Article 2 bis
I. - Le même code est ainsi modifié :
1° Après l'article L. 225-42, il est inséré un article L. 225-42-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 225-42-1. - Dans les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, les engagements pris au bénéfice de leurs présidents, directeurs généraux ou directeurs généraux délégués, par la société elle-même ou par toute société contrôlée ou qui la contrôle au sens des II et III de l'article L. 233-16, et correspondant à des éléments de rémunération ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de ou postérieurement à la cessation de ces fonctions, sont soumis aux dispositions des articles L. 225-38 et L. 225-40 à L. 225-42. » ;
2° Après l'article L. 225-90, il est inséré un article L. 225-90-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 225-90-1. - Dans les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, les engagements pris au bénéfice d'un membre du directoire, par la société elle-même ou par toute société contrôlée ou qui la contrôle au sens des II et III de l'article L. 233-16, et correspondant à des éléments de rémunération ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de ou postérieurement à la cessation de ces fonctions, sont soumis aux dispositions des articles L. 225-86 et L. 225-88 à L. 225-90. » ;
3° Après l'article L. 225-22, il est inséré un article L. 225-22-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 225-22-1. - Dans les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, en cas de nomination aux fonctions de président, de directeur général ou de directeur général délégué d'une personne liée par un contrat de travail à la société ou à toute société contrôlée ou qui la contrôle au sens des II et III de l'article L. 233-16, les seules éventuelles dispositions dudit contrat correspondant à des éléments de rémunération ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de ou postérieurement à la cessation de fonctions sont soumises aux dispositions des articles L. 225-38 et L. 225-40 à L. 225-42. » ;
4° Après l'article L. 225-79, il est inséré un article L. 225-79-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 225-79-1. -- Dans les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé, en cas de nomination aux fonctions de membre du directoire d'une personne liée par un contrat de travail à la société ou à toute société contrôlée ou qui la contrôle au sens des II et III de l'article L. 233-16, les seules éventuelles dispositions dudit contrat correspondant à des éléments de rémunération ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de ou postérieurement à la cessation ou au changement de fonctions sont soumises aux dispositions des articles L. 225-86 et L. 225-88 à L. 225-90. »
II. - Les dispositions du I sont applicables aux conventions conclues à compter du 1er mai 2005.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, sur l'article.
Mme Marie-France Beaufils. La récente campagne référendaire portant sur la ratification du traité constitutionnel européen a permis, entre autres, un débat particulièrement significatif sur les questions sociales, et singulièrement sur celle du pouvoir d'achat des salariés.
Ce qui ne peut manquer de surprendre à la lecture de cet article 2 bis, comme à celle de l'article 2 ter du présent projet de loi, c'est que le pouvoir d'achat des dirigeants et administrateurs de sociétés cotées en bourse semble considéré comme devant être prioritairement pris en compte.
Le moins que l'on puisse dire est que cet article 2 bis n'est pas d'une grande clarté pour le lecteur. Nous sommes loin de la transparence qui est prônée dans ce texte, mais c'est probablement le sujet qui en est la cause.
Cet article, qui concerne les dirigeants d'entreprises cotées - ce qui est loin de représenter tous les administrateurs des entreprises -, prévoit expressément entre autre chose que des mesures peuvent être prises pour leur accorder des accessoires de rémunération, et notamment des compléments de retraite.
En clair, en récompense de leurs bons et loyaux services, ces « salariés » d'une catégorie toute particulière pourraient bénéficier de dispositions exceptionnelles, dérogatoires au droit commun, ledit droit commun se définissant à partir de la réforme des retraites.
Ces dispositions étant exceptionnelles, on les encadre, non par référence au code du travail ou à celui de la sécurité sociale, mais par référence au code du commerce. En effet, en lieu et place d'une disposition pouvant s'appuyer sur un article d'un des codes sociaux - ce qui serait évidemment délicat à justifier - nous nous trouvons face à une convention passée entre le récipiendaire et le conseil d'administration de l'entreprise concernée. En quelque sorte, la retraite des présidents-directeurs généraux des sociétés cotées deviendrait une affaire de gentleman agreement, un « petit arrangement entre amis ».
