M. le président. L'amendement n° 373, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 26, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les étrangers qui, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, sont titulaires d'une carte de séjour temporaire d'un an autorisant à travailler, reçoivent de plein droit une carte de résident à la première échéance de l'un de ces titres de séjour ou de travail.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Par le présent amendement, nous souhaitons insérer dans le projet de loi un nouvel article, afin de conforter l'insertion sociale et professionnelle grâce à l'accès à la carte de dix ans.
La multiplication des cartes de séjour d'un an précarise leurs détenteurs et handicape notamment leur accès à l'emploi et au logement. Nous proposons donc les dispositions suivantes : « Les étrangers, qui, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, sont titulaires d'une carte de séjour temporaire d'un an autorisant à travailler, reçoivent de plein droit une carte de résident à la première échéance de l'un de ces titres de séjour ou de travail ».
Je tiens à rappeler que cette mesure avait été votée à l'unanimité par le Parlement en 1984.
Depuis 1984 - année de création de la carte de résident de dix ans -, l'accès à un titre de séjour de longue durée a constitué un instrument légal d'intégration de dizaines de milliers de migrants. Or, depuis la loi du 26 novembre 2003, on assiste à un retournement majeur dans la conception de l'intégration, renforcée aujourd'hui par votre réforme. Dorénavant, la délivrance d'un titre de séjour devient la « récompense » de l'intégration.
L'intégration suppose un minimum de stabilité dans le droit au séjour permettant un véritable ancrage dans le pays d'accueil non soumis à l'aléa ou à la précarité.
L'intégration ne vous sert en réalité qu'à constituer une condition supplémentaire - donc, un obstacle - à la régularisation de nombre de situations administratives.
Pour toutes ces raisons, nous vous proposons, mes chers collègues, d'adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 373.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 26 bis
Après l'article L. 314-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 314-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 314-6-1. - La carte de résident d'un étranger qui ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion en application des articles L. 521-2 ou L. 521-3 peut lui être retirée s'il fait l'objet d'une condamnation définitive sur le fondement des articles 433-3, 433-4 ou 433-6 du code pénal.
« La carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" lui est délivrée de plein droit. »
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 181 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 245 rectifié est présenté par MM. Delfau, Baylet, A. Boyer, Collin et Fortassin.
L'amendement n° 374 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour présenter l'amendement n° 181.
M. Pierre-Yves Collombat. L'article 26 bis a été introduit par l'Assemblée nationale. Il ne figurait donc pas dans le texte initial, qui était pourtant passablement répressif. Cela prouve que l'on peut toujours en rajouter. D'ailleurs, je vois déjà poindre la soixante-douzième modification de l'ordonnance de 1945.
Cet article dispose que la carte de résident d'un étranger qui ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion en application des articles L. 521-2 ou L. 521-3 peut lui être retirée - une carte d'un an portant la mention « vie privée et familiale » lui est délivrée - s'il fait l'objet d'une condamnation définitive pour menaces et actes d'intimidation ou pour acte de rébellion à l'encontre des personnes dépositaires de l'autorité publique ou chargées d'une mission de service public.
Cet ajout de l'Assemblée nationale peut paraître de bon sens. Comment peut-on conserver sur notre sol des gens qui se rebelleraient contre l'autorité publique, me direz-vous ? Certes ! Sur le plan des principes, nous n'avons rien à redire. Toutefois, la notion d'intimidation ou de rébellion est assez difficile à définir et elle est particulièrement aléatoire.
Le rapport annuel de la Commission nationale de déontologie de la sécurité fait apparaître de nombreux cas où les accusations de rébellion servent à cacher - je voudrais employer une litote -, disons des irrégularités de procédure, des comportements douteux, souvent liés d'ailleurs à des situations difficiles et à un manque d'encadrement, et parfois même, j'en ai eu des exemples dans mon département, des règlements de comptes. Cette notion peut donc servir à autre chose qu'à faire respecter la grandeur de la France.
En outre, cet article ne fait pas référence à la gravité de l'acte. Un pied de nez est-il du même ordre que des coups et blessures ?
Étendre à ce point la notion de rébellion paraît tout à fait excessif. Si l'on n'y prend garde, cet article pourrait être extrêmement destructeur et aboutir au résultat inverse de celui qui est recherché.
