sommaire
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
2. Avenir de l'école. - Suite de la discussion d'un projet de loi d'orientation déclaré d'urgence
Amendements nos 543 de Mme Annie David, 97 de la commission et sous-amendement no 237 rectifié quinquies de M. Jean-Léonce Dupont ; amendements nos 544, 545, 548 de Mme Annie David et 187 de Mme Dominique Voynet ; amendements identiques nos 292 de M. Yannick Bodin et 546 rectifié de Mme Annie David ; amendement no 188 de Mme Dominique Voynet ; amendements identiques nos 293 de M. Yannick Bodin et 633 rectifié ter de Mme Catherine Morin-Desailly ; amendement no 549 de Mme Annie David. - Mme Annie David, M. Jean-Claude Carle, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; Mme Catherine Morin-Desailly, M. Jean-François Voguet, Mme Dominique Voynet, M. Yannick Bodin, Mme Eliane Assassi, François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. - Rejet de l'amendement no 543 ; adoption du sous-amendement no 237 rectifié quinquies et de l'amendement no 97 modifié rédigeant l'article, les autres amendements devenant sans objet.
Articles additionnels après l'article 13
Amendement no 551 de Mme Annie David. - Mme Annie David, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement no 552 de Mme Annie David. - Mme Annie David, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement no 550 de Mme Annie David. - MM. Jean-François Voguet, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Article additionnel avant l'article 14
Amendement no 554 de Mme Annie David. - Mme Eliane Assassi, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement no 555 de Mme Annie David. - Mme Annie David, MM. le rapporteur, le ministre, Mme Hélène Luc. - Rejet par scrutin public.
Amendements nos 189 de Mme Dominique Voynet et 98 rectifié de la commission. - Mme Dominique Voynet, MM. le rapporteur, le ministre, Jean-Luc Mélenchon, Mmes Catherine Procaccia, Hélène Luc, M. Jean-François Voguet, Mme Annie David. - Rejet de l'amendement no 189 ; adoption de l'amendement no 98 rectifié.
Adoption de l'article modifié.
Amendements nos 556 à 558 de Mme Annie David, 99 de la commission, 294 de M. Yannick Bodin et 408 rectifié de Mme Marie-Thérèse Hermange. - Mme Eliane Assassi, MM. le rapporteur, Yannick Bodin, Jean-François Voguet, Mme Annie David, M. le ministre. - Rejet de l'amendement no 556 ; adoption de l'amendement no 99 rédigeant l'article, les autres amendements devenant sans objet.
Amendements nos 559, 560 rectifié bis de Mme Annie David, 100 de la commission, 190 de M. Dominique Voynet et 201 de Mme Marie-Christine Blandin. - Mme Annie David, M. le rapporteur, Mme Dominique Voynet, M. le ministre. - Rejet des amendements nos 559, 190 et 201 ; adoption des amendements nos 560 rectifié bis et 100.
Adoption de l'article modifié.
Amendements identiques nos 295 de M. Yannick Bodin et 561 de Mme Annie David ; amendement no 101 de la commission. - M. Yannick Bodin, Mme Annie David, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet des amendements nos 295 et 561 ; adoption de l'amendement no 101 rédigeant l'article.
Articles additionnels après l'article 15 ter
Amendement no 208 rectifié bis de M. Jean-René Lecerf. - MM. Robert Del Picchia, le rapporteur, le ministre, Mme Marie-Thérèse Hermange. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 102 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article additionnel avant l'article 16
Amendement no 210 rectifié bis de M. André Ferrand repris par la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements identiques nos 296 de M. Yannick Bodin et 562 de Mme Annie David ; amendements nos 563 à 565 de Mme Annie David et 103 de la commission. - M. Jean-Marc Todeschini, Mme Annie David, M. Jean-François Voguet, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. le rapporteur, le ministre, David Assouline, Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles ; Jacques Legendre. - Rejet, par scrutin public, des amendements nos 296 et 562 ; rejet des amendements nos 563 à 565 ; adoption de l'amendement no 103.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 104 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Yannick Bodin. - Adoption de l'amendement rétablissant l'article.
Articles additionnels après l'article 17
Amendement no 105 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 106 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 107 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.
Amendement no 298 de M. Yannick Bodin. - MM. Yannick Bodin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement no 409 rectifié de Mme Marie-Thérèse Hermange. - Mme Marie-Thérèse Hermange, MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Amendement no 566 de Mme Annie David. - Mme Annie David, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendements nos 299 à 301 de M. Yannick Bodin, 567, 568 de Mme Annie David et 191 de Mme Dominique Voynet. - M. Jean-Marc Todeschini, Mmes Nicole Borvo Cohen-Seat, Annie David, M. Yannick Bodin, Mme Dominique Voynet, MM. le rapporteur, le ministre, Jacques Legendre, David Assouline, Mme Catherine Procaccia. - Rejet de l'amendement no 300.
Suspension et reprise de la séance
présidence de M. Philippe Richert
3. Modification de l'ordre du jour
MM. Yannick Bodin, le président, Mme Annie David, MM. Jacques Pelletier, Jean-François Voguet, Ivan Renar, Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles ; Mme Hélène Luc, M. Jean-Marc Todeschini, Mme Dominique Voynet, M. David Assouline, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Adoption, par scrutin public, de la modification de l'ordre du jour.
MM. le président, Jean-Marc Todeschini.
Suspension et reprise de la séance
4. Avenir de l'école. - Suite de la discussion d'un projet de loi d'orientation déclaré d'urgence
MM. Jean-Marc Todeschini, le président. - Rejet des amendements nos 299, 567, 568, 301 et 191.
Amendement no 108 de la commission. - MM. Jean-Claude Carle, rapporteur de la commission des affaires culturelles ; François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 18
Amendement no 569 de Mme Annie David. - MM. Jean-François Voguet, le rapporteur, le ministre. - Rejet par scrutin public.
Amendement no 302 de M. Jean-Luc Mélenchon. - MM. Jean-Luc Mélenchon, le rapporteur, le ministre, Jean-Marc Todeschini, Mme Annie David, M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis de la commission des finances. - Rejet par scrutin public.
Amendement no 297 de M. Yannick Bodin. - MM. Yannick Bodin, le rapporteur, le ministre, Jean-Luc Mélenchon. - Rejet par scrutin public.
MM. Jean-Marc Todeschini, le président.
Amendement no 303 de M. Jean-Luc Mélenchon. - MM. Jean-Luc Mélenchon, le rapporteur, le ministre, Jean-Marc Todeschini, Mme Annie David. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 304 de M. Jean-Luc Mélenchon. - MM. Jean-Luc Mélenchon, le rapporteur, le ministre, Jean-Marc Todeschini, Mme Annie David. - Rejet par scrutin public.
Suspension et reprise de la séance
Amendements nos 570, 571 rectifié de Mme Annie David, 109 de la commission, 410 rectifié et 411 rectifié de M. Marie-Thérèse Hermange ; amendement no 110 de la commission et sous-amendements nos 226 et 225 de M. Christian Demuynck ; amendement no 173 rectifié ter de M. Adrien Gouteyron, repris par la commission et sous-amendement no 655 de M. Christian Demuynck ; amendement no 175 rectifié bis de M. Yves Détraigne. - Mme Annie David, MM. le rapporteur, Jean-François Voguet, Philippe Goujon, Christian Demuynck, Yves Pozzo di Borgo, le ministre, Jean-Marc Todeschini. - Retrait des amendements nos 110, 410 rectifié et 411 rectifié, les sous-amendements devenant sans objet ; rejet, par scrutins publics, des amendements nos 570 et 571 rectifié ; adoption, par scrutin public, de l'amendement no 109 ; adoption du sous-amendement no 655, de l'amendement no 173 rectifié ter modifié et de l'amendement no 175 rectifié bis.
Mme Annie David.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 19
Amendement no 572 de M. Roland Muzeau. - MM. Bernard Vera, le rapporteur, le ministre. - Rejet par scrutin public.
MM. Serge Dassault, le ministre, Jean-Marc Todeschini, Mme Hélène Luc.
Adoption de l'article.
Amendements nos 573, 574 de Mme Annie David, 111 de la commission et 305 rectifié de M. Yannick Bodin. - MM. Ivan Renar, le rapporteur, Jean-Marc Todeschini, le ministre. - Rejet, par scrutins publics, des amendements nos 573, 305 rectifié et 574 ; adoption de l'amendement no 111.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 20
Amendement no 112 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
MM. Jean-Marc Todeschini, le président.
Amendements nos 575, 576 de Mme Annie David, 113 et 114 de la commission. - MM. Ivan Renar, le rapporteur, le ministre. - Rejet, par scrutins publics, des amendements nos 575 et 576 ; adoption des amendements nos 113 et 114.
M. Jean-Marc Todeschini.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 21
Amendement no 115 de la commission et sous-amendement no 227 de M. Christian Demuynck ; amendement no 167 rectifié (identique à l'amendement no 115) de M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur, le rapporteur pour avis, le ministre, Mme Annie David, MM. Jean-Luc Mélenchon, Christian Cointat. - Retrait du sous-amendement no 227 ; adoption, par scrutin public, des amendements nos 115 et 167 rectifié insérant un article additionnel.
Amendement no 176 rectifié ter de M. Yves Détraigne. - MM. Yves Pozzo di Borgo, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 577 de Mme Annie David. - Mme Annie David, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet par scrutin public.
Suspension et reprise de la séance
Mme Annie David, MM. le président, Yannick Bodin.
Articles additionnels après l'article 21 (suite)
Amendement no 553 de Mme Annie David. - Mme Annie David, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.
Amendement no 390 de M. David Assouline. - MM. David Assouline, le rapporteur, le ministre, Jean-Luc Mélenchon, le rapporteur pour avis, Yves Pozzo di Borgo, Mme Hélène Luc, M. Yannick Bodin. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 306 de M. David Assouline. - MM. David Assouline, le rapporteur pour avis. - Irrecevabilité.
Amendement no 116 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé.
Articles additionnels avant l'article 22
Amendement no 117 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 118 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Mme Annie David. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement no 307 de M. Yannick Bodin. - MM. Yannick Bodin, le rapporteur, le ministre. - Rejet par scrutin public.
Mme Annie David.
Amendements nos 308, 309 de M. Yannick Bodin, 578 à 580 de Mme Annie David, 631 rectifié bis de Mme Catherine Morin-Desailly, 134 rectifié bis de Mme Françoise Férat, 426, 425 rectifié de M. Yves Pozzo di Borgo, 119 de la commission. - M. Jean-Marc Todeschini, Mme Hélène Luc, M. Yves Pozzo di Borgo, Mme Françoise Férat, MM. Yannick Bodin, le rapporteur, Mme Eliane Assassi, MM. Bernard Vera, le rapporteur pour avis, le ministre, Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles ; Mme Hélène Luc. - Irrecevabilité des amendements nos 580, 631 rectifié bis et 579 ; retrait des amendements nos 119, 134 rectifié bis et 425 rectifié ; rejet, par scrutins publics, des amendements nos 308, 426, 309 et 578.
M. Jean-Marc Todeschini, Mmes Hélène Luc, Annie David.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel avant l'article 23
Amendement no 177 rectifié ter de M. Yves Détraigne. - MM. Yves Pozzo di Borgo, le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Mme Annie David.
Amendements nos 313 à 315 de M. Yannick Bodin, 368 rectifié ter de Mme Anne-Marie Payet, 584 rectifié, 581 rectifié, 582, 585, 586, 583 de Mme Annie David, 194 de Mme Dominique Voynet et 120 rectifié bis de la commission. - M. David Assouline, Mmes Anne-Marie Payet, Hélène Luc, Dominique Voynet, M. le rapporteur, Mme Annie David, M. Jean-François Voguet, Mme Eliane Assassi, MM. le rapporteur pour avis, le ministre. - Irrecevabilité de l'amendement no 586 ; demande d'un vote unique par le Gouvernement sur l'article modifié par l'amendement no 120 rectifié bis.
M. le président, Mme Hélène Luc, MM. Jean-Marc Todeschini, le ministre, Mme Annie David, MM. David Assouline, le rapporteur pour avis, Jean-François Voguet, Jacques Legendre, Yannick Bodin.
Adoption, par un vote unique au scrutin public, de l'article modifié par l'amendement no 120 rectifié bis.
MM. le président, Jean-Marc Todeschini, Mme Annie David.
Suspension et reprise de la séance
MM. Jacques Pelletier, le président, le président de la commission, Mme Annie David, M. Jean-Marc Todeschini, Mme Hélène Luc, M. Jean-Pierre Sueur.
Article additionnel après l'article 23
Amendement no 178 rectifié bis de M. Yves Détraigne. - Mme Françoise Férat, MM. le rapporteur, le ministre. - Retrait.
Reprise de l'amendement no 178 rectifié ter par Mme Annie David. - Mme Annie David. - Rejet par scrutin public.
Amendement no 121 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre, Mme Annie David, M. le président de la commission. - Adoption de l'amendement supprimant l'article.
Article additionnel après l'article 23 bis
Amendement no 122 de la commission. - MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Mme Annie David.
Amendements nos 588 et 593 de Mme Annie David ; amendements identiques nos 592 rectifié de Mme Annie David et 620 rectifié bis de Mme Catherine Morin-Desailly ; amendements nos 590, 594, 589 et 591 de Mme Annie David. - M. Bernard Vera, Mmes Annie David, Françoise Férat, Eliane Assassi, MM. Jean-François Voguet, le rapporteur, le ministre. - Retrait des amendements nos 592 rectifié et 620 rectifié bis ; rejet des amendements nos 588, 593, 590, 594, 589 et 591.
Mme Annie David.
Adoption de l'article.
MM. le président, le président de la commission, le ministre.
MM. Jean-Pierre Sueur, le ministre.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
vice-président
1
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Avenir de l'école
Suite de la discussion d'un projet de loi d'orientation déclaré d'urgence
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, d'orientation pour l'avenir de l'école. (Nos 221, 234, 239.)
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 13.
Article 13
L'article L. 313-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'orientation et les formations proposées aux élèves tiennent compte de leurs aspirations, de leurs aptitudes et des perspectives professionnelles liées aux besoins prévisibles de la société et de l'économie. »
M. le président. Je suis saisi de quatorze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 543, présenté par Mme David, MM. Renar, Ralite, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement a pour objet de supprimer l'article 13 et, s'il n'est pas adopté, nous vous proposerons toute une série de modifications pour tenter de réduire la nocivité de cet article.
La raison essentielle de cette suppression est que vous réussissez l'exploit de faire inscrire dans le code de l'éducation la subordination de l'orientation des élèves aux objectifs du « marché de l'emploi », désigné ici sous le vocable pudique « des besoins de la société et de l'économie ».
Il nous faut, cependant, reconnaître la constance avec laquelle, du « socle commun » à l'orientation des élèves, vous vous inquiétez plus des besoins à court terme du patronat, qui sont en ligne de visée de vos propositions, que de répondre aux aspirations de tous nos jeunes.
Vous le savez pourtant, l'école ne peut avoir pour simple objectif de fournir une « main d'oeuvre adaptée » aux entreprises européennes et multinationales, dans une économie ultralibéralisée, sans aucune maîtrise publique.
Nous ne pouvons accepter que le cursus de chaque enfant soit limité aux besoins immédiats des entreprises.
La seconde raison de notre amendement tient au fait que votre texte est en contradiction avec le deuxième alinéa de l'article L.313-1 du code de l'éducation, que vous proposez, heureusement, de conserver.
On ne peut pas dire d'abord que « l'élève élabore son projet d'orientation », puis que « son orientation lui est proposée », sans que l'on ne sache d'ailleurs par qui, ni comment.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de supprimer cet article 13 et de laisser en l'état le code de l'éducation.
M. le président. L'amendement n° 97, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le second alinéa de l'article L. 313-1 du code de l'éducation est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« L'orientation proposée aux élèves tient compte de leurs aspirations et de leurs aptitudes. Comme les formations offertes, elle tient également compte des perspectives professionnelles liées aux besoins prévisibles de la société, de l'économie et de l'aménagement du territoire.
« Dans ce cadre, les élèves élaborent leur projet d'orientation scolaire et professionnelle avec l'aide des parents, des enseignants, des personnels d'orientation et des autres professionnels compétents. Les administrations concernées, les collectivités territoriales, les entreprises et les associations y contribuent. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale introduisent des redondances dans l'article L.313-1 du code de l'éducation.
Il s'agit à la fois de les supprimer, d'améliorer la rédaction ainsi que l'organisation des dispositions de cet article et d'introduire le fait que l'orientation et les formations proposées aux élèves devront tenir compte des besoins liés à l'aménagement du territoire. Je crois que c'est l'une des composantes de l'orientation, dont l'objet est de répondre aux souhaits des jeunes, mais aussi aux besoins de notre économie, en particulier, de l'économie locale, et de l'aménagement du territoire.
M. le président. Le sous-amendement n° 648, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
I. Au début du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 97 pour remplacer le second alinéa de l'article L. 313-1 du code de l'éducation, ajouter les mots :
Sous réserve des obligations résultant des programmes officiels,
II. Dans le même alinéa, après les mots :
tient compte
insérer les mots :
autant que possible
Cet amendement n'est pas défendu.
L'amendement n° 237 rectifié quater, présenté par M. J.L. Dupont, Mmes G. Gautier et Payet, MM. Deneux, Nogrix, Pozzo di Borgo, Jégou, C. Gaudin et Détraigne, Mmes Dini, Morin-Desailly et Férat et M. Merceron, est ainsi libellé :
Au début de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :
... Dans la seconde phrase du second alinéa de l'article L. 313-1 du code de l'éducation, après les mots : « les collectivités territoriales, », sont insérés les mots : « les organisations professionnelles ».
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Cet amendement, assez simple, vise à permettre d'aider les élèves concernés à disposer de l'information la plus large en matière d'opportunité professionnelle. A cet égard, les organisations professionnelles disposent d'informations sur les métiers qui permettent d'apporter des éléments pertinents en matière d'orientation.
M. le président. L'amendement n° 544, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 311-1 du code de l'éducation :
« L'orientation et les formations proposées aux élèves tiennent compte, après consultation des parents ou tuteur, de leurs aspirations, de leurs aptitudes et des perspectives professionnelles. Ce sont les élèves, avec l'aide de leurs parents ou tuteur qui décident en dernier ressort, de leurs choix d'orientation et de formation. »
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Notre amendement vise à réécrire l'article 16, afin d'y inscrire ce qui nous semble être les trois dimensions qui doivent guider, à notre avis, les décisions d'orientation.
Elles placent au coeur de cette démarche, d'abord, les aspirations de l'élève, puis ses aptitudes et, enfin, ses perspectives professionnelles, le tout devant être, à notre avis, accompagné d'une réelle information des parents et des tuteurs, afin de les aider à prendre toute leur place dans l'orientation.
Notre amendement précise, enfin, qu'en dernier ressort c'est l'élève, et lui seul, qui doit décider de son orientation. Sinon, comment voulez-vous qu'il s'inscrive sérieusement, avec une perspective de réussite, dans une formation qu'il n'aurait pas choisie, voire qu'il refuserait, ce qui, malheureusement, est souvent le cas.
Par ailleurs, notre amendement confirme notre choix de supprimer toute référence aux besoins plus ou moins prévisibles de l'économie. En effet, comme l'instauration du « socle commun », cette subordination ne serait que le reflet des objectifs d'une économie libérale, qui instrumentalisent les missions de notre école et qui, malheureusement, sont au coeur de votre projet.
L'école ne peut avoir pour objectif de fournir un « capital humain » aux entreprises sur un marché unifié au sein de l'Europe. La réactivité de notre système éducatif ne peut se borner aux besoins des entreprises. C'est pourquoi nous vous demandons d'adopter notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 143, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour compléter l'article L.313-1 du code de l'éducation remplacer les mots :
de leurs aspirations, de leurs aptitudes et des
par les mots :
des exigences de la formation civique nécessaire à la préservation et au bon fonctionnement de la République ainsi qu'aux
Cet amendement n'est pas défendu.
L'amendement n° 545, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
A la fin du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 313-1 du code de l'éducation, supprimer les mots :
liées aux besoins prévisibles de la société et de l'économie
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Nous persévérons dans notre effort de supprimer dans votre texte toute référence aux besoins des entreprises.
Sans doute nous donnerez-vous acte de notre constance, qui n'est nullement fondée sur un ostracisme particulier, un refus de prendre en compte les réalités de la vie.
Dans la proposition de loi que nous avons déposée, l'une des missions de l'école est la formation du futur travailleur pour le préparer à son insertion professionnelle. Comme vous le voyez, nous sommes aussi très attentifs à cet aspect.
Notre refus s'appuie essentiellement sur notre conception humaniste du droit à l'éducation, qui repose sur quatre missions, dont l'une est assignée à l'école : transmettre des savoirs, des méthodes et des compétences constitutives d'une culture scolaire que nous voulons de haut niveau pour tous, développer toutes les capacités de chaque élève pour comprendre le monde et le transformer, former le futur travailleur, le préparer à son insertion professionnelle, enfin, éduquer le futur citoyen afin de lui permettre de participer à la vie de la cité, de l'aider à choisir et à décider.
Il nous est donc impossible d'accepter que le projet éducatif de nos enfants repose sur une quelconque adaptation à un marché du travail, dont la seule perspective est la rentabilité immédiate du capital.
M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Vive le chômage !
Mme Annie David. Notre ambition est bien plus grande. Le choix d'orientation scolaire, qui n'est pas une insertion professionnelle, ne doit pas se borner à ce besoin immédiat des entreprises, d'autant que celles-ci n'ont, en fait, aucune visibilité dans ce domaine à moyen et long terme.
Au rythme des délocalisations auxquelles nous assistons dans notre pays, on peut se demander, monsieur le ministre, si les entreprises, aujourd'hui demandeuses de main-d'oeuvre qualifiée et formée à leur mesure, seront encore là lorsque ces jeunes qui auront été orientés vers ces voies de formation auront terminé leurs études.
C'est pour toutes ces raisons que nous vous proposons d'adopter notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 548, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
A la fin du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 313-1 du code de l'éducation, remplacer les mots :
liées aux besoins prévisibles de la société et de l'économie
par les mots :
de leur choix éclairé par l'équipe pédagogique
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Deux raisons nous amènent à vous proposer la réécriture de la dernière partie du texte de cet article.
La première vise à refuser toute référence aux besoins des entreprises dans le cadre de la formation fondant pour partie l'orientation des élèves. En effet, à l'instar de l'instauration d'un « socle commun », cette subordination aux choix d'une économie libérale, qui instrumentalise les missions de notre école et qui, malheureusement, est au coeur de votre projet, ne saurait avoir notre soutien.
