Article 73 (priorité)
L'article 20 de l'ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l'amélioration de la santé publique à Mayotte, est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l'article 19 et au premier alinéa du présent article, les frais mentionnés au premier alinéa sont personnellement et solidairement à la charge du père ayant reconnu un enfant né d'une mère étrangère et de celle-ci, lorsqu'elle ne remplit pas les conditions fixées aux articles 4 à 6 de l'ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte. Cette disposition s'applique même lorsque la reconnaissance fait l'objet de la procédure prévue aux articles 2499-2 à 2499-5 du code civil. »
M. le président. L'amendement n° 463, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Gélita Hoarau.
Mme Gélita Hoarau. L'article 73 vise à limiter l'attractivité de Mayotte en matière de santé. Les frais d'hospitalisation, de consultation et d'actes externes sont acquittés directement par les personnes qui ne sont pas affiliées au régime d'assurance-maladie de Mayotte où - c'est une particularité par rapport à la métropole - l'aide médicale de l'État n'existe pas.
Si nous sommes tout à fait d'accord pour reconnaître sa situation particulière de Mayotte, elle ne justifie pas pour autant toutes ces dispositions anticonstitutionnelles que nous allons examiner.
Pourquoi instaurer un régime d'exception pour Mayotte ? Pourquoi toujours suspecter et punir la même catégorie de la population et ne jamais inquiéter les auteurs responsables d'une telle situation ?
Avec cet article, ces frais seront solidairement à la charge du père mahorais qui reconnaîtrait un enfant naturel d'une mère étrangère sans papiers, même si la reconnaissance est contestée. L'exposé des motifs est d'ailleurs assez clair puisqu'il s'agit de mettre à la charge personnelle du père ayant reconnu un enfant naturel les frais de maternité de la femme étrangère en situation irrégulière.
Je pense que cette disposition et les raisons qui la justifient ne sont pas acceptables, puisqu'il s'agit toujours de suspicion. C'est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de suppression de l'article 73, article dont je rappelle qu'il permet de dissuader le commerce florissant des reconnaissances de paternité à Mayotte en mettant à la charge du père ayant reconnu un enfant à Mayotte les frais médicaux liés à la naissance.
Rappelons simplement quelques chiffres : le nombre de reconnaissances de paternité à Mayotte a été multiplié par six depuis 2001, alors que, dans le même temps, le nombre des actes de naissance n'a augmenté que de 15 %.
L'article 73 est un outil de dissuasion important aux yeux de la commission, qui a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Baroin, ministre. Le Gouvernement est évidemment défavorable.
Continuez, madame Hoarau, à confondre les articles 73 et 74 de la Constitution, et vous serez toujours dans l'erreur sur les politiques adaptées à Mayotte ; continuez à pratiquer la politique de l'autruche et à ne pas voir la réalité, et vous resterez sans politique pour Mayotte ; continuez à rédiger des amendements de suppression et vous ferez le lit du développement de l'immigration clandestine sur le territoire mahorais (Applaudissements sur les travées de l'UMP.- Protestations sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 73.
(L'article 73 est adopté.)
Article 74 (priorité)
L'article 3 de l'ordonnance n° 2000-218 du 8 mars 2000 fixant les règles de détermination des nom et prénoms des personnes de statut civil de droit local applicable à Mayotte est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l'application de l'alinéa précédent, le père et la mère doivent être des personnes de statut civil de droit local applicable à Mayotte. À défaut, la filiation ne peut être établie que dans les conditions et avec les effets prévus par le code civil. »
M. le président. L'amendement n° 464, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Je trouve que l'arrogance de M. le ministre envers notre groupe devient de plus en plus déplaisante : franchement, monsieur le ministre, vous pourriez au moins entendre les propos de ma collègue !
Que vous ne soyez pas d'accord, nous le comprenons et nous vous le concédons, mais quand même....
L'article 74 restreint les conditions d'application de la dation de nom qui emporte filiation dans le statut civil de droit local, en opposant que les deux parents relèvent du statut civil de droit local.
Ainsi, lorsque seul le père relève dudit statut, l'enfant naturel reconnu par le père est soumis au droit commun du droit civil qui impose l'obligation alimentaire du père.
Nous nous opposons formellement à la suspicion de reconnaissances de complaisance, ni plus ni moins, qu'induit cet article.
