Mme la présidente. L'amendement n° I-266, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I -Dans le premier alinéa du 1 de l'article 238 bis du code général des impôts, le taux : « 5 pour mille» est remplacé par le taux : « 5 pour cent ».
II - Les pertes de recettes résultant éventuellement, pour l'Etat, de l'application du I du présent article sont compensées, à due concurrence, par un relèvement des droits visés à l'article 150 V bis du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.
M. Jean-Jacques Jégou. Madame la présidente, je vais défendre cet amendement déposé notamment par Mme Morin-Desailly, qui est très impliquée dans le domaine du cinéma.
Si nous pouvons être fiers de notre cinéma et de notre production audiovisuelle, qui sont les seuls de cette qualité en Europe, il ne faut pas mésestimer aujourd'hui les difficultés et les menaces qui pèsent sur ce secteur. Je pense, en particulier, au secteur du court métrage, particulièrement fragile, et à celui des industries techniques du cinéma et de l'audiovisuel, qui connaissent des difficultés spécifiques.
S'agissant du court métrage, et alors que le ministre de la culture et de la communication a jugé utile le lancement d'un plan d'urgence, il est nécessaire de rechercher les moyens d'un financement pérenne pour cette catégorie de films. Le risque est que l'effort financier ne repose que sur les collectivités territoriales.
Il convient donc de soutenir le projet des industries techniques du cinéma et de créer une fondation du court métrage pouvant bénéficier de dispositions fiscales favorables, compte tenu des actions de mécénat réalisées par ces industries dans ce domaine.
Tel est l'objet du présent amendement, qui porte sur l'adaptation du régime du mécénat aux petites entreprises, notamment aux industries techniques. Nous proposons donc de porter la limite de 5 ? du chiffre d'affaires appliquée aux dons admis au bénéfice de la réduction d'impôt sur les sociétés pour les actions de mécénat des entreprises à 5 %, cet aménagement aidant les entreprises, mais surtout la production de courts métrages, par conséquent l'intermittence en région. Cette proposition complèterait fort justement les aides régionales et serait d'une grande portée locale.
La limite de 5 ? susvisée pénalise les petites entreprises, en raison à la fois de la faiblesse de leur chiffre d'affaires et de sa variabilité souvent forte d'une année à l'autre.
A titre d'exemple, le mécénat des industries techniques en faveur de la production cinématographique, du court métrage en particulier, ne peut profiter qu'à la marge des effets de la loi en faveur du mécénat du fait de la faiblesse relative de leur chiffre d'affaires et de l'importance de leurs apports à ce secteur.
Par cet amendement, il est donc proposé d'améliorer ce plafond et de le porter à 5 % du chiffre d'affaires. Cette mesure aurait une portée générale, mais serait peu coûteuse dans la mesure où, à l'exception des très petites entreprises, le plafond actuel de 5 ? est rarement atteint.
Par ailleurs, Mme Morin-Desailly a pris comme gage une augmentation de relèvement des droits sur les métaux précieux.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Gage fragile !
M. Jean-Jacques Jégou. Certes, j'en conviens, monsieur le rapporteur général, mais la commission des finances pourrait peut-être déposer un sous-amendement afin d'apporter une aide au cinéma français.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Comment ne pas être sensible, mon cher collègue, à votre appel en faveur du cinéma français ?
Je partage tout à fait votre point de vue. Certes, le plafond actuel m'apparaît un peu bas. Cela dit, passer de 5 ? à 5 % est un bond un peu excessif. Une proposition intermédiaire me conviendrait mieux. Fixer l'actuel taux de 5? à 10?, c'est-à-dire 1 %, serait une solution transactionnelle qui répondrait au souci de ces professions, satisferait M. Jégou et permettrait de faire avancer le débat.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Pour tout dire, cet amendement me laisse sceptique, la plafond actuel de 5 ? étant rarement atteint. J'avoue ne pas être sûr que le remède que vous proposez pour amplifier le mouvement, qui consisterait à l'abaisser à 5 %, aurait l'effet escompté.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cela ne coûterait pas grand-chose !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Ce n'est pas tant un problème de coût qu'un problème d'efficacité. Je ne suis pas certain que la question se résume à un niveau de plafond. Il vaudrait peut-être mieux avoir une démarche plus ouverte.
