Article 14
I. - Les dispositions de la présente loi, à l'exception de celles de l'article 3, sont applicables à Mayotte, en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises, sous réserve des modifications prévues aux II et III.
II. - Pour l'application de l'article 6 de la présente loi et de l'article 421-6 du code pénal, le montant des amendes en euros est remplacé par sa contre-valeur en monnaie locale en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis et Futuna.
III. - Au livre VII du code monétaire et financier :
1° Pour son application à Mayotte l'article L. 735-13 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, le mot et la référence : « et L. 574-2 » sont remplacés par le mot et la référence : « à L. 574-3 » ;
b) Dans le second alinéa, les mots : « Les références à l'article 415 du code des douanes » sont remplacés par les mots : « Les références aux articles 415 et 453 à 459 ainsi qu'aux titres II et XII du code des douanes » ;
2° Pour son application à la Nouvelle-Calédonie l'article L. 745-13 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, le mot et la référence : « et L. 574-2 » sont remplacés par le mot et la référence : « à L. 574-3 » ;
b) Dans le second alinéa, les mots : « Les références à l'article 415 du code des douanes » sont remplacés par les mots : « Les références aux articles 415 et 453 à 459 ainsi qu'aux titres II et XII du code des douanes » ;
3° Pour son application à la Polynésie française l'article L. 755-13 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, le mot et la référence : « et L. 574-2 » sont remplacés par le mot et la référence: « à L. 574-3 » ;
b) Dans le second alinéa, les mots : « Les références à l'article 415 du code des douanes » sont remplacés par les mots : « Les références aux articles 415 et 453 à 459 ainsi qu'aux titres II et XII du code des douanes » ;
4° Pour son application aux îles Wallis et Futuna l'article L. 765-13 est ainsi modifié :
a) Dans le premier alinéa, le mot et la référence : « et L. 574-2 » sont remplacés par le mot et la référence : « à L. 574-3 » ;
b) Dans le second alinéa, les mots : « Les références à l'article 415 du code des douanes » sont remplacés par les mots : « Les références aux articles 415 et 453 à 459 ainsi qu'aux titres II et XII du code des douanes ».
M. le président. L'amendement n° 30 rectifié, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le I de cet article :
I.- Sous réserve des modifications prévues au 1° du III, les dispositions de la présente loi, à l'exception de l'article 3, sont applicables à Mayotte.
Sous réserve des modifications prévues au II et au 4° du III, les dispositions de la présente loi, à l'exception des articles 3, additionnels avant l'article 13 (cf amendements nos 26 rectifié et 27 rectifié) et 15 C sont applicables dans les îles Wallis et Futuna.
Sous réserve des modifications prévues au II et aux 2° et 3° du III, les dispositions de la présente loi, à l'exception des articles 3, 10 sexies, additionnels avant l'article 13 (cf amendements nos 26 rectifié et 27 rectifié), 15 A et 15 C sont applicables en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les Terres australes et antarctiques françaises.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination destiné à rendre applicable le dispositif en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les terres Australes et Antarctiques françaises.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 113, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
IV.- Après l'article L. 422-5 du code des assurances, il est inséré un article L. 422-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 422-6. - Les articles L. 422-1 à L. 422-5 sont applicables à Mayotte et dans les îles Wallis et Futuna. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. C'est un amendement de coordination qui actualise les dispositions pour Mayotte ainsi que pour Wallis et Futuna.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 14, modifié.
(L'article 14 est adopté.)
CHAPITRE VIII
Dispositions finales
Article 15 A
I. - L'article L. 126-2 du code des assurances est ainsi rédigé :
« Art. L. 126-2. - Les contrats d'assurance garantissant les dommages d'incendie à des biens situés sur le territoire national, ainsi que les dommages aux corps de véhicules terrestres à moteur, ouvrent droit à la garantie de l'assuré pour les dommages matériels directs causés aux biens assurés par un attentat ou un acte de terrorisme tel que défini par les articles 421-1 et 421-2 du code pénal subis sur le territoire national.
« La réparation des dommages matériels, y compris les frais de décontamination, et la réparation des dommages immatériels consécutifs à ces dommages sont couvertes dans les limites de franchise et de plafond fixées au contrat au titre de la garantie incendie.
« Lorsqu'il est nécessaire de décontaminer un bien immobilier, l'indemnisation des dommages, y compris les frais de décontamination, ne peut excéder la valeur vénale de l'immeuble ou le montant des capitaux assurés.
« En outre, si l'assuré est couvert contre les pertes d'exploitation, cette garantie est étendue aux dommages causés par les attentats et les actes de terrorisme, dans les conditions prévues au contrat.
« La décontamination des déblais ainsi que leur confinement ne rentrent pas dans le champ d'application de cette garantie.
« Toute clause contraire est réputée non écrite.
« Un décret en Conseil d'État détermine les dérogations ou les exclusions éventuellement applicables aux contrats concernant les grands risques définis à l'article L. 111-6 au regard de l'assurabilité de ces risques. »
II. - Après l'article L. 126-2 du même code, il est inséré un article L. 126-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 126-3. - Les entreprises d'assurance doivent insérer dans les contrats mentionnés à l'article L. 126-2 une clause étendant leur garantie aux dommages mentionnés audit article. »
III. - 1. Le I s'applique aux contrats en cours à compter de la publication de la présente loi.
2. Le II s'applique aux contrats souscrits six mois à compter de la publication de la présente loi et, pour les autres contrats, lors de la conclusion du premier avenant consécutif à l'échéance de ce même délai. - (Adopté.)