L'école ne peut avoir pour objectif de fournir aux entreprises un capital humain sur un marché unifié au sein de l'Europe. La réactivité de notre système éducatif ne peut se borner aux besoins des entreprises.
La deuxième raison est de signifier clairement la responsabilité importante de l'équipe pédagogique dans ses missions d'information et d'accompagnement de l'élève, ainsi que de ses parents et tuteurs.
En effet, nous ne saurions trop insister sur la mission particulière de l'équipe formée par les enseignants, les conseillers d'éducation et d'orientation, les documentalistes et tous ces professionnels qui, chacun à leur place, dans une relation particulière avec l'élève, jouent un rôle très important pour le conseiller et l'aider à construire son choix d'orientation.
Pour ces deux raisons, nous proposons au Sénat d'adopter l'amendement n° 548.
M. le président. L'amendement n° 187, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 313-1 du code de l'éducation, remplacer les mots :
besoins prévisibles de la société et de l'économie
par les mots :
exigences d'un développement durable de la société
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Il s'agit là encore de modifier le texte présenté à l'article 13 pour compléter l'article L. 313-1 du code d'éducation.
En effet, la rédaction proposée est contestable à un double titre.
En premier lieu, la prévisibilité des besoins, que ce soit ceux de la société ou ceux de l'économie, est de plus en plus sujette à caution. Il s'agit moins de prévoir, puis de s'adapter que de doter les élèves et les acteurs économiques d'une aptitude très forte et permanente au changement.
En second lieu, la durabilité de notre développement suppose que l'on remette l'économie à sa place, qui est certes importante, et que l'on introduise d'autres critères de bien-être, comme les dimensions sociale et environnementale du développement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 292 est présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 546 rectifié est présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Dans le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 313-1 du code de l'éducation, remplacer le mot :
besoins
par le mot :
évolutions
La parole est à M. Yannick Bodin, pour présenter l'amendement n° 292.
M. Yannick Bodin. Cet amendement terminologique n'est pas tout à fait neutre.
On entend souvent dire, parfois à juste raison et peut-être plus fréquemment à certaines époques qu'à d'autres, que l'école n'a pas à être au service de l'économie. En d'autres termes, il ne convient pas que les entreprises puissent décider, en fonction de leurs besoins à brève échéance, que telle ou telle formation doit être proposée aux jeunes.
De manière à éviter toute mauvaise interprétation et à ne pas entrer dans un débat à caractère idéologique qui n'a pas sa place ici, je crois donc préférable de prévoir que l'école doit tenir compte des évolutions de l'économie, plutôt que des besoins de celle-ci. Il est évident, quoi qu'il en soit, que l'école doit veiller à offrir des filières de formation débouchant sur des emplois professionnels, et non sur une impasse.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 546 rectifié.
Mme Annie David. Je fais miens les propos de M. Bodin. Il s'agit ici de caractériser l'un des éléments à prendre en compte dans l'orientation de l'élève.
Le changement de terminologie que nous proposons est de grande portée, car il reflète la vision de notre société et de l'économie que nous croyons pertinente, dans une perspective d'orientation des élèves.
A cet égard, ce n'est pas la prise en compte des besoins à court terme des entreprises qui doit prévaloir, ces dernières n'ayant par ailleurs que très rarement une réelle vision à moyen et à long terme des qualifications dont elles auront besoin à l'avenir.
Or, lorsqu'il s'agit d'orientation et non d'insertion professionnelle, il faut être capable de prévoir quelles compétences seront nécessaires demain, donc de définir le contenu des enseignements propres à former nos jeunes non seulement à des types d'emplois qui pourraient être disponibles à l'avenir, mais aussi, et surtout, à leur futur rôle de citoyens.
Comme vous le savez, mes chers collègues, lorsque l'on parle de besoins, on se réfère en général aux plus urgents, aux plus immédiats d'entre eux, en considérant qu'il sera toujours temps plus tard de se soucier des plus éloignés. Que l'on me permette de rappeler ici combien la réponse aux besoins annuels de formation des médecins ou des infirmières, par exemple, nous a fait oublier qu'il fallait de nombreuses années pour former les professionnels de ces secteurs, qui connaissent actuellement une situation difficile.
C'est pourquoi retenir le terme « évolutions » nous semblerait plus judicieux, car cela permettrait d'éloigner cette prégnance de la gestion du quotidien et d'ouvrir sur le recours aux études prospectives. Prendre en compte les évolutions de la société et de l'économie, plutôt que leurs besoins, s'inscrit donc dans une perspective bien plus large.
Ces évolutions sont multiples, bien sûr, mais elles impliquent, pour le moins, l'étude du développement des technologies et de leur insertion dans les processus de production, qui modifie bien souvent l'organisation même du travail et amène, de ce fait, une mutation des compétences liées aux actes de fabrication et de production.
Dans cette optique, les savoirs émergents, le progrès des sciences, les modifications à venir dans les relations sociales doivent être pris en considération.
On le voit, une telle vision élargie est bien plus riche au regard de l'orientation des élèves et ouvre des perspectives bien plus vastes. C'est pourquoi nous souhaitons que le Sénat adopte la modification rédactionnelle proposée au travers de ces deux amendements identiques.
M. le président. L'amendement n° 188, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 313-1 du code de l'éducation par quatre phrases ainsi rédigées :
Les élèves des deux dernières années du collège et du lycée peuvent solliciter directement ou par l'intermédiaire de leurs familles des commissions territoriales d'aide à l'orientation, composées d'enseignants, de professionnels de l'orientation, de parents et de professionnels de l'entreprise, afin d'obtenir un avis motivé sur leurs projets professionnels. Ces commissions peuvent solliciter de la part des personnels des CIO une évaluation de la solidité du projet de l'élève. En liaison avec les équipes éducatives des établissements, elles peuvent recommander à partir de là, des parcours de découverte des métiers et s'il y a lieu des parcours spécifiques visant à combler les écarts de niveau ou de compétences séparant les élèves de leur objectif. Leur avis est transmis au conseil de classe et vient en appui des équipes chargées du recrutement dans les établissements d'accueil.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Lorsque votre prédécesseur est arrivé rue de Grenelle, monsieur le ministre, il a trouvé sur son bureau, en décembre 2003, un rapport de l'Inspection générale de l'éducation nationale portant le numéro 2003-99 -c'est dire si l'on rédige de nombreux rapports dans cette maison ! -, édité par la Documentation française et traitant de l'orientation en lycée professionnel. Mon amendement en reprend les principales conclusions.
Je vous épargnerai l'exposition du raisonnement suivi par les auteurs de ce rapport, me bornant à souligner que ceux-ci estiment qu'il ne faut pas se contenter d'initiatives ponctuelles, comme les forums des métiers, les journées « portes ouvertes », les visites ou même les stages, mais qu'il faut relier entre elles les activités visant à faciliter le choix d'un métier, en développant, au collège, dès la quatrième, puis au lycée, une véritable éducation à l'orientation, pour tous et non pas seulement pour les élèves en difficulté.
A cet égard, il convient de sortir d'une simple logique de l'offre et de la demande, selon laquelle des établissements d'aval cherchent à compléter leurs effectifs tandis que l'on ne fait que constater ou contester les souhaits émis par les élèves, conformément à des stéréotypes très connotés socialement ou à des stratégies de contournement, pour promouvoir une mise en relation rationnelle et optimale de l'une avec l'autre.
L'orientation est, du point de vue de l'élève, typiquement la démarche qui mobilise des savoirs transversaux, des capacités à chercher de l'information, des aptitudes à communiquer. Du point de vue de l'institution, l'orientation ne peut être que le produit d'une mise en relation d'acteurs - je parle bien d' « acteurs », et non pas seulement d'enseignants - qui évaluent des tendances, des aptitudes, et donc des processus ou des itinéraires de formation.
De même, il est clair que les éléments à prendre en compte ne peuvent se réduire aux seuls résultats scolaires, même si ceux-ci sont évidemment décisifs. Il faut donc raisonner en termes de parcours d'orientation, et non de manière statique.
L'espace le plus pertinent pour cette rencontre et ce parcours est présenté logiquement, et pas seulement dans ce rapport, comme recoupant le bassin d'emploi et le bassin de formation. On retrouve là la nécessité de vraies politiques territoriales éducatives.
En conséquence, l'amendement n° 188 vise à faire intervenir des commissions territoriales d'aide à l'éducation, dont la fonction ne se limiterait pas au conseil à la personne, mais engloberait aussi l'appui à l'équipe pédagogique et l'aide à la décision d'orientation.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 293 est présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 633 rectifié ter est présenté par Mme Morin-Desailly, M. Nogrix, Mmes Dini et Férat, MM. Jégou, Pozzo di Borgo et J.L. Dupont.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 313-1 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée :
Elles doivent permettre l'acquisition d'une connaissance de l'expression artistique et culturelle et favoriser la promotion de la diversité culturelle.
La parole est à M. Yannick Bodin, pour présenter l'amendement n° 293.
M. Yannick Bodin. Cet amendement tend à préciser que l'éducation artistique et culturelle fait partie intégrante des formations proposées aux élèves dans le cadre de l'enseignement scolaire.
Nous avons déjà largement abordé ce sujet hier, je n'y insisterai donc pas ce matin.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour présenter l'amendement n° 633 rectifié ter.
Mme Catherine Morin-Desailly. Nous avons déjà eu l'occasion, lors de l'examen de l'article 6, de montrer notre attachement à l'acquisition, dans le cadre de la scolarité, d'une connaissance de l'expression artistique et culturelle. Je ne reviendrai pas sur l'argumentation que j'ai alors développée. Au travers de cet amendement, il s'agit simplement de compléter le texte présenté à l'article 13 par une phrase affirmant ce principe.
M. le président. L'amendement n° 549, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter in fine le texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 313-1 du code de l'éducation, par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce sont les élèves, avec l'aide de leurs parents ou tuteurs, qui décident en dernier ressort de leurs choix d'orientation et de formation. »
La parole est à Mme Eliane Assassi.
Mme Eliane Assassi. Il faut bien le constater, votre refus des modifications que nous proposons est constant, monsieur le ministre. Vous refusez ainsi de supprimer les références aux prétendus besoins des entreprises dans votre projet de loi, alors que nous pensons, quant à nous, qu'ils ne doivent pas influer sur les perspectives et les choix des élèves en matière d'orientation. Autre chose est d'assurer que c'est l'élève, entouré bien sûr de ses soutiens légaux, qui doit avoir le dernier mot en matière de choix d'orientation.
Votre texte a pour objet, dites-vous, d'ouvrir une perspective aux 150 000 jeunes qui sortent chaque année de notre système éducatif sans diplôme ni qualification. Or vous savez que, pour nombre d'entre eux, l'échec est souvent dû aux difficultés, voire au désintérêt, qu'ils ressentent à la suite d'orientations qu'ils n'avaient pas souhaitées. En effet, il est difficile de progresser dans une voie que l'on n'a pas choisie.
C'est pourquoi nous demandons, par cet amendement, que l'on fasse confiance à nos jeunes, à leurs parents et aux équipes éducatives qui les entourent pour définir ensemble le meilleur choix d'orientation et pour laisser l'élève décider, en dernier ressort, de son orientation et de sa future formation.
Nous sommes persuadés que, en adoptant cet amendement, nous nous doterons d'un atout important pour la réussite scolaire de tous.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. En ce qui concerne l'amendement n° 543, il n'est pas compatible avec la position de la commission, puisqu'il vise à supprimer l'article. La commission y est donc défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 237 rectifié quater, les organisations professionnelles peuvent contribuer à aider les élèves à élaborer leur projet professionnel. La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
En ce qui concerne l'amendement n° 544, jamais une orientation ou une formation n'est imposée à un élève. (Exclamations sur les travées du groupe CRC.)En outre, il existe, chacun le sait, une procédure d'appel. Enfin, nous avons estimé que, dans l'intérêt des jeunes, on ne peut déconnecter complètement les formations des débouchés professionnels. Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 545, la notion de besoins prévisibles recouvre celle d'évolution. Cet amendement me semble donc satisfait, et je demande son retrait.
En ce qui concerne l'amendement n° 548, il est contraire à la position de la commission, qui y est donc défavorable.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 187, puisque la notion de besoins prévisibles de la société recouvre celle de développement durable.
En ce qui concerne les amendements identiques n°s 292 et 546 rectifié, la commission a émis un avis défavorable pour les raisons que j'ai exposées à propos de l'amendement n° 545.
En ce qui concerne l'amendement n° 188, la commission préfère renforcer l'efficacité des dispositifs d'orientation existants plutôt que de créer de nouvelles structures. Elle émet donc un avis défavorable, toutefois j'approuve la suggestion de Mme Voynet d'articuler l'action éducative à l'échelon territorial du bassin de formation et du bassin d'emploi, qui me semble le plus pertinent.
En ce qui concerne les amendements identiques nos 293 et 633 rectifié ter, j'indiquerai que le code de l'éducation comporte déjà des dispositions relatives à l'éducation et à l'enseignement artistique. La commission proposera de renforcer les orientations inscrites à ce titre dans le rapport annexé, mais il ne paraît pas pertinent de faire figurer des dispositions de cet ordre à l'article 13, qui ne traite d'ailleurs pas des contenus des formations.
Cela étant, je partage le souci de Mme Morin-Desailly de développer l'enseignement des disciplines artistiques. C'est la raison pour laquelle j'avais présenté, à l'article 4, un amendement, qui a été adopté et visant à ce que soit accordé le même intérêt à toutes les formes d'intelligence, dont l'intelligence du geste, qui s'exprime dans les disciplines artistiques.
Je demanderai donc aux auteurs de ces deux amendements de bien vouloir les retirer.
La commission est défavorable à l'amendement n° 549 pour les raisons que j'ai exposées à propos de l'amendement n°544. Il n'existe pas d'inscription autoritaire d'un élève dans une filière ; les améliorations dans le domaine de l'orientation devraient, en outre, mieux éclairer les choix des élèves.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 543. Il est absolument indispensable que l'orientation tienne compte d'abord des aspirations des jeunes et de celles de leurs familles, mais également des perspectives professionnelles qui sont liées aux besoins prévisibles de la société et de l'économie. Si elle ne le faisait pas, l'école ne remplirait pas la mission qui lui est assignée de favoriser l'insertion des jeunes que la nation lui a confiés.
Il est favorable à l'amendement n° 97 de la commission, qui améliore la cohérence et la lisibilité de cet article.
Il est également favorable à l'amendement n° 237 rectifié quater. Les organisations professionnelles contribuent, en effet, à informer les élèves sur les métiers, les débouchés et les carrières.
Il est défavorable à l'amendement n° 544, car les élèves doivent jouer un rôle actif et être aidés dans l'élaboration de leur projet personnel. La décision d'orientation doit tenir compte de leurs aspirations, de leurs aptitudes et de leurs perspectives professionnelles. La procédure d'orientation doit donner lieu à un dialogue avec le jeune et sa famille, mais il n'appartient pas aux élèves de décider en dernier ressort de leur choix d'orientation.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 545, 548.
S'agissant de l'amendement 187, le projet de loi ne prévoit pas que les besoins de l'économie sont le seul indicateur relatif aux perspectives professionnelles puisqu'il mentionne expressément des besoins de la société. Les besoins prévisibles de la société doivent s'inscrire dans une logique de développement durable. L'amendement n° 187 supprimant toute référence à l'économie ne peut pas être accepté.
Le Gouvernement est défavorable aux amendements n°s 292, 546 rectifié.
S'agissant de l'amendement n° 188, l'amélioration du processus d'orientation des élèves et de leur insertion professionnelle est nécessaire. Plusieurs dispositions du projet de loi y concourent, en particulier la mise en place de la découverte professionnelle en classe de troisième. Le Gouvernement est donc défavorable à l'amendement n° 188.
S'agissant des amendements nos 293 et n° 633 rectifié ter, il n'est pas utile d'énumérer à l'article 13 les connaissances que doivent acquérir les élèves. La question de l'enseignement artistique et culturel est parfaitement réglée par les textes existants.
C'est une réforme qui a été portée par le gouvernement de Jacques Chirac en 1987 et qui a abouti à l'actuelle rédaction de l'article L. 121-6 du code de l'éducation : « Les enseignements artistiques contribuent à l'épanouissement des aptitudes individuelles et à l'égalité d'accès à la culture. Ils favorisent la connaissance du patrimoine culturel ainsi que sa conservation et participent au développement de la création et des techniques d'expression artistiques.
« Ils portent sur l'histoire de l'art et sur la théorie et la pratique des disciplines artistiques, en particulier de la musique instrumentale et vocale, des arts plastiques, de l'architecture, du théâtre, du cinéma, de l'expression audiovisuelle, des arts du cirque, des arts du spectacle, de la danse et des arts appliqués.
« Les enseignements artistiques font partie intégrante de la formation scolaire primaire et secondaire. Ils font également l'objet d'enseignements spécialisés et d'un enseignement supérieur. »
Ces amendements n'apporteraient rien de plus. Je souhaite donc que leurs auteurs acceptent de les retirer.
Enfin, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n°549.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Je proposerai aux auteurs de l'amendement n° 237 rectifié quater de le rectifier pour en faire un sous-amendement afin qu'il puisse être intégré dans l'amendement n° 97 de la commission.
M. le président. Madame Morin-Desailly, acceptez-vous la proposition de M. le rapporteur ?
Mme Catherine Morin-Desailly. Oui, monsieur le président, je l'accepte.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 237 rectifié quinquies, présenté par M. J.L. Dupont, Mmes G. Gautier et Payet, MM. Deneux, Nogrix, Pozzo di Borgo, Jégou, C. Gaudin et Détraigne, Mmes Dini, Morin-Desailly et Férat et M. Merceron, et ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du second alinéa du texte proposé par l'amendement n° 97 pour remplacer le second alinéa de l'article L. 313-1 du code de l'éducation, après les mots : « les collectivités territoriales, », sont insérés les mots : « les organisations professionnelles ».
Je mets aux voix l'amendement n° 543.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 237 rectifié quinquies.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 97.
Mme Annie David. J'ai défendu tout à l'heure un amendement qui tendait à supprimer l'article 13 du projet de loi et qui n'a pas été adopté.
L'une des raisons qui motivait notre rejet était qu'il nous semblait contradictoire de laisser à sa place le deuxième alinéa de l'actuel article L. 131-1 du code de l'éducation, selon lequel c'est l'élève qui élabore son projet d'orientation scolaire et professionnelle, alors que votre projet de loi prévoit que l'orientation est proposée à l'élève sans dire d'ailleurs par qui ni comment elle lui sera proposée.
En effet, la rédaction de ces deux alinéas illustre deux approches, deux conceptions fortes et différentes des mécanismes d'orientation. Le texte actuel du code place au coeur du dispositif l'élève lui-même, ses choix, ses aptitudes, ses envies. Il était donc prévu que l'élève élaborerait son projet éducatif, ce qui est contraire à votre projet de loi selon lequel son orientation lui est proposée.
Il s'agit, tout d'abord, de savoir par qui et comment elle lui est proposée. Ensuite, l'orientation lui sera-t-elle proposée ou imposée ?
Monsieur le rapporteur, vous nous avez dit que vous ne connaissiez pas de formation imposée. Malheureusement, nous connaissons tous des élèves à qui on a imposé une orientation et l'on sait le résultat que cela peut donner.
Cette orientation sera-t-elle proposée ou imposée à l'élève ? Comment ses parents ou ses tuteurs pourront-ils s'y opposer ? Ce sont deux questions auxquelles votre projet de loi ne répond pas.
Vous avez certainement compris la contradiction entre les deux alinéas de l'article du code de l'éducation et vous avez trouvé une parade en inversant leur position.
Vous hiérarchisez ainsi l'ordre de la démarche en commençant par imposer à l'élève, puis en lui laissant la possibilité d'élaborer son projet dans un cadre imposé.
Cette proposition de réécriture est pour nous inacceptable.
En effet, un grand nombre des jeunes en échec le sont du fait de l'orientation forcée jugée par eux inintéressante, voire dévalorisante.
Comment pouvez-vous espérer qu'un élève réussisse quand il n'aura pas choisi son orientation et que ses rêves de vie s'écroulent ?
C'est, au contraire des objectifs annoncés, vers l'échec que vous le dirigez. Vous le savez aussi, les jeunes en difficulté scolaire, souvent issus des familles les plus modestes, sont ceux à qui ces orientations seront le plus fréquemment proposées contre leur gré.
Dorénavant, à l'école comme dans la vie, en cas de difficulté, il faudra accepter ce que l'Autorité avec un grand « A » aura décidé pour nous.
Les chômeurs devront accepter n'importe quel travail disponible. Tel est le projet de société que vous nous proposez. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Les élèves en difficulté devront suivre l'orientation qui aura été choisie pour eux en fonction des places et des emplois disponibles.
C'est bien là tout le projet de société que le Gouvernement veut mettre en place. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Je vois que mes propos vous font réagir.
Mme Françoise Henneron. Non, cela fait rire !
Mme Annie David. Si cela vous fait rire, c'est triste parce que cela concerne un grand nombre de personnes et c'est bien trop grave.
La cohérence est grande entre votre politique de cohésion sociale et votre projet de loi d'orientation pour l'école. Vous l'aurez compris, c'est cette logique que nous refusons. C'est pour cette raison que nous voterons contre cet amendement.
M. le président. En conséquence, l'article 13 est ainsi rédigé, et les amendements nos 544, 545, 548, 187, 292, 546 rectifié, 188, 293, 633 rectifié ter, 549 n'ont plus d'objet.
Articles additionnels après l'article 13
M. le président. L'amendement n° 551, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 128 de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale est abrogé.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Comme pour les amendements suivants, nous demandons l'abrogation d'articles de la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale.
Dans le titre III relatif à la promotion de l'égalité des chances de cette loi, les articles 128 et suivants concernent l'accompagnement des élèves en difficulté.
Nous avons eu l'occasion, lors de la discussion de cette loi à l'automne 2004, de critiquer certaines de ces dispositions qui, nous semblait-il, étaient très en deçà des besoins réels des élèves en difficulté. Nous avons eu à ce sujet des débats très intéressants avec M. Borloo sur les résultats de ces équipes éducatives.
C'est ce dispositif dont traite l'article 128 et que nous vous demandons d'abroger.
Certes, l'objectif d'un tel dispositif est la prévention précoce des difficultés rencontrées par les élèves. Mais c'est tout ce que nous en savons. Le plus grand flou règne sur des modalités de leur mise en oeuvre et sur les structures chargées de cette mise en oeuvre.
En matière de prévention des difficultés, les assistants d'éducation jouaient ce rôle d'accompagnement que vous souhaitez donner aux dispositifs de réussite éducative. Pourtant, vous avez décidé, sans hésiter un instant, de les supprimer. Tout cela manque de cohérence !
