Article 6 bis
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration
Article 7 (interruption de la discussion)

Article 7

I. - L'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé :

« Art. L. 313-7. - I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention «étudiant». En cas de nécessité liée au déroulement des études, et sous réserve d'une entrée régulière en France, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. Dans les mêmes conditions et sous les mêmes réserves, elle peut également l'accorder à l'étranger qui a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans au moins et qui poursuit des études supérieures.

« Le titulaire de la carte de séjour temporaire accordée au titre des dispositions du premier alinéa peut être autorisé à exercer une activité professionnelle salariée dans la limite d'un mi-temps annualisé et dans les conditions d'emploi et de rémunération conformes à la réglementation sur le travail. Le non-respect des prescriptions prévues par la réglementation sur le travail entraîne le retrait de la carte de séjour délivrée au titre du présent article.

« II. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte mentionnée au I est accordée de plein droit :

« 1° À l'étranger auquel un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois a été accordé dans le cadre d'une convention signée entre l'État et un établissement d'enseignement supérieur et qui est inscrit dans cet établissement ;

« 2° À l'étranger ayant satisfait aux épreuves du concours d'entrée dans un établissement d'enseignement supérieur ayant signé une convention avec l'État ;

« 3° À l'étranger boursier du Gouvernement français ;

« 4° À l'étranger ressortissant d'un pays ayant signé avec la France un accord de réciprocité relatif à l'admission au séjour des étudiants.

« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application des dispositions du présent article, en particulier en ce qui concerne les ressources exigées, les conditions d'inscription dans un établissement d'enseignement et celles dans lesquelles l'étranger entrant dans les prévisions du 2° peut être dispensé de l'obligation prévue à l'article L. 311-7. »

II. - Après la sous-section 2 de la section 2 du chapitre III du titre Ier du livre III du même code, il est inséré une sous-section 2 bis ainsi rédigée :

« Sous-section 2 bis

« Dispositions particulières applicables à certains étrangers diplômés

« Art. L. 313-7-1. - Une autorisation provisoire de séjour d'une durée de validité de six mois non renouvelable est délivrée à l'étranger qui, ayant achevé avec succès, dans un établissement d'enseignement supérieur habilité au plan national, un cycle de formation conduisant à un diplôme au moins équivalent au master, souhaite, dans la perspective de son retour dans son pays d'origine, compléter sa formation par une première expérience professionnelle participant directement ou indirectement au développement économique de la France et du pays dont il a la nationalité. Pendant la durée de cette autorisation, son titulaire est autorisé à chercher et le cas échéant à exercer un emploi en relation avec sa formation et assorti d'une rémunération supérieure à un seuil déterminé par décret. À l'issue de cette période de six mois, l'intéressé pourvu d'un emploi ou titulaire d'une promesse d'embauche, satisfaisant aux conditions énoncées ci-dessus, est autorisé à séjourner en France pour l'exercice de l'activité professionnelle correspondant à l'emploi considéré au titre des dispositions de l'article L. 313-10, sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement de l'article L. 341-2 du code du travail.

« Par dérogation à l'alinéa précédent, les ressortissants des États membres de l'Union européenne soumis à des mesures transitoires qui ont achevé avec succès, dans un établissement d'enseignement supérieur habilité au plan national, un cycle de formation conduisant à un diplôme au moins équivalent au master ne sont pas soumis à la détention d'un titre de séjour s'ils souhaitent exercer en France une activité économique.

« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application des dispositions du présent article. »

III. - Après la même sous-section 2, il est inséré une sous-section 2 ter ainsi rédigée :

« Sous-section 2 ter

« Dispositions particulières applicables aux étrangers stagiaires

« Art. L. 313-7-2. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un stage dans le cadre d'une convention de stage visée par l'autorité administrative compétente et qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention "stagiaire". En cas de nécessité liée au déroulement du stage, et sous réserve d'une entrée régulière en France, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée.

« L'association qui procède au placement d'un étranger désireux de venir en France en vue d'y accomplir un stage doit être agréée.

« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'applications des dispositions du présent article et notamment les modalités d'agrément des associations par arrêté ministériel. »

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Legendre, sur l'article.

M. Jacques Legendre. Je saisis l'occasion de ce débat sur l'article 7 pour poser le problème plus général de l'accueil des étudiants en France.

Il est devenu essentiel pour tous les pays d'accueillir des étudiants étrangers. En ce domaine, nous ne devons pas avoir une attitude frileuse ou rétractée, nous devons nous demander comment concilier l'intérêt de notre pays, l'intérêt de ces étudiants et l'intérêt du pays d'origine.

Nous peinons, me semble-t-il, à définir une réelle politique cohérente d'accueil des étudiants.

Le ministère de l'éducation nationale et le ministère des affaires étrangères s'étaient mis d'accord, voilà plusieurs années, pour créer un organisme chargé d'attirer des étudiants en France, qu'il s'agisse d'étudiants des pays développés ou d'étudiants venant des pays du Sud. C'était une bonne chose.

Nous avons affaire dans de nombreux cas, ne l'oublions pas, à des étudiants capables de financer leurs études, en France ou ailleurs. Nous avons aussi affaire à des étudiants de pays en développement qui souhaitent que nous les aidions à suivre ou à terminer leurs études chez nous, ce qui relève évidemment de notre politique des bourses.

Comme nous sommes également confrontés en permanence à des personnes qui tentent d'entrer sur notre territoire en se prévalant du titre d'étudiant sans être toujours réellement ce qu'ils prétendent, nous sommes quelque peu tétanisés. Nous donnons alors le sentiment de multiplier les contrôles, au risque d'écarter de notre territoire non seulement des fraudeurs, mais aussi, dans bien des cas, des étudiants qui auraient pu se former en France mais qui iront étudier ailleurs.

Monsieur le ministre délégué, à l'occasion de ce débat, nous devons avoir à l'esprit la nécessité pour la France d'être un pays qui accueille et forme des étudiants étrangers. C'est d'ailleurs un marché, et certains pays n'ont aucun scrupule à reconnaître que l'équilibre de leur balance des paiements dépend, entre autres, de leur capacité à attirer les étudiants étrangers.

Regardez la politique de l'Australie à l'égard des étudiants du continent asiatique ! La capacité à former des étudiants étrangers sur son sol conditionne, pour l'Australie, l'équilibre de sa balance des paiements et, au-delà, est de l'intérêt bien compris de son rayonnement et de son influence. Les Australiens n'ont, en ce domaine, aucune hésitation.

Nos amis Canadiens sont aussi largement ouverts. Quant aux Américains, ils n'ont pas plus de scrupules à attirer les meilleurs étudiants des pays du Sud pour en faire un élément de leur développement.

En ce qui nous concerne, je souhaiterais que nous soyons capables d'avoir des systèmes cohérents de contrôle pour écarter les faux étudiants, sans que cela nous interdise d'accueillir des étudiants qui pourront repartir chez eux et devenir des éléments du développement à la fois de leur pays et de la France.

Je m'intéresse beaucoup à la francophonie, monsieur le ministre délégué, et il ne saurait y avoir de francophonie rayonnante si nous ne savons pas attirer dans nos écoles et nos universités des étudiants, et parmi les meilleurs, si nous ne savons par leur donner la possibilité de s'épanouir ensuite dans leur pays d'origine, sans oublier pour autant le pays qui les aura formés.

Je présenterai un amendement tendant à faire disparaître ce qui me paraît être une véritable anomalie. Certains lycées français relevant de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger accueillent de jeunes étrangers pendant leur scolarité secondaire. Mais, dès lors que ceux-ci ont obtenu le baccalauréat, nous ne leur permettons pas de poursuivre leurs études en France, parce que notre politique est d'accueillir des étudiants au niveau du master, du troisième cycle.

Il s'agit là, je le pense, d'un parti pris assez étonnant. En effet, ne nous y trompons pas : ces jeunes étant bien formés, si la France hésite à les accueillir, ils poursuivront leurs études ailleurs. Nous aurons alors tout perdu dans cette affaire !

Il est donc temps de faire preuve d'un peu de bon sens et de mettre un terme à cette situation en corrigeant une anomalie choquante. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, sur l'article.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, tout comme mon collègue Jacques Legendre, je crois qu'il est vital pour la France d'accueillir de plus en plus d'étudiants étrangers, de développer les mobilités encadrées - c'est-à-dire l'accueil organisé d'étudiants - et d'y intégrer le plus possible les mobilités individuelles, qui connaissent le taux le plus élevé d'échec.

Entre 1997 et 1998, le nombre d'étudiants étrangers était tombé à 150 000 ; c'était le résultat des lois de 1993.

Le gouvernement de Lionel Jospin a mis en place une politique active, qui a relevé ce nombre à 250 000 étudiants, niveau à peine supérieur à celui de 1985. Ils ont été au nombre de 276 000 l'année dernière.

Je vous rappelle également que notre pays accueille seulement 9 % des étudiants faisant leurs études hors de leur pays, loin derrière les États-Unis, qui en accueillent 30 %, le Royaume-Uni, qui en accueille 14 %, l'Allemagne, qui en accueille 12 % - sans disposer de l'équivalent de la francophonie - et l'Australie, qui en accueille 10 %.

On déplore dans certains cercles - je m'en suis aperçue l'an dernier en faisant une étude sur l'accueil des étudiants étrangers en France - que 50 % de ces étudiants viennent d'Afrique, dont la moitié d'Algérie et du Maroc.

Je souhaiterais que le texte que nous étudions et que les pratiques de l'administration permettent de continuer à former les Africains tout en continuant à diversifier l'origine géographique des étudiants étrangers.

Oui, il faut attirer plus de Chinois, d'Indiens, de Brésiliens et de jeunes des pays émergents. Cependant, cela ne doit pas se faire au détriment des étudiants de notre traditionnel champ d'influence en Afrique.