Article 15 B
Dans l'article 39 sexies de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, les mots : « de militaires de la gendarmerie nationale » sont remplacés par les mots : « de militaires ou de personnels civils du ministère de la défense ». - (Adopté.)
Article 15 C
Après l'article 42-11 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, il est inséré un article 42-12 ainsi rédigé :
« Art. 42-12. - Lorsque, par son comportement d'ensemble à l'occasion de manifestations sportives, une personne constitue une menace pour l'ordre public, le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, prononcer à son encontre une mesure d'interdiction de pénétrer ou de se rendre aux abords des enceintes où de telles manifestations se déroulent ou sont retransmises en public.
« L'arrêté, valable sur le territoire national, fixe le type de manifestations sportives concernées. Il ne peut excéder une durée de trois mois.
« Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent également imposer, par le même arrêté, à la personne faisant l'objet de cette mesure l'obligation de répondre, au moment des manifestations sportives objet de l'interdiction, aux convocations de toute autorité ou de toute personne qualifiée qu'il désigne.
« Le fait, pour la personne, de ne pas se conformer à l'un ou à l'autre des arrêtés pris en application des alinéas précédents est puni de 3 750 € d'amende.
« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 78 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 102 est présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 78.
Mme Josiane Mathon-Poinat. L'article 15 C, qui prévoit une mesure d'interdiction administrative de pénétrer ou de se rendre aux abords des enceintes où des manifestations sportives se déroulent ou sont retransmises en public, s'insérerait dans la loi du 16 juillet 1984, qui fait régulièrement l'objet de modifications introduites par divers textes.
Cette disposition est inacceptable, car elle dévie la loi de 1984 de son objet.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour présenter l'amendement n° 102.
M. Jean-Pierre Sueur. Après avoir été taxés, de manière extrêmement choquante, de soutenir les terroristes, j'espère que nous ne serons pas maintenant taxés de soutenir les hooligans !
Notre approche est claire : le texte relatif à la lutte contre le terrorisme ne doit comporter que des mesures relatives à la lutte contre le terrorisme. Nous avons refusé toute forme d'amalgame, y compris entre la délinquance et le terrorisme.
Le terrorisme est atroce, mais spécifique. À ce titre, il doit relever de mesures spécifiques encadrées, dans le respect du droit.
Certes, il est légitime de légiférer sur l'accès aux stades, sur les délits, voire parfois les crimes qui ont été malheureusement commis dans les enceintes sportives : c'est un vrai sujet et nous sommes tout à fait prêts à en débattre, mais pas dans le cadre de ce projet de loi.
Nous sommes donc opposés à cette disposition, non pas parce qu'elle n'est pas pertinente ou qu'il n'y a pas lieu d'en délibérer, mais parce qu'elle relève d'un domaine différent.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est une logique !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques qui visent à supprimer l'article 15 C, dont l'objet est de créer une mesure de police administrative d'interdiction de stade d'une durée de trois mois.
Les auteurs de ces amendements reprochent à cet article de ne pas concerner la lutte contre le terrorisme. Certes, j'en conviens, mais, à mon sens, cette mesure est vraiment importante eu égard aux incidents répétés que nous avons connus à l'occasion de matches de football entre supporters, ...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est incroyable !
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. ... certains gestes et certains actes étant particulièrement inadmissibles dans un lieu sportif.
J'ajoute que, dans son intitulé, le projet de loi vise également des « dispositions diverses relatives à la sécurité ». Il n'abuse d'ailleurs pas de cette facilité, puisque les dispositions étrangères à la lutte contre le terrorisme sont très minoritaires.
Le sujet traité étant particulièrement important, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 78 et 102.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 15 C.
(L'article 15 C est adopté.)
Article 15
I. - Supprimé.
II. - Les dispositions des articles 3, 5 et 8 sont applicables jusqu'au 31 décembre 2008.
Le Gouvernement remet chaque année au Parlement un rapport sur l'application de la présente loi.
M. le président. L'amendement n° 103, présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le premier alinéa du II de cet article :
L'ensemble des dispositions de la présente loi n'est applicable que jusqu'au 31 décembre 2008.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Au cours de la discussion générale, nous avons clairement dit que l'ensemble des dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme devaient être prévues pour une durée limitée et déterminée. En effet, nous pouvons tous espérer que le terrorisme sera un jour éradiqué.
S'agissant de mesures exceptionnelles, nous considérons qu'il est sage de prévoir que ces dispositions ne s'appliqueront que pendant un laps de temps déterminé.
On a dit beaucoup de bien - ce qui est rare et qui fera certainement plaisir à son auteur - de la loi pour la sécurité intérieure, présentée sur l'initiative de M. Daniel Vaillant.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Nous l'avons votée !
M. Jean-Pierre Sueur. Ce texte avait donné lieu à des débats riches dans cet hémicycle. Or vous vous souvenez, mes chers collègues, que chacun avait alors convenu qu'il était particulièrement sage - et, monsieur Hyest, vous aviez voté cette loi dans cet esprit - de limiter dans le temps les mesures prévues.
Ce qui vous paraissait bon hier, mes chers collègues, ne peut que vous paraître également bon aujourd'hui ! J'espère donc que vous souscrirez à notre amendement tendant à prévoir que l'ensemble des dispositions de la présente loi s'appliqueront jusqu'au 31 décembre 2008. Ensuite, il reviendra au Gouvernement et au Parlement de décider de la suite à leur donner.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tend à étendre à l'ensemble des articles du projet de loi la clause de rendez-vous fixée au 31 décembre 2008. Or je rappelle que le projet de loi ne prévoit cette dernière que pour les articles 3, 5 et 8. Il est notamment difficile d'étendre ce dispositif provisoire à l'article 6, qui vise à transposer une directive communautaire.
