Article 2 quater
I. - Dans la première phrase du 3 de l'article 200 du code général des impôts, les mots : « par chèque, à titre définitif et sans contrepartie » sont remplacés par les mots : « à titre définitif et sans contrepartie, soit par chèque, soit par virement, prélèvement automatique ou carte bancaire ».
II. - 1. Le troisième alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral est complété par les mots : «, virement, prélèvement automatique ou carte bancaire ».
2. A la fin du quatrième alinéa de l'article 11-4 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique, les mots : « par chèque » sont remplacés par les mots : « à titre définitif et sans contrepartie, soit par chèque, soit par virement, prélèvement automatique ou carte bancaire ». - (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 2 quater
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-259, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé:
I - L'article 83 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Les cotisations versées au titre d'un contrat individuel d'assurance dépendance.
« Les cotisations versées mentionnées à l'alinéa précédent sont déductibles dans la limite d'un plafond égal à 4 % du plafond annuel mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale. »
II. - La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-260, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L'article 83 du code général des impôts est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« ...° Les cotisations versées au titre des contrats individuels d'assurance dépendance pour le bénéfice d'un ascendant par son descendant en ligne directe jusqu'au deuxième degré.
« Les cotisations versées mentionnées à l'alinéa précédent sont déductibles dans la limite d'un plafond égal à 4 % du plafond annuel mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale. »
II. La perte de recettes pour l'Etat résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Ces amendements ne sont pas défendus.
L'amendement n° I-270, présenté par M. Badré et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I - Après l'article 163 quatervicies du code général des impôts, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Les cotisations ou primes versées à titre individuel et facultatif, par chaque membre du foyer fiscal à des contrats d'assurance dépendance, sont déductibles du revenu net global, dans une limite annuelle égale à trois 3 % du montant annuel du plafond mentionné à l'article L. 241-3 du code de la sécurité sociale ».
II - La perte de recettes résultant de l'application du I ci-dessus est compensée à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits fixés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Denis Badré.
M. Denis Badré. Nous quittons maintenant le monde rural pour en revenir à des problèmes de société plus généraux, plus précisément à la dépendance : à ce titre, notre amendement s'inscrit dans le prolongement de la journée mondiale de lutte contre la maladie d'Alzheimer.
La récente réforme des retraites a prévu certains mécanismes d'incitation d'ordre financier, mais aucun, à l'exclusion des contrats de prévoyance obligatoires de groupe, ne concerne la dépendance des personnes âgées.
L'objet de cet amendement est d'étendre au droit fiscal le principe fixé par la circulaire du 25 août 2005, afin d'exclure de l'assiette des cotisations sociales les contributions finançant des prestations supplémentaires de prévoyance dans le cadre de contrats collectifs souscrits pour faire face à un état éventuel de dépendance.
Il serait ainsi possible de déduire de l'impôt sur le revenu les cotisations ou primes versées pour les contrats individuels et facultatifs de prévoyance relatifs à la dépendance, au bénéfice de mécanismes de prévention de la dépendance, au premier rang desquels figure la prévention des conséquences de la maladie d'Alzheimer.
M. Jean-Jacques Jégou. Il y en a sans doute pour un milliard d'euros !
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission rappelle que l'assurance dépendance doit, à l'évidence, être encouragée. Nous avons en effet pris conscience de l'augmentation des besoins ainsi que des difficultés éprouvées par les compagnies d'assurance pour couvrir un risque encore assez largement méconnu.
Pour autant, au regard de ce qui existe déjà, la commission s'interroge sur l'opportunité de la création d'un dispositif spécifique.
Je rappelle que les contrats collectifs d'assurance dépendance bénéficient déjà d'exonérations de cotisations sociales, dans les limites prévues par la législation. Par ailleurs, les contrats individuels, qui sont ici visés, donnent déjà lieu à des incitations fiscales, notamment la possibilité d'une exonération de la taxe sur les conventions d'assurance.
Pour ce qui est de l'APA, l'allocation personnalisée d'autonomie, les rentes viagères qui peuvent en résulter ne sont pas prises en compte dans le calcul des revenus de l'intéressé, sous réserve, bien entendu, de satisfaire à certaines conditions.
Par conséquent, la définition fiscale de la dépendance soulève encore de multiples questions.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, la commission n'a pas été convaincue par cet amendement et en sollicite le retrait.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Le Gouvernement partage l'avis défavorable de la commission des finances. Même si l'idée est séduisante, l'adoption de l'amendement poserait un certain nombre de problèmes en termes d'articulation avec les dispositifs existants. En outre, l'attribution d'une aide au moment de la constitution de la rente nous conduirait à nous interroger sur la question du régime fiscal en cas de réalisation du risque.
Tous ces éléments me donnent à penser que cet amendement ne peut pas être adopté en l'état.
Mme la présidente. Monsieur Badré, l'amendement n° I-270 est-il maintenu ?
M. Denis Badré. Je le retire, madame la présidente.
Si nous avons accepté assez régulièrement de retirer nos amendements, nous avons tout de même le sentiment d'avoir contribué à nourrir le débat, en posant de vraies questions, qui doivent nous faire réfléchir sur le moyen et le long termes.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Absolument !
Mme la présidente. L'amendement n° I-270 est retiré.
L'amendement n° I-261, présenté par M. Vasselle, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le 2° du I de l'article 199 septies du code général des impôts, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« ...° Les primes afférentes à des contrats d'assurance dépendance lorsque lesdits contrats garantissent, à titre principal, le versement d'une rente viagère au bénéficiaire lorsque celui-ci devient dépendant.
« Ces primes ouvrent droit à réduction d'impôt dans la limite de 1 070 euros. Cette limite est portée à 2 140 euros pour les contribuables mariés soumis à imposition commune.