Il faut favoriser par les procédures les accords bilatéraux, les bourses, l'accueil d'étudiants à haut potentiel. Il ne faut pas hésiter à faire payer ceux qui sont capables de financer leurs études. Le gouvernement de Lionel Jospin avait d'ailleurs pris un décret dans ce sens afin que les universités facturent l'accueil dans le cadre de la mobilité encadrée.

Néanmoins, il faut bien voir également que les bourses sont nécessaires pour des pays plus pauvres. C'est ainsi que les jeunes Maliens accueillis dans le cadre de l'opération « 300 bourses d'excellence pour le Mali » sont les têtes de promotion de l'Université de Grenoble, qui les accueille.

Je constate, lors de mes visites en Afrique, que les candidats sont soumis à un parcours décourageant. On met en cause, souvent malheureusement à juste titre, un niveau académique et même linguistique faible, et l'on pense que de nombreuses pré-inscriptions sont motivées par la volonté d'émigrer en France et de s'y établir plutôt que d'y étudier. Le texte que nous allons examiner reflète aussi ce souci.

Il est vrai également que la fraude documentaire est amplifiée par Internet.

Nous ne disposons pas actuellement d'une évaluation des centres pour les études en France qui ont été mis en place dans certains pays. On constate cependant que si, dans certains cas, leur fonction d'information et d'orientation est bien remplie, dans d'autres, elle se résume pour l'essentiel à questionnaire informatisé de sélection qui dure vingt minutes !

À cela s'ajoute un certain nombre d'aberrations. Annaba, par exemple, qui se trouve à une heure d'avion d'Alger, accueille un centre d'études en France. Mais, pour l'obtention d'un visa, les jeunes doivent se rendre à Alger, alors qu'il y a un consulat à Annaba !

Si nous voulions inciter les étudiants d'Annaba à venir étudier en France, nous leur permettrions d'obtenir leur visa de séjour en France à Annaba, puisqu'il y a un consulat !

M. Jean Desessard. Cela paraît logique !

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Certes, mais ce n'est pas comme ainsi que cela se passe, au grand désespoir de tous les responsables - conseillers culturels et consul compris !

Si la France veut réellement faire du codéveloppement, il faut qu'elle se réinvestisse dans la mise à niveau des systèmes scolaires et universitaires des pays francophones pauvres.

Au lieu de décourager les étudiants issus de ces pays, nous ferions mieux de créer localement des structures de mise à niveau académique et linguistique des candidats aux études en France.

Comme l'a écrit Pierre-Yves Geoffard, chercheur au CNRS, la possibilité d'étudier et de travailler au Nord peut avoir des effets d'entraînement sur toute la jeunesse, si le système d'éducation est performant. « Investir résolument dans les systèmes éducatifs des pays du Sud semble une condition indispensable pour rétablir des conditions d'échange mutuellement avantageux ».

Dans de telles conditions, on ne parlerait plus de fuite des cerveaux.

Nous verrons si les mesures prévues dans cet article 7 pour l'entrée des étudiants en France sont conciliables avec de tels objectifs. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Goujon, sur l'article.

M. Philippe Goujon. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, l'article 7 offre une bonne illustration de la politique mise en oeuvre par les auteurs de ce projet de loi, fondée à la fois sur la fermeté et la générosité, au service d'une immigration choisie.

Plusieurs mesures permettront de faciliter l'accès de l'enseignement supérieur français aux étudiants étrangers, notamment aux meilleurs d'entre eux.

Mon collègue Jacques Legendre et ceux qui l'ont suivi l'ont excellemment expliqué avant moi : si le nombre d'étudiants étrangers est important en valeur absolue - 255 000 en 2005, soit plus de 11 % des effectifs de l'enseignement supérieur - les caractéristiques de la population étudiante permettent de douter de l'attractivité actuelle du système français d'enseignement supérieur.

En effet, le taux de réussite des étudiants étrangers est inférieur de 40 % en moyenne à celui des étudiants français et l'on constate une forte concentration de ces étudiants sur le premier cycle, plus particulièrement dans certaines disciplines.

Forts de ce constat, les auteurs du projet de loi prévoient de mettre l'accent sur l'évaluation préalable des aptitudes des étudiants étrangers et sur la qualité de l'accueil offert par la France.

Les formalités administratives seront ainsi réduites, ce qui est une très bonne chose.

Bénéficieront d'une carte de séjour de plein droit les étudiants qui seront passés par les centres pour les études en France progressivement mis en place dans l'ensemble de nos ambassades, à partir d'une expérimentation menée en Chine depuis 2003 et étendue à cinq autres postes diplomatiques - l'Algérie, la Tunisie, le Maroc, le Vietnam et le Sénégal.

Cette carte pourra être valable pour plusieurs années, ce qui donnera une stabilité appréciable aux étudiants dont le début de parcours aura montré le sérieux du projet.

Il ne suffit pas d'accueillir des étudiants étrangers en France, encore faut-il encore leur offrir des perspectives d'avenir, même s'ils doivent retourner à terme dans leur pays d'origine.

C'est tout l'objet de l'autorisation de séjour de six mois qui sera accordée aux étudiants étrangers venant de terminer leur master pour leur permettre de chercher un travail. Ce n'est que par l'accès à un travail qu'ils pourront acquérir une première expérience professionnelle en lien avec leurs études.

Dès lors qu'ils trouveront un emploi correspondant à leur formation, ces jeunes diplômés se verront délivrer une carte de séjour.

Dans le même esprit, est créée une carte de séjour temporaire portant la mention « stagiaire », d'une durée de validité maximum d'un an.

Ces nouvelles dispositions permettront d'éviter les abus - il y en a ! - des faux étudiants candidats à l'immigration, tout en favorisant l'attractivité de notre enseignement supérieur grâce à une meilleure orientation des étudiants vers l'université et la formation qui conviendront le mieux.

C'est parce que nous leur offrirons des perspectives de carrière dans leur pays après leurs études que les meilleurs étudiants étrangers viendront suivre leur cursus en France.

N'en doutons pas, mes chers collègues, la vraie générosité ne consiste pas à accueillir tous ceux qui le veulent, mais, au contraire, à accueillir dignement ceux qui le méritent. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, sur l'article.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. J'apprécie de parler après M. Goujon, car je ne partage évidemment pas la lecture idyllique qu'il fait de l'article 7 ni sa vision de l'avenir des étudiants qui souhaitent venir en France !

Comme l'ont souligné mes collègues, il n'y a pas un trop-plein d'étudiants étrangers souhaitant venir en France. Au contraire, et c'est le problème, nous assistons à une raréfaction des étudiants étrangers, y compris de pays francophones ayant des rapports anciens avec la France !

Le nombre des candidats est donc tombé bien bas, et je connais moult étudiants de haut niveau qui préfèrent essayer de chercher ailleurs, même s'ils sont francophones. Ils envisagent de faire leurs études dans les pays anglophones, car ni l'accueil qui leur est fait en France ni les perspectives qui leur sont données par notre pays ne les satisfont.

Tout le problème, monsieur le ministre délégué, est de savoir quelle est la philosophie de votre projet de loi.

Êtes-vous en train de constater que la France attire très peu les étudiants de pays étrangers, qu'ils viennent de pays francophones ayant des liens étroits avec la France ou qu'ils viennent de pays émergents non francophones ? Vu l'état modeste, voire déplorable, des rapports que la France entretient avec des pays susceptibles d'avoir des liens économiques et culturels avec elle, envisagez-vous de leur permettre de nous envoyer leurs étudiants ?

Si tel était le cas, leur accueil nécessiterait des investissements !

Ou, au contraire, n'êtes-vous pas plutôt en train de suspecter ces jeunes qui veulent venir étudier en France de chercher à user de cette possibilité pour devenir de futurs sans-papiers sur notre territoire ?

Tout le problème est là, malheureusement, et la dissociation totale entre les étudiants potentiels et les cartes « compétences et talents » ne laisse pas de doute : votre philosophie n'est pas de chercher à créer, grâce à l'accueil des étudiants étrangers - accueil qui implique nécessairement, je le répète, à un moment donné un investissement de la part de la France - des liens rendant possibles des échanges mutuellement fructueux avec un certain nombre de pays.

Vous ne cherchez pas à faire en sorte que des étrangers puissent travailler un temps en France avant de retourner dans leur pays.

Votre philosophie n'est pas celle-là.

Vous êtes au contraire très frileux à l'égard des étudiants potentiels. En revanche, vous essayez d'attirer des personnes qualifiées - qu'elles se soient formées en France ou ailleurs - pour les faire travailler dans les secteurs d'activité où nous avons des besoins.

Votre philosophie est donc unilatérale. Votre attitude n'est ni positive ni constructive !

Si vous cherchiez à faire de la France un pays attractif pour des jeunes étrangers qui veulent faire des études - courtes ou longues - si vous cherchiez à nouer des liens porteurs d'avenir dans les domaines économique et culturel, vous auriez une tout autre attitude ! Vous vous pencheriez notamment beaucoup plus activement sur ce manque d'attractivité et vous chercheriez à comprendre d'où vient le problème.

Vous vous demanderiez pourquoi nous avons du mal à attirer des étudiants, y compris lorsqu'ils sont issus de pays avec lesquels nous avons été liés - je pense au Vietnam.

Vous prendriez les mesures qui s'imposent pour l'avenir de la France et des pays concernés, c'est-à-dire, encore une fois, que vous investiriez !

Mme la présidente. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, sur l'article.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. A-t-il fallu attendre de parler d'immigration choisie pour se soucier du problème des étudiants étrangers en France ?

Non, évidemment ! Nous avons déjà évoqué ce point il y a longtemps et nous avons pris des dispositions.