Voilà un article du projet de loi de pure opportunité, sans doute guidé par la découverte des conditions scandaleuses de mise à la retraite du président-directeur général d'un grand groupe de la distribution dont les salariés ou les franchisés rattachés n'ont pas les mêmes avantages.
Nous ne voterons évidemment pas cet article qui tend à créer un privilège exorbitant pour une catégorie extrêmement réduite de salariés d'entreprise.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 94, présenté par M. Marc, Mme Bricq, MM. Massion, Yung, Peyronnet, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. L'article 2 bis, qui est issu d'un amendement déposé par le Gouvernement, prévoit que certains éléments - ils ne sont pas précisés - de la rémunération des dirigeants appartiendront désormais au régime des conventions réglementées.
Le Gouvernement prétend que cet article permettra de renforcer le contrôle de la rémunération des dirigeants. En réalité, il n'en est rien.
Le régime des conventions réglementées prévoit l'autorisation préalable du conseil d'administration et l'approbation postérieure de l'assemblée générale des actionnaires. Or cette approbation, étant postérieure, n'a aucune efficacité - ou très faible - sur la décision d'octroi d'une rémunération accessoire par le conseil d'administration.
L'assemblée générale intervient souvent longtemps après la conclusion du contrat et souvent même à un moment où l'exécution de la convention a déjà eu lieu.
A l'heure actuelle, les refus d'approbation sont exceptionnels. L'assemblée générale des actionnaires est, dans cette hypothèse, une simple chambre d'enregistrement qui sert à mettre les dirigeants à l'abri d'une action en responsabilité. On pourrait même se poser la question de savoir ce qui se passerait si une assemblée générale refusait d'entériner une convention de ce genre.
D'une manière plus générale, le régime des conventions réglementées n'offre pas les garanties requises pour que des éléments de la rémunération des dirigeants soient déterminés en toute transparence.
C'est pourquoi nous proposons la suppression de cet article 2 bis.
M. le président. Les amendements suivants sont présentés par M. Buffet, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 33 est ainsi libellé :
I. Dans le texte proposé par le 1° du I de cet article pour l'article L. 225-42-1 du code de commerce, remplacer les mots:
éléments de rémunération ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de ou postérieurement à la cessation de ces fonctions
par les mots:
éléments de rémunération, des contreparties financières ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de la cessation ou du changement de ces fonctions, ou postérieurement à celles-ci
II. En conséquence, procéder au même remplacement dans le texte proposé par le 2° du I de cet article pour l'article L. 225-90-1 du code de commerce.
L'amendement n° 34 est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le 3° du I de cet article pour l'article L. 225-22-1 du code de commerce, remplacer les mots:
les seules éventuelles dispositions dudit contrat correspondant à des éléments de rémunération ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de ou postérieurement à la cessation de fonctions
par les mots:
les dispositions dudit contrat correspondant, le cas échéant, à des éléments de rémunération, des contreparties financières ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de la cessation ou du changement de fonctions, ou postérieurement à celles-ci
L'amendement n° 35 est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le 4° du I de cet article pour l'article L. 225-79-1 du code de commerce, remplacer les mots:
les seules éventuelles dispositions dudit contrat correspondant à des éléments de rémunération ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de ou postérieurement à la cessation ou au changement de fonctions
par les mots:
les dispositions dudit contrat correspondant, le cas échéant, à des éléments de rémunération, des contreparties financières ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de la cessation ou du changement de fonctions, ou postérieurement à celles-ci
La parole est à M. le rapporteur pour avis pour défendre ces trois amendements.
M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis. L'amendement n°33, outre une proposition d'amélioration rédactionnelle, tend à intégrer dans le dispositif des conventions réglementées les contreparties financières dues à raison de la cessation des fonctions de dirigeant. Ainsi, sans ambiguïté possible, ces contreparties liées à une clause de non-concurrence seraient soumises au dispositif proposé.