M. le président. L'amendement n° 245 rectifié n'est pas soutenu.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 374.
Mme Josiane Mathon-Poinat. L'article 26 bis prévoit de nouvelles possibilités de retrait de la carte de résident d'un titulaire qui est protégé contre une mesure d'expulsion.
On pourrait croire que cet article vise les étrangers qui se retrouveraient mêlés à des manifestations, telles que celles qui ont été organisées cet hiver contre le CPE, ou à des violences urbaines, comme celles que nous avons connues dans nos banlieues à l'automne.
En fait, les infractions de rébellion ou de menace contre les forces de l'ordre sont systématiquement invoquées par ces dernières lorsque des confrontations ont lieu. Ainsi, si cet article est adopté, ce serait le moyen de retirer de façon quasi automatique la carte de résident à ces étrangers.
Je tiens à insister sur le fait que cette sanction interviendrait après que l'étranger a fait l'objet d'une condamnation définitive. Si la justice l'a sanctionné, il n'apparaît pas nécessaire de le sanctionner à nouveau ; sinon, cela ressemblerait à une double peine.
M. le président. L'amendement n° 85 rectifié bis, présenté par MM. Courtois, Dassault et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 314-6-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, remplacer les mots :
433-4 ou
par les mots :
433-4, 433-5, du deuxième alinéa de l'article 433-5-1 ou de l'article
La parole est à M. Jean-Patrick Courtois.
M. Jean-Patrick Courtois. L'article 26 bis permet de retirer la carte de résident, qui est le signe d'une intégration dans la société française, aux étrangers condamnés pour avoir commis des violences urbaines, et même des violences rurales.
Il est légitime d'ajouter aux incriminations retenues par l'article L. 314-6-1 du CESEDA celles qui sont visées à l'article 433-5 du code pénal relatives à l'outrage à personne chargée d'une mission de service public et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie, dès lors qu'elles témoignent d'un déficit flagrant d'intégration.
La version rectifiée de cet amendement ajoute, conformément au débat ayant eu lieu en commission des lois, une nouvelle forme d'outrage pouvant entraîner le retrait de la carte de résident : il s'agit de l'outrage fait publiquement à l'hymne national ou au drapeau tricolore.
MM. Paul Girod et Henri de Raincourt. Très bien !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Les amendements identiques nos 181 et 374 visant à supprimer l'article, la commission a bien évidemment émis un avis défavorable.
S'agissant de l'amendement n° 85 rectifié bis, la commission a émis un avis très favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 181 et 374.
En revanche, il est très favorable à l'amendement n° 85 rectifié bis. Un étranger condamné pour outrage à l'encontre d'une personne chargée d'une mission de service public ou dépositaire de l'autorité publique : c'est évidemment l'objectif ! Ajouter l'outrage au drapeau tricolore ou à l'hymne national ne peut que conforter la dimension que nous avons voulu conférer à ce texte. Un tel comportement démontrerait en effet que la personne n'est pas intégrée
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 181 et 374.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote sur l'amendement n° 85 rectifié bis.
M. Alain Vasselle. Je me réjouis d'autant plus volontiers de l'initiative de MM. Courtois et Dassault que, comme tous les membres du groupe de l'UMP, je suis cosignataire de cet amendement.
Cela étant, j'aimerais que la rigueur qui prévaut pour les étrangers s'applique de la même manière aux Français qui ont un comportement peu respectueux vis-à-vis des personnes chargées d'une mission de service public ou des premiers magistrats des communes. Jusqu'à ce jour, les tribunaux ne s'empressent pas de prendre des mesures à l'encontre de ces concitoyens.
Cette mesure n'est-elle pas un coup d'épée dans l'eau ? Je le répète, j'approuve les dispositions législatives visant les étrangers qui n'auraient pas un comportement citoyen, mais il faudrait que ces mêmes mesures s'appliquent aux Français. (Mme Bariza Khiari applaudit.)
Plusieurs premiers magistrats dans mon département ont été victimes d'insultes de la part de certains de nos concitoyens. Or nous attendons encore que la justice se prononce à l'égard de ceux qui ont eu ce comportement condamnable.