En outre, l'essentiel du dispositif de contrôle prévu dans l'article 7 est déjà inscrit dans la loi pour la sécurité intérieure du 18 mars 2003. Ce n'est donc pas une nouveauté.
Par ailleurs, les investissements qu'exigent tant l'article 7 que les articles 6 et 4 pour l'État, les compagnies aériennes ou les cybercafés rendent difficile l'adoption à titre provisoire de ces dispositions.
Enfin, il ne faut pas abuser des dispositions provisoires, qui créent une insécurité juridique.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Monsieur Sueur, comme je sais que vous êtes très attaché au compte rendu analytique, ...
M. Jean-Pierre Sueur. Et au compte rendu intégral, monsieur le ministre ! Il faut être respectueux des deux services !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. ... permettez-moi de relever que vous avez fait référence à la loi pour la sécurité intérieure, alors que la loi de Daniel Vaillant était relative à la sécurité quotidienne.
M. Jean-Pierre Sueur. Vous avez raison, monsieur le ministre !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Je me réjouis d'ailleurs d'avoir moi-même voté, en son temps, cette loi.
Dans le prolongement de ce que vient de dire M. le rapporteur, j'indique que la lutte contre le terrorisme nécessite l'adoption de mesures adaptées s'inscrivant dans une action de longue durée. Dès lors, il n'est pas envisageable de limiter à trois ans l'ensemble des dispositions du présent projet de loi, certaines d'entre elles étant nécessairement pérennes. Nous ne pouvons pas, notamment, transposer dans notre droit interne des directives européennes de manière transitoire, car nous contreviendrions alors aux règles européennes.
Toutefois, chaque fois que cela a été possible, le Gouvernement a limité dans le temps l'application des dispositions. C'est le cas des articles 3, 5 et 8, qui ne seront applicables que jusqu'au 31 décembre 2008.
Pour ce qui concerne les systèmes de vidéosurveillance, dans la mesure où les autorisations ont désormais une durée limitée, nous avons prévu une clause de rendez-vous de cinq ans.
Dans ces conditions, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 15.
(L'article 15 est adopté.)
Article additionnel après l'article 15
M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'article 15, ajouter un article additionnel ainsi rédigé :
Un arrêté interministériel détermine les services de police et de gendarmerie nationales spécialement chargés de la prévention et de la répression des actes de terrorisme au sens de la présente loi.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement tire la conséquence de la suppression de l'article 1er bis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 15.
Intitulé du projet de loi
M. le président. L'amendement n° 104, présenté par MM. Peyronnet, Badinter et Boulaud, Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Khiari, MM. Mermaz, Sueur, Vantomme et Yung, Mme Boumediene-Thiery et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'intitulé du projet de loi :
Projet de loi relatif à la lutte contre le terrorisme
La parole est à M. Louis Mermaz.
M. Louis Mermaz. À moins que le Gouvernement ne se ressaisisse, nous sommes bien actuellement en présence d'un texte qui balaie très large, puisque de nombreuses dispositions n'ont rien à voir avec la lutte contre le terrorisme.
Tout au long de l'examen de ce projet de loi, le groupe socialiste, comme le groupe CRC, a veillé à faire en sorte que les mesures inscrites dans le texte se rapportent directement et uniquement à la lutte contre le terrorisme, sujet suffisamment grave pour ne pas être noyé au sein de propositions diverses.
Par voie d'amendement, nous avons également tenu à écarter toutes les autres dispositions motivées par une autre finalité. À plusieurs reprises, nous avons dénoncé avec force l'amalgame entre terrorisme et immigration irrégulière. À cet égard, vous avez prétendu, monsieur le ministre, que c'était nous qui faisions cette confusion. Je vous renvoie donc à la lecture du paragraphe I de l'article 6 du projet de loi : « Afin d'améliorer le contrôle aux frontières et de lutter contre l'immigration clandestine,... » ; ce ne sont pas les parlementaires qui ont rédigé ce texte, monsieur le ministre, mais bien le Gouvernement !
Par souci de cohérence, nous proposons donc de modifier l'intitulé du projet de loi, afin de préciser clairement qu'il est relatif à la lutte contre le terrorisme.
Cela étant, je ne vous cache pas, mes chers collègues, que, si deviez adopter cet amendement, nous devrions procéder à une seconde lecture du projet de loi, afin d'en retirer de nombreuses dispositions.
Je regrette que, en dépit de l'unanimité qui s'est manifestée dans cette enceinte pour souligner le danger que représente actuellement le terrorisme, pour condamner celui-ci de la façon la plus forte et pour reconnaître l'action des juges et des policiers qui ont protégé notre pays ces dernières années, le Gouvernement, par manque de sang-froid, n'ait pas accepté les amendements que nous avons proposés.
Pour la forme, je vous propose donc, mes chers collègues, de voter cet amendement tendant à modifier l'intitulé du projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. J'allais dire que cet amendement n'a plus d'objet dans la mesure où nous avons adopté des articles et des amendements qui ne concernent pas que le terrorisme.
Pour éviter de recommencer le débat, la commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 104.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, au cours de ces deux derniers jours, nos débats ont été intenses.