On peut en effet se demander si l'on ne cherche pas à dissuader les pères mahorais ou métropolitains de reconnaître un enfant de mère comorienne en situation irrégulière.
S'il existe effectivement des réseaux d'organisation de reconnaissance de paternités frauduleuses, pourquoi ne prendrait-on pas des dispositions plus en amont pour neutraliser ces prétendus réseaux ?
Nous n'avons de cesse de le répéter depuis le début de ce débat : vous vous en prenez toujours, monsieur le ministre, à des individus que vous soupçonnez à tout va de paternités frauduleuses à des fins financières ou clandestines, sans jamais vous préoccuper des causes.
Cherchons à développer Mayotte plutôt que de poursuivre des coupables présumés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 74.
(L'article 74 est adopté.)
Article 75 (priorité)
I. - L'article 2492 du code civil est ainsi rédigé :
« Art. 2492. - Les articles 7 à 32-5, 34 à 56, 58 à 61, 63 à 315 et 317 à 515-8 sont applicables à Mayotte. »
II. - L'article 2494 du même code est abrogé.
III. - Dans le titre Ier du livre V du même code, sont insérés cinq articles 2499-1 à 2499-5 ainsi rédigés :
« Art. 2499-1. - Les articles 57, 62 et 316 sont applicables à Mayotte sous les réserves prévues aux articles 2499-2 à 2499-5.
« Art. 2499-2. - Lorsqu'il existe des indices sérieux laissant présumer que la reconnaissance d'un enfant est frauduleuse, l'officier de l'état civil saisit le procureur de la République et en informe l'auteur de la reconnaissance.
« Le procureur de la République est tenu de décider, dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine, soit de laisser l'officier de l'état civil enregistrer la reconnaissance ou mentionner celle-ci en marge de l'acte de naissance, soit qu'il y est sursis dans l'attente des résultats de l'enquête à laquelle il fait procéder, soit d'y faire opposition.
« La durée du sursis ainsi décidé ne peut excéder un mois, renouvelable une fois par décision spécialement motivée. Toutefois, lorsque l'enquête est menée, en totalité ou en partie, à l'étranger par l'autorité diplomatique ou consulaire, la durée du sursis est portée à deux mois, renouvelable une fois par décision spécialement motivée. Dans tous les cas, la décision de sursis et son renouvellement sont notifiés à l'officier de l'état civil et à l'auteur de la reconnaissance.
« À l'expiration du sursis, le procureur de la République fait connaître à l'officier de l'état civil et aux intéressés, par décision motivée, s'il laisse procéder à l'enregistrement de la reconnaissance ou à sa mention en marge de l'acte de naissance de l'enfant.
« L'auteur de la reconnaissance peut contester la décision de sursis ou de renouvellement de celui-ci devant le tribunal de première instance, qui statue dans un délai de dix jours à compter de sa saisine. En cas d'appel, le tribunal supérieur d'appel statue dans le même délai.
« Art. 2499-3. - Tout acte d'opposition mentionne les prénoms et nom de l'auteur de la reconnaissance, ainsi que les prénoms et nom, date et lieu de naissance de l'enfant concerné.
« En cas de reconnaissance prénatale, l'acte d'opposition mentionne les prénoms et nom de l'auteur de la reconnaissance, ainsi que toute indication communiquée à l'officier de l'état civil relative à l'identification de l'enfant à naître.
« À peine de nullité, tout acte d'opposition à l'enregistrement d'une reconnaissance, ou à sa mention en marge de l'acte de naissance de l'enfant, énonce la qualité de l'auteur de l'opposition, ainsi que les motifs de celle-ci.
« L'acte d'opposition est signé, sur l'original et sur la copie, par l'opposant et notifié à l'officier de l'état civil, qui met son visa sur l'original.
« L'officier de l'état civil fait, sans délai, une mention sommaire de l'opposition sur le registre d'état civil. Il mentionne également, en marge de l'inscription de ladite opposition, les éventuelles décisions de mainlevée dont expédition lui a été remise.
« En cas d'opposition, il ne peut, sous peine de l'amende prévue à l'article 68, enregistrer la reconnaissance ou la mentionner sur l'acte de naissance de l'enfant, sauf si la mainlevée de l'opposition lui a été remise.
« Art. 2499-4. - Le tribunal de première instance se prononce, dans un délai de dix jours à compter de sa saisine, sur la demande de mainlevée de l'opposition formée par l'auteur de la reconnaissance, même mineur.