« Les modalités d'application de ces dispositions sont, en tant que de besoin, fixées par décret. »
II. La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° I-231 rectifié, présenté par Mmes Hermange et Procaccia, est ainsi libellé :
Après l'article 2 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Dans la première phrase du premier alinéa de l'article 200 quater B du code général des impôts, les mots : « six ans » sont remplacés par les mots : « douze ans »
II. - La perte de recettes pour l'État résultant du I est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Marie-Thérèse Hermange et moi-même avons déposé cet amendement pour soutenir les femmes qui éprouvent de plus en plus de difficultés à concilier leur activité professionnelle et leur vie privée.
Dans la plupart des cas, aucune structure n'est prévue pour accueillir les enfants âgés de six à douze ans, sinon dans quelques communes où il existe des garderies pour les élèves après l'école, garderies qui ont évidemment un coût. En outre, une fois qu'ils entrent au collège, c'est-à-dire vers l'âge de douze ans, les enfants ne bénéficient pas non plus de structures d'accueil.
La garde des enfants pose donc un véritable problème : certains d'entre eux se retrouvent à la rue, au risque de favoriser le délitement de la vie familiale et les dérives du type de celles que nous avons dû déplorer dernièrement.
Nous proposons d'engager une politique familiale globale, en ouvrant les avantages fiscaux existants en matière de garde aux parents d'enfants de moins de douze ans. En allongeant ainsi la limite d'âge de six à douze ans, nous entendons favoriser la garde des enfants jusqu'à l'entrée au collège.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La loi de finances pour 2005 a transformé la réduction d'impôt accordée au titre des frais de garde des enfants à charge en un crédit d'impôt, ce qui a occasionné, pour l'année 2005, un coût de 60 millions d'euros.
L'article 62 du présent projet de loi de finances tend à élever le taux de ce crédit d'impôt de 25 % à 50 %, ce qui va doubler le coût de la mesure, celui-ci devant atteindre ainsi quelque 310 millions d'euros pour l'année 2006.
Ma chère collègue, sans disconvenir des besoins que vous nous avez rappelés, convenez avec moi que les efforts réalisés sur deux années sont déjà considérables. Même si la politique familiale doit être l'une de nos priorités pour l'avenir, il ne serait pas raisonnable, dans le projet de loi de finances pour 2006, d'aller au-delà de ce qui nous est proposé par le Gouvernement.
En vertu de cette analyse, la commission sollicite le retrait de l'amendement que vous avez déposé avec Marie-Thérèse Hermange et que vous avez fort bien présenté.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Madame Procaccia, vous n'avez sans doute pas pu penser une seule seconde que je puisse être favorable à votre amendement. Si vous étudiez la situation actuelle dans le détail, vous constaterez que nous avons déjà fait beaucoup d'efforts dans ce domaine. Je rappellerai les plus significatifs.
À compter de l'imposition des revenus de 2005, l'avantage relatif aux frais de garde, tel qu'il existe, prend la forme d'un crédit d'impôt. Dans le présent projet de loi de finances pour 2006, le Gouvernement a prévu de porter le taux de crédit d'impôt de 25 % à 50 %. L'effort consenti est considérable puisqu'il représente 350 millions d'euros sur le plan budgétaire.
Vous proposez d'étendre aux enfants de six à douze ans l'avantage fiscal consenti en matière de garde. Outre le fait qu'il ne s'agit plus, à ces âges, de trouver une place en crèche, il faut tout de même avoir à l'esprit que cette extension ne correspond absolument pas à l'objet de la mesure, qui est destinée, je le répète, à permettre la garde des enfants n'ayant pas encore atteint l'âge de la scolarité obligatoire.
De plus, en instaurant la réduction d'impôt pour l'emploi d'un salarié à domicile et le chèque-emploi-service universel, nous prévoyons déjà les moyens d'aider les familles pour la suite : nous avons mis en place un « tuilage », qui permet, année après année, de suivre la croissance de l'enfant, grâce à des modes de garde différenciés fondés sur le libre choix.
Très franchement, je crois que le système mis en place est désormais bien équilibré et qu'il faut en rester là. Sinon, nous aboutirions à une société totalement assistée.
Madame Procaccia, les mesures qui existent aujourd'hui sont amplement suffisantes au regard des finances publiques et des marges de manoeuvre dont nous disposons. Je préférerais donc que vous le retiriez, à défaut de quoi je serais contraint d'émettre un avis de rejet.
Mme la présidente. Madame Procaccia, l'amendement n° I-231 rectifié est-il maintenu ?
Mme Catherine Procaccia. Je suis sensible aux arguments financiers qui viennent d'être présentés, même si, pour la politique familiale, on peut toujours demander un peu plus !
Monsieur le ministre, entre six et douze ans, la scolarité étant obligatoire, les frais de garde sont bien moindres que pour la catégorie d'âges inférieure : le plus souvent, les parents n'ont en effet besoin de faire garder leurs enfants qu'entre dix-sept heures et dix-neuf heures. À mes yeux, le coût d'une telle mesure ne serait donc pas si élevé.
Cela étant, madame la présidente, j'accepte bien volontiers de retirer l'amendement, car les arguments financiers qu'ont avancés M. le rapporteur et M. le ministre sont tout à fait recevables.
Mme la présidente. L'amendement n° I-231 rectifié est retiré.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Madame Procaccia, il n'y a pas, d'un côté, le méchant ministre du budget qui ne veut pas payer et, de l'autre, le gentil parlementaire qui souhaite qu'on dépense pour faire du social !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Avec, en plus, l'horrible rapporteur général ! (Sourires.)
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Je ne voulais vous mettre dans ce mauvais coup, monsieur le rapporteur général ! (Sourires.)
Plus sérieusement, les membres du Gouvernement et les élus de la majorité forment un tout dans lequel chacun s'efforce de travailler pour le bien commun, en mettant en oeuvre les choix politiques définis, y compris dans le domaine familial.
Il est grand temps d'arrêter de penser, pour se donner bonne conscience, que la politique familiale doit uniquement se traduire par des augmentations de dépenses publiques supplémentaires. Ce qui compte, c'est l'efficacité.
MM. Philippe Marini, rapporteur général, et Jean-Jacques Jégou. Très bien !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. De ce point de vue, la France est aujourd'hui l'un des pays les plus modernes.