Vous aurez remarqué, mes chers collègues, que le groupe socialiste a présenté un nombre limité d'amendements, dont l'objet était de restaurer certaines garanties auxquelles il est très attaché et d'éviter certains amalgames qui semblent particulièrement préjudiciables.
Malheureusement, à une exception près touchant deux mots, aucun de nos amendements n'a été adopté. Nous aurions été très sensibles au fait qu'il en soit autrement, mais telle n'a pas été la volonté du Gouvernement.
Je répéterai les deux raisons pour lesquelles nous voterons contre ce projet de loi.
Bien sûr, je dois redire pour la vingtième fois, sinon plus, combien nous sommes attachés à la lutte contre le terrorisme : le terrorisme est la négation de la civilisation et il nous menace tous.
Mais nous tenons à dire qu'il est possible - et nécessaire - de lutter contre le terrorisme sans procéder à ces amalgames, et dans le respect de l'État de droit.
Il n'était pas besoin, vous le savez bien, de mêler la question de l'immigration à celle de la lutte contre le terrorisme. Nous avons tenté de l'expliquer de toutes les manières possibles, malheureusement sans succès.
Je veux solennellement réaffirmer deux choses : premièrement, il est, bien sûr, légitime de mettre en oeuvre un dispositif de lutte contre le terrorisme ; deuxièmement, il est, bien sûr, légitime de mettre en oeuvre une politique de l'immigration,... sur laquelle nous pouvons avoir, les uns et les autres, des avis divergents.
Dès lors qu'existe une politique de l'immigration, il est logique de prendre des mesures pour réprimer l'immigration clandestine. En revanche, il n'est pas légitime, à notre sens, de tout mélanger et, ainsi, d'entretenir inéluctablement le soupçon.
Nous sommes contre les terroristes d'où qu'ils viennent, quelle que soit leur origine, quelle que soit leur nationalité. Mais gardons-nous de tout préjugé, car préjuger est non seulement une erreur, mais encore c'est ouvrir la porte aux stigmatisations, aux procès d'intention, qui se retournent immanquablement contre nous et contre notre pays.
En second lieu, nous considérons qu'il est possible, nécessaire et indispensable de mener la lutte contre le terrorisme dans le respect de l'État de droit.
On a parlé ici même des juges antiterroristes, auxquels un hommage a été justement rendu. On a souhaité que leur action soit facilitée et que leurs moyens soient renforcés. Évidemment, nous y sommes favorables ! Mais les juges restent des juges ! Or dix articles du projet de loi ont pour objet de substituer aux décisions de l'autorité judiciaire celles des services administratifs dans la lutte contre le terrorisme.
Il n'est pas compatible avec un État de droit que des autorités administratives puissent, en l'absence de toute décision judiciaire ou de tout contrôle du juge, en l'absence même de toute ouverture d'enquête, mettre en oeuvre à tout moment des procédures touchant à la liberté d'aller et venir et tendant à contrôler la libre circulation des personnes, les déplacements ou la tenue de réunions, de manifestations, de grands rassemblements et d'événements particuliers : je cite là les termes du projet de loi.
Il est franchement incompatible avec un État de droit que, dans le domaine des communications téléphoniques ou électroniques, on refuse ici même de mettre en oeuvre les prérogatives de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité, la CNCIS, pour s'en remettre à une personnalité désignée de facto par le ministre de l'intérieur.
Était-il impossible de prévoir que cette commission, présidée par un haut magistrat, doive donner son avis au pouvoir exécutif avant qu'il agisse ?
Était-il impossible de prévoir que les parquets et les juges, auxquels il convient de rendre hommage encore une fois, doivent exercer pleinement leurs pouvoirs ?
C'était possible, mais, malheureusement, les auteurs de ce texte n'ont pas exprimé la volonté de conjuguer la lutte la plus impitoyable contre le terrorisme avec le respect de l'État de droit.
Je conclurai par cette phrase, que nous avons prononcée à plusieurs reprises au cours de ce débat : la plus grande victoire des terroristes serait de nous conduire à renoncer à l'État de droit. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce texte est, en fait, le fruit de la manipulation de l'opinion publique orchestrée par le Gouvernement, qui n'hésite pas à instrumentaliser la peur et à stigmatiser les étrangers dans le but de restreindre toujours un peu plus les libertés et les droits fondamentaux.
En cela, les terroristes ont gagné la première manche dans la lutte qu'ils livrent sans merci contre les démocraties.
Agiter la menace terroriste et multiplier les mesures sécuritaires permet également au Gouvernement de faire oublier à nos concitoyens qu'il ne propose aucune alternative économique ou sociale susceptible d'améliorer leurs conditions de vie.
Que constate-t-on à la lecture de ce texte ?
La vidéosurveillance permettra au mieux d'identifier les auteurs d'actes terroristes, mais aucunement de prévenir leur folie meurtrière. Il en va de même s'agissant des contrôles d'identité, du durcissement des peines d'emprisonnement ou de l'allongement de la durée de garde à vue. Même la disposition relative au gel des avoirs des terroristes, qui pourrait donner l'impression que, en s'attaquant à l'argent des réseaux, on agit sur des points stratégiques, ne va pas assez loin. À cet égard, il est regrettable que nos amendements relatifs au secret bancaire aient été rejetés, alors même que, lorsqu'il était à Bercy, M. Sarkozy attendait ce genre de propositions, dont il était très friand.
Malgré tout, les mesures contenues dans ce texte ont un point commun : elles ne s'appliqueront qu'a posteriori, une fois que l'acte terroriste aura été perpétré et après qu'il aura fait des victimes. Cela nous force à en relativiser la portée et, par conséquent, l'efficacité.