« En cas d'appel, le tribunal supérieur d'appel statue dans le même délai.
« Le jugement rendu par défaut, rejetant l'opposition à l'enregistrement de la reconnaissance ou à sa mention en marge de l'acte de naissance de l'enfant, ne peut être contesté.
« Art. 2499-5. - Lorsque la saisine du procureur de la République concerne une reconnaissance prénatale ou concomitante à la déclaration de naissance, l'acte de naissance de l'enfant est dressé sans indication de cette reconnaissance. »
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune ; les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 502 rectifié est présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et M. Desessard.
L'amendement n° 465 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour présenter l'amendement n° 502 rectifié.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Le texte entend mettre en place une procédure de contestation des reconnaissances d'enfants tout à fait inédite en droit de la famille, au point de créer en la matière un bouleversement inacceptable.
Les dispositions de cet article permettent à l'officier d'état civil qui reçoit la reconnaissance d'un enfant de saisir le parquet s'il estime qu'il existe des indices sérieux laissant présumer que la reconnaissance est invraisemblable ou frauduleuse.
Le parquet devra alors dans un délai de quinze jours autoriser la reconnaissance ou s'y opposer. Il pourra aussi décider de surseoir pendant deux mois maximum, de faire procéder à une enquête avant de prendre une décision.
L'auteur de la reconnaissance pourra bien sûr contester la décision de sursis ou d'opposition et la reconnaissance pourra être alors sans cesse retardée d'un ou deux mois, sans parler du fameux délai de dix jours devant le tribunal de grande instance.
Actuellement, même si un officier d'état civil ne peut pas juger de la sincérité d'une reconnaissance, il pourrait signaler une reconnaissance qui lui paraîtrait mensongère. C'est donc seulement quand la reconnaissance est invraisemblable, par exemple lorsque la différence d'âge entre l'enfant et le père est inférieure à douze ans, que l'officier d'état civil peut refuser de la recevoir et saisir le parquet. Sinon, il lui suffit d'avertir l'intéressé d'un risque d'annulation.
En fait, on s'aperçoit que seuls les étrangers en situation irrégulière, auxquels on prête toujours les pires intentions, sont obligés de s'en tenir au strict droit du sang. Bien entendu, même si ce projet de réforme du code civil n'en fait pas mention, il ne fait aucun doute qu'il ne cible que les sans-papiers.
Les femmes comoriennes qui viennent accoucher à Mayotte et qui sont suspectées de rechercher un Mahorais prêt à reconnaître la paternité de leur enfant, sont explicitement visées par ce dispositif.
Si, comme nous le font croire vos récentes déclarations, monsieur le ministre, le champ d'application de cette réforme concerne tout le territoire national, force est de constater que les sans-papiers qui reconnaîtraient un enfant français pourraient être les principales personnes touchées par ladite réforme. En fait, vous avez maintenant décidé de réduire ce champ d'application, en particulier à Mayotte.
En ce qui concerne les risques réels de fraude, on peut s'interroger sur la nécessité de prévoir une procédure de contrôle a priori reposant uniquement sur des indices qui s'avèrent humiliants et injustes pour des personnes de bonne foi, alors qu'il existe déjà une procédure d'annulation a posteriori plus fiable et respectueuse des droits de la personne.
Une nouvelle fois, on s'aperçoit que ce dispositif repose entièrement sur la suspicion a priori de l'officier d'état civil. L'expérience a démontré que ce type de contrôle était source de nombreux dérapages, tels le refus systématique des maires hostiles aux étrangers, la saisine abusive des parquets effectuée sur le seul fondement du séjour irrégulier.
À ce propos, il convient de relever que des enquêtes intrusives sont déjà menées dans la vie privée des candidats au mariage. D'ailleurs, de nombreux détournements de procédure sont opérés par l'administration. Le dépôt du dossier en mairie devient un moyen d'identifier puis de reconduire à la frontière les candidats au mariage qui sont en situation irrégulière, quelle que soit la réalité des sentiments qu'éprouve chaque partie.
Le contrôle a priori des reconnaissances d'enfants risque fort d'aboutir au même résultat. Quels indices sérieux l'officier d'état civil va-t-il rechercher pour conclure à un risque de fraude, sinon la situation irrégulière de l'un des parents ?