Mme Catherine Procaccia. C'est vrai !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Comme vous ne l'aviez pas dit, madame le sénateur, je tenais à le préciser !
Depuis le début du quinquennat, grâce aux actions engagées, nous avons considérablement fait progresser les choses. Il arrive un moment donné où nous devons assumer ensemble le fait que la bonne politique familiale n'est pas nécessairement celle qui se traduit par une augmentation des dépenses, mais celle qui répond concrètement aux demandes des Français, en l'occurrence des parents qui se préoccupent de la garde de leurs enfants.
Ainsi, grâce à la loi Jacob, les modes de garde ont été extrêmement diversifiés et le libre choix a été enfin consacré. Je salue d'ailleurs la contribution de Mme Hermange à cet égard.
Toute la partie « scolarisée » est donc réglée, dès l'instant, donc, où l'enfant sort de la crèche et entame sa scolarité. Il reste ensuite le problème de l'accueil à la sortie de l'école.
Là encore, il existe de nombreuses possibilités. Tout d'abord, la République française, c'est-à-dire le contribuable, finance des aides pour l'embauche de personnes qui ont vocation à garder les enfants à domicile, que cela passe par l'AGED, l'allocation de garde d'enfant à domicile, ou par le mécanisme de soutien de l'emploi à domicile.
Ensuite, dans les nombreuses villes bien gérées, comme dans celles qui le sont moins, des politiques spécifiques permettent d'accueillir les enfants. Il s'agit du soutien scolaire, des études surveillées, des actions mises en oeuvre par les associations sportives ou culturelles. Ainsi, dans la ville de Meaux dont je suis l'élu, je peux en témoigner, nous organisons en permanence ce genre d'activités.
M. Philippe Marini, rapporteur général. À Compiègne aussi !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Il paraît effectivement que cela se passe bien à Compiègne !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Et à Vincennes aussi, sans aucun doute !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Sur ces sujets, nous avons, les uns et les autres, réalisé beaucoup de choses. Si je me suis laissé quelque peu emporter, madame Procaccia, je vous prie de m'en excuser, mais je ne pouvais pas laisser dire que seul un argument financier m'avait incité à émettre un avis défavorable sur votre amendement ! Fondamentalement, mon avis défavorable était d'abord motivé par le fait que nous avons déjà mis en place beaucoup de choses et que le fait d'accroître encore les avantages fiscaux ne rassurera personne.
Nous sommes, tous ensemble, dans le même bateau, au service des Français, pour mener une politique familiale qui est ambitieuse et efficace. Même s'il est évidemment toujours possible de faire encore mieux, nous avons su apporter à de très nombreux parents des réponses adaptées et personnalisées pour chacun de leurs problèmes.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Le débat qui s'est instauré entre M. le ministre et notre collègue de la majorité montre bien que la situation n'est pas si simple.
Nous avons tous été amenés à entendre un certain nombre de déclarations ces derniers temps, après les difficultés que l'on a rencontrées dans beaucoup de villes, particulièrement dans des quartiers populaires.
Ces évènements ont montré que les enfants dont il était question dans l'amendement de Mme Procaccia auraient besoin de structures susceptibles de les accueillir.
J'ai bien entendu le plaidoyer de M. le ministre, mais je voudrais tout de même rappeler que les moyens dont disposaient certaines structures associatives prenant en charge des enfants de six à douze ans ont été mis à mal.
Quand, par exemple, on a mis fin au dispositif des emplois jeunes, quand on a décidé de ne pas prolonger l'attribution des coupons sport, qui permettaient d'assumer le coût de l'accueil de ces enfants en vue d'activités sportives, bien des familles ont ressenti des difficultés financières.
Peut-être cet amendement ne répondait-il pas pleinement au problème, mais il soulevait de véritables questions, auxquelles les collectivités territoriales sont confrontées. J'espère que nous aurons à nouveau l'occasion d'en discuter au moment où nous débattrons des moyens financiers mis à la disposition des collectivités territoriales.
La politique de l'enfance ne peut en effet se traduire simplement par la déclaration de M. le ministre de l'intérieur devant l'Association des maires de France, hier, déclaration où il était question de modifier l'ordonnance du 2 février 1945...
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est pourtant bien nécessaire ! C'est même indispensable.
Mme Marie-France Beaufils. ...de manière que les mineurs soient traités comme les majeurs.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Je conviens tout à fait que l'on fait déjà beaucoup. Le Gouvernement a pris énormément d'initiatives en faveur de la famille au cours des dernières années et les a menées à bien.
Toutefois, je le répète, on peut toujours demander un peu plus.
M. Jean Arthuis, président de la commission. C'est un peu plus de dette publique !
Mme Catherine Procaccia. Pour autant, je ne méconnais en rien tous les efforts qui sont faits, nous l'avons d'ailleurs dit au ministre en charge de la famille, M. Philippe Bas.
Article 3
I. - L'article 200 sexies du code général des impôts est ainsi modifié :
A. - Les montants et taux figurant dans l'article sont remplacés par les montants et taux suivants :
Montants, taux et coefficient applicables aux revenus 2004 |
Montants, taux et coefficient applicables aux revenus 2005 |
Montants, taux et coefficient applicables aux revenus 2006 |
|
Au A du I |
12 383 |
12 606 |
15 758 |
24 765 |
25 211 |
31 514 |
|
3 421 |
3 483 |
4 354 |
|
Au 1° du B du I, au 3° du A du II et au B du II |
3 507 |
3 570 |
3 570 |
Au 1° du A du II |
11 689 |
11 899 |
11 899 |
Aux 1° et 2° du B du I, aux 1° et 3° (a et b) du A du II et au C du II |
16 364 |
16 659 |
16 659 |
Au 3° (b et c) du A du II |
23 377 |
23 798 |
23 798 |
Aux 1° et 2° du B du I, au 3° (c) du A du II et au C du II |
24 927 |
25 376 |
25 376 |
Au 1° du A du II |
4,6 % |
6,0 % |
6,8 % |
11,5 % |
15,0 % |
17,0 % |
|
Au 2° du A du II |
0,55 |
0,35 |
0,15 |
45 % |
65 % |
85 % |
|
Au B du II |
34 |
35 |
35 |
68 |
70 |
70 |
B. - Le IV est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) La première phrase est supprimée ;
b) Dans la deuxième phrase, le mot : « Il » est remplacé par les mots : « Le montant total de la prime accordée au foyer fiscal » ;
c) Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :
« La prime n'est pas due lorsque son montant avant imputation est inférieur à 30 €. » ;
2° Dans le deuxième alinéa, les mots : « aux articles 199 quater B à 200 » sont remplacés par les mots : « aux articles 199 quater B à 200 bis et 200 octies ».