Ce qui est également regrettable, c'est que l'article 128 n'insère ces dispositifs ni dans le code de l'éducation, ni dans le code général des collectivités territoriales, ce qui en réduit considérablement la portée.
Vient ensuite le problème du coût de ces dispositifs de réussite éducative.
Il est en effet aisé pour le Gouvernement de proposer des dispositifs d'aide aux enfants en difficulté et de les faire ensuite financer par les collectivités territoriales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 552, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 129 de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale est abrogé.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Nous vous proposons d'abroger l'article 129 de la loi de programmation pour la cohésion sociale, qui crée les établissements publics locaux de coopération éducative.
Les dispositions contenues dans le titre III de cette loi, relatives à l'accompagnement des élèves en difficulté, sont typiques de votre conception du service public de l'éducation.
Vous commencez par démanteler la communauté éducative, comme nous l'avons constaté. Les assistants d'éducation ont été supprimés, les personnels techniciens ouvriers et de services seront transférés aux départements et aux régions, alors que tous ces personnels non enseignants, placés aux côtés des élèves, sont indispensables aussi bien sur le plan éducatif que sur le plan social. Ils jouent un rôle d'écoute, mais aussi d'accompagnement.
Je vous rappelle également que le statut des maîtres d'internat et surveillants d'externat, les MI-SE, risque d'être abrogé, entraînant la disparition de ces jeunes dans les établissements scolaires.
Mme Annie David. Ils seront remplacés, mais pas par les mêmes personnes puisque les nouveaux surveillants des établissements ne seront pas forcément des étudiants. Ils devront assurer un temps de travail important qui ne leur permettra sans doute pas de poursuivre des études.
Mme Annie David. Les MI-SE vont donc disparaître et les surveillants ne seront plus des jeunes issus de milieux très populaires qui pouvaient, grâce à leur travail dans les établissements scolaires, financer leurs études.
Votre gouvernement décide donc de remettre en cause la cohésion de la communauté éducative et de remplacer l'action positive des personnels qui étaient présents dans les établissements par de nouvelles structures, et tout cela dans un flou financier inacceptable !
Ce sont donc des établissements publics locaux de coopération éducative, constitués par une commune ou par un EPCI avec l'Etat, qui seront désormais chargés de mobiliser et de coordonner l'ensemble des acteurs afin de contribuer au développement et au soutien éducatif, culturel, social et sanitaire des enfants.
Une fois de plus, le Gouvernement déleste l'Etat de ses missions régaliennes et fait peser sur les collectivités une responsabilité qui n'est pas la leur, avec une absence cruelle de moyens. Nous l'avons déjà dit lors de l'examen du projet de loi de cohésion sociale, et nous le répétons aujourd'hui, nous n'acceptons pas cette situation. C'est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de l'article 129 de la loi de cohésion sociale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission émet le même avis défavorable qu'à l'amendement précédent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 550, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 13, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 131 de la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale est abrogé.
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Avec cet amendement, nous revenons au problème déjà exposé dans les précédents amendements. Nous assistons en effet au développement d'établissements publics chargés de concourir à l'accompagnement des élèves et de mettre en place des dispositifs de réussite éducative.
Selon l'article 131 de la loi de programmation pour la cohésion sociale, « des groupements d'intérêt public peuvent également être créés pour apporter [...] un soutien éducatif, culturel, social et sanitaire aux enfants relevant de l'enseignement du premier et du second degrés. » Cette prolifération de structures juridiques diverses chargées de participer au service public de l'éducation n'est pas sans danger. Nous assistons, malheureusement, au démantèlement de l'Etat au profit d'établissements qu'il ne contrôlera que très partiellement, et cela dans le domaine de l'éducation, service public qui n'a de cohérence que parce qu'il est national.
La multiplication des établissements publics et d'autres groupements d'intérêt public ne fera qu'accentuer des inégalités que nous combattons par ailleurs. C'est pourquoi nous demandons la suppression de toutes ces dispositions, et, en l'espèce, de l'article 131 de la loi de cohésion sociale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 550.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Section 1
Enseignement du premier degré
Article additionnel avant l'article 14
M. le président. L'amendement n° 554, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 14, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 321-1 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'école maternelle constitue le premier cycle de l'école primaire. Elle a pour fonction de faciliter la socialisation des enfants et leur entrée dans les premiers apprentissages. Les enseignements y sont assurés par des professeurs d'école assistés - pour les besoins corporels notamment - d'agents territoriaux spécialisés. Ces enseignants constituent la base d'une culture commune indispensable à tous. »
La parole est à Mme Eliane Assassi.
Mme Eliane Assassi. L'école maternelle, même en dehors du cadre de l'obligation scolaire, est devenue l'école de tous. Elle scolarise 95 % des enfants de trois ans et la quasi-totalité des enfants de cinq ans.
Une pédagogie qui se déploie sur trois années doit faire évoluer ses objectifs au rythme de progression de l'enfant, qui accède à l'autonomie. L'installation progressive d'un cadre de travail suppose, en étroite concertation avec les parents, un temps de présence suivi et régulier des enfants.
Même lorsqu'elle s'ouvre aux moins de trois ans, la maternelle ne se confond pas avec les structures d'accueil, car elle scolarise des enfants. C'est une école ! Elle met donc en oeuvre des pratiques pédagogiques précises en vue d'apprendre à l'enfant les concepts de base : améliorer sa motricité, maîtriser les aptitudes nécessaires à la lecture, à l'écriture, à l'arithmétique, pour s'exprimer, apprendre à écouter, être indépendant ...
Le rôle de l'école maternelle est donc riche et diversifié à l'image des enfants qu'elle scolarise. En ce sens, elle est le fondement du système éducatif, particulièrement lorsqu'il s'agit de faire reculer l'échec scolaire. Elle acquiert de plein droit sa place de première école, qui ne peut être une simple propédeutique à des enseignements qui débuteraient à la « grande école ».
L'organisation de la scolarité en cycles, qui place la grande section à la charnière de deux cycles, ainsi que la scolarisation de la quasi-totalité des enfants de trois ans et d'une partie importante des enfants de deux à trois ans sont autant d'éléments qui imposent à l'école maternelle de nouveaux défis et de nouvelles exigences.
Leur mise en forme dans le cadre de la loi serait une fois de plus l'occasion de montrer le dynamisme et la force de notre école maternelle, dont les objectifs prioritaires doivent être la prise en compte des caractéristiques sociales et culturelles de chaque élève et la réussite scolaire de tous.
Nous devons faire preuve d'ambition afin que tous les élèves entrent dans les apprentissages et osent s'aventurer dans les savoirs. Tel est l'objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. L'amendement n° 554 tend à inclure de façon confuse l'école maternelle dans l'école primaire. L'article 14 du projet de loi prévoit déjà que la formation maternelle prépare les enfants aux apprentissages fondamentaux dispensés à l'école primaire.
Par ailleurs, l'article L. 321-2 du code de l'éducation prévoit que l'Etat affecte dans les classes le personnel enseignant nécessaire à l'exercice de ses missions éducatives.
Pour toutes ces raisons, je vous demande, madame Assassi, de bien vouloir retirer votre amendement. A défaut, la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 554.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 14
Le premier alinéa de l'article L. 321-2 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elle remplit au sein du service public de l'éducation nationale une mission éducative et comporte une première approche des outils de base de la connaissance et prépare les enfants aux apprentissages dispensés à l'école élémentaire. »
M. le président. L'amendement n° 555, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Au début de cet article, ajouter un paragraphe ainsi rédigé :
... Au début de l'article L. 321-2 du code de l'éducation, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« La scolarisation des enfants de deux ans doit être assurée pour toute famille qui en fait la demande. Cette scolarisation reste assurée en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement vise la scolarisation des enfants de moins de trois ans, qui doit pouvoir être assurée aux familles qui en font la demande.
L'amendement n° 555 est donc inspiré par la volonté de voir particulièrement reconnue la valeur des actions éducatives menées dans nos écoles maternelles. Il faut, nous semble-t-il, inscrire dorénavant dans la loi l'intégration organique de notre école maternelle au sein de notre système éducatif obligatoire.
En effet, tout le monde s'accorde à reconnaître notre école maternelle comme un lieu indispensable d'apprentissage et de socialisation. Notre école maternelle nous est même enviée par de nombreux pays, en particulier en Europe.
Le législateur devrait donc entériner le succès reconnu de notre école maternelle et renforcer les premiers apprentissages, comme le nécessaire développement précoce de la socialisation de nos enfants, en inscrivant officiellement ces deux missions dans un premier niveau essentiel à l'acquisition d'une culture commune. Cela suppose, chacun l'aura compris, que l'école obligatoire commence dès l'âge de trois ans.
Par cet amendement, nous souhaitons donc empêcher tous les risques de dérives tendant à transformer notre école maternelle en simple garderie. Nous souhaitons également que les enfants de moins de trois ans aient accès à l'école maternelle, rendue obligatoire dès l'âge de trois ans.
Nous le savons tous, même si certains ne veulent pas les prendre en compte, les études de certains spécialistes concluent avec force que la scolarisation des enfants de moins de trois ans, dans certains milieux en tout cas, permet véritablement de lutter contre l'échec scolaire. C'est une raison supplémentaire de vouloir la permettre à toutes les familles quand on veut lutter contre l'échec scolaire sur l'ensemble de notre territoire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable, car l'article L.113-1 du code de l'éducation prévoit déjà l'accueil prioritaire des enfants de deux ans dans les zones défavorisées.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. On ne peut pas balayer d'un revers de main, comme le font régulièrement les sénateurs du groupe communiste, les très nombreuses études qui montrent les dangers que pourrait représenter la scolarisation des enfants à deux ans dans un certain nombre de cas.
Madame la sénatrice, face à un problème aussi grave que celui-là, on n'avance pas des certitudes comme vous venez de le faire. On cherche plutôt à s'interroger, et l'on compare les avis.
Je l'ai déjà indiqué, nous organiserons l'année prochaine, à l'instar de ce qui se fait dans le domaine médical lorsqu'il y a un doute sur l'efficacité d'un traitement ou d'un médicament, une conférence de consensus sur la scolarisation des enfants de moins de deux ans. Tous les avis seront mis sur la table, puis nous déciderons.
Je me demande souvent si, sur cette question, on défend l'intérêt des enfants, celui des familles ou d'autres intérêts qui ne seraient ni ceux des enfants ni ceux des familles.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Monsieur le ministre, vous nous annoncez la tenue d'une conférence de consensus afin de connaître tous les avis sur ce sujet. C'est très bien ! Mais, puisque vous nous reprochez de balayer d'un revers de main des études dont vous avez connaissance, je vous signale que d'autres études existent et qu'elles ont des conclusions contraires aux vôtres.
La conférence de consensus permettra de mettre sur la table tous les avis, mais encore faut-il que tous les spécialistes et différentes personnalités y soient invités afin de faire connaître leur position.
Par ailleurs, vous n'avez pas à nous accuser de ne pas défendre l'intérêt des enfants et de préférer celui des familles. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Mme Annie David. C'est bien aux enfants que nous pensons. Certaines communes rurales manquent, en effet, de garderie. Si les parents demandent la scolarisation de leurs enfants de moins de trois ans, c'est parce que les enfants en ont effectivement besoin.
D'ailleurs, nous avons déposé un amendement afin que l'on parle non plus d'accueil en école maternelle, mais de scolarisation. Ce mot, qui a une valeur forte, symbolise les premiers apprentissages des savoirs que les enfants doivent pouvoir emmagasiner tout au long de leur vie d'élève, puis d'étudiant, que nous leur souhaitons la plus longue possible afin de pouvoir acquérir des connaissances leur permettant d'avoir un métier intéressant.
Monsieur le ministre, j'espère que de nombreuses personnes pourront participer à votre conférence de consensus. Si vous y invitez des personnalités politiques, j'espère que vous ferez appel aux représentants du parti communiste, car nous y avons aussi notre place.
Quant à vos reproches de ne pas nous préoccuper des enfants, j'aimerais bien ne plus les entendre. Ce n'est pas parce que nous ne sommes pas du même avis que vous que nous avons forcément tort. Nous ne détenons sans doute pas la vérité, mais vous non plus !
Chacun défend les idées qu'il croit bonnes pour l'école de la République, pour l'école de nos enfants. Et c'est avant tout à nos jeunes que nous pensons ! J'aimerais qu'avant la fin de ce débat, qui risque encore de durer un peu de temps, vous reconnaissiez que nous défendons bien l'intérêt de l'ensemble de nos jeunes. D'ailleurs, lors de la discussion des articles et des amendements que nous venons d'examiner, il m'a semblé que vous portiez un intérêt plus grand à l'économie et aux entreprises qu'à nos jeunes.
A la question « qui défend quoi ? », je réponds que nous persisterons tout au long de ce débat à défendre nos amendements dans l'intérêt de nos jeunes.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, je voudrais expliquer mon vote.
M. le président. Madame, vous disposez de cinq minutes au maximum. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, il n'y a personne de l'autre côté de l'hémicycle, laissez au moins parler ceux qui sont présents depuis le début du débat et qui ont quelque chose à dire. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Au lieu de protester, mes chers collègues, vous devriez vous compter. Vous n'êtes même pas dix pour défendre un projet de loi que le Gouvernement veut faire passer en force !
M. Robert Del Picchia. Et vous, vous êtes combien ?
M. Christian Cointat. On est plus nombreux que vous !
Mme Hélène Luc. On en reparlera cet après-midi, mais il paraît que l'on veut nous faire siéger demain samedi, alors que l'on a supprimé les trois lectures de ce texte. Pourtant, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous aurions eu vraiment besoin de plusieurs lectures. Car nous discutons de sujets difficiles, délicats, qui ont une importance décisive pour un certain nombre d'enfants et qui mériteraient que le Parlement s'y attarde.
Ce n'est pas la peine de défendre le bicamérisme si l'on fait en sorte qu'une seule assemblée, l'Assemblée nationale en l'occurrence, décide.
Nous subissons de nombreuses pressions pour que le débat se termine le plus rapidement possible. Eh bien, non ! Nous prendrons le temps qu'il faut pour discuter de ce projet de loi.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Nous aussi !
Mme Hélène Luc. Nous ne voulons pas décevoir les parents, les enseignants, les lycéens et les étudiants, qui nous interpellent. Par nombre d'e-mails, de résolutions, de lettres, ils nous demandent de ne pas accepter ce projet de loi en l'état.
Voilà ceux dont nous défendons ici les intérêts ! Ils nous demandent de le faire et nous le ferons jusqu'au bout !
Monsieur le ministre vous nous parlez sans cesse d'élèves en difficultés et de l'aide que vous voulez leur apporter. Eh bien, notre amendement est clairement destiné à aider les enfants à aborder leur scolarité dans les meilleures conditions, sans que le dispositif que nous proposons ait, au demeurant, le moindre caractère obligatoire.
Cela étant, il existe aussi des études qui concluent que la meilleure solution est celle qui voit les femmes rester à la maison pour s'occuper de leurs enfants parce que, à deux ans, on est encore trop jeune pour aller à l'école ! De toute façon, les associations de parents d'élèves de l'enseignement catholique, les syndicats et toutes les associations de parents d'élèves sont favorables à ce que l'on maintienne cette possibilité. C'est ce qui ressort des auditions auxquelles la délégation aux droits des femmes a procédé.
Mais il faut aussi considérer le cas des familles où il n'y a pas de livre, où il n'y a pas de vie culturelle, où les parents sont au chômage, où les parents sont RMIstes, dont le nombre, vous le savez, dépasse aujourd'hui le million et s'accroît de jour en jour. Les enfants de ces familles doivent avoir la possibilité d'aller à l'école maternelle parce que celle-ci représente pour eux le meilleur lieu de socialisation et le tout premier contact avec l'apprentissage des connaissances.
La possibilité de fréquenter l'école maternelle dès l'âge de deux ans n'est pas une condition suffisante, malheureusement, mais c'est une condition nécessaire pour que ces enfants retirent du cours préparatoire un bénéfice et qu'ils sachent lire correctement à la fin de celui-ci afin de poursuivre normalement leurs études à l'école élémentaire.
Voilà pourquoi nous tenons beaucoup à cet amendement et demandons que le Sénat se prononce à son sujet par scrutin public.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 555.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 127 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 189, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour compléter le premier alinéa de l'article L. 321-2 du code de l'éducation :
« Les activités pratiquées dans les classes enfantines et la démarche éducative en école maternelle visent à favoriser l'éveil de la personnalité de l'enfant, l'apprentissage de la vie collective, l'accès à l'expression orale, artistique et corporelle. L'école maternelle n'a pas pour objet l'apprentissage de la lecture, de l'écriture ou d'autres disciplines scolaires, mais tend à prévenir les difficultés scolaires, dépister les handicaps et à compenser les inégalités. »
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Avant de présenter cet amendement, j'aimerais revenir brièvement sur le débat qui vient d'avoir lieu.
Je fais partie de ceux qui ne sont pas totalement convaincus de l'intérêt d'une scolarisation des enfants de deux ans en maternelle, et je dois dire que, si j'ai néanmoins voté avec mes camarades l'amendement précédent, monsieur le ministre, c'est parce que j'ai été gênée que vous fassiez mine de douter des motivations de nos collègues communistes à cet égard.
Beaucoup de gens notent que l'isolement de certaines familles expose leurs enfants à des difficultés d'intégration scolaire et sociale, ainsi qu'à l'échec scolaire susceptible de s'ensuivre. Ce point fait l'objet de controverses où s'affrontent des positions aussi nobles et défendables les unes que les autres. C'est pourquoi, monsieur le ministre, j'approuve votre idée d'une conférence de consensus sur ce sujet. Je désapprouve néanmoins la fin de votre argumentation, qui semblait donner à penser que, ici, certains sont moins soucieux que d'autres de l'intérêt des enfants.
L'amendement n° 189 ne tend pas à relancer la querelle fort ancienne, et qui fait l'objet d'innombrables colloques, opposant préparation au savoir scolaire et épanouissement personnel. Simplement, il me semble que l'école maternelle ne doit décidemment pas être conçue comme un moment où l'on ne ferait que commencer, avant le primaire, ce qu'on fera en primaire.
La maternelle est un moment éducatif particulier, où l'enfant découvre ce qu'est un savoir, que celui-ci soit abstrait ou concret. Ce savoir n'est pas seulement donné par l'autorité, il ne se produit pas magiquement, mais il est construit par l'expérience, par la mise en relation, par la découverte, par le contact, par la négociation avec les autres. Cet apprentissage met en jeu une certaine régulation de soi, de ses émotions : en maternelle, apprendre c'est d'abord résoudre un problème en comprenant des liens.
La maternelle fait ainsi découvrir à l'enfant un nouveau statut, celui d'apprenant, dans lequel il y a des rôles : l'institutrice, le professeur, la dame de service, la directrice ; j'emploie le féminin parce que c'est aujourd'hui la réalité, même si je déplore que les modèles offerts aux tout jeunes enfants ne soient pas des modèles des deux sexes.
Il y a des objectifs, des itinéraires, des procédures, il y a des moments où l'on apprend, d'autres où l'on oublie, des moments où l'on se trompe, d'autres où l'on se corrige.
Il faut donc cesser d'entretenir un productivisme scolaire qui devient à la longue totalement contre-performant parce qu'il ignore les étapes. En voulant aller trop vite, on fabrique de l'échec, on perd du temps. C'est d'ailleurs un message qui ne vaut pas uniquement pour les membres du Gouvernement, mais aussi pour les parents, qui ne sont pas les derniers, parfois, à « mettre la pression ».
L'institution scolaire doit aussi faire passer le message selon lequel les choses doivent se faire au rythme d'enfants tout petits, qui découvrent la vie avec les autres.
M. le président. L'amendement n° 98, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la phrase proposée par cet article pour compléter le premier alinéa de l'article L. 321-2 du code de l'éducation :
« L'école maternelle remplit une mission éducative, comporte une première approche des outils de base de la connaissance et prépare les enfants aux apprentissages fondamentaux dispensés à l'école élémentaire. »
Le sous-amendement n° 649, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
I. Rédiger comme suit le début du texte proposé par l'amendement n° 98 pour rédiger la phrase proposée par cet article pour compléter le premier alinéa de l'article L. 321-2 du code de l'éducation :
La mission éducative de l'école maternelle comporte...
II. Compléter ce même texte par les mots :
et leur apprend les exigences de la vie en société.
III. En conséquence dans le même texte, remplacer le mot :
et
par le signe de ponctuation :
,
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 98.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement vise tout d'abord à améliorer la rédaction du présent article et ensuite à préciser que l'école maternelle a pour mission de préparer les enfants aux apprentissages fondamentaux dispensés à l'école élémentaire.
Constatant que M. Charasse n'est pas présent dans l'hémicycle pour défendre son sous-amendement, qui avait reçu un avis favorable de notre commission, je rectifie mon amendement de manière à y intégrer les modifications que notre collègue avait souhaité y apporter.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 98 rectifié, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, et ainsi libellé :
Rédiger comme suit la phrase proposée par cet article pour compléter le premier alinéa de l'article L. 321-2 du code de l'éducation :
« La mission éducative de l'école maternelle comporte une première approche des outils de base de la connaissance, prépare les enfants aux apprentissages fondamentaux dispensés à l'école élémentaire et leur apprend les exigences de la vie en société. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Sur cette question difficile de l'école maternelle, je voudrais faire remarquer que le Gouvernement n'a pas d'attitude dogmatique : si nous avons un doute concernant la question de la scolarisation des enfants à l'âge de deux ans, nous avons néanmoins maintenu les dispositions issues de la loi de 1989 permettant l'accueil des enfants dès l'âge de deux ans lorsque les nécessités sociales, notamment, l'imposent.
Si j'entendais les membres du groupe CRC formuler la même interrogation, si je les voyais adopter une position aussi mesurée, je n'aurais pas à dire ce que j'ai dit tout à l'heure. Ce que j'entends, ce que je vois, ce sont des amendements qui tendent à imposer coûte que coûte cette scolarisation à deux ans.
J'en viens à l'amendement n° 189. Son adoption conduirait à reprendre à l'identique, dans le second alinéa de l'article L. 321-2 du code de l'éducation, des éléments du premier alinéa. Je ne vois pas son utilité et j'y suis donc défavorable.
Je suis, en revanche, favorable à l'amendement n° 98 rectifié, qui rend la formulation plus claire et plus correcte.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Mélenchon. Sur ces sujets, nous devons nous référer aux connaissances issues des travaux scientifiques.
Or ces derniers indiquent qu'il n'y a pas de mode évident de prise en charge de la très jeune enfance. L'histoire comme l'anthropologie sociale nous montrent que tous les modes ont été expérimentés par l'espèce humaine : la prise en charge par la seule mère, par la famille, selon des acceptions variées du terme, par un groupe plus élargi, etc. Aucune règle en la matière ne s'impose du fait d'un mythique « état de nature », et cela vaut d'ailleurs pour pratiquement tous les aspects de la condition humaine.