Si nous condamnons fermement le terrorisme - et nous l'avons fait tout au long de ces deux jours de débat -, nous n'en considérons pas moins que, tant que les inégalités économiques et sociales existeront entre les pays riches et les pays pauvres, tant que la mondialisation des marchés financiers servira de support au financement des réseaux terroristes, nous éprouverons de grandes difficultés à éradiquer cette menace.
En tout état de cause, nous n'y parviendrons pas en renonçant à l'esprit de notre État de droit, fondé sur la préservation des libertés individuelles, que ce soit la liberté d'aller et venir ou le respect de la vie privée.
Or c'est pourtant ce à quoi vise le texte que nous propose le Gouvernement. C'est pourquoi notre groupe votera contre.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, les sénateurs socialistes ont pris la décision de voter contre ce projet de loi.
Ils auraient pu faire autrement, et cette décision est le fruit d'une longue réflexion : je veux dire très solennellement que, si l'un quelconque d'entre nous ou d'entre vous avait pu faire, lors des débats, la démonstration que ce texte pouvait prémunir notre patrie d'un seul attentat, nous l'aurions voté.
Sachez donc que c'est pleinement conscients de l'inanité de son contenu que nous avons pris notre décision. Vous n'êtes pas parvenus à nous convaincre du contraire.
Une mesure parmi tant d'autres est particulièrement emblématique du caractère de gesticulation et d'affichage de ce texte : celle qui permet dorénavant de déchoir de la nationalité française quelqu'un qui l'aurait acquise depuis quinze ans, contre dix ans auparavant. Cette mesure n'aura aucun effet concret et technique ! Au fond, elle ne fait que renforcer la suspicion généralisée qui pèse sur tout individu qui n'aurait pas eu le bon goût de devenir Français, à temps et au bon moment.
Peu importe, d'ailleurs, les raisons pour lesquelles il ne l'était pas : ce qui importe, c'est que cette disposition ne stigmatise que ceux qui sont naturalisés. On cherche en vain l'intérêt d'une telle mesure dans la lutte contre le terrorisme !
En l'espèce, M. le ministre nous a demandé d'accepter la mise en place cette disposition avec un champ d'application étendu, afin de mieux pouvoir mieux éloigner ensuite les terroristes que nous capturerions. Eh bien, pour ma part, je ne souhaite pas que l'on éloigne ceux que nous frappons, ceux qui nous auraient menti et qui auraient pris la nationalité française pour mieux nuire à leurs semblables. Au contraire, je souhaite que nous les tenions à notre disposition tout le temps nécessaire pour leur faire payer le prix de ce qu'ils ont fait aux autres et les rendre inoffensifs.
Ce projet de loi contient d'autres exemples tout aussi parlants.
Cette attitude s'inscrit dans l'air du temps, car il faut bien admettre que la France n'est pas seule concernée. Certes, le terrorisme est un phénomène bien réel, mais nos démocraties, de façon surprenante et comme par effet d'aubaine, profitent de la menace terroriste pour mettre en place des mesures contrevenant au régime de libertés publiques qu'elles ont pendant tant d'années rivalisé à mettre en place et dont elles estimaient qu'il reflétait leur identité profonde, par opposition à un tout autre système.
Elles rivalisent à présent pour adopter des dispositions de plus en plus privatives de libertés individuelles. Ce faisant, elles créent une ambiance qui permet en toutes circonstances de substituer à la grande question sociale qui agite le monde les fantasmes de la question ethnique, raciale, sécuritaire, etc. C'est une vieille ruse de l'Histoire...
Voilà le tableau tel qu'il se dessine. Voilà comment notre pays entre à son tour dans l'ère du soupçon généralisé, dans l'ère de la suspicion universelle et de l'exception permanente, à coups de lois nourrissant jour après jour les angoisses dont elles se prévalent ensuite.
On voit ainsi d'éminents collègues, au demeurant brillants cerveaux, nous dire à cette tribune leur surprise du faible nombre d'attentats alors que l'on circule si facilement dans les aéroports. Ainsi, on s'étonne maintenant de ne pas avoir peur ! Voilà donc où nous en sommes parvenus, tant la pression est grande sur les esprits et tant le poison de la méfiance est répandu.
Nous n'avons pas l'intention, si peu que ce soit, d'ignorer cette réalité contenue dans la loi.
Naturellement, nous aurions pu évoquer certains aspects positifs du projet : personne ici n'aura la sottise de dire que ce texte n'aura aucun effet sur la lutte contre le terrorisme, qu'il n'offrira pas, ici ou là, quelque facilité. Ce serait stupide, et totalement exagéré. Mais son économie générale, sa structuration et les liens qui unissent les parties qui le constituent font de ce texte un système dont nous ne voulons pas.
Durant ces deux jours de débat, il n'a pas été question de lutte contre le terrorisme. Il n'a été question que de la meilleure manière d'attribuer à l'autorité judiciaire ce qui était hier du ressort du pouvoir législatif, et d'attribuer à l'autorité administrative ce qui était hier du ressort de l'autorité judiciaire. En définitive, il n'a été question que d'accroître les moyens de coercition pour effrayer les Français et leur faire aimer le contrôle arbitraire.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Humbert.
M. Jean-François Humbert. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ainsi que l'indiquait dans son propos liminaire notre excellent rapporteur, Jean-Patrick Courtois, l'enjeu majeur, pour nous parlementaires, lorsque nous légiférons en matière de lutte contre le terrorisme, est de maintenir fidèlement un cap en gardant à l'esprit le double objectif qui s'impose à nous.