II. - Le premier alinéa du I de l'article 1665 bis du même code est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase, les mots : « au moins égale à six mois » sont remplacés par les mots : « au moins égale à quatre mois », le montant : « 250 € » par le montant : « 300 € » à compter du 1er janvier 2006 et par le montant : « 400 € » à compter du 1er janvier 2007 ;
2° Dans la deuxième phrase, le mot : « six » est remplacé par le mot : « quatre ».
III. - 1. Après l'article 1665 bis du même code, il est inséré un article 1665 ter ainsi rédigé :
« Art. 1665 ter. - I. - Les personnes qui ont bénéficié de la prime pour l'emploi au titre des revenus d'activité professionnelle d'une année perçoivent l'année suivante, du mois de janvier jusqu'au mois de juin, des versements mensuels égaux au douzième du montant de la prime obtenu après imputation prévue au IV de l'article 200 sexies. Il n'est pas procédé à un versement mensuel inférieur à 15 €.
« Le montant de la prime pour l'emploi déterminée dans les conditions prévues au II de l'article 200 sexies au titre des revenus d'activité professionnelle de l'année précédant celle des versements mensuels est calculé après déduction du total de ces versements. La régularisation des versements intervient lors de la liquidation de l'impôt afférent aux revenus de l'année précédant celle des versements mensuels, après imputation éventuelle des différents crédits d'impôt, de l'acompte prévu à l'article 1665 bis et de la prime pour l'emploi.
« II. - Supprimé.....»
2. Un décret précise les modalités de paiement des versements mensuels prévus à l'article 1665 ter du même code.
IV. - Les dispositions prévues au III s'appliquent à compter du 1er janvier 2006.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Vera, sur l'article.
M. Bernard Vera. La revalorisation de la prime pour l'emploi, la PPE, fait l'objet d'une campagne de communication du Gouvernement, campagne qui laisse dans l'ombre des questions à nos yeux essentielles.
La mesure contenue dans l'article 3 nous est en effet présentée comme la meilleure démonstration d'une hausse du pouvoir d'achat des ménages qui serait incluse dans ce projet de loi de finances.
En relevant la prime pour l'emploi, on ferait un geste significatif en direction des salariés les plus modestes, par exemple envers ceux qui ne bénéficieront pas pleinement de la réduction de l'impôt sur le revenu que l'on nous annonce pour 2007.
Pour un coût sensiblement équivalent à celui de l'actualisation réalisée en 2005, qui conduisait à une hausse de 4 % de la prime pour l'emploi, le Gouvernement prétend parvenir à une hausse de 50 %.
La réalité est quelque peu différente puisque la prime pour l'emploi est en quelque sorte réorientée en direction des salariés à temps partiel.
Le choix est clair : en prétendant lutter contre les « trappes à pauvreté », on incite encore et toujours au développement des emplois précaires, sur des contrats très faiblement rémunérés, par temps partiel payé au niveau du SMIC, par exemple.
À la vérité, tout se passe comme si l'argent des contribuables servait à exempter des groupes comme Carrefour ou Auchan de toute revalorisation des salaires directs de leurs salariés.
Ces entreprises, qui ont fait de la précarité de l'emploi et du temps partiel subi l'alpha et l'oméga de leur politique de ressources humaines, sont donc encore davantage encouragées à le faire, au mépris le plus total des salariés eux-mêmes.
Compte tenu du nombre de bénéficiaires - 8,8 millions de personnes -, la mesure représenterait en moyenne un gain de 4,73 euros par mois.
Mais le Gouvernement se garde de souligner qu'il instaure un minimum : la prime cessera d'être versée si elle est inférieure à 3,30 euros. Nous aimerions d'ailleurs savoir combien de personnes sont concernées par cette décision.
Que près de 9 millions de nos compatriotes aient des revenus si faibles qu'il faille passer par la PPE pour leur laisser l'illusion d'une progression de leur pouvoir d'achat illustre l'état dans lequel nous sommes.
Aujourd'hui, la richesse créée dans les entreprises n'est manifestement pas bien répartie entre salaires et profits.
La mensualisation de la prime pour l'emploi est également engagée. Tous les titulaires de la prime qui ont touché plus de 15 euros par mois la recevront désormais sous forme de versement mensuel pendant les six premiers mois, avec régularisation lors de la liquidation de l'impôt sur le revenu.
Cette manière de procéder participe encore et toujours de l'illusion entretenue autour de la prime pour l'emploi.
Nous ne pouvons qu'inviter les salariés bénéficiaires de la PPE à en comparer le montant mensuel avec celui de la CSG qu'ils paient tous les mois.
Notons à ce propos que la progression du produit de la CRDS en 2006 sera de 170 millions, c'est-à-dire quasiment la progression du montant de la PPE. C'est là, nous semble-t-il, un rapprochement tout à fait révélateur.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, sur l'article.
Mme Nicole Bricq. Cet article soulève en quelque sorte la question du « modèle social français », sujet abondamment commenté en ce moment. Ce modèle, par rapport aux autres, se caractériserait par une faible incitation au travail.
D'autre pays ont un taux de chômage plus faible que le nôtre. C'est le cas de certains pays anglo-saxons, mais le nombre de travailleurs pauvres y est assez considérable.