Pour conclure, à l'instar des suspicions pesant sur le mariage, le présent projet de loi, qui réformera certaines dispositions du code civil dont le champ d'application est territorialement limité à Mayotte, pourra être destiné à dissuader tous les étrangers de faire valoir leur droit de vivre en famille. Il s'agit, encore une fois, d'une violation des droits fondamentaux, et nous ne pouvons l'accepter.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 465.
Mme Éliane Assassi. Je n'ai jamais eu le plaisir de me rendre à Mayotte pour y rencontrer nos concitoyens. Cependant, j'ai quelques notions de géographie et je sais qu'il convient que nous soyons très attentifs à la situation économique, sanitaire ou scolaire des Comores, ainsi qu'aux difficultés politiques prévisibles.
La mise en place d'un plan de développement régional qui éviterait les migrations forcées de cet archipel semblerait plus efficace et respectueuse de la vie humaine que le renforcement, bien aléatoire, du contrôle des frontières ou de la reconnaissance frauduleuse de la paternité.
Dans une île où la moitié de la population est âgée de moins de vingt ans, porter une attention privilégiée aux problèmes des enfants devrait être une priorité encore plus affirmée. Mais, au lieu de cela, nous sommes amenés à légiférer sur le fantasme gouvernemental relatif à l'invasion des bébés français de mères comoriennes qui engendre la chasse à la paternité de complaisance.
La loi du 26 novembre 2003 avait consacré la suspicion : tout mariage mixte ne serait qu'un mariage blanc ou de complaisance destiné à protéger l'immigration illégale. En toute logique, après le contrôle de la validité des mariages apparaît la suspicion de fraude à la reconnaissance de paternité, ou « paternité blanche », face aux nouveau-nés de parents français et étranger.
Dans les deux cas, le dispositif repose entièrement sur la suspicion a priori de l'officier d'état civil.
À Mayotte coexistent deux états civils. L'état civil de droit commun découle du code civil, mais la majorité de la population relève d'un statut personnel de droit local, inspiré du droit coranique et prévu par l'article 75 de la Constitution. Ce statut est héréditaire sauf renonciation, cas peu fréquent. Jusqu'en 2001, le cadi tenait un registre d'état civil. Depuis cette date, le service d'état civil est censé tenir le registre de droit commun comme celui de droit local. Mais les mariages coutumiers, sans valeur juridique, semblent fréquents.
Si l'évolution administrative de l'île entraîne des adaptations, ces dernières ne doivent pas justifier des entorses aux droits de l'homme. Les écueils constatés en matière d'asile, comme le non-accès aux soins et à la scolarisation, ne sont pas acceptables sur le territoire français et ne peuvent être des moyens de lutte contre l'immigration irrégulière. Il y va non seulement de la francophonie, mais aussi de l'évolution et du rayonnement des droits de l'homme dans cette région du monde. C'est pourquoi, mes chers collègues, nous vous demandons d'adopter l'amendement n° 465.
M. le président. L'amendement n° 70, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le I de cet article pour l'article 2492 du code civil, après la référence :
61,
insérer la référence :
62-1,
L'amendement n° 71, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Au dernier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour l'article 2499-3 du code civil, remplacer les mots :
la mainlevée
par les mots :
une expédition de la mainlevée
La parole est à M. le rapporteur, pour donner l'avis de la commission sur les amendements identiques nos 502 rectifié et 465 et pour présenter ces deux amendements.
M. François-Noël Buffet, rapporteur. L'amendement n° 502 rectifié tend à supprimer la procédure d'opposition aux reconnaissances frauduleuses de paternité à Mayotte. Il est évident que la commission y est défavorable. Le même avis vaut pour l'amendement n° 465.
Par ailleurs, les dispositions de l'article 2492 du code civil relatives aux conditions d'accouchement sous X n'avaient pas pris en compte le cas de Mayotte, oubli auquel l'amendement n° 70 a pour objet de remédier.
L'amendement n° 71, quant à lui, est purement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les quatre amendements en discussion commune ?
M. François Baroin, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements identiques de suppression nos 502 rectifié et 465.
Madame Assassi, je pourrais vous parler à nouveau de la politique de l'autruche, mais vous trouveriez cela arrogant !
Mme Éliane Assassi. Ce ne sont pas des arguments !