D'une part, il nous faut assumer la responsabilité que nous avons à l'égard de nos concitoyens, en leur garantissant que nos services de police et de gendarmerie peuvent bénéficier de tout l'arsenal technique et technologique nécessaire pour prévenir les actes terroristes.
D'autre part, il nous faut nous assurer que toutes les mesures que nous adoptons préservent les libertés publiques.
Certains pensent que les démocraties, par nature, ne disposent pas des instruments pour lutter contre ces actes les plus abominables et que leur souci de légalité est une faiblesse. D'autres pensent que toute mesure de police administrative est déjà, en soi, un ver dans le fruit de la démocratie. Nous ne nous retrouvons dans aucun de ceux-là et nous considérons que l'honneur du législateur est, justement, de savoir prendre ses responsabilités.
Mes chers collègues, le texte que nous apprêtons à adopter répond à cette double exigence et nous pouvons nous enorgueillir d'améliorer notre droit, qui, en la matière, fait figure d'exemple parmi les grandes démocraties.
Sans doute cela tient-il à notre procédure inquisitoire, particulièrement adaptée puisqu'elle place les magistrats au coeur du dispositif. En effet, ceux de nos partenaires, notamment anglo-saxons, qui disposent d'un système accusatoire ont dû avoir recours à des législations d'exception qui ne nous semblent pas être d'aussi bonne politique.
Nos partenaires nous envient la qualité de nos services de lutte contre le terrorisme et l'efficacité de notre procédure. Pourquoi en rougirions-nous ?
Nous ne comprenons donc pas la position du groupe socialiste en la matière : la législation antiterroriste a, jusqu'à maintenant, toujours fait l'objet d'un consensus entre les grands partis à vocation majoritaire.
Cette volonté de politiser un débat sur lequel nos concitoyens attendent un front uni est regrettable, et les arguments que nous avons entendus depuis hier soir nous semblent particulièrement infondés.
La vidéosurveillance, la densification des sources d'information ne sont rien d'autre que des mesures que les magistrats eux-mêmes nous demandent d'instituer pour assurer leur mission et s'adapter à l'évolution permanente des cellules terroristes.
Aucune de ces dispositions ne soulève de problème d'inconstitutionnalité ! Au demeurant, vous n'avez pas, mes chers collègues, déposé de motion tendant à opposer l'exception d'irrecevabilité sur ce projet de loi.
Ce réveil sourcilleux ne peut que nous interpeller lorsque nous nous souvenons de la loi Vaillant sur la sécurité intérieure, adoptée quelques semaines après la tragédie du 11 septembre.
Souvenons-nous que le gouvernement d'alors s'était assuré auprès de l'opposition qu'elle ne déposerait pas de recours devant le Conseil constitutionnel, tant il craignait que les sages aient à dire ou à redire sur ses propres mesures.
Qu'aurions-nous entendu, aujourd'hui, si c'était notre majorité qui avait proposé la fouille des véhicules, pour ne prendre que cet exemple après le débat que nous avons eu ce matin sur la vidéosurveillance !
D'ailleurs, comment ne pas pointer - pardonnez-moi ce terme - vos quelques incohérences ? Vous reprochez à ce texte d'étendre inutilement, et de manière attentatoire aux libertés publiques, la vidéosurveillance. Pourtant, ce matin, sur l'initiative de notre groupe, le droit attribué aux préfets de prescrire l'installation de tels systèmes pour les exploitants de lieux ouverts au public a été supprimé, précisément afin d'éviter que les autorités de l'État ne s'immiscent dans le domaine privé. Or cette disposition avait été introduite à l'Assemblée nationale par vos collègues députés !
Nos concitoyens seront seuls juges de cette attitude quelque peu polémique. Pour notre part, nous assumerons nos responsabilités face à eux et le groupe de l'UMP votera ce texte tel qu'il ressort de nos travaux. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Fauchon.
M. Pierre Fauchon. Le groupe de l'UC-UDF votera ce texte, pour des raisons similaires à celles qu'ont avancées nos collègues du groupe de l'UMP.
M. Mélenchon disait tout à l'heure que je ne sais quelle mesure serait dans l'air du temps... Ce qui est dans l'air du temps, c'est le terrorisme : ne confondez pas, s'il vous plaît, la cause et l'effet !
Le terrorisme, nous le savons tous, est une forme moderne et insaisissable de la barbarie, qui était totalement imprévisible il y a encore une vingtaine d'années. Il prend aujourd'hui des dimensions invraisemblables qui échappent aux prévisions : des individus isolés, apparemment faibles, presque sans argent et munis d'un simple canif, peuvent provoquer des désastres épouvantables. Il s'agit d'une forme nouvelle de guerre complètement effarante, qui est probablement loin d'avoir dit son dernier mot.
Face à ce terrorisme, il est de salut public de réagir et d'essayer de trouver des solutions pour y remédier. Et, même si je suis de ceux qui estiment que celles qui ont été imaginées ne sont pas parfaites, je considère qu'il faut quand même agir.
Selon nos collègues de l'opposition, les mesures qui nous sont proposées seraient liberticides. Mais que suggèrent-ils pour les remplacer ? Apparemment, rien !
Quoi qu'il en soit, ceux d'entre nous qui ont bien connu les démocraties populaires le savent parfaitement, ce ne sont pas les textes qui sont liberticides, ce sont les pratiques.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Justement !