En tout état de cause, à ce stade, je n'ai pas l'impression que votre formule soit la bonne. Il conviendrait, selon moi, d'engager une réflexion plus globale sur la question de la dépense en matière de mécénat. Ce sujet est en effet mal appréhendé en France, mal connu, mal assumé. Mais commencer par modifier le seuil ne me paraît pas de bonne méthode ; une approche globale serait préférable.
Je veux bien réfléchir sur ce sujet avec vous, monsieur Jégou. Cependant, comme il me semble que vous regardez le problème par le petit bout de la lorgnette, je vous suggère de retirer cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Jégou, l'amendement n° I-266 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Jégou. Je suis un peu gêné, n'étant pas un spécialiste de ces matières et m'exprimant au nom de mon groupe, mais j'ai cru comprendre que Mme Morin-Desailly s'était entretenue de ce sujet avec M. le ministre de la culture.
Elle reconnaît elle-même, d'ailleurs, à la fin de son argumentaire, que les 5 ? sont rarement atteints.
Je ne veux pas, à cette heure, retarder le débat. Peut-être se rapprochera-t-elle de vous, monsieur le ministre. En attendant, je retire cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° I-266 est retiré.
L'amendement n° I-294, présenté par M. Adnot, est ainsi libellé :
Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 21 de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de l'économie est ainsi modifié :
1° Le I est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 3° 25 % du montant des sommes versées au titre des souscriptions en numéraire réalisées entre le 1er janvier et le 31 décembre 2006 au capital des petites entreprises innovantes définies au II ou dans des parts de fonds commun de placement dans l'innovation mentionnés au I de l'article L. 214-41 du code monétaire et financier. » ;
2° Dans le IV, après les mots « des dispositions du 2° », sont insérés les mots « et du 3° » ;
3° Après le IX, est inséré un IX bis ainsi rédigé :
« IX bis. - La réduction d'impôt mentionnée au 3° s'impute, dans les conditions prévues au VIII, sur l'impôt sur les sociétés dû au titre du premier exercice clos à compter du 31 décembre 2006, dans la limite de 2,5 % du montant de l'impôt dû au titre du dernier exercice clos avant le 1er janvier 2006. » ;
4° Dans le XIV, les mots « ou au 2° » sont remplacés par les mots «, au 2° ou au 3° »
II. - La perte de recettes pour le budget de l'État résultant du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Article additionnel avant l'article 16
Mme la présidente. L'amendement n° I-71, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le 6° bis de l'article 207 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° Les établissements et services accueillant des personnes âgées ou des personnes handicapées, au sens des 6° et 7° de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, habilités à l'aide sociale et conventionnés avec l'assurance maladie ».
II. - Les droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts sont relevés à due concurrence.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Nous avons déposé différents amendements tendant à insérer des articles additionnels avant ou après les articles 20 ter et 25, portant sur les règles fiscales applicables aux maisons de retraite. Il s'agit en effet de mettre en cohérence l'ensemble de ces dispositions.
L'assujettissement de ces établissements à la TVA, même à taux réduit, pour certaines de leurs prestations, risque de faire d'eux des assujettis potentiels à l'impôt sur les sociétés.
En effet, en vertu de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2003, mise en oeuvre depuis le 1er janvier 2004, l'application de l'article 279 du code des impôts pourrait conduire à un assujettissement massif d'établissements financés principalement par l'État et les départements, voire par l'assurance maladie.
Pour prévenir cette éventualité, et dans le souci d'une stricte application des textes, nous proposons, par cet amendement, d'exonérer expressément ce type d'établissements de l'impôt sur les sociétés en les ajoutant à l'article 207 du code des impôts, aux termes duquel est prévu ce type d'exonération.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission n'est pas convaincue. En effet, de deux choses l'une : ou bien l'on est en présence d'établissements à but lucratif soumis à l'impôt sur les sociétés, ou bien l'on est en présence d'établissements sous forme associative, par exemple, et qui n'ont pas vocation à être assujettis à l'impôt sur les sociétés. Nous comprenons mal ce que peuvent être des établissements associatifs ou rattachés à une collectivité qui travailleraient en milieu concurrentiel.