M. François Baroin, ministre. Je pourrais vous répéter que plaider contre une évidence n'a jamais fait un bon avocat, mais vous pourriez considérer cela comme déplaisant.
Je pourrais comparer la superficie de Mayotte à celle de l'île d'Oléron, vous rappeler sa situation géographique, démographique, le pourcentage de clandestins atteignant les 30 % à 40 %, le taux de natalité le plus élevé de France, le fait que 80 % des femmes donnant la vie sont arrivées illégalement sur le territoire, mais, mesdames les sénateurs du groupe CRC, vous pourriez estimer qu'il s'agit d'une mauvaise manière de ma part.
Alors, madame Assassi, je n'aurai qu'une chose à dire : allez-y, allez à Mayotte, et peut-être pourrons-nous reprendre le débat, si, d'aventure, vous avez changé d'avis.
M. Alain Gournac. Oui ! Allez-y !
M. François Baroin, ministre. Par ailleurs, le Gouvernement est naturellement favorable aux amendements nos 70 et 71 de la commission.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 502 rectifié et 465.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 75, modifié.
(L'article 75 est adopté.)
Article 76 (priorité)
Le I de l'article 29-1 de l'ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, après les mots : « contracter un mariage », sont insérés les mots : « ou de reconnaître un enfant » et, après les mots : « un titre de séjour », sont insérés les mots : « ou le bénéfice d'une protection contre l'éloignement » ;
2° Dans le deuxième alinéa, après le mot : « mariage », sont insérés les mots : « ou de la reconnaissance d'un enfant ».
M. le président. L'amendement n° 466, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Ayant demandé la suppression de l'article 75, nous demandons en toute logique celle de l'article 76.
Sur quels indices sérieux se fondera en priorité l'officier d'état civil pour conclure à un risque de fraude, sinon la situation irrégulière de l'un des parents ? Si la reconnaissance d'un enfant fait encourir le risque d'une reconduite à la frontière, rares seront les pères sans papiers qui tenteront le diable ! Or sont concernés des enfants, des individus, des êtres humains, qui ont besoin d'une reconnaissance préalable pour démarrer une vie affective équilibrée, quels que soient les liens biologiques entre les adultes qui les accueillent et eux-mêmes.
Les officiers d'état civil savent à quel point le lien biologique n'est pas la condition sine qua non de ce départ dans la vie. La société ne saurait considérer ces enfants, ces êtres humains, comme des justificatifs administratifs, bureaucratiques, et estimer a priori que leurs pères sont des délinquants.
À l'instar des dispositions relatives au mariage, ce projet de réforme du code civil territorialement limité à Mayotte est avant tout destiné à dissuader les étrangers de faire valoir leurs droits à vivre en famille.
On s'étonnera que le Gouvernement ait osé aborder un domaine sensible du droit de la famille au travers d'une énième réforme du droit des étrangers, sans avoir songé un instant à consulter les personnes compétentes en ce domaine.
Telles sont les raisons pour lesquelles les membres du groupe CRC ont déposé le présent amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. À partir du moment où cet amendement tend à supprimer la pénalisation de la reconnaissance frauduleuse de paternité à Mayotte, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 76.
(L'article 76 est adopté.)
Article 76 bis (priorité)
L'article 30-2 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pendant une période de trois ans à compter de la publication de la loi n° du relative à l'immigration et à l'intégration, pour l'application du deuxième alinéa du présent article, les personnes majeures au 1er janvier 1994 qui établissent qu'elles sont nées à Mayotte sont réputées avoir joui de façon constante de la possession d'état de Français si elles prouvent, en outre, qu'elles ont été inscrites sur une liste électorale à Mayotte au moins dix ans avant la publication de la loi n° du précitée et qu'elles font la preuve d'une résidence habituelle à Mayotte. » - (Adopté.)
Article 76 ter (priorité)
Le deuxième alinéa de l'article 26 de la délibération de l'assemblée territoriale des Comores n° 61-16 du 17 mai 1961 relative à l'état civil à Mayotte est ainsi rédigé :
« La célébration du mariage est faite en mairie en présence des futurs époux et de deux témoins par l'officier d'état civil de la commune de résidence de l'un des futurs époux. » - (Adopté.)
CHAPITRE III
Dispositions modifiant le code du travail de la collectivité départementale de Mayotte
Article 77 (priorité)
I A. - Dans la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 330-11 du code du travail applicable à Mayotte, le mot : « cent » est remplacé par le mot : « mille ».