Or, tout d'un coup, on considère qu'il n'y a pas assez d'étudiants étrangers en France. On peut aussi penser qu'il n'y a pas assez de chercheurs, mais si les chercheurs ne viennent pas dans notre pays, c'est évidemment parce qu'on ne les paie pas assez ! Cette vérité vaut également pour beaucoup d'autres professions.

Aujourd'hui, et je m'en félicite, nous sommes tous d'accord : nous voulons que les étudiants étrangers viennent étudier chez nous plutôt qu'ailleurs.

Cependant, cela pose des problèmes, en particulier celui du travail.

Lorsque nous étions étudiants, il y a très longtemps, nous militions pour le « présalaire ». Nous rêvions en effet que les étudiants puissent percevoir un salaire qui leur permette de poursuivre leurs études, quitte à ce qu'il y ait remboursement plus tard. Cette formule aurait indéniablement contribué à démocratiser l'accès à l'enseignement supérieur. Il y avait une autre solution, bien connue, consistant à demander aux étudiants qui voulaient faire des études mais qui ne pouvaient pas les payer de s'engager à servir l'État pendant une dizaine d'années.

On a vu de tout temps des étudiants qui ne disposaient pas de moyens suffisants s'efforcer de travailler pendant leurs études. C'est le cas de beaucoup d'entre eux encore aujourd'hui.

Pour les étudiants étrangers, la situation était différente. Avant de leur délivrer une autorisation, on leur demandait de disposer de moyens suffisants, ce qui était tout de même énorme ! Aujourd'hui, on dit qu'il faut les laisser venir et leur permettre de travailler, soit à temps partiel, comme nous le proposons, soit à mi-temps, comme l'a proposé l'Assemblée nationale. Le Gouvernement a d'ailleurs demandé à M. Courtois de déposer des sous-amendements visant à privilégier le travail à mi-temps.

Une telle disposition introduirait une inégalité entre les étudiants étrangers et les étudiants français dans la mesure où ces derniers ont le droit de travailler autant qu'ils le veulent et autant qu'ils le peuvent pendant leurs études.

Les étudiants étrangers devraient avoir le même droit, d'autant qu'une sanction est prévue s'ils ne décrochent pas leur diplôme ou s'ils n'obtiennent pas leurs examens dans un délai décent : leur permis de séjour leur sera retiré. Nous constatons cette situation tous les jours ! Pourquoi ne pas les autoriser à travailler autant qu'ils le voudront et tant qu'ils en auront besoin, puisque, je le répète, contrairement aux étudiants français, l'échec dans leurs études sera sanctionné ?

J'ajoute que travailler 35 heures tout en poursuivant des études n'est pas un défi phénoménal lorsque l'on est jeune.

Telles sont les réflexions d'ensemble que je voulais faire sur l'article 7, qui aurait mérité d'être examiné d'un peu plus près. Malheureusement, chacun connaît les conditions dans lesquelles nous avons travaillé. Le rapport de M. Buffet n'a été disponible que lorsque nous sommes rentrés de nos départements. Il est vrai que ceux qui n'avaient rien d'autre à faire pendant ce week-end pouvaient le consulter sur le web !

Quant aux amendements, nous avons été obligés de les déposer avant lundi. Après avoir participé aux travaux de la commission, nous avons bien évidemment largement eu le temps de les rédiger !

Voilà une nouvelle illustration des conditions dans lesquelles nous travaillons dans cette maison !

Pour votre part, monsieur le ministre délégué, le problème ne se pose pas. Vous avez eu tout le temps de vous préparer, puisque vous avez déjà suivi les débats à l'Assemblée nationale.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission de lois.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. M. Dreyfus-Schmidt répète toujours la même chose.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est mieux que de se contredire !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Vous arrivez quand même à vous contredire ! (Sourires.)

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il me semble que nos collègues du groupe socialiste n'ont pas été trop gênés, si j'en juge au nombre d'amendements qu'ils ont déposés !

M. Bernard Frimat. C'est parce que nous avons « compétences et talents » ! (Sourires.)

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Il est vrai que certains n'arrivent peut-être pas à travailler aussi vite. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Je vous rappelle, monsieur Dreyfus-Schmidt, que le rapport était disponible sur Internet jeudi après-midi. (M. Michel Dreyfus-Schmidt proteste.) À moins que vous ne considériez que le week-end commence le jeudi ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Comme nous le faisons à chaque fois, le rapport photocopié est aussitôt adressé à chaque groupe.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Le jeudi après-midi !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Eh oui, renseignez-vous auprès du secrétariat de votre groupe !

Ensuite, il a été disponible à la distribution vendredi après-midi.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Combien d'exemplaires pour le groupe ?

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Au groupe, le jeudi ? Un exemplaire !

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Un seul ? C'est parfait !

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Franchement, il n'est pas difficile de faire des photocopies !

Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, nos conditions de travail ont toujours été les mêmes. Nous faisons cependant des efforts considérables afin que nos collègues sénateurs disposent des documents nécessaires dans un délai qui leur permette de travailler.

M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pendant le week-end de la Pentecôte ?

M. Josselin de Rohan. Lundi, c'était la journée de solidarité !

M. Jean Desessard. Vous savez bien que la gauche ne travaille pas le lundi de Pentecôte ! (Sourires.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, il s'agit d'un autre débat, et je vous propose de poursuivre, avec compétences et talents, l'examen des amendements. (Nouveaux sourires.)

Sur l'article 7, un certain nombre d'amendements ont été déposés qui font l'objet d'une discussion commune. Je rappelle toutefois que le Sénat a décidé d'examiner séparément l'amendement n° 287.

Cet amendement, présenté par Mmes Assassi,  Borvo Cohen-Seat,  Mathon-Poinat et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé :

« Art. L. 313-7. - La carte de séjour temporaire délivrée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention "étudiant". »

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Avec cette rédaction, nous proposons de revenir à la situation qui prévalait pour les étudiants étrangers avant la loi du 26 novembre 2003. Cette loi de M. Sarkozy relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité a malheureusement durci considérablement les conditions de séjour des étudiants étrangers.

Lors des débats en 2003, nous nous étions déjà fermement opposés à de telles restrictions, qui non seulement empêchent de nombreux étudiants de venir étudier sur notre territoire, mais aussi prive notre pays de jeunes qui ont des connaissances fort précieuses.

Nous savons aujourd'hui à quel point il est urgent d'investir dans l'avenir, et donc dans l'université. Les échanges avec l'étranger, qui passent notamment par le séjour d'étudiants étrangers en France, sont l'un des enjeux majeurs de la politique qui nous permettra de nous maintenir sur le plan international dans la course au savoir et à la recherche.

En durcissant les critères d'obtention d'un titre de séjour provisoire pour les étudiants, vous découragez les jeunes étrangers de venir en France. C'est donc ailleurs qu'ils iront offrir leurs savoirs et leurs savoir-faire !

Par ailleurs, nous nous trouvons aussi ici dans une opposition de principe, car les jeunes qui incarnent la connaissance, la recherche, ne devraient pas être soumis à votre logique de contrôle des flux migratoires, tant ils sont porteurs d'avenir. En garantissant une plus grande souplesse dans l'accueil des étudiants étrangers sur notre territoire, nous répondons tout simplement à ce principe.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Alors que les conditions d'arrivée des étudiants étrangers ont été prises en compte par la loi de 2003, les auteurs de cet amendement préconisent de revenir à l'ordonnance du 2 novembre 1945. Il s'agirait d'un très grand retour en arrière. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)

Pour notre part, nous avons choisi l'avenir. Le projet de loi offre une situation plus favorable aux étudiants que ce grand bond en arrière. C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Invoquer un retour en arrière n'est pas une explication. Certaines choses ont été très bien faites il y a soixante ans et d'autres sont mal faites aujourd'hui !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Je vais m'exprimer globalement sur la philosophie de l'article 7 et répondre aux intervenants.

Je le rappelle, cet article vise à déployer une nouvelle stratégie d'accueil des étudiants étrangers. Celle-ci nous paraissait nécessaire. Chacun a avancé ses statistiques. Pour sa part, Mme Cerisier-ben Guiga a annoncé que la France n'accueillait que 9 % des étudiants faisant leurs études hors de chez eux. En réalité, c'est 11,3 %. Toutefois, j'en conviens, ce chiffre reste tout à fait insuffisant.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous sommes d'accord !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. S'il y a bien une volonté sur laquelle nous nous accordons tous, de manière dépassionnée et raisonnable, c'est celle de créer ensemble une politique d'accueil des étudiants étrangers qui soit plus offensive, plus déterminée, plus dynamique que celle qui existe actuellement.

On ne va pas refaire l'historique des politiques qui ont été conduites, dans notre pays, en direction des étudiants étrangers depuis dix, quinze, vingt ou trente ans, tous gouvernements confondus. Le constat s'impose : ce qui devait être fait ne l'a pas forcément été !

Aujourd'hui, avec le texte relatif à l'immigration et à l'intégration, le Gouvernement propose des dispositions de nature à faciliter le parcours administratif des étudiants étrangers, pour ce qui relève donc de la compétence du ministère de l'intérieur et de la délégation confiée au ministre de l'intérieur en matière de coordination des politiques d'immigration. Malheureusement, nous ne pouvons pas traiter tous les aspects du problème.

Je ne peux en effet pas aborder ce dossier, si passionnant soit-il, sous l'angle de l'enseignement supérieur ou du logement. Il y aurait pourtant beaucoup à faire en ces domaines si nous voulions être une terre beaucoup plus attractive pour un grand nombre d'étudiants étrangers. Je le répète, je ne peux aborder ce dossier que pour ce qui concerne notre responsabilité, à savoir la facilitation de l'accueil des étudiants étrangers.

