous avons voulu que la DIV puisse continuer à disposer d'un budget de fonctionnement à la hauteur de ses missions.
Mesdames, messieurs les sénateurs, avec cette organisation et un budget qui présente les conditions d'une intervention à la fois massive et équilibrée sur les volets humain et urbain, avec des masses budgétaires comparables sur l'investissement et les crédits d'intervention, le Gouvernement démontre sa volonté de changer les conditions de vie de nos concitoyens vivant dans les quartiers dits « sensibles ».
J'en viens au budget consacré au logement.
Des résultats historiques vont être obtenus en 2006 dans ce secteur, avec un rythme de production annuelle de 430 000 logements, jamais atteint depuis 1980, avec le financement de 90 000 à 95 000 logements locatifs sociaux, avec une mobilisation accrue du parc privé et un triplement de l'accession sociale à la propriété, avec près de 250 000 prêts à taux zéro distribués.
Avec la loi portant engagement national pour le logement, nous mettons en oeuvre de nouveaux outils pour mieux répondre à la demande de logement de l'ensemble de nos concitoyens.
Comme vous l'avez souligné, Monsieur Karoutchi, les autorisations d'engagement du programme « Développement et amélioration de l'offre de logement » progressent de 3,2 % entre 2006 et 2007, ce qui permettra de lancer davantage d'opérations, conformément à la volonté du Gouvernement.
En 2007, les engagements du plan de cohésion sociale en matière d'offre locative sociale seront respectés. En effet, 481 millions d'euros d'autorisations d'engagement seront consacrés au parc social en 2007. L'objectif est de réaliser 100 000 logements locatifs sociaux. À titre de comparaison, 42 000 logements sociaux avaient été financés en 2000.
Madame Létard, le nombre de logements accessibles aux ménages très modestes progresse également de façon sensible : de 5 000 logements financés en PLAI en 2000, nous sommes passés à 7 500 en 2005.
Monsieur Delfau, je vous rappelle que 30 % des logements PLUS doivent être réservés à des ménages disposant de ressources inférieures aux plafonds d'accès au PLAI. En 2005, ce sont ainsi 21 200 logements sociaux qui ont été financés en direction des ménages disposant de ressources très modestes.
Monsieur Raoul, concernant les paiements aux organismes de logement social, je tiens à vous rappeler que ces organismes ont bénéficié, en 2006, de 220 millions d'euros de ressources extrabudgétaires. Comme l'a indiqué M. Braye, avec ces 220 millions d'euros et les moyens prévus dans le projet de loi de finances pour 2007, les organismes de logement social de métropole auront disposé, entre 2005 et 2007, des montants prévus par la loi de programmation pour la cohésion sociale. Le plan d'apurement des retards de paiement prévu par cette loi est donc totalement respecté.
Les conditions d'équilibre des opérations locatives sociales ont été considérablement améliorées depuis deux ans. Nous avons par exemple allongé de quinze à vingt-cinq ans l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les logements sociaux financés pendant le plan de cohésion sociale. Nous avons également instauré une compensation totale par l'État de cette exonération dès la première année, au profit des communes et des intercommunalités, pour les logements PLUS et PLAI. Vous avez rappelé, monsieur Braye, l'importance de cette mesure.
En outre, nous avons amélioré les caractéristiques des prêts au logement social, tant en 2005 qu'en 2006. De bonnes conditions d'équilibre financier des opérations locatives sociales sont donc garanties, même après la dernière augmentation du taux du livret A.
Monsieur Raoul, je vous confirme que le Gouvernement est mobilisé pour la défense du livret A. Selon la formule utilisée par le président de la République lui-même au mois de novembre dernier, c'est un système irremplaçable qui permet de conjuguer épargne populaire et financement du logement social. Nous avons d'ores et déjà répondu à Bruxelles et nous restons très mobilisés sur ce sujet.
De façon plus générale, je rappelle que l'État intervient massivement dans le financement des logements locatifs sociaux, notamment au travers des avantages fiscaux tels que l'application d'un taux de TVA de 5,5 %.
Monsieur Muzeau, à titre de comparaison, les moyens fiscaux consacrés par l'État à la production de logements sociaux représentent, en 2007, plus de 2 milliards d'euros quand le dispositif Robien représente 400 millions d'euros.
Monsieur Lagauche, au total, les aides apportées par l'État représentent un équivalent de subvention de 33 % du montant total des opérations de logement social, soit un taux nettement supérieur à celui des logements en investissements locatifs.
Monsieur Karoutchi, nous nous mobilisons pour encourager la cession de terrains de l'État pour la production de logements. Le programme s'établit déjà à 25 000 logements sur trois ans répartis sur 280 sites et 35 % sont des logements locatifs sociaux. Nous suivons très attentivement ce programme, qui mobilise la Délégation interministérielle pour développer l'offre de logements, la DIDOL, et la Délégation à l'action foncière, la DAF.
Les moyens d'engagement de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat, l'ANAH, passent de 480 millions d'euros à 507,3 millions d'euros en 2007.
La dotation d'intervention est complétée par l'affectation de 20 millions d'euros de la taxe sur les logements vacants en 2007, ce qui porte les moyens d'intervention de l'Agence à 527,3 millions d'euros, contre 505 millions d'euros en 2006, soit un niveau jamais atteint auparavant.
Monsieur Hérisson, vous avez raison d'insister sur la mobilisation de l'État dans la mise en oeuvre des schémas départementaux d'accueil des gens du voyage. Nous nous donnons les moyens de renforcer encore notre action en portant les autorisations d'engagement prévues à cet effet à 40 millions d'euros, soit une augmentation de 33 %.
Quant à votre souhait de développer, sous l'égide de l'État, une aire de grand passage par arrondissement, nous examinons comment mettre en oeuvre une telle mesure.
Les plans départementaux d'action pour le logement des personnes défavorisées doivent tenir compte des besoins des gens du voyage qui souhaitent se sédentariser. Le décret relatif à ces plans qui, au début de l'année 2007, sera soumis au Conseil national de l'habitat puis au Conseil d'État le prévoit très explicitement.
Monsieur Karoutchi, comme vous le soulignez dans votre rapport, les moyens destinés à la lutte contre l'habitat indigne sont en augmentation de 30 %, passant de 20 millions d'euros à 26 millions d'euros en 2007.
Madame Létard, à ces moyens spécifiques s'ajoutent les moyens mis en oeuvre par l'ANAH dans la lutte contre l'habitat indigne, qui s'élèvent à 105 millions d'euros en 2007, soit le cinquième du budget de l'Agence.
Comme vous l'expliquiez, nous menons une politique ambitieuse en matière d'accession sociale à la propriété.
Les moyens destinés aux prêts à taux zéro financés sur les ressources budgétaires et émis avant le 1er février 2005 sont en diminution mécanique. En revanche, les moyens consacrés aux prêts à taux zéro émis depuis le 1er février 2005 et financés par un crédit d'impôt sur les sociétés sont en progression significative de 515 millions d'euros à 770 millions d'euros entre 2006 et 2007.
Ce sont 250 000 ménages qui bénéficient, chaque année, du prêt à taux zéro, contre moins de 80 000 en 2004. C'est ainsi que nous contribuons à encourager la mobilité dans les parcours résidentiels, que vous appelez de vos voeux, monsieur Karoutchi.
Dans les prochains documents budgétaires, nous veillerons à ce que les résultats en matière d'accession sociale à la propriété soient mis en regard des tensions s'exerçant sur les marchés immobiliers.
Je peux, en tout état de cause, vous indiquer que la réforme du prêt à taux zéro intervenue en 2005 a d'ores et déjà permis de renforcer l'accession sociale à la propriété dans les agglomérations denses. Ainsi, près de 48 % des prêts à zéro sont désormais émis dans les agglomérations de plus de 50 000 habitants, contre 30 % auparavant ; les ménages disposant de ressources modestes sont désormais aidés à devenir propriétaires dans les centres-villes et les zones denses.
L'application prévue par la loi ENL du taux de TVA de 5,5 % pour les opérations en accession sociale dans les quartiers en rénovation urbaine représente un impact fiscal de 300 millions d'euros en 2007, contre 100 millions d'euros en 2006. Il est vrai que les dépenses fiscales constituent une part significative des moyens du programme « Développement et amélioration de l'offre de logement ».
L'application du taux de TVA de 5,5 % aux travaux réalisés dans les logements de plus de deux ans représente, à elle seule, un montant de 5 milliards d'euros, soit quasiment la moitié des dépenses fiscales de la mission. On ne peut d'ailleurs que se féliciter de la reconduction de cette mesure jusqu'en 2010.
Plusieurs rapporteurs ont demandé que l'efficacité des dépenses fiscales soit mieux évaluée. Une mission interministérielle est actuellement menée pour examiner les objectifs et indicateurs du programme. Dans ce cadre, des indicateurs nouveaux seront créés pour mesurer les résultats obtenus par les dépenses fiscales, notamment en matière d'aide à l'investissement locatif.
J'en viens maintenant à l'aide à l'accès au logement
Monsieur Karoutchi, vous évoquiez les préconisations de l'audit de modernisation sur la gestion des aides personnelles au logement. La plus importante d'entre elles est, comme vous l'indiquiez, l'utilisation des données fiscales par les caisses d'allocations familiales pour le calcul des aides personnelles au logement. Je vous confirme que nous la mettrons en oeuvre au cours de l'année 2007.
Dès janvier 2008, les déclarations de ressources des bénéficiaires des aides personnelles au logement seront renseignées automatiquement à partir des informations transmises aux services fiscaux au cours de l'année 2007. Cette mesure se traduira donc par une réduction des coûts de gestion à compter de 2008.
Je confirme que plusieurs facteurs contribuent à modérer les besoins de financement sur le fonds national d'aide au logement, FNAL. L'amélioration de la situation économique et la baisse du chômage se traduisent par une baisse de 60 millions d'euros des besoins de financement. L'entrée en vigueur du nouvel indice de révision des loyers qui freine l'augmentation de ces loyers a un impact de 20 millions d'euros.
Je voudrais surtout rappeler que nous pratiquerons une actualisation de 1,8 % des aides personnelles au logement, pour les loyers et pour les charges, à compter du 1er janvier 2007.
Monsieur le rapporteur Dallier, comme je m'y étais engagée à l'Assemblée nationale et devant la commission des affaires économiques du Sénat, une solution a été trouvée pour ramener le seuil de non-versement de 24 euros à 15 euros. Cela répond à une attente qui était légitime. Nous aurons l'occasion d'y revenir à l'occasion de l'examen de l'amendement que vous avez déposé à ce sujet.
Je tiens à préciser, à l'intention de M. Raoul, que la fixation de la date d'actualisation au 1er janvier est l'une des préconisations de l'audit de modernisation évoqué par M. Karoutchi.
Monsieur Raoul, contrairement à ce que vous indiquez, une actualisation a également eu lieu au 1er juillet 2006 ; elle a porté sur le paramètre représentatif des ressources pour les locataires. Une revalorisation de ce paramètre aura lieu au 1er juillet 2007.
Ces revalorisations accompagnent une politique de modération des loyers. Auparavant, les loyers étaient révisés sur la base de l'indice du coût de la construction, l'ICC. Cet indice connaît des fluctuations importantes, liées notamment à l'augmentation des prix internationaux des matières premières, mais sans rapport avec la location de logements. Depuis le 1er janvier 2006, les loyers sont donc révisés sur la base du nouvel indice de révision des loyers, l'IRL, dont les évolutions sont plus lissées que celles de l'ICC et qui tient mieux compte de la capacité financière des locataires.
M. Gérard Delfau. C'est insuffisant !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Depuis le début de l'année, l'IRL a systématiquement évolué à un rythme inférieur à celui de l'ICC. Cela a un impact non seulement sur le parc privé, où l'indice sert à l'actualisation des loyers réels, mais également sur le parc social, où l'indice sert à l'actualisation des loyers plafonds des logements sociaux.
Notre politique d'accroissement de l'offre de logements améliore directement les conditions d'accès au logement. Notre pays a trop longtemps connu une production insuffisante de logements, en particulier de logements sociaux.
Monsieur Delfau, vous avez souligné, je l'ai bien noté, l'effort qui a été accompli dans ce domaine. Alors que 42 000 logements locatifs sociaux ont été financés en 2000, soit le plus faible niveau depuis 1980, nous sommes actuellement sur un rythme compris entre 90 000 et 95 000 logements par an. C'était indispensable et c'est le seul moyen de remettre un peu de fluidité dans cette chaîne du logement.
Au début des années deux mille, à peine plus de 300 000 logements étaient mis en chantier chaque année. Nous avons accumulé, en matière de production de logements, des retards dramatiques, qui se traduisent aujourd'hui par un lourd déséquilibre entre la demande et l'offre de logements. C'est ce déséquilibre qui est à la source des tensions que nous connaissons sur les marchés immobiliers.
Heureusement, la construction de logements a été relancée et nous atteignons actuellement un rythme annuel de 430 000 mises en chantier. Ainsi, nous pourrons aider les ménages à accéder au logement dans de bonnes conditions. Nous agissons donc sur tous les leviers : la revalorisation des aides personnelles au logement, la modération des loyers et l'augmentation globale de l'offre, en particulier de l'offre sociale.
Pour autant, monsieur Braye, cela ne nous fait pas perdre de vue l'élément, ô combien ! important, que vous avez souligné : le développement durable. C'est effectivement une priorité : 1 milliard d'euros de crédits d'impôt sont inscrits au budget pour les aides aux particuliers ; c'est là un signe indispensable.
Ce budget, mesdames, messieurs les sénateurs, permet de poursuivre une tendance affirmée par la loi de 2003, par le plan de cohésion sociale, et il montre l'effort du Gouvernement en faveur tant de l'urbain que de l'humain. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Ville et logement » figurant à l'état B.
État B
(en euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Ville et logement |
7 293 324 637 |
7 145 024 637 |
Rénovation urbaine |
397 591 610 |
383 591 610 |
Équité sociale et territoriale et soutien |
751 219 385 |
790 219 385 |
Aide à l'accès au logement |
4 919 025 500 |
4 919 025 500 |
Développement et amélioration de l'offre de logement |
1 225 488 142 |
1 052 188 142 |
dont titre 2 |
149 447 000 |
149 447 000 |
L'amendement n° II-42, présenté par MM. Dallier et Karoutchi, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits de la mission et des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Rénovation urbaine |
||||
Équité sociale et territoriale et soutien |
||||
Aide à l'accès au logement |
||||
Développement et amélioration de l'offre de logement Dont Titre 2 |
1.000.000 1.000.000 |
1.000.000 1.000.000 |
||
TOTAL |
1.000.000 |
1.000.000 |
||
SOLDE |
- 1.000.000 |
- 1.000.000 |
La parole est à M. Philippe Dallier, rapporteur spécial.
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Cet amendement vise à éclairer le Sénat sur l'utilisation d'une somme de un million d'euros qui nous a posé question, même si, me direz-vous, cette somme n'est pas considérable. Il s'agit des crédits de l'action 5 « soutien » du programme 135 « Développement et amélioration de l'offre de logement ».
Nous proposons également de supprimer les crédits liés à l'indemnisation de ceux qui, dans le projet de performance, sont désignés sous le nom de « délégués de l'État pour la politique de la ville » : ils seraient au nombre de deux cent soixante-dix sur l'ensemble du territoire, si les informations que l'on nous a communiquées, et que nous avons parfois eu un peu de mal à obtenir, sont exactes.
Il apparaît ainsi que c'est un décret du 19 août 1992 qui a institué une indemnité de vacation pour collaboration occasionnelle aux activités inscrites au projet de service public d'un quartier en développement social urbain, limitant ces vacations, malgré tout, à cent soixante-cinq heures annuelles. Il faut remarquer que, dix ans plus tard, en 2002, le taux de l'indemnité a été doublé.
Précédemment, le comité interministériel des villes et du développement urbain, le CIV, du 14 décembre 1999 avait décidé de généraliser cette indemnisation dans le cadre de la mise en place de délégués de l'État, choisis par les préfets pour animer la politique de la ville et les réseaux de services publics locaux dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Ces bonnes intentions ont sans doute laissé place à beaucoup de confusion car, aujourd'hui, il existerait deux cent cinquante ou deux cent soixante-dix délégués dans trente-cinq départements. Assez curieusement, ce ne sont pas nécessairement les départements où les enjeux de la politique de la ville sont les plus évidents. Ainsi, dans mon département, la Seine-Saint-Denis, ce mécanisme n'est pas utilisé. Il ne l'est pas plus dans l'Oise, en Haute-Normandie ou en Champagne-Ardenne. Nous avons donc quelques raisons de nous interroger ! Le montant des indemnisations, un million d'euros, est malgré tout assez considérable compte tenu des effectifs relativement faibles des personnes concernées.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons pensé être en droit de déposer cet amendement de suppression de ces crédits d'un montant de un million d'euros.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Les dépenses liées à l'indemnisation des délégués de l'État mis en place dans le cadre de la politique de la ville représentent un montant de 600 000 euros. Les 400 000 euros restant sur cette ligne correspondent au paiement de vacataires ou d'indemnités de stagiaires pour la DIV.
Une circulaire du 4 avril 2002 prévoit que les indemnités de ces délégués sont calculées sur la base d'un taux horaire de 26,99 euros brut et dans le cadre d'un nombre d'heures de vacations annuelles limitées à cent soixante-cinq.
Deux cent quarante-sept délégués sont actuellement en fonction et nous souhaitons porter ce nombre à deux cent soixante-dix pour 2007.
Quelles sont les missions confiées à ces délégués ? Le délégué est l'interlocuteur de proximité au nom de l'État en matière de politique de la ville pour les communes et les associations. Dans les départements les plus urbanisés, il assure ainsi le relais du sous-préfet d'arrondissement ou du sous-préfet de ville pour le suivi quotidien des contrats de villes, demain contrats urbains de cohésion sociale.
Chaque délégué est attaché à un contrat de ville. Il effectue le suivi administratif de la politique de la ville. Il doit disposer d'une connaissance précise du terrain, des acteurs, surtout associatifs. Il est enfin l'interlocuteur permanent des chefs de projet des communes, auxquels il apporte son appui. Les délégués de l'État sont choisis parmi des agents de catégorie A, sur la base du volontariat, au sein des différents services déconcentrés, où ils continuent d'exercer leurs fonctions.
Ils disposent, pour exercer ces missions supplémentaires, d'une décharge horaire de 20 %, mais, en pratique, leur implication réelle va bien au-delà d'une journée de travail par semaine. Ils sont en effet conduits à participer à des réunions dans les quartiers, à prendre connaissance de l'activité des associations en dehors des heures de travail, souvent d'ailleurs en soirée. Il leur est demandé une grande disponibilité. Pour cette raison, les préfectures font part de leurs difficultés à trouver des volontaires. La charge est assez lourde et les communes sollicitent fortement ces interlocuteurs de proximité.
À la suite des événements de 2005, il nous est apparu nécessaire d'accroître - on en a beaucoup parlé dans cet hémicycle - le rôle de proximité de l'État. C'est pour cette raison que le CIV du 9 mars a décidé que, dans chacun des quartiers ou territoires les plus en difficulté, un délégué de l'État serait systématiquement désigné au sein des services déconcentrés pour relayer l'action du préfet délégué au plus près du terrain.
Cette extension du dispositif vise prioritairement la Seine-Saint-Denis où, pour des raisons historiques, les délégués de l'État n'ont pas été développés, ce qui se traduit par un sous-dimensionnement des équipes directement affectées à la politique de la ville.
Dans ce département, le dispositif se met en place depuis le mois de septembre : neuf délégués sont nommés, issus de divers services, qu'il s'agisse de la direction départementale du travail et de l'emploi, de la direction départementale de l'équipement, de l'éducation nationale ou de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales.
Ils constitueront une équipe interministérielle autour du préfet délégué à l'égalité des chances. Au vu de l'expérience menée dans les départements dans lesquels ce dispositif a démontré son utilité, j'ai demandé à la DIV qu'une circulaire soit diffusée dans les meilleurs délais pour repréciser le rôle et les conditions d'intervention de ces délégués, dans la perspective notamment de la mise en oeuvre des contrats urbains de cohésion sociale.
C'est dans cet esprit, et connaissant votre intérêt pour un département qui n'est pas suffisamment équipé aujourd'hui, monsieur le rapporteur spécial, que je vous invite à retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Non, je le retire, monsieur le président.
Je suis à la fois rassuré et coincé, si je puis dire. (Sourires.) Nous avons eu quelques difficultés à comprendre l'objet de ce dispositif, qui existe quand même depuis 1992. Soit il est utile, mais alors il l'est partout, notamment dans les départements les plus concernés par la politique de la ville, soit il ne l'est pas !
Vous nous annoncez une extension de ce dispositif. Néanmoins, les crédits ne sont pas pour autant augmentés. J'ignore comment cela se traduira concrètement.
M. le président. L'amendement n° II-42 est retiré.
L'amendement n° II-41, présenté par MM. Dallier et Karoutchi, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
²Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Rénovation urbaine |
65.000.000 |
65.000.000 |
||
Équité sociale et territoriale et soutien |
||||
Aide à l'accès au logement |
65.000.000 |
65.000.000 |
||
Développement et amélioration de l'offre de logement Dont Titre 2 |
||||
TOTAL |
65.000.000 |
65.000.000 |
65.000.000 |
65.000.000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Philippe Dallier, rapporteur spécial.
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Nous avons déposé cet amendement avant de savoir ce qu'il en était plus précisément des 100 millions d'euros de ressources extrabudgétaires inscrites à ce projet de loi de finances.
Jean-François Copé m'a demandé, lundi dernier, de retirer un amendement visant à la création d'un nouveau fonds de rénovation urbaine, au motif que ces 100 millions d'euros proviendraient de la Caisse des dépôts et consignations.
Pour autant, madame la ministre, nous aimerions savoir si, véritablement, des négociations sont engagées avec la Caisse, qui aboutiront à une convention créant un nouveau FRU ciblé sur les missions d'intérêt général. Ces 100 millions d'euros ne valent-ils que pour 2007 ou bien seront-ils reconduits, voire augmentés si les résultats de la Caisse des dépôts et consignations le permettent, les années suivantes ?
Votre réponse ne nous a pas apporté cette précision, madame la ministre. Pourriez-vous nous en dire plus, car ce point est très important ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Monsieur le rapporteur spécial, je vous confirme que le budget de l'ANRU pour 2007 a été construit en intégrant 200 millions d'euros de recettes extrabudgétaires en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Ces 200 millions d'euros s'ajoutent aux 400 millions d'euros d'autorisations de programme et aux 356 millions de crédits de paiement.
Pour vous répondre très précisément, je vous confirme que, sur les 200 millions d'euros, 100 millions d'euros ont été affectés aux SACI. S'agissant des autres 100 millions d'euros, des discussions sont en cours avec la Caisse des dépôts et consignations afin d'étudier les modalités de leur versement. Nous aboutirons très prochainement.
M. le président. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. Me voilà rassuré pour 2007, car j'espère que les discussions aboutiront. Je retire donc l'amendement.
M. le président. L'amendement n° II-41 est retiré.
L'amendement n° II-149, présenté par MM. Dallier et Karoutchi, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Rénovation urbaine |
||||
Équité sociale et territoriale et soutien |
||||
Aide à l'accès au logement |
22 000 000 |
22 000 000 |
||
Développement et amélioration de l'offre de logement Dont Titre 2 |
22 000 000 0 |
22 000 000 0 |
||
TOTAL |
22.000.000 |
22.000.000 |
22.000.000 |
22.000.000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Je serai bref, car j'ai déjà évoqué cet amendement dans mon rapport initial et, madame la ministre, vous avez eu l'amabilité d'en parler à votre tour lors de votre intervention.
Il s'agit, en pratique, de revenir sur le seuil de versement des aides personnelles au logement de 24 à 15 euros. À cette fin, nous proposons de minorer du même montant les crédits du programme « Développement et amélioration de l'offre de logement ».
La modification, en 2004, de la réglementation avait conduit à supprimer toute aide au logement à environ 120 000 ménages modestes. De nombreux parlementaires, de tous horizons politiques, avaient alerté le Gouvernement sur les effets de cette mesure, mais leurs initiatives s'étaient heurtées à l'article 40 de la Constitution.
À cet égard, je précise, au nom de la commission des finances, que les six amendements tendant à insérer des articles additionnels après l'article 62, à savoir les amendements n°s II-91, II-92 et II-93 de Mme Létard, au nom de la commission des affaires sociales, et les amendements n°s II-138, II-136 et II-137 de M. Repentin et des membres du groupe socialiste, qui concernent un peu le même sujet, tombent, de fait, sous le coup de l'article 40.
Le Gouvernement s'était longtemps montré rétif à l'idée de revenir à 15 euros en raison du coût de cette mesure : 22 millions d'euros. Lors du débat à l'Assemblée nationale, madame la ministre, vous avez annoncé que cette mesure pourrait être envisagée. Tel est précisément l'objet du présent amendement que Philippe Dallier et moi-même avons déposé, avec l'accord de la commission des finances et de son président, bien entendu.
La compensation que nous proposons porte sur la dotation de l'ANAH. L'action de cette agence ne devrait pas s'en trouver gênée : il existe en effet actuellement à l'ANAH un stock d'autorisations d'engagement de 82 millions d'euros. Ce stock, constitué au fil des années, provient principalement de l'annulation ou de la réalisation partielle de certains dossiers engagés.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
Lors de la discussion à l'Assemblée nationale, j'avais effectivement fait part de la volonté du Gouvernement de travailler sur une solution. Cette baisse du seuil de 24 à 15 euros concerne en effet 120 000 ménages.
Nous étudions actuellement avec l'ANAH la façon dont pourra être absorbée cette diminution de crédits de 22 millions d'euros. Mais il s'agit d'un message important pour les 120 000 ménages qui pourront, dès le début de l'année 2007, bénéficier à nouveau de l'APL.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis.
Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis. Au nom de la commission des affaires sociales, je voudrais saluer l'effort consenti cette année par le Gouvernement en faveur de l'aide au logement de ces familles. Celles-ci considéraient depuis des années comme une injustice le fait que ne leur soit pas versée, en raison de son trop faible montant, une aide à laquelle elles avaient pourtant droit.
À de nombreuses reprises, à chaque fois qu'un texte de loi lui en a donné l'occasion, la commission des affaires sociales a évoqué ce problème. Aussi, nous avons été très satisfaits d'apprendre que le Gouvernement acceptait d'étudier avec bienveillance la proposition de MM. Karoutchi et Dallier.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. L'objectif visé par cet amendement est louable, mais je considère, par déformation professionnelle, que l'on pourrait mieux faire. Dans le budget de certains ménages, 15 euros mensuels, soit 180 euros annuels, représentent une somme non négligeable.
Par ailleurs, quelles sont ces disponibilités inutilisées de l'ANAH ?
En outre, d'après les informations que j'ai pu obtenir, celle-ci n'aurait pas été consultée. Ce procédé est assez inélégant, même si, je le répète, l'objectif est louable.
Pour toutes ces raisons, nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Ayant moi aussi soulevé cette question tout à l'heure au cours de la discussion générale, je me réjouis que l'on nous propose une solution pour augmenter le nombre de bénéficiaires des aides personnelles au logement. Cette mesure de justice était urgente.
En revanche, comme notre collègue Daniel Raoul, je m'inquiète que cet amendement soit gagé par une diminution des ressources de l'ANAH. Vous nous affirmez, madame la ministre, que cela n'aura pas d'incidence sur le fonctionnement de l'Agence. Néanmoins, en tant qu'élu local, je puis vous dire - mais vous le savez sans doute - que, trop souvent, l'ANAH éprouve des difficultés à financer les programmes que nous lui soumettons.
Aussi, quand bien même je voterai cet amendement, je ne voudrais pas que son adoption ait pour conséquence de pénaliser le fonctionnement de l'ANAH et de nuire aux actions des collectivités territoriales qu'elle finance.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Mon explication de vote me donnera l'occasion de rappeler un certain nombre de faits.
Les crédits de paiement de l'ANRU sont passés de 13 millions d'euros en 2004 à 107 millions d'euros en 2005. Ils s'élèveront à 780 millions d'euros cette année et à 1 328 millions d'euros l'an prochain.
Notons que, dans le même temps, la dotation de l'État à l'Agence est passée de 465 millions d'euros en autorisations d'engagement en 2004, à 413 millions d'euros en 2005, puis à 305 millions d'euros cette année ; 400 millions d'euros sont prévus pour l'an prochain.
D'autres ressources ont été plus régulièrement sollicitées, qu'il s'agisse des ressources extrabudgétaires - pour 400 millions d'euros au total sur quatre exercices - ou, plus nettement encore, de la contribution obligatoire des collecteurs du « 1 % logement », qui s'élève en effet à 1 924 millions d'euros sur les quatre exercices, soit un effort plus important que celui que l'État daigne accomplir pour le moment.
Or l'article 7 de la loi d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine dispose : « Les crédits consacrés par l'État à la mise en oeuvre du programme national de rénovation urbaine, ouverts par les lois de finances entre 2004 et 2013, sont fixés à 5 milliards d'euros, aucune dotation annuelle au cours de cette période ne pouvant être inférieure à 465 millions d'euros. Ils sont affectés, dans les conditions fixées par les lois de finances, à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine créée par l'article 10. »
Concrètement, voilà trois ans que les autorisations d'engagement du programme national de rénovation urbaine ne sont pas au niveau fixé par la loi d'orientation et de programmation. Et il en va de même cette année. L'amendement n° II-41 a été retiré, mais le problème demeure, malgré l'engagement de Mme la ministre qui a convaincu notre collègue Philippe Dallier.
Quant à l'amendement n° II-149, présenté par MM. Dallier et Karoutchi, bien évidemment, nous y souscrivons dans la mesure où il apporte enfin une réponse à une demande que nous avons été nombreux à formuler sur ces travées.
L'année dernière, au terme de débats passionnants et passionnées, le Gouvernement nous avait répondu par la négative. Il s'avère que, cette fois-ci, le Gouvernement donne une réponse positive, mais la diminution des crédits de l'ANAH nous inquiète.
Madame la ministre, vous venez d'indiquer - et vos propos figureront au Journal officiel - que le fonctionnement et les missions de l'ANAH ne s'en trouveront pas affectés. En vertu de cette assurance, nous voterons cet amendement, car nous considérons que cette aide au logement est indispensable pour beaucoup de gens dont le « reste à vivre » est très faible.
M. le président. J'ai été saisi d'une demande d'explication de vote sur les crédits de la mission par M. Jean-Pierre Caffet.
Je lui donne donc la parole.
M. Jean-Pierre Caffet. Il me revient de compléter les propos de mes collègues et d'expliquer le vote du groupe socialiste sur les crédits de la mission « Ville et logement » du projet de loi de finances pour l'année 2007.
En tout premier lieu, je souhaite formuler quelques remarques sur le programme « Aide à l'accès au logement » de la mission budgétaire que nous examinons.
La dotation destinée à financer l'APL et l'ALS s'élève à 4,91 milliards d'euros, soit un recul de 3,8 % par rapport à la loi de finances pour 2006. Cette baisse s'explique d'abord par le pari que fait le Gouvernement d'un ralentissement des versements de prestations au cours de l'année 2007. Malgré l'entrée en vigueur de l'indice de référence des loyers, il apparaît pourtant peu probable que ce scénario se réalise.
La tendance à l'alourdissement du poids des dépenses de logement dans le budget des ménages se poursuit sans fléchissement depuis dix ans, atteignant aujourd'hui 21 %. De même, la nette augmentation des dépôts de dossiers auprès du Fonds de solidarité logement au cours des deux dernières années laisse à penser que les versements d'aides au logement suivront une évolution similaire.
Par ailleurs, le recul de la dotation destinée à financer les aides au logement s'explique également par le prélèvement de 150 millions d'euros sur les fonds propres des SACI - cette ressource, par définition non pérenne, a déjà été évoquée tout à l'heure - et par le nouvel assujettissement des employeurs publics - État, collectivités territoriales et établissements publics administratifs - à la cotisation destinée à financer le Fonds national d'aide au logement. Jusqu'à présent, seuls les employeurs privés y étaient soumis.
Cette recette supplémentaire permettra de dégager 236 millions d'euros. Nous sommes toutefois surpris de cette initiative, prévue par l'article 62 du projet de loi de finances, qui vise à transférer de l'État aux collectivités territoriales une partie du financement des aides au logement, alors que celles-ci ne sont pas compétentes en la matière. En effet, les 65 millions d'euros que les collectivités territoriales devront acquitter au titre de cette cotisation nouvelle sont autant de crédits en moins à financer pour l'État.
Je veux également aborder la question de la revalorisation des aides au logement. Même si une actualisation de 1,8 % au 1er janvier 2007 nous est annoncée, je note qu'aucune hausse des aides n'aura été réalisée en 2006. Conjuguée aux augmentations insuffisantes de ces dernières années, cette évolution ne permettra pas de diminuer le taux d'effort des ménages.
En la matière, nous persistons pourtant à croire nécessaire d'inscrire dans la loi le principe selon lequel les aides à la personne doivent suivre les variations de l'indice de référence des loyers. À défaut, si une telle mesure était trop coûteuse, il faudrait prévoir une indexation sur l'inflation.
Tel est l'objet des amendements déposés par les parlementaires socialistes sur cette mission, comme de ceux qu'ils ont présentés avec constance depuis 2004 sur les projets de loi de finances pour 2005 et 2006, ainsi que sur le projet de loi portant engagement national pour le logement et le projet de loi pour l'égalité des chances.