On ne peut donc pas exclure par principe le fait que nous soyons poussés de tel ou tel côté dans nos choix, dans nos décisions, et il n'est pas possible de dire a priori que tel choix sera « mauvais par essence ». Il faut, par conséquent, être pragmatique et regarder ce qui fonctionne. Il n'y a pas de règle absolue. Dans certains cas, la prise en charge des petits enfants par la famille se révélera très positive, très épanouissante, alors que dans d'autres elle produira des résultats totalement lamentables.
Dès lors, la réalité commande de considérer que, chaque fois que les parents le demandent, ils doivent pouvoir trouver le service public de l'école maternelle : c'est cela le moyen terme entre l'obligation pour tous et l'absence totale de structure publique.
Il convient là de mettre cette discussion en relation avec d'autres réalités. En effet, si l'école maternelle est en France si performante et si développée, c'est aussi parce que notre pays est exceptionnel à un autre titre, parce qu'il détient, en Europe, le record du travail féminin.
Mme Dominique Voynet. Heureuse exception !
M. Jean-Luc Mélenchon. Absolument ! Les Françaises et les Français considèrent en effet que l'autonomie personnelle passe par cette autonomie professionnelle.
Dès lors, la question est de savoir où vont les enfants lorsque leur père et leur mère travaillent tous les deux. La réponse de ceux qui, comme nous, croient à la vertu de l'école publique, c'est que mieux vaut qu'ils aillent à l'école !
Comme l'a dit Mme Voynet, il ne s'agit pas de tendre vers un productivisme scolaire consistant à gaver de savoir les enfants dès leur premier âge, car cela n'a effectivement pas de sens. Ce que l'on construit, c'est le jeune être humain dans sa capacité à maîtriser un certain nombre de fonctions qu'il lui faut bien apprendre : marcher, parler, négocier avec le voisin, ne pas tout régler à coup de paires de claques, découvrir et maîtriser sa propre sensibilité et, à partir de là, savoir construire des relations humaines.
Ces deux amendements sont de bon sens et, si le ministre veut bien suivre ce qui a été proposé par Mme Luc et comprendre ce qu'a dit Mme Voynet, tout sera pour le mieux.
Je ne vois pas ce qu'il y a de si extraordinaire à dire que, si les parents travaillent, nous souhaitons que leurs enfants soient correctement éduqués et que ce la passe par le service public. La belle affaire !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Le débat sur les enfants de deux ans agite beaucoup les parents et la communauté éducative depuis de nombreuses années.
J'ai participé, comme Mme Luc, à bon nombre de réunions concernant les crèches, qui peuvent accueillir les enfants jusqu'à l'âge de trois ans.
Par ailleurs, la plupart des enseignants, notamment ceux de notre département, madame Luc, estiment que les structures de l'école maternelle ne sont pas vraiment adaptées à l'accueil de jeunes enfants de deux ans.
Mme Annie David. Pas tous les enseignants !
Mme Catherine Procaccia. J'ai, pour ma part, déposé un amendement sur le cas des enfants que l'éducation nationale appelle à tort « des enfants de deux ans ». En effet, pour l'éducation nationale, un enfant de deux ans peut être âgé de deux ans et onze mois. Or, dans un amendement, la formulation « enfant de deux ans » renvoie à un enfant âgé de vingt-quatre mois, mais, à cet âge, il n'est peut-être pas prêt à être scolarisé. En revanche, un enfant de trente mois ou de trente-cinq mois peut l'être.
Pour d'autres raisons, nous ne pouvons scolariser les enfants à deux ans ou deux ans et demi, uniquement parce que les parents le demandent, notamment pour ne pas payer la crèche ou la nourrice, et pas forcément dans l'intérêt de l'enfant.
Par conséquent, je ne pense pas qu'il faille demander systématiquement la scolarisation des enfants de deux ans. En revanche, personnellement, j'aimerais que l'éducation nationale cesse d'utiliser l'expression « enfants de deux ans » pour des enfants âgés de vingt-quatre mois ou de trente-cinq mois.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc.
Mme Hélène Luc. Une étude sur la scolarisation des enfants de deux ans a été réalisée dans le département du Val-de-Marne. Comme par hasard, c'est dans les villes de Vincennes, dont vous avez été l'élue, madame Procaccia, de Saint-Mandé, de Saint-Maur, où les parents et les enfants ont beaucoup moins besoin de l'école maternelle, que les enfants de deux ans sont le moins scolarisés !
On en revient toujours à la même question : comment aider les jeunes qui sont le plus en difficulté ? La solution s'impose d'elle-même ! Et le problème ne se pose pas seulement quand les deux parents travaillent parce que, malheureusement, dans beaucoup de familles, les deux parents sont au chômage ou perçoivent le RMI !
Je suis convaincue que, pour la plupart des enfants de toutes ces familles en situation difficile, la meilleure solution est l'école maternelle, même si celle-ci n'est malheureusement pas, à l'heure actuelle, équipée pour recevoir des enfants de deux ans, ce que je déplore, monsieur le ministre. Il devrait y avoir une structure intermédiaire entre la crèche et la maternelle ; c'est le rôle que jouaient autrefois les jardins d'enfants.
Il est vrai que, parfois, dans les écoles maternelles, les enfants de deux ans ne peuvent pas faire la sieste correctement. Néanmoins, même dans les conditions actuelles, je préfère que ces enfants puissent être scolarisés et que la loi indique clairement que cette possibilité est offerte aux familles.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Je ne comprends pas très bien ce débat : il ne s'agit aucunement d'obliger quiconque à envoyer son enfant à l'école dès l'âge de deux ans !
Mme Hélène Luc. Bien sûr !
M. Jean-François Voguet. D'ailleurs, les textes prévoient la possibilité de scolariser les enfants à partir de deux ans à l'école maternelle. Il s'agit donc du libre choix des parents.
Il faut évidemment prendre en compte le développement spécifique de l'enfant, certains enfants de deux ans étant autonomes, d'autres moins. Il faut également prévoir une organisation spécifique de la classe, avec des effectifs allégés, du personnel d'accompagnement - les agents spécialisés des écoles maternelles, les ASEM - supplémentaire, des rythmes différents.
Je peux vous assurer que, dans une ville comme celle que j'administre, où se trouvent des familles en très grande difficulté, chacun s'accorde à dire que, à deux ans, l'enfant est beaucoup mieux à l'école maternelle que dans un logement surpeuplé, insalubre...
Mme Hélène Luc. Eh oui !
M. Jean-François Voguet. ...et que les conditions de son épanouissement passent indéniablement par l'école.
J'ajoute qu'il convient de prendre en compte l'évolution de la société : le travail des femmes, mais aussi les familles en situation de précarité, les parents au chômage, qui n'ont d'autre solution que de mettre leur enfant à l'école lorsque c'est possible.
Je veux enfin souligner que l'école maternelle n'est pas un mode de garde ; d'une part, c'est une école et, d'autre part, elle est gratuite, ce qui constitue indéniablement, compte tenu du coût des assistantes maternelles et des crèches, un élément de justice sociale.
Mme Hélène Luc. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 98 rectifié.
Mme Annie David. Nous ne pourrons pas voter cet amendement qui donne un rôle quelque peu réducteur à l'école maternelle. Il y est en effet précisé que la mission éducative de l'école maternelle est de préparer les enfants aux apprentissages fondamentaux dispensés à l'école élémentaire. Cela signifierait-il que les apprentissages dispensés à l'école maternelle ne sont pas fondamentaux ? Il est vrai que le long débat que nous avons eu hier sur le socle des fondamentaux a permis de mesurer nos désaccords !
Cet amendement réduit la mission de l'école maternelle à la préparation des apprentissages fondamentaux futurs, évidemment utilitaristes. Or l'école maternelle, dans sa mission d'apprentissage des premiers savoirs, doit avoir, elle aussi, une place fondamentale. Il serait injuste de ne pas la lui accorder.
Quant à la scolarisation des moins de deux ans, je vous rappelle qu'elle est autorisée dans les zones d'éducation prioritaires. Nous vous demandons simplement d'offrir cette possibilité à tous les enfants, où qu'ils habitent sur notre territoire.
M. le président. En conséquence, l'article 14 est ainsi rédigé.
Article 15
Dans la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 321-3, après les mots : « Elle offre » sont insérés les mots : « une première approche d'une langue vivante étrangère en donnant la priorité à l'expression orale et ».
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 556, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
La deuxième phrase du second alinéa de l'article L. 321-3 du code de l'éducation est complétée par les dispositions suivantes :
« et un premier apprentissage d'une langue vivante étrangère par un enseignant dûment qualifié. La continuité d'une discipline artistique comme de l'apprentissage d'une langue étrangère doit être garanti de l'école élémentaire au collège et au lycée. »
La parole est à Mme Eliane Assassi.
Mme Eliane Assassi. L'enseignement précoce d'une langue étrangère, lorsqu'il se produit dans un contexte scolaire, a obligatoirement des répercussions sur l'ensemble des apprentissages. De récents travaux insistent sur les effets bénéfiques de l'apprentissage d'une langue étrangère sur le développement des compétences dans la langue maternelle ou sur le développement des compétences linguistiques en général.
Avec cet article, l'apprentissage d'une langue vivante devrait donc remplacer l'initiation auparavant mise en oeuvre.
Il convient tout de même de rappeler que cet enseignement est inscrit dans les programmes de l'école primaire depuis plusieurs années, mais que les conditions ne sont pas toujours réunies pour qu'il soit bien dispensé. Selon le ministère, 82 % à 94 % des élèves de cours moyen apprennent une langue vivante. Néanmoins, selon ce bilan, il reste 3 800 classes sans cours de langue dans l'enseignement public.
Trop souvent aussi, le choix de la langue répond à la loi de l'offre et de la demande. Il est plus fréquemment imposé que décidé par l'équipe éducative. La pression sociale conduit à préférer l'anglais, d'autant que l'offre d'intervenants y est plus importante.
Les textes prévoient en outre que la durée hebdomadaire de l'enseignement des langues vivantes est, pour chaque enfant, d'une heure et demie par semaine. Si cet horaire est parfois respecté, on peut noter que, dans nombre d'écoles privilégiant le travail en demi-groupe pour favoriser les situations d'expression, les élèves ne bénéficient que de quarante-cinq minutes par semaine.
La formation des enseignants doit être également une des priorités, de manière à permettre à tous les enfants de recevoir un enseignement d'égale qualité. Pour plus d'efficacité, il convient aussi d'harmoniser les programmes afin que chaque élève reçoive un apprentissage continu de l'école élémentaire au collège et au lycée. Cela vaut également pour l'enseignement artistique.
Il est donc nécessaire que l'Etat s'engage à assurer la formation initiale et continue des enseignants et à attribuer les moyens nécessaires à la réalisation de cette nouvelle disposition.
M. le président. L'amendement n° 99, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Dans la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 321-3, après les mots : « Elle offre » sont insérés les mots : « un premier apprentissage d'une langue vivante étrangère et ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement vise à rétablir la rédaction initialement proposée par le Gouvernement.
En effet, l'Assemblée nationale a substitué le terme « approche » à celui d'« apprentissage » d'une langue vivante étrangère, ce qui, à mon sens, atténue fortement l'importance accordée à cet enseignement et n'est donc pas conforme aux objectifs fixés par le projet de loi dans le cadre des engagements européens de la France.
Par ailleurs, sans vouloir minimiser le nécessaire développement des compétences d'expression orale, il apparaît restrictif, voire inutile de ne mettre l'accent que sur cette dimension de l'enseignement.
M. le président. L'amendement n° 294, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Au début de cet article ajouter un paragraphe ainsi rédigé :
... - Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 321-3 les mots : « des instruments fondamentaux de la connaissance » sont remplacés par les mots : « d'un socle commun de connaissances et de compétences »
La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Il s'agit d'une mesure de coordination avec le dispositif que nous avons adopté à l'article 6 instaurant le socle commun de connaissances et de compétences, notion qui recueille un relatif consensus, même si la définition de son contenu ne fait pas l'unanimité et fera sans doute l'objet, à l'avenir, de quelques commentaires.
Cet amendement vise à intégrer cette notion à l'article L. 321-3 du code de l'éducation, qui précise le contenu de la formation dispensée à l'école primaire. Pour l'heure, le code de l'éducation dispose que « cette formation assure l'acquisition des instruments fondamentaux de la connaissance », puis définit ces instruments fondamentaux en précisant leur contenu en termes de disciplines.
Nous souhaitons, par souci de cohérence, qu'il soit désormais inscrit que « cette formation assure l'acquisition d'un socle commun de connaissances et de compétences ».
Vous voyez que nous avançons, monsieur le ministre !
M. le président. L'amendement n° 408 rectifié, présenté par Mme Hermange et M. Goujon, est ainsi libellé :
Dans cet article, après les mots :
langue vivante étrangère
insérer les mots :
pour les élèves ayant une bonne maîtrise du français
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 558, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
L'Etat s'engage à assurer les moyens humains et financiers nécessaires à la réalisation de cette disposition.
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Par cet amendement, nous rappelons à l'Etat qu'il doit se donner les moyens de ses ambitions et que l'application de la disposition de cet article relative à l'apprentissage d'une langue vivante étrangère ne pourra se faire sans une augmentation des moyens humains et financiers.
Le recrutement des personnels enseignant les langues inquiète. En effet, on peut recenser des personnes sortant d'IUFM, des professeurs des écoles ou des instituteurs plus anciens, mais aussi des professeurs du second degré, des assistants étrangers, des contractuels recrutés par l'Etat et parfois même des intervenants municipaux. C'est dire la multiplicité des formations initiales de ces personnels et, sans doute, leur manque d'homogénéité !
Aujourd'hui, l'insuffisance de formation remet en cause la faisabilité de la généralisation de l'enseignement des langues. On ne dispose d'éléments suffisants ni sur les pratiques de classes, ni sur les méthodes d'enseignement, ni sur les résultats des élèves.
Tant que l'enseignement était fondé sur le volontariat, seuls les enseignants qui avaient suffisamment de compétences en langues se lançaient dans l'aventure.
Avec la généralisation, il ne suffit pas de décréter l'enseignement des langues étrangères à l'école pour que ce dernier soit une réussite. Il faut un effort de formation considérable, des moyens importants et une prise en compte par les municipalités du matériel nouveau - livres, supports audiovisuels, etc. - nécessaire à sa mise en oeuvre.
Il est donc primordial que l'Etat s'engage à assurer la formation initiale et continue des enseignants et à attribuer les moyens nécessaires à la réalisation de cette nouvelle disposition.
M. le président. L'amendement n° 557, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigées :
... - Le même article est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« II. - Les moyens de favoriser l'étude des langues et cultures régionales dans les régions où elles sont en usage sont systématiquement recherchés. »
... - Le début du même article est précédé de la mention :
« I »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement concerne les langues et cultures régionales, au sujet desquelles nous avons eu un débat très intéressant la nuit dernière.
La diversité culturelle dans la République est une réalité : cette diversité doit être vécue, se traduire en actes dans la société, et au premier chef dans le système éducatif.
En dehors du français, langue commune, la France dispose d'un riche patrimoine de langues et de cultures.
Dans un monde où l'ouverture à l'autre passe nécessairement par la découverte de la pluralité des langues et des cultures, par l'échange et par l'enrichissement réciproque, il est de la responsabilité du système éducatif public de traiter cette situation comme une richesse et de contribuer à cette ouverture.
Mes chers collègues, vous me donnerez acte de ma constance sur ce point puisque c'est à peu près ce que je vous ai demandé cette nuit à propos du rôle de l'Etat dans l'apprentissage des langues régionales.
Depuis que leur existence a été reconnue à l'intérieur du service public, il y a plus d'un demi-siècle, les langues dites « régionales » ont progressivement bénéficié d'un statut plus conforme à la réalité socioculturelle du pays.
Cependant, la réduction drastique des moyens ces dernières années, s'ajoutant trop souvent à une certaine mauvaise volonté des instances hiérarchiques, réduit progressivement cette ouverture à la portion la plus modeste.
L'éducation nationale doit contribuer à faire vivre ces langues et ces cultures, en particulier dans les régions où elles restent en usage. Pour autant, je l'ai déjà dit, elles ne doivent pas rester cantonnées à l'intérieur de leurs seules « frontières » régionales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 556 dans la mesure où elle a elle-même restauré la notion d'apprentissage - elle l'a préféré à celle d' « approche » - d'une langue étrangère. L'amélioration de la formation des maîtres devrait permettre à ces derniers d'assurer cet apprentissage dans les écoles. Quant à la continuité des enseignements, elle s'inscrit mal dans ce titre consacré à l'enseignement du premier degré.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 294. La référence aux instruments fondamentaux de la connaissance, aux termes de l'article L. 321-3 du code de l'éducation, recouvre l'expression orale et écrite, la lecture et le calcul. Elle ne vise donc pas l'ensemble du socle commun défini à l'article 6, dont la maîtrise doit être garantie en fin de scolarité obligatoire et qui fera l'objet d'une évaluation à tous les niveaux.
En ce qui concerne l'amendement n° 558, l'utilisation du présent de l'indicatif dans la rédaction de l'article L. 321-3 du code de l'éducation suffit à rendre ces dispositions obligatoires. La commission émet donc un avis défavorable.
Quant à l'amendement n° 557, la commission y est défavorable, car il n'est pas compatible avec la position qui est la nôtre à l'article 12 bis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Je rappelle que le projet de loi prévoit un plan très ambitieux pour rattraper notre retard, avec la poursuite au collège, puis au lycée, de l'enseignement de la langue apprise dès l'école primaire. Il prévoit également que le concours de recrutement de professeurs des écoles devra obligatoirement intégrer une épreuve de langue vivante. Ainsi, l'Etat s'engage à recruter des professeurs des écoles aptes à enseigner les langues vivantes.
J'émets donc un avis défavorable sur l'amendement n° 556.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 99. Il est vrai que le terme d'apprentissage est plus juste que celui d'approche.
J'émets un avis défavorable sur l'amendement n° 294, qui tend à modifier la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 321-3 en supprimant les mots « des instruments fondamentaux de la connaissance ». Cette expression est en effet explicitée dans l'alinéa suivant. Il s'agit des instruments en français et en mathématiques. Quant à l'expression de « socle commun de connaissances et de compétences », elle renvoie à un ensemble beaucoup plus large qui n'a pas sa place à cet endroit du texte.
Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 558. Les engagements que nous prenons sont sérieux et crédibles. Vous le verrez lors de l'examen de l'article 8 : le Gouvernement s'engage à recruter l'équivalent de 10 000 personnels à temps plein pour mettre en oeuvre le plan d'apprentissage des langues étrangères.
J'émets également un avis défavorable sur l'amendement n° 557.
M. le président. En conséquence, l'article 15 est ainsi rédigé, et les amendements nos 294, 558 et 557 n'ont plus d'objet.
Article 15 bis
Après les mots : « éducation morale et », la fin de la dernière phrase du dernier alinéa de l'article L. 321-3 est ainsi rédigée : « offre un enseignement d'éducation civique qui comporte obligatoirement l'apprentissage de l'hymne national dans les établissements du premier degré. »
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 559, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet article, issu d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale, fait obligation de dispenser, dans les établissements du premier degré, un apprentissage de l'hymne national.
Nul, selon moi, ne peut être contre l'enseignement de La Marseillaise. Néanmoins, la formulation ici retenue nous paraît singulièrement. Et encore n'est-il pas précisé, heureusement, le niveau auquel nos enfants devront apprendre l'hymne national. Ce serait en effet un comble que de se fixer pour objectif de faire apprendre La Marseillaise à des enfants ne sachant pas lire et dont la compréhension des mots comme des phrases reste encore très imparfaite !
Cet article semble répondre aux voeux de certains qui nourrissent une irrépressible nostalgie de tout ce qui se faisait « avant » : assurer un nécessaire retour aux « valeurs ».
S'il est vrai que, voilà quelques dizaines d'années, on apprenait l'hymne national à l'école, c'était dans le cadre de la préparation au certificat d'étude. Ce n'était donc pas à l'école primaire.
Mmes Janine Rozier et Françoise Henneron. Mais si, c'était au primaire !
Mme Annie David. Il paraît en effet peu sérieux de prévoir que des enfants en si bas âge, à peine sortis de la maternelle, puissent apprendre l'hymne national, sauf si cet enseignement consiste en un strict cours de chant ; mais alors, nous serions loin du symbole de notre République ! Pis, nous rabaisserions notre hymne à une simple chanson, parmi tant d'autres, que nos tout-petits apprendraient au cours de leur scolarité.
L'enseignement de notre hymne national n'a de sens que si son histoire et sa symbolique sont correctement expliquées. Celui-ci ne peut donc s'adresser qu'à des élèves plus âgés.
Comment, en effet, faire comprendre la violence de certaines expressions ou certaines envolées lyriques à des enfants qui ne sont pas encore capables de comprendre le sens des métaphores ni de mesurer le choc historique de la Révolution française ?
Pour mesurer toute la richesse, toute la profondeur de La Marseillaise, pour mieux faire comprendre comment, pourquoi et quand ce chant révolutionnaire est devenu notre hymne national, il semble nécessaire d'accompagner son enseignement d'une approche historique.
Pour que cet hymne devienne un bien partagé, il est nécessaire que chacun en mesure toute la signification. C'est seulement ainsi que chaque Français pourra se l'approprier comme une valeur de notre République et non simplement comme un chant qu'il faut connaître. Pour vibrer au son de ses notes, il faut percevoir toute sa signification et tout l'engagement Républicain qu'il représente.
Un enseignement trop précoce serait vide de sens et contreproductif. Il serait sans aucun doute perçu comme un conditionnement inutile.
C'est la raison pour laquelle nous proposons la suppression de cet article.
M. le président. L'amendement n° 560, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour la fin de la dernière phrase du dernier alinéa de l'article L. 321-3 du code de l'éducation, remplacer le mot :
l'apprentissage
par les mots :
l'histoire et la connaissance
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement de repli vise à faire en sorte que l'apprentissage de l'hymne national ne se limite pas à un simple cours de chant.
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Cet amendement est intéressant !
Mme Annie David. La Marseillaise n'est pas une chanson parmi tant d'autres. Son enseignement n'a de sens que replacé dans son contexte historique et dans toute sa symbolique. C'est à ce prix seulement que nos élèves pourront mesurer toute la richesse et toute la profondeur de cet hymne.
Pour que ce chant devienne un bien partagé par tous et qu'il s'inscrive plus largement dans le cadre d'un enseignement d'éducation civique, il convient de ne pas limiter son apprentissage à une simple leçon de chant : il faut faire comprendre l'histoire et la signification précise de cet hymne.