Pour cela, nous proposons à la fois de mieux choisir et de mieux accueillir.

Les étudiants étrangers sont trop souvent inscrits dans des filières qui ne répondent ni aux besoins de l'économie française ni à ceux des pays d'origine. Philippe Goujon y faisait d'ailleurs allusion tout à l'heure. On relève qu'ils sont essentiellement inscrits en lettres et en sciences humaines.

M. Bernard Frimat. Disciplines nobles !

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Certes, mais, au-delà de ces seules filières, nous pourrions avoir beaucoup plus d'étudiants étrangers inscrits dans les formations touchant à l'ingénierie ou aux sciences de la vie.

Le parcours administratif des étudiants en France est trop complexe, au point de décourager les meilleures volontés, si bien que les candidats préféreront rejoindre les universités britanniques, canadiennes, américaines ou australiennes.

Le Gouvernement ne peut que partager l'analyse qui a été faite en la matière. Le constat est simple : par rapport à l'accueil qui est réservé aux étudiants étrangers dans d'autres grandes démocraties du monde et sur d'autres continents, nous avons beaucoup d'efforts à accomplir pour rattraper nos retards.

Je veux remercier M. Legendre d'avoir souligné que la mobilité internationale des étudiants fait l'objet d'une compétition intense entre pays occidentaux. Le Gouvernement est conscient que la France doit poursuivre, voire accentuer ses efforts afin d'attirer des étudiants étrangers. C'est la raison pour laquelle nous avons prévu des mesures de simplification administrative, notamment la délivrance automatique d'une carte de séjour ou la création d'une carte pluriannuelle. C'est également la raison pour laquelle nous cherchons à ouvrir le marché du travail aux titulaires d'un master. Nous allons d'ailleurs tenter ensemble dans un instant de perfectionner encore le dispositif, monsieur Frimat.

C'est pourquoi aussi nous voulons généraliser les centres pour les études en France. Cette appellation, c'est tout un programme ! La France dispose d'ores et déjà de centres pour les études en France dans dix pays ; elle en aura vingt au 1er janvier 2007. Ces centres jouent un rôle décisif pour informer les étudiants étrangers et mieux organiser leur sélection en liaison avec les universités françaises d'accueil.

Je souligne que l'aspect le plus important de la politique gouvernementale porte précisément sur une meilleure coopération entre les postes consulaires chargés de la délivrance des visas de long séjour pour études et les universités, qui conservent la maîtrise des inscriptions universitaires. Cette coopération est organisée par la convention prévue au 1° du II du texte proposé par l'article 7 pour l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Je voudrais également rassurer Mme Cerisier-ben Guiga. Le Gouvernement est conscient que les centres pour les études en France doivent travailler main dans la main avec les consulats, et nous veillerons à résoudre le plus vite possible les difficultés qu'elle nous a signalées à Annaba.

Par ailleurs, je récuse le procès d'intention que nous a intenté Mme Borvo Cohen-Seat. L'étudiant étranger n'est pas un suspect en puissance. Nous souhaitons que les étudiants qui viennent en France réussissent leurs études, ce qui implique qu'ils soient bien sélectionnés, non pour en accueillir moins, mais pour veiller à ce que les filières qu'ils choisissent correspondent à leur parcours académique antérieur et à leurs aptitudes.

Il ne paraît pas raisonnable d'autoriser un étudiant étranger à aller au-delà d'un travail à mi-temps en plus de ses études. Mais nous allons en débattre dans quelques instants, puisque des amendements ont été déposés sur ce thème.

Il reste une question que le texte ne pouvait pas traiter, mais que nous n'oublions pas pour autant : il s'agit du logement des étudiants étrangers.

Je tenais à insister sur ces différents points.

Très sincèrement, je ne comprends pas l'objet de cet amendement de suppression déposé par le groupe CRC, ni d'ailleurs celui de l'amendement dont nous débattrons dans quelques instants.

Nous avons une volonté commune : permettre à un plus grand nombre d'étudiants étrangers de venir en France, notamment sur la base des valeurs qui ont été soulignées par Jacques Legendre.

Il s'agit, en particulier, du rayonnement international de la France dans le monde. Plus nous accueillerons d'étudiants étrangers en France, plus nous leur permettrons de parvenir au meilleur niveau de formation et de qualification possible, plus nous les aiderons à bénéficier d'une première expérience professionnelle de haut niveau dans notre pays pour en faire ensuite profiter leur pays d'origine et plus nous contribuerons tant au codéveloppement qu'au rayonnement international de la France et de la francophonie, dont vous êtes un grand ambassadeur, monsieur le sénateur.

Dans ces conditions, pourquoi vouloir supprimer l'article 7 ? Certes, cet article ne résout pas tout et n'apporte pas toutes les réponses à l'ensemble des questions qui nous sont posées en matière d'accueil d'étudiants étrangers dans notre pays. Mais il constitue une avancée importante sur des sujets relevant notamment des compétences et des responsabilités du ministre d'État, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

Je n'ouvrirai pas un débat sur la question de l'organisation de l'enseignement supérieur de notre pays. Cela relève de la compétence du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Mais, nous le savons bien, il existe un problème s'agissant de l'organisation de nos universités : celle-ci est très différente de celle des universités américaines.

En ce moment s'ouvre une grande discussion sur l'autonomie des universités. Dans certains pays, des industries et des entreprises participent à la politique de recherche et d'attractivité d'étudiants étrangers. La France n'a pas la même organisation.

Nous pourrions discuter pendant des heures des mérites respectifs de tel ou tel système. Pour ma part, je ne donnerai pas d'avis personnel. Je constate simplement que l'organisation universitaire dans notre pays n'apporte pas toutes les réponses attendues.

Je souhaite à présent aborder une autre question : celle du logement. Accueillir des étudiants sans bénéficier d'une capacité de logement et d'hébergement constitue bien évidemment un véritable problème. La France doit se doter d'une politique de logements à la fois pour les étudiants français et pour les étudiants étrangers que nous souhaitons accueillir, car ceux-ci sont confrontés à de nombreuses difficultés.

En tant que président d'un conseil général, je connais bien ce sujet. Là encore, les collectivités départementales ont un rôle important à jouer et des initiatives à prendre. Pour ma part, avec le conseil général que j'ai l'honneur de présider, j'ai mis en place une politique de construction de cinq mille logements pour les étudiants sur les trois ans à venir. Une part importante de ces logements sera destinée à des étudiants étrangers. En effet, ma collectivité a fait le choix de renforcer la politique menée par le Gouvernement pour attirer des étudiants étrangers sur notre territoire national.

Nous pourrions également évoquer les initiatives d'un certain nombre de collectivités locales. Ainsi, j'ai passé un accord avec Sciences-Po pour accueillir le premier cycle « Moyen Orient-Méditerranée » de cette école à Menton. Nous y accueillerons 50 % d'étudiants français et 50 % d'étudiants originaires des pays du Maghreb, qui seront orientés vers les filières de science politique et d'économie spécialisées sur la Méditerranée. C'est un choix de ma collectivité d'avoir tissé un partenariat de ce type avec une grande école française.

Nous le voyons bien, l'organisation institutionnelle de notre pays est ainsi faite que ce n'est bien évidemment pas dans ce seul projet de loi que nous pourrons répondre à tous les problèmes liés à l'accueil des étudiants étrangers en France.

Mais, en tout état de cause, dans cet article 7, le ministère de l'intérieur, qui est en charge de la coordination de la politique de l'immigration, propose des dispositions tendant à faciliter le parcours administratif des étudiants étrangers que nous voulons accueillir dans notre pays.

C'est pourquoi les amendements de suppression, tant celui-ci que celui dont nous débattrons dans quelques instants, n'ont pas lieu d'être. Il serait donc plus raisonnable de les retirer. Nous devons en effet profiter de l'examen de cet article pour ouvrir un débat nous permettant d'aller plus loin. Des amendements constructifs ont été déposés sur l'ensemble de ces travées ; nous en débattrons dans quelques instants.

Bien entendu, dans l'hypothèse où l'amendement n° 287 serait maintenu, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.

Mme la présidente. Madame Josiane Mathon-Poinat, l'amendement est-il maintenu ?

Mme Josiane Mathon-Poinat. Oui, je le maintiens, monsieur le président. Du reste, il s'agit d'un amendement non pas de suppression, mais de réécriture. Une partie de la nouvelle rédaction que nous proposons est d'ailleurs reprise dans l'amendement de M. le rapporteur.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 287.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 154, présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et  M. André, MM. Assouline,  Badinter,  Bel et  Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et  Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et  C. Gautier, Mmes Khiari et  Le Texier, MM. Mahéas,  Mermaz,  Peyronnet et  Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Supprimer le I de cet article.

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.

M. Pierre-Yves Collombat. Comme vous le constatez, cet amendement porte sur la question du travail des étudiants.

Tout à l'heure, mon collègue a parfaitement exposé notre position de fond sur les dispositions de cet article 7. Je ne reviendrai donc pas sur ce sujet et je m'en tiendrai à l'aspect constructif, en tout cas pratique, de ce débat, ainsi que M. le ministre vient de nous y convier.

Selon nous, la rédaction antérieure du I de cet article était de meilleure qualité - j'essaierai de le démontrer - que celle qui nous est aujourd'hui proposée.

En effet, l'ancienne rédaction de cet alinéa mentionnait la possibilité pour les étudiants d'exercer une activité professionnelle « à titre accessoire ». La nouvelle rédaction évoque un « mi-temps annualisé ».

Sans doute me direz-vous que cela signifie la même chose. Mais tel n'est pas le cas dans la mesure où l'on peut envisager - en pratique, c'est souvent ce qui se produit - que les étudiants exercent effectivement une activité professionnelle à mi-temps en période scolaire et travaillent au-delà du mi-temps durant les congés, notamment pendant la période estivale.