Systématiquement, le Gouvernement et la majorité sénatoriale refusent de les discuter, invoquant l'article 40 de la Constitution, mais nous ne désarmerons pas. Il s'agit en effet de mesures d'urgence sociale rendues impératives par la contraction du pouvoir d'achat de nos concitoyens.
De la même manière, mes collègues et moi-même avons réclamé sans relâche la suppression du mois de carence et du seuil de non-versement des aides personnelles au logement, qui est aujourd'hui de 24 euros. Avec le vote de cet amendement, c'est désormais chose faite ; nous regrettons simplement que cette ressource trouve son origine dans une ponction sur la trésorerie de l'ANAH et nous nous inquiétons de la poursuite des missions de l'Agence.
Cela étant dit, nous nous félicitons de cette évolution. Remarquons tout de même que beaucoup de temps a été perdu : quatre années durant lesquelles environ 120 000 familles ont été exclues des aides au logement et n'ont pu percevoir les 288 euros par an auxquelles elles avaient droit.
Ainsi, au total, les crédits d'aides à la personne tels qu'ils nous sont proposés par le projet de loi de finances pour 2007 ne permettront pas de lutter contre l'érosion du budget des locataires modestes. Je tiens à rappeler que près des trois quarts des bénéficiaires des aides personnelles ont des revenus inférieurs au SMIC.
Une plus grande exposition des milieux populaires à la précarité, une fragilisation des classes moyennes, une insuffisance des aides à la pierre consacrées au logement abordable, un report croissant des politiques publiques du logement sur les collectivités territoriales : autant d'orientations de la mission « Ville et logement », autant de choix du Gouvernement en faveur de villes qui excluent du centre vers la périphérie une part croissante de la population, autant de chemins vers la paupérisation de ceux que la Fondation Abbé Pierre appelle les « mal logés » et les « personnes en situation de réelle fragilité à court ou moyen termes » ; elles sont près de 9 millions aujourd'hui.
Pour toutes ces raisons, les membres du groupe socialiste, qui n'ont eu de cesse de défendre le logement pour tous, voteront contre l'enveloppe et la répartition des crédits de la mission « Ville et logement ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Ville et logement », modifiés.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J'appelle en discussion les articles 62, 62 bis et les amendements tendant à insérer des articles additionnels qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Ville et logement ».
Ville et logement
Article 62
I. - Dans le dernier alinéa de l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale, les mots : « l'État, les collectivités locales, leurs établissements publics administratifs » sont supprimés.
II. - L'article L. 351-6 du code de la construction et de l'habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sa gestion est assurée par la Caisse des dépôts et consignations. »
III. - En 2007, le taux de la contribution mentionnée au 2° de l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale est fixé à 0,2 % pour l'État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-134, présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, MM. Billout et Coquelle, Mme Didier, M. Le Cam et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Roland Muzeau.
M. Roland Muzeau. Le moins que l'on puisse dire, à l'examen des dispositions de cet article 62, c'est qu'il participe des différentes « petites astuces » dont ce projet de loi de finances est truffé, en reportant sur d'autres, en l'occurrence les collectivités locales et leurs établissements publics, entre autres, ce qui découle naturellement des obligations budgétaires de l'État.
Il s'agit en effet de faire financer, par relèvement de cotisation, le Fonds national d'aide au logement, qui prend en charge le financement des aides personnelles au logement, par les employeurs de droit public que sont les collectivités territoriales. L'opération budgétaire incriminée s'élève à 131 millions d'euros, si l'on en croit les éléments fournis par les rapports spéciaux.
Dans le même temps, comme nous le savons, l'article 23 dispose qu'une partie du droit de consommation sur le tabac fixé par les articles 575 et 575 A du code général des impôts serait dorénavant affectée au financement du Fonds national d'aide au logement, en lieu et place de la contribution du budget général.
Pour l'État, l'opération est blanche, mais les collectivités territoriales sont sollicitées, ce qui pose une question essentielle : les collectivités territoriales peuvent-elles être tenues pour responsables de la situation de consommation des aides personnelles au logement, dans la mesure où celles-ci ont beaucoup à voir avec l'état des ressources de leurs bénéficiaires, c'est-à-dire la persistance d'un chômage massif, le développement de la précarité du travail et celui du travail insuffisamment rémunéré ?
En vérité, mes chers collègues, si l'on doit accroître quelque peu les moyens du FNAL, on peut aussi trouver la source de ce financement auprès des entreprises du secteur concurrentiel, sans que leur contribution soit spectaculairement relevée. Peut-être pourrait-on en effet, moyennant un taux d'appel de cotisation de 0,65 % au lieu de 0,55 %, faire largement le compte pour assurer la fluidité des ressources du fonds.
Mais, évidemment, la question qui nous est posée est aussi l'occasion de revenir sur la réalité de la consommation des crédits des aides personnelles au logement.
Le fonds, comme nul ne l'ignore, est aujourd'hui partagé, quant à son financement, entre les cotisations collectées par les caisses d'allocations familiales et le budget général.
En loi de finances initiale pour 2006, le montant des aides personnelles au logement s'élevait à 5 115 millions d'euros. Le présent budget prévoit une dépense budgétaire directe de 4 911 millions d'euros, soit une révision à la baisse de 200 millions d'euros.
Et ce n'est qu'au travers de « ficelles » diverses que l'on pourra encore tenir l'état de la consommation des crédits.
Entre le gel du barème, la mise en cause de la faculté de reprise des droits, la sollicitation de la trésorerie des sociétés coopératives d'accession à la propriété, l'État se désengage progressivement du financement du Fonds national d'aide au logement.
Pour mémoire, en 2005, c'est-à-dire l'an dernier, l'État a engagé 5 529 millions d'euros dans le financement des aides personnelles au logement. On peut se demander par quel miracle, et en dépit des mesures qui ont été rappelées, les dépenses diminueraient en 2006 et pour quelle raison nous devrions enregistrer la même tendance en 2007.
De fait, plutôt que de nous perdre dans une procédure budgétaire pour le moins discutable, qui participe du grand « bricolage » destiné à masquer la réalité du déficit, nous ferions mieux de nous interroger sur les conditions d'un financement équilibré et pérenne de la nécessaire solidarité en direction des plus modestes de nos compatriotes.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° II-40 est présenté par MM. Dallier et Karoutchi, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-57 est présenté par MM. Repentin et P. André, au nom de la commission des affaires économiques.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger comme suit cet article :
I. - Dans le dernier alinéa de l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale, les mots « l'État » sont supprimés.
II. - L'article L. 351-6 du code de la construction et de l'habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sa gestion est assurée par la Caisse des dépôts et consignations ».
III. - En 2007, le taux de la contribution mentionnée au 2° de l'article L. 834-1 du code de la sécurité sociale est fixé à 0,2 % pour l'État.
La parole est à M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, pour présenter l'amendement n° II-40.
M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. Cet amendement porte sur le FNAL. Actuellement, je le rappelle, les cotisations employeur versées à ce fonds sont les suivantes : une cotisation de 0,1 % assise sur les salaires plafonnés est due par tous les employeurs, qu'ils soient publics ou privés, et une cotisation de 0,4 % est assise sur la totalité des salaires. Cette dernière cotisation n'est pas due par les employeurs occupant moins de vingt salariés, par l'État, par les collectivités locales, par leurs établissements publics administratifs, et par les employeurs relevant du régime agricole.
Le présent article vise à assujettir, en deux ans, les employeurs publics à cette seconde contribution. Le Gouvernement en attend une augmentation des ressources du fonds de 236 millions d'euros. Les 105 millions d'euros de cotisations supplémentaires pour l'État, dont la charge sera répartie entre les différentes missions du budget général, seront compensés par la diminution de la contribution de l'État au FNAL inscrite à la mission « Ville et logement ».
C'est donc, pour l'État, un jeu à somme nulle. Ce n'est évidemment pas le cas pour les 65 millions d'euros estimés de cotisations supplémentaires pour les collectivités territoriales : de fait, pour celles-ci, il s'agira d'une charge supplémentaire.
Dans ces conditions, la commission des finances, opposée à cette disposition, vous propose le présent amendement visant à réserver à l'État l'application de cette harmonisation des taux de cotisations.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° II-57.
M. Daniel Raoul, rapporteur pour avis. Tout en souscrivant aux propos de M. le rapporteur spécial, je tiens à indiquer que la commission des affaires économiques soutient pleinement la démarche de la commission des finances et qu'elle a, pour les mêmes raisons, décidé à l'unanimité de déposer un amendement identique.
En effet, un grand nombre de membres de notre commission se sont déclarés très surpris par cette initiative tendant à créer une charge supplémentaire pour les collectivités territoriales, laquelle pourrait être substantielle pour celles qui disposent d'une masse salariale importante. Cette charge pourrait même conduire certaines d'entre elles à augmenter leur fiscalité locale ; certains responsables de collectivités m'ont parlé d'une augmentation de 1 % de la pression fiscale.
Tout le monde s'accorde pour dire que les collectivités territoriales sont des acteurs incontournables des politiques du logement. Toutefois, s'il est un domaine dans lequel elles ne sont pas compétentes, c'est bien celui des aides à la personne.
Pour ces raisons, la commission des affaires économiques, saisie pour avis, s'est opposée à ce transfert de l'État vers les collectivités territoriales pour le financement des aides à la personne.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur l'amendement n° II-134 ?
M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial. La commission est défavorable à cet amendement, car il est satisfait, pour les collectivités territoriales, par ceux de la commission des finances et de la commission des affaires économiques. Cependant, il ne nous paraît pas nécessaire de supprimer l'harmonisation des taux de cotisations au FNAL pour l'État : cette mesure aboutirait à répartir la charge de cotisations sur l'ensemble des missions du budget général, et elle est neutre budgétairement puisque l'État ne la compensera pas par une diminution de sa subvention au FNAL.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. S'agissant de l'amendement n° II-134, les salariés du privé comme ceux du public peuvent effectivement bénéficier des aides personnelles, alors que les employeurs privés sont soumis à des prélèvements plus élevés que les employeurs publics. C'est donc une volonté d'équité qui sous-tend l'article 62, puisque celui-ci prévoit l'alignement, en deux ans, des taux de cotisation des employeurs publics sur ceux du secteur privé.
Si le Sénat décidait de supprimer ledit article, il remettrait totalement en cause ce souci d'équité, d'autant que l'amendement vise également à empêcher l'État et ses établissements publics administratifs d'augmenter, en tant qu'employeurs, leurs cotisations au FNAL.
Le Gouvernement est donc totalement défavorable à cet amendement.
En ce qui concerne les amendements identiques nos II - 40 et II - 57, je ne reviens pas sur les propos que j'ai tenus sur le concept même du financement du FNAL. Ce fonds est principalement alimenté par des dotations budgétaires de l'État, par des contributions des régimes sociaux et des contributions des employeurs.
La contribution de 0,10 % sur les salaires plafonnés est due par tous les employeurs. Aujourd'hui, le taux de cotisation des employeurs privés s'élève à 0,4 %, contre 0,1 % pour les employeurs publics. L'article 62 du projet de loi de finances vise à appliquer, en 2007, une cotisation de 0,2 % sur les salaires pour les employeurs publics et de 0,4 % à partir de 2008.
Le présent amendement a pour objet de ne pas appliquer cette cotisation aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics. Il entraînerait donc une diminution d'environ 65 millions d'euros des ressources affectées au FNAL.
L'équilibre du FNAL pour cette année a été établi en tenant compte des ressources supplémentaires qui, encore une fois, répond à un souci d'équité entre les employeurs.
Pour maintenir l'équilibre entre les ressources et les dépenses du FNAL, il faudrait pratiquer des économies sur les aides personnelles au logement. À titre d'exemple, si ces économies portaient sur le niveau de la revalorisation, il faudrait réduire de 1,8 % à 0,6 % l'actualisation des loyers plafonds prévue au 1er janvier.
Le Sénat vient d'adopter un amendement représentant un coût supplémentaire de 22 millions d'euros.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
Pour autant, je suis sensible à l'argumentation des rapporteurs et au souci de diminuer les charges des collectivités locales. Je comprends très bien qu'une contribution complémentaire de 0,4 % puisse être lourde pour celles-ci.
C'est dans cet esprit que je vous propose de modifier l'article 62 afin de pérenniser le taux à 0,2 %. En d'autres termes, je vous propose d'aller de 0,1 % à 0,2 %, en supprimant purement et simplement la mention « En 2007 » dans le paragraphe III de l'article. Ainsi, la contribution au FNAL n'aurait pas de répercussions trop importantes sur les budgets des collectivités.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Madame la ministre, j'interviens en étroite relation avec mes collègues Roger Karoutchi et Philippe Dallier.
À l'évidence, chacun est attentif à la situation financière du FNAL. Mais tous ceux qui participent à des commissions d'aide sociale sur le plan local sont frappés par certains dévoiements des procédures.
En effet, les ressources des foyers les plus modestes sont absorbées par le crédit à la consommation, à la suite d'une sorte d'arbitrage consistant à ne pas prendre en compte les dettes de loyers au motif que c'est le FNAL qui en supportera le coût. Sans doute sera-t-il nécessaire de remettre un peu d'ordre dans le traitement des dettes des foyers.
C'est trop commode pour les prêteurs, qui ont quelquefois un comportement compulsif. Je suis frappé par leur promptitude à octroyer des crédits à la consommation ! Sans vérifier les capacités de remboursement, ils accordent du crédit revolving. C'est ainsi que des particuliers en viennent à consacrer l'intégralité de leurs maigres ressources à rembourser un crédit à la consommation, souvent très onéreux.
Ces facilités conduisent probablement à des arbitrages en matière de consommation, par exemple en faveur du téléphone mobile.
Peut-être faut-il veiller à freiner un peu la consommation ! Il n'est pas certain que la consommation participe à la croissance ; elle concourt bien souvent à un supplément d'importations.
Pour en revenir au FNAL, à la lecture de l'excellent rapport conjoint de Philippe Dallier et Roger Karoutchi, je suis frappé par la complexité des cotisations, dont une partie est plafonnée, l'autre pas, alors que l'on parle constamment de simplifier et de réduire les formalités. Nous sommes là en présence d'un cas caricatural de complexité tout à fait inutile, à laquelle il serait souhaitable de remédier, par voie de décret sans doute.
S'agissant du financement proprement dit, la disposition proposée ne me paraît pas judicieuse pour les collectivités territoriales, que représente le Sénat. Combien de maires sont-ils conscients que, par notre vote, nous risquons d'accroître les frais de personnel de 0,2 % ?
On demande aux collectivités territoriales d'abonder le FNAL. Bien souvent, d'ailleurs, les conseils généraux participent au financement du fonds départemental d'aide au logement, en complément de ce que peut verser le FNAL. Mais, en l'occurrence, c'est la double peine : les collectivités devront à la fois verser une cotisation sur les salaires et suppléer aux insuffisances du fonds départemental. Je le vis dans mon propre département !
Enfin, permettez-moi de rappeler un principe général. Selon une doctrine définie par la commission des finances, on peut distinguer deux types de financement en matière sociale : des actions relèvent de la solidarité nationale et d'autres d'un régime assurantiel, par exemple les accidents du travail et les cotisations de retraite. Or le financement qui nous est proposé met en cause la solidarité.
Ce n'est pas une bonne manière d'agir, car nous érodons un peu plus la compétitivité du travail. Je pense à tous ceux qui, demain, iront créer des emplois hors du territoire national, notamment les sous-traitants du secteur de l'automobile. C'est ce type de cotisations qui fait que l'emploi marchand s'étiole progressivement.
Pour autant, je conçois qu'il y ait un problème budgétaire. Si le Sénat votait un texte différent de celui qui a été adopté par l'Assemblée nationale, cela nous laisserait le temps, d'ici à la réunion de la commission paritaire, en relation étroite avec le Gouvernement, notamment le ministre délégué au budget, de tenter de trouver les bonnes réponses et d'apaiser les craintes de la direction du budget.
Nous sommes au Sénat et je ne crois pas que nos mandants aient conscience que, si nous votons ce soir cette mesure, ils auront à inscrire demain une dépense sociale correspondant à 0,2 % des salaires qu'ils versent.
M. Gérard Delfau. Très bien !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Telles sont les raisons pour lesquelles la commission maintient cet amendement, madame la ministre, tout en vous assurant qu'elle a aussi le sens des responsabilités budgétaires.
À titre personnel, puisque je serai certainement membre de la commission mixte paritaire, je m'engage à poursuivre la discussion avec le Gouvernement. Si nous ne trouvons pas de solution d'ici là, nous aviserons de façon responsable.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Monsieur le président de la commission, je partage tout à fait vos inquiétudes s'agissant du recours au crédit et du surendettement. Nous savons tous que, en général, c'est le FSL qui intervient dans une proportion importante sur ces impayés. Pour m'en être entretenue, très récemment encore, avec le Médiateur de la République, il est clair que nous devons continuer à accompagner ceux de nos concitoyens qui ne mesurent pas toujours l'incidence de leurs engagements financiers.
En ce qui concerne les charges qui pèsent sur le coût du travail, je comprends votre commentaire et je l'entends dans sa globalité.
Au regard de la disposition qui nous occupe, c'est bien la compétitivité du travail qui est en jeu. Les entreprises qui ont effectivement la possibilité de créer des emplois et qui pourraient êtes tentées de le faire hors du territoire national sont assujetties à un taux de 0,4 %.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C'est trop ! C'est pourquoi nous proposons la TVA sociale !
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Aujourd'hui, notre objectif est précisément de ne pas modifier le taux des entreprises et d'appliquer celui de la fonction publique, qui s'élève à 0,1 %.
Par cette démarche, nous essayons de procéder à un rééquilibrage afin de ne pas toucher au coût du travail et d'éviter ainsi que, demain, des emplois ne quittent notre territoire.
Pour autant, une problématique demeure, avec 65 millions d'euros à recouvrer dans un souci d'équilibre budgétaire.
J'ai parfaitement mesuré votre volonté d'essayer de trouver une solution d'ici à la réunion de la commission mixte paritaire. La préoccupation du Gouvernement est de remédier au déséquilibre financier du FNAL.
Tout au long de ce débat, vous avez exprimé le souhait d'un accompagnement de nos concitoyens et vous avez été nombreux à demander au Gouvernement de revaloriser les aides personnelles et de relever leur seuil d'attribution. Tout cela a un coût ! Au moment où il faut équilibrer ce budget, nous avons besoin que chacun fasse un effort. Tel est le sens de la proposition que je vous fais.
M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis, pour explication de vote sur les amendements identiques nos II - 40 et II - 57.
Mme Valérie Létard, rapporteur pour avis. La question de l'abondement du FNAL est essentielle puisqu'il s'agit de l'accompagnement des familles dans le financement de leurs loyers.
Aujourd'hui, c'est véritablement la première préoccupation de nombre de foyers français, puisque l'écart se creuse entre le niveau des aides à la personne et le montant des loyers qui flambent. Un nombre croissant de familles se trouvent en difficulté pour équilibrer leur budget, sachant que la plus grosse part du revenu global est consacrée au paiement du loyer et des charges locatives.
Le dispositif proposé ne nous paraît pas apporter une solution au problème. Comme l'a dit le président de la commission des finances, pour les collectivités locales, c'est la double peine : outre le financement des aides au logement lors du premier mois de carence, par exemple, celles-ci devront également payer une contribution de 0,2 % au FNAL
Je rappelle que, dans le cadre du plan de cohésion sociale, le Sénat a voté un amendement instaurant la créance prioritaire « logement ». Malheureusement, le décret d'application n'est toujours pas publié. La mise en oeuvre de cette mesure permettrait de faire en sorte que la première des dépenses prise en compte dans le cadre des dispositifs de surendettement soit bien la dette de loyer, et non pas celle des crédits à la consommation. Les départements seraient ainsi dispensés de contribuer au financement des dettes de loyer.
Ensuite, si le Gouvernement décide de diminuer de 3,6 % la part de l'État dans le financement du FNAL et prévoit, en contrepartie, une participation de 0,2 % des collectivités locales, cela ne s'inscrit pas dans une logique de renforcement des financements du FNAL.
Dès lors, on comprend pourquoi l'article 40 de la Constitution est invoqué sur les trois amendements présentés par la commission des affaires sociales. La déclaration trimestrielle de ressources permettrait d'être en adéquation, et non pas en décalage, avec les besoins des familles. La suppression du mois de carence est une mesure attendue par les familles. Tout cela vise à prendre en compte la situation réelle de nos concitoyens.
Si je suis bien consciente qu'il faut abonder les financements du FNAL, je m'interroge, comme M. Arthuis, sur la bonne solution.
Encore une fois, les collectivités locales ont leurs limites. Quel choix auront-elles ? Augmenter leurs impôts locaux ? Augmenter leur taxe professionnelle ? Augmenter la TIPP ? Tout à l'heure, nous évoquions les entreprises : une hausse de la TIPP se reportera non seulement sur les foyers, mais également sur les entreprises, qui ont elles aussi besoin de carburant, et cela pèsera d'autant sur leur coût de fonctionnement. Il y aura donc des répercussions sur le secteur économique, mais aussi sur les collectivités.
C'est pourquoi je rejoins, à titre personnel - la commission des affaires sociales n'a pas débattu de cette question - la position exposée par M. Arthuis, qui est une position de sagesse : il est urgent de trouver une solution intermédiaire qui, effectivement, permette de ne pas pénaliser le FNAL, lequel, aujourd'hui, a plutôt besoin d'être maintenu à niveau, et d'accompagner fortement les aides au logement, parce que les familles en ont plus que jamais besoin.
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour explication de vote.
M. Roland Muzeau. Je partage très largement les propos que vient de tenir ma collègue Valérie Létard. Quand le président de la commission des finances nous indique qu'il faut veiller à ne pas peser sur le coût du travail, là aussi, je peux entendre l'argument.
Cependant, comme vient de l'indiquer Valérie Létard, il ne faut pas penser qu'en faisant payer les collectivités locales nous pourrons éviter ce type d'effet induit : cela retombera immanquablement sur nos concitoyens, parce que les collectivités locales, dans leur majorité, et même s'il y a toujours des exceptions, procéderont à un ajustement de leurs recettes fiscales par le biais de l'augmentation des taux. Or on connaît les ravages que provoque aujourd'hui dans nombre de collectivités territoriales, par exemple, le plafonnement à 3,5 % en matière de taxe professionnelle. On peut donc mesurer quelles pourraient être les conséquences sur la taxe d'habitation, en particulier dans les villes.
Je voterai donc les amendements identiques de M. Dallier et de M. Repentin, mais je souhaite attirer l'attention de notre assemblée sur un point. M. Arthuis, à la fin de son propos, a indiqué à Mme la ministre que les sénateurs aviseraient de façon responsable et qu'il serait possible, lors de la CMP, de trouver une voie de passage. Il est aisé de deviner quelle pourrait être cette voie de passage, et elle commence à m'inquiéter, car, au fond, et même si un bout de chemin a été fait par l'une et l'autre partie, elle rejoint la proposition initiale du Gouvernement.
Pour ma part, je souhaite que la CMP ne vienne pas modifier l'ordre des choses et qu'elle respecte le vote qui va avoir lieu sur les amendements identiques nos II-40 et II-57.
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau, pour explication de vote.
M. Gérard Delfau. Sans reprendre l'ensemble de mon argumentation, j'indiquerai que je voterai sans aucune hésitation les deux amendements identiques qui nous sont proposés par la commission des finances et par la commission des affaires économiques.
Je soulignerai simplement combien le président de la commission des finances a raison quand il prend l'engagement d'user de son influence et de celle du Sénat, qui sont grandes, pour réviser cet arbitrage tout à fait inexplicable aux termes duquel, lorsqu'une famille est en situation de surendettement, ce sont grosso modo les contribuables qui paient par le biais du FNAL tandis que les banques sont complètement exonérées.
C'est là, effectivement, une piste de travail pour laquelle il nous trouvera, comme souvent, d'ailleurs, tout à fait solidaires.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-40 et II-57.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je constate que ces amendements ont été adoptés à l'unanimité des présents.
L'article 62 est donc ainsi rédigé.
Articles additionnels après l'article 62
M. le président. Tout à l'heure, M. Karoutchi, au nom de la commission des finances, a déclaré que les amendements n°s II-91, II-138, II-92, II-136, II-93 et II-137 tendant à insérer des articles additionnels après l'article 62 tombaient sous le coup de l'article 40.
En conséquence, ils sont irrecevables. J'en donne néanmoins lecture.
L'amendement n° II-91, présenté par Mme Létard, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 62, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa de l'article L. 351-3 du code de la construction et de l'habitation est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« L'aide personnalisée au logement est liquidée pour des périodes successives de trois mois.
« Son montant est calculé en fonction d'un barème défini par voie réglementaire. Les ressources prises en compte pour le calcul de l'aide sont égales à la moyenne trimestrielle des ressources effectivement perçues au cours des trois mois précédant la demande ou la révision. »
II. - L'article L. 831-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Avant le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L'allocation de logement sociale est liquidée pour des périodes successives de trois mois. »
2° Au début du premier alinéa, les mots : « Le mode de calcul de l'allocation de logement » sont remplacés par les mots : « Son mode de calcul ».
3° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les ressources prises en compte pour le calcul de l'allocation sont égales à la moyenne trimestrielle des ressources effectivement perçues au cours des trois mois précédant la demande ou la révision. »
L'amendement n° II-138, présenté par MM. Repentin, Lagauche, Pastor, Reiner et Dussaut, Mme Khiari, M. Caffet et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 62, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 542-5-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'allocation de logement est versée mensuellement. Les personnes remplissant les conditions de l'aide ne peuvent en être privées. Au cas où l'allocation mensuelle est d'un montant inférieur à un seuil fixé par décret, elle peut être versée par trimestre échu. »
II. - Après l'article L. 831-4-1, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L..... - L'allocation de logement est versée mensuellement. Les personnes remplissant les conditions de l'aide ne peuvent en être privées. Au cas où l'allocation mensuelle est d'un montant inférieur à un seuil fixé par décret, elle peut être versée par trimestre échu. »
III. - L'article L. 351-3-1 du code de la construction et de l'habitation est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
«... - L'aide personnalisée au logement est versée mensuellement. Les personnes remplissant les conditions de l'aide ne peuvent en être privées. Au cas où l'allocation mensuelle est d'un montant inférieur à un seuil fixé par décret, elle peut être versée par trimestre échu. »
IV. - La perte éventuelle de recettes résultant pour l'État de l'application du présent article est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° II-92, présenté par Mme Létard, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 62, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La première phrase du dernier alinéa de l'article L. 351-3 du code de la construction et de l'habitation est ainsi rédigée :
« Le barème, révisé chaque année au 1er janvier, est indexé sur l'évolution de l'indice de référence des loyers défini à l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. »
II. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 831-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant de l'allocation, révisé chaque année au 1er janvier, est indexé sur l'évolution de l'indice de référence des loyers défini à l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. »
III. - La perte éventuelle de recettes résultant pour l'État de l'application du présent article est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° II-136, présenté par MM. Repentin, Lagauche, Pastor, Reiner et Dussaut, Mme Khiari, M. Caffet et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 62, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - La première phrase du dernier alinéa de l'article L. 351-3 du code de la construction et de l'habitation est ainsi rédigée :
« Le barème, révisé chaque année au 1er janvier, est indexé sur l'évolution de l'indice de référence des loyers défini à l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. »
II. - Après le deuxième alinéa de l'article L. 831-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant de l'allocation, révisé chaque année au 1er janvier, est indexé sur l'évolution de l'indice de référence des loyers défini à l'article 17 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. »
III. - Après l'article L. 542-3 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L..... - Le montant de l'allocation, révisé chaque année, est indexé sur le nouvel indice de référence des loyers défini à l'article 17 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. »
IV. - La perte éventuelle de recettes résultant pour l'État de l'application du présent article est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° II-93, présenté par Mme Létard, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l'article 62, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa du I de l'article L. 351-3-1 du code de la construction et de l'habitation est ainsi rédigé :
« L'aide personnalisée au logement est due à compter de la date d'entrée dans le logement, sous réserve que les conditions d'ouverture des droits soient réunies. »
II. - La première phrase du premier alinéa de l'article L. 831-4-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée :
« L'allocation de logement est due à compter de la date d'entrée dans le logement, sous réserve que les conditions d'ouverture des droits soient réunies. »
III. - La perte de recettes résultant pour l'État de l'application du présent article est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° II-137, présenté par MM. Repentin, Lagauche, Pastor, Reiner et Dussaut, Mme Khiari, M. Caffet et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 62, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa du I de l'article L. 351-3-1 du code de la construction et de l'habitation est ainsi rédigé :
« L'aide personnalisée au logement est due à compter de la date d'entrée dans le logement, sous réserve que les conditions d'ouverture des droits soient réunies. »
II. - La première phrase du premier alinéa de l'article L. 831-4-1 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée :
« L'allocation de logement est due à compter de la date d'entrée dans le logement, sous réserve que les conditions d'ouverture des droits soient réunies. »
III. - La première phrase du quatrième alinéa de l'article L. 542-2 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigée :
« L'allocation de logement est due à compter de la date d'entrée dans le logement, sous réserve que les conditions d'ouverture des droits soient réunies. »
IV. - La perte de recettes résultant pour l'État de l'application du présent article est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Article 62 bis
La Caisse de garantie du logement locatif social est autorisée, à titre exceptionnel, à verser en 2007 à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine créée par l'article 10 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine un concours de 25 millions d'euros. Ce versement de la Caisse de garantie du logement locatif social à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine ne donne lieu à aucune indemnité ou perception d'impôts, droits ou taxes. - (Adopté.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame le ministre, vous me pardonnerez de reprendre la parole pour une ultime question.
On retiendra certainement de cette législature qu'elle a beaucoup fait pour le logement. En particulier, nous avons voté en loi de finances rectificative pour 2005 des dispositions ayant pour objet d'étendre le taux réduit de TVA à certains travaux de rénovation dans le bâtiment lorsqu'il s'agit de réhabilitations lourdes.
Sans doute le texte comportait-il des formulations un peu ambiguës ; toujours est-il que l'administration a cru devoir rédiger des imprimés que les propriétaires d'immeubles remplissent lorsque des travaux sont réalisés chez eux. Je voudrais vous rendre attentive aux « remontées d'huile » que nous avons reçues.
Le document simplifié comporte trois pages, contre quatre pour le document normal. Les propriétaires en sont un peu perturbés, et les entreprises du bâtiment qui leur soumettent ces documents pour libérer leur responsabilité, dans leur embarras, se livrent souvent à des commentaires qui traduisent un déficit manifeste de pédagogie ; en tout cas, on ne les sent pas très solidaires.
Si le Gouvernement pouvait, par voie d'instruction, y porter remède, je pense que chacun y gagnerait, et votre politique serait encore plus appréciée.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée. Monsieur le président de la commission des finances, vous avez raison : il est nécessaire de préciser certains points.
Le décret du 11 août indique les éléments de second oeuvre auxquels s'applique le taux réduit de TVA. Pour autant, on sait que, sur le terrain, un certain nombre d'entreprises ont encore quelques difficultés. C'est la raison pour laquelle l'administration fiscale est en train de travailler à un document qui sortira au tout début de l'année 2007.
M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Ville et logement ».
Recherche et enseignement supérieur
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » (et article 51).
La parole est à M. Maurice Blin, rapporteur spécial.
M. Maurice Blin, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vais m'efforcer de tirer le meilleur parti possible du peu de temps qui m'est imparti, ce qui n'est pas une tâche facile.
Le budget qui nous est proposé est le premier qui suit l'adoption de la loi de programme pour la recherche du 18 avril 2006. Il est d'ailleurs, constatons-le d'emblée, en étroite continuité financière avec elle, ce dont il convient de se féliciter. Avec 21,3 milliards d'euros de crédits de paiement, soit plus 2,6 % à périmètre constant par rapport à 2006, il en respecte en effet les dispositions.
En outre, il confirme la progression du financement de la recherche par l'État jusqu'en 2010, disposition obtenue grâce à un amendement de la commission spéciale présidée par M. Jacques Valade et dont j'avais eu l'honneur d'être co-rapporteur.
Cette hausse s'équilibre entre, premièrement, la progression du budget des opérateurs traditionnels, que symbolise l'augmentation des crédits de la Mission interministérielle de la recherche et de l'enseignement supérieur, la MIRES, deuxièmement, le développement de la recherche par projets, fait nouveau, par l'intermédiaire de l'ANR et d'OSEO-ANVAR, enfin, troisièmement, l'encouragement à la recherche privée au moyen d'incitations fiscales, en particulier grâce au crédit d'impôt recherche.
Elle a aussi un autre mérite, et il n'est pas moindre : la relative rapidité avec laquelle ont été mis en place les organismes, qu'il soit nouveau, tel l'ANR, ou renouvelé, tel l'OSEO-ANVAR, organismes au travers desquels s'exprime le respect des étapes qu'impose une recherche digne de ce nom, c'est-à-dire soucieuse en même temps d'efficacité et d'économie, à savoir l'orientation, la sélection et, surtout, l'évaluation.
Cette dernière sera confiée à l'Agence de la recherche et de l'enseignement supérieur, l'ARES, dont le décret fondateur vient enfin d'être publié. Son rôle est à la fois le plus délicat et le plus nécessaire : délicat, car toute recherche peut demander du temps, et le résultat, par définition, est incertain ; nécessaire, car un pays d'importance moyenne comme le nôtre ne peut lui consacrer que des ressources limitées. Cette recherche ne peut donc échapper, je le répète, et on ne le dira jamais assez, au principe d'économie.