Les orateurs de la majorité qui se sont succédé hier à la tribune lors de la discussion générale ont dit et répété que le travail n'était pas une valeur de la gauche. Je m'inscris évidemment en faux ! Une telle opinion me semble d'ailleurs particulièrement démentie par la dernière période où la gauche a été responsable de la conduite de la France.
Je rappelle que, sous le gouvernement de Lionel Jospin, nous avons mis en place cette prime pour l'emploi, dont l'objectif était notamment d'inciter les chômeurs à accepter un emploi, même faiblement rémunéré. Nous avions eu, du reste, à l'époque, un débat interne à la gauche : nous, qui voulions la mise en place de cette prime, étions souvent accusés de mettre en place un impôt négatif, à l'américaine.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quelle horreur ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
Mme Nicole Bricq. Le montant de la prime était sans doute trop faible à l'époque, et le versement de la prime avait le défaut d'être trop longtemps différé : il intervenait l'année suivante.
À cet égard, la mensualisation que vous proposez, monsieur le ministre, est une bonne chose : elle rendra la prime pour l'emploi plus lisible pour les intéressés.
L'effet incitatif risque cependant de porter bien davantage sur les employeurs que sur les chômeurs ; j'en veux pour preuve l'insistance avec laquelle certains des orateurs de la majorité, tel M. Lambert, regrettent que la prime pour l'emploi n'apparaisse pas directement sur le bulletin de salaire.
Cette insistance nous amène à penser que la prime pour l'emploi est, dans votre philosophie, outre un élément « cosmétique » destiné à atténuer les mesures prises en faveur des revenus les plus élevés, un élément d'ajustement du salaire, ce que nous ne saurions accepter. En effet, on transfère ainsi à la charge de l'État ce qui devrait normalement relever des entreprises. Ce n'est pas notre option.
Nous pensons en effet que les entreprises ne peuvent échapper à leur responsabilité en ce qui concerne les salaires, surtout quand les salaires des dirigeants bondissent : 6 % par an depuis trois ans ! L'écart avec les salaires de base s'accroît considérablement. Certains grands patrons s'en émeuvent eux-mêmes, comme M. Bertrand Collomb, PDG de Lafarge, ou M. Michel Cicurel, président du directoire de la Compagnie financière Edmond de Rotschild.
Pour en revenir à la PPE, son bilan montre qu'elle n'a permis d'atteindre ni l'objectif d'équité ni l'objectif d'incitation que nous avions fixé à l'origine. C'est pourquoi, au groupe socialiste et au parti socialiste en général, on s'interroge sur l'avenir de ce mécanisme.
Quoi qu'il en soit, pour l'heure, nous sommes défavorables à la réforme que vous proposez.
Comme notre collègue M. Bernard Vera vient de le dire, il est manifeste que votre choix de revaloriser la PPE proportionnellement davantage pour les salaires inférieurs au SMIC rompt avec la philosophie initiale de cette mesure, celle du gouvernement de Lionel Jospin, qui visait à favoriser le retour à l'emploi à temps plein.
Le mécanisme que vous instaurez risque d'inciter à la sous-activité, surtout pour les couples. Loin de combattre la précarité, et donc l'assistance, ce mécanisme les encourage. Les employeurs seront en effet incités à proposer des contrats à temps partiel.
Si les contrats à mi-temps de la première année ne deviennent pas la deuxième année des contrats à plein-temps, la chute de revenu sera dramatique pour le salarié : il retombera dans la situation infernale du travailleur pauvre, cette situation que nous voulions, nous, combattre.
Vous jouez ainsi avec le feu, car vous n'entreprenez rien par ailleurs pour transformer ces retours à l'emploi en débuts de véritables carrières professionnelles.
Quant à nous, nous proposons que les travailleurs aient de vrais parcours professionnels et que ces parcours soient sécurisants.
Dans un monde où la vie est toujours plus difficile, toujours plus incertaine, où l'emploi à vie n'est plus garanti, le drame n'est pas tant de se retrouver au chômage que de ne plus être capable de retrouver un emploi.
Le débat doit donc se situer au juste niveau : il faut refuser de placer l'arbitrage entre chômage de masse et précarité ou pauvreté de masse ; nous souhaitons que l'arbitrage se hisse au niveau d'un emploi qui voie alterner périodes d'emploi salarié et périodes de formation.
Vous constatez donc que notre philosophie est radicalement différente de celle qui sous-tend votre projet de réforme.
Mme la présidente. L'amendement n° I-29, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
6,9 % |
17,25 % |
I.- Rédiger ainsi les dizième et onzième lignes de la deuxième colonne du tableau du A du I de cet article :
II.- Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... La perte de recettes pour l'Etat résultant des modifications aux taux applicables aux revenus 2004 pour la prime par l'emploi est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement vise à revaloriser la prime pour l'emploi puisque le Gouvernement a refusé pendant trois ans de soutenir réellement le pouvoir d'achat des plus modestes. Il a préféré distribuer des « cadeaux fiscaux » aux plus aisés, dans une période où l'absence totale de marge de manoeuvre budgétaire ne le permettait pas, d'où l'aggravation du déficit. Ce sera du reste l'objet d'un autre débat.
Aujourd'hui, nous pouvons espérer une croissance un peu plus soutenue. Elle doit être consolidée afin d'éviter la rechute observée à la fin de 2004 et en 2005. Différents aléas font peser un risque sur cette légère reprise, en ce qu'ils pourraient se traduire par des remises en cause du pouvoir d'achat des ménages, du fait d'une hausse continue des prix pétroliers, voire d'un regain d'inflation.
La consommation interne demeure un moteur essentiel de la croissance économique et, en la matière, le chiffre du dernier trimestre n'est pas très bon.
Sans préjudice d'une réforme ultérieure que nous proposerons, comme je l'ai déjà dit, nous demandons, par cet amendement, un doublement en 2006 de la prime pour l'emploi par rapport à 2005.