Par conséquent, l'ancienne rédaction, dont les termes « à titre accessoire » indiquent bien qu'il ne peut pas s'agir d'un temps complet, était meilleure que la formulation actuelle, qui risque de poser des problèmes et de créer des contestations. D'ailleurs, M. le ministre reprochait tout à l'heure à Mme Assassi de confondre le régime applicable aux étudiants et le régime applicable aux actifs.

Comme l'a fait remarquer mon collègue Philippe Goujon, le nouveau dispositif fait une estimation plus complète des aptitudes des étudiants. Mettre des obstacles supplémentaires à ceux-ci en matière de travail, ce n'est ni contribuer à leur insertion ni leur faciliter la tâche. Et pour quel résultat ? Aucun !

C'est pourquoi, si nous voulons réellement être constructifs, constatons très modestement que la rédaction antérieure était meilleure que la formulation actuelle.

Mme la présidente. L'amendement n° 12, présenté par M. Buffet, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le I du texte proposé par le I de cet article pour  l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

« - I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention « étudiant ». En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France.

« La carte ainsi délivrée donne droit à l'exercice, à titre accessoire, d'une activité professionnelle salariée dans la limite d'un temps partiel annualisé.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement a plusieurs objets.

D'abord, il tend à clarifier la rédaction de l'article 7.

Ensuite, il vise à donner aux étudiants étrangers le droit d'exercer une activité professionnelle à titre accessoire. Le système de l'autorisation préalable serait supprimé. En effet, l'amendement n° 13 de la commission tend à y substituer un système déclaratif à la charge de l'employeur pour faciliter les contrôles a posteriori de l'inspection du travail.

Enfin, il a pour objet de permettre aux étudiants de travailler dans la limite d'un temps partiel annualisé. Cela apportera une plus grande souplesse dans l'organisation du temps de travail des étudiants.

Par ailleurs, l'amendement n° 21, qui porte sur l'article 11, tend à reprendre partiellement la dernière phrase de l'article L. 313-7-1. Il tend à limiter les possibilités de retrait de la carte de séjour « étudiant » au seul cas où l'étranger ne respecte pas la condition du temps partiel annualisé.

Le projet de loi permet le retrait en cas de non-respect de la réglementation du travail. Cela semble beaucoup trop large. En effet, l'étudiant salarié n'est pas forcément responsable du non-respect de la réglementation du travail. Le responsable de telles pratiques est parfois l'employeur.

Bien entendu, cet amendement ne remet nullement en cause la possibilité de retrait de la carte de séjour «  étudiant » si l'étranger travaille sans disposer d'un titre l'y autorisant.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 518, présenté par M. Courtois, est ainsi libellé :

Au second alinéa du texte proposé par l'amendement n° 12 pour le I de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, remplacer les mots :

temps partiel

par le mot :

mi-temps

Ce sous-amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 143 rectifié ter, présenté par Mme Garriaud-Maylam, MM. Cointat,  Del Picchia,  Duvernois,  Ferrand et  Guerry, Mmes Kammermann et  Brisepierre, est ainsi libellé :

Compléter la dernière phrase du premier alinéa du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 313?7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile par les mots :

ainsi qu'à l'étranger qui a effectué sa scolarité dans un établissement secondaire d'enseignement français à l'étranger

La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Nous avons besoin d'attirer plus d'étudiants dans notre système universitaire. C'est une évidence et nous sommes tous d'accord sur ce point, y compris M. Dreyfus-Schmidt. (Sourires.)

Cet amendement vise précisément à renforcer l'attractivité de la France pour les étudiants étrangers qui fréquentent nos établissements d'enseignement français à l'étranger.

Sur 91 000 élèves étrangers inscrits dans le réseau de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, l'AEFE, force est de constater que la grande majorité d'entre eux, même ceux qui sont titulaires du baccalauréat français, sont attirés par l'enseignement supérieur anglo-saxon.

Selon un rapport du Conseil économique et social, présenté en 2003 par M. Bernard Cariot, conseiller élu à l'Assemblée des Français de l'étranger, et intitulé Quel avenir pour l'enseignement français à l'étranger ?, seulement 38,26 % des élèves étrangers ayant obtenu leur baccalauréat à l'étranger optent pour des études supérieures en France.

EduFrance, l'organisme chargé de la promotion des filières supérieures françaises, ne possède pas de statistiques fiables. En effet, on ne distingue pas les élèves français des élèves étrangers dans le nombre des titulaires du baccalauréat à l'étranger, même si une enquête partielle confirme cette grave déperdition pour notre pays.

C'est un fait, les élèves inscrits dans nos établissements à l'étranger sont très convoités par d'autres pays traditionnellement recruteurs. C'est notamment le cas des États-Unis, où 54 % des élèves de nos établissements choisiraient d'aller étudier. Le Canada en attirerait 33 %, contre 21 % pour le Royaume-Uni et 18 % pour l'Australie, qui est un recruteur récent.

Pourquoi nos élèves sont-ils tant convoités ? Tout simplement parce que nos établissements scolaires à l'étranger ont une excellente réputation et que les élèves y sont très bien formés.

Selon une enquête toute récente d'Edufrance, 70 % des établissements interrogés font l'objet de campagnes de promotion de la part d'universités étrangères. Toujours selon cette étude, la qualité de l'accueil et les logements en France constituent des points très noirs. En outre, l'accès à l'université est perçu à l'étranger comme difficile, marqué notamment par des procédures d'inscription extrêmement complexes. Je vous remercie donc, monsieur le ministre, d'avoir annoncé des mesures de simplification en ce domaine.

Il est donc impératif de renforcer l'attractivité de la France, non seulement auprès des bacheliers de nos écoles et lycées à l'étranger, comme le suggère notre excellent collègue Jacques Legendre dans son amendement au présent article, mais également auprès de tous ceux qui ont étudié un certain temps dans notre système scolaire et qui possèdent un diplôme équivalent pour accéder à nos universités, à nos IUT ou à nos grandes écoles.

Je dois rappeler que tous les étudiants de nos établissements français à l'étranger ne passent pas le baccalauréat. Ainsi, le lycée Charles de Gaulle à Londres forme des étudiants aux A-Levels et les établissements espagnols forment à la Selectividad.

Dans ces conditions, pourquoi accepter l'équivalence de diplômes pour des Chinois ou des ressortissants d'autres pays et ne pas tenir compte de ces anciens élèves étrangers de nos établissements pour lesquels l'équivalence de diplôme ne serait pas possible ?

Mes chers collègues, vous me permettrez donc d'insister sur ce point, qui est absolument essentiel : il faut que notre pays soit plus ouvert et plus accueillant avec ces étudiants parfaitement intégrables dans notre enseignement supérieur.

Il est donc indispensable de simplifier d'obtention d'une carte de séjour temporaire pour les étudiants étrangers qui sont formés à l'esprit et aux méthodes françaises et empreints de notre culture.

Cela ne pourra qu'accroître le nombre de ces anciens élèves dans nos grandes écoles et dans nos universités, pour le plus grand bénéfice de la France et des pays d'origine.

J'ai lu avec beaucoup d'attention l'amendement déposé par notre collègue Jacques Legendre, qui relève du même esprit. Je suis donc prête à retirer cet amendement au profit du sien, si M. Legendre accepte d'ajouter à la mention du baccalauréat celle de diplôme équivalent.

Mme la présidente. L'amendement n° 156, présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et  M. André, MM. Assouline,  Badinter,  Bel et  Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et  Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et  C. Gautier, Mmes Khiari et  Le Texier, MM. Mahéas,  Mermaz,  Peyronnet et  Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Remplacer le second alinéa du I du texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile  par un alinéa ainsi rédigé :

« La carte de séjour portant la mention « étudiant » vaut autorisation de travail  à temps partiel pendant l'année universitaire et à temps complet pendant les vacances universitaires.

La parole est à M. Bernard Frimat.

M. Bernard Frimat. Madame la présidente, dans un souci de clarté, je présenterai également l'amendement n° 155, ces deux amendements étant liés.

Nous devrions éviter, et peut-être y parviendrons-nous, de nous accuser mutuellement d'avoir telle ou telle intention à l'égard des étudiants étrangers.

Il n'y a pas assez d'étudiants étrangers en France. Chaque fois qu'un étudiant étranger sort diplômé d'une université française, c'est une grande chance pour lui, mais aussi pour la France, car il sera ensuite un ambassadeur de notre pays partout où il ira.

J'aborderai plus précisément la question du temps de travail de l'étudiant. Je n'évoquerai pas le problème obsessionnel des faux mariages, des faux étudiants ; nous aurons l'occasion, au cours de l'examen de ce texte, de revenir sur les faux de toutes natures.

Un étudiant peut travailler pendant ses études. Souvent, ce n'est d'ailleurs pas un choix. En effet, si l'on donne le choix à un étudiant entre travailler ou se consacrer exclusivement à ses études, il opte généralement pour la seconde possibilité ; c'est le cas des étudiants dont les familles disposent de revenus suffisants. J'ai moi-même eu la chance de pouvoir me consacrer totalement à mes études, ainsi qu'à une série d'activités universitaires, car le temps de l'université est trop riche pour se limiter aux études.

S'agissant des étudiants qui sont dans l'obligation de travailler, qu'ils soient français ou étrangers, ils doivent pouvoir concilier leurs études et le travail. Le temps d'études est sanctionné par les diplômes et, en cas d'échec universitaire, le statut d'étudiant est perdu.

Nous avons discuté de ce sujet en commission. Nous avons maintenu nos amendements, mais nous sommes prêts à les retirer si nous parvenons à un accord.