En outre, il s'agit de viser par cohérence avec le quatrième alinéa du I de l'article les cas de changement de fonction.
Les deux amendements suivants sont des amendements de cohérence rédactionnelle avec le premier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement de suppression ; elle est, en revanche, favorable aux trois amendements présentés par la commission des lois.
Nous estimons en effet que le dispositif proposé par le rapporteur pour avis est équilibré et qu'il répond à un objectif de plus grande transparence.
Nous souhaiterions, monsieur le ministre, que vous nous rappeliez les conséquences qui, le cas échéant, s'attachent à un éventuel rejet par l'assemblée générale du rapport spécial des commissaires aux comptes sur les conventions réglementées. Que se passe-t-il ? Existe-t-il un régime de sanction légale ? Dans quelles conditions la responsabilité des dirigeants de la société peut-elle être mise en jeu ?
Tout rappel informatif en ce domaine sera utile à notre assemblée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Thierry Breton, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 94.
Avec les amendements nos 33, 34 et 35, vous souhaitez viser explicitement, monsieur le rapporteur pour avis, dans les mesures de transparence et d'approbation de la rémunération des dirigeants, les contreparties financières en plus des éléments de rémunération et des avantages dus ou susceptibles d'être dus qui sont déjà expressément mentionnés.
Cette démarche est effectuée dans un souci d'exhaustivité que je partage et qui tend à soumettre au dispositif de transparence et d'approbation des rémunérations les contreparties financières qui pourraient par exemple être liées à une clause de non-concurrence.
Il me semble toutefois que la rédaction actuelle est suffisamment large pour prendre en compte ces indemnités. C'est, en tous cas, la volonté du Gouvernement.
Par ailleurs, il ne me paraît pas souhaitable d'entrer dans une logique de description de toutes les formes de rémunérations qui seraient soumises au dispositif, car le texte pourrait être alors plus facilement contournable.
C'est la raison pour laquelle je vous demande de retirer vos trois amendements.
En outre, monsieur le rapporteur, à partir du moment où on entre dans le droit des conventions réglementées, c'est ce dernier qui s'applique effectivement. Si jamais l'assemblée générale n'approuve pas la convention, le conseil d'administration en sera responsable. Dans sa sagesse, ce dernier proposera un nouvel élément, qui sera cette fois accepté par l'assemblée générale, faute de quoi le conseil sera directement responsable au cas où, par exemple, un actionnaire viendrait s'opposer à cette décision. Je ne connais pas un conseil d'administration qui s'exposerait à ce risque.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, vos trois amendements sont-ils maintenus ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis. Avec le terme de « contrepartie financière » nous avons voulu englober toutes les rémunérations pour éviter le catalogue que vous évoquiez tout à l'heure, monsieur le ministre.
En ce qui concerne l'intégration au dispositif des conventions réglementées, notre approche vise à préserver un double intérêt : d'une part, celui de l'entreprise et de ceux qui la dirigent, d'autre part, celui des membres de l'assemblée générale, qui profitent d'une information classique et normale sans pour autant que les choses soient mises sur la place publique, ce qui n'est souhaitable ni pour les uns ni pour les autres.
C'est la raison pour laquelle nous préférons maintenir ces trois amendements.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'amendement n° 33.
Mme Nicole Bricq. Le rapporteur pour avis de la commission des lois a raison de maintenir ses amendements.
Nous avions demandé la suppression de l'article 2 bis parce que la rédaction du texte nous paraissait très insuffisante. A partir du moment où le rapporteur pour avis maintient ses amendements, nous les voterons.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 bis, modifié.
(L'article 2 bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2 bis
M. le président. L'amendement n° 96, présenté par M. Marc, Mme Bricq, MM. Massion, Yung, Peyronnet, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 225-42 du code de commerce est ainsi rédigé :
« Sans préjudice de la responsabilité de l'intéressé, les conventions désapprouvées par l'assemblée sont inopposables aux tiers. En cas de fraude, elles peuvent être annulées. »
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Cet amendement, qui tend à insérer un article additionnel après l'article 2 bis, a pour objet de renforcer l'efficacité des conventions réglementées.