Vous observerez que cet amendement comporte une réserve aux termes de laquelle « cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû. » Cette réserve est rendue nécessaire par les règles relatives à la recevabilité financière des amendements, les promesses du Gouvernement et de la majorité parlementaire relatives à une clarification du statut de la prime pour l'emploi n'ayant pas été tenues.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La présentation que vous avez effectuée, madame Bricq - et ne m'en veuillez pas de cette appréciation - comporte une dose de mauvaise foi assez importante.
M. Roger Karoutchi. Pas une dose, la totalité !
Mme Nicole Bricq. J'ai fait un bilan mitigé de la mesure proposée !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ma chère collègue, comme vous l'avez rappelé, la mesure a été adoptée sur l'initiative d'un gouvernement que vous souteniez.
Mme Nicole Bricq. Oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Que s'est-il passé depuis la présente législature ? Ont été prévues une augmentation de la prime pour l'emploi qui approche 50 % en deux ans et une hausse renforcée de cette même prime pour les travailleurs à temps partiel. Vous mettez en cause cette orientation,...
Mme Nicole Bricq. Oui !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ...mais ainsi vous ignorez ou feignez d'ignorer que le retour au travail peut être grandement facilité par le recours au temps partiel. Dans bien des circonstances, ce dernier est un instrument de réintégration dans le marché du travail.
Le mode de calcul de la PPE, révisé depuis 2002, incite à utiliser toutes les solutions à portée de main pour faciliter cette réintégration dans le monde du travail. C'est simplement de l'empirisme ; c'est la reconnaissance de la réalité.
Par ailleurs, la mensualisation de la PPE, l'augmentation des acomptes doivent permettre aux bénéficiaires de mieux rattacher cette prime à l'élément « emploi ». La prime pour l'emploi à la mode Jospin était une sorte de « machine à arroser » qui ne générait pas, dans l'esprit de ses bénéficiaires, le lien qui s'imposait entre l'argent reçu et l'emploi retrouvé ou conforté.
Comme nombre de personnes l'ont affirmé, la prime pour l'emploi, compte tenu de son poids budgétaire qui ne cesse d'augmenter, n'est justifiable que si elle est incitatrice au retour à l'activité...
Mme Nicole Bricq. Ce qui n'est pas démontré !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ...ou si elle évite à un certain nombre de bénéficiaires bien ciblés de tomber dans la trappe à bas salaires, de se retrouver dans la condition de travailleurs du bas de l'échelle que vous avez évoquée.
Bien entendu, monsieur le ministre, la prime pour l'emploi pourrait encore évoluer. Il faut s'interroger sur le devenir de ce dispositif. Au nom de la commission, je me suis permis, dans le commentaire sur l'article 3 qui figure dans le rapport écrit, de développer quelques scenarii possibles. Le paiement d'acomptes par l'employeur, l'inscription de la PPE sur la fiche de paye supposeraient que soient résolus d'importants problèmes financiers, techniques et de gestion. Ces dispositions se traduiraient par des augmentations budgétaires très significatives.
Cela étant, la majorité des membres de la commission des finances estime que, dans l'hypothèse de l'instauration d'une TVA sociale - sujet dont nous reparlerons, monsieur le ministre - la prime pour l'emploi, en tant que telle, se justifierait beaucoup moins. En effet, le coût du travail diminuerait et l'opportunité du dispositif susvisé décroîtrait également. Bien entendu, la TVA sociale supposerait qu'une part de la marge économique dégagée puisse revenir aux salariés grâce, notamment, à l'instrument du SMIC, qui est entre les mains du Gouvernement. Mais il faudrait alors trouver un autre équilibre économique. Ce modèle, excessivement complexe, va alimenter nos réflexions et nos débats au cours des prochains mois.
Quoi qu'il en soit, les mesures qui nous sont proposées cette année constituent un progrès. Mais ce progrès ne nous dispense pas de réfléchir à des visées encore plus lointaines et au devenir du dispositif de la prime pour l'emploi, qui devient l'un des postes les plus importants du budget de la France. Il faut en avoir conscience.
J'en viens à l'amendement n° I-29, qui tend à instaurer une augmentation de 1,5 % de la PPE. Cette dernière s'ajouterait à celle qui est programmée par l'article 3 du présent projet de loi, qui s'élève à plus de 48 % et doit représenter en 2007 un supplément de dépense proche de 1 milliard d'euros.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. La prime pour l'emploi est une mesure que le gouvernement Jospin a introduite dans notre système économique et fiscal - vous l'avez rappelé, madame Bricq -, en rupture avec la tradition de gauche.
En effet, à ma connaissance, ce type de mesure n'a jamais été préconisé dans aucun programme politique de gauche, alors que, pour l'actuelle majorité, c'est un sujet récurrent.
L'objectif est d'essayer d'introduire une véritable rupture entre les revenus d'assistance et ceux du travail. L'idée est partie de constats assez simples, que tout le monde connaît et évoque dans les réunions publiques. Aujourd'hui, eu égard au système actuel, le bénéficiaire d'un revenu d'assistance, d'un minimum social - le RMI, par exemple - perd de l'argent s'il reprend un travail, en particulier si son salaire est équivalent au SMIC et s'il travaille à temps partiel. Cet état de fait n'incite pas à travailler.
Les spécialistes qualifient cette situation de « trappe à inactivité » absolument infernale, due à l'attribution d'avantages connexes liés à l'attribution du RMI. Une personne qui perçoit le RMI gagne 450 euros, alors que celle qui touche le SMIC dispose de 1 000 euros. Mais un bénéficiaire du RMI profite également de la CMU, de la CMU complémentaire, ...
M. Jean-Jacques Jégou. D'exonérations de cotisations !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. ...des exonérations d'impôts locaux et de redevance. Par ailleurs, elle bénéficie de toute une série de prestations gratuites proposées par les villes, telles que la cantine, les transports, la garde d'enfants, autant d'avantages que perd quasi instantanément la personne qui reprend un travail.
Cette situation instaure une distorsion majeure.