M. le président. L'amendement n° 100, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
A la fin du texte proposé par cet article pour compléter le dernier alinéa de l'article L. 321-3 du code de l'éducation, après les mots :
l'hymne national
supprimer les mots :
dans les établissements du premier degré
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il s'agit de supprimer une disposition inutile, l'article L. 321-3 figurant dans un titre consacré à l'enseignement du premier degré.
M. le président. L'amendement n° 144, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour la fin de la dernière phrase du dernier alinéa de l'article L. 321-3 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée :
« La Marseillaise doit être chantée au moins une fois par semaine scolaire. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 190, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour la fin de la dernière phrase du dernier alinéa de l'article L. 321-3 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée :
Un groupe de travail est à cette fin constitué auprès du Premier Ministre pour réécrire ou pour compléter notre hymne national par des paroles moins belliqueuses et plus adaptées à notre temps. »
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Cet amendement vise à prévoir qu'un groupe de travail est constitué auprès du Premier ministre pour récrire ou pour compléter notre hymne national en employant des formules moins belliqueuses et plus adaptées à notre temps.
Afin qu'il n'y ait point d'ambiguïté sur le sens de cet amendement, je veux rappeler quelques éléments historiques.
Dans la nuit du 25 au 26 avril 1792, Rouget de Lisle, officier français en poste à Strasbourg, compose, dit-on - car ce point a fait l'objet de polémiques -, le Chant de guerre pour l'armée du Rhin.
Ce chant est repris par les fédérés de Marseille lors de l'insurrection des Tuileries, le 10 août 1792.
Le 14 Juillet 1795, ce chant devient l'hymne national. Il ne l'est plus sous l'Empire et sous la Restauration. Il sera remis à l'honneur pendant la Révolution de 1830.
En 1879, la IIIe République en fait de nouveau le chant national, mais sans en préciser la version, ce qui provoque d'ailleurs quelque cacophonie quand plusieurs orchestres officiels le jouent ensemble !
En 1887, une version officielle est adoptée par le ministère de la guerre.
En septembre 1944, une circulaire préconise de le faire chanter dans les écoles.
La Marseillaise est confirmée en tant qu'hymne national par les Constitutions de 1946 et de 1958.
De ce rappel historique il ressort que l'hymne national a connu un certain nombre de variations, à la fois quant à la musique et quant aux paroles, lesquelles ont été adaptées à l'usage que l'on voulait bien en faire.
Je signale, par exemple, qu'un couplet initial semblait faire clairement référence à Dieu, qui utilise le bras vengeur du peuple pour « exterminer » les tyrans. Je crois que cette référence n'existe plus dans notre République laïque.
Puisque les paroles de la Marseillaise ont déjà été retouchées pour des raisons particulières, pourquoi ne pas supprimer aujourd'hui quelques éléments qui sont compris quand on les replace dans leur contexte, mais qui, hors de celui-ci, ont, à mon sens, une résonance étrange ?
Ces paroles ont en effet été écrites en un temps où princes, hobereaux, partisans de l'absolutisme et autres émigrés se liguaient avec des puissances étrangères pour se dresser contre la marche en avant de la démocratie, de la liberté, de l'égalité et de la fraternité. Hegel, Goethe et bien d'autres en ont salué l'universalité.
Cependant, force est de reconnaître que les temps ont changé et que, littéralement, telle ou telle parole de notre bel hymne peut prendre désormais une résonance un peu particulière.
Ainsi la notion de « sang impur », métaphore de la trahison royale et aristocratique, peut, après l'aventure coloniale, deux guerres mondiales et dans un contexte différent, prendre ici ou là un sens susceptible d'alimenter la haine, le désordre et la désunion.
Dans un souci d'apaisement, animés à coup sûr par un puissant esprit patriotique d'union nationale autour des valeurs de la République, ouverts à la construction européenne et à la solidarité internationale, les Français doivent montrer à la jeune génération la voie de la réconciliation, de la solidarité humaniste et internationaliste, et donc celle du rejet de toutes les logiques chauvines ou « racialistes ».
M. le président. L'amendement n° 201, présenté par Mmes Blandin, Voynet et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour la fin de la dernière phrase du dernier alinéa de l'article L. 321-3 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée :
Un groupe de travail est composé à cette fin auprès du Premier Ministre afin de remplacer, dans le refrain de La Marseillaise, les mots : « sang impur » par des termes métaphoriques moins ambigus dans le contexte contemporain.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. C'est avec plaisir que je défends l'amendement dont Mme Blandin a pris l'initiative et qui constitue en quelque sorte un amendement de repli par rapport à celui que je viens de défendre.
Mme Blandin considère, comme moi-même, que le temps semble venu de faire évoluer les paroles de notre hymne national vers des phrases moins belliqueuses, tout en en gardant la mélodie et le rythme fédérateur.
Cet amendement vise à créer un groupe de travail qui devra trouver un moyen élégant de supprimer la référence historiquement mobilisatrice, mais scientifiquement erronée et humainement fâcheuse, au « sang impur », celui de l'ennemi censé, dans le texte, « abreuver nos sillons ».
Avant le développement de la génétique, depuis les croisements de petits pois conduits par Mendel jusqu'à la découverte de la structure à double hélice de l'ADN par Watson et Crick, qui leur valut le prix Nobel, on croyait que les caractères se transmettaient à la génération suivante par le sang du père et de la mère. Tout naturellement, les rois étaient réputés avoir le sang bleu !
La notion de sang impur du groupe ennemi renvoie non seulement à cette hérésie biologique, que doivent encore combattre encore beaucoup de professeurs de sciences naturelles, mais aussi à la valeur intrinsèque d'un groupe par rapport à un autre, non pour son action condamnable ou pour ses choix qui vont à l'encontre de nos convictions ou de nos intérêts, mais parce qu'il est d'un « autre sang ». On diffuse et conforte l'idée que les autres auraient en commun non seulement le sang, mais encore un sang corrompu, qui rabaisserait ce groupe à des caractéristiques inférieures aux nôtres et de surcroît immuables.
Alors que des généticiens, tel Albert Jacquard, passent leur temps à donner des conférences et à écrire des livres de vulgarisation pour combattre le racisme et la croyance erronée en cette notion de groupe racial et en une hiérarchie naturelle entre les différents groupes, voilà que nous envisageons de faire répéter et chanter aux enfants et adolescents de tous âges que les « autres » peuvent avoir le « sang impur ».
Au musée de l'histoire, ces excès ne seraient que la démonstration de la fougue passée. Dans le livre de poésie, tout est permis : la lune parle et le soleil rit.
Mais à l'âge où les jeunes cherchent tous leur identité en se confrontant à l'autre, à une époque où l'accumulation de discriminations fait miroiter la tentation communautaire, alors que, dans des écoles, les conflits entre élèves laissent parfois échapper, entre autres injures, « nique ta race ! », le rôle de la République et de ses écoles laïques et ouvertes à tous est-il de marteler dans son chant de rassemblement que l'autre a un « sang impur » ?
Certains, sur le long chemin de la paix et de l'amitié entre les peuples, se rappellent de Gaulle et Adenauer, d'autres, Mitterrand et Kohl main dans la main. Il fallut beaucoup d'énergie et de symboles pour faire oublier la haine !
Nombre d'entre vous, sur toutes les travées, soutiennent l'initiative de Genève, rêvant d'un Moyen-Orient où les enfants des uns n'auraient pas pour seul but l'anéantissement des enfants des autres et vice-versa.
Renonçons donc à l'enseignement de ces termes criminogènes de « sang impur ». Mandatons un groupe de travail qui proposera au Parlement, voire au Congrès, cette courte modification. Une évolution humaniste sur le point le plus contestable de notre hymne serait un petit pas pour La Marseillaise, mais peut-être un grand pas vers plus d'humanité.
M. le président. L'amendement n° 145, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
I - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
Le second alinéa de l'article L. 321-3 du code de l'éducation est complété par une phrase ainsi rédigée : « Un enseignement de morale civique est dispensé chaque matin au début des cours. »
II - En conséquence, faire précéder le début de cet article de la mention :
I.
Cet amendement n'est pas défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle. Cet avis défavorable sur l'amendement n° 559 : celui-ci n'est pas compatible avec la position de la commission, qui approuve cette adjonction de l'Assemblée nationale.
La commission approuve en revanche l'objet de l'amendement n° 560. Mais il est à craindre que la rédaction n'en soit imparfaite. Aussi la commission propose-t-elle non de remplacer, mais d'insérer les mots : « histoire de la connaissance » après le mot : « apprentissage ». Si Mme David accepte cette rectification, j'émettrai un avis favorable.
M. le président. Madame David, suivez-vous la suggestion de M. le rapporteur ?
Mme Annie David. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 560 rectifié, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour la fin de la dernière phrase du dernier alinéa de l'article L. 321-3 du code de l'éducation, après le mot :
l'apprentissage
insérer les mots :
,l'histoire et la connaissance
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. J'en viens à l'amendement n° 190. Ainsi que vous l'avez rappelé, madame Voynet, la Constitution, en son article 2, fait référence à La Marseillaise. Faut-il prévoir d'en modifier les paroles à l'occasion de l'examen de ce projet de loi ? Je ne le pense pas, et cet avis vaut également pour l'amendement n° 201.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. La Marseillaise est l'hymne officiel de la République depuis deux cent dix ans. Elle a connu un certain nombre de variations sous la monarchie et l'Empire, mais l'Assemblée nationale, lors d'une séance historique qui s'est tenue le 14 février 1879, a redit qu'elle était bien l'hymne national.
Sous la IIIe République a eu lieu une nouvelle tentative de réécriture de La Marseillaise. Le Président de la République, Paul Doumer, avait alors déclaré qu'elle était intangible.
Ce caractère est confirmé depuis 1958 par l'article 2 de la Constitution, qui dispose que « l'hymne national est La Marseillaise ».
L'apprentissage de La Marseillaise à l'école n'est pas une nouveauté. La première circulaire date du 25 février 1911. Elle est signée de Maurice Faure, qui écrit à l'ensemble des inspecteurs d'académie : « Je vous adresse sous ce pli un certain nombre d'exemplaires de La Marseillaise, paroles et musique, d'après la version que j'ai fait établir à l'usage des écoles publiques. J'estime que cet hymne, qui est non seulement le plus célèbre de tous par les souvenirs qu'il consacre, mais aussi le plus beau par la flamme patriotique qui l'anime, doit être appris et chanté dans toutes les écoles où le chant est compris parmi les matières obligatoires de l'enseignement. »
Bien entendu, nous devons concevoir cet apprentissage de La Marseillaise dans le cadre d'un enseignement visant à resituer les termes utilisés dans le contexte de sa rédaction. Il conviendra donc de rappeler que cet hymne a été choisi par les républicains et qu'il a été reçu hors de nos frontières comme l'hymne de la liberté. C'est cette lecture qui doit primer toutes les autres.
Au regard de ces remarques, je suis donc défavorable à l'amendement n° 559, qui vise à la suppression de l'article, favorable à l'amendement n° 560 rectifié, tout en soulignant qu'il vise bien à faire apprendre La Marseillaise et, dans le même temps, à en faire étudier le contenu et l'histoire de manière à en faire comprendre les termes. Je suis également favorable à l'amendement n° 100 de la commission. En revanche, hostile à la réécriture de La Marseillaise, je suis défavorable aux amendements nos 190 et 201.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 560 rectifié.
Mme Annie David. Je me demande si, compte tenu de la rectification demandée par la commission, on n'obtient pas une rédaction un peu redondante, du fait de l'emploi conjoint des termes « apprentissage » et « connaissance ». C'est d'ailleurs pour cette raison que nous avions initialement supprimé la référence à l'apprentissage. Cela étant, ce qui nous importe avant tout, c'est que figurent les termes « histoire » et « connaissance ».
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La rédaction à mon avis la plus claire et la plus lisible serait en fait la suivante : « l'apprentissage de l'hymne national et de son histoire ». Il est évident que, pour apprendre La Marseillaise, il faut la connaître ! (Sourires.)
Mme Annie David. D'accord pour cette nouvelle rectification !
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 560 rectifié bis, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, ainsi libellé :
Dans le texte proposé par cet article pour la fin de la dernière phrase du dernier alinéa de l'article L. 321-3 du code de l'éducation, après les mots :
l'apprentissage de l'hymne national
insérer les mots :
et de son histoire
M. le président. Je mets aux voix l'article 15 bis, modifié.
(L'article 15 bis est adopté.)
Article 15 ter
L'article L. 321-4 est ainsi rédigé :
« Art. L. 321-4 - Dans les écoles, des aménagements particuliers et des actions de soutien sont prévus par l'équipe enseignante au profit des élèves qui éprouvent des difficultés et au profit des élèves intellectuellement précoces, afin de répondre à leur besoin. »
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 295 est présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 561 est présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Yannick Bodin, pour présenter l'amendement n° 295.
M. Yannick Bodin. Cet article, introduit par l'Assemblée nationale, me semble inopportun pour deux raisons.
D'une part, il mélange les genres : il intègre au dispositif général de cet article, qui concerne l'ensemble des « élèves qui éprouvent des difficultés », les « élèves intellectuellement précoces », terme médical qui désigne les enfants qu'on qualifiait, il y a quelques années, de « surdoués ».
Ces enfants, en raison de leur précocité intellectuelle, ne bénéficient pas toujours d'une situation scolaire enviable. Cette précocité se traduit souvent par une inadaptation aux enseignements, par un blocage dans certains apprentissages, voire par un rejet scolaire. Ils font généralement l'objet d'un suivi psychologique. Il ne s'agit donc aucunement d'enfants « qui éprouvent des difficultés », au sens classique du terme. De ce fait, il est difficile d'intégrer les élèves pour lesquels un tel diagnostic a été dressé au dispositif prévu à l'article L. 321-4.
Un amendement de notre collègue Hugues Portelli tendant à insérer un article additionnel après l'article 11 visait à apporter des solutions sur mesure pour les enfants intellectuellement précoces. Ce dispositif était nettement plus adapté à leur particularité que celui qui nous est proposé à l'article 15 ter.
Par ailleurs, les solutions proposées à l'article 15 ter en faveur des enfants en difficulté sont en retrait par rapport au dispositif en vigueur. Actuellement, le code de l'éducation dispose que les « élèves qui éprouvent des difficultés » reçoivent « un enseignement adapté » lorsque celles-ci sont « graves et permanentes ». Le présent article se borne à renvoyer à l'équipe enseignante le soin de prévoir « des aménagements particuliers et des actions de soutien ». Le mot « enseignement » ne figure pas dans ce dispositif, non plus que le mot « adapté ». Cette formule floue de remplacement ne laisse augurer aucune action efficace à destination des enfants qui éprouvent des difficultés.
Ces deux raisons nous poussent à demander la suppression de cet article incongru.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 561.
Mme Annie David. Nous demandons la suppression de l'article 15 ter pour les mêmes raisons que celles que vient d'exposer M. Bodin.
M. le président. L'amendement n° 101, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L'article L. 321-4 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Des aménagements appropriés sont prévus au profit des élèves intellectuellement précoces ou manifestant des aptitudes particulières, afin de leur permettre de développer pleinement leurs potentialités. Le rythme scolaire peut être accéléré, en fonction des capacités de l'enfant. Des établissements scolaires peuvent se regrouper pour proposer des structures d'accueil adaptées. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. L'Assemblée nationale a adopté un article additionnel visant à étendre au profit des élèves intellectuellement précoces les dispositions prévues par l'article L. 321-4 du code de l'éducation.
La commission partage pleinement le souci - déjà exprimé hier par M. Portelli - de voir reconnus les besoins particuliers des élèves intellectuellement précoces, ces « oubliés de la difficulté scolaire », comme le soulignent M. Jean-Pierre Delaubier dans son rapport de 2002 et les inspections générales dans leur rapport annuel pour 2004. Il semble en effet qu'en l'absence d'un dispositif adapté un tiers de ces élèves soient en difficulté scolaire en classe de troisième.
La commission propose d'améliorer en la complétant, la rédaction proposée pour cet article additionnel.
Il s'agit, d'une part, de rétablir la référence à l'enseignement adapté pour les élèves dont les difficultés sont graves et permanentes, que l'Assemblée nationale a malencontreusement supprimée.
Il s'agit, d'autre part, de préciser la portée des dispositions introduites par l'Assemblée nationale au profit des élèves intellectuellement précoces ou manifestant des aptitudes particulières. Ainsi, il est indiqué que le rythme scolaire peut être accéléré, en fonction des capacités de l'enfant.
M. le président. Le sous-amendement n° 650, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
I. Au début de la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 101 pour compléter l'article L. 321-4 du code de l'éducation, remplacer les mots :
Des aménagements appropriés sont prévus au profit des
par le mot :
Les
II. Dans la même phrase, remplacer les mots :
, afin de
par les mots :
bénéficient d'aménagements appropriés pour
III. A la fin de la même phrase, remplacer le mot :
potentialités
par le mot :
capacités
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 207, présenté par M. Lecerf et Mme Desmarescaux, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article L. 321-4 du code de l'éducation :
« Art. L. 321-4 - Tout au long de leur scolarité, des aménagements particuliers et des actions de soutien sont prévus par l'équipe enseignante au profit des élèves qui éprouvent des difficultés, au profit des élèves porteurs de troubles spécifiques du langage oral et/ou écrit et au profit des élèves intellectuellement précoces, afin de répondre à leur besoin ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 146, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Au début du texte proposé par cet article pour l'article L. 321-4 du code de l'éducation, après les mots :
Dans les écoles,
insérer les mots :
lorsque cela est possible,
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements identiques nos 295 et 561 ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission ayant proposé une nouvelle rédaction pour l'article 15 ter afin de rétablir les dispositions de l'article L. 321-4 sur l'enseignement adapté, ces amendements seront satisfaits par l'adoption de son propre amendement. Je demande à leurs auteurs de bien vouloir les retirer.
Faut-il supprimer les établissements spécialisés qui accueillent les enfants en difficulté ? Cela me semble paradoxal !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements identiques nos 295 et 561 et favorable à l'amendement n° 101.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 295 et 561.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. En conséquence, l'article 15 ter est ainsi rédigé.
Articles additionnels après l'article 15 ter
M. le président. L'amendement n° 208 rectifié bis, présenté par M. Lecerf, Mme Desmarescaux, MM. Dériot, Girod et Cambon, Mme Garriaud-Maylam et M. Del Picchia, est ainsi libellé :
Après l'article 15 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La première phrase du premier alinéa de l'article L. 321-4 du code de l'éducation est complétée par les mots : « , notamment les élèves atteints de troubles spécifiques du langage oral et/ou écrit, tels la dyslexie. »
La parole est à M. Robert Del Picchia.
M. Robert Del Picchia. Les élèves dyslexiques présentent des difficultés spécifiques qui doivent faire l'objet d'une prise en charge adaptée et systématique, au sein du milieu scolaire.
Actuellement, ces enfants ne bénéficient d'aucun suivi particulier et rencontrent trop souvent des difficultés dans l'apprentissage scolaire, en l'absence de méthodes qui tiendraient compte de leurs besoins particuliers.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Je souhaite attirer l'attention de M. le ministre sur le fait que, pour faire progresser ces enfants dyslexiques, alors que l'on dispose aujourd'hui d'une large palette de méthodes, seules quelques-unes d'entre elles sont mises en pratique et font éventuellement l'objet d'un remboursement par la sécurité sociale.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 15 ter.
L'amendement n° 102, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Après l'article 15 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 321-4 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Des actions particulières sont prévues pour l'accueil et la scolarisation des élèves non francophones nouvellement arrivés en France. Des établissements scolaires peuvent se regrouper pour proposer des structures d'accueil adaptées. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement concerne les primo-arrivants.
Le principe du droit à l'instruction s'applique de la même manière quelle que soit la nationalité des élèves. Les élèves de nationalité étrangère âgés de six à seize ans sont donc soumis à l'obligation scolaire.
La commission propose de rappeler que des conditions de scolarisation adaptées doivent être prévues, dans les écoles, pour l'accueil des enfants nouvellement arrivés en France.
En effet, l'école est un lieu déterminant pour favoriser l'intégration sociale et culturelle de ces élèves et de leurs familles dans leur nouvel environnement, et la maîtrise de la langue française constitue un facteur essentiel de cette intégration.
Il convient donc de proposer à ces élèves, en priorité, un apprentissage intensif et accéléré du français. De telles structures d'accueil sont déjà prévues. Mais, en l'absence de pilotage national clair, les politiques mises en oeuvre sont disparates.
Aussi, cet article additionnel a vocation à souligner que la scolarisation des élèves dits « primo-arrivants » est une mission de l'école de la République.
Toutefois, dans la mesure où les situations et les flux sont par nature imprévisibles, et éminemment variables sur le territoire, la scolarisation de ce public exige une grande souplesse dans son organisation. C'est pourquoi le dispositif proposé prévoit que des établissements peuvent se regrouper pour mettre en place des structures adaptées.
M. le président. Le sous-amendement n° 651, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 102 pour compléter l'article L. 321-4 du code de l'éducation, après les mots :
sont prévues
insérer les mots :
chaque fois que possible
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 102 ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 15 ter.
Section 2
Enseignement du second degré
Article additionnel avant l'article 16
M. le président. L'amendement n° 210 rectifié, présenté par MM. Ferrand, Guené et Cambon et Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article L. 331-1 du code de l'éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les jurys des examens conduisant à la délivrance du diplôme national du brevet option internationale et du baccalauréat option internationale peuvent comprendre des membres de corps d'inspection ou d'enseignement étrangers. Les jurys des baccalauréats binationaux peuvent comprendre des membres de corps d'inspection ou d'enseignement des pays concernés. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 210 rectifié bis.
Vous avez la parole pour présenter cet amendement, monsieur le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement, qui avait fait l'objet d'un avis favorable de la commission, favorise l'ouverture des jurys des diplômes à option internationale, ce qui est conforme à l'orientation retenue par le projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 16.
Article 16
Le troisième alinéa de l'article L. 331-1 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« En vue de la délivrance des diplômes, il peut être tenu compte, éventuellement en les combinant, des résultats d'examens terminaux, des résultats des contrôles en cours de formation, des résultats du contrôle continu des connaissances, et de la validation des acquis de l'expérience.
« Lorsqu'une part de contrôle continu est prise en compte dans un diplôme national, les garanties sont prises pour assurer l'égale valeur du diplôme sur l'ensemble du territoire national. »
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 296 est présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 562 est présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour présenter l'amendement n° 296.
M. Jean-Marc Todeschini. En cohérence avec votre décision de suspendre la réforme du baccalauréat, monsieur le ministre, nous demandons la suppression de cet article.
Les lycéens prétendument manipulés ont eu raison de votre réforme du bac.