Il reste, pour ceux qui s'en soucient, que l'augmentation de 3,5 % des crédits affectés aux grands organismes publics de recherche comme le CNRS, l'INSERM, le CEA, et beaucoup d'autres, témoigne de la volonté du Gouvernement de sauvegarder la recherche à plus long terme.
En outre, et je tiens à le dire tant cet élément me paraît important dans cet ensemble de dispositions, certains de ces organismes explorent la voie qui permettra demain de rapprocher - faut-il dire enfin ? - recherche et enseignement. Elle mettra progressivement un terme à la lourdeur d'un système, singularité bien française, qui cumule à la fois le statut de « chercheur à vie » et le manque d'emplois sur lequel butent trop de post-doctorants. À l'image de ce qui se pratique depuis longtemps en Grande-Bretagne et aux États-Unis, le contrat négocié relaiera le statut.
Certes, le pacte pour la recherche garde des ombres, comporte des paris que le temps seul pourra lever. Les pôles de recherche et d'enseignement supérieur, les PRES, qui réunissent l'État, l'entreprise privée et l'université ne se mettent que lentement en place. La part des PME dans la répartition des crédits de recherche est encore bien modeste, à l'inverse de celle des grands organismes publics qui se taillent la part du lion, et sont dominants.
La voie ouverte par vos soins, monsieur le ministre, reste donc, pour le moment, étroite. Mais elle devrait s'élargir dans la mesure où l'opinion a désormais pris conscience du rôle capital que la recherche jouera demain dans l'avenir du pays. À condition aussi que la multiplicité, la complexité des organismes qui auront à la gérer n'alimentent pas une bureaucratie qui l'étoufferait.
J'en viens à l'examen des programmes que j'avais à vous rapporter.
Le programme « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » finance les grands organismes publics auxquels je viens de faire allusion. La hausse de leurs crédits montre - je le redis pour répondre à certaines inquiétudes qui se sont manifestées dans le monde des chercheurs - que la recherche « traditionnelle » par organismes et la recherche « nouvelle » par projets ne s'opposent pas, mais s'appuient et se relaient.
En revanche, le programme « Orientation et pilotage de la recherche » pose problème. En effet, conformément aux recommandations du Comité interministériel d'audit des programmes, le CIAP, ce programme a été amputé des crédits destinés au paiement des allocations de recherche. Ceux-ci figureraient à présent dans le programme « Formations supérieures et recherche universitaire ».
Or, le programme « Orientation et pilotage de la recherche » ne dispose paradoxalement ni des dépenses de personnel de la Direction générale de la recherche et de l'innovation, ni, surtout, des crédits d'intervention de l'ANR, soit environ 825 millions d'euros, puisque cette agence doit être financée par une affectation d'impôt.
En conséquence, les crédits de ce programme ne représentent plus que 0,6 % des crédits de la mission, alors même que ses objectifs, très ambitieux, pourraient être ceux de la mission tout entière.
Cette disposition est, à l'évidence, contraire au principe de la LOLF ; je pense que vous en conviendrez, monsieur le ministre. De plus, des programmes de trop petite taille enlèvent, en pratique, tout pouvoir aux gestionnaires de ce programme.
C'est pourquoi je vous proposerai, mes chers collègues, un amendement visant tout simplement à supprimer ce programme et à transférer ses crédits vers le programme « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires ». Cet amendement n'a, certes, qu'une portée symbolique, mais elle est forte, car il est indispensable que le Parlement rappelle à l'exécutif, à temps et à contretemps s'il le faut, le respect d'une règle qui vise à établir clarté et transparence dans l'élaboration et le contrôle de la dépense publique.
À propos du programme « Recherche dans le domaine de l'énergie », se pose une question simple, monsieur le ministre. L'an dernier, j'avais proposé, au nom de la commission des finances, un amendement tendant à réduire de 5 millions d'euros la subvention de l'État à l'Institut français du pétrole, organisme très performant, à la notoriété internationale reconnue, et qui bénéficie de la confiance et de l'appui des compagnies pétrolières dont les ressources ont, on le sait, augmenté.
J'avais retiré cet amendement à la suite de l'avis défavorable du Gouvernement. Je suis donc très surpris de constater que le même gouvernement propose, un an plus tard, une disposition qu'il avait combattue hier. J'aimerais, monsieur le ministre, en connaître la raison.
Le programme « Recherche industrielle » appelle, quant à lui deux remarques.
Tout d'abord, le financement d'OSEO-ANVAR est peu clair, car il passe par de multiples circuits. Par ailleurs, nous aurons, au début de l'année 2007, une audition pour suite à donner à une enquête de la Cour des comptes que le président Jean Arthuis avait sollicitée en son temps au sujet des derniers exercices de l'EPIC ANVAR et de sa transformation en OSEO-ANVAR.
Ensuite, s'agissant de l'Agence de l'innovation industrielle, ses crédits d'intervention jusqu'en 2007 ont fait l'objet, fin 2005, d'un versement unique de 1,7 milliard d'euros par le compte d'affection spéciale « Participations financières de l'État ». Au-delà de l'année prochaine, la pérennité des crédits de cette agence n'est donc pas assurée.
Ma dernière observation concerne un sujet difficile, celui des liens en matière de recherche entre le militaire et le civil. L'an dernier, il avait été traité d'une façon très simpliste et en quelque sorte pour la forme : 200 millions d'euros avaient été affectés à deux organismes, le CNES et le CEA, et à eux seuls. J'avais alors déploré cette logique de guichet qui aboutissait en réalité à abonder tout simplement les budgets de ces deux grandes maisons.
Or, en 2007, la situation reste inchangée. Pourquoi ? Le croisement entre recherche militaire et recherche civile, délicat, je le reconnais, en France et ailleurs, s'imposerait d'autant plus que, de l'espace à l'atome, celles-ci ont la même finalité : la sécurité.
Sous le bénéfice de ces observations et compte tenu de l'amendement de principe évoqué plus haut, la commission des finances vous invite, mes chers collègues, à voter le budget de la recherche pour 2007. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je me félicite du respect des engagements pris par le Gouvernement à l'occasion de la loi de programme pour la recherche. Tout n'est pas parfait, mais nous allons dans le bon sens, et nous l'apprécions.
Toutefois, n'oublions pas que le projet de budget que nous examinons concerne aussi bien la recherche que l'enseignement supérieur.
Des 21,3 milliards d'euros que comptabilise la mission, la moitié est affectée au programme « Formations supérieures et recherche universitaire ». À structure constante, les crédits de ce programme sont en augmentation de 2,82 %.
Lors de la discussion des deux précédents budgets, j'avais mis en avant la nécessité de rééquilibrer le financement en faveur de l'enseignement supérieur, qui, comparé à celui de nos voisins, apparaît sous-doté. Cette année, je soulignerai les indispensables évolutions qualitatives du système, sans lesquelles tout effort financier aurait une portée limitée en termes d'insertion professionnelle des étudiants.
Deux points majeurs doivent à l'avenir faire l'objet de toute notre attention : d'une part, la nécessité de réussir l'entrée dans les études supérieures ; d'autre part, celle de réviser la gouvernance des universités.
S'agissant de la première année d'études supérieures, l'enjeu, ou plutôt le défi, consiste à faire en sorte que chaque inscription à l'université soit non seulement le résultat d'un choix, mais également l'aboutissement d'une réflexion prenant en compte les acquis scolaires et les perspectives d'insertion professionnelle. Un certain nombre de propositions ont été formulées, que ce soit par vous, monsieur le ministre, avec la possibilité de préinscription, ou dans le cadre de la commission Hetzel. Je m'en félicite.
Il me semble toutefois nécessaire d'aller au-delà et de mettre en place au cours du premier trimestre de l'année de terminale, avant que ne s'effectuent les premiers choix, un module d'enseignement permettant à l'élève de développer sa réflexion et d'élargir ses horizons. Il s'agit donc de promouvoir une approche professionnelle de l'orientation en utilisant les formations dispensées par les professeurs actuels, sans en créer de nouvelles, mais en leur donnant une cohérence propre à éclairer les étudiants et en renforçant cette approche par l'intervention d'établissements supérieurs au cours de ce module, de manière à ouvrir des perspectives de choix.
Monsieur le ministre, nous souhaitons vivement que vous permettiez cette expérimentation, qui, je pense, pourrait faire la démonstration de son efficacité et viendrait compléter heureusement les mesures que vous avez déjà proposées. Cela nous paraît d'autant plus important que l'actuelle absence de choix conduit finalement à ternir l'image de l'université, alors que celle-ci est, je crois, de très bon niveau.
Le second point a trait à la gouvernance des universités. Ma principale inquiétude concerne la capacité des universités, dans le contexte actuel de compétition internationale, à attirer, ou tout simplement à conserver ses enseignants-chercheurs. Sans marge de manoeuvre financière, sans possibilité de s'ajuster à cette compétition internationale, nos établissements, monsieur le ministre, ne seront pas en mesure de garder les meilleurs.
Sans souplesse, il ne nous sera pas possible de recruter les personnels de qualité, aussi bien les enseignants que les personnels de direction, qui soient les plus adaptés aux missions que nous voulons leur confier. Des profils de postes attractifs impliquent un fléchage réduit des crédits, la possibilité de procéder à des choix et à des arbitrages, des responsabilités à exercer.
Dans cette perspective, monsieur le ministre, je souhaiterais que, sur ce point aussi, soit conduite une mission pour que, grâce à une dotation globale renforcée, nous puissions à titre expérimental, dans une université ou deux pour commencer, donner de l'espace aux présidents d'université de façon qu'ils puissent assumer leurs responsabilités, choisir de garder les meilleurs, en ayant peut-être moins de postes, mais en exerçant pleinement leurs responsabilités.
J'ai noté une très nette augmentation des crédits du programme « Vie étudiante ». Je ne reviendrai pas cette année sur les problèmes du logement étudiant, que nous avons déjà largement évoqué, monsieur le ministre, et sur lequel je garde ma position : vous pourriez beaucoup mieux utiliser cet argent, qui vous est indispensable.
En ce qui concerne les bourses, nous souhaiterions que les informations fournies dans le projet annuel de performances soient plus précises, afin notamment que nous puissions connaître la nature des bourses honorées dans les délais. Je rappelle que plus de 490 000 étudiants bénéficient de bourses sur critères sociaux et que 199 000 étudiants perçoivent une bourse échelon 5, c'est-à-dire la plus élevée.
Par ailleurs, si nous nous félicitons de l'accélération qu'a connu cette année le paiement des bourses, il est important que les difficultés de trésorerie qui en résultent soient résolues au plus vite. Nous vous serions reconnaissants, monsieur le ministre, de bien vouloir faire le point à ce sujet.
Par ailleurs, quid de la situation d'un certain nombre d'étudiants qui, ayant obtenu l'essentiel de leurs diplômes, choisissent le statut social d'étudiant, mais ne sont plus vraiment étudiants.
S'agissant des autres programmes dont j'ai la charge et qui comprennent de nombreux opérateurs, je souhaite faire une remarque générale sur l'évaluation des actions conduites.
Tout d'abord, l'évaluation de la performance nécessite une certaine stabilité des indicateurs et de leur méthodologie, afin que les résultats puissent être observés sur plusieurs années. Or l'architecture des programmes a, cette année encore, connu de nombreuses modifications. Nous pouvons le comprendre, mais nous souhaiterions une plus grande stabilité.
En outre, un certain nombre d'indicateurs sont tributaires de la fiabilité des informations recueillies par les opérateurs. Dans cette perspective, la mise en place de systèmes d'information intégrés et l'élaboration systématique de protocoles méthodologiques permettraient d'améliorer la sincérité et l'homogénéité des informations transmises.
De ce point de vue, les projets annuels de performance ne sont pas encore de réels outils d'analyse.
Cela m'amène à souligner, s'agissant du programme « Recherche culturelle et culture scientifique », l'absence d'indicateurs concernant le Palais de la découverte et, plus largement, l'absence d'informations et de justification de la subvention accordée au Palais de la découverte, alors même que la totalité de sa subvention est inscrite sur la présente mission. Nous aurons l'occasion d'en reparler, puisque nous avons déposé un amendement. Le Parlement mérite d'être respecté, ce qui, en l'espèce, n'a pas été le cas.
Enfin, mon ultime remarque sera inspirée des deux premières années de vie de la LOLF. Au cours de l'examen de la loi de finances, nous raisonnons désormais par mission, regroupement cohérent de crédits concourant à la mise en oeuvre d'une politique publique. Toutefois, ce raisonnement apparaît partiel, puisque, s'agissant de l'exercice de régulation budgétaire, le découpage ministériel garde toute sa pertinence. À ce moment-là, nous arrivons à des blocages dont nous aurons l'occasion de nous entretenir puisque mon collègue Jean-Léonce Dupont présentera un amendement concernant l'enseignement supérieur agricole.
Ce budget va dans le bon sens. Au nom de la commission des finances, je vous invite à l'adopter, même si je pense qu'il faudra être rapidement capable d'affecter à la recherche, à la valorisation et à l'innovation des moyens extrêmement plus importants si nous voulons relever les défis face aux sociétés qui vont très vite et très fort en ce domaine.
Monsieur le ministre, je pense que c'est possible. Comme j'ai eu l'occasion de le dire aux syndicalistes de la recherche que j'ai reçus cette semaine, je suis partisan de consacrer beaucoup plus d'argent en la matière. Cette conviction, je la tire d'une comparaison : aujourd'hui, 20 milliards d'euros sont consacrés à l'ensemble de l'enseignement supérieur et de la recherche, contre 11 milliards d'euros pour réparer les dégâts occasionnés par la mise en place des dégâts des 35 heures. Si l'on voulait réfléchir à l'efficacité de la dépense publique, à l'avenir de notre jeunesse, au devenir de l'emploi, les crédits sont largement suffisants pour faire de votre ministère le plus important de notre pays. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis.
M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le rapporteur pour avis des onze programmes de la mission « Recherche et enseignement supérieur » consacrés à la recherche que je suis, Jean-Léonce Dupont étant le rapporteur pour avis des deux programmes concernant l'enseignement supérieur et la vie étudiante, était tenté de commencer son intervention par le mot : « enfin ».
Enfin, en effet, une priorité, que, pour ma part, je réclame depuis vingt-deux ans à cette même tribune, est donnée à la recherche et à l'innovation !
D'abord, conformément à ses engagements et dans la droite ligne de la loi de programme que nous avons votée en avril dernier, le Gouvernement propose de poursuivre l'effort sans précédent engagé en faveur de la recherche et de l'innovation, et ce malgré un contexte de maîtrise accrue des dépenses publiques : il prévoit de mobiliser plus d'un milliard d'euros supplémentaires et de créer 1 000 nouveaux postes pour la recherche.
La commission des affaires culturelles s'en réjouit, comme elle se réjouit de toute une partie de ces programmes que je n'ai pas le temps d'évoquer ici du fait de la brièveté de ce débat, brièveté qui d'ailleurs, me semble-t-il, n'est pas à la mesure de l'importance que ces sujets revêtent. Il est en effet étonnant que les priorités de la nation que sont la recherche et l'enseignement supérieur, ainsi que l'écologie et le développement durable, alors que nous devons nous défendre contre le dérèglement climatique, soient examinées un vendredi soir et un samedi soir, voire dans la nuit !
Enfin tout de même, les programmes de la mission bénéficient non seulement d'une augmentation des crédits, mais aussi d'un pilotage de ces crédits, ce qui, à mon sens, constitue une réforme considérable qui s'apparente à celles qui sont conduites dans la plupart des pays les plus industrialisés.
Nous avons développé des agences, notamment l'Agence nationale de la recherche, l'ANR, renforcé l'OSEO-ANVAR, créé une nouvelle agence, l'Agence de l'innovation industrielle. Je remarque au passage que ces agences ne sont pas sous le contrôle direct du Parlement : elles ne sont même pas budgétisées de façon claire, en particulier en ce qui concerne l'ANR.
Nous avons appris, avec plaisir, que 300 millions d'euros supplémentaires, qui seront gérés par l'ANR, étaient alloués au financement des programmes liés aux réseaux thématiques de recherche avancée, les RTRA, et aux pôles de recherche et d'enseignement supérieur, les PRES.
C'est une raison de plus pour demander avec insistance, comme la commission des finances, qu'à l'avenir l'ANR soit budgétisée.
La commission des affaires culturelles regrette par ailleurs qu'un aspect essentiel fasse défaut au programme « Orientation et pilotage de la recherche », que nous aimerions voir intitulé « Orientation, pilotage et modernisation de la recherche », et que ce programme ait été privé de certains de ses éléments, alors qu'il devrait au contraire être renforcé dès à présent, question que nous évoquerons à l'occasion d'un amendement, notre objectif étant, comme celui de la commission des finances, que le Parlement puisse avoir une vision claire de ces éléments fondamentaux que sont le pilotage, l'orientation et la modernisation de la recherche.
Nous n'avons pas non plus beaucoup d'indications dans le projet de budget sur les « instituts Carnot ». Nous voulons faire des instituts Fraunhofer à la française, mais cette volonté n'apparaît pas dans les crédits.
Il faudra, monsieur le ministre, prendre une décision politique forte pour montrer qu'il existe des instituts Carnot, que vous en avez labellisés un certain nombre et que ces instituts devraient pouvoir se développer, y compris dans des universités qui ne sont pas encore labellisées. Il y a en effet là une dynamique qui incitera à la modernisation de nos universités.
Je voudrais aussi évoquer le système de « bottom-up » dans les appels à projets relevant de l'ANR, qui nous concerne tout particulièrement.
Nous nous interrogeons aussi, monsieur le ministre, sur le fait étonnant que vous n'ayez pas un contrôle sur plusieurs fonds interministériels importants, pilotés essentiellement à l'intérieur de la direction générale des entreprises par le ministère de l'industrie.
Je me réjouis cependant qu'un fonds interministériel ait été mis en place, car cela facilite les choses, même si le fonctionnement des différentes organisations et entreprises ne s'en trouve pas simplifié, chacune d'entre elles ayant développé un système d'expertises, expertises qui sont parfois longues, longueur qui, en matière d'innovation, me paraît parfaitement illusoire.
En effet, les projets sont en principe déjà étudiés. Ceux qui s'engagent financièrement devraient probablement le faire plus fermement dans les appels à projets, mais il me semble que la durée d'étude de ces appels à projets devrait être la plus brève possible, parce que l'innovation n'attend pas et elle est souvent en concurrence avec l'innovation émanant d'autres pays dont la dynamique est beaucoup plus forte.
Le fonds de compétitivité des entreprises disposera désormais, et je m'en réjouis, de 600 millions d'euros grâce à la simplification des procédures, et notamment grâce à la disparition de dispositifs très complexes qui posaient en particulier des problèmes aux pôles de compétitivité et qui auraient conduit à un certain nombre d'anomalies, à des transferts de sièges sociaux plus ou moins fictifs de façon à leur permettre de bénéficier d'avantages sociaux, et non pas fiscaux.
La formule retenue, qui consiste à avantager les PME de façon plus directe, me paraît donc une simplification très utile.
Les pôles de compétitivité ont correspondu à une forte mobilisation des acteurs dans toute la France. C'est une révolution tranquille des mentalités qui manifeste un espoir et un dynamisme retrouvés, mais, encore une fois, monsieur le ministre, je crois que l'ensemble de ces contrôles a priori devraient être renforcés par un contrôle a posteriori beaucoup plus puissant et systématique.
Enfin, nous avons voté avec notre collègue Philippe Adnot un amendement visant à inciter les structures financières à être plus dynamiques en matière de capital-risque. Ce n'est pas le sujet principal de votre ministère, mais vous savez bien, monsieur le ministre, qu'il faut promouvoir un financement massif de la recherche par un capital-risque renouvelé et renforcé.
On pourrait aussi envisager un prélèvement obligatoire sur les contrats d'assurance vie, mesure que le Sénat avait adoptée mais qui n'a pas été mise en place définitivement.
Une telle mesure correspond à une volonté qui commence à se manifester, mais cette volonté est insuffisante si on la compare à la dynamique extraordinaire en matière de transferts de technologie et de développement de l'innovation qui est nécessaire à notre pays.
En conclusion, monsieur le ministre, j'indique que la commission des affaires culturelles a, évidemment, émis un avis favorable à l'adoption des crédits destinés à la recherche dans la mission « Recherche et enseignement supérieur » et elle vous félicite pour la dynamique nouvelle dont, grâce aux programmes de cette mission, notre pays pourra bénéficier, à condition toutefois que l'on veille à leur application. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à la suite de Pierre Laffitte, je vous présenterai le programme « Formations supérieures et recherche universitaire » et le programme « Vie étudiante ». En 2007, 12,51 milliards d'euros seront consacrés à ces programmes, soit une progression de 3,1 %, à structure constante. En outre, 1 000 emplois supplémentaires seront créés.
Je rappelle toutefois que le renforcement des moyens doit s'accompagner d'une bonne gestion prévisionnelle des effectifs et d'une meilleure visibilité des recrutements.
Je me réjouis surtout de la forte augmentation du niveau des allocations de recherche pour les doctorants ; nous l'avions appelée de nos voeux.
En ce qui concerne les crédits de fonctionnement, je me suis particulièrement intéressé à la situation des bibliothèques universitaires, qui bénéficieront d'1 million d'euros de moyens supplémentaires.
Je m'inquiète cependant du retard pris par nos bibliothèques par rapport à leurs homologues européennes, qu'il s'agisse du nombre de places offertes, des documents accessibles ou encore des horaires d'ouverture, et j'insiste particulièrement sur ce dernier point. Il conviendra de leur donner les moyens de combler leur retard, car il semble que les nouvelles technologies ne pourront que partiellement les y aider.
Par ailleurs, les établissements d'enseignement supérieur agricole nous ont fait part de leurs inquiétudes, en raison de l'annulation d'une partie des subventions qui devaient leur être allouées en 2006. Je rappelle que le Gouvernement s'était engagé à leur égard, en contrepartie d'efforts réalisés notamment en matière de recherche. Outre l'amendement que nous défendrons tout à l'heure à ce sujet pour le budget 2007, nous souhaitons qu'à l'avenir les arbitrages ministériels ne soient pas défavorables à l'enseignement agricole.
Par ailleurs, et de façon plus générale, j'aimerais, monsieur le ministre, que vous nous confirmiez qu'un redéploiement de crédits permettra d'augmenter la subvention aux établissements d'enseignement supérieur privés, sujet qui avait été évoqué par le biais d'un amendement déposé à l'Assemblée nationale.
Je me réjouis, en revanche, qu'un effort particulier soit accompli en faveur du programme « Vie étudiante », dont le budget progresse de 4,31 % en 2007, à structure constante.
Quant au logement étudiant, l'accélération du rythme des constructions est avérée. Je souhaite que le plan Anciaux puisse atteindre sa vitesse de croisière en 2007, les besoins en logements étudiants restant criants.
Les aides directes aux étudiants enregistrent une forte hausse, de 4,5 %. Cela n'ôte cependant rien à la nécessaire réforme du système d'aides sociales aux étudiants que j'avais déjà appelée de mes voeux l'an dernier. Le dispositif est en effet complexe ; il a en même temps pour principal inconvénient d'ignorer les étudiants issus des classes moyennes.
Par ailleurs, bien que les délais de versement des bourses aient été améliorés cette année, mon attention a été attirée sur les problèmes subsistant en fin d'année civile.
Dans ces conditions, monsieur le ministre, j'aimerais connaître les conclusions de l'audit sur la gestion des bourses de l'enseignement supérieur lancé en avril dernier et les perspectives de réforme du système d'aides sociales aux étudiants.
Par ailleurs, je me félicite des progrès réalisés dans le domaine de l'enseignement supérieur, qu'il s'agisse de la mise en oeuvre du système licence-master-doctorat, ou système LMD, de la réforme très positive de la formation doctorale ou des avancées en matière d'orientation.
Cette question de l'orientation est bien évidemment essentielle, tant pour la réussite des jeunes eux-mêmes et pour leur bonne insertion professionnelle que pour le pays tout entier. Je constate une réelle évolution des esprits dans ce domaine et m'en réjouis très sincèrement.
Il convient maintenant que les universités se mobilisent pour alimenter rapidement le portail Internet et faire figurer sur ce site les taux de réussite et d'insertion professionnelle de toutes les filières de formation proposées. Le taux d'insertion professionnelle doit être l'un des critères d'habilitation et d'évaluation des filières, afin d'éviter une surabondance d'offres de formation dans des secteurs aux débouchés limités.
Monsieur le ministre, je suis président de la commission des affaires sociales de mon département et je faisais récemment le point sur les contrats d'avenir : sur 500 contrats négociés cette année, 20 % sont attribués à des diplômés de l'enseignement supérieur. Et lorsqu'on interroge ces derniers sur leur motivation, la réponse est unanime : la formation suivie ne correspond pas au marché de l'emploi.
Je me réjouis par ailleurs de la mise en oeuvre d'un dispositif expérimental d'orientation active. Je crois cependant que son efficacité sera subordonnée à la correction de certaines dérives.
À cet égard, il convient d'abord de restaurer la logique qui consiste à donner aux titulaires d'un baccalauréat professionnel ou technologique un accès privilégié aux sections de techniciens supérieurs, ou STS, et aux instituts universitaires technologiques, ou IUT. À quoi servirait en effet d'améliorer l'information et l'orientation des jeunes si ces derniers ne pouvaient accéder à la formation la plus pertinente ?
Il faut ensuite que le travail engagé par le Gouvernement pour développer les passerelles entre les différentes formations se poursuive. Il s'agit notamment d'éviter que d'éventuels échecs dans certaines filières ne se traduisent par une année perdue pour l'étudiant.
Je crois que les mesures en matière d'orientation doivent s'accompagner d'un effort considérable pour renforcer l'attractivité des carrières scientifiques, en vue d'assurer le remplacement des nombreux chercheurs qui partiront à la retraite dans les années à venir.
Il faut aussi nous donner les moyens à la fois de retenir les chercheurs brillants, souvent tentés de partir à l'étranger, et d'attirer les meilleurs chercheurs étrangers. Cela suppose d'assouplir les modalités et conditions de recrutement par les établissements.
Outre le statut de titulaire de la fonction publique, ces établissements doivent pouvoir proposer des contrats d'une durée suffisante pour la réalisation d'un projet, à des niveaux de rémunération attractifs. A cet égard, la politique menée par l'INSERM mérite d'être saluée et peut-être de faire école.
Par ailleurs, je me félicite que le Gouvernement se soit saisi de la question de l'ouverture sociale dans l'enseignement supérieur.
A la suite de la proposition de loi déposée par notre collègue Yannick Bodin sur ce thème, la commission des affaires culturelles a créé une mission d'information portant sur la diversité sociale et l'égalité des chances dans la composition des classes préparatoires aux grandes écoles, mission présidée par notre collègue Jacques Legendre. Le rapporteur en est Yannick Bodin ; Pierre Laffitte et moi-même comptons parmi les vice-présidents.
J'insiste cependant pour que, parallèlement à la légitime préoccupation relative à l'accès aux classes préparatoires aux grandes écoles, soient redoublés les efforts de sensibilisation des jeunes à l'égard des autres filières d'excellence, qu'elles soient professionnalisantes ou scientifiques.
Je citerai un autre sujet d'actualité : la double réforme, statutaire et pédagogique, des IUFM.
Le cahier des charges doit être fixé d'ici à la fin de l'année, et M. de Robien en a déjà tracé quelques contours. À cet égard, il nous paraît indispensable que les futurs enseignants soient mieux sensibilisés aux réalités de leur métier ainsi qu'à celles du monde socioéconomique et à la culture d'entreprise.
De façon générale, les avancées sont réelles. Je crois néanmoins qu'une part essentielle du chemin reste à parcourir et que ce sera la tâche du prochain gouvernement, quel qu'il soit. Je pense notamment, bien entendu, à la réforme de l'autonomie et de la gouvernance des universités, qui me semble indispensable, incontournable,...
M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis. Urgente !
M. Jean-Léonce Dupont.... mais aussi à la nécessaire évolution des modes de financement de nos universités.
J'ai étudié cette année les réformes conduites par deux grands pays voisins, l'Allemagne et le Royaume-Uni, et je vous assure que les évolutions rapides de leurs systèmes d'enseignement supérieur et de recherche doivent nous faire réfléchir.
Bien sûr, leurs traditions et cultures sont différentes des nôtres, mais je suis convaincu que, dans un contexte de mondialisation croissante, les évolutions en cours dans les pays étrangers ne seront pas sans impact sur l'évolution de notre propre système, car nous sommes confrontés aux mêmes défis et aux mêmes difficultés. Qu'en pensez-vous, monsieur le ministre ?
Enfin, comme Pierre Laffitte, j'estime nécessaire que la France ratifie dès que possible l'accord de Londres sur le brevet européen. Les entreprises, quelle que soit leur taille, attendent cette mesure. J'aimerais également connaître les intentions du Gouvernement sur ce sujet.
En conclusion, monsieur le ministre, j'indiquerai que la commission des affaires culturelles a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à l'enseignement supérieur et à la vie étudiante pour 2007. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi de finances pour 2007, adopté par l'Assemblée nationale.
Dans la suite de l'examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », la parole est à M. Henri Revol, rapporteur pour avis.
M. Henri Revol, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. Mes chers collègues, votre commission des affaires économiques salue, bien entendu, le troisième milliard d'euros, qui vient s'ajouter aux crédits des budgets de 2005 et 2006, permettant ainsi de remplir pleinement l'engagement triennal sans précédent en faveur de la recherche que proposait, en 2004, le Président de la République.
Encore faut-il ajouter à ces crédits les très importants moyens nouveaux dont dispose l'Agence de l'innovation industrielle afin de mener à bien les huit grands programmes déjà lancés. C'est dans ce contexte très favorable que nous avons souhaité formuler quatre remarques ou questions très brèves.
Premièrement, s'agissant des 2 000 emplois nouveaux prévus par ce projet de budget, votre commission tient à rappeler qu'il ne suffit pas de créer des postes de chercheurs et de les pourvoir - même si, bien entendu, il s'agit d'un point très positif - encore faut-il offrir à ces chercheurs un environnement qui leur permette de travailler efficacement.
Cet accompagnement passe par le recrutement de personnels, ingénieurs, techniciens et administratifs, comme le prévoit le présent projet de loi de finances, mais aussi par une dotation en équipements qui permette aux scientifiques de mener leurs recherches.
Or ces investissements et équipements sont trop faibles en France. Après le rattrapage et les développements de l'emploi scientifique, il est désormais nécessaire de prévoir un rééquilibrage en ce sens. Monsieur le ministre, nous aimerions savoir si vous partagez sur ce point notre diagnostic.
Deuxièmement, s'agissant des indicateurs de performance des programmes de la MIRES, la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur », nous voudrions marquer notre intérêt pour un indicateur du taux de brevets donnant lieu à une exploitation socio-économique, et ce afin de lutter contre le phénomène des brevets dormants.
Nous avons déjà débattu de ce problème lors de l'examen de la loi de programme pour la recherche. Il était apparu alors que la meilleure méthode était non pas d'intervenir par la loi en faveur de l'exploitation des brevets, mais plutôt d'inciter les laboratoires, au moyen, notamment, d'une amélioration du système d'indicateurs de performance institué par la LOLF.
Troisièmement, monsieur le ministre, qu'en est-il officiellement des travaux du Gouvernement sur le crédit d'impôt recherche ? La date butoir pour la présentation du rapport d'évaluation économique de ce dispositif, fixée au 1er octobre 2006 par la loi de programme, n'a malheureusement pu être respectée. Au-delà de l'expression de ce regret, nous souhaiterions savoir si les études menées permettent d'ores et déjà de tirer des conclusions quant à l'efficacité de ce dispositif, eu égard, notamment, au dilemme entre élargissement et concentration des dépenses éligibles et à la sempiternelle question de l'effet d'aubaine.
Quatrièmement, j'évoquerai le périmètre de la mission « Recherche et enseignement supérieur », dans lequel ne figurent pas les crédits de l'ANR, l'Agence nationale de la recherche. Monsieur le ministre, je ne reprendrai pas les arguments de nos collègues de la commission des finances, d'autant plus que notre commission a marqué son attachement au maintien du programme 172 « Orientation et pilotage de la recherche ».
Je ne mettrai pas non plus en cause la transparence ou le souci de performance, et même d'excellence, qui caractérisent l'action de l'ANR, car chacun peut en apprécier la réalité, simplement en se rendant sur le site Internet de l'agence ou en consultant son rapport d'activité.
Toutefois, l'ANR bénéficiant désormais d'un statut juridique plus solide et de l'affectation d'une ressource fiscale, et donc pérenne, nous ne voyons pas pourquoi les crédits de l'agence, ses objectifs et les indicateurs qui lui sont associés ne prendraient pas leur place naturelle au sein de la MIRES. Monsieur le ministre, nous serons très intéressés par vos explications, même si nous n'avons pas déposé d'amendement sur cette question.
En effet, c'est sans adopter aucun amendement que la commission des affaires économiques a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la MIRES. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe Union pour un mouvement populaire, 60 minutes ;
Groupe socialiste, 41 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 18 minutes ;
Groupe du rassemblement démocratique et social européen, 15 minutes.
Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d'intervention générale et celui de l'explication de vote.
Je vous rappelle également que, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quarante-cinq minutes pour intervenir.
La parole est à M. Pierre Bordier.