Il nous semble que le droit fiscal actuel est correct, les établissements à but non lucratif y étant bien distingués des autres. Les établissements à but non lucratif ne sont pas assujettis à l'impôt sur les sociétés.
Notre avis est a priori défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Par cet amendement, nous souhaitions relayer auprès de vous, monsieur le rapporteur général, les questions que nombre d'établissements nous ont posées, établissements qui, suite à la modification des textes intervenue au 1er janvier 2004, se trouvent assujettis à la TVA pour certaines de leurs prestations et, donc, confrontés à des difficultés financières.
J'ai bien entendu votre remarque, mais j'aimerais malgré tout qu'une investigation plus complète soit menée sur ce sujet.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. La circulaire Sauter, qui vise à préciser le régime fiscal des associations, doit apporter la réponse : s'il y a doute sur la nature des activités, si, dans une association, une fraction d'activité est quasi commerciale ou, en tout cas, s'exerce de manière concurrentielle, les impôts commerciaux sont applicables, que ce soit la taxe professionnelle, l'impôt sur les sociétés ou la TVA. On prend donc en compte un secteur d'activité distinct pour les activités qui répondent à cette description, le reste étant exonéré des impôts commerciaux.
Logiquement, les cas de figure dont vous faites état doivent se prêter à cette analyse. S'il y a dualité d'activité, le double secteur fiscal est possible.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° I-71.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 16
Après l'article 238 bis-0 I du code général des impôts, il est inséré un article 238 bis-0 J ainsi rédigé :
« Art. 238 bis-0 J. - I. - Les produits provenant du placement de la fraction des sommes reçues lors de l'émission de valeurs mobilières relevant des dispositions de l'article L. 228-97 du code de commerce transférée hors de France à une personne ou une entité, directement ou indirectement, par l'entreprise émettrice ou par l'intermédiaire d'un tiers, sont compris dans le résultat imposable de cette entreprise au titre du premier exercice clos à compter du 31 décembre 2005 ou, s'il est postérieur, de l'exercice clos au cours de la quinzième année qui suit la date d'émission, sous déduction des intérêts déjà imposés sur cette même fraction au cours des exercices antérieurs. Pour l'application de ces dispositions, le montant de ces produits est réputé égal au montant nominal de l'émission sous déduction de la fraction transférée hors de France.
« Par exception aux dispositions du premier alinéa, cette imposition est différée au titre de l'exercice au cours duquel ces valeurs mobilières donnent lieu au paiement d'un montant d'intérêts effectif inférieur au produit du montant nominal de l'émission par le taux d'intérêt légal si cet exercice est postérieur à l'exercice clos au cours de la quinzième année qui suit la date d'émission.
« II. - Les dispositions du I s'appliquent aux émissions de valeurs mobilières réalisées entre le 1er janvier 1988 et le 31 décembre 1991 ainsi qu'aux émissions réalisées en 1992 sous réserve que les produits mentionnés au I n'aient pas été imposés sur le fondement de l'article 238 bis-0 I, et dont les dettes corrélatives sont inscrites au bilan d'ouverture du premier exercice clos à compter du 31 décembre 2005 de l'entreprise émettrice. »
M. le président. L'amendement n° I-311, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. Dans le premier et le deuxième alinéa de cet article, remplacer (deux fois) la référence :
238 bis O-J
par la référence :
238 bis O-I bis
II. Après les mots :
même fraction
rédiger ainsi la fin de la première phrase du premier alinéa (I) du texte proposé par cet article pour l'article 238 bis-O-J du code général des impôts :
postérieurement à la date du douzième anniversaire de l'émission.
III. Rédiger ainsi la seconde phrase du premier alinéa (I) du texte proposé par cet article pour l'article 238 bis-O-J du code général des impôts :
Pour l'application des dispositions de la phrase précédente, le montant de ces produits est réputé égal à la différence entre le montant nominal de l'émission et la fraction transférée hors de France majorée des intérêts capitalisés, jusqu'à ce douzième anniversaire, calculés au taux d'intérêt actuariel défini au deuxième alinéa du 2 du II de l'article 238 septies E à la date du transfert.