Cette réforme, on ne le rappelle pas assez, faisait l'objet d'un groupe de travail, se réunissant parallèlement à l'examen de ce projet de loi et placé sous votre égide, monsieur le ministre. Ce groupe de travail rassemblait divers partenaires de la communauté éducative, dont les syndicats représentatifs, qui, les uns après les autres, ont quitté ce groupe afin de ne pas cautionner des propositions aberrantes. Mais eux aussi étaient sans doute manipulés !
Tout le monde s'accorde à dire que cette réforme était mal ficelée : contrôle continu, suppression des TPE... Les élèves de terminale voyaient tout ce à quoi ils avaient été préparés bouleversé d'un trait de plume.
Puisqu'il n'y a plus de réforme du baccalauréat, cet article n'a plus de raison d'être. Nous en demandons donc la suppression.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 562.
Mme Annie David. Nous demandons également la suppression de cet article 16 qui nous conduit au coeur d'un des sujets forts du mécontentement de la communauté éducative dans son ensemble et des élèves en particulier.
Monsieur le ministre, votre annonce selon laquelle le contrôle continu serait dorénavant pris en compte pour la validation du bac a été perçue par une part importante des membres de la communauté éducative comme la manifestation d'une volonté de remettre en cause la valeur du bac.
Tous redoutent un risque majeur : la fin de la valeur nationale de ce diplôme, avec des bacs différenciés suivant les lycées.
Certes, devant ce mécontentement très large, vous avez déclaré remettre à plus tard la réforme du bac. Mais il ne s'agit là que d'un retrait tactique, répondant au seul souci de freiner le développement du mécontentement.
En fait, avec l'article 16, vous laissez dans la loi les éléments qui vous permettront de mettre plus tard en oeuvre cette réforme, quand bon vous semblera et selon les modalités que vous avez annoncées. Et là, il ne sera plus question de demander son avis à la représentation nationale !
En transformant l'article L. 331-1 du code de l'éducation, vous vous laissez les mains libres pour la réforme que vous souhaitez. En fait, vous refusez d'entendre les propositions alternatives.
Ainsi, le mouvement lycéen qui se développe actuellement demande que soient organisés des partiels nationaux afin d'assurer la valeur nationale du baccalauréat. Pourquoi ne pas prendre en compte cette demande ?
Mme Annie David. Vous allez me répondre que la réforme du bac est ajournée. Mais, en faisant voter cet article 16 ainsi rédigé, vous ne permettez pas qu'une telle revendication puisse être ultérieurement prise en compte.
Qui plus est, le bac est d'ores et déjà modifié. En effet, en supprimant les TPE, vous avez transformé les conditions de préparation, de passage et d'obtention de ce diplôme. Pourquoi, là encore, ne pas entendre ce que tout le monde vous demande, à savoir le rétablissement des TPE ? En fait, derrière cette mesure, nous le savons tous, il n'y a qu'une volonté de redéploiement des dépenses.
Ne pouvant justifier pédagogiquement cette réforme, vous avez décidé de la rendre exécutoire en passant par le règlement, en ne l'inscrivant pas dans votre projet de loi.
Puisque vous nous dites régulièrement être attentif aux préoccupations qui se font jour dans le mouvement actuel et que votre réforme porte pour partie les modifications que beaucoup attendent, monsieur le ministre, je vous propose de donner un signe fort de votre capacité d'écoute.
Deux petites décisions seraient des grands pas : d'une part, rétablissez les TPE et, d'autre part, acceptez de retirer l'article 16 de votre projet de loi, afin de laisser réellement toutes les portes ouvertes pour une réforme du bac, cette fois négociée avec l'ensemble de la communauté éducative.
Je vous rappelle que l'une des justifications de cet article était, selon vos propres termes, d'« énumérer les différentes modalités de contrôle de l'acquisition des savoirs et des compétences qui peuvent être prises en compte pour la délivrance des diplômes sanctionnant les formations secondaires ».
Le bac est, si je ne me trompe, un diplôme sanctionnant une formation secondaire. Et puisque vous avez décidé d'en ajourner la réforme, je demande que soit, de la même façon, ajournée l'application de cet article, afin de mettre en cohérence le texte de cette réforme avec les intentions politiques que vous affichez, monsieur le ministre.
M. le président. L'amendement n° 564, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le premier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer le troisième alinéa de l'article L. 331-1 du code de l'éducation.
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Cet amendement s'inscrit dans la même logique que celui qui vient d'être défendu par Mme David.
Le contenu d'un examen terminal, quel qu'il soit, n'est pas une évaluation « patchwork » d'un segment de vie ; c'est l'évaluation d'un cursus défini par les experts de l'éducation nationale selon des critères pédagogiques transparents. C'est ce qui en fait la force et la valeur. Un diplôme, surtout national, n'est pas un « fourre-tout », mais doit être vu comme le moyen de vérifier la validation d'acquis accumulés au cours d'un cursus.
Le caractère national d'un examen, menacé par le contrôle en cours de formation, doit être préservé, et des critères d'évaluation doivent être définis clairement pour éviter des disparités selon les disciplines, les formations, les inspecteurs, voire les établissements.
M. le président. L'amendement n° 565, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer le troisième alinéa de l'article L. 331-1 du code de l'éducation, supprimer les mots :
, des résultats du contrôle continu des connaissances,
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, il faut vraiment remettre sur le métier cette réforme du baccalauréat.
Mes collègues viennent d'évoquer un certain nombre de problèmes. D'autres se posent, qui tiennent au fait que, avec la contrôle continu, c'est la même personne qui enseigne et qui évalue, à la disparité du contrôle selon les disciplines, les formations et les établissements, à la question de l'évaluation dans les établissements privés hors contrat ou à la situation des candidats au baccalauréat qui ne sont pas scolarisés.
Je crois donc nécessaire de supprimer complètement ces dispositions, conformément aux engagements pris par M. le ministre.
M. le président. L'amendement n° 563, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer le troisième alinéa de l'article L. 331-1 du code de l'éducation, supprimer le mot :
continu
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Nous tenons à réaffirmer notre attachement au caractère national et anonyme du baccalauréat, afin que ce diplôme soit le même pour tous et garde la même valeur reconnue sur l'ensemble du territoire de la République.
La suppression du contrôle continu est, du point de vue des élèves, la garantie de l'égalité et de l'objectivité et, du point de vue des enseignants, celle de l'indépendance et du respect des programmes nationaux.
Par ailleurs, le contrôle continu possède une connotation péjorative de « diplôme au rabais ». Inconsciemment, on soupçonne toujours le contrôle continu de servir à « donner » le diplôme. Ce sentiment n'est sans doute pas étranger au manque de considération dont souffre, par exemple, le BEPC.
Au demeurant, nous avons souvent dénoncé les difficultés et les risques que peut entraîner le contrôle continu en cours de formation.
On peut en effet s'inquiéter du cumul de la fonction de formateur et de la responsabilité d'évaluateur vis-à-vis des mêmes élèves, de la charge de travail supplémentaire supportée par les professeurs, de la « pression » qui s'exerce sur certains d'entre eux, des disparités dans la mise en oeuvre de ce contrôle selon les disciplines, les formations, les inspecteurs, voire les établissements, de la perte du caractère d'« épreuve de passage » de l'examen, etc.
Le contrôle en cours de formation risque de remettre en cause le caractère national de l'examen, même s'il est précisé dans l'article que, « lorsqu'une part de contrôle continu est prise en compte dans un diplôme national, les garanties sont prises pour assurer l'égale valeur du diplôme sur le territoire national » : nous ne savons pas quelles sont ces garanties. Cet alinéa semble destiné plutôt à calmer les craintes des lycéens qu'à organiser, selon les principes de justice et d'égalité qui régissent notre droit, ce mode d'évaluation.
M. le président. L'amendement n° 103, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le second alinéa du texte proposé par cet article pour remplacer le troisième alinéa de l'article L. 331-1 du code de l'éducation :
« Lorsqu'une part de contrôle continu est prise en compte pour la délivrance d'un diplôme national, l'évaluation des connaissances des candidats s'effectue dans le respect des conditions d'équité. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l'avis de la commission.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. L'amendement n° 103 tend à modifier un alinéa ajouté par l'Assemblée nationale afin de répondre aux inquiétudes manifestées à propos de l'introduction d'une part de contrôle continu pour la délivrance d'un diplôme national.
En effet, il apparaît redondant de parler de l'égale valeur d'un diplôme national sur l'ensemble du territoire : c'est le propre même d'un diplôme national !
Notre amendement précise la portée de la disposition ainsi introduite en prévoyant que, lorsqu'une part de contrôle continu est prise en compte pour la délivrance d'un diplôme national, l'évaluation des connaissances des candidats s'effectue dans le respect des conditions d'équité.
La commission est défavorable aux amendements identiques nos 296 et 562, car l'article 16 ne concerne pas seulement le baccalauréat. Il faut rappeler que le brevet ainsi que d'autres examens comportent d'ores et déjà une part de contrôle continu.
La commission est également défavorable aux amendements nos 564 et 565.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Avec ce débat, nous pouvons mesurer combien il est difficile pour certains mouvements politiques de rester toujours dans le sens du vent, surtout quand le vent tourne aussi vite !
M. François Fillon, ministre. Pendant plusieurs dizaines d'années, les mouvements lycéens ont réclamé l'introduction du contrôle continu dans les épreuves du baccalauréat. Il n'y a pas si longtemps, en 1998, ils manifestaient même dans la rue contre le gouvernement socialiste avec deux revendications principales : l'introduction du contrôle continu au baccalauréat et la renonciation à la mise en place des TPE en classes de première et de terminale !
M. Christian Demuynck. Exact !
M. François Fillon, ministre. Lionel Jospin, en 1991, devant le Conseil supérieur de l'éducation, avait annoncé une réforme du baccalauréat comprenant l'introduction du contrôle continu. Il avait même indiqué que 1995 serait l'année de l'entrée en vigueur de cette réforme du baccalauréat !
M. David Assouline. Mais pas celle-là !
M. François Fillon, ministre. Et voilà que vous nous demandez de prendre en compte la demande des lycéens d'introduire le contrôle en cours de formation. Or c'est justement une proposition que j'avais faite puisque la commission que j'avais mise en place avait pour mission de déterminer la meilleure façon de réduire le nombre d'épreuves terminales et travaillait à la fois sur le contrôle continu et sur le contrôle en cours de formation.
Ceux qui ne font que courir après des mouvements conjoncturels devraient se souvenir qu'ils ont en charge, eux aussi, l'intérêt général ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Peut-être leur arrivera-t-il demain de gouverner notre pays. Qu'ils s'attendent à se voir alors rappeler les déclarations définitives qu'ils ont faites un peu trop promptement sur des sujets qui mériteraient, pourtant, de donner lieu à une réflexion globale et sereine.
Les amendements qui visent à supprimer l'article 16 sont tout à fait étranges.
Mesdames, messieurs les sénateurs, cet article L. 331-1 du code de l'éducation, qui est ancien, prévoit d'ores et déjà le contrôle continu. L'objectif de l'article 16 est simplement d'ajouter à toutes les formes de contrôle des connaissances existantes le contrôle en cours de formation, que Mme David réclamait à l'instant et qui, lui, n'est pas inscrit dans les textes législatifs.
Lorsque vous nous demandez de supprimer cet article du code de l'éducation, qui existe depuis des années et qui permet d'organiser le contrôle continu pour un certain nombre d'examens - baccalauréat professionnel, brevet ou bac général à travers les TPE -, votre objectif est en fait simplement d'envoyer un signe aux lycéens qui manifestent.
Ceux-ci expriment une inquiétude, que j'ai prise en compte. Mais cela ne nous exonère pas de leur dire la vérité : le baccalauréat est un examen en danger, non seulement parce que son organisation n'est pas satisfaisante, mais aussi parce que, de mon point de vue, il n'est pas très juste, notamment à l'égard des enfants issus des quartiers défavorisés et de ceux auxquels leur famille ne peut pas apporter le soutien nécessaire.
Préparer onze ou douze épreuves pour le mois de juin n'est pas la meilleure façon de vérifier et d'évaluer les connaissances des lycéens. C'est la raison pour laquelle, lorsque ce projet de loi sera voté, je demanderai de nouveau aux organisations syndicales et aux représentants des lycéens de bien vouloir s'asseoir autour d'une table afin de réfléchir à la modernisation du baccalauréat.
Pour ces raisons, je suis défavorable aux amendements nos 296, 562, 564, 565, 563, et favorable à l'amendement n° 103.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 296 et 562.
M. David Assouline. Monsieur le ministre, vous « remettez sur le tapis » l'historique de la question du contrôle continu au baccalauréat. Il ne s'agit pourtant pas d'une question idéologique divisant la droite et la gauche dans ce pays ! Il s'agit d'un débat qui prend un sens nouveau en fonction de chaque situation et du climat qui existe, à un moment donné, au sein de l'éducation nationale.
A mon époque, si je puis dire, en tout cas lorsque j'étais plus jeune, le principe et la forme de ce mode de contrôle étaient encore à définir. Le contrôle continu apparaissait alors comme un progrès par rapport au bachotage, qui pose effectivement des problèmes et peut être source d'injustice. On peut en effet être bon toute l'année et dépressif le jour du baccalauréat !
Pourquoi, aujourd'hui, la perspective du contrôle continu suscite-t-elle tant d'émotion chez les jeunes ? Interrogés au cours des premières manifestations, ces jeunes considéraient que l'introduction du contrôle continu serait un moyen de les « sacquer ». En effet, petit à petit, au cours des derniers mois et des dernières années, l'idée a été introduite, en partie par votre ministère, selon laquelle les professeurs devraient dorénavant « sacquer » les élèves pour asseoir leur autorité.
M. David Assouline. Vous avez créé une incertitude et le rapport entre les élèves et les enseignants s'est donc quelque peu modifié, du fait de l'appréciation portée par les jeunes sur ce que pourrait être le contrôle continu au baccalauréat.
Ce que réclament certains lycéens aujourd'hui, ce n'est pas la suppression du contrôle continu, mais une épreuve impartiale - sur le principe des partiels à l'université -, unique pour tous et excluant l'appréciation des candidats selon des critères subjectifs.
M. le président. La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Nous demandons la suppression de cet article 16 non pas pour laisser les choses en l'état, monsieur le ministre, mais pour faire avancer la discussion et pour proposer des idées nouvelles sur la réforme du baccalauréat !
Pourquoi ne pas diversifier les formes d'évaluation ? Selon certaines études internationales, comme le PISA, le programme international pour le suivi des acquis des élèves, auquel participent trente-deux pays de l'OCDE, il manque aux élèves de notre pays la capacité de transférer leurs savoirs pour les mettre en oeuvre dans des situations nouvelles.
Pourquoi l'évaluation ne porterait-elle pas en particulier, dans le cadre du brevet et du baccalauréat, sur de nouveaux dispositifs comme les itinéraires de découverte et les travaux personnels encadrés ?
Le contrôle continu comme mode d'évaluation existe certes déjà dans certaines disciplines, telle l'éducation physique et sportive. Mais nous avons souvent dénoncé les difficultés et les risques entraînés par le contrôle continu en cours de formation, notamment pour la légitimité nationale du diplôme.
Nous proposons la suppression de l'article 16, car celui-ci ne définit pas suffisamment les modalités de la réforme du baccalauréat. Il faut redonner sa place à la consultation et à la réflexion pour aboutir à une véritable réforme, qui corresponde à ce que nous voulons aujourd'hui pour le baccalauréat.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, notre acharnement à vouloir supprimer cet article vaut bien le vôtre à vouloir le maintenir ! L'existence de cet article n'est nullement nécessaire pour que soit entamée une réflexion nouvelle sur la réforme du baccalauréat.
J'ajoute qu'il serait bon de s'interroger sur les raisons qui expliquent la réaction actuelle des lycéens. Cela nous amènerait à constater que ceux-ci nourrissent un sentiment d'injustice, à l'évidence justifié - inutile, pour s'en assurer, de suivre les manifestations ou de questionner les manifestants ! - par l'existence d'inégalités entre les établissements en matière de fonctionnement comme d'enseignement, et donc entre les élèves.
Cela nous conduirait aussi à mener une réflexion plus vaste, sur les raisons de l'échec de certains élèves.
Sans doute les jeunes ont-ils aussi le sentiment que la valeur nationale de ce diplôme et sa valeur de premier diplôme universitaire sont menacées ; de fait, le baccalauréat leur ouvre de moins en moins l'accès aux études supérieures qu'ils voudraient entreprendre.
Décidément, tout cela mérite réflexion et il convient donc de supprimer cet article.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Je ne peux pas laisser passer sans réagir les propos que vient de tenir David Assouline.
Mon cher collègue, l'évolution des mentalités est perceptible, notamment dans votre propre discours.
Ce que vous avez dit tout à l'heure est absolument indigne : d'un côté, vous défendez le corps enseignant, les professeurs, les instituteurs, les professeurs des écoles, mais, de l'autre, vous laissez planer une suspicion sur la valeur des notes que ces enseignants sont amenés à attribuer à leurs élèves ou à leurs étudiants, sur la valeur des appréciations qu'ils sont amenés à formuler à leur endroit. C'est proprement scandaleux ! (Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.)
M. Jacques Legendre. Très bien !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur Assouline, vous ne pouvez à la fois prétendre défendre le corps dont vous faites partie, dont je fais partie et dont nombre de sénateurs font ou ont fait partie, et mettre en doute la sincérité et l'honnêteté des appréciations que ce corps formule.
Je ne peux vous laisser dire qu'il faut éliminer le contrôle des connaissances, que vous avez réclamé, que nous avons été plusieurs à réclamer, au prétexte qu'il ne pourrait être ni totalement sincère ni totalement honnête. Ou alors il faudrait également mettre en doute la valeur des appréciations portées dans le carnet scolaire ! Or le carnet scolaire est très important, notamment lors des délibérations des jurys de baccalauréat. Au-delà des notes qui sont fournies, les appréciations sont en effet fondamentales pour éclairer la décision finale du jury sur l'opportunité de recevoir ou non à l'examen tel ou tel élève.
Je le répète, on ne saurait à la fois défendre le corps enseignant, comme nous le faisons tous ensemble, puis mettre en doute la sincérité de ses appréciations et envisager que tel ou tel comportement puisse avoir une incidence sur les notes qu'un enseignant attribuera.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre. Avant que le Sénat ne se prononce sur les amendements de suppression de l'article 16, je veux simplement lui indiquer quelle serait la conséquence de cette suppression : ce serait la suppression de toute base légale pour tous les examens dans notre pays !
J'ai rappelé tout à l'heure que cet article n'était pas nouveau : il figure déjà dans notre code de l'éducation. Nous ne faisons qu'y ajouter une disposition relative au contrôle en cours de formation.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 296 et 562.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 128 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 121 |
Contre | 201 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote sur l'amendement n° 564.
M. David Assouline. Je souhaite surtout répondre à M. Valade,...
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Alors, ce n'est pas une explication de vote !
M. David Assouline. ...dont je mets l'intervention sur le compte ou d'un malentendu sur le sens de mes propos ou de l'habileté politique.
A aucun moment, monsieur Valade, je n'ai mis en cause dans mes propos les professeurs,...
M. David Assouline. ...comme la lecture du compte rendu des débats vous en convaincra.
J'essaie seulement de comprendre pourquoi, à un moment donné, la colère des jeunes s'est focalisée sur la question du contrôle continu, question dont on peut pourtant légitimement débattre et qui n'avait jamais suscité un tel rejet de la part des jeunes,...
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il serait intéressant de se demander pourquoi !
M. David Assouline. ...et je vous fournis mon explication.
On a instauré, au cours des dernières années, un certain climat, et d'abord un certain climat social, qui, notamment dans les territoires les plus en difficulté, a alimenté un sentiment d'exclusion, de rejet, l'idée selon l'égalité des chances n'était pas réelle. Cela explique pour une large part leur comportement.
En outre, au plus haut niveau, a été tenu dans l'éducation nationale un discours laissant entendre que, pour rétablir l'autorité, on allait privilégier la sanction - y compris dans les jugements sur le comportement -, ce qui a créé un climat de défiance chez les jeunes.
Jusqu'à ce que j'entre dans cet hémicycle, j'ai été de ces professeurs qui doivent se « coltiner » le problème quotidiennement, et ce n'est pas moi qui mettrais en accusation ce corps, que vous n'aimez pas, vous, à droite ! (Vives protestations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. Christian Cointat. C'est scandaleux ! On ne peut pas vous laisser dire cela !
M. David Assouline. A moi, on peut dire que je tiens des propos scandaleux !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Ils ne sont pas scandaleux, ils sont injurieux !
M. David Assouline. Je vous renvoie le propos, et je peux l'étayer !
Lorsque, dans la discussion générale, j'ai dit que vous vous méfiiez de ce corps, j'ai entendu vos rigolades, et, chaque fois qu'il est question des professeurs, j'entends parler - certes pas en séance publique, bien sûr - de ces « planqués », de ces gens qui ne travaillent pas, et cela vient toujours de votre camp ! (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
M. Christian Demuynck. N'importe quoi !
M. le président. La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. M. le ministre nous a dit que le vote des amendements de suppression ou de nos amendements suivants sur l'article 16 remettrait complètement en cause la délivrance des diplômes dans notre pays.
Mme Annie David. Mais, monsieur le ministre, si nous demandons la suppression de l'article 16 de votre projet de loi, c'est justement pour laisser en l'état le code de l'éducation, dont article L. 331-1 prévoit déjà que l'Etat sanctionne par des diplômes nationaux les formations secondaires.
Si nous demandons la suppression de l'article 16, c'est pour permettre à la commission qui doit être mise en place d'étudier sérieusement et sereinement la réforme qu'il est nécessaire d'apporter au baccalauréat.
Voter en l'état l'article 16 serait un déni de démocratie. Ce serait le rejet de ce que vous avez négocié avec les élèves, ou tout au moins ce que vous leur avez octroyé en leur disant : « Nous rediscuterons ultérieurement de la réforme du bac. »,
Mme Annie David. Vous ne pouvez dire cela d'un côté et, de l'autre, nous demander le maintien de l'article 16 au motif que sa suppression remettrait tout en cause.
Nous, nous vous demandons de maintenir le code de l'éducation en l'état, puis d'entamer les discussions en vue d'une véritable réforme de notre baccalauréat, afin de l'adapter à la société actuelle en tenant compte des évolutions qu'elle a subies.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre. Vous vous enferrez ! Vous demandez, dans votre amendement n° 564, la suppression du premier alinéa de l'article L. 331-1 du code l'éducation,...
Mme Annie David. Dans la rédaction proposée à l'article 16 !
M. François Fillon, ministre. ...mais, je l'ai dit et c'est la vérité, supprimer cet alinéa enlèverait toute base légale aux examens qui intègrent le contrôle continu, qui est déjà prévu dans notre code de l'éducation.