M. Pierre Bordier. Monsieur le ministre, permettez-moi, tout d'abord, de vous féliciter d'avoir tenu les engagements pris lors du vote de la loi de programme pour la recherche.
Je me réjouis que le Gouvernement se soit ainsi engagé sur la voie d'une rénovation ambitieuse du système national de recherche et d'innovation, en étroite collaboration avec tous les acteurs qui y concourent.
La France bénéficie d'une longue tradition d'excellence scientifique et compte des savants de grande valeur. Pourtant, il était nécessaire de donner un nouveau souffle à notre système de recherche, mis en place au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, car nos résultats semblaient insuffisants au regard de nos publications, de nos brevets et de notre rayonnement général.
Notre environnement, à l'échelle mondiale, est caractérisé par une intense compétition. Aujourd'hui, nous constatons que ce sont les pays qui ont le plus investi dans la recherche qui connaissent les meilleurs taux de croissance et le recul le plus significatif du chômage.
Le présent projet de loi de finances prolonge l'effort sans précédent du Gouvernement en faveur de l'enseignement supérieur et de la recherche, en augmentant, pour la troisième année consécutive, les moyens consacrés à ce secteur. Le budget de la mission s'élève à 23,9 milliards d'euros, une somme particulièrement importante dans une période de maîtrise de la dépense publique.
En ce qui concerne la recherche, les moyens progressent de un milliard d'euros. Ils se répartissent entre deux tiers de crédits consacrés aux organismes de recherche ainsi qu'à l'Agence nationale de la recherche, et un tiers de dépenses fiscales supplémentaires satisfaisant les objectifs fixés par la loi de programme pour la recherche.
Il faut saluer, bien sûr, l'augmentation des crédits de l'ANR, qui constitue un moyen privilégié de mise en oeuvre des grandes orientations fixées par le Gouvernement en matière de recherche.
En 2006, l'ANR a amplifié son activité de financement de projets de recherche, dans le cadre des appels à projets, auxquels elle a prévu de consacrer 615 millions d'euros. Le volume total des aides demandées a augmenté de 21 % entre 2005 et 2006.
Par ailleurs, l'ANR finance le dispositif Carnot, une mesure du Pacte pour la recherche qui a pour objectif de resserrer le partenariat entre la recherche publique et les entreprises, afin de favoriser le développement de l'innovation. La création de l'ANR a rendu de la visibilité aux chercheurs, dans la mesure où l'agence peut engager des moyens sur plusieurs années.
De même, nous ne pouvons que nous réjouir de la mise en place de l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, car l'évaluation est la garantie de la qualité d'un système de recherche.
Il était temps de rationaliser notre dispositif en la matière. Il s'agissait, en effet, de l'un de nos points faibles, car la recherche française n'a pas cette culture de l'évaluation qui joue un rôle central dans les universités et les instituts de recherche du Royaume-Uni, de la Finlande, du Japon ou encore de la Suisse. À tous les stades du processus, la transparence et le respect du principe du contradictoire garantiront la justesse de l'évaluation.
Je voudrais insister sur la question du soutien aux jeunes chercheurs et de l'attractivité des carrières : 2 000 créations d'emplois publics sont prévues en 2007 ; elles font suite à celles qui sont intervenues depuis deux ans, dont 3 000 en 2006, et se répartissent également entre l'enseignement supérieur et la recherche.
Ainsi, doivent être créés dans les organismes de recherche 140 postes de chercheurs, 410 postes de personnels ingénieurs et techniciens, 200 postes de contractuels de haut niveau pour les établissements publics à caractère scientifique et technologique, les EPST, et 100 postes de contractuels à durée indéterminée pour les établissements publics à caractère industriel et commercial, les EPIC.
Au sein de l'université, 450 emplois d'enseignants-chercheurs et 550 emplois de personnels non enseignants viendront renforcer le potentiel de recherche des établissements.
Mes chers collègues, les promesses relatives aux emplois ont donc été tenues. Attirer les meilleurs talents vers les carrières scientifiques et donner des perspectives aux jeunes chercheurs constituent des objectifs primordiaux.
Le projet de loi de finances vise à renforcer cette attractivité : 500 monitorats sont créés dans l'enseignement supérieur, ce qui devrait faciliter les décharges d'enseignement en faveur des enseignants-chercheurs qui souhaitent se consacrer à plein temps à un projet de recherche.
Pour la deuxième année consécutive, l'allocation de recherche accordée aux doctorants pour préparer leur thèse tout en enseignant à l'université sera revalorisée. Elle augmentera de 8 % à compter du 1er février 2007.
De même, à compter du 1er octobre de l'année prochaine, les allocations de troisième année de thèse connaîtront une revalorisation supplémentaire, qui portera leur valeur à 1,5 fois le montant du SMIC.
L'effort du Gouvernement est donc significatif - en l'espace d'une législature, l'allocation aura progressé de plus de 30 % -, d'autant plus que le nombre des allocataires reste élevé : en 2007, comme en 2006, 4 000 nouveaux doctorants bénéficieront de cette aide, pour un total de presque 12 000 allocataires.
Pour financer les « bourses Descartes », qui permettent à nos chercheurs les plus brillants de continuer à s'investir sur le territoire national, limitant ainsi la fuite des cerveaux, 0,9 million d'euros sont programmés.
Enfin, des crédits supplémentaires sont ouverts pour favoriser l'insertion des post-doctorants en entreprise.
Si toutes ces mesures sont très positives, le présent débat doit être aussi l'occasion, me semble-t-il, de souligner la faiblesse profonde du système universitaire français de recherche, qui n'occupe pas la place qui devrait être la sienne.
Le modèle anglo-saxon a fait ses preuves : l'université y est l'unité de base et la référence en matière de recherche académique.
En France, historiquement, la recherche s'est construite différemment. Les grands organismes spécialisés, tels que le CNRS, le Centre national de la recherche scientifique, l'INSERM, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, ou l'INRA, l'Institut national de la recherche agronomique, ont assuré des activités de recherche, tandis que les universités exerçaient essentiellement une mission d'enseignement. La massification de l'enseignement supérieur a également joué au détriment des activités de recherche dans les universités, qui comptaient 1 470 000 étudiants en 1995 contre 660 000 en 1970.
Je m'associe au voeu de ma commission, qui souhaite voir les résultats des expérimentations menées avec les PRES, les pôles de recherche et d'enseignement supérieur, ou les réseaux thématiques entraîner une évolution des mentalités suffisante pour envisager de mettre en place, dès que possible, la nouvelle gouvernance dont les universités françaises ont tant besoin.
J'ajouterai quelques mots, en sortant du contexte spécifique de la recherche, sur l'aide apportée, cette année, par l'État aux étudiants.
Le projet de budget fait une place importante à l'amélioration des conditions de vie étudiante en augmentant les crédits destinés à cette politique de plus de 4,31 %. Ainsi, les bourses au mérite croissent-elles. Il en est de même pour les bourses de mobilité et pour l'allocation d'installation étudiante, l'ALINE, qui accompagne l'étudiant quittant son foyer familial.
Par ailleurs, la réhabilitation des résidences universitaires se poursuit. Grâce aux moyens fournis, 5 000 chambres devraient être mises aux normes actuelles de confort et d'équipement alors que 5 000 nouveaux logements seront mis en chantier. Je précise cependant que, pour tenir les objectifs - 70 000 chambres rénovées et 50 000 construites d'ici 2015 -, il faudrait accélérer les programmes de réhabilitation et de construction de résidences.
En outre, 7,5 millions d'euros permettent de faciliter l'accès des étudiants handicapés aux études universitaires, au moyen de dispositifs d'accueil et de soutien et de la mise en place d'équipements spécifiques.
Je tiens, par conséquent, à vous remercier, monsieur le ministre, pour votre détermination à mener une politique ambitieuse en faveur de l'enseignement supérieur et de la recherche, et de l'égalité des chances.
Je souhaiterais maintenant, comme d'autres de mes collègues, attirer votre attention sur le problème de l'application de la LOLF en ce qui concerne l'enseignement supérieur sous tutelle du ministère de l'agriculture.
Dans le cadre de son application, la subvention octroyée par l'État émarge au programme 142 de la MIRES. En début d'exercice, une réserve de précaution de 5 % des crédits de fonctionnement a été gelée, puis dégelée en totalité, mais uniquement pour les établissements d'enseignement supérieur sous tutelle du ministère de l'éducation nationale, et pas du tout pour ceux qui sont placés sous tutelle du ministère de l'agriculture. Je souhaite donc vous alerter sur ce point.
L'esprit même de la LOLF implique une gestion des crédits de l'État par grande mission, sous contrôle des parlementaires, sans distinction des découpages ministériels traditionnels.
Or, l'enseignement supérieur agricole offre une véritable spécificité. Il a souvent été le moteur dans l'innovation pédagogique et est cité en exemple pour sa capacité d'insertion professionnelle des diplômés. Une égalité de traitement est indispensable ; c'est une question de cohérence.
En ce qui concerne l'investissement, force est de constater que, notamment dans les quatre écoles nationales vétérinaires, les contrats passés avec l'État sont loin d'être respectés. Les crédits de paiement ne représentent, en effet, qu'une très faible part des autorisations d'engagement. Il manque entre 1 et 2 millions d'euros dans chacune de ces écoles.
Comment, dans ces conditions, faire face aux enjeux majeurs à l'échelon national ou international ? Je tiens, monsieur le ministre, à vous faire part de l'inquiétude des personnels et de l'ensemble des établissements au regard de cette situation.
Enfin, je conclurai en évoquant le succès du projet ITER. L'enjeu est considérable dans un contexte où les efforts de recherche sur les énergies de substitution aux combustibles fossiles doivent s'accroître fortement au niveau mondial. Le choix de Cadarache pour construire ce réacteur de recherche est le résultat d'un engagement très fort de l'État au plan national et au niveau déconcentré. La dynamique créée autour de ce projet vient à propos pour nous encourager à poursuivre nos efforts et notre réflexion. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j'évoquerai deux points essentiels. Le premier a déjà été abordé brillamment par M. Jean-Léonce Dupont : il s'agit de la recherche et de la gouvernance dans les universités.
Chacun connaît le classement de Shanghaï. Il est discutable dans ses principes, puisqu'il ne prend pas en compte les grandes écoles et s'applique à tous les étudiants, alors que, chez nous, nombre d'entre eux sont des étudiants « fantômes », qui, pour l'essentiel, s'inscrivent uniquement afin de bénéficier des avantages fiscaux et sociaux donnés par la carte d'étudiant, et sont ainsi comptés dans les mauvaises performances de nos universités.
Je prendrai un autre exemple. La semaine prochaine, nous aurons la visite d'un responsable de la gouvernance du Massachusetts Institute of Technology, le MIT. Il vient visiter un certain nombre de centres d'excellence - universités, grandes écoles, centres de recherche - pour recruter des étudiants de master et des doctorants. Pouvez-vous me dire quelle gouvernance française est capable de faire la même chose, aux États-Unis ou ailleurs ? Actuellement, c'est impossible. Le système donc doit être changé.
Lors du débat sur la loi de programme pour la recherche, j'avais déjà évoqué cette question. Le ministre de l'éducation nationale et de la recherche m'avait répondu que ce n'était pas le moment d'en discuter parce qu'il s'agissait alors de recherche, et que je parlais des universités...
Je maintiens que la gouvernance des universités concerne la recherche. Il me semble que, à l'occasion de l'examen des crédits de cette mission, il convient d'évoquer fortement et le plus tôt possible la nécessité absolue de permettre une expérimentation dans les universités. Nous ne devons pas attendre la législature suivante pour le faire. La commission des affaires culturelles, et le Sénat dans son ensemble, partagent certainement mon avis.
Le second point que je souhaite aborder concerne le système de financement des transferts de technologie.
Désormais, de nouvelles incitations sont prévues. Toutes les lois en vigueur, depuis celles qui avaient été proposées par François d'Aubert puis par Claude Allègre -cette dernière avait été fortement amendée par le Sénat - jusqu'à la loi de programme, ont instauré de nombreuses initiatives permettant le pilotage, l'évaluation et la modernisation de notre recherche, ainsi qu'un assouplissement des potentialités.
Il faut absolument que nos universités, nos centres de recherche utilisent, entre autres, les réseaux thématiques de recherche avancée, les RTRA, les PRES et toutes les possibilités de fonctionnement souple offertes par des fondations de recherche et de coopération de recherche - il en existe désormais une cinquantaine en France - qui peuvent elles-mêmes recevoir en leur sein un certain nombre d'autres fondations de façon rapide, instantanée, pour que nous puissions sortir de la bureaucratie qui empêche la recherche d'être à niveau dans la compétition internationale.
Nous devons pouvoir recruter instantanément des chercheurs, aider des incubateurs à se développer avec des financements publics et privés, comme cela se fait dans un certain nombre de pays, par exemple en Israël, petit pays par sa tailles, mais où, en moins de deux ans, un petit groupe de chercheurs peut être à l'origine d'une société de plus de mille personnes.
La France possède désormais tous les dispositifs nécessaires. Les business angels ont maintenant un statut plus performant. Un financement de deux milliards a été mis en place par la Caisse des dépôts, dans l'ensemble des agences. La frilosité n'est donc plus de règle.
Il faut que nous puissions utiliser, en particulier pour les pôles de compétitivité, toutes les possibilités qui nous sont offertes. Il convient qu'une véritable priorité sociale, économique et financière soit accordée à l'innovation. C'est possible. Tous les gouvernements à venir seront coupables de ne pas renforcer, comme nous l'avons fait cette année, le budget de la recherche.
Je voudrai dire, pour conclure, que les collectivités locales ne sont pas en reste. Très souvent, les initiatives qu'elles portent - les rapporteurs en sont l'exemple - sont brillantes.
Le Sénat, quant à lui, s'investit dans ce domaine avec enthousiasme ; la commission des affaires culturelles a toujours soutenu les ministres de la recherche successifs, qu'ils soient de droite ou de gauche - Hubert Curien et tous les autres - car nous pensons qu'il y va de l'intérêt de la France.
Toutes ces réflexions doivent donc nous conduire à adopter le budget de la recherche, qui nous est présenté aujourd'hui. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, conformément aux orientations définies par le pacte pour la recherche, le budget de la MIRES pour 2007 traduit la volonté du Gouvernement de transformer radicalement le paysage de la recherche et de l'enseignement supérieur de notre pays.
M. Ivan Renar. Rassurez-vous, monsieur le ministre, je vais rapidement changer de registre !
Ce budget bouleverse les équilibres entre, d'un côté, universités et organismes publics, et, de l'autre, entreprises, structures et agences nouvellement créées. Il renforce le pilotage de la recherche en mettant en oeuvre une conception utilitariste lourde de menaces pour l'avenir de notre pays.
Une fois encore, les acteurs historiques de la recherche voient leurs moyens considérablement diminuer alors que l'effort financier est redéployé massivement vers un secteur privé qui, sauf exceptions notables, demeure jusqu'à présent peu enclin à s'investir dans les activités de recherche- développement.
M. Ivan Renar. Il faut, en outre, déplorer que certains engagements antérieurs du Gouvernement n'aient pas été tenus. Je citerai l'exemple de la revalorisation des allocations de recherche et celui du nombre de postes créés, très en deçà du chiffre annoncé il y a quelques mois. J'y reviendrai.
Alors que la France a grand besoin d'un enseignement supérieur et d'une recherche forts pour se maintenir dans le peloton de tête des pays développés, le budget pour 2007 se caractérise par une augmentation particulièrement modeste, de l'ordre de 2,58 % à structure constante et en euros courants.
M. Ivan Renar. Ce budget ne permet pas de rattraper le retard dû aux coupes claires opérées les années précédentes, que seule la mobilisation de la communauté scientifiques, soutenue par l'opinion publique, a permis d'enrayer.
Au terme de cette législature, la recherche et l'enseignement supérieur figurent parmi les premières victimes de la politique de compression budgétaire mise en oeuvre depuis 2002.
En 2007, les crédits affectés aux établissements d'enseignement supérieur et aux organismes de recherche serviront essentiellement à couvrir les mesures liées à l'emploi et à la masse salariale. Les principaux acteurs de la recherche publique ne connaîtront quasiment aucune augmentation de leur dotation propre.
Comme nous l'avions déjà proposé lors du débat consacré à la loi de programme, il est plus que jamais indispensable de revoir l'équilibre entre le financement propre des organismes et celui qui est versé par les agences, d'autant que la gestion de la pénurie engendre des situations particulièrement préoccupantes pour l'avenir de notre recherche.
En témoigne l'actualité récente du CNRS, où les restrictions budgétaires ont amené la nouvelle présidente à opérer des choix qui mettent en danger des pans entiers de la recherche fondamentale. Ainsi le département des sciences de la vie, qui emploie le quart des effectifs du CNRS, devrait-il enregistrer une baisse de sa dotation. Cette mesure, difficilement acceptable sur le fond, serait, selon la direction, nécessaire pour financer les recherches dans de nouveaux secteurs tels que l'environnement et le développement durable.
Pourvu d'un budget pour 2007 bien trop insuffisant afin de faire face à la hausse des salaires, à l'augmentation des cotisations sociales ainsi qu'à l'inflation des dépenses courantes, le CNRS, comme la plupart des opérateurs publics de recherche, risque à court terme l'asphyxie.
Concernant les mesures fiscales destinées à soutenir la recherche-développement et l'innovation privée, le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie observe « une diminution préoccupante de la part des entreprises dans l'effort national de recherche », précisant que « de très importants efforts fiscaux ont été mis en place depuis et accentués en 2007, dont on ne mesure pas encore les effets. »
En attendant, cette année encore, le Parlement est appelé à reconduire le crédit d'impôt recherche, le CIR, qui atteindra, en 2007, 900 millions d'euros, sans connaître précisément l'efficacité de cette mesure. Une récente étude, d'ailleurs favorable à l'initiative, montre néanmoins que l'impact du CIR est réel pour les entreprises effectuant déjà de la recherche.
En revanche, les entreprises peu ou pas impliquées dans la recherche-développement « sont très peu influencées par le CIR ». De même, l'effet de cette mesure fiscale sur les activités de recherche des grandes entreprises est très « difficile à cerner ».
Monsieur le ministre, n'eut-il pas été plus pertinent de prendre le temps d'évaluer plus finement les effets de ces mesures fiscales avant de les reconduire en 2007 et, qui plus est, d'augmenter l'enveloppe qui leur est consacrée ?
Alors que la recherche et l'enseignement supérieur sont des secteurs stratégiques dont dépend l'avenir de notre pays, ne faut-il pas considérer que la nation devrait en priorité remédier à la sous-dotation des universités et des laboratoires publics, dont les besoins sont immenses ? Selon la conférence des présidents d'université, la CPU, 3 milliards d'euros supplémentaires manqueraient aux établissements d'enseignement supérieur pour assurer décemment leurs missions et atteindre le niveau des grandes universités des autres pays développés et, désormais, de certains pays émergents.
Un plan de rattrapage pour l'enseignement supérieur est d'autant plus indispensable que la réponse aux défis contemporains exige un formidable développement de la connaissance et des savoirs.
Cela étant, un grand patron du Nord, dont l'entreprise a massivement investi dans la recherche, déclarait récemment, lors d'un colloque à Lille, que les chercheurs ne disposaient pas « de moyens à la hauteur de leurs talents ». Lors de ce même colloque, un responsable de laboratoire a rappelé que la France connaissait une véritable crise des vocations pour la recherche, et a indiqué que la plupart des doctorants en activité au sein de sa structure étaient étrangers et, en majorité, chinois.
Les derniers chiffres connus confirment ces propos : la France ne forme que 6 000 docteurs français et 3 000 docteurs étrangers, tandis que 14 000 thèses sont soutenues en Grande-Bretagne ou 24 000 en Allemagne. Pour atteindre les objectifs de Lisbonne et Barcelone, il faudrait pourtant que la France double le nombre de ses titulaires du doctorat. Or le nombre d'étudiants inscrits en master « recherche » semble diminuer significativement, ces dernières années. À ce sujet, monsieur le ministre, pourriez-vous nous confirmer l'existence d'un tel phénomène et nous communiquer les chiffres d'inscription en master « recherche » par discipline pour les cinq dernières années ?
M. Ivan Renar. Ce n'était pas un piège, monsieur le ministre ! (Sourires.)
Pour combattre la désaffection des carrières scientifiques, phénomène aggravé par l'exil de nombreux doctorants et post-doctorants, la majorité des acteurs du système national de recherche affirme qu'il est urgent de rendre les rémunérations des chercheurs plus attractives, de mettre à leur disposition l'équipement nécessaire pour développer leurs travaux, ou encore de créer les conditions permettant aux organismes de disposer d'une plus grande réactivité, notamment en matière d'ouverture de postes.
De même, il apparaît de plus en plus indispensable d'établir un plan pluriannuel de l'emploi scientifique, afin de donner des perspectives aux jeunes scientifiques et, plus largement, d'offrir une vision stratégique de l'avenir de la recherche française. Le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie rappelle cette année encore qu' « il a en de nombreuses circonstances recommandé qu'une véritable politique de l'emploi et de recrutement pour l'ensemble de la recherche publique française soit mise en place, prenant en compte non seulement le volume global mais aussi la dynamique des disciplines et leurs évolutions ». Ces recommandations resteront, cette année encore, lettre morte.
Plus grave encore, en dépit des engagements pris, le Gouvernement n'affichera, en 2007, que 2 000 créations d'emplois pour la recherche et l'enseignement supérieur sur les 3 000 postes promis. Il faut, en outre, noter que seuls 1 550 postes statutaires seront créés, du moins en théorie, puisque les EPST ne disposeront pas des moyens budgétaires nécessaires pour financer la création des nouveaux emplois.
Dans le registre des promesses non tenues, je rappellerai également qu'il avait été annoncé que le montant de l'allocation de recherche serait porté à 1,5 fois le SMIC dès le 1er janvier prochain. Cette revalorisation, très attendue par les jeunes chercheurs, ne concernera finalement que les seuls doctorants en troisième année et ne prendra effet qu'à la rentrée 2007. La grande majorité des jeunes chercheurs demeurera donc en situation précaire.
Dès lors, s'étonnera-t-on encore du nombre élevé d'abandons en cours de thèse ou plus tôt, de la profonde désaffection pour des études longues et exigeantes, dont les débouchés sont à l'heure actuelle plus qu'incertains ? Ces phénomènes ne peuvent être enrayés que par la mise en oeuvre d'une politique volontariste assurant un financement décent aux jeunes poursuivant un cursus doctoral offrant des perspectives d'emploi durable, que ce soit dans le secteur public ou dans le secteur privé.
Il serait, en effet, grand temps que les entreprises reconnaissent les compétences spécifiques des docteurs. Ceux-ci connaissent les savoirs formels acquis à la frontière de leur spécialité scientifique, qui se révèlent très utiles pour assumer des fonctions d'expertise pointue, et sont également des vecteurs de savoir-faire originaux, qui les distinguent des ingénieurs ou des gestionnaires, auxquels on les compare pourtant trop souvent, à leur désavantage.
Acquises dans leur premier parcours professionnel et au cours de leur thèse, ces compétences constituent des aptitudes peu banales : capacité d'identifier des problèmes et d'expérimenter des méthodes nouvelles, savoir expérimental en matière de validation et d'évaluation d'idées nouvelles, expérience des projets collectifs, appartenance à des réseaux nationaux ou internationaux au contact immédiat des meilleurs experts.
Toutefois, rares sont les entreprises qui ont pris conscience de l'atout que représentent les docteurs. Face aux nombreux défis que la France doit relever pour s'engager pleinement dans l'économie de la connaissance, il paraît urgent d'inciter les employeurs privés à embaucher les jeunes chercheurs issus de l'enseignement universitaire.
La question de l'emploi scientifique demeure fondamentale pour rétablir un cercle vertueux ; la promesse d'emplois stables, justement rémunérés, devrait contribuer à attirer notre jeunesse vers les filières scientifiques et la recherche. Encore faudrait-il que les entreprises acceptent de s'ouvrir à une culture de la recherche, certes risquée mais aussi porteuse d'avenir. De ce point de vue, il est intéressant de constater que des groupes comme L'Oréal, Bouygues ou Roquette se sont inscrits dans une telle démarche, estimant à juste titre qu'une entreprise n'investissant pas dans la matière grise est à court terme menacée.
Favoriser l'émergence d'un important corpus de docteurs impose de s'engager résolument dans la lutte contre l'échec dans l'enseignement supérieur. Pour cela, il est nécessaire de renforcer significativement l'encadrement et l'orientation des étudiants - je dis bien orientation et non sélection !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Eh oui !
M. Ivan Renar. Autant dire qu'il faut déployer un effort sans précédent pour renverser la tendance actuelle, qui voit les universités françaises se distinguer par l'indigence de leurs moyens. Doit-on rappeler que la France est l'un des pays de l'OCDE qui investit le moins dans l'enseignement supérieur ?
M. Dominique Braye. C'est vrai !
M. Ivan Renar. À cet égard, j'évoquerai la situation des instituts universitaires de technologie, les IUT, qui, faute de moyens humains et financiers suffisants, risquent de ne plus être en mesure de mener à bien leurs missions. Globalement, ce sont plus de 6 millions d'euros qui feront défaut à ces instituts qui assurent pourtant la liaison entre l'université et le monde économique.
Encourager la recherche, d'abord fondamentale puis appliquée, renforcer l'enseignement supérieur, susciter l'intérêt de la jeunesse en promouvant un développement impétueux de la diffusion de la culture scientifique et technique aux quatre coins du pays, telles devaient être les priorités de ce projet de loi de finances. Je regrette que ce ne soit pas le cas. Force est de constater que le budget de la MIRES pour 2007 n'est pas à la hauteur des défis que la France doit relever. Nous ne pourrons donc le voter. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche.
M. Serge Lagauche. Monsieur le ministre, vous nous présentez votre dernier budget de la législature pour la recherche et l'enseignement supérieur. Permettez-moi donc d'en dresser un rapide bilan.
Cette législature aura vu s'exercer, en matière d'enseignement supérieur et de recherche, comme dans d'autres secteurs d'ailleurs, l'art du leurre et de la désillusion. Envers les étudiants, envers les chercheurs, comme envers tant d'autres catégories de Français, vous n'avez pas tenu vos engagements.
Je ne prendrai que quatre exemples pour étayer mon propos.
Premièrement, s'agissant du logement étudiant, il manque, dans votre budget, 10 millions d'euros pour financer le plan Anciaux lancé en 2004. L'objectif de 70 000 chambres réhabilitées et de 50 000 chambres construites sur dix ans ne pourra être tenu. Pour l'heure, depuis la mise en oeuvre du plan, 6 000 logements seulement ont été construits, alors que 15 000 auraient dû l'être durant cette période.
Seuls ont été entrepris des travaux de mise en conformité et de sécurité dans les résidences les plus vétustes. Et là, monsieur le ministre, vous ne pouvez pas invoquer l'argument du foncier : il ne peut en aucun cas justifier le retard pris en la matière ! Or, ce retard sera encore accentué l'an prochain. Pour financer les 5 000 réhabilitations prévues pour 2007, 15 millions d'euros auraient été nécessaires au titre de la participation de l'État ; le « bleu » ne fait apparaître que 1,7 million d'euros.
Deuxièmement, concernant l'emploi, les promesses du Président de la République portaient sur 3 000 créations en 2006 et autant en 2007, dans l'enseignement supérieur et la recherche. Elles ne seront qu'au nombre de 2 000 cette année. La LOLF nous interdit de créer des emplois. C'est bien regrettable parce que les projections, à l'horizon 2016, pour le seul enseignement supérieur, font état de 9 842 départs à la retraite de professeurs des universités sur les quelques 18 000 en exercice, soit plus de la moitié du corps, et d'environ 9 500 départs chez les maîtres de conférence, soit un quart du corps. Avec une moyenne de création de moins de 1 000 emplois par an dans l'enseignement supérieur, vous êtes bien loin d'assurer le renouvellement du corps enseignant, monsieur le ministre !
Troisièmement, s'agissant de l'allocation de recherche pour les doctorants, vous vous étiez fait fort, monsieur le ministre, lors de l'examen de la loi de programme pour la recherche, de la porter à 1,5 fois le SMIC au 1er janvier 2007. Là encore, vous ne tenez pas vos engagements. En réalité, les allocations de recherche n'augmenteront que de 8 % à partir du 1er février prochain, et la revalorisation annoncée à 1,5 fois le SMIC ne sera effective qu'au 1er octobre 2007, et n'interviendra qu'en troisième année de doctorat, c'est-à-dire à la fin de la thèse !
Quatrièmement, le milliard d'euros annuel pour la recherche reste hypothétique, comme l'an passé, puisque, pour presque un tiers, il porte sur le crédit d'impôt recherche, une prévision de dépense non garantie.
Non seulement vous ne tenez pas les engagements que vous avez pris devant les Français, mais, en plus, votre politique en matière d'enseignement supérieur comme de recherche ne permet pas de répondre aux enjeux actuels de ces secteurs.
Pour l'enseignement supérieur, la priorité doit être la lutte contre l'échec en première année universitaire. C'est une aberration que des bacheliers des filières professionnelles ou technologiques viennent « se perdre à la fac », alors que des places en IUT ou BTS, où ils ont de bien meilleures chances de réussir, restent vacantes ! Cela n'est pas seulement dû à une mauvaise orientation ; c'est bien plutôt le fait d'une surreprésentation des lycéens des filières générales dans ces sections sélectives et, parfois, d'une volonté délibérée de restreindre les recrutements.
Or, monsieur le ministre, vous n'abordez l'échec en premier cycle que sous l'angle de l'orientation. Encore faut-il s'entendre sur ce terme ! Les craintes sont grandes que l'orientation ne s'apparente, dans votre logique, au cheval de Troie de la sélection. Les solutions à la sélection par l'échec ne peuvent pas passer par une autre forme de sélection, institutionnalisée celle-là.
J'en viens maintenant plus spécifiquement au secteur de la recherche. Le bilan de cette législature en ce domaine, monsieur le ministre, se traduit avant tout par une erreur stratégique manifeste durant les trois premières années. Vous avez asphyxié les laboratoires de recherche, en remettant en cause le programme pluriannuel des emplois scientifiques mis en place en 2000 par le gouvernement de Lionel Jospin et en pratiquant des coupes claires dans les budgets.
Vous tentez un rattrapage depuis deux ans, très en deçà des promesses faites aux chercheurs, comme je l'ai déjà démontré, et en cassant les assises de notre système de recherche.
Le déséquilibre prévisible, que nous avions dénoncé lors de l'examen de la loi de programme sur la recherche, entre les financements sur projets de l'ANR et les financements récurrents des organismes de recherche se voit confirmé.
Face au resserrement des crédits, des laboratoires du CNRS voient leur dotation fondre comme neige au soleil, alors que des disciplines pourtant jugées « priorité nationale » se trouvent menacées. Ainsi, pour les sciences de la vie, par exemple, qui maintiendra les recherches fondamentales, si ce n'est le CNRS ? C'est la politique de la courte vue qui s'impose. Hors de l'association d'un pôle de compétitivité et d'un financement par l'ANR, il n'est pas de salut pour les équipes de recherche.
Quant aux PRES, seule mesure d'importance de votre réforme pour les universités, quel bilan pouvons-nous en tirer ? Vous avez certes réussi un bon coup de marketing, monsieur le ministre : chacun a pu mettre ce qu'il voulait dans l'emballage de ce sigle. Il en résulte que, sur le terrain, les règles du jeu sont si floues qu'elles sont source de blocage, et que les organismes de recherche ne se sentent pas concernés par la constitution de PRES, faute de précisions sur leurs missions. Au final, les universités risquent fort de voir les réseaux de thématiques de recherche avancée les assécher de leurs meilleurs éléments.
Pour 2007, les dépenses fiscales en faveur de la recherche atteignent 1,8 milliard d'euros. Vous avez trouvé un biais, en faveur de la recherche industrielle, celui de la dépense fiscale prévue, mais certainement pas garantie, pour tenter de respecter le fameux milliard d'euros annuel supplémentaire.
Mais quid du financement et de la pérennité de l'Agence d'innovation industrielle ?
Cette année, ce sont 280 millions d'euros de dépenses fiscales supplémentaires qui sont avancés, dont 170 millions d'euros pour le crédit d'impôt recherche. Ces augmentations annuelles répétées sont-elles crédibles au regard de la consommation effective du crédit d'impôt recherche ? Quel est, monsieur le ministre, le résultat pour 2005, et la consommation réelle attendue pour 2006 ? La question de l'efficacité du crédit d'impôt recherche se pose d'autant plus que le Gouvernement devait déposer au Parlement, le 1er octobre dernier, un rapport établissant l'évaluation économique du crédit d'impôt pour dépenses de recherche.
En 2004, vous avez revu les modalités du crédit d'impôt recherche, pour prendre en compte une part « volume », de l'ordre de 5 % des dépenses consacrées à la recherche et au développement sur une année. Vous avez également réévalué le plafond par an et par entreprise, qui est ainsi passé de 6,1 millions d'euros à 8 millions d'euros.
En 2005, un nouveau changement est survenu, qui porte non seulement sur le plafond de dépenses éligibles, leur nature, mais aussi sur la répartition entre accroissement et volume.