IV. Compléter le I du texte proposé par cet article pour l'article 238 bis-O-J du code général des impôts par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de rachat des valeurs mobilières postérieurement à l'exercice d'imposition défini au premier ou deuxième alinéa, l'annulation de cette dette n'entraîne pas d'imposition supplémentaire.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je me bornerai à indiquer, à cette heure tardive, que cet amendement vise à approuver le dispositif qui nous est soumis par le Gouvernement pour traiter de la question complexe, mais un peu en déshérence, des anciennes émissions de titres subordonnées à durée indéterminée reconditionnée.
Vous trouverez tous les détails mes chers collègues, dans mon rapport écrit, y compris la référence à l'époque pas si ancienne du « ni-ni », qui a conduit des entreprises publiques à rechercher des modalités d'émission de quasi-fonds propres - M. Karoutchi semble approuver - qui ne pouvaient pas être des émissions de capital, mais qui devaient demeurer des succédanés d'émissions de capital.
Ces montages spécifiques et complexes qui, pour une partie, transitaient par des territoires off shore, étaient assortis d'un dispositif fiscal lui-même non moins complexe, qui était réglé par des lettres de la direction de la législation fiscale.
Ce mécanisme a fonctionné jusqu'à la fin de l'année 1992, une disposition législative ayant alors été insérée dans une loi de finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Rectificative !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le rapporteur général de la commission des finances du Sénat de l'époque, M. Jean Arthuis, avait bien vu la chose et en avait souligné les aspects assez contestables.
Par la suite, et compte tenu de cette disposition législative, ces pratiques se sont poursuivies sur le stock existant d'émissions mais aucune autre n'a été réalisée.
Aujourd'hui, il faut sortir de ce dispositif vraiment hors normes. C'est ce que nous propose le Gouvernement.
Le présent amendement se situe donc exactement dans cette ligne : il faut apurer les comptes du passé. Il tend cependant à opérer quelques modifications de nature à améliorer la sécurité juridique des solutions ainsi trouvées sans pour autant diminuer le rendement budgétaire de la mesure.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. J'ai quelque peine à dissimuler mon émotion. Je me souviens en effet de la loi de finances rectificative pour l'année 1992. C'était l'époque du « ni-ni » et, l'État étant déjà impécunieux, on avait recours à des opérations parfaitement scandaleuses qui consistaient à monter des souscriptions de TSDI, à savoir de titres subordonnés à durée indéterminée, et à les « repackager » dans des paradis fiscaux.
L'État faisait preuve d'une gestion douteuse, se livrant lui-même à des démarches parfaitement illégales, mais il fallait couvrir cela d'un voile de légalité formelle. Cela avait fait l'objet d'une délibération d'un article comme on en insère quelquefois dans les lois de finances rectificative.
Qu'il soit mis fin à ces pratiques est pour moi un soulagement. Je tiens à féliciter le Gouvernement pour cette initiative.
M. le président. Je mets aux voix l'article 16, modifié.
(L'article 16 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 16
M. le président. L'amendement n° I-37, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le IV de l'article 219 du code général des impôts, après les mots : « de l'article 223 F et », sont insérés les mots : « à 26,5 % en ce qui concerne les plus values imposables en application ».
La parole est à Jean-Pierre Demerliat.
M. Jean-Pierre Demerliat. La réforme du régime fiscal des sociétés foncières a été introduite, subrepticement et en étroite collaboration avec les professionnels concernés, à l'occasion de l'examen au Sénat de la loi de finances pour 2003.
Elle a été justifiée, à l'époque, d'une part, par des considérations budgétaires de court terme, et, d'autre part, par la nécessité de soutenir l'activité du secteur immobilier locatif et de développer les marchés financiers français en créant, en quelque sorte, des « champions » français du secteur.