Il s'agit d'un discours polémique et il n'a absolument aucun sens : il n'y aura pas de réforme du baccalauréat tant qu'il n'y aura pas d'accord entre l'ensemble des acteurs de la communauté éducative sur la question et il n'est vraiment pas utile de supprimer les bases légales des examens qui utilisent le contrôle continu aujourd'hui pour parvenir à cet accord !
M. Christian Cointat. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Nous ne sommes pas là pour faire des procès d'intention. Or David Assouline vient d'en faire deux d'un seul coup !
Le premier vise les professeurs ; c'est du moins ainsi que beaucoup d'entre nous, monsieur Assouline, ont compris votre intervention. Vous avez tenté de justifier votre position, mais je confirme la mienne : il serait indigne d'imaginer qu'un professeur, parce qu'il aurait, comme vous le sous-entendez, perdu le contrôle de sa classe se rattrape en « sacquant » les élèves qui lui sont confiés. C'est un procès d'intention que ni le ministre ni les parlementaires ne peuvent admettre.
Le second vise le Sénat, en laissant penser que notre Haute Assemblée, dont vous faites partie, monsieur Assouline, se livrerait, à l'encontre du corps enseignant, à une chasse aux sorcières. Nous avons, en vérité, la plus grande considération pour celles et ceux à qui nous confions nos enfants, nos adolescents, non seulement pour qu'ils leur enseignent les disciplines dont ils sont responsables et dont ils ont la maîtrise, mais également pour qu'ils fassent leur éducation.
En mettant en cause cette réalité, on touche au fameux socle républicain auquel nous sommes unanimement attachés.
De grâce, pas de procès d'intention entre nous ! Nous respectons la totalité du corps enseignant. Comme tout groupe humain, il connaît naturellement des dérives, mais nous lui faisons une totale confiance : nous ne mettons pas une seconde en doute l'honnêteté qui doit être et qui est celle des enseignants quant aux jugements qu'ils peuvent porter sur les enfants et les adolescents qui leur sont confiés. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Je tiens d'abord à dire que, en tant qu'enseignant et que parlementaire, j'ai trouvé curieux d'être accusé d'appartenir à un groupe politique qui n'aimerait pas les enseignants ! Comment pourrait-on ne pas s'aimer soi-même ? (Rires et exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C'est fréquent : étudiez la psychanalyse !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. C'est ce qu'on appelle l'« anti-narcissisme » !
M. Jacques Legendre. Sur toutes les travées de cet hémicycle, siègent des enseignants et des gens qui se préoccupent sincèrement de l'organisation de l'éducation nationale, de la qualité de notre éducation et, surtout, du devenir des élèves, qui est l'objet même de notre débat.
L'amendement n° 564, que je ne voterai pas, me paraît, sinon constituer une fausse accusation, du moins mettre le doigt sur un faux problème en oubliant quelles sont les véritables questions que pose le baccalauréat. Ce qui devrait constituer l'essentiel de notre débat, c'est non l'organisation des modalités de cet examen, mais son rôle et la façon, après son obtention, de réussir dans l'enseignement supérieur.
S'il y a un scandale, c'est bien le pourcentage effrayant de titulaires du baccalauréat qui échouent dans l'enseignement supérieur : 60 %. Cette situation appelle une réflexion et mérite un véritable débat à l'Assemblée nationale et au Sénat, et non pas des mauvais procès laissant planer le soupçon que nous voudrions organiser de bons baccalauréats dans certains lycées et de mauvais baccalauréats dans d'autres.( Mme Borvo s'esclaffe.)
L'enjeu est de permettre aux titulaires du baccalauréat de poursuivre leurs études avec quelque succès, comme nous le souhaitons à tous ceux qui en ont la capacité. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur Legendre, nombreux sont ceux qui ne s'aiment pas eux-mêmes. C'est même un thème qui fait l'objet de nombreux travaux psychanalytiques que vous connaissez certainement. Franchement, en matière d'argumentation, nous attendions mieux de vous !
Pour en revenir au sujet qui nous intéresse, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, je dirai qu'en amour, comme chacun le sait, seuls les actes comptent. Or les enseignants ont vraiment eu beaucoup à pâtir de l'attitude que vous avez adoptée à leur égard, depuis votre arrivée au pouvoir.
M. Jacques Valade., président de la commission des affaires culturelles. Qu'est-ce qui a changé ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ils ont été pénalisés quant au décompte de leurs jours de grève. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Mme Françoise Henneron. C'est normal !
M. Robert Del Picchia. Dans le privé, les grévistes ne sont pas payés !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Bien sûr, vous avez applaudi des deux mains parce que vous faisiez sans doute partie de ceux qui pensaient que les jours de grève des fonctionnaires leur étaient payés ! Vous êtes mal informés ! En fait, la pénalisation a même été double !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Pas du tout !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Par ailleurs, les enseignants vous parlent, revendiquent, demandent à être associés à la concertation, et ils exercent un métier qui devient de plus en plus difficile, non pas de leur fait, mais du fait de la société, de ses dirigeants et de leurs politiques qui aboutissent aux résultats que nous savons.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Vous avez été au pouvoir !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Vous y avez pris votre part !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les enseignants ne sont pour rien dans les difficultés actuelles.
En revanche, ils ont des besoins en matière de formation, de formation continue notamment.
Puisque vous dites aimer les enseignants, nous attendons de vous des actes. Entendez-les, travaillez avec eux pour mettre sérieusement en oeuvre vos réformes, écoutez leurs revendications, revalorisez leur métier et étudiez de plus près ce qui se passe dans les classes : cela ne pourra vous faire que du bien ! (M. Assouline applaudit.)
Pour ce qui est de la réponse que vous venez de nous apporter, monsieur le ministre, ne nous prenez pas pour des idiots : nous vous demandons de supprimer le premier alinéa du texte proposé par votre article et donc de revenir simplement à l'actuelle rédaction du code.
M. François Fillon, ministre. Cela ferait tomber l'article du code ! C'est stupide de tenir de tels propos ! Quand on fait une erreur, on la reconnaît !
M. le président. L'article 17 a été supprimé par l'Assemblée nationale.
L'amendement n° 104, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
La deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 331-7 du code de l'éducation est complétée par les dispositions suivantes : « , en liaison avec les collectivités territoriales. Elle s'accompagne de la remise d'une documentation qui comprend des données objectives et actualisées relatives aux formations, aux métiers ainsi qu'aux débouchés professionnels et perspectives de carrière. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Avant d'en venir à cet amendement, je veux répéter à M. Assouline ce que j'ai dit hier à nos collègues communistes : chaque fois que les uns ou les autres tiendront des propos laissant entendre que nous n'aimerions pas les enseignants, je m'élèverai fermement contre, car de tels propos ne sont rien de moins qu'injurieux : nous portons aux enseignants une estime au moins égale à celle de nos collègues de l'opposition, et certainement beaucoup plus désintéressée !
Concernant l'amendement n 104, il faut savoir que l'article L. 331-7 du code de l'éducation concerne l'élaboration par l'élève de son projet d'orientation scolaire et professionnelle et les informations dont il doit disposer à cet effet.
Le présent amendement a un double objet.
Il vise, d'une part, à prévoir que cette information, réalisée par les conseillers d'orientation psychologues, les personnels enseignants, les conseillers de l'enseignement technologique et les représentants des organisations professionnelles et des chambres de commerce et d'industrie, de métiers et d'agriculture, se fera en liaison avec les collectivités territoriales, qui sont des acteurs à part entière.
Il tend, d'autre part, à préciser le contenu de cette documentation. Il s'agit en particulier d'éclairer les élèves non seulement sur la réalité des formations et des métiers, mais aussi sur les débouchés professionnels et sur les perspectives de carrière. C'est, en effet, la meilleure façon, à mes yeux, de les inciter à intégrer des formations qui ont parfois une image dévalorisée, mais qui sont porteuses d'avenir.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote.
M. Yannick Bodin. Dans la mesure où il est prévu d'agir « en liaison avec les collectivités territoriales » je m'interroge sur le rôle que le Gouvernement souhaite les voir jouer. Si leur intervention devait se traduire par un nouveau transfert de charges et entraîner un certain nombre de dépenses supplémentaires, il est évident que nous ne pourrions qu'y être défavorables. J'attends des précisions sur ce point, étant entendu qu'une explication orale ne suffira pas à éviter des interprétations diverses de l'article 17 si la précision n'est pas écrite dans l'article.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il n'y a, de ma part, aucune volonté de transférer des charges supplémentaires aux collectivités territoriales, notamment en matière d'orientation.
J'estime simplement que, en tant qu'acteurs du territoire, elles sont concernées par la formation, par le développement économique et par le fait qu'une orientation réussie doit tenir compte non seulement du projet du jeune, mais aussi des besoins de l'économie, et notamment de l'économie locale.
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article 17 du code de l'éducation est rétabli dans cette rédaction.
Articles additionnels après l'article 17
M. le président. L'amendement n° 105, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 332-4 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Des aménagements appropriés sont prévus au profit des élèves intellectuellement précoces ou manifestant des aptitudes particulières, afin de leur permettre de développer pleinement leurs potentialités. Le rythme scolaire peut être accéléré, en fonction des capacités de l'enfant. Des établissements scolaires peuvent se regrouper pour proposer des structures d'accueil adaptées. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement n° 101 de la commission à l'article 15 ter. Il s'agit de prévoir pour les collèges les mêmes dispositions que pour les écoles quant à la prise en charge spécifique des élèves intellectuellement précoces ou manifestant des aptitudes particulières.
M. le président. Le sous-amendement n° 652, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
I. Au début de la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 105 pour compléter l'article L. 332-4 du code de l'éducation, remplacer les mots :
Des amendements appropriés sont prévus au profit des
par le mot :
Les
II. Dans la même phrase, remplacer les mots :
, afin de
par les mots :
bénéficient d'aménagements appropriés pour
III. A la fin de la même phrase, remplacer le mot :
potentialités
par le mot :
capacités
Ce sous-amendement n'est pas soutenu.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 105 ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17.
L'amendement n° 106, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Après l'article 17, insérer un article additionnel ainsi rédigé:
L'article L. 332-4 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé:
« Des actions particulières sont prévues pour l'accueil et la scolarisation des élèves non francophones nouvellement arrivés en France. Des établissements scolaires peuvent se regrouper pour proposer des structures d'accueil adaptées. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination avec l'amendement n° 26.
M. le président. Le sous-amendement n° 653, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du texte proposé par l'amendement n° 106 pour compléter l'article L. 332-4 du code de l'éducation, après les mots :
sont prévues
insérer les mots :
chaque fois que possible
Ce sous-amendement n'est pas soutenu
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 106 ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17.
Article 18
Après l'article L. 332-5, il est inséré un article L. 332-6 ainsi rédigé :
« Art. L. 332-6. - Le diplôme national du brevet sanctionne la formation acquise à l'issue de la scolarité suivie dans les collèges.
« Il atteste la maîtrise des connaissances et des compétences définies à l'article L. 122-1-1, intègre les résultats de l'enseignement d'éducation physique et sportive et prend en compte, dans des conditions déterminées par décret, les autres enseignements suivis par les élèves selon leurs capacités et leurs intérêts. Il comporte une note de vie scolaire.
« Des mentions sont attribuées aux lauréats qui se distinguent par la qualité de leurs résultats.
« Ces mentions ouvrent droit à des bourses. Celles-ci peuvent être également attribuées à d'autres élèves méritants ayant réussi le brevet, dans des conditions déterminées par décret.
« Ces bourses, qui s'ajoutent aux aides à la scolarité prévues au titre III du livre V, sont soumises à une condition de ressources. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 107, est présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles.
L'amendement n° 133 rectifié quater, est présenté par Mmes Férat et Dini, MM. Détraigne et J.L. Dupont, Mme Morin-Desailly et M. Pozzo di Borgo.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6 du code de l'éducation par les mots :
ou dans les classes de niveau équivalent situées dans d'autres établissements.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement vise à permettre, comme c'est actuellement le cas, aux élèves des classes de quatrième et de troisième implantées dans les lycées professionnels et dans des établissements d'enseignement agricole, comme les maisons familiales, de passer l'examen du brevet selon des modalités adaptées. Je sais que Mme Férat, qui a déposé un amendement identique à celui de la commission, est très attachée à ce que ce projet de loi reconnaisse à l'enseignement agricole sa place et son rôle dans le système éducatif.
M. le président. L'amendement n° 133 rectifié quater n'est pas soutenu.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 107 ?
M. le président. L'amendement n° 298, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6 du code de l'éducation, par une phrase ainsi rédigée :
Il ne constitue pas un diplôme qualifiant.
La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. L'article 18 introduit dans le code de l'éducation un nouvel article, destiné à donner une base légale au diplôme national du brevet. Le dispositif proposé n'apporte que des indications floues sur les connaissances que sanctionne ce diplôme. Plus éclairant est le rapport annexé, qui précise que les épreuves écrites au brevet seront limitées à trois, mais que ce dernier comportera sans doute une part de contrôle continu dont les modalités d'évaluation restent cependant extrêmement vagues.
Nous reviendrons sur la dangerosité de la notion de note de vie scolaire.
Pour l'heure, afin de lever une ambiguïté dans la rédaction du texte, notre amendement tend à préciser que le brevet « version Fillon » ne pourra en aucun cas constituer un diplôme qualifiant. Cette précision n'est pas inutile compte tenu des velléités du Gouvernement de réintroduire une orientation précoce : nous avons déjà longuement abordé la question de la troisième option « découverte professionnelle ».
Il convient, en outre, de s'assurer que les élèves ne seront soumis à aucun diplôme qualifiant avant d'atteindre la fin de la scolarité obligatoire et donc de maîtriser le socle commun.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Le brevet n'est pas reconnu, chacun le sait, comme un diplôme qualifiant : son objet est de sanctionner la maîtrise du socle commun. Il n'est pas nécessaire de le préciser dans la loi et je demande donc à notre collègue de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement est-il maintenu ?
M. Yannick Bodin. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 409 rectifié, présenté par Mme Hermange et M. Goujon, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée :
La réussite du brevet des collèges conditionne le passage en seconde d'enseignement général.
La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Dans la mesure où le brevet atteste la maîtrise d'un socle commun de connaissances et où il existe aujourd'hui une session de rattrapage en septembre pour les élèves n'ayant pas pu, pour des raisons de force majeure, passer les épreuves lors de la session de juin, nous estimons que la réussite au brevet des collèges peut et doit conditionner le passage en seconde d'enseignement général.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Le brevet n'a pas vocation à conditionner le passage en seconde. En revanche, le rapport annexé prévoit que les épreuves se dérouleront plus tôt, au mois de mai, pour que les résultats soient pris en compte dans les décisions des conseils de classe relatives à l'orientation en fin de troisième.
Je demande donc à notre collègue de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président. Madame Hermange, l'amendement n° 409 rectifié est-il maintenu ?
Mme Marie-Thérèse Hermange. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 409 rectifié est retiré.
L'amendement n° 566, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6 du code de l'éducation, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Il est tenu compte des résultats obtenus lors de l'examen terminal.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Par cet amendement, nous souhaitons inscrire dans le code de l'éducation la primauté de l'examen terminal par rapport au contrôle continu dans l'obtention du diplôme national du brevet.
Je ne conteste pas la pertinence du contrôle continu comme complément de l'examen terminal, dans la mesure où il permet de juger un élève sur le travail fourni deux années durant. Cependant, le contrôle continu ne saurait remplacer les épreuves écrites du diplôme national du brevet, lequel constitue une étape d'une importance cruciale dans la vie de l'élève et permet de conserver une certaine unité à l'enseignement du premier cycle du second degré.
Ces épreuves écrites représentent le premier rendez-vous solennel entre l'élève et l'institution nationale de l'école. Elles permettent aussi de répondre à la question de savoir ce que les élèves ont tiré, à un moment M, c'est-à-dire à la fin de leurs années de collège, de tout ce que leurs professeurs leur ont transmis. Notons au passage que cette évaluation touche non seulement l'élève, mais aussi l'éducation nationale. Ce rendez-vous revêt une importance symbolique considérable, car il inscrit l'élève dans une communauté nationale et le prépare aux futures épreuves qu'il aura à affronter.
D'un point de vue qualitatif, l'examen terminal ne saurait être remplacé par le contrôle continu. La généralisation de ce dernier vaudrait renoncement à apporter une culture commune aux élèves. Or vous savez, mes chers collègues, que nous sommes attachés à cette culture commune, que nous voulons de haut niveau pour tous nos jeunes.
L'intérêt du contrôle continu réside dans le fait qu'il permet de juger les élèves dans leur contexte, de façon plus nuancée et, surtout, dans la durée, mais s'il devenait le seul mode de contrôle, l'autonomie des établissements serait excessive. Il n'y aurait plus aucun moyen de juger les élèves sur des bases communes et, par conséquent, la valeur nationale du brevet ne serait plus que fictive.
Pour éviter la désagrégation du réseau national des établissements d'enseignement en autant de mondes séparés, enseignant des savoirs et des compétences variant considérablement selon l'environnement économique et social des uns et des autres, il est primordial de rappeler et de fixer dans la loi la prééminence de l'examen terminal. Ce dernier représente, pour l'ensemble des élèves et des professeurs de collège, un étalon et un horizon communs, un but à atteindre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Le rapport annexé précise que le brevet comporte, comme c'est déjà le cas, une part de contrôle continu prenant en compte les résultats des classes de quatrième et de troisième et trois épreuves finales. Il n'est pas nécessaire de préciser ces dispositions d'ordre réglementaire dans la loi. Aussi, je demanderai à notre collègue de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. J'ai beaucoup de mal à comprendre l'acharnement soudain du groupe communiste républicain et citoyen contre le contrôle continu, qui, je le souligne, est la règle s'agissant du brevet. Cette règle ne l'a pas gêné pendant les très nombreuses années où il a été aux affaires !
M. Christian Demuynck. Exactement !
M. François Fillon, ministre. Et voilà qu'aujourd'hui nous devrions tout simplement éliminer le contrôle continu, ou au moins en restreindre la place ! Non ! Le contrôle continu fait partie de nos modes d'évaluation et restera présent dans le cadre du brevet.
Je rappelle que, aux termes du projet de loi, le brevet deviendra un examen obligatoire et national, ce qu'il n'était pas jusqu'à présent puisqu'il était organisé sur le plan régional, avec des programmes et des sujets variant suivant les régions.
Nous nous orientons donc vers la constitution d'un grand rendez-vous pour les élèves au milieu de leur scolarité. Il s'agit de donner à cet examen toute son importance, ce que cet amendement ne permet pas.
Aussi le Gouvernement y est-il défavorable.
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 300, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6 du code de l'éducation :
« Il atteste la maîtrise d'un socle commun des connaissances et des compétences dont tout élève doit faire preuve à l'issue de la scolarité obligatoire. Par ailleurs, chaque élève a la possibilité de présenter des épreuves optionnelles.
L'amendement n° 299, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6 du code de l'éducation, après les mots :
la maîtrise
insérer les mots :
du socle commun
La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour présenter ces deux amendements.
M. Jean-Marc Todeschini. L'amendement n° 300 vise à récrire le texte du deuxième alinéa de cet article consacré au « diplôme national du brevet ». Cet alinéa définit le contenu des connaissances et compétences sanctionnées par le brevet.
Notre rédaction a le mérite de la clarté. Elle se réfère au socle commun qui désormais existe et doit devenir la référence.
Bien sûr, nous aurions souhaité une définition plus large du contenu de ce socle commun, en y intégrant notamment l'éducation artistique et sportive. Nous nous sommes déjà amplement exprimés sur ces questions.
L'amendement n° 300 fait également référence à d'éventuelles épreuves optionnelles qui permettraient à tous les élèves de développer des intérêts, des compétences ou des talents supplémentaires.
L'amendement n° 299 est un amendement de coordination avec le dispositif de l'article 6 du projet de loi, qui prévoit l'acquisition du socle commun de connaissances et de compétences. Il nous semble logique que le brevet sanctionne cette maîtrise du socle commun.
Le Sénat ne saurait repousser cet amendement de précision.
M. le président. L'amendement n° 567, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après les mots :
résultats de l'enseignement
rédiger comme suit la fin du deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6 du code de l'éducation :
de l'éducation physique et sportive et de l'ensemble des enseignements suivis par les élèves.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Comme vous le voyez, monsieur le ministre, nous ne sommes pas opposés au contrôle continu dans le cadre du brevet puisque, par cet amendement, nous vous proposons simplement d'ajouter à la mention de l'éducation physique et sportive - qui a été fort heureusement introduite par l'Assemblée nationale - celle de l'ensemble des enseignements suivis par les élèves.
Cette disposition permettrait de valoriser les options et le travail que les élèves effectuent réellement au collège.
M. le président. L'amendement n° 568, présenté par Mme David, MM. Renar, Ralite, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après les mots :
enseignements suivis par les élèves
supprimer la fin du deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6 du code de l'éducation.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Par cet amendement, nous souhaitons supprimer la mention de la note de vie scolaire, que le projet de loi fait figurer parmi les éléments à prendre en compte pour la délivrance du diplôme national du brevet.
M. le président. L'amendement n° 301, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer la dernière phrase du deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6.
La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Cette note de vie scolaire pose effectivement un problème.
J'avoue que, dans un premier temps, l'argument avancé dans nos débats en faveur de la note de vie scolaire me paraissait séduisant dans la mesure où il s'agissait en quelque sorte de récompenser les élèves qui prenaient l'initiative de s'impliquer plus fortement que d'autres dans les activités de la communauté éducative, dans la vie de leur lycée, donc dans la vie scolaire au sens strict et très précis du terme. Sincèrement, j'appréciais cette définition qui me paraissait tout de même plus noble que ce que l'on appelait à une époque le « prix de camaraderie ».
Mais, au fur et à mesure que le débat avance, l'interprétation change. J'entends dire par un certain nombre de nos collègues de droite, y compris en commission, que la note de vie scolaire sera une note de comportement. Il y a là un glissement sémantique : a priori, vie scolaire et comportement ne signifient pas tout à fait la même chose ! En fait, il apparaît que, pour employer le langage commun, on va rétablir une note de conduite !
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai parlé d'article « Choristes », me référant à un film récent, du reste excellent, pour souligner que les méthodes de discipline jadis en vigueur n'ont jamais abouti, c'est le moins que l'on puisse dire, à un meilleur comportement des élèves ! En vérité, on ne faisait rien d'autre que « jouer » avec la note de conduite, et je m'inclus dans ce « on ».
Monsieur le ministre, votre note de vie scolaire est devenue la note de conduite, et c'est ainsi que chacun l'a comprise.