Aujourd'hui, la désapprobation par l'assemblée générale d'une convention réglementée n'emporte aucun effet juridique pratique. Il importe donc de renforcer la portée de la désapprobation de l'assemblée générale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. Sous le bénéfice des observations complémentaires que la commission des lois pourrait éventuellement formuler sur ce point, il me semble que cet amendement est superfétatoire par rapport au droit existant.
En effet, comme M. le ministre le rappelait, au cas où, par extraordinaire, les conventions réglementées ne seraient pas approuvées par l'assemblée générale, le régime de responsabilité des mandataires sociaux est tellement dissuasif en la matière que ces derniers devraient prendre les mesures nécessaires de rectification et de mise en place de nouvelles conventions susceptibles d'êtres approuvées par l'assemblée générale.
Au demeurant, un rejet serait révélateur d'une véritable situation de crise qui se traduirait sans doute par d'autres conséquences : révocation de dirigeants, changements au sein du conseil d'administration, etc.
Dans l'hypothèse où un tel rejet interviendrait en assemblée générale, des actions en justice seraient possibles à la diligence des actionnaires pour faire constater les conséquences du rejet des conventions par l'assemblée générale.
Au total, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 95, présenté par M. Marc, Mme Bricq, MM. Massion, Yung, Peyronnet, Godefroy et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 225-45 du code de commerce est ainsi rédigé :
« Art. L. 225-45 - L'assemblée générale peut allouer aux administrateurs et au président du conseil d'administration ou de surveillance, en rémunération de leur activité, à titre de jetons de présence et au titre des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de ou postérieurement à la cessation de leurs fonctions, une somme fixe annuelle que cette assemblée détermine sans être liée par des dispositions statutaires.
« Le montant de celle-ci est porté aux charges d'exploitation. Sa répartition entre les administrateurs et le président du conseil d'administration ou de surveillance est déterminée par le conseil d'administration. ».
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Alors que les indemnités de départ en retraite des dirigeants de société font, à juste titre, souvent scandale dans l'opinion publique, il importe que les conditions de fixation des rémunérations accessoires soient déterminées par les actionnaires.
A l'heure actuelle, le régime juridique applicable ne permet pas aux actionnaires de participer à la décision. En effet, pour les rémunérations accessoires, c'est l'article L. 225-47 qui s'applique et il donne compétence au conseil d'administration pour statuer sur les accessoires de la rémunération, notamment sur les pensions. Or cet article n'apporte aucune précision sur leurs conditions d'octroi, prévoyant simplement que le conseil d'administration détermine la rémunération du président.
Il convient par conséquent d'instituer un contrôle de l'assemblée générale des actionnaires.
L'article L. 225-45 prévoyant une intervention de cette dernière pour la rémunération principale, le respect du parallélisme des formes doit conduire à lui donner aussi compétence pour établir des garde-fous en matière de rémunérations accessoires.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. L'article 2 bis soumet les engagements pris par les sociétés cotées, s'agissant de certaines rémunérations différées de leurs dirigeants, au régime des conventions réglementées. Ce régime implique notamment une approbation de l'ensemble des conventions par l'assemblée générale.
Il s'agit d'un dispositif équilibré que la commission approuve et qui lui paraît préférable au régime proposé dans l'amendement. L'avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Thierry Breton, ministre. Je partage, monsieur Yung, votre volonté d'encadrer davantage les éléments de rémunération différée des dirigeants.
C'est l'objet même du dispositif proposé par le Gouvernement, objet que ce dispositif remplit bien puisqu'il prévoit, pour ces éléments de rémunération, non seulement une autorisation préalable du conseil d'administration mais aussi une approbation par les actionnaires.
Néanmoins, je considère que la détermination de la rémunération doit rester une compétence du conseil d'administration - ou du conseil de surveillance -, qui doit agir sous le contrôle étroit des actionnaires.