Selon le Gouvernement, le fait d'augmenter fortement, à hauteur de 1 milliard d'euros en deux ans, la prime pour l'emploi constitue un premier élément de réponse très significatif pour marquer la différence entre les revenus de l'assistance et du travail.
Certes, ce n'est qu'un premier pas. Même si, grâce à cette disposition, nous pouvons faire en sorte que la reprise d'un travail soit plus avantageuse pour les bénéficiaires de minima sociaux, nous sommes encore loin de toutes les mesures que nous voulons mettre en oeuvre. Nous aurons certainement un débat sur l'évolution de la gestion des minima sociaux lorsque nous évoquerons les finances locales ultérieurement.
Pour ce qui est de la prime pour l'emploi, madame Bricq, je ne suis pas réellement convaincu par l'amendement que vous nous avez présenté.
Si j'ai bien compris, vous proposez d'instituer une augmentation qui aurait un caractère relativement cosmétique pour les bénéficiaires, mais qui serait extrêmement coûteuse pour les comptes de l'État. Elle engendrerait un coût supplémentaire de l'ordre de 300 millions à 400 millions d'euros, sans pour autant que les problèmes soient réglés.
Madame le sénateur, je vous invite à rallier la proposition du Gouvernement. L'augmentation très substantielle de la prime pour l'emploi proposée constitue déjà une rupture avec le passé.
Mme Nicole Bricq. C'est sûr qu'il y a une rupture !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Nous aimons bien employer ce mot de temps en temps et, en l'occurrence, il illustre bien la situation actuelle.
Le système suggéré par le Gouvernement améliore également l'organisation du dispositif. Auparavant, la prime était insuffisamment ciblée ; 8 800 000 foyers fiscaux en bénéficiaient, dont 30 % se situaient dans la moitié supérieure de la distribution de revenus.
Mme Nicole Bricq. C'est le problème !
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Avec le nouveau système, 6 000 000 de foyers voient leur PPE augmenter. Pour 3,9 millions de foyers travaillant à temps plein et percevant le SMIC, l'augmentation sera de 50 % ; elle sera de 100 % pour ceux qui travaillent à temps partiel et dont la rémunération est indexée sur le SMIC. Ce système est beaucoup plus efficace.
Auparavant, les montants unitaires étaient beaucoup plus faibles. Ils atteignaient en moyenne 280 euros. Avec la mensualisation, qui sera opérationnelle dès le mois de janvier prochain, le système de versement sera beaucoup plus régulier.
Ce système a de nombreuses vertus, me semble-t-il.
Madame Bricq, vous soutenez que l'effort du Gouvernement est insuffisant et qu'il faudrait faire plus. Sans doute on peut toujours faire plus, mais l'objectif était de concentrer l'effort là où le besoin est le plus grand, c'est-à-dire au niveau du SMIC. Pour nous, c'est essentiel.
Quant au seuil de versement de 30 euros, il est motivé non par un souci budgétaire, mais par un souci d'efficacité de la dépense publique. Quel est l'intérêt de verser une prime inférieure à 3 euros par mois ? Outre le fait que le paiement d'une prime de ce type est compliqué, ceux qui la touchent n'en profitent guère.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je peux comprendre qu'un certain nombre d'entre vous ne veuillent pas voter en faveur de la refonte du barème de l'impôt sur le revenu, même si j'espère pouvoir vous convaincre lorsque nous examinerons ce point particulier. En revanche, je ne vois pas pourquoi la mesure consistant à revaloriser et à cibler la prime pour l'emploi ne serait pas adoptée à l'unanimité. Je ne vois absolument pas quels arguments invoquer pour justifier une opposition à une mesure de bon sens qui accroît l'écart entre le revenu de l'assistance et celui du travail, qui stimule le revenu du travail au niveau du SMIC. C'est une véritable incitation à retrouver du travail, à condition bien sûr que les offres d'emploi soient au rendez-vous. Mais ce point constitue un autre volet de notre politique économique.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° I-29. Il vous demande, mesdames, messieurs les sénateurs -après réflexion, peut-être accéderez-vous à son souhait - d'adopter en l'état la remarquable disposition fiscale qu'il vous propose.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je n'accepte pas l'accusation de mauvaise foi que vous avez formulée, monsieur le rapporteur général. Si vous m'aviez écoutée attentivement, vous auriez constaté que j'ai essayé, à l'occasion de ce débat important eu égard à ce que nous appelons notre « modèle social », de faire preuve d'une certaine objectivité...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Une certaine...
Mme Nicole Bricq. Non, j'ai fait preuve d'une objectivité certaine.
Les représentants de divers courants économistes ont mené des études sérieuses sur la prime pour l'emploi. Aujourd'hui, personne n'est capable de démontrer que le système actuel a un effet vertueux en matière d'emploi. C'est un des problèmes auxquels nous sommes confrontés. J'ai d'ailleurs précédemment indiqué les difficultés d'application de la mesure prise sous le gouvernement Jospin.
Monsieur le ministre, avec le système que vous nous proposez, on tord complètement le cou à l'esprit originel du dispositif. En effet, vous encouragez le recours au temps partiel. L'aubaine va être non pour le chômeur mais pour l'employeur, qui n'aura aucune raison de transformer un emploi à mi-temps en emploi à plein temps.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Comment créer des emplois sans employeurs !
Mme Nicole Bricq. Je réitère mes propos. Vous créez une nouvelle trappe à pauvreté. Comment peut-on vivre avec un demi-SMIC ? Il faut me l'expliquer. C'est pour cela que je n'accepte pas d'être taxée de mauvaise foi.
Nous ne partageons pas politiquement la même logique. Mais, dans la logique dans laquelle vous vous êtes engagés, j'estime que, si l'on veut donner une vertu à la PPE, son efficacité en matière d'emploi n'étant pas démontrée, il faut le faire dans l'objectif de soutien à la consommation.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. M. le rapporteur général et M. le ministre nous disent qu'il faut tenir compte du bas niveau des salaires. Dans un premier temps, il conviendrait au moins, selon moi, d'améliorer le SMIC.