Elle consistait, en réalité, en un allégement très important de la fiscalité pesant sur les opérations immobilières réalisées par ces sociétés et a contribué, de ce fait, à déclencher de nouvelles opérations spéculatives sur l'immobilier.
Ces opérations ont en effet contribué à déclencher une vague de ventes à la découpe dont les conséquences sociales négatives sur la mixité sociale sont désormais avérées. Le phénomène a d'ailleurs atteint une telle ampleur que la majorité parlementaire est désormais contrainte de légiférer pour, en quelque sorte, tenter d'éteindre un incendie qu'elle a elle-même allumé !
Trois ans après cette réforme, un bilan s'impose : force est de constater qu'elle a échoué à développer le marché immobilier au bénéfice des entreprises françaises, puisque, en moins d'un an, quatre sociétés foncières françaises parmi les plus importantes auront été absorbées, dont trois par des étrangers.
En matière de patriotisme économique, la réforme constitue donc un contre-exemple de ce que le Premier ministre préconise, puisqu'elle a artificiellement gonflé les comptes des sociétés foncières françaises et les a rendues ainsi plus appétissantes pour les fonds étrangers.
En revanche, la réforme a produit des effets massifs et déstabilisants sur le marché de l'immobilier en raison de la spéculation qui s'en est suivie. Ainsi, l'indice boursier des sociétés foncières a quasiment doublé depuis la fin de l'année 2003, leur statut fiscal accommodant ayant dopé les perspectives de croissance des groupes et augmenté les dividendes des actionnaires.
Aujourd'hui, la flambée des prix a atteint un tel niveau que la Banque de France met régulièrement en garde les acteurs du marché de l'immobilier.
Il est donc temps d'utiliser l'outil fiscal afin de tempérer la frénésie des acteurs et de stabiliser le marché avant que ne se produise un éclatement de la bulle spéculative.
Vu la situation, nous proposons de mettre fin au régime fiscal particulièrement « accommodant » dont bénéficient les sociétés foncières, en relevant de 16,5 % à 26,5 % le taux d'imposition des bénéfices de ces sociétés.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est tout à fait défavorable à cet amendement.
Nous avions en effet initié la réforme du régime fiscal des sociétés foncières, qui vient d'être critiquée. Or, il s'agit d'une bonne réforme, qui a dynamisé le secteur, créé de l'activité économique et rapporté au budget de l'État des sommes plus importantes que prévu, notamment grâce à l'exit tax.
Des foncières françaises ont effectivement été absorbées par d'autres sociétés, mais il s'en est également créé de nouvelles - et il s'en est même créé bien davantage !
Je continue donc de considérer cette réforme comme un véritable processus « gagnant-gagnant », qui a réellement fait ses preuves.
J'ajoute que, contrairement à ce que certains commentaires avaient laissé entendre ces derniers mois, il n'y a pas de rapport évident, en tout cas démontré ou significatif, entre la réforme du régime des foncières cotées et le développement du phénomène dit des ventes « à la découpe » dans Paris.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est un amalgame qu'il convient absolument d'éviter.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Nous soutenons totalement l'amendement n° I-37 et nous partageons l'analyse de nos collègues du groupe socialiste quant à l'effet néfaste de la réforme du régime fiscal des sociétés foncières.
M. le rapporteur général nous dit que cette réforme n'a eu aucun effet sur le développement du processus de la vente à la découpe. Nous ne portons absolument pas le même jugement.
Cette question avait d'ailleurs été abordée ici par la présidente de notre groupe à l'occasion d'un précédent débat.
Nous savons d'ailleurs que certaines sociétés, par l'intermédiaire de ce dispositif, ont économisé bien plus que ce que vous attendiez, monsieur le rapporteur général, en termes de résultats financiers pour le budget de l'État. Il faut regarder la réalité en face !
Par conséquent, nous soutenons cet amendement et nous aurions même pu, me semble-t-il, aller plus loin.