I. - L'article L. 610-4 du même code est abrogé.
II. - Dans le deuxième alinéa de l'article L. 610-6 du même code, après les mots : « les travailleurs à domicile », sont insérés les mots : « ou les employés de maison ».
III. - L'article L. 610-11 du même code est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Dans le cadre des enquêtes préliminaires diligentées pour la recherche et la constatation des infractions prévues aux articles L. 312-1 et L. 330-5 du présent code, les officiers de police judiciaire assistés, le cas échéant, des agents de police judiciaire, peuvent, sur ordonnance du président du tribunal de première instance de Mayotte ou d'un juge délégué par lui, rendue sur réquisitions du procureur de la République, procéder à des visites domiciliaires, perquisitions et saisies de pièces à conviction dans les lieux de travail des salariés visés à l'article L. 000-1 et ceux des travailleurs indépendants et des employeurs exerçant directement une activité, même lorsqu'il s'agit de locaux habités.
« Le juge doit vérifier que les réquisitions du procureur de la République mentionnées à l'alinéa précédent sont fondées sur des éléments de fait laissant présumer l'existence des infractions dont la preuve est recherchée. »
M. le président. L'amendement n° 467, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. L'article 77 du projet de loi vise à permettre le contrôle des employés de maison à Mayotte et l'accès, dans le cadre d'enquêtes préliminaires relatives au travail dissimulé et à l'emploi d'étrangers sans titres, aux locaux d'habitation.
Ce projet de loi renforce ainsi les moyens de contrôle de l'emploi illégal à Mayotte. Si nous sommes favorables à un tel renforcement, ...
Mme Éliane Assassi. Nous l'avons toujours affirmé, monsieur le ministre. Vous n'avez pas assez bien écouté mon intervention dans la discussion générale : je n'ai pas cessé de le répéter !
Mme Éliane Assassi. Je répète donc, une fois de plus, que, si nous sommes favorables au renforcement des moyens de contrôle de l'emploi illégal, en revanche, nous estimons que les inspecteurs du travail n'ont pas à participer à l'éloignement des étrangers en situation irrégulière, ni à effectuer un contrôle de la nationalité. D'ailleurs, rien dans leurs attributions ne les y oblige. Pour cela, il existe des services spécialisés, comme la police aux frontières.
En réalité, vous prenez prétexte du renforcement des moyens de contrôle de l'emploi illégal à Mayotte pour détourner la mission des inspecteurs du travail vers un contrôle des étrangers travaillant sans autorisation. C'est une pression supplémentaire exercée sur les inspecteurs du travail, eux qui subissent déjà une forte contrainte depuis la circulaire du 27 février 2006 aux termes de laquelle ils doivent se prévaloir de leurs fonctions pour contrôler les étrangers travaillant sans autorisation.
Il s'agit d'un détournement du code du travail !
Notre pays manque d'inspecteurs du travail. Dès lors, pourquoi vouloir leur faire faire autre chose que ce pour quoi ils sont formés et employés ?
Compte tenu de leur faible effectif, ces agents connaissent déjà de grandes difficultés pour remplir leur mission première qui est de surveiller et de punir les travailleurs clandestins et surtout les employeurs de main-d'oeuvre irrégulière qui tirent profit de ces travailleurs clandestins, corvéables à merci et sous-payés.
D'ailleurs, l'intersyndicale des inspecteurs du travail n'est pas favorable à l'élargissement des missions des intéressés qui, de surcroît, va se faire sans aucune contrepartie.
Au moment où le Gouvernement prône la suppression de 15 000 postes de fonctionnaire, ...
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Mais pas de postes d'inspecteur du travail ! On en crée, au contraire !
Mme Éliane Assassi. ...on est en droit de se demander comment une telle mesure va pouvoir se traduire concrètement.
Que cela soit clair : les membres du groupe CRC sont favorables à un renforcement des moyens de lutte contre le travail clandestin, mais pas dans les conditions figurant à l'article 77, dont ils vous proposent, mes chers collègues, la suppression pure et simple.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Le dispositif mis en place par l'article 77 est évidemment placé sous le contrôle permanent de l'autorité judiciaire, garante des libertés individuelles. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 77.
(L'article 77 est adopté.)
CHAPITRE IV
Dispositions modifiant le code de procédure pénale