Dans un second temps, compte tenu des allégements des cotisations sur les bas salaires intervenus dans les entreprises, allégements qui ont incité ces dernières à faire glisser les salaires vers le SMIC, donc vers le bas, il conviendrait de revenir sur un certain nombre de mesures, sauf à vouloir que le pouvoir d'achat des salariés stagne, ce que certains, ici, ont l'air de souhaiter.
Je tiens à revenir également sur la comparaison qu'ils font entre les personnes qui perçoivent des ressources du type du RMI et celles qui travaillent à temps partiel.
Il est évident qu'une personne qui, prenant un travail à temps partiel, perd l'ensemble du bénéfice des accompagnements du revenu minimum d'insertion, est confrontée à un véritable problème.
Depuis déjà un bon nombre d'années, j'essaie d'obtenir que soit examinée de plus près la mesure qui consisterait à maintenir une part de RMI à ceux qui ont repris une activité salariale sans avoir obtenu un niveau de salaire suffisant, ce qui leur permettrait de redresser leur situation en attendant d'avoir retrouvé un travail à temps complet.
La mesure proposée, elle, favorise le temps partiel. Dans le secteur du commerce, en particulier, le travail à temps partiel est monnaie courante. Il va se trouver encouragé et la possibilité pour un salarié de retrouver un emploi à temps complet s'en trouvera amoindrie, dans la mesure où le patron se dira que, de toute façon, ses salariés bénéficieront d'un complément de rémunération grâce à la PPE qui vient d'être modifiée par le Gouvernement.
C'est pourquoi, même si nous ne pensons pas que la PPE soit la panacée, nous voterons pour l'amendement de nos collègues du groupe socialiste.
Mme la présidente. L'amendement n° I-30, présenté par MM. Massion, Masseret, Angels et Auban, Mme Bricq, MM. Charasse, Demerliat, Frécon, Haut, Marc, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I.- A la fin du second alinéa du c du 1° du B du I de cet article, remplacer la somme :
30 €
par la somme :
15 €
II.- Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
...La perte de recettes pour l'État résultant de l'abaissement à 15 € du plancher en deçà duquel la prime pour l'emploi ne sera pas versée est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. Cette disposition n'est applicable qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Le Gouvernement met en place un plancher de trente euros en deçà duquel la prime pour l'emploi ne serait pas versée à ses bénéficiaires.
La fixation de ce seuil de versement à trente euros est particulièrement préjudiciable aux bénéficiaires de la PPE puisqu'il est plus élevé que le seuil de droit commun de huit euros prévu par l'article 1965 L du code général des impôts.
Le gain budgétaire de la mesure que nous propose le Gouvernement n'est pas chiffré, non plus que le nombre de bénéficiaires qui n'auraient plus droit à la prime pour l'emploi.
Nous proposons donc, parce qu'il est vrai qu'il faut tenir compte du volume des frais de gestion de cette prime, d'abaisser le seuil de versement à quinze euros. La restriction visant à n'appliquer cette disposition qu'en déduction de l'impôt dû n'est justifiée qu'au regard des règles de la recevabilité financière des amendements d'origine parlementaire.
Ce matin, mes collègues de la commission des finances m'ont demandé si j'estimais réellement utile d'envisager de mettre en place toute une gestion pour quinze euros. Je ferai simplement remarquer que quinze euros permettent d'acheter quelques litres d'essence et que nos concitoyens - je ne sais pas, monsieur le ministre, si, comme moi, vous avez l'habitude de vous ravitailler en carburant à la station de l'avenue Cornillon, à Meaux - sont nombreux à prendre de l'essence au compte-gouttes, si je puis m'exprimer ainsi, c'est-à-dire avec un billet de cinq euros, quand nous, nous faisons le plein sans barguigner.
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je n'ai toujours pas compris ! Le seuil de versement est de combien ?
Mme Marie-France Beaufils. Trente euros !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Trente euros par an !
Mme Marie-France Beaufils. C'est comme l'allocation logement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Alors que nous nous efforçons de mettre en place un dispositif qui soit incitatif au retour à l'activité, le versement de moins de trente euros par an, divisé par douze mois compte tenu de la mensualisation, vous semble-t-il sincèrement, mes chers collègues, de nature à inciter qui que ce soit à quoi que ce soit ?
Vous avez beau vous évertuer à m'expliquer toutes les théories imaginables, je persiste à ne pas comprendre...
Mme Nicole Bricq. Vous n'êtes pas dans la logique !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ...et j'émets un avis défavorable à cet amendement.
Franchement, avec la toute petite coupure que vous évoquez, on ne peut pas mettre beaucoup d'essence dans le réservoir !
Mme Nicole Bricq. Deux litres !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Deux litres par an !
Mme Nicole Bricq. Non !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Par mois, c'est pareil ! Personne n'ira bien loin avec. Pour verser d'aussi petits montants, qui n'auront aucun impact sur les comportements des gens, est-ce la peine de mobiliser tout un arsenal administratif, ce qui va entraîner des frais de gestion considérables et coûter des centaines de millions d'euros ?
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-François Copé, ministre délégué. Si j'ai bien compris, madame Bricq, vous souhaitez donc que la représentation nationale décide, sur votre proposition, de priver de quinze euros des gens qui iront faire leur plein d'essence ! (Sourires.)
Pensez-vous vraiment nous convaincre ? Bien que vous fassiez partie de la catégorie des gens plutôt réalistes, vous nous proposez là une mesure extrêmement démagogique. Vous le savez très bien ! Je vous préfère quand vous nous expliquez comment, un jour de miracle, M. Jospin a créé la prime pour l'emploi, jour qui s'est révélé bien plus faste, entre nous, que celui où il s'est levé pour instaurer les trente-cinq heures !
Je m'oppose donc évidemment à cet amendement. Une somme de quinze euros par an est extrêmement faible pour celui qui en bénéficie et son versement n'est bien entendu pas du tout adapté à la gestion publique. C'est pourquoi nous avons relevé le seuil de non-versement.