Monsieur le ministre, quel premier bilan pouvez-vous tirer de cette réforme ? Quel est l'impact du crédit d'impôt recherche en termes d'emplois ? Dans quelle proportion constitue-t-il, pour certaines entreprises, une aide publique comme une autre, au même titre que les baisses de charges, sans qu'il soit réinvesti dans le budget « recherche » de l'entreprise ? Représente-t-il réellement une incitation à investir dans la recherche et le développement pour les entreprises qui n'en font pas du tout, ou très peu ? Le Parlement n'a pas les moyens d'en juger.
Néanmoins, si le rapport du Gouvernement n'était pas disponible à la date prévue, une étude du mois de mai 2006 sur l'impact du crédit d'impôt recherche, effectuée par un cabinet spécialisé dans le conseil en politiques technologiques, figure sur le site de votre ministère.
On y apprend, selon le panel d'entreprises ayant répondu à l'enquête, que, plus que le crédit d'impôt recherche, les avances remboursables sont l'instrument de soutien à la recherche et au développement le plus efficace en termes d'impact sur le volume de l'effort de recherche et développement des entreprises.
Le crédit d'impôt recherche n'est pas le premier élément qui intervient dans la décision d'une entreprise de faire de la recherche ; c'est bien l'existence ou non d'un projet clairement identifié. Les entreprises bénéficiaires du crédit d'impôt recherche et d'une aide de l'ANVAR - avance remboursable ou aide au recrutement d'un ingénieur ou d'un docteur - plébiscitent cette dernière et déclarent que, sans elle, les recrutements ou les projets n'auraient pas eu lieu.
Par rapport aux aides publiques, le crédit d'impôt recherche présente deux inconvénients majeurs : il n'a pas d'effet immédiat sur la trésorerie à cause du décalage temporel entre la décision d'investir et le remboursement, contrairement aux aides publiques qui interviennent immédiatement dans le processus décisionnel ; il se réduit au versement d'une subvention, alors que les aides de l'ANVAR s'accompagnent d'une assistance technique.
L'enquête conclut sur le constat que le crédit d'impôt recherche incite surtout « les entreprises ayant des dépenses de recherche et développement à les augmenter. Bien que cet impact soit diffus, implicite, et intervienne avec un délai, il est sans nul doute positif. Les entreprises qui ne font pas ou très peu de recherche-développement sont peu influencées par le crédit d'impôt recherche », ce qui contrevient en grande partie à son objectif.
Dans ces conditions, la question du rapport entre le coût et l'impact du crédit d'impôt recherche est posée. Ne vaudrait-il pas mieux renforcer les moyens et les aides de l'agence Oséo-ANVAR plutôt que la dépense fiscale du crédit d'impôt recherche pour un soutien plus efficace à la recherche privée ?
Sur l'ANR comme sur le crédit d'impôt recherche, la politique de recherche exige un changement d'orientation.
Pour conclure, la sincérité de ce projet de budget pour 2007 est doublement affectée, d'une part, dans la réalité des chiffres annoncés, et, d'autre part, dans son exécution, qui est déjà mise en cause par l'annonce de gels de crédits, sans même attendre son vote par le Parlement.
Lors des échéances électorales des prochains mois, l'un des enjeux majeurs pour l'avenir de notre pays consistera à dire clairement aux Français quelle recherche et quel enseignement supérieur nous voulons pour les quinze à vingt ans à venir.
Pendant cette législature, vous avez largement entamé le démantèlement de notre système de recherche pour le faire aller, de force, vers une évolution à l'anglo-saxonne. Pour notre part, nous sommes convaincus qu'il existe une autre voie pour notre recherche et notre enseignement supérieur, qui sont très liés. Cette autre voie, au sein de l'Europe, conserve les spécificités de notre système - grands organismes et universités acteurs de la recherche française, statuts protecteurs pour les chercheurs et enseignants- chercheurs - tout en l'adaptant, le remodelant, afin que nous puissions répondre aux enjeux de notre temps.
La communauté scientifique a montré, lors des états généraux, non seulement qu'elle y était prête, mais qu'elle avait des propositions en ce sens. À nous, politiques, de savoir lui faire confiance pour avancer ensemble. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Georges Othily.
M. Georges Othily. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » est l'occasion pour moi d'intervenir sur un sujet extrêmement important pour la région que je représente, c'est-à-dire la recherche en Guyane.
Bien qu'étant une région exceptionnelle dans ce domaine, la Guyane est sous-dotée en moyens. L'arrivée de nouveaux chercheurs, depuis l'implantation du CNRS en 2002, n'a malheureusement pas compensé le départ des chercheurs de dizaine d'établissements présents sur le sol guyanais.
On estime le nombre de chercheurs et d'enseignants-chercheurs résidents entre 100 et 120. On peut doubler ce chiffre en incluant le personnel technique et les ingénieurs associés.
Toutefois, si l'on compare avec la moyenne nationale -de l'ordre de 6,2 pour 1 000 actifs -, force est de constater que la Guyane, comme les autres régions d'outre-mer, est très largement sous-dotée, puisqu'elle pourrait prétendre à un potentiel de 300 chercheurs ou équivalents.
Pourtant, la Guyane est un atout majeur pour la recherche. En tant que seule région européenne d'Amérique du Sud en zone équatoriale, elle représente un potentiel d'une richesse unique et inestimable, non seulement pour la France, mais aussi pour l'Union européenne tout entière.
Le monde amazonien est, en effet, très précieux en matière de biodiversité et de richesse ethnique et culturelle. Sur le plan bioécologique, la forêt guyanaise devient un lieu exceptionnel, un environnement scientifique porteur. Elle constitue indéniablement un atout pour le développement de la coopération régionale, particulièrement avec le Brésil, les pays du continent sud-américain, mais aussi avec l'Afrique et l'Asie, notamment en conduisant des études sur les maladies de certaines plantes au bénéfice de pays du Sud, dans une région où ces plantes ne sont pas cultivées.
En outre, de nombreux programmes, reconnus à l'échelon international, impliquant des chercheurs résidents et des laboratoires métropolitains, sont, en totalité ou en partie, réalisés sur le sol guyanais. De même, des thématiques de recherche aussi prometteuses que la biodiversité ont fédéré, depuis une dizaine d'années, un certain nombre d'organismes qui peuvent aujourd'hui s'enorgueillir de belles réussites au rayonnement international.
Malheureusement, il semblerait que nos sites soient peu attractifs pour les chercheurs. Il est vrai que les conditions de vie et de travail ne suffisent pas à compenser une mobilité lointaine : les locaux sont insuffisants, les moyens techniques limités et le coût de la vie est élevé.
Pour faire face à la crise de ce secteur, les responsables locaux des diverses structures de recherche ont décidé d'élaborer, comme vous le savez, monsieur le ministre, un projet de pôle de recherche et d'enseignement supérieur, complémentaire du pôle universitaire de Guyane. Ce pôle scientifique d'excellence permettra de développer le potentiel scientifique en Guyane, de lui offrir une dimension originale à l'échelle internationale et sera motivé par la volonté de faire avancer un thème de recherche commun, en rassemblant des chercheurs confirmés.
Il est essentiel que l'État soutienne ce projet en attribuant, notamment, des moyens spécifiques et des avantages budgétaires particuliers aux établissements qui participeront à ce développement.
J'en viens à la politique spatiale. Peut-on se réjouir de la dotation de 701,6 millions d'euros prévue dans le budget national pour les activités spatiales ?
Dans cette période de crise financière, reconnaissons à l'État sa volonté manifeste de concourir à l'action du Centre national d'études spatiales, le CNES. En effet, comment ce centre arriverait-il à réaliser les actions retenues dans le contrat pluriannuel pour la période 2005-2010 signé avec l'État ?
Aussi, nous devons être attentifs au programme du CNES, segmenté en cinq thèmes qui sont l'accès à l'espace, avec la gamme des lanceurs Ariane, Soyouz, Vega qui assure la souveraineté de l'Europe dans ce domaine ; les applications grand public, qui concernent les télécommunications -télévision, haut débit -, la télémédecine, le positionnement ; le développement durable, qui conduit le CNES à être le vigile de notre planète à travers ses programmes liés à la gestion des ressources naturelles ou à l'étude des changements climatiques ; les sciences spatiales et la préparation de l'avenir, qui le font participer, aux côtés des organismes de recherche, à l'exploration de l'univers, à la physique fondamentale et à la recherche et technologie ; enfin, la sécurité et la défense. Ces cinq thèmes me paraissent suffisamment importants pour pouvoir permettre à la France, comme à l'Europe, de tenir son rang.
Là, il s'agit bien de donner à la France et au CNES les moyens nécessaires pour maîtriser l'espace, de bout en bout, et pour être le moteur dans la construction de l'Europe de l'espace.
Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, nous sommes favorables à l'adoption des crédits proposés par votre ministère. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'examen de la mission budgétaire « Recherche et enseignement supérieur » intervient à un moment de vérité, après un événement qui a marqué le printemps de cette année. En effet, la forte réaction des jeunes étudiants, lors du vote du contrat première embauche, le CPE, a mis en lumière, si besoin en était, le fait que l'accès à l'emploi pour les jeunes, qu'ils soient diplômés ou non, est aujourd'hui un parcours du combattant qui commence tôt et qui se poursuit sur les bancs de la faculté, alors que la détention de diplômes universitaires a souvent été présentée comme le « sésame » de l'entrée dans une vie active assurée.
La mission budgétaire que nous examinons ce soir devrait donc permettre de répondre clairement à ce que, par deux fois, les enseignants, les chercheurs et les étudiants sont venus vous demander Malheureusement, à voir le projet de budget tel qui nous est proposé aujourd'hui, je suis convaincu qu'il ne sera pas à la hauteur des réformes nécessaires.
Je limiterai mon propos à trois points qui me semblent importants : l'orientation des lycéens et des étudiants, les conditions de vie des étudiants, le manque de moyens des universités.
Je traiterai, d'abord, de l'orientation.
L'obtention du baccalauréat fait partie du pacte républicain ; dès lors que ce premier diplôme universitaire est acquis, l'entrée en faculté ne peut être refusée. Elle est et devra rester libre pour tous les bacheliers. Cela exclut donc toute sélection. Pourtant, dans les faits, cette dernière est pratiquée. Comment ? Par l'échec.
Nombreux sont les étudiants, surtout parmi les titulaires d'un baccalauréat technologique ou professionnel, qui ont été mal orientés et qui sortent du système universitaire sans diplôme.
La solution reste l'orientation dès la terminale, mais aussi en premier cycle universitaire. Il faut, pour cela, un encadrement adéquat. Or, lorsque l'on compare, pour chaque étudiant, l'encadrement ainsi que les moyens d'une université, d'un IUT ou d'une classe préparatoire, on constate des différences importantes.
Et, encore une fois, le projet de budget que vous nous proposez aujourd'hui, pour la création de postes d'encadrement, reste bien en deçà de ce qui serait nécessaire afin de résoudre ce problème. Je ne reviendrai pas sur les chiffres, qui ont déjà été cités.
En effet, il est insuffisant pour réguler les besoins engendrés par la réforme « LMD », licence-master-doctorat, aux termes de laquelle, par exemple, de nouveaux diplômes à forts besoins d'encadrement ont été créés - master et licence professionnels - et certains cursus ont été diversifiés.
Monsieur le ministre, pour faire face aux défis de l'orientation, vous proposez aux lycéens de terminale de pouvoir effectuer une préinscription au mois de février ou de mars, afin de lutter contre l'échec en premier cycle. Il faut, pour cela, assurer une meilleure visibilité des filières et aider l'élève à appréhender un changement de cadre, bref, de plus en plus personnaliser les mesures d'orientation et d'accompagnement.
Expliquez-moi comment vous allez vous y prendre pour réussir cet ambitieux chantier, alors que ce projet de budget ne propose rien pour améliorer le service universitaire d'information et d'orientation : en France, il y a actuellement un conseiller d'orientation-psychologue pour 10 000 étudiants !
Pour faire face au problème de l'employabilité des jeunes étudiants, vous avez demandé un rapport à M. Hetzel. Le Premier ministre vient d'annoncer de nouvelles mesures : mise en place de services des stages dans les universités, observatoires des parcours des étudiants, développement des enseignements transversaux, comme les langues et l'informatique, systématisation des modules de projet personnel et professionnel en licence. Soit ! Mais, encore une fois, ce sont des effets d'annonce : on annonce, on annonce, et, quand on lit le projet de budget, rien ! Ce sont des promesses qui n'auront pas d'application directe et immédiate alors que des moyens financiers et humains sont nécessaires !
Abordons la question des conditions de vie des étudiants.
La crise du CPE a ouvert les yeux à certains sur l'extrême précarité dans laquelle ils vivent. Entre des universités qui s'octroient de nouveaux droits d'inscription « illégaux », entre le coût du logement qui pèse de plus en plus lourd dans leurs budgets, avec des bourses qui sont distribuées au compte-goutte et ne suffisent plus à couvrir leurs besoins élémentaires, les étudiants ne peuvent étudier dans de bonnes conditions, voire abandonnent leurs études en cours d'année.
Est-il normal de retrouver des étudiants dans les files d'attente des Restos du Coeur ? Cela existe ! Est-il normal qu'ils « enchaînent » de plus en plus des emplois mal rémunérés, voire qu'ils se prostituent, comme l'ont montré certains reportages diffusés à la télévision, pour pouvoir tout simplement payer leurs études ? (Murmures sur les travées de l'UMP.)
Le programme « Vie étudiante » serait doté de 1,846 milliard d'euros, soit une hausse de 6,2 %. Soit ! Cependant, cette augmentation de moyens est principalement obtenue grâce à des transferts de crédits - on déshabille Jacques pour habiller Paul -, j'en veux pour preuve les crédits affectés aux étudiants handicapés.
Or, les dépenses des étudiants ont augmenté de 23 % en cinq ans, alors que les aides ne croissaient que de 6 % ; ces dernières ne suivent même pas l'inflation.
Les conditions de vie des étudiants se dégradent et il faut traiter la précarité, qui touche un grand nombre d'entre eux. La perte de leur pouvoir d'achat est importante et, encore une fois, le financement de l'enseignement supérieur repose de plus en plus sur eux-mêmes. Or, à cette situation, vous répondez, certes, par des bourses au mérite et par une allocation à l'installation, mais qui, in fine, ne concernent que 4 % des étudiants.
Vous aviez demandé à M. Wauquiez un rapport afin d'améliorer le système d'aide sociale aux étudiants. Ce dernier préconisait d'investir un montant supplémentaire de 250 millions d'euros, d'augmenter le nombre d'étudiants boursiers, notamment parmi les étudiants issus des classes moyennes.
Or, vous ne mettez en place qu'une seule mesure : l'allocation pour l'installation étudiante, l'ALINE. D'un montant de 300 euros, elle concernera moins de 80 000 étudiants sur les deux millions qui existent en France et elle sera versée uniquement à ceux qui s'installent pour la première fois.
Par ailleurs, les bourses et allocations d'études ne sont pas revalorisées et le projet de budget ne prend pas en compte l'inflation.
S'agissant, maintenant, du manque de moyens des universités, il est assez déshonorant de constater que la France est l'un des pays de l'OCDE qui consacre le moins d'argent à l'enseignement supérieur, notamment aux universités. La dépense de l'État par étudiant, de 8 630 euros, est très disparate selon les catégories d'établissements. Elle est inférieure de moitié pour les étudiants des universités par rapport à la somme consacrée aux étudiants des grandes écoles. La dépense par étudiant s'élève à 6 700 euros à l'université, à 13 760 euros en classe préparatoire, à 9 160 euros dans les IUT.
La dépense par étudiant à l'université reste donc très faible dans notre pays. L'université française a besoin d'un effort budgétaire de la part de la nation. Mais vous refusez d'engager la France dans cette ambition-là !
Avant de conclure, je voudrais souligner ici le travail de réflexion qui est mené par la mission d'information sur la diversité sociale et l'égalité des chances au sein des classes préparatoires aux grandes écoles, mise en place au Sénat et dont j'ai l'honneur d'être le rapporteur. Des voies d'excellence existent heureusement dans les universités françaises. Il faut orienter les meilleurs élèves vers les meilleures formations, auxquelles ils n'auraient pas spontanément accès, soit en raison de leur milieu social, soit à cause de l'éloignement géographique. Je pense, en particulier, aux classes préparatoires aux grandes écoles.
Il est indispensable de parvenir à des conditions d'accès aux grandes écoles qui soient égales sur tout le territoire. Lors de l'année scolaire 2003-2004, 35 065 élèves étaient inscrits en première année de classe préparatoire, soit 8,9 % des bacheliers de l'enseignement général, très inégalement répartis entre les établissements. Dans certains lycées, aucun élève n'accède aux classes préparatoires ; dans d'autres, plus de 80 % des élèves y parviennent.
La proportion des élèves d'origine modeste dans les quatre plus grandes écoles - Polytechnique, ENA, HEC, Normale Sup - est passée de 29 % au début des années cinquante à seulement 9 % au milieu des années quatre-vingt-dix. Si les employés et les ouvriers représentent encore 60 % de la population active, seuls 6 % de leurs enfants intègrent aujourd'hui l'ENA.
Devant l'urgence et la gravité de la situation, la mission sénatoriale poursuit actuellement ses travaux. Toutefois, dès à présent, je note avec intérêt que fleurissent, dans les programmes pour les élections de 2007, des propositions qui reprennent en substance ce que j'ai préconisé voilà quelques mois, de manière certes quelque peu hasardeuse. J'ai en effet déposé, au nom de mon groupe, une proposition de loi qui tend notamment à réserver des places en classes préparatoires aux grandes écoles aux 5 % des élèves les meilleurs de tous les lycées de France. Or, cette proposition, qui figure dans le projet socialiste, se retrouve désormais, mot pour mot, dans le programme législatif de l'UMP. Affaire à suivre, donc !
En conclusion, monsieur le ministre, vous nous dites que, pour la troisième année consécutive, le Gouvernement place la recherche et l'enseignement supérieur au premier rang de ses priorités. Mais quand on décide d'inscrire l'avenir des jeunes et celui de la recherche au coeur de ses préoccupations, on s'en donne les moyens ! Or, dans ce projet de budget pour 2007, je ne vois rien qui puisse réellement améliorer la situation de façon significative. Au mieux vous efforcez-vous de rattraper le retard que vous avez accumulé depuis quatre ans : nous vous sentons, d'ailleurs, très essoufflé !
Mes chers collègues, ce budget manque d'ambition et ne permet pas de résoudre les très nombreux défis auxquels l'université est confrontée. C'est pourquoi nous serons contraints de voter contre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Delfau.
M. Gérard Delfau. Monsieur le ministre, je tiens à vous interroger sur le budget que le projet de loi de finances pour 2007 consacre à l'École normale supérieure de la rue d'Ulm, qui n'est pas un établissement d'enseignement supérieur parmi d'autres : le poids de Normale Sup dans notre histoire est si considérable que toute crise ou, même, tout risque de voir son rayonnement affaibli est intolérable.
Or la presse, relayant des informations connues dans le milieu universitaire, vient de faire état d'un vent de fronde de l'ensemble des directeurs des départements de lettres et de sciences humaines contre le style de gestion de la direction de l'établissement et contre certaines orientations que celle-ci a décidées.
Il ne m'appartient pas, en tant que parlementaire, de porter un jugement sur le conflit en cours. En revanche, il est de mon devoir de vous questionner sur la dimension budgétaire qui, pour partie sans doute, explique cette levée de boucliers.
J'observe que la situation financière de l'école a connu une dégradation importante entre 1997 et 2005. Pendant tout ce temps, la dotation de fonctionnement versée par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche est restée quasi étale. Faute d'une part suffisante d'autofinancement, la direction et le conseil d'administration n'ont pu faire face et ont subi un important déséquilibre budgétaire pendant plusieurs années.
C'est justement grâce à votre intervention, monsieur le ministre, et à l'octroi d'une dotation supplémentaire pour 2006 et 2007, que la situation budgétaire a pu être rétablie et que le calme est revenu. De cela, il convient de vous donner crédit. Pourtant, rien n'est définitivement réglé, comme le montre le climat de défiance qui règne au sein de l'établissement.
Le constat est clair : le budget de l'École normale supérieure, trop longtemps sous-doté, n'a pas permis d'assurer l'entretien d'un patrimoine de 130 000 mètres carrés et encore moins d'effectuer les travaux nécessaires à la mise en conformité des locaux aux normes de sécurité.
Dans ce contexte, vous sachant sensible à ce problème, je me tourne vers vous pour vous demander instamment d'accepter un arbitrage budgétaire favorable sur trois points cruciaux.
Il faut, d'abord, annoncer que la dotation de fonctionnement exceptionnelle a vocation à être intégrée au budget normal de l'établissement au-delà de 2007, ce qui serait véritablement un pas de géant !
Il convient, ensuite, d'attribuer des crédits exceptionnels, afin d'équilibrer le budget de fonctionnement de la bibliothèque et de désamorcer ainsi l'un des principaux sujets de conflit entre la direction et les départements de lettres et de sciences humaines.
Il importe, enfin, d'envisager un programme pluriannuel de travaux, pour rénover les édifices et assurer les normes de sécurité et d'hygiène qu'exigent ces lieux publics.
Voilà, monsieur le ministre, ce que je me permets de vous demander dans le cadre du débat sur le projet de loi de finances pour 2007. En prenant ces engagements avant le prochain conseil d'administration, qui s'annonce crucial, vous désamorceriez la crise et vous rendriez sa sérénité à une institution qui, depuis sa fondation en 1794, sous la Révolution, n'a cessé d'illustrer l'histoire de notre pays.
Encore récemment, elle a vu l'un de ses anciens élèves décrocher une médaille Fields, c'est-à-dire l'équivalent du prix Nobel pour les mathématiques. D'ailleurs, peut-être un futur Jean-Paul Sartre fait-il partie de l'une des promotions qui en ce moment même suivent un cursus de lettres ou de sciences humaines...
Au nom du Gouvernement, monsieur le ministre, faites ce geste et la tension actuelle s'apaisera. Les personnels, la direction et le conseil d'administration pourront alors de nouveau envisager l'avenir avec confiance. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre, devant le projet de budget qui nous est présenté, comment ne pas comprendre la préoccupation et, parfois, la colère des chercheurs français dont le collectif « Sauvons la recherche » s'est encore récemment fait l'écho ?
Dans ce projet de loi de finances pour 2007, environ 4 milliards d'euros de baisses d'impôt sont consenties en faveur essentiellement de nos compatriotes les plus aisés, de ceux dont les revenus sont les plus élevés. Une grande partie de cette somme aurait pu être investie dans la recherche, mais, malheureusement, je rêve trop ! Le Gouvernement aurait pourtant témoigné ainsi de sa volonté non seulement de soutenir la recherche française, mais aussi, tout simplement, de tenir ses promesses.
Si je m'en tiens à la mission « Recherche et enseignement supérieur », 685 millions d'euros de crédits supplémentaires y sont inscrits. Or, les deux programmes destinés à l'université absorbent déjà 665 millions d'euros. Ce ne sont donc pas les seuls 20 millions d'euros consacrés à l'ensemble des programmes de la recherche qui permettront d'honorer les engagements figurant dans la loi de programme pour la recherche du 18 avril 2006, laquelle prévoit un effort cumulé de 19,4 milliards d'euros entre 2005 et 2010, dont 6 milliards d'euros pour la seule période 2005-2007.
Monsieur le ministre, à quoi notre vote intervenu voilà quelques mois a-t-il servi si vous ne le respectez pas ? De plus, chacun le sait car cela a été répété maintes fois, les lois de finances pour 2005 et pour 2006 n'ont prévu, chacune, qu'un milliard d'euros supplémentaire pour la recherche. Or, nous avons des raisons de douter de la réalité de ces 2 milliards d'euros.
M. François Goulard, ministre délégué. Ils sont pourtant inscrits dans le projet de loi de finances !
M. Jean-Pierre Sueur. Le Gouvernement avait d'ailleurs indiqué que le montant de 2005 n'était pas comptabilisé dans l'enveloppe globale nécessaire de 6 milliards d'euros, sur laquelle il s'était engagé. Si je ne me trompe pas dans les calculs, cela signifie qu'il aurait dû prévoir, dans le projet de loi de finances pour 2007, 5 milliards d'euros supplémentaires pour atteindre l'objectif fixé.
Monsieur le ministre, tout le monde en a conscience, nous sommes malheureusement très loin du compte ! Certes, nous pouvons toujours espérer une correction importante, à la faveur des grands débats qui vont nous occuper durant l'année 2007. Néanmoins, nous sommes pratiquement sûrs que la situation va rester en l'état et que nous n'aurons donc aucune chance de porter à 3 % du PIB le budget de la recherche en 2010, contrairement aux engagements pris, notamment, lors des conseils européens de Lisbonne, en 2000, et de Barcelone, en 2002.
Nous sommes confortés dans cette opinion par les résultats de certaines études, selon lesquelles la part des dépenses de recherche dans le PIB en France ne cesse de baisser : de 2,23 % en 2002, elle est ainsi passée à 2,13 % en 2005. Pour le collectif « Sauvons la recherche », 14 milliards d'euros supplémentaires sont nécessaires pour pouvoir atteindre, en 2010, les objectifs fixés au niveau européen.
Monsieur le ministre, nous pouvons toujours discuter sur les chiffres ; c'est un débat effectivement perpétuel. En l'espèce, il est pourtant patent que nous ne prenons pas le chemin du respect des engagements pris. Pour illustrer mon propos, je prendrai quelques exemples que vous connaissez bien.
Ainsi, le programme « Recherche spatiale », dont chacun mesure l'importance, enregistre une hausse de 1,4 %, après celle de 0,4 % l'année dernière, soit un taux encore inférieur à celui de l'inflation. Sans même prendre en compte les annulations de crédits qui ont été réalisées, la recherche spatiale voit donc son budget diminuer en francs constants.
Le programme « Recherche dans le domaine des risques et des pollutions » sera doté de 278 millions d'euros en 2007, exactement comme en 2006 et en 2005. Son budget diminue donc également en francs constants.
M. Jean-Pierre Sueur. Mais j'en tiens compte, monsieur le ministre !
Le programme « Recherche dans le domaine de l'énergie » voit également ses moyens baisser en francs constants. Quant au programme « Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat », il subit une baisse de 2,6 % hors inflation.
Monsieur le ministre, je pourrais encore continuer, mais je préfère m'intéresser maintenant à la question particulière de l'emploi scientifique.
Vous-même deviez être à Reims, en août 2005, lorsque M. Jacques Chirac, Président de la République, y a annoncé avec force la création de 3 000 postes de chercheurs en 2006 et autant en 2007. C'est comme si je l'entendais encore aujourd'hui ! Si nous avons tous évidemment un grand respect pour lui, quel est donc l'intérêt de se rendre à Reims, ville johannique que j'admire,...
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !
... et d'annoncer 3 000 postes pour cette année si cette promesse n'est finalement pas tenue ? En effet, en lisant les trois rapports de nos excellents collègues, j'ai pu constater que le nombre de postes créés était bien inférieur.
Monsieur le ministre, un autre engagement a eu une valeur symbolique importante. Vous vous en souvenez sûrement, puisque c'est vous-même qui l'avez pris ! Il s'agit de l'allocation de recherche pour les doctorants. Pour ma part, j'estime que notre pays traite bien mal tous ces jeunes qui s'engagent dans la recherche et qui choisissent de faire un doctorat, souvent au prix de nombreux sacrifices et de beaucoup d'efforts.
Nous avons peu de postes à offrir aux chercheurs du monde entier qui veulent venir faire des recherches en France.
Le constat reste le suivant : trop de jeunes Français qui voudraient faire des recherches en France vont les faire ailleurs !
Les doctorants ont déjà fait de très nombreuses années d'études, ils ont déjà fourni beaucoup d'efforts ; ils entendent leur ministre annoncer qu'il va porter l'allocation de recherche à un SMIC et demi au 1er janvier 2007, c'est-à-dire dans un mois exactement...
M. Jean-Pierre Sueur. Tel est l'engagement que vous avez pris !
Or, monsieur le ministre, vous nous proposez une augmentation de 8 %, qui s'inscrit dans le droit-fil des hausses des quatre dernières années avec, il est vrai, 1 % de plus ! Mais, nous sommes loin d'un SMIC et demi ! Tout le monde le voit bien. Le SMIC et demi viendra après ! C'est sans doute à Bercy qu'il appartient d'en décider, n'est-ce pas ?
M. Jean-Pierre Sueur. Vous nous expliquerez, monsieur le ministre. Toujours est-il qu'il est difficile d'expliquer qu'un SMIC et demi sera mis en place alors que ce n'est pas le cas !
M. Jean-Pierre Sueur. De surcroît, un tel dispositif ne concernera, nous dit-on, que les dernières années. Peut-être s'agit-il de fadaises !
M. Jean-Pierre Sueur. Peut-être allez-vous rectifier, monsieur le ministre. Je serais d'ailleurs très intéressé que vous annonciez le prochain dépôt d'un amendement - il vous reste encore quelques minutes - tendant à ce que le SMIC et demi puisse être mis en place au 1er janvier 2007, c'est-à-dire dans trente et un jours exactement.
Je pourrais continuer encore longtemps ! Je souhaite simplement faire un constat : malheureusement, qu'il s'agisse de crédits, d'emplois ou d'allocations de recherche, vos engagements ne sont pas tenus, du moins tels qu'ils avaient été pris.
Nous savons tous, et cela a été dit éloquemment avant moi, que la recherche d'aujourd'hui, ce sont les emplois de demain ; c'est le développement de notre pays et de l'Europe qui est en jeu. J'espère, à ce titre, que l'on aura le courage à l'avenir d'affirmer que la priorité sera l'enseignement supérieur et la recherche, au lieu d'opérer ces réductions fiscales que nous jugeons démagogiques et en tout cas injustes, car elles bénéficient à nos compatriotes les plus aisés.
Mais, attention, dire qu'il s'agit vraiment de la priorité implique de faire des choix en conséquence. Nous trouverons, j'en suis convaincu, le courage politique pour favoriser notre recherche, si importante pour l'avenir de notre pays ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué à l'enseignement supérieur et à la recherche. Mesdames, messieurs les sénateurs, pour commencer mon propos, je tenais à vous dire le plaisir que j'éprouve en retrouvant la qualité des débats que nous avions eus dans cet hémicycle, lors de la présentation du projet de loi de programme pour la recherche. C'est une grande joie de pouvoir discuter avec des parlementaires passionnés par leur sujet, compétents et qui, lors de son examen, ont permis d'améliorer très sensiblement ce texte.
Je vais tenter de répondre à chacun des orateurs. Je commencerai par Philippe Adnot.
Monsieur le rapporteur spécial, vous avez noté la croissance globale de 2,82 % de la MIRES, tout en soulignant une relative sous-dotation de l'enseignement supérieur. Nous pouvons regarder les choses en face et faire les constats qui s'imposent quant aux masses budgétaires telles qu'elles se présentent.
Personne ne peut sérieusement nier qu'un effort de six milliards d'euros en trois ans, au profit de la recherche, est considérable pour notre budget et pour notre pays. On peut contester, sur ces travées, tel ou tel aspect de notre politique - je le comprends - mais comment refuser de reconnaître l'immense travail accompli par l'État en faveur de la recherche ?
Nous ne pouvions pas faire, au même moment, un effort identique pour l'enseignement supérieur, c'est une question de bon sens élémentaire ! Malgré la progression de son budget, nous savons que ce secteur reste insuffisamment doté dans notre pays. Voilà un effort qu'il va falloir accomplir dans les prochaines années : nous sommes au moins tous d'accord sur ce point.
La conférence des présidents d'université a évoqué une somme, à mon sens très réaliste, de trois milliards d'euros supplémentaires à inscrire au budget de nos universités. Elle a le mérite d'être fondée sur des données internationales et nous permettrait de situer la France dans une bonne moyenne des pays de l'OCDE.
Est-il besoin de rappeler que cette même moyenne est « tirée vers le haut » par la dépense considérable par étudiant que consent un pays comme les Etats-Unis où, nous le savons, les conditions d'étude sont assez différentes des nôtres ?
D'autres intervenants ont évoqué des montants plus élevés. À ce titre, je souhaiterais, non sans quelque ironie, évoquer les propositions de M. Allègre, qui est un scientifique de renom. Il a proposé un doublement des crédits consacrés à nos universités, doublement auquel il serait possible d'aboutir, selon lui, grâce à une croissance de 10 % par an pendant dix ans.
Tout en étant un scientifique de moindre renom, je voudrais simplement lui dire, de cette tribune, qu'une progression de 7 % par an suffirait pour atteindre un doublement en dix ans... Cela méritait d'être relevé parmi les quelques incongruités que l'on peut entendre en ce qui concerne les chiffres ; il est toujours facile d'être généreux !
J'ai relevé la proposition de Philippe Adnot qui consiste à mettre en place au lycée, au cours de l'année de terminale, des modules tendant à préparer le choix extrêmement important, opéré par les étudiants, de leur orientation. Cette préoccupation est aussi la nôtre.
Nous souhaitons que le choix d'orientation soit effectué dès le mois de février. En effet, vous le savez, aujourd'hui, beaucoup d'étudiants font le choix de leur filière d'enseignement supérieur après le baccalauréat, autrement dit en juillet ; voilà qui est bien tard ! Ce choix est alors souvent fait, hélas ! à la légère, alors qu'il s'agit de l'un des actes les plus importants dans la vie d'une femme ou d'un homme. Cette décision doit être plus réfléchie, elle doit pouvoir être entourée de davantage de conseils. Effectuer ce choix en février constituerait donc une amélioration.