C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. Ce qui nous a été dit par M. le rapporteur concernant les conventions qui donnent lieu à une vérification et à une adoption a posteriori par l'assemblée générale ne peut complètement nous satisfaire, car il s'agit pour nous d'anticiper les excès qui pourraient être commis. On sait en effet très bien que les conventions adoptées a posteriori laissent très systématiquement les choses en l'état.
Le fait qu'un P-DG ait pu partir récemment avec 30 et quelque millions d'euros sans que les actionnaires aient pu émettre la moindre observation anticipée démontre, s'il en était besoin, que le dispositif n'est pas satisfaisant.
Il s'agit pour nous de permettre à l'assemblée générale des actionnaires de déterminer par avance une enveloppe et de porter ainsi un regard anticipé sur les sommes mises à la disposition du conseil d'administration. Ce dernier garde ensuite la liberté de répartir ces sommes, mais le contrôle a priori ainsi exercé sur lui par l'assemblée générale rend possible la transparence.
Dans un contexte où, vous en êtes certainement d'accord, l'opinion publique est très sensibilisée aux excès qui peuvent exister et qu'elle estime inadmissibles, cet amendement constitue un progrès et répond à une attente ; dans sa sagesse, notre assemblée devrait donc l'adopter.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 95.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 2 ter
I. - L'article L. 225-102-1 du même code est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ce rapport décrit en les distinguant les éléments fixes, variables et exceptionnels composant ces rémunérations et avantages ainsi que les critères en application desquels ils ont été calculés ou les circonstances en vertu desquelles ils ont été établis. Il indique également les engagements de toutes natures, pris par la société au bénéfice de ses mandataires sociaux, correspondant à des avantages ou éléments de rémunération dus ou susceptibles d'être dus à raison de ou postérieurement à la prise, à la cessation ou au changement de leurs fonctions. L'information donnée à ce titre doit préciser les modalités de détermination de ces engagements. Hormis le cas de bonne foi, les versements effectués et les engagements pris en méconnaissance des dispositions du présent alinéa peuvent être annulés. » ;
2° Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions des deux derniers alinéas de l'article L. 225-102 sont applicables aux informations visées au présent article. » ;
3° Dans la première phrase du dernier alinéa, les mots : « et deuxième » sont remplacés par les mots : « à troisième ».
II. - Après la deuxième phrase du troisième alinéa de l'article L. 225-235 du même code, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Ils attestent spécialement l'exactitude et la sincérité des informations visées aux trois premiers alinéas de l'article L. 225-102-1. »
La parole est à M. Bernard Vera, sur l'article.
M. Bernard Vera. L'article 2 ter porte, indirectement, sur la question de la rémunération des administrateurs et dirigeants d'entreprises ainsi que sur la communication des éléments de cette rémunération au cours de l'assemblée générale des actionnaires.
Créé par la loi relative aux nouvelles régulations économiques, l'article L. 225-102-1 du code de commerce est en quelque sorte amendé en reprenant en ce sens les dispositions d'une ordonnance de juin 2004.
Comment interpréter cette évolution ? Disons simplement que le texte qui nous est proposé à une double visée : d'une part, intégrer une ordonnance dans le cadre de notre droit, singulièrement du code de commerce ; d'autre part, consacrer le fait que les dirigeants salariés d'entreprises bénéficient de par leur statut d'un traitement tout à fait particulier de leur retraite.
Ainsi, pour le commun des salariés, la retraite correspond à une perte de ressources immédiate, perte s'aggravant d'autant que la réforme des retraites s'applique de plus en plus et frappe de manière déterminante les personnels d'encadrement. Pour les mandataires sociaux et les administrateurs salariés, c'est au contraire la rente à vie, provisionnée et payée sur le produit de l'activité de l'entreprise.
Nous n'évoquerons pas plus longtemps les critères qui peuvent guider la démarche visant ainsi à rassurer ces « salariés » sur les moyens dont ils disposeront pour leur retraite, mais vous nous permettrez d'estimer que cette mesure est pour le moins surprenante. Si nous ne voyons guère d'inconvénient à la publicité de ce type de procédures, autorisez-nous au moins à trouver tout simplement choquant que le droit fasse place à ce qui est une dérogation au droit commun !