Je ne doute pas que M. le ministre s'empressera de prendre une circulaire ministérielle pour rappeler aux magistrats, avec le concours du garde des sceaux, qu'il y a lieu de faire preuve de sévérité à l'égard tant des étrangers que des citoyens français.
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Voilà le type même de mesure qui paraît fortement défendre la dignité nationale. C'est très bien, mais qui jugera de la réalité des faits ?
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Les juges !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Quand on voit ce qui se passe dans les tribunaux et dans les commissariats de police, quand on entend le témoignage des avocats ou quand on lit le rapport de la commission de déontologie de la sécurité, je crains vraiment que ce texte ne favorise les abus de droit caractérisés.
Les comportements dont nous parlons sont bien évidemment condamnables, mais il faudrait les juger avec toute la sérénité nécessaire. Or ces conditions ne sont pas réunies dans un grand nombre de tribunaux. En flagrant délit, les affaires sont jugées les unes après les autres, à toute allure, avec des avocats commis d'office qui ne savent pas de quoi il retourne quelques secondes auparavant. On peut donc avoir des craintes. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
MM. Jean-Patrick Courtois et Paul Blanc. C'est inacceptable !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame Cerisier-ben Guiga, remettre systématiquement en cause les décisions de justice, alors que toutes les voies de recours existent, me semble une attitude franchement insupportable ! (Très bien ! et vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.) C'est trop facile !
Si des individus se comportent mal vis-à-vis de l'autorité publique, vis-à-vis du drapeau, qui représente tout de même la nation,...
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. ... ou vis-à-vis de symboles de la République, il est normal qu'ils en assument les conséquences s'ils sont condamnés.
Certains disent qu'il ne faudrait pas prononcer de sanctions.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Nous n'avons jamais dit cela !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Les individus concernés seraient, paraît-il, mal jugés et injustement condamnés.
Je le répète, madame Cerisier-ben Guiga : votre généralisation est insupportable ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Patrick Courtois. C'est scandaleux !
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote.
Mme Bariza Khiari. J'ai particulièrement apprécié l'intervention de notre collègue Alain Vasselle.
En effet, cette intervention démontre en creux qu'il y a une discrimination à l'égard des étrangers...
M. Alain Vasselle. Je n'ai pas parlé de discrimination !
Mme Bariza Khiari. ... et que le présent projet de loi, notamment à l'article dont nous débattons actuellement, tend à renforcer ce phénomène.
M. le président. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Apparemment, nous en sommes à nous raconter nos différentes anecdotes personnelles.
Dans ces conditions, je voudrais m'adresser à mon collègue Alain Vasselle. J'ai remarqué que le président de la commission ne s'était pas insurgé contre les propos de M. Vasselle sur la manière dont les juges traitent ceux qui insultent les premiers magistrats.
Pour ma part, j'ai été confronté au problème à plusieurs reprises. J'ai pu constater avec satisfaction que ceux qui m'avaient insulté et menacé avaient été sanctionnés.
Par conséquent, mon cher collègue, peut-être votre département se caractérise-t-il par un laxisme particulier, mais ce n'est pas le cas du mien. Alors, ne généralisons pas !
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. C'est pourtant ce qu'a fait Mme Cerisier-ben Guiga !
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Non, je n'ai pas généralisé !
M. Pierre-Yves Collombat. En pratique, la définition concrète de la notion de « rébellion » est extrêmement floue. Le dispositif risque donc de provoquer de multiples bavures.
M. le président. Je mets aux voix l'article 26 bis, modifié.
(L'article 26 bis est adopté.)
Article 27
L'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, le mot : « également » est supprimé ;
2° Dans le 1°, les mots : « aux enfants mineurs ou dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire » sont remplacés par les mots : « aux enfants dans l'année qui suit leur dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3 », et le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois » ;
3° Dans le 2°, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « trois » ;
4° Après le 2°, il est inséré un 3° ainsi rédigé :
« 3° À l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. »
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, sur l'article.
Mme Bariza Khiari. Comme c'était déjà le cas pour l'article précédent, la lecture de cet article 27 démontre que l'objet de ce projet de loi est non pas de maîtriser l'immigration ou d'améliorer son pilotage, mais bien de précariser à l'extrême les parcours de séjour des étrangers dans notre pays.