M. Pierre Fauchon. Ainsi, il m'est arrivé d'observer les institutions et les lois de ces démocraties populaires. D'un point de vue formel, elles étaient apparemment parfaites. Mais leur application, quant à elle, était bien liberticide !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n'est pas une bonne comparaison !
M. Pierre Fauchon. Soyons vigilants sur les pratiques, mais ne sonnons pas le tocsin systématiquement, parce que c'est une activité artificielle, ce n'est rien d'autre qu'un simulacre. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat rit.)
Vous avez beau rire, madame, vous savez mieux que moi à quoi je fais allusion, et cela devrait vous encourager à ne pas parler des libertés, parce que vous êtes bien mal placée pour cela. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat proteste.) Oui, chère amie, il faut finir par dire les choses franchement !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Avez-vous quelque chose à me reprocher ? Je demande des excuses !
M. Pierre Fauchon. Vous avez très bien compris ce que je voulais dire : puisque vous appartenez au groupe communiste, c'est que vous avez quelques affinités avec les régimes communistes, qui n'ont pas été, jusqu'à nouvel ordre, exemplaires en matière de libertés. Vous voulez que je vous le dise ? Je le fais très volontiers ! J'ai déjà eu l'occasion de le dire à Charles Lederman il y a quelques années et, puisque vous le souhaitez, je vous le répète. (Vives protestations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous n'avez rien à me dire à ce sujet ! Heureusement qu'il y a des communistes !
M. Pierre Fauchon. Le second ordre de critiques à l'encontre de ce texte consiste à dire, comme l'a fait Mme Boumediene-Thiery, que l'on n'est pas sûr de son efficacité. Peut-être,... mais il faut bien essayer de faire quelque chose !
Au demeurant, vous n'êtes pas sûrs non plus de l'inefficacité de ces mesures : en vérité, la marge d'incertitude dans ce domaine est très importante. Dans ce cas, et puisque ces affaires sont insaisissables, il faut bien tenter de trouver des solutions.
Les mesures qui nous sont proposées répondent globalement aux préoccupations et aux demandes de ceux qui sont en charge de ces responsabilités et qui mènent ce combat. Nous les avons d'ailleurs rencontrés, et écoutés très attentivement sur tous les aspects de la question. Ils risquent quotidiennement leur vie pour notre salut à tous. Ils méritent donc, à cet égard, qu'on leur témoigne une certaine confiance, notamment lorsqu'ils affirment que certaines mesures leur paraissent souhaitables !
C'est la raison pour laquelle nous voterons ce texte.
En conclusion, chers collègues de l'opposition, je dirai que, comme M. Humbert, je m'interroge sur votre ligne de conduite, qui me paraît assez différente de celle qui a dicté dans le passé la loi à laquelle nous avons fait allusion tout à l'heure, comme elle est différente de celle de vos collègues de l'Assemblée nationale : tout en disant que vous condamnez le terrorisme, vous semblez ne pas le prendre au sérieux.
L'autre explication - mais je ne veux pas imaginer un seul instant cette hypothèse - serait que vous ne prenez pas vos responsabilités au sérieux.
M. Jean-Pierre Sueur. C'est un procès d'intention !
M. Pierre Fauchon. En ce qui nous concerne, nous prenons au sérieux, nous, nos responsabilités, comme nous prenons au sérieux le terrorisme. C'est la raison pour laquelle nous voterons ce texte ! (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Quelle honte !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d'abord remercier la Haute Assemblée dans son ensemble : nous avons eu un débat particulièrement nourri et riche, un débat de qualité, quelles qu'aient été les positions des uns et des autres. Chacun a affirmé avec force sa volonté de lutter contre le terrorisme.
Je remercie la commission des lois, son président, Jean-Jacques Hyest, et son excellent rapporteur, Jean-Patrick Courtois, dont les travaux ont utilement permis d'amender le projet de loi. Je remercie également les sénateurs, qui, sur quelque travée qu'ils siègent, ont fait preuve de leur esprit de responsabilité.
Face à la menace terroriste, nous avons un devoir collectif, celui de doter la France de tous les instruments juridiques nécessaires à la prévention de ces actes et à la répression de leurs auteurs.
Ce devoir est aussi un devoir moral. Je pense en cet instant, madame Borvo Cohen-Seat, aux victimes des attentats terroristes. C'est à eux, en vérité, que ce projet de loi est consacré.
À la différence de ce que nous avons constaté à l'Assemblée nationale, le groupe socialiste a choisi au Sénat de voter contre le projet de loi.
Le parti communiste a au moins un mérite,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est d'avoir défendu les libertés quand d'autres les supprimaient !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. ... c'est d'être constant dans son attitude.
Je regrette la position du groupe socialiste du Sénat, parce que je considère que les partis de gouvernement ont le devoir de faire preuve de responsabilité, et surtout de sens des réalités. Et je rappellerai de nouveau ce que fut l'attitude de l'opposition au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 à New York, dans le cadre du texte de loi proposé par Daniel Vaillant.
M. Jean-Luc Mélenchon. Ce n'est pas pareil !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. L'opposition avait alors adopté à l'unanimité les dispositions proposées par le Gouvernement.
Je le redis, je considère que les partis de gouvernement ont le devoir d'être unis en ces circonstances.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Que représentent les « partis de gouvernement » ? Le quart des électeurs inscrits !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Depuis le 11 septembre 2001, il y a eu Madrid, il y a eu Londres, et un certain nombre d'attentats ont été déjoués. Et, nous ne pouvons pas non plus l'oublier, la France a été cruellement frappée dans le RER en 1995.