À ce titre, mesdames, messieurs les sénateurs, plus de trente universités ont d'ores et déjà choisi de fixer les dates d'inscription au mois de février. Nous avions retenu le principe du volontariat : les universités ont largement répondu, puisque près de la moitié d'entre elles ont opté pour ce dispositif.
Vous avez également évoqué la possibilité, s'agissant de la rémunération des chercheurs et des enseignants-chercheurs, de dotations globales spécifiques. Une telle mesure va dans le bon sens.
Il existe des dispositifs qui tendent, soit à alléger la charge d'enseignement, soit à rémunérer davantage un certain nombre de chercheurs ou d'enseignants-chercheurs. Certes, nous n'avons pas inventé l'Institut universitaire de France, mais nous contribuons très sérieusement à son développement, puisque nous avons fortement augmenté le nombre de chercheurs juniors cette année. Par ailleurs, cet institut est un moyen d'encourager un certain nombre de jeunes chercheurs particulièrement brillants, distingués par leur pairs, et dont les heures d'enseignement sont largement allégées en même temps que les dotations de recherche sont accrues.
Les réseaux thématiques de recherche avancée ainsi que les fondations de coopération scientifique permettent, en outre l'adaptation, dans certains cas, du régime de rémunération, afin de maintenir ou d'attirer sur notre sol des chercheurs particulièrement éminents.
Monsieur le rapporteur spécial, vous vous êtes également dit préoccupé par le logement étudiant. Nous lançons, à Nancy, une expérimentation : un rapprochement entre le CROUS, les collectivités territoriales et les offices d'HLM y est opéré pour tenter de mettre en oeuvre des idées nouvelles dont vous avez parfois été le pionnier dans votre propre département. Vous savez donc que cela peut donner de bons résultats.
S'agissant des bourses, il convient de noter une accélération sensible de leur paiement, cette année. En effet, à cette date, nous avons versé environ 5 % de plus que l'an passé. Par ailleurs, je peux vous assurer que nous ne paierons pas avec retard au mois de décembre. C'est une heureuse nouvelle et je suis certain, aujourd'hui, que nous tiendrons cet objectif que nous avons, avec l'ensemble des rapporteurs, évoqué à plusieurs reprises.
En ce qui concerne l'évaluation, je partage votre point de vue sur la nécessaire durée des indicateurs utilisés pour se faire une opinion.
Monsieur le rapporteur spécial Maurice Blin, vous vous êtes référé à la loi de programme pour la recherche. L'examen du projet de budget est effectivement une bonne occasion d'en établir un premier bilan. Cette loi, pourtant récente puisqu'elle date du 18 avril 2006, est déjà très largement entrée en vigueur.
Les réseaux thématiques de recherche avancée ont été lancés. Les sommes qui leur sont affectées leur seront très prochainement attribuées.
Les PRES, pôles de recherche et d'enseignement supérieur, seront, à la fin de cette année, totalement configurés et, dans les prochaines semaines, les premiers établissements publics seront créés.
Le Haut Conseil de la science et de la technologie a été mis en place par le Président de la République et a déjà commencé son activité.
L'Institut des hautes études pour la science et la technologie a aujourd'hui inauguré ses travaux avec la réunion de la première promotion de ses auditeurs.
Et je n'oublie pas, monsieur Laffitte, les labels « Institut Carnot », qui vous sont chers. Ils ont été attribués à une vingtaine d'institutions de recherche. Les fonds ont commencé à leur être versés. La fédération des instituts Carnot est en phase de constitution. Un mouvement considérable, visant à encourager les institutions de recherche qui savent travailler avec les entreprises sous la forme de recherche partenariale, est lancé.
Bref, sur tous les plans, cette loi est mise en application et ses résultats seront très rapidement au rendez-vous !
Monsieur Blin, vous avez évoqué, à juste titre, la place des petites et moyennes entreprises. Le travail est complexe ; en effet, faire en sorte que les PME puissent utiliser les résultats de notre recherche n'est pas simple. Nous savons que c'est beaucoup plus facile avec les grandes entreprises.
Toutefois, dans la recherche partenariale des institutions labellisées Carnot, d'ores et déjà 13 % des contrats, en montant, concernent des PME. C'est encore insuffisant, mais ce chiffre est très encourageant. Cela signifie que les PME participent véritablement aux recherches partenariales, avec nos institutions de recherche publiques.
Vous avez évoqué le statut des chercheurs. Des contrats pour les post-doctorats sont, en effet, nécessaires. Certains les refusent, ils ont tort. En effet, il est indispensable de proposer des contrats, pour quelques années, à de jeunes chercheurs avant qu'ils ne s'orientent vers une carrière de recherche, soit dans le secteur public, soit dans le secteur privé ou autre.
Vous avez dit, à juste titre, et contrairement à d'autres orateurs qui se sont exprimés après vous, que le financement de la recherche dans nos organismes par des budgets permanents n'était pas en contradiction avec la recherche par projet. Nous le démontrons : le budget des organismes est en croissance et, simultanément, nous attribuons de nouveaux moyens à des appels à projet. Voilà un démenti à l'attention de ceux qui dénoncent un virage à l'anglo-saxonne de la recherche française !
Nous avons essayé de dégager le meilleur de notre système, de celui, presque équivalent, de pays européens ou de modèles très différents mais ayant aussi leur vertu. Nous tentons de les conjuguer sans renier l'originalité de l'organisation de la recherche française.
Monsieur le rapporteur spécial, vous avez fait un certain nombre de remarques, au nom de la commission des finances, qui concernent la présentation budgétaire. Nous y reviendrons à l'occasion de l'examen de certains amendements.
S'agissant de l'Institut français du pétrole, vous avez eu des mots louangeurs à son endroit. Sachez tout de même que, si la dotation de l'État est en diminution, c'est parce que cet organisme, détenteur d'un portefeuille important d'actions, connaît aujourd'hui une progression de ses dividendes telle que l'État peut se permettre temporairement de réduire son apport. Il s'agit, somme toute, de bonne gestion !
Vous avez également évoqué le financement des agences, comme d'autres orateurs après vous. Il est vrai que l'on pourrait fort bien imaginer que la dotation des agences soit inscrite à la MIRES.
Vous connaissez la genèse de ce financement, qui trouve son origine dans le compte d'affectation spéciale. Il y a une vraie logique dans le fait d'utiliser des produits de cession d'actifs pour financer la recherche. Il s'agit dans les deux cas d'investissements, du passage d'une catégorie d'actifs à une autre.
S'agissant de l'Agence nationale de la recherche, nous avons trouvé une solution, peut-être provisoire. En tout cas, la transparence de l'activité de cette agence est garantie par la qualité du rapport d'activité qu'elle met en ligne et publie.
Je suis d'accord avec vous : la recherche duale est un thème trop peu développé dans notre pays. En tout cas, je peux vous donner la garantie que les quelque 200 millions d'euros de financement du ministère de la défense attribués au CNES et au CEA sont consacrés à des programmes qui présentent un intérêt réel pour les missions de défense. De ce point de vue, la sincérité budgétaire est totale.
Monsieur Laffitte, vous avez repris le thème des agences et de leur contrôle. Je crois que celui-ci s'exerce dans d'excellentes conditions. Quant à l'inscription de leur financement, je viens de l'évoquer.
Vous avez totalement raison s'agissant des instituts Carnot : ce dispositif doit monter en puissance. Sa dotation passe ainsi de 40 millions d'euros en 2006 à 60 millions d'euros en 2007. Nous estimons que, en régime permanent, cette dotation devrait avoisiner les 100 millions d'euros, ce qui n'est pas considérable. À titre de comparaison, l'Allemagne consacre à la Fraunhofer-Gesellschaft environ 300 millions d'euros. Et même si la dimension de cet organisme de recherche est plus importante que celle de nos instituts Carnot, ceux-ci ont néanmoins besoin d'être encouragés.
S'agissant des pôles de compétitivité, il faut avoir confiance dans leurs projets et leur gouvernance, et exercer des contrôles a posteriori plutôt que a priori.
Vous avez évoqué le fameux classement international de Shangaï des 500 premières universités du monde.
Cela n'aurait pas de sens de nier la valeur des classements internationaux, car ceux-ci sont actuellement en train de s'imposer. Je me permettrai néanmoins de faire observer que, du point de vue de la méthodologie, le classement de Shangaï est certainement contestable. Ainsi, comment peut-on admettre qu'une institution comme l'École normale supérieure, l'ENS, évoquée par M. Delfau, dont huit anciens élèves sont titulaires de la Médaille Fields, l'équivalent du prix Nobel dans le domaine des mathématiques, soit aussi mal classée ? Il s'agit là d'une non-reconnaissance de l'exceptionnelle qualité du potentiel scientifique d'un certain nombre de nos institutions.
Afin d'améliorer notre classement, nous devons faire en sorte de présenter nos dossiers de façon plus conforme aux critères fixés par l'université de Shangaï, pour que nos spécificités soient mieux prises en compte. Nous devons également faire des efforts pour améliorer notre performance universitaire et de recherche.
Monsieur Laffitte, je sais que vous êtes très attaché au statut de fondation. D'ailleurs, nous avons créé ensemble les fondations de coopération scientifique. En dehors des réseaux thématiques de recherche avancée, les RTRA, et des pôles de recherche et d'enseignement supérieur, les PRES, qui peuvent également adopter la forme de fondations de coopération scientifique, nous disposons donc désormais d'un nouvel outil juridique, souple et totalement adapté à l'objet auquel il est destiné : la recherche. Ce statut de fondation peut être utilisé de façon très large dans le monde de la recherche et permettra de gagner en souplesse au niveau organisationnel.
Monsieur Jean-Léonce Dupont, votre intervention me donne l'occasion d'évoquer les allocations de recherche.
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous devons être extrêmement précis. Le 1er février prochain, date à laquelle est augmenté le point indiciaire des fonctionnaires - et non le 1er janvier -, les doctorants allocataires de recherche, c'est-à-dire les étudiants qui participent à la recherche mais qui n'ont pas encore fini leur thèse, exerçant des fonctions de monitorat, ce qui est un cas très fréquent, percevront un salaire équivalent à 1,5 fois le SMIC. Cet engagement pris sera donc tenu, à un mois près.
Pour ceux qui ne sont pas moniteurs, nous allons porter, au mois d'octobre prochain, l'allocation de recherche pour les étudiants de troisième année à une fois et demi le SMIC. Il semble, en effet, logique que les tâches de monitorat soient allégées en troisième année, car ces étudiants doivent consacrer des efforts tout particuliers à l'achèvement de leur thèse. Cet engagement sera également tenu.
Nous souhaitons que les docteurs perçoivent une rémunération mais aussi, et surtout, que les jeunes chercheurs se voient offrir des carrières attractives. Un certain nombre de mesures ont d'ores et déjà été prises : les bourses Descartes, les possibilités nouvelles dans les RTRA ou, demain, dans les PRES.
Nous devons rendre ces carrières encore plus attractives. Il n'est pas concevable que les allocations de recherche soient quasiment égales aux salaires de début de carrière des maîtres de conférence ou des chargés de recherche de deuxième classe. C'est une question de bon sens.
Vous avez également relevé que les crédits consacrés aux bibliothèques augmentaient, mais nous avons encore du retard. Les contrats de projet de la prochaine période prévoient ainsi la création de plusieurs bibliothèques. Nous devons également, comme vous l'avez dit, aménager les horaires d'ouverture de ces établissements.
Nous reviendrons sur le sujet de l'enseignement supérieur agricole privé lors de l'examen des amendements.
Il est absolument indispensable que le portail que nous avons mis en place intègre des données complètes concernant les débouchés qui peuvent s'ouvrir aux diplômés. C'est un devoir de vérité et le seul moyen de vérifier si une formation répond bien à son objet, qui est de permettre aux diplômés d'obtenir un emploi. Nous pouvons ainsi vérifier que les emplois correspondent bien au niveau de qualification.
Ce devoir élémentaire n'est pas encore respecté. Nous nous sommes donc donné les moyens de le faire. Le chiffre que vous avez cité à propos des contrats d'avenir est tout à fait éloquent : il montre que nous devons en permanence conduire des réformes dans l'enseignement supérieur.
De très nombreux étudiants sont dans les filières générales ; ils sont même trop dans certaines d'entre elles par rapport aux débouchés offerts. Nous devons donc développer les formations professionnelles supérieures, qui ne les attirent pas suffisamment aujourd'hui.
Je partage votre sentiment sur l'accord de Londres. Cet accord est avantageux pour la recherche française et défend la langue française, contrairement à ce qui se dit parfois.
Je suis également de votre avis s'agissant des contrats mis en place par l'INSERM afin de retenir ou de faire venir en France de très bons chercheurs.
Monsieur Revol, je salue l'effort que vous avez fait en quittant Pékin pour venir participer à notre débat. Cette performance démontre votre volonté d'observer en permanence et en temps réel ce qui se passe dans le monde entier.
Vous avez raison de dire que le nombre des emplois créés ne suffit pas, qu'il faut aussi opérer des rééquilibrages et augmenter certains crédits.
S'agissant de l'indicateur du taux de brevets, j'émettrai une réserve. En effet, nous savons par expérience que certains brevets ne débouchent sur rien. Le nombre de brevets réellement exploités et qui procurent un vrai revenu est proportionnellement assez limité. Il faut donc examiner attentivement et finement cette question afin de savoir si les brevets sont pris à bon escient. Ce n'est pas aussi simple qu'il y paraît.
En ce qui concerne le crédit d'impôt recherche, le CIR, un certain nombre d'orateurs ont parlé d'un effet d'aubaine. Je ne suis pas d'accord : l'effet multiplicateur est évalué à plus de 2, ce qui est pour le moins intéressant. Mais, indépendamment de cet effet de levier, d'incitation, je rappelle qu'une entreprise qui réalise un effort de recherche le fait dans son intérêt, pour satisfaire ses propres objectifs. Cependant, dans le même temps, son but est aussi d'intérêt général.
Nous avons besoin que la recherche s'intensifie dans notre pays. Il nous faut donc mettre en place des mesures d'allègement fiscal pour les entreprises qui y consacrent des moyens importants. Il suffit pour s'en convaincre de considérer les efforts que font d'autres pays pour attirer sur leur sol des centres de recherche.
L'activité de recherche des entreprises est intéressante pour nous, car elle crée des débouchés, augmente le niveau scientifique et entraîne, dans tous les cas, des retombées extrêmement positives.
Monsieur Pierre Bordier, vous avez évoqué l'augmentation de un milliard d'euros des crédits consacrés à la recherche : 458 millions d'euros pour les crédits budgétaires, 280 millions d'euros de dotations des agences, notamment l'ANR, et 280 millions d'euros représentant les dépenses fiscales. Vous avez également parlé des décharges d'enseignement.
Vous avez raison de dire que l'université constitue l'unité de base de la recherche : nous devons affirmer la place des universités dans le domaine scientifique, même si les organismes de recherche représentent aussi un apport spécifique au sein de notre organisation. C'est une nécessité, notamment au regard de notre visibilité internationale.
Nous avons augmenté de 75 millions d'euros les crédits destinés à la vie étudiante, ce qui a permis de mettre en place l'allocation pour l'installation étudiante, ALINE. Vous avez raison, il faudra poursuivre les efforts pour respecter le plan Anciaux mais cela ne passe pas uniquement par des crédits budgétaires. Les opérations de rénovation, notamment, sont lourdes à mettre en oeuvre et supposent des relogements. Ces travaux étant complexes à réaliser, une montée en puissance est nécessaire.
Je vous remercie d'avoir évoqué le projet ITER, qui constitue, pour nous, un engagement.
Si la France a été choisie comme pays d'accueil du réacteur ITER, c'est bien sûr parce que nous nous sommes battus, aidés en cela par l'Europe, mais aussi, et ce constat est très satisfaisant, parce que notre pays dispose des infrastructures d'accueil et du niveau scientifique permettant l'installation sur son sol d'un centre de recherche d'intérêt mondial.
On entend parfois dire que nous avons « décroché » en matière scientifique. C'est totalement faux. Le fait que ITER, le plus grand projet scientifique mondial actuellement en cours de mise en oeuvre, s'installe sur notre sol, est bien la preuve que nous sommes un grand pays de recherche, et il n'y en a pas tant dans le monde.
Monsieur Renar, je connais vos critiques, mais les faits démentent vos propos. Où avez-vous trouvé l'information selon laquelle nous avons sacrifié la recherche publique à la recherche privée ?
Les moyens que nous mettons en place sont très majoritairement consacrés à la recherche publique. Que je sache, les 458 millions d'euros de crédits budgétaires ne vont pas au privé ! Les 280 millions d'euros de dotation des agences sont destinés à 90 % à la recherche publique !
Par ailleurs, vous contestez la finalité des dépenses fiscales.
M. Ivan Renar. Non, je m'interroge sur cette finalité !
M. François Goulard, ministre délégué. Nous avons besoin que la recherche privée soit plus dynamique dans notre pays.
Il est également faux de dire que les sciences de la vie sont sacrifiées au sein du CNRS.
La présidente du CNRS a rappelé - avec son style décidé et parfois un peu catégorique - un certain nombre d'évidences, notamment qu'il fallait se soucier de la qualité des recherches conduites et définir des priorités.
Pour autant, les sciences de la vie restent un domaine d'activité majeur au sein du CNRS. Je rappelle par ailleurs que d'autres grands organismes - l'INSERM, l'INRA, le CEA, sans compter nos universités - y consacrent des efforts importants. Enfin, les sciences de la vie représentent le premier chapitre de dépenses de la recherche, tant en crédits budgétaires qu'en nombre de chercheurs qui s'y consacrent.
S'agissant des mastères de recherche, je ne vais pas infliger à vos collègues la liste des effectifs dans chaque discipline, mais je peux vous dire qu'il y a actuellement 37 000 étudiants dans ces mastères et à peu près le double dans les mastères dits professionnels.
Selon M. Sueur, les engagements en matière de création d'emploi n'ont pas été tenus. Or nous créons 2 000 emplois dans le secteur. À titre de comparaison, le plan de M. Roger-Gérard Schwartzenberg prévoyait 800 créations sur plusieurs années.
Nous créons 2 000 emplois en 2007, en raison de nombreux départs à la retraite. Nous avons un très haut niveau de recrutement : 8 500 postes dans l'enseignement supérieur et la recherche, et il serait déraisonnable d'aller au-delà.
Avec ces 2 000 créations d'emplois, nous atteindrons le niveau de recrutement de 2006, année au cours de laquelle nous avons créé 3 000 emplois. C'est une régulation tout à fait normale et un effort très significatif dans le contexte budgétaire actuel.
Monsieur Lagauche, vous avez évoqué l'allocation de recherche pour les doctorants.
Si j'étais taquin, je vous dirais que, entre 1997 et 2000, ces fameuses allocations de recherche ont pris un sérieux retard, puisqu'elles n'ont pas du tout été revalorisées. C'est la réalité !
Monsieur le sénateur, en matière d'orientation, les universités ont maintenant la possibilité de demander aux lycéens d'envoyer leur dossier d'inscription au mois de février plutôt qu'au mois de juillet, après le baccalauréat. Et vous osez dire que c'est une sélection cachée ! Enfin ! Pouvons-nous nous mettre d'accord, quelles soient nos appartenances politiques, sur le respect des réalités telles qu'elles sont ? La sélection, c'est autre chose. Elle existe dans certaines filières et ce n'est pas nouveau.
À l'université, la loi prévoit que l'inscription est libre. Elle reste libre et nous avons prévu des modalités d'inscription différentes et plus précoces. Pourquoi ? Dans l'intérêt des étudiants, pour qu'ils aient le temps de réfléchir, de faire un choix plus conscient et pour que le conseil de l'université puisse leur expliquer que leur dossier les prédispose à telle ou telle orientation. Mais c'est un conseil, la liberté d'inscription reste entière ; c'est le contraire d'une sélection.
Monsieur Othily, vous avez évoqué la recherche en Guyane. J'ai eu la chance d'aller là-bas rencontrer nos chercheurs. Ils sont sans doute moins nombreux que dans d'autres régions, mais il faut savoir que la répartition des chercheurs est très hétérogène sur l'ensemble des départements français. Ils sont très concentrés en région parisienne et dans quelques très grandes agglomérations. Dans mon propre département, nous n'avons sans doute pas plus de chercheurs qu'en Guyane. Il est vrai que nous n'avons pas les mêmes atouts de biodiversité, même si nous en avons tout de même quelques-uns.
Les organismes de recherche sont nombreux en Guyane - les raisons que vous avez évoquées l'expliquent - : le CNRS, l'IFREMER, l'INRA, le CIRAD, l'IRD, le Muséum national d'histoire naturelle, l'Institut Pasteur, et je n'oublie pas le pôle universitaire qui est en train de s'affirmer et que nous allons aider parce qu'il est nécessaire.
Bref, je suis très favorable à la constitution du pôle de recherche et d'enseignement supérieur guyanais. C'est une nécessité pour mieux fédérer ces forces de recherche, qui constituent un ensemble de très grande tenue. En effet, les équipements sont de bonne qualité- j'ai pu le vérifier moi-même - et nous avons des chercheurs de très haut niveau, reconnus à l'échelon international, sur des thèmes de recherche tout à fait spécifiques et qui sont, bien sûr, particulièrement intéressants pour notre pays.
Dans le domaine spatial - je parle sous le contrôle de M. Henri Revol - la France est le premier pays européen en matière de dépenses et de technologie. Nous consacrons environ 1,3 milliard d'euros de crédits au secteur spatial, principalement par le biais de la dotation du CNES et de notre apport à l'Agence spatiale européenne, l'ESA.
Par ailleurs, à la fin de l'année dernière, nous avons fait reconnaître, au sein de l'ESA, le principe de la préférence européenne pour les lanceurs. C'est extrêmement important et je sais que vous y êtes sensible. Nous aurons donc, désormais, des lanceurs européens pour les satellites européens et cela profitera, bien sûr, à la Guyane où ces lanceurs sont mis en oeuvre et où de nombreuses opérations sont réalisées dans la phase préalable au lancement.
Par conséquent, l'avenir scientifique et technologique de la Guyane est assuré. Vous avez raison de vous en préoccuper, monsieur Othily, car ce sont de grands enjeux pour notre pays, dans des disciplines très différentes les unes des autres, mais qui sont également importantes pour la planète tout entière.
Monsieur Bodin, la sélection par l'échec est, en effet, une réalité, mais c'est en ayant une meilleure orientation que nous pourrons remédier à cette situation dans les premières années de l'université, en développant des formules comme le tutorat, l'examen de la situation de l'étudiant et d'éventuelles réorientations après un semestre. Voilà des méthodes qui sont efficaces pour éviter l'échec, nous essayons de les mettre en place.
Nous approuvons la majeure partie des conclusions du rapport Hetzel, qui sont des propositions de bon sens. Elles prônent, par exemple, de professionnaliser davantage les études supérieures pour que nos étudiants aient de meilleurs débouchés.
S'agissant des moyens, monsieur le sénateur, nous mettons à disposition de chaque université, fin 2006 et début 2007, deux nouveaux postes d'ingénieur d'études pour des missions d'orientation et d'insertion professionnelle que nous voulons renforcer.
Nous avons donc prévu des moyens nouveaux, contrairement à ce que vous disiez.
Quant aux droits d'inscription « illégaux », ils sont aujourd'hui un quasi-mythe. En effet, nous avons lutté contre ces pratiques. Nous avons demandé aux recteurs de déférer les universités devant les tribunaux administratifs et, cette année, on a enregistré très peu de tentatives de faire payer des frais complémentaires.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis d'accord avec vous pour dire que l'égalité des chances, l'égalité d'accès à l'enseignement supérieur sont la mise en oeuvre d'un principe républicain absolument fondamental qui peut nous réunir.
J'ai lancé, avec Azouz Begag, un appel à projet pour promouvoir l'égalité des chances, avec des moyens financiers. Il reposera avant tout sur la volonté des établissements de se rapprocher des lycées pour faire accéder à l'enseignement supérieur des jeunes qui en ont le talent, qui en ont les capacités et qui en auront la volonté, si on le leur propose.
Nous sommes en train, non pas de réussir, mais de changer la donne, grâce à un certain nombre d'établissements qui ont accompli un travail de pionniers et qui sont de plus en plus nombreux. En effet, une soixantaine d'universités ou d'établissements d'enseignement supérieur se sont engagés résolument dans cette voie.
Monsieur Delfau, vous avez concentré votre intervention sur l'École normale supérieure.
Je reconnais avec vous que c'est un établissement absolument exceptionnel, extraordinairement prestigieux, dont l'apport est primordial dans toutes les disciplines, qu'il s'agisse des sciences dures ou des sciences humaines et sociales.
Vous parlez d'un vent de fronde. Nous savons que cette école est quelquefois frondeuse ; nous en avons eu de nombreux exemples au cours de son histoire.
Vous avez eu l'élégance de souligner que nous avions consenti des efforts financiers pour redresser sa situation budgétaire : 2 millions d'euros en 2006, 2 millions d'euros en 2007. C'est beaucoup pour une dotation globale de fonctionnement de 34,6 millions d'euros.
Nous sommes prêts à pérenniser ces efforts, mais à une condition : que nous ayons une vision claire de la gestion, qui était « défaillante » - il faut le dire - il y a encore quelques mois. Il est normal que l'État exige davantage de rigueur quand il donne des moyens nouveaux. Je n'ai aucune raison de penser que ce ne sera pas le cas, nous pourrons donc pérenniser cette dotation supplémentaire.
S'agissant du patrimoine, nous avons beaucoup insisté pour que des travaux soient réalisés dans les laboratoires de la rue Lhomond et pour que cette rénovation soit inscrite au CPER de la région d'Île-de-France. Nous connaissons la qualité des recherches en physique qui sont menées là-bas. Le plan de rénovation et de mise en sécurité se poursuit.
Voilà ce que je peux vous dire ce soir, mais sachez que nous sommes très attentifs à cette question, parce que cet établissement est évidemment porteur d'une part du prestige scientifique français.
Je terminerai en évoquant l'intervention de M. Jean-Pierre Sueur, qui s'est référé au mouvement « Sauvons la recherche ».
. Il est vrai que, voilà quelques temps encore, nous avions des milliers de chercheurs dans la rue. Pourquoi ? Parce que, pendant de très longues années, nous n'avions pas fait collectivement l'effort nécessaire, un effort financier, certes, mais peut-être plus encore un effort de reconnaissance de l'importance de la recherche et de la science pour notre société et pour notre avenir.
Aujourd'hui, ceux qui tentent d'organiser des manifestations ne réunissent que quelques dizaines de personnes sur un parvis ou sur une place parisienne. Cela veut dire que la situation a fondamentalement changé. Pourquoi ? Parce que les chercheurs ont le sentiment d'être reconnus dans leur rôle. Vous y avez contribué par les votes que vous avez émis, par la loi que nous avons adoptée, par les moyens que nous donnons à la recherche. Un bon climat s'est instauré s'agissant des relations entre les élus de la nation et le monde de la recherche, entre notre société et notre recherche, et la situation a radicalement changé.
Ce que je souhaite, pour conclure cette intervention, c'est que cet effort ne se relâche pas. Nous en avons besoin, mais j'ai la faiblesse de penser que les orientations qui ont été prises avec vous sont, dans l'ensemble, les bonnes, que la volonté est là et que les moyens sont au rendez-vous. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je voudrais revenir sur l'accord de Londres, car je ne suis pas sûr d'avoir bien compris la réponse de M. le ministre.
La non-transposition de cet accord pose un problème à nombre de preneurs de brevets, et j'avoue ne pas comprendre l'inertie que semble manifester le Gouvernement français.
Monsieur le ministre, pouvez-vous être plus précis et nous dire dans quel délai le Gouvernement envisage la ratification de cet accord, car de nombreuses entreprises, notamment des PME, s'impatientent de le voir inscrit dans notre droit positif ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Monsieur le président de la commission des finances, j'ai dit tout à l'heure que la communauté scientifique, dans son ensemble, était favorable à la mise en oeuvre de l'accord de Londres. En effet, il simplifie le dépôt de brevet et il ne porte atteinte en rien à la langue française, je le dis et je le répète.
Nous avons eu, à l'Assemblée nationale, un débat sur ce sujet, voilà quelques mois, à l'occasion du dépôt d'un amendement parlementaire qui prévoyait la ratification de cet accord. Il est apparu que l'Assemblée nationale, pour le moins, était extrêmement divisée. Si un vote avait eu lieu à ce moment-là - l'amendement a finalement été retiré - il est à peu près certain qu'il eût été négatif.
Aujourd'hui, un projet de loi de ratification n'est pas inscrit à l'ordre du jour. En revanche, si mes informations sont exactes, une proposition de loi a été déposée à l'Assemblée nationale.
Il s'agit de voir maintenant si l'inscription de cette proposition de loi est possible dans le calendrier parlementaire. Au moment où nous parlons, cela est difficile.
Tels sont les éléments s'agissant de la procédure parlementaire, mais je pense que nous avons intérêt à procéder à la ratification.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ces atermoiements et cette inertie coûtent plusieurs dizaines milliers d'euros dans chaque opération. C'est donc un gâchis de moyens au détriment de la recherche et du développement des entreprises.
Comment peut-on à la fois proclamer l'ambition de promouvoir l'économie de la connaissance et marquer autant d'irrésolution dans la ratification de cet accord ? Peut-être faut-il que nous déposions nous aussi une proposition de loi pour ratifier cet accord dans les plus brefs délais !
C'est une anomalie qui contredit totalement les déclarations du Gouvernement.
M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » figurant à l'état B.
État B
(en euros)
Mission |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Recherche et enseignement supérieur |
21 221 613 557 |
21 283 392 638 |
Formations supérieures et recherche universitaire |
10 509 069 924 |
10 658 768 723 |
dont titre 2 |
8 092 355 625 |
8 092 355 625 |
Vie étudiante |
1 846 909 704 |
1 846 909 704 |
dont titre 2 |
73 000 068 |
73 000 068 |
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
3 722 318 355 |
3 722 318 355 |
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
1 163 116 925 |
1 163 116 925 |
Recherche spatiale |
1 261 054 058 |
1 261 054 058 |
Orientation et pilotage de la recherche |
116 653 129 |
116 653 129 |
dont titre 2 |
300 000 |
300 000 |
Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
276 843 057 |
276 843 057 |
Recherche dans le domaine de l'énergie |
659 299 204 |
659 299 297 |
Recherche industrielle |
644 320 182 |
576 470 182 |
Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat |
400 276 284 |
378 021 473 |
Recherche duale (civile et militaire) |
198 000 000 |
198 000 000 |
Recherche culturelle et culture scientifique |
151 352 520 |
150 092 520 |
dont titre 2 |
34 273 153 |
34 273 153 |
Enseignement supérieur et recherche agricoles |
272 400 215 |
275 845 215 |
dont titre 2 |
158 935 032 |
158 935 032 |
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° II-27, présenté par MM. Blin et Adnot, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I.- Supprimer le programme :
Orientation et pilotage de la recherche.
II.- En conséquence, modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Crédits de paiement |
|
+ |
- |
+ |
- |
Formations supérieures et recherche universitaire Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Vie étudiante Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires Dont Titre 2 |
116 653 129
300 000 |
|
116 653 129
300 000 |
|
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
|
|
|
|
Recherche spatiale |
|
|
|
|
Orientation et pilotage de la recherche Dont Titre 2 |
|
116 653 129
300 000 |
|
116 653 129
300 000 |
Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine de l'énergie |
|
|
|
|
Recherche industrielle |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat |
|
|
|
|
Recherche duale (civile et militaire) |
|
|
|
|
Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
116 653 129 |
116 653 129 |
116 653 129 |
116 653 129 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Maurice Blin, rapporteur spécial.
M. Maurice Blin, rapporteur spécial. Je commenterai rapidement un problème que j'ai évoqué dans mon propos initial et que vous avez bien voulu reprendre tout à l'heure, monsieur le ministre.
Les modalités de financement de l'ANR, dont le montant est important puisqu'il s'agit de 825 millions d'euros, ne correspondent pas à une saine gestion des finances publiques et sont en contradiction manifeste - personne ne peut le contester - avec la LOLF.
Nous avons adopté, face au choix qu'a cru devoir faire le Gouvernement, une attitude d'une grande simplicité qui, à mon avis, présente l'avantage de la clarté. En effet, ce lourd budget est assumé non pas par le budget de l'État, mais par la contribution sociale sur les bénéfices des entreprises, ce qui traduit une démarche complètement différente. Cela signifie, tout simplement, que ce programme est vide de sens. La logique veut donc qu'il soit abandonné.
J'insiste sur le fait que nous ne rejetons pas ces crédits : nous souhaitons simplement qu'ils soient affectés à un autre programme, puisque la LOLF autorise le transfert de crédits d'un programme à un autre. Certes, monsieur le ministre, vous avez parlé de disposition temporaire. Mais il n'est pas possible que nous approuvions, en tant que représentants de la commission des finances, singulièrement attachés à une certaine rigueur budgétaire - je pense notamment à M. le rapporteur général, Philippe Marini, et à M. le président Arthuis, qui est ici présent -, une disposition aussi contraire à la LOLF.
Nous proposons donc d'affecter ces crédits au programme « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires ». Par ce biais, sans perdre le bénéfice des crédits, nous rendons clarté et logique à ce budget, qui le mérite bien, compte tenu de son importance et de son caractère exemplaire.