Cet article comporte deux volets. Tout d'abord, il tend à créer de nouveaux critères pour la délivrance de la carte de résident aux conjoints de Français et aux bénéficiaires du regroupement familial. Ensuite, il vise à porter le délai de séjour régulier préalable à la délivrance d'une carte de résident de deux ans à trois ans.
Ces mesures laissent une nouvelle fois une grande part à l'arbitraire administratif. Monsieur le ministre, vous faites du respect des conditions d'intégration et de la continuité de la communauté de vie des préalables à la délivrance d'une carte de résident. Vous supprimez donc de fait les délivrances de plein droit de ces titres de séjour. En outre, l'ajout d'une condition d'intégration me laisse plus que perplexe. Plutôt que de contribuer à l'intégration des étrangers en leur accordant la stabilité du séjour, vous faites du contrat d'accueil et d'intégration un préalable.
Tout cela est bien la preuve de l'utilisation que vous voulez faire du contrat d'accueil et d'intégration. Si nous sommes favorables à ce dispositif, nous sommes en revanche inquiets quant à l'usage qui en sera fait. Selon nous, ce contrat ne sera aucunement un moyen de favoriser l'intégration des primo arrivants dans notre pays. Vous souhaitez au contraire en faire un outil d'exclusion et de précarisation des parcours de séjour.
Ensuite, l'allongement de deux ans à trois ans de l'obligation de séjour préalable à la délivrance d'une carte de résident pour les conjoints de Français, les bénéficiaires du regroupement familial et les parents d'enfants français n'a pas de raison d'être. Pour le justifier, vous avancez la nécessité de lutter contre les mariages forcés. Vous avez ainsi égrené toute une liste d'entraves. Nous admettons tout à fait l'existence de mariages forcés ou des filières de complaisance. Mais ce n'est pas une raison pour jeter l'anathème sur l'ensemble des couples mixtes !
Monsieur le ministre, ce projet de loi ne participe pas d'une politique de l'immigration. Cet article 27 ne sert à rien. Comme toute la philosophie qui sous-tend ce texte, il s'agit seulement de vous permettre d'affirmer que vous avez une nouvelle fois durci la législation.
C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste demandera la suppression de cet article.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 182 est présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et M. André, MM. Assouline, Badinter, Bel et Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et C. Gautier, Mmes Khiari et Le Texier, MM. Mahéas, Mermaz, Peyronnet et Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 375 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l'amendement n° 182.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, permettez-moi de faire une remarque préalable.
La déclaration enflammée de M. Vasselle de tout à l'heure comportait une conclusion qui m'est apparue quelque peu choquante. En fait, mon cher collègue, vous avez émis l'idée selon laquelle le ministre de l'intérieur pourrait envoyer une circulaire aux juges.
M. Alain Vasselle. Le garde des sceaux !
M. Jean-Pierre Sueur. C'est le garde des sceaux qui peut envoyer une circulaire aux parquets ; nous sommes bien d'accord ?
M. Alain Vasselle. Oui !
M. Jean-Pierre Sueur. Il était préférable de clarifier ce point. Le procès-verbal fera foi, mais j'avais cru vous entendre parler du ministère de l'intérieur.
J'en viens à présent à l'amendement n° 182.
Les conditions de délivrance de la carte de résident sont aujourd'hui définies par les articles L. 314-8 à L. 314-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
L'article L. 314-9 traite spécifiquement des cas de délivrance de la carte de résident à certaines catégories d'étrangers présents en France depuis une durée inférieure au délai de droit commun de cinq ans.
Or l'article 27 du présent projet de loi tend à modifier sensiblement ce dispositif.
D'une part, les étrangers entrant en France par la voie du regroupement familial, qu'il s'agisse de conjoints, d'enfants ou de parents de Français, devront justifier de trois années de présence régulière en France, et non plus seulement de deux.
D'autre part, les conjoints de Français relèveront désormais de l'article L. 314-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et non plus de l'article L. 314-11 pour l'accès à la carte de résident.