Comme M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, le rappelait hier soir à cette même tribune, nous sommes malheureusement dans le cadre d'une guerre sournoise. Une menace constante pèse sur notre pays et nous avons le devoir, à cet instant précis, de nous unir.
Monsieur Sueur, monsieur Mélenchon, vous avez dit que vous regrettiez que le Gouvernement n'ait pas fait preuve de plus d'ouverture dans ce débat. Mais vous savez très bien que les règles du jeu étaient faussées dès le départ ! En effet, un débat interne a eu lieu au sein du groupe socialiste, comme l'a rappelé M. Mélenchon. J'imagine qu'il a été difficile, puisque le président du groupe socialiste au Sénat était favorable, vous le savez, à ce texte.
Nous avons adopté deux amendements proposés par le groupe socialiste, qui se sont ajoutés aux quatre amendements qui ont été adoptés à l'Assemblée nationale et qui émanaient également du groupe socialiste.
Il en est ainsi, notamment, de la prolongation de la garde à vue et de la présence du juge des libertés, ou encore de la mise en place de la commission départementale chargée de la vidéosurveillance. Alors que ce dispositif de vidéosurveillance avait été vivement dénoncé, l'attitude du groupe socialiste a conduit à renforcer son poids dans le texte.
Il en est ainsi, surtout, de l'amendement sur la commission du renseignement : M. le ministre de l'intérieur s'est engagé à mettre en place un groupe de travail au sein duquel chacun sera associé et dont les conclusions seront rendues le 15 février. Ces travaux devraient déboucher sur une proposition ou sur un projet de loi permettant de mettre en place cette commission.
En réalité, votre décision était prise à l'avance. L'ouverture était difficile à pratiquer dans ce débat dès lors que, contrairement à l'attitude du groupe socialiste à l'Assemblée nationale, vous n'avez présenté, d'entrée de jeu, que des amendements de suppression de dispositions et d'articles. La messe était dite ! Vous ne pouvez donc pas nous dire, monsieur Sueur, que vous auriez souhaité que ce débat prenne une autre tournure.
Je note d'ailleurs qu'un certain nombre de sénateurs du groupe socialiste, en désaccord avec vous, ont fait le choix de ne pas être présents en séance et de ne pas participer à ce débat. Je souhaite leur rendre hommage !
M. Jean-Pierre Sueur. C'est un procès ! De qui parlez-vous ?
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Monsieur Mélenchon, vous dites que les propositions faites par le Gouvernement pour renforcer les dispositions visant à lutter contre le terrorisme n'auraient d'autre but que d'effrayer les Français. Mais ce qui effraie les Français, c'est la barbarie sourde et aveugle qui a frappé et qui menace de nous frapper au quotidien !
N'oubliez pas que vingt-huit personnes ont été interpellées depuis lundi à Clichy-sous-Bois, qu'un stock d'armes et de munitions a été démantelé la nuit dernière !
M. Jean-Luc Mélenchon. Sans votre loi !
M. Jean-Pierre Sueur. Sans votre loi !
M. Jean-Luc Mélenchon. Sans votre loi !
M. Jean-Luc Mélenchon. Sans votre loi !
M. Jean-Luc Mélenchon. Sans votre loi !
M. Jean-Luc Mélenchon. Sans votre loi !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. ... une kalachnikov, deux revolvers, un pistolet automatique, un lot de munitions, une tenue complète de gendarme, plusieurs combinaisons d'intervention de couleur noire, des cagoules, deux gilets pare-balles, une motocyclette, j'en passe et des meilleures !
Ce que la DST a découvert la nuit dernière, ce stock d'armes et de munitions, effraie bien plus les Français que le projet de loi que vous propose le Gouvernement !
M. Jean-Luc Mélenchon. A découvert sans votre loi, qui n'a servi à rien en l'occurrence !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce texte n'est pas nécessaire ! Vous en faites la démonstration !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Ce texte, au contraire, les rassure.
Je veux d'ailleurs préciser que le rôle de ce groupe dans la répartition du travail terroriste international consistait à financer la cause pour commettre des attentats terroristes. Ce groupe entretenait des liens indirects avec Al-Zarkaoui, le représentant d'Al-Qaida en Irak, mais aussi des liens directs avec de nombreux autres groupes, tels que le groupe de Francfort, qui avait projeté des attentats en 2000, ou encore celui de Safe Bourada, chef présumé d'une cellule soupçonnée de préparer des attentats et qui a été démantelée fin septembre.
M. Jean-Luc Mélenchon. La DST a bien travaillé !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Bravo la DST ! Vous n'avez rien démontré !
M. Christian Estrosi, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, tout cela est porté à la connaissance des Françaises et des Français, et cela les effraie. Ils ont donc des exigences envers le Gouvernement, comme envers l'ensemble de la représentation nationale.
C'est pourquoi je forme le voeu que le groupe socialiste du Sénat se ressaisisse et privilégie, lors de la commission mixte paritaire, une approche plus constructive, à l'identique de celle du groupe socialiste de l'Assemblée nationale.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, en proposant à la représentation nationale d'adopter ce projet de loi, Nicolas Sarkozy vous demande, avec l'ensemble du Gouvernement, les moyens de mieux garantir le droit à la sécurité dans le respect des libertés, conformément à l'attente des Français. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public, émanant l'une du groupe socialiste, l'autre du groupe UMP.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 65 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 325 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 163 |
Pour l'adoption | 203 |
Contre | 122 |
Le Sénat a adopté.