M. le président. L'amendement n° II-81 rectifié, présenté par MM. Laffitte et J.L. Dupont, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
I. - Rédiger comme suit l'intitulé du programme n° 172 « Orientation et pilotage de la recherche » :
Orientation, pilotage et modernisation de la recherche
II. - Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Crédits de paiement |
|
+ |
- |
+ |
- |
Formations supérieures et recherche universitaire Dont Titre 2 |
|
5 000 000 3 000 000 |
|
5 000 000 3 000 000 |
Vie étudiante Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
|
|
|
|
Recherche spatiale |
|
|
|
|
Orientation, pilotage et modernisation de la recherche Dont Titre 2 |
5 000 000 3 000 000 |
|
5 000 000 3 000 000 |
|
Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine de l'énergie |
|
|
|
|
Recherche industrielle |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat |
|
|
|
|
Recherche duale (civile et militaire) |
|
|
|
|
Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis.
M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis. Tout en partageant totalement la position de la commission des finances concernant les crédits de la nouvelle Agence nationale d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, l'AERES, la commission des affaires culturelles estime que le programme « Orientation, pilotage de la recherche » constitue l'un des acquis majeurs de la loi de programme pour la recherche, que nous avons votée récemment.
Il ne nous semble donc pas souhaitable de supprimer ce programme, compte tenu de son caractère stratégique. Souhaitant, au contraire, lui donner davantage de cohérence, nous regrettons le transfert des moyens du Comité national d'évaluation de la recherche, le CNER, vers le programme « Formations supérieures et recherche universitaire ». En effet, ces crédits viendront abonder la dotation de l'AERES, qui est, pour le moment, extrabudgétaire. La mission de cette agence concerne non seulement les établissements d'enseignement supérieur, mais aussi les établissements de recherche, quel que soit leur rattachement ministériel. Que je sache, la LOLF est tout de même interministérielle !
C'est donc dans cet esprit, mes chers collègues, que la commission des affaires culturelles vous présente le présent amendement, qui vise à inscrire l'ensemble des crédits en faveur de l'AERES dans le programme 172 « Orientation et pilotage de la recherche ». Une action spécifique du programme devra lui être consacrée. Elle bénéficiera de 5 millions d'euros, grâce au transfert des crédits affectés au programme 150 « Formations supérieures et recherche universitaire ».
En outre, nous proposons de modifier le titre de ce programme 172, qui deviendrait « Orientation, pilotage et modernisation de la recherche », afin de tenir compte des nécessaires évolutions du système de recherche, en introduisant une certaine souplesse, en vue de sa modernisation.
Enfin, la commission des affaires culturelles forme le voeu que, à l'avenir, ce programme comporte également les crédits destinés à l'Agence nationale de la recherche, l'ANR, ceux qui sont liés à la rémunération du personnel de la direction générale de la recherche et de l'innovation, lesquels sont curieusement inscrits dans la mission « Enseignement scolaire »...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Cela n'a pas de sens !
M. Pierre Laffitte, rapporteur pour avis. ..., les crédits correspondant aux fondations, aux PRES, les pôles de recherche et d'enseignement supérieur, aux RTRA, les réseaux thématique de recherche avancée, ceux qui sont destinés aux CORTECHS, les conventions de recherche pour techniciens supérieurs, aux CIPRE, les conventions industrielles de formation par la recherche, aux CIFRE, les conventions industrielles de formation par la recherche, aux allocations de recherche et aux laboratoires labellisés « Carnot ».
De telles mesures permettraient de constituer un ensemble cohérent, dont le volume atteindrait probablement plus de un milliard d'euros, voire un milliard et demi d'euros. Nous aurions alors réellement un véritable programme « Orientation, pilotage et modernisation de la recherche », qui tiendrait la route.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Maurice Blin, rapporteur spécial. Mes chers collègues, si les points de vue de la commission des finances et de la commission des affaires culturelles se rejoignent, c'est la méthode retenue et le manque de rigueur qui nous posent problème.
En définitive, le choix qui vous est proposé est le suivant.
D'un côté, la commission des finances vous invite à affirmer clairement que la méthode adoptée par le Gouvernement n'est pas la bonne et qu'il faut absolument la rectifier. Il le fera, car il ne peut pas ne pas le faire ! L'ANR, nous le savons très bien, doit fonctionner, puisqu'il s'agit d'un élément essentiel de la réforme que nous examinons ce soir. Cette méthode est claire, elle frappe les esprits. Il faut, en effet, que le Gouvernement comprenne qu'il ne peut pas, dans une affaire aussi lourde, s'engager de travers.
De l'autre côté, la commission des affaires culturelles vous propose, mes chers collègues, un arrangement, un accommodement, une tentative pour arranger les choses.
Soit votre souci de rigueur prévaut, et vous adoptez l'amendement n° II-27 présenté par la commission des finances, soit, à l'inverse, votre souci d'accommodement l'emporte, et vous suivez la proposition de la commission des affaires culturelles.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, M. Blin a excellemment présenté les termes du débat : il m'a d'ailleurs tendu une perche, que je saisis volontiers pour vous dire que je préfère l'accommodement à la divergence.
J'ai très bien entendu les arguments de M. le rapporteur spécial et de M. le rapporteur pour avis : si leurs analyses se rejoignent, leurs moyens s'opposent.
S'agissant des crédits de l'ANR, j'ai répondu tout à l'heure. D'une certaine façon, cette agence a succédé à deux fonds budgétaires, qui étaient non seulement d'un montant beaucoup plus faible, puisqu'ils n'atteignaient pas la moitié des sommes qui y sont maintenant consacrées, mais dont l'opacité d'utilisation était à peu près totale. Outre un saupoudrage, qui était d'ailleurs de mauvais politique, personne ne savait comment étaient utilisés les fonds en question.
Aujourd'hui, nous disposons d'une instance qui fonctionne dans la plus totale transparence. Des commissions scientifiques font le choix des projets. Le rapport d'activité, qui est disponible en ligne, permet de savoir ce qui a été fait. Les avis des commissions sont rendus publics et communiqués à ceux qui ont présenté un projet. Bref, nous avons une vision parfaitement claire de l'utilisation de ces fonds.
Le fait que ce groupement d'intérêt public se transforme, demain, en établissement public ne me semble pas être un obstacle à la visibilité de ses actions ni à l'exercice d'un contrôle parlementaire le plus étendu possible.
S'agissant des amendements nos II-27 et II-81 rectifié, le programme 172 devrait, en effet, être rattaché à un ensemble plus vaste. Mais, dans ce cas, il faudrait sans doute procéder à d'autres rectifications de « frontières », auxquelles vous avez fait allusion les uns et les autres.
Pour des raisons de commodité, le Gouvernement estime que l'adoption de l'amendement n° II-81 rectifié, qui donne une plus grande cohérence à l'orientation choisie par le Gouvernement, serait, aujourd'hui, préférable à l'adoption de l'amendement n° II-27. Au demeurant, je le répète, j'ai bien compris les réflexions exprimées par M. le rapporteur spécial.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, nous n'avons qu'une préoccupation : vous aider ! (Sourires.)
M. Blin vous a indiqué les raisons pour lesquelles la commission des finances a déposé l'amendement n° II-27. Objectivement, le programme « Orientation et pilotage de la recherche », si l'on en croit d'ailleurs le Comité interministériel d'audit des programmes, ne ressemble pas à grand-chose !
Comment se fait-il que la rémunération du personnel soit intégrée dans la mission « Enseignement scolaire » ? Comment pouvez-vous accepter une telle mesure ? La LOLF a pour objet de rattacher les dépenses, notamment les frais de personnel, aux programmes et aux missions. Et, dans ce cas particulier, qui constitue la figure emblématique de la gouvernance de la recherche, le personnel dépend, je le répète, de la mission « Enseignement scolaire » !
Nous voulons donc tirer la sonnette d'alarme et vous donner les moyens de faire pression sur votre administration, pour que cela change et que les dépenses soient enfin rattachées aux programmes et aux missions correspondants. Ce programme offre, en effet, l'image d'une contradiction totale.
Par ailleurs, l'accommodement que vous propose la commission des affaires culturelles, dont je salue l'initiative, ne permet pas de satisfaire aux exigences budgétaires. Le compte n'y serait pas ! Par un vote assez symbolique, nous voulons vous aider à entrer dans une démarche à laquelle, je le sais, vous êtes très attaché. En déposant cet amendement, nous vous apportons notre concours.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. Je souhaite apporter une précision : les moyens de fonctionnement de l'ANR figurent bien dans le programme 172 de la MIRES.
Vous faites allusion, monsieur le président de la commission des finances, aux crédits de personnel de la direction générale de l'enseignement supérieur, qui relèvent en effet de la mission « Enseignement scolaire » et qui se fondent ainsi dans la masse. C'est toute l'administration centrale qui est rassemblée au même endroit. Mais, pour ce que l'on nomme le pilotage de la recherche, c'est bien le programme 172 de la MIRES qui est concerné.
Par conséquent, l'adoption de ces amendements ne permettrait pas de corriger pas l'anomalie que vous signaliez.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Si je puis me permettre, monsieur le ministre, l'adoption de notre amendement permettrait tout de même de remettre les apparences budgétaires en conformité avec la réalité de la LOLF s'agissant du pilotage de la recherche, qui est assez symbolique.
Nous vous donnons les moyens d'exercer une pression forte sur les résistances qui se manifestent peut-être au sein de votre administration.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Je ne voudrais pas que ce débat se transforme en querelle entre la commission des finances, dont nous respectons, naturellement, la compétence, les priorités et la rigueur, et la commission des affaires culturelles.
Pour autant, je ne voudrais pas non plus que l'on nous enferme dans une analyse qui tendrait à considérer que les propositions de la commission des affaires culturelles sont du « bricolage », puisque c'est le terme qui a été utilisé tout à l'heure.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Non ! J'ai parlé d'accommodement !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président de la commission des finances, vous avez évoqué un « bricolage » de la commission des affaires culturelles, ce qui est relativement peu supportable !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. De toute façon, le terme « bricolage » n'est pas péjoratif !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Si, il l'est !
Nous avons toujours préféré, et choisi, le pragmatisme. Et, si nous avons abouti - je parle sous le contrôle de M. le ministre - à une loi de programme pour la recherche à la suite de son examen par une commission spéciale - les membres de la commission des finances y participaient - c'est justement parce que nous avons su faire preuve de pragmatisme.
Était-ce du bricolage ? Non ! C'était la recherche de la meilleure solution, afin d'aboutir à une loi, qui, respectant les orientations du Gouvernement, que nous soutenons, justifiait non seulement la mise en place d'un nouveau système, mais également des financements considérables dégagés par le Gouvernement.
Dans ce cas précis, les anomalies relevées, que je conçois, sont-elles vraiment si importantes et si fondamentales ? Je préfère la démarche pragmatique que nous proposons au travers de l'amendement n° II-81 rectifié à une rigueur qui, certes, serait d'une orthodoxie parfaite par rapport à la LOLF, mais qui nous mettrait dans une situation un peu embarrassante par rapport au fonctionnement quotidien de la recherche.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° II-81 rectifié n'a plus d'objet.
L'amendement n° II-122 rectifié bis, présenté par M. Renar et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Crédits de paiement |
|
+ |
- |
+ |
- |
Formations supérieures et recherche universitaire Dont Titre 2 |
90 000 000
90 000 000 |
|
90 000 000
90 000 000 |
|
Vie étudiante Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
|
|
|
|
Recherche spatiale |
|
|
|
|
Orientation et pilotage de la recherche Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine de l'énergie |
|
|
|
|
Recherche industrielle |
|
90 000 000 |
|
90 000 000 |
Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat |
|
|
|
|
Recherche duale (civile et militaire) |
|
|
|
|
Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
90 000 000 |
90 000 000 |
90 000 000 |
90 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Notre amendement vise, dès le 1er janvier 2007, à porter le montant des allocations de recherche à 1,5 fois le SMIC. Une somme de 90 millions d'euros permettrait d'honorer une promesse du Gouvernement qui n'a pas été tenue, comme en témoigne le budget 2007. En l'état, l'augmentation des allocations de recherche ne concernera que les seuls doctorants en troisième année. En outre, comme le ministre l'a rappelé, la mesure ne prendra effet qu'à l'automne prochain !
Pour financer cette revalorisation des allocations de recherche, il apparaît malheureusement impossible d'amputer les crédits de l'Agence nationale pour la recherche, l'ANR, ceux-ci étant extrabudgétaires et traités par une affectation de taxe à hauteur de 825 millions d'euros.
Reste la possibilité de réduire à due concurrence les crédits du programme « Recherche industrielle » et plus particulièrement de l'action 3 « Soutien de la recherche stratégique », qui regroupe les crédits du fonds de compétitivité des entreprises subventionnant les sociétés qui participent aux pôles de compétitivité. Une telle baisse apparaît d'autant plus supportable pour ces entreprises que, cette année encore, le crédit d'impôt recherche continuera à monter en puissance.
L'adoption de cet amendement améliorerait les conditions de vie des jeunes chercheurs, grâce à la revalorisation des allocations de recherche, et constituerait un signal fort pour notre jeunesse. La mesure que je propose contribuerait également à attirer davantage d'étudiants vers les filières scientifiques et le doctorat, remédiant ainsi à la pénurie de thésards qui se dessine à très court terme.
C'est pourquoi, mes chers collègues, nous vous demandons de voter ce très intéressant et très constructif amendement qui, soit dit en passant, facilitera votre travail, monsieur le ministre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Maurice Blin, rapporteur spécial. Personne ne sera surpris, ce soir, que la commission des finances soit tout à fait opposée à l'initiative de M. Renar.
J'apprécie toujours les interventions de notre collègue qui, dans leurs excès mêmes, sont transparentes, limpides et parfaitement intelligibles. Toutefois, le fait d'adopter cet amendement nous conduirait manifestement à sacrifier des crédits qui sont destinés à des entreprises et dont nous redoutons qu'ils soient insuffisants ; en effet, il est tout à fait vrai que c'est le privé qui, demain, portera l'élan, avec le public.
Mais, surtout, c'est ne pas tenir compte de chiffres que je vais vous rappeler : les allocations de recherche bénéficient déjà, depuis plusieurs années, d'un effort très sérieux de l'État. En effet, à l'augmentation de 8 % au 1er janvier 2006 a succédé une hausse de 0,5 % le 1er juillet 2006. Le présent budget prévoit une nouvelle hausse de 8 % le 1er février 2007, portant l'allocation de base à 2 072,32 euros - comme vous nous l'avez précisé, monsieur le ministre. Enfin, au 1er octobre 2007, l'allocation de troisième année sera effectivement portée à 1,5 SMIC, soit 2 547,35 euros.
Monsieur Renar, considérez-vous que cela est insuffisant ? Pour moi, c'est un gros effort. Il doit être poursuivi et il ne faudrait surtout pas qu'il se paye éventuellement par des coups portés aux entreprises françaises, qui ont furieusement besoin qu'on les aide pour assurer la conjoncture de demain.
Telles sont les raisons pour lesquelles la commission est formellement défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. L'avis du Gouvernement est identique à celui de la commission.
Comme je l'ai expliqué, nous atteindrons, pour tous les allocataires ayant des heures de monitorat, une fois et demie le SMIC dès le 1er février 2007 et, pour ceux qui n'ont pas de monitorat, au mois d'octobre prochain. Bref, l'engagement est rempli et il n'y a donc aucune raison, comme l'a dit excellemment le rapporteur, de priver la recherche industrielle, dont nous savons à quel point elle est nécessaire, de crédits qui lui sont aujourd'hui particulièrement utiles.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.
M. Ivan Renar. Il ne faut pas craindre que les entreprises soient dépouillées ou mises en difficulté par ce type de proposition. En effet, de toute évidence, le crédit d'impôt recherche montant en puissance très fortement, cela s'équilibrera !
Je comprends que l'on ait un débat sur la conception que nous avons et les choix à opérer, mais il est inutile de pleurer outre mesure ! Ces entreprises peuvent accepter une telle disposition, qui ne sera même pas un poids. Posez la question aux chefs d'entreprise que vous connaissez, vous verrez qu'ils sont capables de la supporter !
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche, pour explication de vote.
M. Serge Lagauche. Les arguments de M. Renar en faveur d'une augmentation de crédits me paraissent justifiés. Il en est de même pour les autres amendements ; je pense, par exemple, à celui qui est relatif à l'école vétérinaire, en faveur de laquelle un abondement nous paraît légitime.
Il est vrai aussi que leur adoption nécessiterait d'amputer d'autres crédits, que nous jugeons déjà insuffisants pour la plupart. Nous ne pouvons donc pas trancher. Pourquoi en prélever ici pour les mettre ailleurs ?
Le jeu qui consiste à déshabiller Pierre pour habiller Paul ne nous paraît pas acceptable. En conséquence, nous ne participerons pas à l'ensemble des votes sur les amendements suivants.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-122 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-133 rectifié bis, présenté par MM. Marini, Valade, Adnot, J.L. Dupont et Bordier, Mmes Férat, Desmarescaux et Létard et M. Braye, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Crédits de paiement |
|
+ |
- |
+ |
- |
Formations supérieures et recherche universitaire Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Vie étudiante Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
|
|
|
|
Recherche spatiale |
|
|
|
|
Orientation et pilotage de la recherche Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
|
2 000 000 |
|
2 000 000 |
Recherche dans le domaine de l'énergie |
|
|
|
|
Recherche industrielle |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat |
|
|
|
|
Recherche duale (civile et militaire) |
|
|
|
|
Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2 |
2 000 000 |
|
2 000 000 |
|
TOTAL |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jean-Léonce Dupont.
M. Jean-Léonce Dupont. Il s'agit d'un sujet que nous avons déjà abordé les uns et les autres, et sur lequel nous avons dit que nous reviendrions.
Monsieur le ministre, nous regrettons que le Gouvernement n'ait pas tenu ses engagements à l'égard des établissements d'enseignement supérieur agricole, et cela d'autant plus qu'ils avaient pour contrepartie des mesures que les établissements concernés ont commencé à mettre en oeuvre.
Après une diminution de leurs subventions de 3,5 % en 2005, ils ont subi une annulation de crédits de 5,6 % en 2006. Dans le même temps, la mise en réserve de crédits destinés aux autres établissements d'enseignement supérieur a été annulée. Monsieur le ministre, comment expliquer cette absence de parallélisme, qui semble d'ailleurs peu compatible avec l'esprit de la LOLF ?
Ces annulations ont concerné les établissements publics à hauteur de 1,96 million d'euros et les établissements privés pour 1,15 million d'euros.
Sur ce sujet, les rapporteurs des commissions des finances et des affaires culturelles sont parfaitement en phase. Nous avons travaillé ensemble à la rédaction de cet amendement, qui tend à opérer un rattrapage partiel en faveur des établissements de l'enseignement supérieur agricole, de l'ordre de 2 millions d'euros.
J'estime que cette filière occupe une place très importante dans notre système d'enseignement. Elle assure des formations attractives et qui permettent, nous le savons, un très bon taux d'insertion professionnelle des jeunes diplômés. Alors que nous nous réjouissons d'une meilleure prise de conscience, dans notre pays, d'une plus forte professionnalisation des formations et d'une reconnaissance de l'excellence dans tous les domaines, je crois que notre démarche commune s'imposait.
Par conséquent, nous vous demandons d'adopter le présent amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. La commission des finances est parfaitement en accord avec cet amendement.
Nous nous félicitons de l'évolution des rapports avec la recherche supérieure agricole, l'enseignement supérieur agricole, en ce qui concerne la contractualisation et les regroupements en pôles auxquels il a été procédé.
Nous souhaitons seulement que les engagements pris soient respectés et que la cohérence de l'analyse par mission ne soit pas, ensuite, remise en cause par des avis divergents, selon le ministère qui s'occupe des régulations.
Cela dit, nous soutenons totalement cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement comprend très bien les préoccupations qui viennent d'être exprimées et vous rejoint dans l'appréciation que vous portez sur l'enseignement supérieur privé.
Le ministère de la recherche a été exonéré des gels de crédits qui ont touché certains ministères. Cela montre que la recherche constitue une vraie priorité pour le Gouvernement et nous sommes ici nombreux à nous en féliciter.
Je vous propose que les annulations de crédits relevant du ministère de l'agriculture en gestion soient minorées de 2 millions d'euros, montant qui figure dans votre amendement, et que cette somme soit reportée sur l'exercice 2007. Nous atteindrions ainsi l'objectif qui est le vôtre d'accroître les dotations de 2 millions d'euros.
La proposition que je vous fais aboutit au même résultat financier. Si vous l'acceptez, je vous demande naturellement de bien vouloir retirer votre amendement. Dans le cas contraire, je serais contraint d'émettre un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Dupont, l'amendement n° II-133 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-Léonce Dupont. Monsieur le ministre, nous pouvons tout à fait accepter votre proposition et donc retirer l'amendement, sous réserve toutefois de la pérennité de ces fonds au-delà du seul exercice à venir.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Permettez-moi, monsieur le président, de demander au Gouvernement une petite précision.
Il s'agit bien de l'enseignement supérieur agricole public, et pas seulement du privé. Sommes-nous bien d'accord, monsieur le ministre ?
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. De plus, ces fonds seront réellement utilisables dès le début de 2007 ?
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Et utilisables début 2007 ?
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. L'amendement peut donc être retiré.
M. le président. L'amendement n° II-133 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° II-132 rectifié bis, présenté par MM. Bizet, Dulait, Le Grand, Gruillot et Braye, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Crédits de paiement |
|
+ |
- |
+ |
- |
Formations supérieures et recherche universitaire Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Vie étudiante Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
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|
|
|
Recherche spatiale |
|
|
|
|
Orientation et pilotage de la recherche Dont Titre 2 |
|
|
|
|
Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
|
|
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|
Recherche dans le domaine de l'énergie |
|
|
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|
Recherche industrielle |
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Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat |
|
|
|
|
Recherche duale (civile et militaire) |
|
|
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Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2 |
|
1 600 000 |
|
1 600 000 |
Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2 |
1 600 000 |
|
1 600 000 |
|
TOTAL |
1 600 000 |
1 600 000 |
1 600 000 |
1 600 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Dominique Braye.
M. Dominique Braye. Cet amendement vise à transférer 1 600 000 euros du programme « Recherche culturelle et scientifique » - programme 186, action 3 - vers le programme 142 « Enseignement supérieur et recherche agricoles » - action 1 « Enseignement supérieur ».
Ces crédits sont destinés à l'École nationale vétérinaire d'Alfort, l'ENVA, pour lui permettre de réaliser des investissements qui sont totalement indispensables et sur lesquels l'État s'était engagé.
Après mon collègue M. Pierre Bordier, je voudrais vous alerter, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur la situation matérielle et budgétaire très préoccupante des écoles nationales vétérinaires de notre pays, et particulièrement sur celle de l'école d'Alfort, qui est totalement catastrophique.
Cette école figure parmi les dix-huit établissements d'enseignement supérieur agricole sous tutelle du ministère de l'agriculture, mais c'est sûrement l'établissement dont l'état est le plus alarmant. C'est la raison de mon intervention.
Mme Hélène Luc. Je suis d'accord avec M. Braye !
M. Dominique Braye. Les dirigeants, le personnel, les élèves de cet établissement et tous ceux qui s'y rendent ont attiré mon attention, et naturellement celle des huit confrères vétérinaires de notre assemblée, au nom desquels je m'exprime, sur les conditions matérielles totalement catastrophiques dans lesquelles l'enseignement vétérinaire est aujourd'hui dispensé dans cette école, autrefois prestigieuse.
Les bâtiments les plus anciens, vieux de plus d'un siècle, n'ont jamais été rénovés depuis la fin du XIXe siècle et ils ne sont plus - loin s'en faut ! - conformes aux normes actuelles en vigueur.
Les maires des plus petites communes de notre pays seraient horrifiés et scandalisés de constater l'état dans lequel sont les locaux d'une école nationale vétérinaire, en région parisienne, placée sous la responsabilité de l'État, au regard des exigences de ce même État pour les plus petits locaux dont ils sont responsables dans leur commune.
Récemment, d'importantes fuites se sont produites dans le réseau de chauffage vétuste. La température ambiante des bâtiments a chuté, atteignant moins de 12 degrés, ce qui est, vous en conviendrez, totalement incompatible avec les missions de cet établissement, principalement l'hospitalisation des animaux et les opérations chirurgicales.
Je vous laisse imaginer quelle serait votre réaction, mes chers collègues, si, après une opération chirurgicale délicate, vous étiez placés dans une salle de réveil dont la température est inférieure à douze degrés !
Les normes de sécurité électrique ne sont plus respectées depuis très longtemps, et d'importants travaux de mise en conformité sont absolument nécessaires. La salle d'autopsie est devenue totalement indigne d'une école nationale.
J'arrête là la liste des indispensables travaux de remise à niveau, car les cinq minutes qui me sont octroyées ne me suffiraient pas à tous les citer...
Il est devenu en effet vital pour l'École nationale vétérinaire de réaliser rapidement ces travaux, mais aussi de retrouver des marges de manoeuvre budgétaires.
Le seul élément un peu positif, me faisait remarquer l'un de mes vieux confrères lors d'une visite que j'ai effectuée voilà quelques semaines dans cette école, c'est que quelqu'un qui y a fait ses études voilà cinquante ou soixante ans aura l'heureuse impression de ne pas avoir vieilli, dans la mesure où les locaux et les peintures sont exactement dans l'état où ils étaient à cette époque !
En outre, au début de l'actuel exercice budgétaire, un gel de 5 % des crédits de fonctionnement a été effectué par la MIRES. Or à l'issue du débat budgétaire à l'Assemblée nationale, le « dégel » de ces crédits a été voté pour tous les établissements d'enseignement supérieur placés sous la tutelle du ministère de l'éducation nationale. Comme l'a rappelé notre collègue Pierre Bordier, tel n'a pas été le cas pour les établissements d'enseignement supérieur placés sous la tutelle du ministère de l'agriculture.
Cette importante mise en réserve budgétaire de 5 %- 0,5 % pour les dépenses de personnel et 4,5 % pour les dépenses de fonctionnement - a notamment obligé les établissements concernés à payer les personnels sur leur budget propre et à retarder la création de nouveaux postes de maîtres de conférence dans le cadre des « emplois Fillon ».
Monsieur le ministre, l'enseignement supérieur agricole aurait-il démérité à ce point qu'un traitement spécifique défavorable lui soit appliqué par ce maintien du gel sur le budget pour 2006, alors que ce gel a été levé pour tous les établissements d'enseignement supérieur placés sous l'autorité du ministère de l'éducation nationale ?
En tout cas, ce n'est pas ce que je croyais avoir entendu au cours de ces dernières années lors des épidémies de la vache folle et, tout dernièrement, de grippe aviaire, lorsque la nation tout entière, classe politique, gouvernement et ministres en tête, se félicitaient que, grâce à la qualité de la veille sanitaire exercée par le corps vétérinaire, notre pays n'avait pas eu à connaître les catastrophes que certains pays européens avaient vécues.
Même le Président de la République, lors du dernier salon de l'agriculture, rappelait à la nation toute l'attention que l'on devait porter aux sciences agricoles.
Pourtant, le budget pour 2007 n'en est pas pour autant mieux loti puisque le budget de fonctionnement de l'enseignement agricole public diminue de 0,65 % par rapport à 2006, et perd notamment trente emplois.
Pour revenir au cas particulier de l'École nationale vétérinaire d'Alfort, qui conserve une réputation internationale, je regrette en outre que le ministère de l'agriculture ne respecte pas le contrat portant sur les années 2005-2008 qu'il a signé avec elle en 2005, contrat aux termes duquel il avait été décidé d'octroyer à l'école, compte tenu de son état catastrophique, les moyens financiers pour engager les travaux indispensables sur les bâtiments, qui n'en ont jamais subi depuis la fin du xixe siècle.
Pourtant, en 2005, seulement 750 000 euros ont été attribués sur les 2,2 millions d'euros qui étaient prévus. Il manque, monsieur le ministre, 1,5 million d'euros pour l'année 2005.
En 2006, seulement 330 000 euros ont été attribués sur les 2,23 millions d'euros prévus. Il manque, monsieur le ministre, 1,9 million d'euros pour l'année 2006.
Cela signifie que, sur les deux ans, seul 1 million d'euros a été octroyé sur les 4 millions d'euros qui étaient prévus. Il manque, monsieur le ministre, 3,5 millions d'euros !
Est-ce là l'engagement de l'État ?
Si, aujourd'hui, 3,545 millions d'euros sont prévus au titre de l'année 2007, sur une enveloppe totale de 5,8 millions d'euros pour l'ensemble de l'enseignement supérieur agricole, pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, à quelle hauteur le Gouvernement entend respecter ses engagements cette année ?
L'enseignement supérieur agricole français, en particulier l'enseignement vétérinaire, constitue encore, aux yeux de nombreux experts nationaux et internationaux, un modèle cité en référence. Mais n'est-ce pas déjà, monsieur le ministre, mes chers collègues, un constat du passé et ne sommes-nous pas en train de détruire consciencieusement ce que nos prédécesseurs avaient si bien su construire ?
À l'heure où cet enseignement supérieur agricole, fer de lance de l'avenir de notre agriculture, se restructure pour faire face aux défis de demain, par l'émergence de pôles de compétences associant l'ensemble des partenaires universitaires et de recherche - je pense notamment au pôle de compétitivité MédiTech -, le retrait de l'État est incompréhensible et totalement condamnable.
La filière de l'enseignement supérieur agricole français, en particulier l'enseignement vétérinaire, constitue pourtant un atout majeur dans notre capacité à former des professionnels hautement compétents, à innover et à forger les succès de notre agriculture de ce xxie siècle, dont tout le monde, et notamment le Président de la République, parle beaucoup en ce moment.
Voilà pourquoi il importe, monsieur le ministre, mes chers collègues, de « dégeler » d'abord les crédits pour 2006 nécessaires au bon fonctionnement de notre enseignement supérieur agricole. C'est évidemment la raison pour laquelle j'ai tenu à cosigner l'amendement n° II-133 rectifié bis déposé par Philippe Marini, Jacques Valade, et plusieurs autres sénateurs, qui prévoit un transfert de 2 millions d'euros en faveur de l'enseignement supérieur et la recherche agricoles.
Quant au cas particulier de l'École nationale vétérinaire d'Alfort, il convient d'agir dès aujourd'hui en lui octroyant immédiatement les crédits nécessaires à des travaux urgents. C'est en ce sens que j'ai cosigné l'amendement n° II-132 rectifié bis, déposé notamment par notre collègue Jean Bizet, dont l'objet est d'attribuer à cette école une toute petite partie seulement des sommes que l'État s'était engagé à lui verser en signant le contrat pluriannuel 2005-2008 pour sa remise à niveau.
Si nous voulons que l'« arme verte » de notre économie, l'agriculture, soit toujours dans les décennies à venir une arme de conquête économique et un outil performant du développement durable de notre pays, il est vital d'investir aujourd'hui pour son avenir. Plus tard, mes chers collègues, il sera sûrement trop tard.
Je vous inviterai tous un jour à venir visiter ce splendide établissement, et je crois que vous serez surpris de constater ce qui peut actuellement exister sur le territoire national.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Nous avons bien entendu le plaidoyer que vient de prononcer avec sa fougue habituelle Dominique Braye.
Nombre de parlementaires nous ont alertés sur la situation de différentes écoles relevant de l'enseignement supérieur et de la recherche agricoles, confrontées à des difficultés.
C'est la raison pour laquelle nous avons déposé ensemble l'amendement n° II-133 rectifié bis, qui a été partiellement satisfait. Monsieur le ministre, en dépit de ce caractère partiel, nous apprécions le geste qui a été fait.
Il reviendra au ministère de l'agriculture de procéder de manière responsable à la répartition de ces 2 millions d'euros qui viennent d'être réintégrés. Mais je ne crois pas qu'il soit bien approprié que nous procédions nous-mêmes, dans ce débat budgétaire, à la répartition des fonds entre chacun de ces établissements. Aussi, je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Braye, l'amendement n° II-132 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Dominique Braye. Monsieur le président, il est bien évident que je ne retirerai pas cet amendement !
M. le ministre octroie 2 millions d'euros. Mais pour la seule École nationale vétérinaire d'Alfort, il manque 4,5 millions d'euros ! Mes chers collègues, vous vous contentez de bien peu !
Les propositions de M. le ministre ne sont manifestement pas à la hauteur de la situation des établissements d'enseignement supérieur agricole !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Le Gouvernement ne peut pas être favorable à l'amendement n° II-132 rectifié bis.
En premier lieu, il ne peut pas y être favorable pour la raison que vient d'indiquer M. le rapporteur spécial. En effet, grâce à la mesure que j'ai présentée, les crédits de l'enseignement supérieur agricole sont augmentés de 2 millions d'euros.
Comme vous le savez, monsieur Braye, c'est le ministère de l'agriculture qui gère l'école dont vous venez de parler. Il est incontestable que celle-ci a connu de vraies difficultés budgétaires. Mais, aussi paradoxal que cela puisse paraître après l'exposé que vous venez de faire, il faut savoir qu'une partie de ces difficultés venait d'une sous-consommation des crédits. Aussi, une mission d'inspection a été diligentée, qui a rendu ses conclusions voilà quelques mois.
Le ministère de l'agriculture est décidé à considérer comme prioritaires les travaux nécessaires à réaliser à l'École nationale vétérinaire d'Alfort. Une partie des crédits indispensables à leur bonne fin sera intégrée dans le contrat de projet État-région 2007-2013 - nous en aurons la certitude dans quelques jours.