Il s'agit d'une modification très substantielle. En effet, ces personnes ne bénéficieront plus d'une carte de résident de plein droit après une certaine durée de séjour, mais elles devront faire une demande dans les conditions de droit commun. L'administration aura donc un pouvoir d'appréciation sur l'opportunité de délivrer cette carte, ce qui rendra très difficile la situation d'un certain nombre de couples mixtes.
Par ailleurs, la durée de vie commune nécessaire pour qu'un conjoint de Français puisse bénéficier de la carte de résident sera portée de deux ans à trois ans, par cohérence avec l'allongement équivalent de la durée nécessaire pour pouvoir demander la nationalité française dans le cadre du mariage.
Monsieur le ministre, selon nous, l'ensemble de ces dispositions sont contraires à la lettre et à l'esprit de l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui pose le principe du droit à la vie familiale.
C'est pourquoi nous demandons la suppression de l'article 27.
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 375.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet article 27, qui décline l'article 5 du présent projet de loi, symbolise une fois de plus la suspicion généralisée et la précarisation de l'étranger dans notre pays, y compris s'il décide de fonder un foyer avec un homme ou une femme de nationalité française.
Comme l'indique M. le rapporteur, le prétexte de cette précarisation extrême est la « satisfaction de la condition d'intégration dans la société française ».
Comment cette satisfaction sera-t-elle évaluée en pratique ? Par l'allongement de deux ans à trois ans du délai pour l'obtention de la carte de résident du conjoint ou des enfants mineurs de l'étranger et même du conjoint étranger d'une Française ou d'un Français !
À quelques mois d'une échéance électorale, je ne cesse de m'étonner de ce nouveau durcissement d'une législation que M. Sarkozy avait lui-même ardemment préconisée et défendue en 2003.
Comment ne pas percevoir des raisons d'opportunité dans cette obsession du ministre de l'intérieur, du Gouvernement et de certains sénateurs siégeant sur ces travées à remettre sur le tapis la question de l'immigration et de la sécurité lorsque la marmite sociale bouillonne ?
En fait, quel bilan peut-on tirer de la réforme précédente ? Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire à quelle date les décrets d'application ont été rendus exécutoires ? À moins que cet article 27 ne soit purement idéologique !
C'est un rappel à la rigueur législative et républicaine qu'il faudrait plutôt formuler. La France doit donner une image d'elle-même autre que celle d'un pays apeuré, agressif et d'exclusion.
Vous venez d'adopter un amendement tendant à sanctionner l'outrage au drapeau tricolore. L'article 27 constitue un outrage à tout humanisme !
M. le président. L'amendement n° 376, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le 2° de cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Les dispositions que le 2°de l'article 27 tend à instituer sont motivées par les échéances électorales à venir. Je viens de le dire, mais je peux le répéter : c'est tellement vrai !
En fait, en évoquant le texte en vigueur, M. le rapporteur explique que : « Cette rédaction est issue de la loi du 26 novembre 2003. Auparavant, les regroupés bénéficiaient immédiatement d'un titre de même nature et de même durée que celui du regroupant. »
M. Buffet souligne ainsi - j'ignore s'il le fait volontairement ou non - le caractère particulièrement oppressant de la législation actuelle et la violence supplémentaire proposée par cet article, et tout particulièrement par son 2°.
Aussi, un étranger, conjoint ou enfant, qui doit déjà passer la barrière de l'accès au territoire national - ce n'est pas simple du tout et nous pouvons compter sur la vigilance obsessionnelle de l'actuel gouvernement -, devra patienter trois ans, et non plus deux ans, pour sortir de la précarité statutaire et obtenir une carte de résident.
L'enfant scolarisé sera-t-il maintenu dans cette précarité et les jeunes époux seront-ils également soumis à cette précarité au détriment de la sérénité nécessaire à l'épanouissement de leur vie familiale ou, plus simplement, de leur vie ?
La croissance depuis 2003 est-elle si importante qu'il faille véritablement durcir encore la législation ?
M. le président. L'amendement n° 377, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le 4° de cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Je crains que l'on ne me prête des intentions que je n'ai pas.