Mme la présidente. L'amendement n° I-59 rectifié bis, présenté par MM. Legendre, Fournier, Émin, Duvernois, Haenel, de Broissia, Karoutchi et Carle, est ainsi libellé :
Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les entreprises qui engagent des frais pour l'enseignement du français dispensé au profit des membres non francophones du personnel de leurs établissements stables et de leurs filiales détenues à 50 % et plus, situés hors de France dans des pays ayant signé une convention fiscale avec la France, bénéficient d'un crédit d'impôt déterminé dans les conditions suivantes.
Pour que les frais soient éligibles à ce crédit d'impôt, l'enseignement délivré doit remplir des critères de qualité attestés par la délivrance d'un agrément. Un arrêté conjoint du ministre chargé de l'éducation nationale et du ministre chargé de la francophonie définit les critères en cause et les conditions de délivrance de l'agrément.
Les frais ne sont retenus par année que dans la limite de 1 500 euros par personne pour un nombre de bénéficiaires de l'enseignement au plus égal à 2 % de l'effectif de l'entité étrangère plafonnés à 100 personnes, étant précisé que, pour les entités de moins de 50 personnes, il est admis la prise en compte des frais d'enseignement pour une personne. La somme de 1 500 euros est actualisée chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu.
Le crédit d'impôt est égal à 90 % des frais tels que définis ci-dessus. Ce crédit d'impôt est imputable sur le montant de l'impôt sur les sociétés. Il peut être reporté sur 3 ans, mais n'est pas restituable.
Le présent dispositif est applicable aux frais engagés à compter du 1er janvier 2006.
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés à l'article 150 V bis du code général des impôts.
La parole est à M. Louis Duvernois.
M. Louis Duvernois. Tout le monde est conscient du fait que le français est une langue, sinon menacée, du moins insuffisamment enseignée ou pratiquée dans le monde.
Son exclusion de facto des diverses organisations internationales - je pense notamment à l'Organisation des nations unies, à l'Organisation de coopération et de développement économiques, et même à l'Union européenne -, sans même évoquer les institutions sportives, au profit de la langue anglaise, est patente.
À l'inverse, les entreprises françaises ont su s'internationaliser et ont une présence très forte hors de France, sous la forme de filiales ou de succursales.
Il semble donc essentiel de faire progresser, par le biais de cette expansion économique internationale, l'enseignement et donc la pratique du français auprès des membres non francophones du personnel des entités étrangères de ces groupes.
Cela étant dit, les entreprises locales, établissements stables ou filiales, ne sont pas suffisamment motivées pour engager des frais à cet égard.
Cet amendement vise précisément à lever l'obstacle « fiscalo-financier ». Cela paraît constituer un préalable, afin de supprimer le prétexte du coût pour ne pas engager la dépense. Cette suppression doit, compte tenu des obstacles, être totale.
En autorisant une déduction, par des sociétés françaises, de dépenses faites hors de France au profit de collaborateurs d'entités non taxables en France, il est clair que l'on crée une exception aux principes fiscaux, notamment à celui de la territorialité.
Toute la question est donc de savoir si, comme nous le pensons, l'enjeu vaut cette exception. Notons, d'ores et déjà, que celle-ci est tout à fait spécifique et peu susceptible de créer un précédent contagieux pour d'autres dépenses.
Cela étant, il ne s'agit pas d'instituer un guichet ouvert, sans contrôle de pertinence ni limite budgétaire.
C'est pourquoi l'enseignement déductible doit répondre à des critères de qualité attestés par un agrément préalable, qui pourrait, sous le contrôle du ministère de l'éducation nationale et du ministère chargé de la francophonie, être délivré par les écoles françaises locales, les attachés culturels, voire le réseau de l'Alliance française.
En outre, les frais ne doivent être déductibles fiscalement que dans certaines limites. C'est pourquoi cet amendement tend à créer un plafond annuel pour les dépenses d'enseignement par personne et un nombre maximum de bénéficiaires par entité. Les chiffres retenus paraissent très raisonnables : 1 500 euros par personne pour un nombre de bénéficiaires au plus égal à 2 % du total de l'effectif de l'entité, et ce dans la limite de cent personnes par entité.
De ce point de vue, il est clair que la population effectivement ciblée est prioritairement celle des cadres locaux.