Je me réjouis de l'absence de notre collègue Jean-Patrick Courtois, quel que soit le plaisir que j'ai à le voir, car son sous-amendement n'a pas été soutenu. La construction intellectuelle de celui-ci est d'ailleurs curieuse : par courtoisie, M. Courtois n'a pas souhaité supprimer l'amendement de la commission, mais la rédaction qu'il propose nous ramène au texte de l'Assemblée nationale. Ce point est donc réglé !

Dans son amendement, M. le rapporteur utilise l'expression « temps partiel annualisé ». Lorsque nous parlons de « temps partiel pendant l'année universitaire » et de « temps complet pendant les vacances universitaires », cela correspond à l'acception générale des termes « temps partiel annualisé » Par conséquent, si son amendement est adopté, le nôtre n'aura plus d'objet. Nous le maintenons donc seulement à titre de garantie.

Nous avons eu une discussion intéressante à ce sujet en commission. L'expression « mi-temps annualisé » ne nous convient pas. En revanche, les termes « temps partiel annualisé », nous donnent satisfaction.

Par ailleurs, dans le souci de simplifier la vie de nos étudiants, qui ont besoin d'être protégés, ne pourrait-on pas imaginer que la carte d'étudiant vaut autorisation de travailler, dans les conditions définies par M. le rapporteur ?

Je pourrais ainsi transformer mon amendement en sous-amendement à l'amendement n° 12 de la commission. Ce dernier tendant à préciser que les étudiants sont autorisés à exercer « une activité professionnelle salariée dans la limite d'un temps partiel annualisé », il suffirait d'ajouter que la carte d'étudiant vaut autorisation de travailler.

N'oublions jamais que l'accueil que l'on réserve aux gens est important. Je n'aborderai pas les problèmes liés à l'éloignement, que nous évoquerons plus tard, mais certains étudiants font l'objet d'incessants contrôles d'identité, parce qu'ils font partie d'une minorité visible. Au bout d'un certain temps, ils se lassent et ils doutent de la qualité de l'accueil.

Nous devrions pouvoir trouver un accord. Nous sommes prêts à retirer nos amendements, qui du reste n'auraient plus d'objet si l'amendement de la commission était adopté, mais nous souhaitons que la carte d'étudiant vaille autorisation de travail.

Mme la présidente. Le sous-amendement n° 525, présenté par M. Courtois, est ainsi libellé :

Dans le texte proposé par l'amendement n° 156 pour le second alinéa du I de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, remplacer les mots :

temps partiel

par le mot :

mi-temps

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 484, présenté par Mmes Boumediene-Thiery,  Blandin et  Voynet et M. Desessard, est ainsi libellé :

Rédiger comme suit le second alinéa du I du texte proposé par le I de cet article par l'article L. 313-7 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile :

« La carte de séjour temporaire accordée au titre des dispositions du premier alinéa vaut autorisation temporaire de travail dans la limite d'un temps partiel annualisé et d'un temps plein durant la période de vacances scolaires et dans les conditions d'emploi et de rémunération conformes à la réglementation sur le travail. Le non-respect des prescriptions prévues par la réglementation sur le travail entraîne le retrait de l'autorisation temporaire de travail accordée au titre du présent article.

La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. La situation générale des étudiants dans notre pays est d'une extrême gravité : ils ont énormément de mal à trouver un logement, à financer leurs études, à se soigner, voire parfois à se nourrir.

Comme l'ont montré les manifestations anti-CPE, sur lesquelles je ne m'appesantirai pas, les jeunes, notamment les étudiants, figurent parmi les catégories les plus en difficulté dans notre pays. La situation des étudiants étrangers est encore plus grave que celle des étudiants français. Voilà pourquoi il est discriminatoire de restreindre autant leurs possibilités de travailler.

Je rappelle en effet que toutes les préfectures font le tri entre les vrais et les faux étudiants. Lors de chaque renouvellement de leur titre de séjour, les étudiants étrangers doivent fournir des preuves de leur assiduité et de leur réussite.

Limiter l'exercice d'un emploi à un mi-temps annualisé constituerait donc un obstacle supplémentaire dans le parcours de l'étudiant étranger.

Il convient dès lors d'amoindrir leurs difficultés, notamment en leur facilitant l'accès à un travail et en les autorisant à occuper un temps partiel annualisé ou un temps plein durant la période des vacances scolaires.

Enfin, il importe de sanctionner le non-respect du droit du travail par le retrait de l'autorisation temporaire de travail, plutôt que par le retrait du titre de séjour lui-même. Cette sanction est trop injuste et constitue une discrimination supplémentaire à l'encontre de l'étudiant étranger.

Mme la présidente. L'amendement n° 155, présenté par M. Frimat, Mmes Alquier et  M. André, MM. Assouline,  Badinter,  Bel et  Bockel, Mmes Boumediene-Thiery et  Cerisier-ben Guiga, M. Collombat, Mme Demontès, MM. Dreyfus-Schmidt et  C. Gautier, Mmes Khiari et  Le Texier, MM. Mahéas,  Mermaz,  Peyronnet et  Sueur, Mme Tasca, M. Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

I. Après les mots :

professionnelle salariée

rédiger comme suit la fin de la première phrase du second alinéa du I du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

à temps partiel pendant l'année universitaire et à plein temps pendant les vacances universitaires.

II. Supprimer la seconde phrase du second alinéa du même texte.

Cet amendement a déjà été défendu.

L'amendement n° 135 rectifié bis, présenté par MM. Legendre et  Karoutchi, Mme Brisepierre, MM. Del Picchia,  Duvernois et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après le quatrième alinéa (3°) du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ... ° À l'étranger titulaire du baccalauréat français préparé dans un établissement relevant de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger ;

La parole est à M. Jacques Legendre

M. Jacques Legendre. Cet amendement vise à mettre un terme à une situation choquante. La France dispose, de loin, du plus important réseau d'établissements secondaires à l'étranger. Tout le monde s'accorde à reconnaître l'excellence de la formation dispensée dans ces établissements, où l'on prépare souvent des élèves jusqu'au baccalauréat.

Ces établissements sont d'abord destinés aux enfants des Français de l'étranger ; ensuite, s'il reste des places, ils accueillent des enfants étrangers. Or on constate, comme notre collègue Joëlle Garriaud-Maylam vient de le rappeler à juste titre, une « évaporation » de ces élèves à leur sortie de ces établissements du secondaire. En effet, les établissements d'enseignement supérieur français n'accueillent pas un nombre significatif de ces élèves, qui leur préfèrent les établissements d'enseignement supérieur anglo-saxons.

Ce débat doit donc être l'occasion d'envoyer un signe clair et de dire que nous sommes prêts à accueillir dans les établissements d'enseignement supérieur en France les enfants étrangers ayant effectué une part notable de leur scolarité et obtenu un diplôme dans un établissement français de l'étranger.

Il faut se souvenir que le baccalauréat est tout de même le premier grade de l'enseignement supérieur. Il serait donc étonnant que nous acceptions ces élèves pour préparer le premier grade de l'enseignement supérieur, puis au niveau du master, mais pas entre les deux ! Dans ce cas, en effet, ces étudiants vont ailleurs,...

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et ils y restent !

M. Jacques Legendre. ... et c'est logique ! Dès lors, ils ne reviennent pas nécessairement en France au niveau du master.

Cet amendement vise donc, monsieur le ministre, à mettre un terme à cette situation étrange.

Par ailleurs, notre collègue Joëlle Garriaud-Maylam et plusieurs sénateurs représentant les Français établis hors de France m'ont fait remarquer que certains de ces élèves étaient titulaires d'un diplôme équivalent au baccalauréat français, qu'ils ont préparé dans ce type d'établissements.

En ce qui me concerne, je ne verrais pas d'inconvénient à mentionner qu'il s'agit d'élèves titulaires du baccalauréat français ou d'un diplôme équivalent et ayant suivi pendant au moins trois ans une scolarité dans un établissement français de l'étranger Cela répondrait à l'ensemble des situations qui peuvent être rencontrées dans les établissements français de l'étranger et constituerait une avancée significative.

Mme la présidente. Je suis donc saisie d'un amendement n° 135 rectifié ter, présenté par MM. Legendre et Karoutchi, Mme Brisepierre, MM. Del Picchia et Duvernois, Mme Garriaud-Maylam, et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, et qui est ainsi libellé :

Après le quatrième alinéa (3°) du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ... ° À l'étranger titulaire du baccalauréat français préparé dans un établissement relevant de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger ou titulaire d'un diplôme équivalent et ayant suivi pendant au moins trois ans une scolarité dans un établissement français de l'étranger ;

Madame Garriaud-Maylam, compte tenu de la rectification de l'amendement de M. Legendre, l'amendement n° 143 rectifié ter est-il maintenu ?

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Non, je le retire, madame la présidente.

Mme la présidente. L'amendement n° 143 rectifié ter est retiré.

L'amendement n° 288, présenté par Mmes Assassi,  Borvo Cohen-Seat,  Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :

Après l'avant-dernier alinéa (4°) du II du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, insérer un alinéa ainsi rédigé :

« ... ° À l'étudiant venant en France pour y suivre des études supérieures, dans un établissement public ou privé reconnu par l'État, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État.

La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.

Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement tend à rétablir la motivation des refus consulaires de visas aux étudiants, afin que ceux-ci puissent venir se former en France sans se heurter à un refus systématique et injustifié

Cette disposition garantirait aux étudiants sinon le droit d'étudier en France, du moins celui de connaître, le cas échéant, la raison du refus qui leur a été opposé.