S'agissant des amendements identiques nos 182 et 375, est-il utile de rappeler que l'allongement des délais contribue également à lutter contre les fraudes ? En outre, obtenir la carte de résident n'est pas un droit qui s'acquiert par simple capitalisation des années. Nous devons nous appuyer sur ces deux principes.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression, ainsi que sur les amendements nos 376 et 377, qui sont des amendements de repli.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Monsieur Sueur, vous avez mentionné l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Comme vous avez la réputation d'être un bon législateur, donc un bon juriste, je vous invite à lire la jurisprudence sur ce sujet.
Ainsi, aux termes de l'arrêt Abdulaziz, Cabales et Balkandali contre Royaume-Uni de la Cour européenne des droits de l'homme du 28 mai 1985, « l'article 8 ne saurait s'interpréter comme comportant pour un État contractant l'obligation générale de respecter le choix, par des couples mariés, de leur domicile commun et d'accepter l'installation de conjoints non nationaux dans le pays. »
Par ailleurs, je vous rappelle que les dispositions de l'article 27 ont été largement validées par l'assemblée générale du Conseil d'État.
Depuis le début de cette discussion, j'ai le sentiment d'assister à une tentative de manipulation des esprits sur certaines travées (Marques d'étonnement sur les travées du groupe socialiste.), et vous en êtes l'un des principaux instigateurs, monsieur Sueur, même si vous le faites avec une certaine modération, sous des dehors généreux, solidaires. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
À la demande de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, je suis venu vous présenter hier soir, par respect pour la Haute Assemblée, le contenu de la circulaire que M Sarkozy a signée hier et adressée ce matin à tous les préfets de France pour expliquer les dispositions devant être prises pour préserver la présence d'un certain nombre d'enfants d'origine étrangère scolarisés en France.
Dès cet instant, j'ai vu la mise en oeuvre d'une démarche coordonnée visant à dénaturer l'esprit et la lettre de cette circulaire. Je veux donc, dès ce soir, profiter de l'occasion que vous m'offrez de mettre un terme à toute tentative de manipulation.
J'ai lu ce matin, dans un organe de presse qui se disait autrefois très proche d'un parti implanté place du Colonel-Fabien, un article assez délirant - il est peut-être votre source d'inspiration -, qui me semble témoigner de cette tentative de manipulation.
M. Jean-Pierre Sueur. Je lis Libération !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Cet article était intitulé : « Faudra-t-il leur couper la langue pour qu'ils puissent rester ici ? ».
Lorsque le ministre d'État a défini les conditions dans lesquelles il convenait, par humanité, d'envisager la régularisation de certaines familles, il a évoqué la situation d'enfants arrivés en France en bas âge ou nés en France, qui ne connaissent que la France.
Je relis les propos qu'il a tenus ici même, au Sénat, le mardi 4 juin : « Lorsqu'un enfant étranger est né en France où qu'il y est arrivé en très bas âge, qu'il est scolarisé en France, qu'il ne parle pas la langue de son pays d'origine,...
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. C'est cela le problème !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. ...qu'il n'a aucun lien avec ce pays, il serait très cruel de l'y reconduire de force ! Car ce pays d'origine, en réalité, n'est pas le sien. Les attaches de cet enfant sont en France et son départ serait vécu comme une véritable expatriation, un déracinement. »
Telles sont les propos qu'a tenus Nicolas Sarkozy. Voilà où se situe votre manipulation, monsieur Sueur ! Une manipulation d'extrême gauche voudrait nous faire croire aujourd'hui que l'on interdit aux enfants étrangers de parler la langue de leur pays d'origine. C'est tout simplement un procès stalinien (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) et je voulais ce soir, devant ceux qui en sont à l'origine, effectuer la mise au point nécessaire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Pierre-Yves Collombat. C'est ridicule !
M. Thierry Foucaud. C'est vieillot !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. D'ailleurs, les uns et les autres utilisent de façon répétée le même vocabulaire : « précarisation extrême », « obsession », « article purement idéologique ».
Vous vous en êtes pris, madame Cerisier-ben Guiga, à M. Alain Vasselle,...