Enfin, la couverture du coût n'est pas tout à fait totale, puisque le crédit d'impôt est de 90 % des frais. Il reste donc un coût résiduel. Dès lors, la question se pose de savoir si l'on doit en rester là ou aller plus loin. Un coût modeste effectif peut paraître sain et souhaitable ; il ne faudrait pas qu'il détourne les entreprises du dispositif.
En effet, tout le pari de réussite de cette opération réside dans l'espoir que, grâce à la prise en charge des frais - ou de l'essentiel de ceux-ci -, il sera difficile pour les entreprises de refuser de proposer ce type d'enseignement. Le dispositif retenu permettra d'en faire la promotion et, le cas échéant, de procéder sans hésitation à des « piqûres de rappel » auprès de ces entreprises.
La dépense fiscale devrait donc, en définitive, être modérée. En effet, si 5 000 personnes suivaient un enseignement de français, le coût fiscal n'atteindrait que 6 750 000 euros.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous sommes tous très attachés à la langue française et plusieurs ici sont très investis dans le mouvement de la francophonie, en particulier au sein de l'Assemblée des parlementaires de la francophonie.
Par conséquent, l'objectif est à la fois éminemment important et sympathique.
Cela dit, la méthode préconisée est-elle la bonne ? M. Louis Duvernois a montré que si 5 000 personnes étaient concernées au sein des entreprises, cela représenterait un coût fiscal de 6 750 000 euros.
Cette somme n'est pas négligeable, mais M. Duvernois a rappelé que, selon l'amendement, une limite de 1 500 euros serait fixée par personne.
Or, pour un grand groupe avec des enjeux financiers considérables, les montants que nous évoquons sont-ils réellement incitatifs et attractifs ? S'agit-il d'un réel levier économique, à l'échelle du pouvoir de décision, dans un grand groupe implanté dans de nombreux Etats du monde ? Très sincèrement, j'ai de la peine à le croire.
Le dispositif est, me semble-t-il, complexe et risque de ne pas avoir tout l'impact que nous pourrions souhaiter. Je crois cependant qu'il y a d'autres façons d'oeuvrer en faveur de la francophonie.
Dès lors, faut-il se situer sur le terrain fiscal, à travers ce type de méthodes ? À cette heure relativement tardive (Sourires), j'aurai de la peine à improviser une autre solution. Je pense toutefois que nous devons la rechercher, mon cher collègue.
Dans l'immédiat, après nous avoir sensibilisés à ce sujet, il serait souhaitable que vous retiriez cet amendement, monsieur Duvernois.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je partage, comme c'est très souvent le cas, l'avis de M. le rapporteur général.
Comme vous le savez, monsieur le sénateur, nous sommes tous très engagés dans le combat en faveur de la francophonie.
Ainsi, j'ai eu l'occasion à de nombreuses reprises de rappeler ici même devant les sénateurs représentant les Français de l'étranger combien nous étions mobilisés en faveur de la diffusion de notre langue partout dans le monde.
Cependant, chacun peut le constater, la fiscalité n'est pas le meilleur outil pour ce faire. Il y en a sans doute beaucoup d'autres. Je pense notamment aux actions que nous menons en matière culturelle, économique, voire, naturellement, en matière politique.
Nous aurons probablement bien d'autres occasions de nous retrouver sur ces sujets, mais il est vrai que, dans l'immédiat, je vous invite à retirer votre amendement, monsieur le sénateur.
Mme la présidente. L'amendement n° I-59 rectifié bis est-il maintenu, monsieur Duvernois ?
M. Louis Duvernois. Je comprends parfaitement le point de vue qui vient d'être exprimé.
La fiscalité n'est certes peut-être pas le meilleur moyen pour promouvoir la francophonie, mais c'en est tout de même un parmi d'autres.
En fait, à travers cet amendement, nous voulions lancer un message à l'occasion de ce débat budgétaire. (M. le ministre acquiesce.)
Par conséquent, même si je le regrette, je me rallie, par fidélité, au Gouvernement (Sourires) et je retire mon amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° I-59 rectifié bis est retiré.
La suite de la discussion de ce projet de loi est renvoyée au lundi 28 novembre 2005.