La réforme que propose le Gouvernement consiste apparemment à donner automatiquement une carte de séjour aux étudiants qui, dans leur pays d'origine, auront été choisis selon quatre procédures : ils pourront être sélectionnés par les Centres pour les études en France, reçus au concours d'établissements conventionnés, boursiers du Gouvernement français ou originaires d'un pays ayant signé un accord de réciprocité avec la France.

Une telle restriction privera de nombreux étudiants de la possibilité d'étudier en France, tout en créant probablement une grande confusion. C'est pourquoi nous pensons que les étudiants à qui l'on refuse ce droit doivent au moins s'en voir notifier la raison.

Le projet de loi vise à multiplier les Centres pour les études en France, déjà opérationnels auprès des consulats de douze pays en 2006 et qui devraient être généralisés à compter de 2007.

Vous allez donc pratiquer une sélection en choisissant les étudiants. Je vous rappelle les termes du dispositif : « À compter de la rentrée 2006, les étudiants bénéficiant d'un visa seront choisis selon un nouveau système multicritères (prenant en compte plusieurs points : le projet d'études, le parcours académique et personnel, les compétences linguistiques, les relations bilatérales ainsi que les intérêts de la France et du pays de l'étudiant étranger), s'ajoutant aux critères actuels (ressources, inscription dans un établissement d'enseignement, absence de menace à l'ordre public). »

Avec cet amendement de repli, nous demandons au moins que le droit de certains étudiants à venir étudier sur notre territoire ne se heurte pas à un refus systématique et, surtout, injustifié.

M. Jean Desessard. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission est d'autant plus défavorable à l'amendement de suppression n° 154 que les nouvelles dispositions prévues sont plus favorables que le droit positif, notamment en matière de droit pour les étudiants à exercer une activité salariée. Je vous renvoie également à ce que nous avons dit, à l'occasion du débat sur l'article 6, sur la carte de séjour temporaire pluriannuelle.

S'agissant de l'amendement n° 156, si l'amendement n° 12 de la commission est adopté, celui-ci deviendra sans objet.

La commission souhaite le retrait de l'amendement n° 484, car il est satisfait par l'amendement n° 12.

Elle demande également le retrait de l'amendement n° 155 qui est satisfait par l'amendement n° 12, notamment en ce qui concerne la possibilité de travailler pour les étudiants.

La commission est favorable à l'amendement n° 135 rectifié ter.

Enfin, elle est défavorable à l'amendement n° 288, qui est sans lien véritable avec son objet. En l'état, cet amendement généralise la délivrance de plein droit de la carte d'étudiant. Or le projet de loi réserve celle-ci aux étudiants ayant fait l'objet d'une forme de présélection. Il n'est donc pas convenable de l'étendre au-delà.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 154.

J'en viens aux amendements évoquant le problème du temps partiel ou du mi-temps.

L'amendement n° 12 précise utilement, dans un souci de simplification, que la carte de séjour « étudiant » donne droit à l'exercice, à titre accessoire, d'une activité professionnelle.

Nous avons toutefois une interrogation, que la Haute Assemblée va nous aider à résoudre : nous craignons en effet que la limite fixée par la commission d'un temps partiel annualisé ne soit trop élevée. Si l'étudiant consacre 99 % de son temps à travailler, il n'aura plus guère le temps d'étudier. L'Assemblée nationale, en retenant le mi-temps, avait ce souci présent à l'esprit. Je pense que les étudiants doivent consacrer l'essentiel de leur temps à étudier. Quelles limites faut-il fixer à leur temps de travail ? À cet égard, l'amendement n° 156 de M. Frimat va dans le bon sens en précisant les choses ; le sous-amendement de M. Courtois, qui n'a pas été soutenu, le faisait encore mieux.

Ouvrir la possibilité aux étudiants de travailler, c'est aussi permettre à beaucoup d'entre eux de financer une part de leur hébergement, de leurs études. Bon nombre d'universités à l'étranger - et l'exemple américain est, sur ce point, probant - ont elles-mêmes un bureau du travail qui, en relation avec les entreprises, a pour objet de proposer aux étudiants, le jour même de leur arrivée, un certain nombre de postes afin qu'ils puissent exercer une activité professionnelle et participer au financement de leurs études. Il y a donc des exemples étrangers intéressants. Que la France s'en inspire en permettant à des étudiants étrangers de pouvoir exercer des activités professionnelles et assouplisse le dispositif est positif.

Les propositions qui ont été formulées de part et d'autre sont judicieuses. Le Gouvernement est donc favorable aux amendements nos 12 et 156.

En ce qui concerne l'amendement n° 143 rectifié ter, qui a été retiré au bénéfice de l'amendement n° 135 rectifié ter, vous avez raison, madame Garriaud-Maylam, il faut faciliter l'accueil des bacheliers des lycées français à l'étranger en leur donnant une carte de séjour « étudiant » de plein droit. Je remercie M. Legendre, qui a accepté d'ajouter dans son amendement la notion de « diplôme équivalent » à la suite du mot « baccalauréat », de la façon dont il propose d'enrichir le texte.

Nous avons, il a raison de le souligner, un réseau de lycées français à l'étranger qui accueillent, bien évidemment, des étudiants français, mais aussi un grand nombre d'étudiants étrangers. Ces lycées doivent être des portes d'accès pour ces étudiants étrangers aux universités françaises.

Voilà dix jours, je me trouvais en Israël, dans le cadre de partenariats que mon ministère mène avec des industriels, des universitaires, des scientifiques français, pour la signature d'accords entre le pôle de compétitivité français SCS, solutions communicantes sécurisées, et le pôle des technologies de Jérusalem, ainsi qu'entre l'hôpital Hadassah de Jérusalem, la faculté de médecine de l'université hébraïque de Jérusalem et un centre hospitalier français. À cette occasion, j'ai également rencontré le proviseur du lycée français de Jérusalem, avec qui je me suis entretenu de ce sujet, et les autorités israéliennes.

C'est un exemple, mais un grand nombre d'autres pays amis souhaitent que nous favorisions cet accès aux universités françaises par le biais des lycées français à l'étranger. Votre amendement, cher Jacques Legendre, y contribue largement et je tiens, au nom du Gouvernement, à vous en remercier.

Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 484 de Mme Boumediene-Thiery, qui n'aurait plus d'objet si l'amendement n° 156 de M. Frimat était adopté.

Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement n° 155 de M. Frimat, parce qu'il faut maintenir un régime de retrait de titre de séjour en cas de non-respect de la réglementation du travail, dans l'intérêt même des étudiants.

Enfin, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 288 de Mme Assassi, car il ouvrirait trop largement les facilités que nous prévoyons en matière de délivrance de carte de séjour La seule inscription dans un établissement d'enseignement supérieur ne peut suffire à donner de plein droit une carte de séjour.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Ainsi que certains d'entre vous s'en souviennent, lors de notre débat en commission, il est apparu souhaitable - et, monsieur le ministre, vous l'avez très bien confirmé - de permettre aux étudiants étrangers de travailler pendant leurs études parce que cela présente de nombreux avantages, tels que le financement de leurs études ou la participation à une activité économique.

Pour un étudiant en médecine, assurer des gardes d'infirmier pendant les week-ends me paraît tout à fait positif. D'ailleurs, beaucoup d'étudiants qui ne sont pas étrangers travaillent pour payer leurs études. J'ai moi-même toujours travaillé à temps plein en faisant mes études.

Le seul souci qui nous préoccupe, c'est que les étudiants aient aussi le temps de se consacrer à leurs études. Après réflexion, il nous a semblé qu'une certaine souplesse était nécessaire. Par le passé, c'est le mi-temps qui avait été retenu, calculé sur la base de 39 heures et non pas sur celle de 35 heures, qui réduit d'autant la durée du travail.

Cette souplesse se justifie du fait que l'année universitaire n'est pas homogène : à certains moments, on travaille beaucoup à l'université et, à d'autres, on est plus disponible. Pour cette raison, l'expression « temps partiel annualisé », qui permet une alternance de périodes de travail à temps plein et d'autres à temps partiel, nous paraît beaucoup plus claire.

L'amendement de M. Frimat aboutit au même résultat, mais il nous paraît plus simple de parler de temps partiel annualisé. Cela permet une adaptation au cas par cas.

D'ailleurs, monsieur le ministre, la sanction, c'est que celui qui ne poursuit pas ses études perd son statut.

En fin de compte, il appartient à chacun de prendre ses responsabilités. La commission des lois, après avoir examiné toutes les modalités, a préféré laisser une certaine souplesse.

On pourrait évidemment continuer à discuter de cette question. La philosophie de la commission des lois, qui rejoint tout à fait la vôtre, monsieur le ministre, est de permettre à des étudiants étrangers de travailler, à condition, bien entendu, qu'ils aient aussi le temps de se consacrer à leurs études. Il y a des cas où, de toute façon, il est pratiquement impossible de travailler en dehors de ses études, sauf le week-end.

Tel est le sens de l'amendement n° 12 de la commission. Monsieur Frimat, votre amendement est sous-tendu par le même objectif que l'amendement de la commission, mais ce dernier est plus souple. Vous pourriez donc retirer le vôtre.

Mme la présidente. Monsieur Frimat, maintenez-vous votre amendement ?

M. Bernard Frimat. Monsieur Hyest, j'irai même jusqu'à vous concéder que l'amendement de la commission est mieux rédigé que le mien !

Mon seul problème, par rapport à l'amendement de la commission, c'est que je voudrais être assuré que la délivrance de la carte de séjour « étudiant » vaut bien autorisation de travail, c'est-à-dire qu'une personne titulaire de cette carte peut exercer une activité professionnelle dans les conditions définies sans avoir besoin de remplir des formalités spécifiques et d'obtenir une autorisation de travail.