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Pas du tout !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. ... qui a proposé que soit adressée une circulaire aux parquets, afin que ceux-ci se prononcent de manière uniforme dans toutes les juridictions de France. On pourrait citer tant et tant d'exemples ! (Mme Monique Cerisier-ben Guiga s'exclame.) C'est vous qui, hier, soupçonniez la police nationale ou les pompiers de travailler au noir ! Tous les Français installés aux Etats-Unis seraient en situation clandestine. Et je pourrais ainsi faire référence à l'ensemble de vos interventions devant la Haute Assemblée...
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. C'est de la mauvaise foi !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. ...depuis quelques jours, et ce soir encore.
Quel crime y aurait-il à prévoir dans la loi que tous ceux qui portent atteinte au drapeau, à l'hymne national, aux symboles de la République, puissent être sanctionnés ?
Vous considériez hier - car ce sont vos propositions ! - que nous pouvions donner l'image d'un pays où l'irrégularité de tous ceux qui viennent en France sans en respecter les règles devrait être une référence dans le monde entier.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. C'est ridicule !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Quelle leçon êtes-vous en train de donner à tous ceux qui attendent que nous redonnions un peu de repères, un peu d'authenticité, un peu d'identité aux fondements de notre histoire, aux lois de la République et aux règles qui régissent les valeurs de la nation française ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Je tenais à faire cette mise au point au moment où le ministre d'État prépare un texte sur la prévention de la délinquance des mineurs. Il s'agit, notamment par une réforme de l'ordonnance de 1945, d'assurer l'égalité de tous les Français devant la loi : les crimes les plus odieux doivent être punis de la même manière, devant toutes les juridictions de France, quel que soit l'âge auquel ils ont été commis. Malheureusement, lors des violences urbaines du mois de novembre dernier, nous avons pu constater que les mineurs qui avaient commis des actes barbares étaient jugés de façon totalement différente selon les juridictions.
Je crois donc que le rappel qu'a effectué M. Vasselle tout à l'heure était tout à fait justifié et qu'il est légitime que nous fassions ces propositions. C'est l'expression de la démocratie ! C'est elle qui nous permet aujourd'hui de proposer un certain nombre de réformes. Que des sénateurs de la République se soient engagés dans cette voie et fassent des suggestions au Gouvernement me paraît parfaitement fondé.
Pour toutes ces raisons, bien évidemment, le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques n°s 182 et 375, ainsi qu'aux amendements n°s 376 et 377. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote, sur les amendements identiques n°s 182 et 375.
M. Jean-Pierre Sueur. Il importe de ne pas entrer dans le procès instruit par M. le ministre.
Vous me dites, monsieur le ministre, que j'ai l'air généreux, mais qu'en réalité je fais de la manipulation. Je suis le représentant - c'est bien connu ! - de l'extrême gauche. (Rires.) Vous devriez en parler à l'extrême gauche ! Je tiens des discours staliniens, tout le monde le sait.
M. Jean-Pierre Sueur. Nous n'acceptons pas que vous profériez de telles accusations !
Je cherchais tout à l'heure le texte exact de la circulaire, mais les déclarations de M. le ministre d'État, dont vous venez de donner lecture, sont très claires : parmi les conditions posées à la régularisation des enfants de sans-papiers, il y a bien le fait, pour ceux-ci, de ne pas parler la langue de leur pays d'origine.
Cela signifie que l'un des critères pour bénéficier de cette circulaire est de ne parler que le français. Cela nous paraît extrêmement critiquable, car on ne peut tout de même pas reprocher à un enfant de parler la langue de ses parents ou de l'un de ses parents ! De nombreux enfants d'immigrés parlent à la fois le français et la langue de leur pays d'origine.
Il ne s'agit pas là d'une manipulation de notre part, monsieur le ministre : nous commentons simplement les propos de Nicolas Sarkozy, que vous venez de rapporter.
Nous assistons, en ce moment - nous en sommes tous témoins - à un mouvement de solidarité avec ces enfants. Et ce mouvement dépasse largement les frontières politiques : nous rencontrons tous des parents d'élèves qui ne comprennent vraiment pas pourquoi tel élève, qu'ils connaissent, devrait quitter notre pays.