M. le président. L'amendement n° 36, présenté par M. Buffet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Après les mots:
correspondant à
rédiger comme suit la fin de la deuxième phrase du texte proposé par le 1° du I de cet article pour insérer un alinéa après le deuxième alinéa de l'article L. 225-102-1 du code de commerce :
des éléments de rémunération, des contreparties financières ou des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de la prise, de la cessation ou du changement de leurs fonctions ou postérieurement à celles-ci.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. François-Noël Buffet, rapporteur pour avis. Dans la continuité de ce que nous disions précédemment, cet amendement vise à lever toute ambiguïté sur le fait que les contreparties financières liées à la cessation ou au changement de fonctions, telles que les sommes versées au titre des clauses de non-concurrence, sont soumises à l'information prévue au présent article.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission est tout à fait favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Thierry Breton, ministre. Je continue d'estimer qu'il n'y avait pas d'ambiguïté dans le texte initial, mais je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Marini, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le début de la dernière phrase du texte proposé par le 1° du I de cet article pour compléter l'article L. 225-102-1 du code de commerce :
Les versements...
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Marini, rapporteur. La loi relative aux nouvelles régulations économiques du 15 mai 2001 a prévu des modalités de transparence des rémunérations des dirigeants.
Depuis la loi de sécurité financière du 1er août 2003, et sur l'initiative de la commission des finances, cette publicité ne concerne plus que les sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé.
Toutefois, la pratique a montré que ce dispositif encore imprécis pouvait être appliqué de façon parcellaire et hétérogène.
C'est pourquoi nous approuvons l'initiative prise par la commission des lois de l'Assemblée nationale dans l'esprit des travaux qu'elle a menés l'an dernier dans le cadre de sa mission d'information sur la réforme du droit des sociétés, mission que présidait Pascal Clément.
Nous sommes en outre en phase avec l'initiative du Gouvernement tendant, on l'a vu, à soumettre certains éléments de rémunération des dirigeants de sociétés cotées au régime des conventions réglementées.
Toutefois, un point d'ordre juridique mériterait d'être éclairci, monsieur le ministre.
La nullité facultative des versements effectués et engagements pris est prévue « hormis le cas de bonne foi ». Lors de la discussion à l'Assemblée nationale, cette formule a été jugée préférable à une nullité en cas de « méconnaissance volontaire » de l'obligation d'information au motif qu'il serait difficile d'apporter la preuve de cette méconnaissance volontaire. Cependant, la formulation retenue continue à faire reposer la charge de la preuve sur le demandeur, puisque la bonne foi est, par principe, présumée.
La commission propose donc de supprimer la référence à la bonne foi, la loi étant suffisamment explicite et la nullité étant, au demeurant, facultative, ce qui laisse au juge un pouvoir d'appréciation.
Mais peut-être pourriez-vous, monsieur le ministre, apporter à la commission des éléments qui lui permettraient, le cas échéant, de modifier sa position...
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Thierry Breton, ministre. La formule « hormis les cas de bonne foi » renvoie à des situations certes rarissimes mais envisageables. Admettons par exemple qu'un dirigeant quitte l'entreprise au mois de mars. Il va indiquer à son successeur qu'elles ont été ses rémunérations, et c'est son successeur qui les déclarera ; si le successeur se trompait, ce qui peut arriver, ce serait son prédécesseur le responsable.
La référence à la bonne foi permet de résoudre les situations de cette nature, raison pour laquelle il nous semble préférable de laisser le texte en l'état.
M. le président. Monsieur le rapporteur, la commission modifie-t-elle sa position ?
M. Philippe Marini, rapporteur. L'exemple concret que vient de donner M. le ministre permettant de mieux mesurer la portée de la référence à la bonne foi, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 4 est retiré.
Je mets aux voix l'article 2 ter, modifié.
(L'article 2 ter est adopté.)