Mon amendement vise à apporter une simplification. J'ai cru comprendre, en écoutant M. le ministre, qu'il partageait ce souci. Mais comme je veux éviter toute erreur d'interprétation, j'aimerais qu'il me confirme, compte tenu de ce qui est écrit, que l'étudiant sera dispensé des formalités nécessaires à l'obtention d'une autorisation de travail, que sa carte en fera foi et lui donnera le droit d'exercer une activité professionnelle dans les conditions définies par la loi.

Si cet engagement est pris et si nous sommes d'accord sur le fond, n'ayant pas de vanité d'auteur, je pourrai consentir le sacrifice de retirer cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Christian Estrosi, ministre délégué. Je confirme que la carte de séjour « étudiant » vaut autorisation de travail.

S'agissant de la question du temps de travail, le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. Monsieur Frimat, compte tenu de la réponse de M. le ministre, l'amendement n° 156 est-il maintenu ?

M. Bernard Frimat. Je ne peux que retirer cet amendement, madame la présidente !

Quant à l'autre amendement, il devrait connaître un sort qui ne m'obligera pas à m'en préoccuper.

Mme la présidente. L'amendement n° 156 est retiré.

Je mets aux voix l'amendement n° 154.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Hugues Portelli, pour explication de vote sur l'amendement n° 12.

M. Hugues Portelli. Voilà trente ans que je dirige des travaux universitaires - thèses, masters ou licences - d'étudiants étrangers, dont beaucoup viennent de pays en voie de développement.

Un étudiant étranger qui souhaite travailler est obligé de remplir des formalités administratives extrêmement compliquées et rencontre de nombreuses difficultés. Tout cela prend beaucoup de temps.

La réalité des étudiants étrangers qui travaillent, c'est d'abord une très grande pluralité de situations. Certains de mes étudiants travaillent au noir, d'autres à temps plein, à temps partiel ou à mi-temps. Ils sont livreurs de pizzas, gardiens d'immeubles de nuit, ou biens ils sont serveurs dans des Bistro Romain et des fast foods. Ce sont les cas les plus fréquents ! (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat opine.)

Il existe aussi une autre réalité : les étudiants qui s'inscrivent à l'université, mais que je ne vois plus jamais après.

M. Jean Desessard. Il y a des sénateurs que je ne vois jamais non plus ! (Sourires.)

M. Hugues Portelli. Ceux-là viennent me voir, en général à cette époque de l'année, car ils ont besoin d'un tampon sur leur carte d'étudiant avant de la présenter à la préfecture de police. Je sais très bien qu'ils ne suivent leurs études que partiellement, ou très mal, mais il leur faut l'attestation d'un professeur prouvant que leur thèse avance.

Il m'arrive d'avoir la faiblesse de signer ces papiers, même si je sais que les travaux n'ont pas beaucoup progressé au cours de l'année. Mais, la plupart du temps, je demande une production minimum. Si tel n'est pas le cas, je refuse de signer, car le contrat moral n'est pas respecté.

Si l'on veut apprécier correctement cette réalité, il faut d'abord la considérer du point de vue de l'éducation nationale, avant de se pencher sur la situation de ces étudiants dans le monde du travail. Il faut donc vérifier s'ils sont vraiment des étudiants et s'ils suivent correctement leurs études.

Cela étant, il est tout à fait normal que les étudiants exercent une activité rémunérée. Pour ma part, je connais très peu d'étudiants qui obtiennent une bourse. La plupart d'entre eux sont obligés de travailler pour payer leurs études. Ainsi, parmi mes nombreux étudiants qui sont devenus un jour professeurs d'université, j'en connais un seul qui a travaillé à temps plein comme gardien de nuit : il est aujourd'hui professeur dans une grande université du Maroc. Tous les autres ont eu énormément de difficultés pour s'en sortir. Telle est la réalité !

Enfin, je souhaite ouvrir une « parenthèse », même si cela ne concerne pas directement l'amendement dont nous discutons.

Si nous voulons faire preuve d'une totale honnêteté intellectuelle à l'égard des étudiants étrangers qui s'inscrivent dans nos universités, nous devons les traiter de la même façon que les étudiants français. Combien de fois ne me suis-je pas retrouvé dans des jurys de thèse qui ont décerné des mentions de complaisance à des travaux médiocres, considérant que, de toute façon, ces étudiants n'enseigneraient pas chez nous. Il s'agit là d'une forme de mépris !

M. Hugues Portelli. Le résultat, c'est que certains pays francophones d'Afrique refusent aujourd'hui de reconnaître la validité des diplômes décernés par les universités françaises, car ils savent que ceux-ci ne valent rien. Les étudiants doivent alors repasser un examen d'entrée à leur retour dans le pays, afin de vérifier que les études qu'ils ont suivies en France étaient effectivement valables.

Si nous voulons que l'image de la France, sur le plan académique, s'améliore au niveau mondial, il nous faut retourner le fer dans la plaie, et il s'agit non pas du monde du travail, mais de l'éducation nationale. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. M. Portelli vient de nous parler de la vraie vie, et c'était très intéressant.

Dans la vraie vie, il y a, d'une part, ce qui relève de l'éducation nationale et, d'autre part, le quotidien des étudiants.

Les universités doivent pouvoir donner un avis sur ce que fait l'étudiant dans le cadre de ses études : s'il suit les cours, s'il a un bon niveau, s'il est en mesure d'obtenir un diplôme.

S'agissant de la réalité de la vie des étudiants, la plupart d'entre eux ne reçoivent ni bourse ni argent de la part de leurs parents pour pouvoir subsister en France. Il faut donc leur laisser les moyens de vivre.

La plupart de ceux qui travaillent, en général dans la distribution, ne choisissent pas leur contrat de travail : on leur propose des contrats de vingt, vingt-huit, trente ou trente-deux heures et, que cela leur plaise ou non, comme ils ont besoin de travailler, ils les acceptent. Beaucoup se débrouillent ainsi pour mener à bien leurs études.

La formule du temps partiel annualisé me semble correcte, car elle leur permet de travailler à plein temps pendant les vacances et, durant l'année universitaire, soit de faire des « petits boulots » répartis comme ils l'entendent - c'est mieux que de travailler au noir ! -, soit d'avoir un contrat de plus de vingt heures, ce qui est en général proposé dans la distribution.

Je souhaite également, madame la présidente, faire part au Sénat de mon inquiétude s'agissant d'une autre situation, qui ne concerne pas l'activité professionnelle des étudiants étrangers.

Certains mineurs, arrivés en France de façon irrégulière, sont placés sous la protection de l'aide sociale à l'enfance, l'ASE, et suivent leur scolarité en France de l'âge de seize ans à leur majorité. De ce point de vue, ils sont donc en situation régulière et devraient pouvoir poursuivre leurs études après l'âge de dix-huit ans. De toute façon, ils ne peuvent en général pas retourner dans leur pays d'origine, car personne ne peut s'en occuper. Personnellement, je connais plusieurs cas très concrets.

Je pense que ces mineurs, souvent pris en charge par des membres de leur famille ou des amis qui vivent dans notre pays, devraient avoir la possibilité de poursuivre leurs études en France.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 12.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos 484 et 155 n'ont plus d'objet.

La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour explication de vote sur l'amendement n° 135 rectifié ter.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Mon groupe votera l'amendement de M. Legendre. Mais je tiens à préciser que les refus de visas opposés aux élèves étrangers qui ont fréquenté nos établissements sont rarissimes et dus, le plus souvent, aux mauvaises relations qu'entretiennent le service culturel et le consulat du pays où ces élèves résident. Par conséquent, s'il est très positif de faciliter l'obtention d'une carte de séjour portant la mention « étudiant », il faut savoir que les difficultés rencontrées par ces jeunes sont d'ordre pratique plutôt que juridique.

Il n'est pas étonnant qu'un certain nombre d'élèves de nos établissements français à l'étranger choisissent de faire leurs études supérieures dans leur pays de résidence. Ainsi, un Espagnol, un Italien ou un Allemand qui a suivi ses études dans nos établissements reviendra, à dix-sept ans ou dix-huit ans, dans le pays de résidence de sa famille. Quant à nos étudiants d'Amérique du Nord, ils choisissent souvent de rester dans leur pays, préférant étudier dans un collège américain ou canadien plutôt que dans une classe préparatoire française.

Par ailleurs, les parents demandent désormais à l'AEFE de multiplier les doubles certifications, afin que les diplômes de fin d'études aient à la fois la valeur du baccalauréat et du diplôme de fin d'études du pays de résidence.

Toutes ces dispositions sont salutaires pour nos établissements, car elles nous permettent de garder les élèves jusqu'à la fin du second cycle. Sans celles-ci, ils partiraient avant. Il ne faut donc pas nous étonner de ne pas voir ces élèves arriver en France dès le début des études supérieures. Ils viennent souvent à l'occasion du cycle suivant, en master ou en doctorat, car du fait de leur maîtrise du français, ils ont intérêt à venir en France.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.

M. Christian Cointat. Je souhaite remercier chaleureusement Joëlle Garriaud-Maylam et Jacques Legendre, qui ont réussi à régler le problème en fusionnant leurs deux amendements. En effet, en tant que cosignataire, j'aurais été très déçu si l'une des deux facettes avait disparu.

Cette mesure renforcera, dans les pays où nous sommes présents, l'attractivité et la réputation de nos établissements français d'enseignement qui, comme l'ont rappelé M. le ministre, Jacques Legendre et Joëlle Garriaud-Maylam, sont d'une très grande utilité pour le rayonnement de la culture française.

Nous disposons désormais d'un texte qui « tient la route », qui est complet, et dont nous pouvons nous féliciter.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 135 rectifié ter.

(L'amendement est adopté.)

Mme la présidente. Je constate que cet amendement a été adopté à l'unanimité des présents.

Je mets aux voix l'amendement n° 288.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 7 (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration
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