Lorsque M. le ministre d'État décide de mettre en oeuvre, par circulaire, un dispositif en faveur de ces enfants, je trouve cela positif. Mais à la lecture de cette circulaire, je suis plus dubitatif ; je viens d'expliquer pourquoi. Quand j'entends que ce dispositif ne saurait concerner que huit cents enfants, je ne comprends plus du tout ! En effet, puisque l'on demande aux préfets de procéder à un examen au cas par cas de la situation de ces enfants, il n'est pas possible de dire combien d'entre eux seront concernés par ce dispositif avant que cet examen ait eu lieu !
Annoncer qu'une réponse sera apportée au problème et déclarer que celle-ci ne concernera que huit cents enfants, n'est-ce pas de la manipulation ?
Vous nous assénez des propos sur les sapeurs-pompiers et les policiers.
M. Jean-Pierre Sueur. J'ai un grand un respect pour les sapeurs-pompiers, avec qui je travaille dans mon département. J'ai également un grand respect pour les policiers. Je ne vois pas pourquoi on devrait suspecter tel ou tel groupe ; d'ailleurs, je n'en suspecte aucun.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Cessez, monsieur le ministre ! La calomnie a ses limites !
M. Jean-Patrick Courtois. C'est ce qui a été dit hier !
M. Jean-Pierre Sueur. On a le droit d'émettre des critiques, mais on doit respecter les sapeurs-pompiers et les policiers ! Tel est tout à fait notre état d'esprit.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Je termine, monsieur le président, mais M. le ministre s'est longuement exprimé, sur de nombreux sujets.
M. le président. Le temps de parole de M. le ministre n'est pas limité.
M. Jean-Pierre Sueur. Je ne pensais pas devoir avoir la cruauté, mais je vais finir par l'avoir, de répéter ici les propos qu'a tenus M. Nicolas Sarkozy en 2003, lorsqu'il a présenté la loi relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité. Il a dit, en substance : avec cette nouvelle loi, la question va enfin être résolue, alors qu'avant ce n'était pas le cas ; enfin, nous apportons les réponses ; il va y avoir des reconduites à la frontière ; on va réduire l'immigration clandestine, etc.
Or nous avons montré que, si l'on excepte le cas particulier de l'outre-mer, le nombre de reconduites à la frontière n'a pas augmenté sensiblement : le même décalage subsiste entre le nombre de personnes en situation irrégulière et celui des reconduites à la frontière. Pourtant, M. Nicolas Sarkozy est là depuis cinq ans !
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Sueur !
M. Jean-Pierre Sueur. C'est la fin de ma conclusion ! (Rires.)
Lorsque, à quelques mois d'une échéance électorale, on nous soumet un nouveau texte sur l'immigration, avec la volonté évidente que le débat politique s'organise autour de ce sujet, alors que ce n'est sans doute pas la meilleure façon de le faire avancer, n'est-ce pas, là aussi, une forme de manipulation ?
Que chacun dise ici ce qu'il a à dire, mais, moi, je n'accuse personne de manipulation ! J'ai trouvé, monsieur le ministre, que votre plaidoyer était très largement excessif.
M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Ayant enseigné les lettres françaises et la langue française pendant vingt-huit ans, j'ai appris à mes élèves à ne pas déformer les propos, à ne pas tirer d'un texte ce qui n'y figurait pas. Nous verrons donc, à la lecture du compte rendu de nos débats dans le Journal officiel, qui, ici, dit la vérité et qui déforme sciemment les propos d'autrui. Je n'en dirai pas plus sur ce sujet !
Pour en revenir à l'article 27, je tiens tout de même à souligner l'incohérence de l'obligation d'une communauté de vie continue depuis le mariage imposé aux familles binationales. En effet, depuis la mise en oeuvre du décret de mars 2005, un grand nombre de ces couples passent plusieurs mois sans pouvoir mener une vie commune et certains d'entre eux, d'après les magistrats qui traitent ces problèmes, passeront même plusieurs années dans cette situation. Notre État impose à ces couples, dont le mariage est - parfois à raison, mais aussi parfois à tort - suspecté, une condition qu'ils ne peuvent remplir.
Il n'est donc pas honnête, vis-à-vis des familles binationales qui se sont constituées à l'étranger, d'imposer comme condition la vie commune depuis la célébration du mariage pour l'obtention d'un droit au séjour en France.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 182 et 375.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)