Néanmoins, à ce jour, vous obtenez partiellement satisfaction grâce au déblocage de ces 2 millions d'euros. Le ministère de l'agriculture considère que les travaux que vous avez évoqués pourront être partiellement financés en 2007, notamment grâce à ces crédits complémentaires qui ont été décidés voilà quelques instants.
En second lieu, le Gouvernement ne peut pas être favorable à l'amendement n°II-132 rectifié bis dans la mesure où ce dernier prévoit la diminution de 1,6 million d'euros de crédits dont personne ne peut nier la nécessité. Nous avons en effet un grand besoin de diffuser la culture scientifique. C'est un intérêt commun, à l'échelle du pays.
Monsieur le sénateur, j'ai bien entendu la description très détaillée que vous avez faite de la situation de l'École vétérinaire. Mais le palais de la Découverte, bâtiment patrimonial, nécessite aussi des travaux considérables. Et l'on ne peut pas considérer qu'il soit aujourd'hui « surdoté » en crédits par rapport à ses besoins et à ses missions.
Je répète que le ministère de l'agriculture est bien décidé à traiter en priorité ce dossier dans la limite de ses enveloppes budgétaires, notamment en utilisant le contrat de projet État-région, qui est le vecteur indiqué pour réaliser de tels investissements.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.
Mme Hélène Luc. J'avais prévu de déposer un amendement allant dans ce sens lors de la discussion des crédits de la mission « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales ». En effet, comme cela a été rappelé, c'est en effet le ministère de l'agriculture qui assure la tutelle de l'École nationale vétérinaire d'Alfort. Mais je me réjouis évidemment que nous puissions dès ce soir discuter ces deux amendements. Une fois n'est pas coutume, je suis d'accord avec M. Braye !
En tant qu'ancien membre du conseil d'administration de l'École nationale vétérinaire d'Alfort, j'ai été très sensible au fait que ledit conseil et les syndicats d'enseignants et d'étudiants s'adressent aux parlementaires.
Le programme 142 « Enseignement supérieur et recherche agricoles » augmente certes globalement de 5,7 %, mais la raison en est simplement un changement de son périmètre. Pour l'enseignement agricole public, ce budget se traduira en 2007 par la suppression de trente emplois et la diminution de 0,65 % des dépenses de fonctionnement, mesures qui s'ajoutent aux baisses des années précédentes.
J'avais déjà alerté le Sénat sur la situation très préoccupante de certains établissements de l'enseignement supérieur agricole public.
Je tiens ici à rapporter les difficultés majeures que traverse l'École nationale vétérinaire d'Alfort et qui ont récemment conduit son conseil d'administration à refuser, à une très large majorité, de voter son budget. Les élus de ce conseil menacent de démissionner si l'État ne respecte pas ses engagements puisque non seulement les crédits sont insuffisants, mais que certains autres ont été gelés.
En effet, cette prestigieuse école, la plus ancienne sur son site et dont les bâtiments d'origine sont historiques, n'a jamais bénéficié d'un projet global de rénovation depuis la fin de sa structuration au début du siècle dernier. Cette carence totale de l'État devient insupportable pour les personnels et les étudiants, qui doivent supporter des conditions de travail et de sécurité d'un autre âge.
Par la lutte qu'ont menée ensemble les élus, les enseignants et les étudiants, l'école, qui devait être délocalisée, a été sauvée. Ce fut une grande victoire. Mais allons-nous maintenant devoir affronter la menace de fermeture de certains locaux pour vétusté ? C'est d'autant plus inimaginable que des projets importants sont par ailleurs prévus sur le site de l'école, à commencer par l'ouverture d'un centre hospitalo-universitaire vétérinaire, financé en grande partie par la région d'Île-de-France, qui, elle, respecte ses engagements, la création de laboratoires de recherche et la rénovation du musée Fragonard - il vient d'être classé « musée de France » -, qui est subventionné par le conseil régional d'Île-de-France et le conseil général du Val-de-Marne.
J'attire votre attention sur le fait que la construction du centre hospitalo-universitaire est un projet structurant indispensable à cet établissement. C'est le seul moyen de relocaliser dans des locaux décents des activités actuellement dispersées dans des bâtiments vétustes et inadaptés, et de donner de l'enseignement vétérinaire français une image revalorisée.
Or si la part de la région dans ce programme - 80 % - est assurée à ce jour, l'État doit apporter au plus vite 20 % de la somme requise, ce qui représente 1,5 million d'euros. En outre, dans le contrat quadriennal signé en 2005 entre l'École nationale vétérinaire d'Alfort et le ministère de l'agriculture était prévu, à hauteur de 11,2 millions d'euros, un plan de rénovation d'urgence concernant principalement la mise aux normes de sécurité.
Encore une fois, l'État ne respecte pas ses engagements. Nous sommes déjà dans la troisième année d'exécution de ce contrat, et moins de 10 % de ces crédits ont été effectivement attribués.
Il est donc facile de comprendre que, dans le cadre d'un budget de fonctionnement en diminution, il deviendra impossible à l'École nationale vétérinaire d'Alfort à la fois d'assurer l'entretien d'un patrimoine vétuste et de maintenir la qualité de son enseignement, qui doit respecter au minimum les exigences européennes de la formation des vétérinaires.
La santé animale et la sécurité sanitaire des aliments sont des domaines très importants dans notre société. Il n'est pas acceptable que la formation des vétérinaires, qui ont un rôle fondamental dans ces domaines, ne soit pas à la hauteur des exigences que la société a vis-à-vis des professionnels de ces secteurs d'activité. Aussi, des financements doivent être obtenus et l'État doit respecter ses engagements.
L'amendement qui nous est proposé est insuffisant, car il faudrait y ajouter le 1,5 million d'euros dû par l'État.
M. le président. Veuillez conclure, madame Luc !
Mme Hélène Luc. En outre, il n'est pas satisfaisant de retirer des crédits à la culture scientifique, pourtant si importante, pour les transférer à l'école vétérinaire. Je voterai tout de même cet amendement. Mais vous voyez, monsieur le président de la commission des finances, où nous mène la LOLF, avec cette nouvelle procédure de discussion du budget : le Parlement est privé de toute initiative ! Il est temps de rompre avec cette méthode de discussion, si vous voyez à quoi je veux faire allusion...
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche, pour explication de vote.
M. Serge Lagauche. Je ne peux qu'approuver les propos de M. Braye, en particulier s'agissant de l'École nationale vétérinaire. Mais, comme l'a dit M. le ministre, le palais de la Découverte a lui aussi besoin de crédits !
Monsieur le ministre, il faut que vous réussissiez à faire bouger les uns et les autres, car la situation actuelle ne peut plus durer. Je ne sais pas si, après les élections, d'autres s'engageront sur cette affaire. En tout cas, de notre côté, nous exerçons des pressions en ce sens, parce qu'un retard important a été pris. Les conséquences pour l'école vétérinaire et pour le département sont catastrophiques. Des efforts supplémentaires doivent donc être faits.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.
M. Ivan Renar. Si Mme Hélène Luc votera en faveur de l'amendement de notre excellent collègue Dominique Braye pour les raisons qu'elle a exposées, les autres membres du groupe communiste républicain et citoyen ne prendront pas part au vote. C'est non par désintérêt pour l'Ecole nationale vétérinaire d'Alfort, mais parce que le gage proposé n'est pas supportable. À cet égard, je partage le propos de Serge Lagauche : nous ne pouvons accepter de devoir procéder à une sorte d'échange avec le palais de la Découverte, qui a lui aussi besoin de crédits.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-132 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-28, présenté par MM. Adnot et Blin, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Crédits de paiement |
|
+ |
- |
+ |
- |
Formations supérieures et recherche universitaire Dont Titre 2 |
500.000 |
500.000 |
||
Vie étudiante Dont Titre 2 |
||||
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
||||
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
||||
Recherche spatiale |
||||
Orientation et pilotage de la recherche Dont Titre 2 |
||||
Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
||||
Recherche dans le domaine de l'énergie |
||||
Recherche industrielle |
||||
Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat |
||||
Recherche duale (civile et militaire) |
||||
Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2 |
500.000 |
500.000 |
||
Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2 |
||||
TOTAL |
500.000 |
500.000 |
500.000 |
500.000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Cet amendement a deux objets : d'une part, rappeler que l'examen du projet de loi de finances doit pouvoir s'exercer correctement et que les demandes du Parlement doivent être respectées, et, d'autre part, montrer toute l'importance que représente la valorisation de la recherche pour notre pays. L'ensemble de nos collègues qui sont intervenus au cours de la discussion générale en ont fait état.
Que s'est-il passé exactement ? Le palais de la Découverte ne fait l'objet d'aucune présentation dans la partie « opérateurs », alors que sa subvention représente 9,8 % des crédits du programme « Recherche culturelle et culture scientifique ». Or cette description nous permet notamment de connaître les actions engagées, la justification au premier euro et les perspectives pour l'année suivante.
En outre, l'activité du palais n'est évaluée par aucun indicateur de performance, pour une raison qui nous laisse perplexes. En effet, le ministère de la culture nous a informés qu'il avait décidé de ne pas faire apparaître, dans la partie « opérateurs », les lignes concernant le palais de la Découverte tant que la tutelle de cet établissement public relèverait du ministère chargé de la recherche. Il est vrai que, à ce stade, le palais de la Découverte n'est pas géré par le ministère de la culture.
Nous ne voulons pas, pour notre part, entrer dans des « chicaneries » interministérielles. Ce qui nous intéresse, c'est que le Parlement soit respecté. Nous avons fait des demandes, mais nous n'avons obtenu aucun élément d'analyse. Nous ne pouvons accepter que cela nous soit présenté ainsi.
C'est la raison pour laquelle nous proposons un amendement visant à diminuer les crédits de 500 000 euros, ce qui n'obérera en rien le fonctionnement du palais de la Découverte compte tenu du budget et des réserves qui sont à l'heure actuelle disponibles. En outre, je souhaiterais que nous prenions conscience de l'importance de la valorisation de la recherche : 500 000 euros de moins pour le palais de la Découverte, c'est 500 000 euros de plus, monsieur le ministre, pour mettre en oeuvre la valorisation de la recherche dans les contrats quadriennaux.
Permettez-moi de vous livrer une petite anecdote. Un journal du Sud-Ouest a récemment fait paraître une annonce pour un poste à pourvoir dans une université locale. Sa mission est de valoriser la recherche et sa rémunération est de... 22 000 euros bruts par an !
Si nous voulons une valorisation de la recherche - vous avez d'ailleurs accepté un certain nombre de conclusions qui figurent dans le rapport que j'ai rédigé sur cette question -, il faut y attacher de l'importance.
Nous marquons donc notre réprobation pour l'absence de renseignements, et, dans le même temps, nous montrons notre volonté de favoriser l'innovation et la recherche. Ces deux manifestations sont des actes positifs de notre part.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Je reconnais que nous sommes en tort, car l'information parlementaire n'a pas été satisfaisante. Monsieur Adnot, vous avez expliqué les raisons exactes de cette situation anormale. Si nous n'avons pas respecté nos obligations - lorsque je dis « nous », je parle de l'État et de l'exécutif -, c'est en raison d'un transfert entre deux ministères et d'une situation transitoire.
À tout pêcheur miséricorde : je souhaiterais obtenir votre pardon. Je prends l'engagement que, dès 2007, le palais redeviendra opérateur principal du programme, mais qu'il aura par conséquent l'obligation de vous fournir toutes les informations nécessaires pour que vous puissiez juger de l'efficacité de sa gestion et de la réalisation de ses objectifs.
J'ajoute que la diminution de ses crédits de 500 000 euros, pour un établissement qui n'est pas riche et qui mène des travaux présentant un caractère d'urgence, n'est pas une chose négligeable. Les travaux de première sécurité que nous conduisons, à hauteur de 2 millions d'euros, visent à palier un risque réel d'interdiction de l'ouverture du palais au public.
Donc, tout en reconnaissant nos torts, je plaide pour le maintien de ces crédits. Je répète que le palais a une incontestable utilité, puisque nous avons relativement peu d'institutions de diffusion de la culture scientifique et technique.
Parmi les institutions de diffusion de cette culture, il convient de citer la Cité des sciences, qui est une création relativement récente. Elle a son style et connaît désormais un franc succès. Son taux de fréquentation, qui déclinait sérieusement avant que nous ne la redressions en changeant sa direction, a dépassé le seuil de 3 millions de visiteurs par an.
Le palais de la Découverte est un peu plus modeste, mais le nombre de ses visiteurs, qui était de 530 000, devrait dépasser cette année les 610 000. Des efforts sont poursuivis, et une nouvelle équipe a été mise en place. Mais surtout, ce qui fait la spécificité de cet établissement, c'est sa façon de montrer la science, qui conserve toute sa valeur. Des expériences sont réalisées devant le public, et chacun d'entre vous sait l'importance que cela peut avoir sur le jeune public, notamment pour les vocations scientifiques.
Je sollicite donc le maintien de ces crédits, tout en reconnaissant que, globalement, notre administration a été défaillante. Mais, reconnaissez-le, c'est un point relativement mineur dans un ensemble beaucoup plus vaste.
Pour les raisons que je viens d'exposer, je ne puis qu'être défavorable au présent amendement.
M. le président. Monsieur le rapporteur spécial, l'amendement est-il maintenu ?
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, vous n'avez pas répondu sur l'intérêt qu'il y aurait à augmenter les crédits pour la valorisation de la recherche, dans le cadre des plans quadriennaux.
Le pardon aurait été total si vous aviez pris un engagement supplémentaire dans ce domaine. Nous acceptons que vous reconnaissiez cette erreur, mais cette dernière ne doit pas se reproduire. Pour le vérifier, nous pourrons nous rendre au palais de la Découverte.
L'argument des travaux n'est pas acceptable ; si les bâtiments sont en péril, c'est le signe que l'on ne s'est pas occupé à temps de ce qui devait être fait,...
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. ... et que la gestion a été mauvaise. C'est également la démonstration que les renseignements n'ont pas été fournis.
Je vais retirer mon amendement, puisque vous avez fait amende honorable. Mais cela ne veut pas dire que nous ne serons pas attentifs à un meilleur comportement de cet établissement à l'avenir.
M. le président. L'amendement n° II-28 est retiré.
L'amendement n° II-82, présenté par MM. Laffitte et J.L. Dupont, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
Crédits de paiement |
|
+ |
- |
+ |
- |
Formations supérieures et recherche universitaire Dont Titre 2 |
500 000 |
500 000 |
||
Vie étudiante Dont Titre 2 |
||||
Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires |
||||
Recherche dans le domaine de la gestion des milieux et des ressources |
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Recherche spatiale |
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Orientation et pilotage de la recherche Dont Titre 2 |
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Recherche dans le domaine des risques et des pollutions |
||||
Recherche dans le domaine de l'énergie |
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Recherche industrielle |
||||
Recherche dans le domaine des transports, de l'équipement et de l'habitat |
||||
Recherche duale (civile et militaire) |
||||
Recherche culturelle et culture scientifique Dont Titre 2 |
500 000 |
500 000 |
||
Enseignement supérieur et recherche agricoles Dont Titre 2 |
||||
TOTAL |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à transférer 500 000 euros du programme « Recherche culturelle et scientifique » vers le programme « Formations supérieures et recherche universitaire », et ce pour abonder la dotation en faveur des bibliothèques universitaires, laquelle pourrait donc être destinée à la Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg, seule bibliothèque - c'est un cas unique en France - à posséder la double caractéristique d'être à la fois patrimoniale - ce qui entraîne des dépenses spécifiques - et universitaire.
En effet, la dégradation de la situation budgétaire de cet établissement, notamment liée à la baisse de ses subventions, doit être enrayée.
Serait diminuée en contrepartie soit la subvention accordée - oserai-je le dire ? - au palais de la Découverte, son activité n'ayant été évaluée par aucun indicateur de programme, comme cela a été excellemment souligné par M. Philippe Adnot, soit - de préférence, et j'insiste sur ce terme, monsieur le ministre - la subvention allouée à la Cité des sciences et de l'industrie. Voilà une vraie porte nouvelle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Cet amendement pose un problème à la commission des finances. En effet, dans la mesure où elle a retiré l'amendement similaire qu'elle avait déposé, il lui est difficile d'émettre un avis favorable sur celui-là.
M. le ministre a d'ailleurs laissé entrevoir une porte de sortie en indiquant que la question des bibliothèques pourrait être traitée dans le cadre des contrats de projet. Je souhaiterais qu'il nous confirme ce point.
Quoi qu'il en soit, la commission des finances s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n°II-82. Nous n'allons pas faire de mauvaises manières à une commission que nous apprécions au plus haut point !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Ah, enfin ! (Sourires.)
M. Henri Revol, rapporteur pour avis. Quel compliment !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Goulard, ministre délégué. Là encore, le problème que vous soulevez est parfaitement réel.
La Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg constitue la deuxième collection nationale, avec trois millions de volumes, ce qui est tout à fait exceptionnel.
En 2006, son budget s'élève à 3,7 millions d'euros, dont 2,2 millions d'euros proviennent de l'État, le reste émanant des collectivités locales et des ressources propres. Il est en augmentation de 30 %, contre 1,8 % en 2005.
Néanmoins, la Bibliothèque de Strasbourg connaît des difficultés financières.
Nous avons pris un certain nombre de mesures d'urgence, notamment l'affectation, au titre de 2006, d'une dotation exceptionnelle de 150 000 euros pour la reconstitution du fonds de roulement.
Pour 2007, nous avons d'ores et déjà pris deux décisions. Tout d'abord, afin d'analyser les difficultés d'organisation interne qui nous sont apparues, nous avons commandé un audit financier dont nous aurons le compte rendu fin janvier 2007. Ensuite, nous prévoyons de renouveler la dotation exceptionnelle de 150 000 euros consentie en 2006, afin d'améliorer les conditions du budget primitif pour 2007.
Vous le voyez, le Gouvernement a pleinement conscience de la nécessité de rétablir la situation financière de la Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg, et les mesures qu'il propose, d'un montant de 300 000 euros, sont voisines de celles que vous préconisez - 500 000 euros. J'ajoute qu'il tirera également les conséquences des résultats de la mission d'audit.
En outre, le financement des investissements immobiliers est inscrit dans le contrat de plan État-région, pour un montant de 18 millions d'euros.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° II-82 est-il maintenu ?
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis. J'ai un peu de chance parce que le retrait de l'amendement précédent m'interdit l'incohérence.
Monsieur le ministre, j'ai pris bonne note des indications que vous venez d'apporter et qui vont dans le bon sens. Pour renforcer la démarche d'audit, je maintiens cet amendement. Et nous verrons bien si la commission mixte paritaire a à revenir sur ce point.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Il y aurait beaucoup à dire sur la situation financière des réseaux de bibliothèques universitaires sur l'ensemble de notre territoire, et nous comprenons très bien la préoccupation que fait naître la situation particulière de la Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg, que vous avez rappelée, monsieur le ministre, et dont notre collègue Philippe Richert nous a fait part en commission.
Néanmoins, je ne peux que réitérer la dénonciation des mécanismes budgétaires de la LOLF, qui renvoient dos à dos les priorités de la politique budgétaire tant de l'enseignement supérieur dont nous débattons ce soir que de l'ensemble des budgets qui suivront.
Ainsi, mes chers collègues, par cet amendement, vous amputez le programme « recherche culturelle et culture scientifique » pour abonder celui de la « formation supérieure et recherche universitaire », donnant ainsi le sentiment que le budget de la diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle est considéré comme une simple variable d'ajustement, alors que c'est le budget de votre ministère dans son ensemble qui est insuffisant, monsieur le ministre !
En effet, le milliard d'euros annoncé n'est pas véritablement attribué, et c'est bien ainsi qu'il aurait fallu abonder ce budget, comme l'a brillamment démontré mon collègue Ivan Renar lors de son intervention dans la discussion générale.
Par cet amendement, et son caractère de variable d'ajustement, c'est un signal bien négatif que vous envoyez aux acteurs de la vulgarisation scientifique en France !
À l'heure où vous prônez le rapprochement entre la recherche et l'industrie, n'est-il pas contradictoire de vouloir amputer les crédits du palais de la Découverte, de la Cité des sciences et de l'industrie, dont la première fonction, selon le ministre de la culture, est « de permettre le rassemblement d'acteurs de culture et de statut social différents pour favoriser tous les dialogues » ?
Alors que, par ailleurs, l'éducation nationale constate que les jeunes se détournent des filières scientifiques et que l'on parle même de désertification massive, comment accepter de diminuer les crédits de la diffusion de la culture scientifique ?
Il est indispensable pour nous de maintenir les budgets du palais de la Découverte et de la Cité des sciences, qui remplissent une indispensable mission de démocratisation de la culture scientifique, sauf à dire que notre pays renonce au progrès, à la raison même, et à l'avenir.
Dans ce monde lézardé par les sectarismes et la violence, la lutte contre l'illettrisme scientifique est plus que jamais un enjeu crucial pour peser sur les choix environnementaux, éthiques et sociaux qui résultent des avancées scientifiques elles-mêmes.
Dans une société où la technique et la technologie sont omniprésentes, comment concevoir que la diffusion de la culture scientifique puisse être en recul ?
Il faut véritablement, mes chers collègues, que nous sortions de l'un des aspects de la pensée unique selon laquelle « il est fatal qu'il soit fatal que la culture soit toujours traitée après... », et la culture scientifique encore après !
D'autant que les sciences et les techniques sont au coeur des grandes problématiques auxquelles sont confrontés l'ensemble de nos concitoyens. Il n'est, pour s'en persuader, que d'examiner le rôle qu'elles jouent dans la plupart des grands débats de société, qu'il s'agisse du réchauffement climatique, de l'avenir de l'énergie nucléaire, de la « mal-bouffe », des organismes génétiquement modifiés, des biotechnologies, ou des nombreux bouleversements juridiques, économiques ou sociaux induits par le développement de l'Internet et des technologies de l'information...
On mesure toute l'importance de démocratiser l'accès à la culture scientifique, car c'est aussi un enjeu de la démocratie tout court. Il n'y a pas de démocratie sans généralisation et partage des savoirs, sans citoyens éclairés...
Il est plus que nécessaire de démocratiser la culture scientifique, de développer sa large diffusion, afin de permettre que chacun puisse, en connaissance de cause, maîtriser, peser sur les choix scientifiques qui dessineront le monde de demain.
Mes chers collègues, si nous pouvons partager les inquiétudes de M. Richert, notamment concernant la Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg, il nous semble néanmoins impossible d'opérer une ponction sur les crédits destinés à la diffusion culturelle.
Telle est la raison pour laquelle nous ne participerons pas au vote sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote.
M. Yannick Bodin. Je souhaite confirmer la position que nous avons adoptée dès le début et analyser un tant soit peu l'exercice auquel le Sénat vient de se livrer s'agissant de l'ensemble des amendements déposés sur cet article.
C'est tout de même un cas d'école ! En effet, à quoi le Sénat a-t-il passé son temps depuis deux heures, et où se situe le pouvoir législatif ? Force est de constater que le Parlement, en l'occurrence le Sénat, n'a aucune possibilité de peser sur les choix budgétaires qui nous sont présentés par le Gouvernement !
Le débat sur le budget est réduit au commentaire. Croyez-vous que la vocation de ce que nous appelons, avec une certaine fierté et un certain honneur, « la Haute Assemblée » est de se limiter au droit de débattre pendant deux heures sur des échanges de crédits entre une école vétérinaire, un palais de la Découverte et une bibliothèque nationale ?
Voilà à quoi est réduit aujourd'hui le débat national au Parlement français sur le budget concernant la recherche et l'enseignement supérieur !
Le pouvoir législatif dans ce pays mérite à mon avis mieux ! Le débat que nous avons eu n'est pas digne de l'idée que l'on peut se faire de ce pouvoir dans une démocratie comme celle de la République française !
Vous comprendrez donc pourquoi nous ne participons pas au vote sur les amendements.
M. le président. La parole est à M. Pierre Laffitte, pour explication de vote.
M. Pierre Laffitte. Monsieur le ministre, doit-on privilégier la Cité des sciences ou le palais de la Découverte ?
À l'occasion d'un colloque franco-allemand, qui se tenait au palais de la Découverte, sur la politique énergétique de l'Europe, de la France et de l'Allemagne, j'ai visité une exposition extraordinaire sur les effets de la vision sur le cerveau, qui révolutionne notre conception du fonctionnement de ce dernier.
C'est une démonstration étonnante de la qualité des réalisations du palais de la Découverte.
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot, rapporteur spécial.
M. Philippe Adnot, rapporteur spécial. Tout à l'heure, j'en avais appelé à la sagesse, et M. le rapporteur pour avis, en évoquant l'interdiction de l'incohérence, m'avait donné de bons espoirs.
Mais nous n'avons pas été cohérents ! En effet, tout à l'heure, nous avons fait valoir à M. Braye que, puisque nous avions obtenu 2 millions d'euros supplémentaires pour l'enseignement supérieur agricole, il était préférable de ne pas traiter nous-mêmes au cas par cas et de laisser le ministère opérer la répartition.
Là, c'est la même chose. La cohérence nous commande de ne pas distinguer le cas de telle ou telle bibliothèque.
Je vous invite donc à retirer cet amendement, monsieur le rapporteur pour avis, de façon à rechercher une autre solution au problème.
M. le président. La parole est à M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis.
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis. Le début de mon intervention n'a probablement pas été compris. Le paradoxe entre la cohérence et la solidarité est parfois difficile à résoudre !
Compte tenu de cet appel très fort à la cohérence, si M. le ministre pouvait me confirmer les propos qu'il a tenus tout à l'heure, voire les amplifier, je pourrais envisager de retirer mon amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. François Goulard, ministre délégué. C'est bien volontiers que je précise les choses.
Comme vous l'avez constaté, nous avons entrepris de trouver des solutions aux problèmes financiers de la Bibliothèque nationale universitaire de Strasbourg. Ainsi, 150 000 euros ont été attribués au titre de 2006.
Par ailleurs, je vous ai dit tout à l'heure que nous allions attribuer 150 000 euros au titre de 2007. J'en prends l'engagement ferme devant vous, et je prends l'engagement supplémentaire que, si l'audit financier fait apparaître un besoin plus important, nous augmenterons cette dotation au-delà de ce premier engagement de 150 000 euros.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, dans ces conditions, l'amendement n° II-82 est-il maintenu ?
M. Jean-Léonce Dupont, rapporteur pour avis. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° II-82 est retiré.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Je veux répondre à Yannick Bodin, qui s'est demandé où était le pouvoir législatif.
Il est ici, mon cher collègue, à condition que nous l'assumions !
Je reconnais que la discussion budgétaire n'est pas un exercice facile, puisque nous devons opérer des choix à l'intérieur des enveloppes des missions. Mais nous avons toute faculté de déplacer des crédits et, le cas échéant, de réduire leur montant.
Il n'y a pas si longtemps, au cours de la discussion générale, nous étions un certain nombre à déplorer l'ampleur du déficit public et à souligner la nécessité de mieux maîtriser la dépense publique, pour des raisons sur lesquelles je ne reviendrai pas.
Ce n'est pas facile de procéder à ces arbitrages ! Lorsqu'il s'agit de délibérer à propos des recettes, nous sommes assez prompts à penser qu'il faudrait plutôt les réduire pour ne pas accabler nos compatriotes de prélèvements fiscaux ou sociaux. Et lorsque vient le temps de la discussion sur les dépenses, nous nous livrons les uns et les autres à un inventaire visant à justifier la demande de crédits supplémentaires !
Comme l'a rappelé Philippe Adnot, nous ne sommes pas là pour flécher les crédits sur tel édifice ou tel autre : c'est la responsabilité de l'exécutif. Sinon, à l'occasion de la discussion du budget des routes, nous pourrions flécher les crédits sur telle route nationale, tel carrefour, tel giratoire... Cela ne peut pas être l'objet de la discussion budgétaire.
Nous avons eu ce soir un échange extrêmement intéressant, et je voudrais dire aux membres de la commission des affaires culturelles et à son président que nous avons été tout à fait en phase sur ces échanges, et leur manifester mon estime personnelle.
M. le président. J'ai été saisi d'une demande d'explication de vote sur les crédits de la mission de la part de M. Ivan Renar, à qui je donne donc la parole.
M. Ivan Renar. Tout d'abord, monsieur le ministre, je voudrais vous remercier de votre réponse, même si je ne partage pas votre optimisme, et apporter une précision : quand je prends la parole, comme tout à l'heure dans la discussion générale, je n'invente pas les inquiétudes ni les doléances de la communauté scientifique !
Les questions préoccupantes qui concernent le monde étudiant devraient certainement attirer davantage notre attention. Je m'étonne ainsi que le projet de budget ignore les conclusions du rapport Wauquiez consacré aux aides versées aux étudiants. Encore un rapport qui risque d'être abandonné à la critique rongeuse des souris !
M. Ivan Renar. Notre collègue député - vous voyez que je suis impartial, puisque je suis dans l'opposition et lui dans la majorité ! - avait pourtant mené un travail de fond débouchant sur des propositions pertinentes et ambitieuses telles que la création d'une allocation de rentrée universitaire, l'augmentation du nombre de bourses et l'accélération de leur versement, la constitution d'un dossier unique pour l'étudiant, le financement des études par un prêt aidé par l'État, ou encore la mise en oeuvre d'un plan national « Conditions de vie étudiantes ».
Qu'en est-il des aides au logement ? Continueront-elles d'être versées directement aux étudiants sans considération des ressources de leurs parents, « au risque délibéré d'en faire bénéficier des locataires qui, socialement, n'en ont en réalité aucun besoin », pour reprendre les propos de notre collègue ?
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ce débat a eu lieu cet après-midi !
M. Ivan Renar. Il précisait encore que ces aides au logement « constituent un effet d'aubaine pour les bailleurs qui, partout en France, intègrent systématiquement l'aide au logement au montant majoré d'autant de leurs loyers ».
Que dire de la santé des étudiants ? Une étude réalisée par une mutuelle étudiante révèle qu'ils sont de plus en plus nombreux à renoncer aux soins, faute de moyens financiers.
Ainsi la plupart des jeunes de l'enseignement supérieur se privent-ils de soins, notamment dentaires ou ophtalmologiques, qui sont trop peu remboursés. Pour remédier à cette situation préoccupante, il faudra bien un jour inscrire la mise en place d'un chèque-santé dans la loi de finances.
Je terminerai par un mot sur la logique que révèlent les choix budgétaires qui sont soumis aujourd'hui à notre vote. L'appareil de recherche et d'enseignement supérieur est désormais remodelé de façon dirigiste. En témoigne d'ailleurs le mode de désignation des membres des conseils d'administration de l'ANR, du Haut Conseil à la science et à la technologie, des jurys décernant les labels Carnot, des comités des pôles de compétitivité, de l'Agence de l'innovation industrielle... : tous sont nommés, aucun n'est directement élu par la communauté scientifique.
Les évolutions récentes, tant celles de l'évaluation que celles des modes de financement, témoignent également de cette conception dirigiste, utilitariste et concurrentielle de la recherche qui est actuellement mise en oeuvre.
Ainsi l'Agence d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur, contrairement aux attentes de la communauté scientifique, s'impose-t-elle aux chercheurs comme une véritable « épée de Damoclès », pour reprendre les propos du rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale - membre, lui aussi, de la majorité ! -, qui résume bien la situation : « Le plus important dans l'évaluation, c'est ce que l'on en fait. En l'occurrence, c'est le pouvoir politique, davantage que l'Agence elle-même, qui doit témoigner de sa volonté et de sa capacité à utiliser les résultats de l'Agence qu'il a portée sur les fonts baptismaux ». Ou c'est un dangereux agitateur, ou il a raison !
Le pilotage de la recherche s'opère également par le profond remaniement des modes de financement des différents acteurs de la recherche.
L'Agence nationale de la recherche, conçue pour devenir le moyen privilégié d'impulsion des grandes orientations fixées par le Gouvernement, est en passe de détenir le quasi-monopole du financement de toute nouvelle recherche en France.
Faute de moyens, les organismes et les universités sont contraints, pour survivre, de se disputer la manne de l'ANR, en compétition avec une pléiade de nouvelles entités administratives : pôles de compétitivité, réseaux thématiques de recherche avancée, instituts Carnot et autres instituts spécialisés. Le Gouvernement peut ainsi sans difficulté développer certains secteurs de recherche finalisée, où il est aisé d'obtenir un financement sans forte sélection, et étouffer d'autres secteurs plus fondamentaux, où le taux de succès des demandes est dérisoire quelle que soit la valeur des projets.
On est aussi en droit de s'interroger, monsieur le ministre, sur l'avenir des sciences humaines et sociales. Dans le contexte actuel, où prévaut la rentabilité à tous crins, il est à redouter que les recherches dans ces disciplines, déjà réduites à la portion congrue, ne soient rapidement laissées à l'abandon.
Je vous ai bien entendu tout au long de ce débat, monsieur le ministre ; mais permettez-moi de persister et de signer : l'avenir de la recherche impose d'investir massivement dans la matière grise en favorisant l'émergence de nouvelles connaissances diffusées au plus grand nombre, et donc de renoncer au discours managérial fondé sur l'obsession du court terme, de possibilités d'applications prévisibles et de la rentabilité économique rapide.
Monsieur le ministre, vous l'avez compris, le groupe CRC ne pourra voter ces crédits.
M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur », modifiés.
M. Serge Lagauche. Le groupe socialiste vote contre !
M. le président. J'appelle en discussion l'article 51, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Article 51
Le V de l'article 24 de la loi de finances n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005 est abrogé. - (Adopté.)
M. le président. Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».
La suite de la discussion du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.