Pour notre part, nous préférerions qu'elle ne soit pas prise en compte dans le brevet des collèges, qui est défini comme la sanction de la maîtrise des connaissances et des compétences. Or, autant que je sache, la conduite n'est un élément ni de compétence ni de connaissance.
Souvenons-nous de certains chahuts auxquels nous avons sûrement tous participé et qui nous ont parfois valu des zéros de conduite : ces zéros de conduite n'ont en rien affecté les brillantes études que nous avons suivies par la suite ! (Rires et exclamations.)
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. La preuve : nous sommes là !
M. Yannick Bodin. Alors, monsieur le ministre, s'agit-il d'une note de vie scolaire ou d'une note de conduite ?
M. le président. L'amendement n° 191, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Remplacer la seconde phrase du deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6 du code de l'éducation, par deux phrases ainsi rédigées :
Seuls les points supérieurs à la moyenne obtenus dans la note de vie scolaire sont pris en compte pour le calcul des points nécessaires à l'obtention du diplôme national du brevet. Cette note est attribuée sur les deux dernières années du cycle et intègre à part égale les quatre éléments suivants : présence, discipline, capacité d'entre aide, participation à la vie de l'établissement.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Vous l'avez compris, monsieur le ministre, nous souhaitons la suppression du concept même de note de vie scolaire, qui semble n'être là que pour sacrifier à un affichage d'autorité. Mais comme, depuis ce matin, vous ne paraissez guère enclin au compromis, nous proposons cet amendement pour au moins limiter les dégâts.
Telle qu'elle est actuellement envisagée, la note de vie scolaire a un statut indéfini et même dangereux. Qui l'attribue et selon quels critères ? L'annexe n'est pas plus claire sur ce point. Les lycéens qui la combattent sont donc fondés à penser qu'elle sanctionnerait particulièrement ceux dont le comportement n'est pas en phase avec les jugements subjectifs de tel ou tel détenteur de l'autorité.
On pourrait, à l'extrême limite, entendre que cette note soit intégrée, à partir d'autres critères, au calcul d'une moyenne annuelle.
Mais l'intégrer pour l'attribution d'un diplôme censé mesurer un niveau paraît aussi faux pédagogiquement que de mettre zéro à une dictée dépourvue de fautes au motif que l'élève aurait chahuté pendant la récréation !
En retenant pour le calcul des points nécessaires à l'obtention du diplôme national du brevet uniquement les points supérieurs à la moyenne obtenus dans la note de vie scolaire, en attribuant cette dernière sur les deux dernières années du cycle, en prévoyant qu'elle intègre non seulement l'adaptation à la vie de la classe par la discipline, mais aussi l'assiduité, la capacité d'entraide, la participation à la vie de l'établissement, nous encouragerions les comportements individuels et collectifs vertueux, sans fausser l'évaluation terminale, qui doit rester une évaluation des contenus.
Nous éviterions également l'arbitraire en précisant que les critères retenus pour l'attribution de cette note valorisent de la même façon l'aptitude à la solidarité et à la discipline.
M. le président. L'amendement n° 209, présenté par M. Lecerf et Mme Desmarescaux, est ainsi libellé :
Dans la seconde phrase du deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6 du code de l'éducation, remplacer les mots :
note de
par les mots
appréciation en ce qui concerne la
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 300, la rédaction proposée n'ajoute rien par rapport à ce qui est déjà prévu. Au contraire, elle tend à supprimer l'intégration des résultats de l'éducation physique, introduite par l'Assemblée nationale, de même que la note de vie scolaire. La commission émet donc un avis favorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 299, d'abord, je me réjouis, monsieur Todeschini, que vous reconnaissiez désormais le socle commun.
M. Jean-Marc Todeschini. Je l'ai toujours défendu tel que nous l'avons défini, nous, et tel que le Sénat l'a adopté hier matin ! (Sourires.)
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Quoi qu'il en soit, le renvoi à l'article L. 122-1 du code de l'éducation, qui définit le socle commun, donne satisfaction à votre amendement et je vous demanderai de retirer celui-ci.
Sur l'amendement n° 567, je rappelle que le rapport annexé prévoit, au contraire, que les autres enseignements pris en compte sont au choix des élèves, afin de mieux valoriser les goûts et les aptitudes de chacun. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
L'amendement n° 568 ayant le même objet que l'amendement n° 567, l'avis de la commission est défavorable.
L'amendement n° 301 recueille également un avis défavorable puisqu'il vise à supprimer la référence à une note de vie scolaire, alors que la commission estime au contraire tout à fait positive la prise en compte de cette note dans le brevet.
S'agissant de l'amendement n° 191, le rapport annexé précise déjà que la note de vie scolaire prend en compte l'assiduité de l'élève, le respect du règlement intérieur et son engagement dans l'établissement. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Depuis le début de ce débat, on a beaucoup parlé des valeurs ; nous sommes d'ailleurs parvenus à un certain consensus pour les inscrire dans le texte. Toutefois, lorsqu'il s'agit de s'interroger sur la manière dont elles doivent être transmises et sur la façon dont on doit veiller à les faire respecter, les choses se compliquent !
La note de vie scolaire au brevet des collèges est une mesure concrète qui va dans le sens de la transmission et du respect effectif des valeurs. Il faut savoir récompenser, reconnaître les comportements responsables et exemplaires. Bien entendu, comme toute note, la note de vie scolaire doit être le résultat d'une démarche d'explication et d'apprentissage, mais, à un moment, on doit procéder à l'évaluation.
La note de vie scolaire, telle que nous l'envisageons, est attribuée par le principal, sur proposition du conseiller principal d'éducation, qui aura consulté au préalable le professeur principal et tous les personnels, enseignants ou non, susceptibles d'apporter un éclairage sur le comportement de l'élève.
Le brevet sanctionne l'acquisition des connaissances et des compétences indispensables du socle, mais aussi l'apprentissage des comportements essentiels ; c'était d'ailleurs en ce sens que la commission Thélot avait rendu ses conclusions.
En effet, peut-on accepter qu'un collégien ne respecte pas les jeunes filles, profère des injures à caractère raciste ou antisémite à l'égard de ses camarades ou de ses professeurs ? (Mais non ! sur les travées du groupe socialiste.) Eh bien, mesdames, messieurs les sénateurs, vous vous mobilisez pour dénoncer les incidents, mais, dès que nous nous donnons les moyens d'agir, et surtout d'évaluer les progrès que peuvent faire les adolescents dans leur comportement, vous protestez !
La note doit avoir à la fois un effet incitatif et dissuasif. Elle a aussi pour objectif de promouvoir l'altruisme des élèves, les actions de solidarité, d'engagement civique dans l'établissement, tels que transmettre les cours à un élève malade, être arbitre de compétition sportive : autant d'éléments qui doivent pouvoir être valorisés.
La note de vie scolaire traduit également l'éducation au comportement responsable, le respect des autres, le respect de la règle, le respect de la politesse, l'adoption d'un comportement civique, la prévention des conduites à risques. Cette éducation existe au collège à travers l'éducation civique, à travers les actions du comité d'éducation à la santé et à la citoyenneté, à travers le fonctionnement des associations et des instances représentatives.
Il est essentiel que le diplôme national du brevet tienne compte de cette note qui, je le rappelle, s'appuie sur trois éléments, et je réponds par là même aux interrogations qui ont été formulées : le respect du règlement intérieur, l'assiduité des élèves et l'engagement dans la vie de l'établissement.
Ce sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n°s 300, 299, 567, 568, 301 et 191. Même si je partage, une fois encore, les objectifs de Mme Voynet, j'ai du mal à admettre que les comportements vertueux soient considérés comme une option. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote sur l'amendement n° 300.
M. Jacques Legendre. Tous ces amendements en discussion commune visent essentiellement à revenir sur la création de la note de vie scolaire.
Madame Voynet, j'ai été quelque peu étonné par vos propos ; vous vous inquiétez du comportement éventuel des détenteurs de l'autorité dans ce domaine. Or M. le ministre vient de rappeler que ce sont les enseignants, les membres de la communauté éducative, qui seront conduits à donner cette note.
Je me pose une fois de plus la question : qui a peur des enseignants ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M David Assouline.
M. David Assouline. Ce court débat éclaire ce que j'ai expliqué tout à l'heure à propos du climat qui est actuellement entretenu.
Une note de conduite ou une note de comportement n'a absolument aucune valeur.
Monsieur le ministre, si vous pensez qu'il suffit, pour lutter contre le racisme latent qui peut exister dans la société et dans les établissements, de mettre une mauvaise note aux élèves qui profèrent, de manière d'ailleurs un peu trop courante, des insultes à caractère raciste, généralement à l'encontre d'autres élèves, vous êtes largement en deçà des efforts que doivent fournir la société et les professeurs dans les collèges, notamment au travers de disciplines telles que l'éducation civique. Une mauvaise note n'empêchera jamais ce genre de comportement.
En revanche, je le répète, en essayant de restaurer une autorité qui se perd dans nos collèges et dans nos lycées, vous créez un climat de doute chez les élèves. En réalité, c'est vous qui tendez à créer une opposition qui n'existait pas entre les professeurs et les élèves. Vous faites croire à ces derniers que les professeurs sont là pour les sanctionner, alors qu'ils sont là pour leur transmettre des connaissances. Leur rôle n'est pas de noter leur comportement : pour cela, il y a des conseils de discipline.
Je suis partisan de la plus grande fermeté pour faire respecter le règlement dans les collèges, car la situation actuelle l'exige. Cependant, nous disposons déjà des outils nécessaires.
La transmission des connaissances et la note relative au niveau des connaissances des élèves n'ont rien à voir avec le comportement.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Mes chers collègues, si j'ai pu vous donner à penser que j'étais en quoi que ce soit complaisante à l'égard des multiples désordres qui perturbent parfois la vie de l'école, je veux revenir sur mon argumentation.
M. le ministre a livré tout à l'heure quelques exemples qui ne me paraissent, en l'occurrence, guère pertinents.
Si des élèves profèrent des insultes à l'encontre des professeurs ou s'ils profèrent des insultes racistes ou sexistes à l'encontre de leurs camarades, on doit prendre des sanctions immédiates via des procédures claires, transparentes, comprises de tous et qui existent déjà au sein de l'école. En outre, les professeurs doivent en profiter pour reprendre en classe les notions indispensables au « vivre ensemble ».
Je ne vois donc pas ce qui, dans les cas évoqués tout à l'heure par M. Fillon, pourrait faire l'objet d'une notation.
Quant à la prévention des comportements à risques, il est évident qu'un certain nombre d'entre eux non seulement ne sont pas encouragés, mais sont même strictement prohibés au sein de l'école. Là encore, en cas de violation du règlement de l'école, le couple sanction-mise en place d'une réponse éducative appropriée, notamment par le biais des programmes d'éducation à la santé, constitue la réponse adéquate, contrairement à la notation.
Monsieur Legendre, cette note ne me semble pas du tout être la bonne solution, car elle ne peut manquer d'avoir un caractère arbitraire compte tenu du nombre élevé des enfants et de la difficulté de les connaître tous intimement.
En outre, certains comportements témoignent de graves problèmes, qui exigent une prise en charge globale de l'élève. Ce n'est pas la mise en place de la note de vie scolaire que vous proposez, monsieur le ministre, qui va les régler.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Je m'associe aux propos qui viennent d'être tenus sur la note de vie scolaire, laquelle présente, en outre, un caractère très subjectif. On peut se demander ce qui sera positif. Est-ce que ce sera l'implication des élèves dans la vie scolaire ou, par exemple, le respect toujours strict de la discipline ?
Quant aux actes qui ont été évoqués, ils ne relèvent malheureusement pas de la notation. En réalité, il faut se donner les moyens de faire en sorte qu'ils ne se produisent pas.
Aujourd'hui, certains élèves sont indignés de la façon dont la police est intervenue dans leur établissement. En tout cas, c'est ce que relate la presse ; la presse en fait trop, certes, mais c'est souvent le cas, notamment lorsqu'il s'agit de la sécurité ! Quoi qu'il en soit, cela nous conduit à nous interroger sur les rapports qui existent aujourd'hui entre l'école et la police.
Enfin, je vous livrerai mon expérience personnelle en relatant un cas particulier qui corrobore bien d'autres faits.
Pendant mes études, j'ai été maîtresse d'internat et surveillante d'externat dans un lycée de filles parisien - c'était avant la mixité - qui existe toujours et qui se situe dans un quartier qui n'est pas défavorisé. En me livrant à un calcul très précis, je me suis aperçue que, par rapport à cette époque « bénie » où il n'y avait guère de problèmes dans les établissements, le nombre de personnes affectées à la vie scolaire dans cet établissement a été divisé par trois. Je vous communiquerai les chiffres précis, monsieur le ministre !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous devons donc vraiment nous interroger sur le rapport entre le nombre d'adultes et la façon dont est jugé le comportement des élèves. De plus, nous devons dissocier ce fait des graves problèmes qui se posent dans la société en général et qui ont des répercussions dans les établissements, avant de prévoir une note de conduite qui serait déterminante pour l'obtention d'un diplôme.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Ce n'est pas une note déterminante !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Je me demande vraiment pourquoi la note de vie scolaire suscite une telle inquiétude. Pourquoi devrait-elle être négative ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce n'est pas nous qui l'avons dit ! C'est M. le ministre qui a parlé des insultes !
Mme Catherine Procaccia. Elle peut être négative pour une minorité d'élèves, mais elle sera positive pour la majorité des autres.
En outre, M. le ministre a indiqué qu'il y aurait une note d'assiduité. Je crois que tout le monde s'accorde à dire que c'est l'absentéisme qui entraîne, doucement mais sûrement, les élèves vers l'échec scolaire.
Si le fait de prévoir une note de vie scolaire est une façon d'éviter l'échec scolaire, alors cela nous permettra de sauver certains élèves et, quoi qu'il en soit, la plupart des autres auront des points supplémentaires. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. Yannick Bodin. Il y a une note d'assiduité maintenant ?
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Philippe Richert.)
PRÉSIDENCE DE M. Philippe Richert
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Modification de l'ordre du jour
M. Yannick Bodin. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Monsieur le président, en ce début d'après-midi, je souhaiterais en réalité vous interroger sur l'organisation de nos travaux.
Certains, me dit-on, parce que nous sommes vendredi après-midi, commencent à considérer que le débat pourrait sinon être écourté, du moins s'accélérer dans des conditions telles qu'il ne s'agirait certainement plus d'un débat.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Si !
M. Yannick Bodin. Pour ma part, je pense que le texte qui nous est présenté est suffisamment important pour que nous y consacrions le temps nécessaire.
M. le ministre nous l'a dit à plusieurs reprises, et à juste titre, ce n'est pas tous les jours que l'on vote une loi d'orientation scolaire ; cela n'arrive que tous les quinze ans, en moyenne. Un tel événement mérite bien que l'on prenne le temps nécessaire.
Nombreux sont ceux qui, comme moi, au sein de mon groupe et au-delà, n'ont pas apprécié, c'est le moins que l'on puisse dire, que le Gouvernement déclare l'urgence sur ce projet de loi. Il n'y aura donc qu'une seule lecture. Encore faut-il, cependant, que cette unique lecture soit une vraie lecture, une lecture complète, et sereine aussi. En d'autres termes, encore faut-il un débat approfondi sur l'ensemble des amendements qui ont été déposés.
J'ai bien entendu M. le ministre dire, au début de nos travaux, lorsque la question du calendrier avait été posée, qu'il souhaitait lui-même que ce débat aille jusqu'à son terme.
Je vous interroge donc sur la manière dont nous pouvons envisager, à cette heure-ci, le calendrier de nos travaux. Certes, nous allons siéger cet après-midi et ce soir. Mais le week-end est là, et nous avons chacun d'autres engagements à l'extérieur. De surcroît, faut-il le rappeler, demain, c'est le 19 mars, date qui a une signification, officielle ou non, mais une signification pour tout le monde.
Comme nous n'en sommes encore qu'à l'article 18, nous n'aurons sans doute pas terminé l'examen du projet de loi ce soir, ce qui veut dire qu'il sera sans doute nécessaire de reprendre ce débat, sereinement, dès le début de la semaine prochaine. Qu'en pensez-vous, monsieur le président ? Il est temps de nous éclairer.
M. le président. Je vous donne acte de votre rappel au règlement, mon cher collègue. Si vous aviez attendu quelques instants de plus avant d'intervenir, vous m'auriez permis de lire la communication de M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement ; elle répond à vos interrogations s'agissant de la suite de nos travaux.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, Mme David avait également demandé la parole pour un rappel au règlement !
M. le président. Si vous le permettez, madame Luc, nous allons dans un instant savoir comment nous poursuivrons nos travaux. De la sorte, chacun pourra s'organiser et prendre ses dispositions.
M. le président du Sénat a en effet reçu de M. Henri Cuq, ministre délégué aux relations avec le Parlement la lettre suivante :
« Monsieur le président,
« J'ai l'honneur de vous informer qu'en application de l'article 48 de la Constitution et des articles 29 et 32 du règlement du Sénat, le Gouvernement demande au Sénat, en accord avec la commission des affaires culturelles, de poursuivre la discussion du projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école, le samedi 19 mars, le matin, l'après-midi et, éventuellement, le soir.
« Je vous prie d'agréer, monsieur le président, l'expression de mes sentiments les meilleurs.
« Signé : Henri CUQ »
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, j'ai bien entendu les termes de la lettre que vous venez de lire. Au nom de la commission des affaires culturelles, et en accord avec son rapporteur, je vous confirme notre désir d'aller jusqu'au bout de l'examen de ce texte et jusqu'à son vote. En d'autres termes, nous sommes prêts à siéger samedi matin, après-midi et soir, s'il le faut.
M. le président. En application de l'article 32, alinéa 2, du règlement, je vais consulter le Sénat sur la tenue d'une séance le samedi 19 mars, à neuf heures trente, à quinze heures et, éventuellement, le soir.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, je confirme que Mme Annie David avait demandé la parole pour un rappel au règlement.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Mais qui préside la séance ?
M. le président. Madame Luc, je vous remercie de me rappeler les règles de la présidence de séance !
Conformément donc à votre souhait, et au règlement, je donne la parole à Mme Annie David, pour explication de vote sur la modification de l'ordre du jour demandée par le Gouvernement.
Mme Annie David. Je confirme, dans ce rappel au règlement,...
M. le président. Il s'agit non pas d'un rappel au règlement, mais d'une explication de vote, ma chère collègue.
Mme Annie David. ...que nous ne souhaitons pas siéger demain samedi. Notre assemblée doit se prononcer sur ce point.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, apprendre en séance publique, un vendredi, à quinze heures, que l'on devra siéger le lendemain samedi, toute la journée, voire toute la nuit, de surcroît un jour de commémoration important dans nos départements, vous comprendrez que ce soit assez difficile à accepter.
Depuis mardi, nous siégeons sans désemparer, le matin, l'après-midi, le soir et la nuit, pour débattre d'un texte important, celui que vous voulez nous faire adopter aujourd'hui dans l'urgence, monsieur le ministre.
Comme mon collègue Yannick Bodin l'a rappelé, nous n'étions pas d'accord avec la procédure d'urgence qui a été utilisée sur ce texte. Monsieur le ministre, vous essayez de brider le débat dans l'hémicycle et vous n'écoutez pas le débat qui s'instaure dans la rue. (M. Christian Demuynck s'exclame.) Vous ne pouvez pas ignorer qu'il y a encore beaucoup de manifestations dans le pays, encore beaucoup de contestations sur votre projet de loi. De nombreux lycéens manifestent et bloquent leurs établissements parce qu'ils ne sont pas d'accord avec votre texte.
Allez-vous enfin écouter ce que la rue vous dit et prendre la mesure du message ? Si la rue ne gouverne pas, nous, nous sommes des élus du peuple !
Vouloir faire passer en force un projet de loi d'une telle importance un samedi, en catimini, c'est indigne de notre assemblée, mais indigne aussi d'un texte que l'on nous a présenté comme porteur d'ambitions pour notre système éducatif, et pour les quinze années à venir !
Ne serait-ce que par respect pour notre travail de parlementaires, nous aurions mérité de disposer de notre samedi dans nos départements, pour nos cérémonies commémoratives mais aussi pour assurer au mieux nos permanences. Faut-il le rappeler, ne siègent pas ici uniquement des parlementaires de la région parisienne ; il y a aussi des parlementaires de province.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Eh oui, ma chère collègue !
Mme Annie David. Et pensez aux sénatrices. M. le président du Sénat se glorifie que notre assemblée soit plus féminisée que l'Assemblée nationale. Mais, justement, il me semble que, si l'on veut nous respecter les uns et les autres, il faut aussi savoir nous donner du temps non seulement pour que nous assumions correctement notre travail de parlementaires ici, à Paris, ainsi que dans notre département, mais encore pour que nous puissions passer quelques moments en famille.
Monsieur le ministre, vouloir faire passer ce texte à toute force comme vous le faites, c'est vraiment se ficher de la République, se ficher de la démocratie, et c'est de toute manière indigne de votre gouvernement !
Depuis quatre jours, nous sommes quelques-uns ici à tenter de faire aboutir des propositions différentes des vôtres pour défendre l'éducation nationale ; mais, bien sûr, vous ne voulez pas nous entendre. Eh bien ! nous persistons, nous maintenons nos positions et nous continuerons, car nous n'avons pas envie, au prétexte qu'il faut raccourcir le débat, de nous priver de l'occasion qui nous est offerte de défendre l'éducation nationale.
Vous prendrez vos responsabilités. Vous voulez que l'examen de ce texte s'achève demain, en pleine nuit pour que personne ne puisse suivre nos débats. C'est vraiment un déni de démocratie et c'est tout à fait indigne d'un tel texte, monsieur le ministre.
M. le président. La parole est à M. Jacques Pelletier, pour explication de vote.
M. Jacques Pelletier. Monsieur le président, nous avons affaire à un projet important et politiquement sensible.
Mme Hélène Luc. Justement !
M. Jacques Pelletier. Avoir prévu trois jours et demi pour l'examen d'un tel projet de loi me paraissait une gageure, et je m'en étais d'ailleurs ouvert à certains. Aujourd'hui, on vient nous dire qu'il nous faudra travailler toute la nuit et demain samedi.
Mme Annie David. Ce n'est pas sérieux !
M. Jacques Pelletier. C'est ignorer que nous avons tous des emplois du temps très chargés. Certains d'entre nous sont à Paris toute la semaine et rejoignent leur département le samedi où les attendent en général un grand nombre de rendez-vous de toutes sortes. J'estime qu'il n'est pas sérieux de nous annoncer vendredi, à quinze heures, que nous devrons siéger toute la journée du lendemain, samedi.
Mme Annie David. Voilà !
M. Jacques Pelletier. On aurait pu éventuellement songer à lundi prochain ; ce n'était pas non plus une solution extraordinaire, car, le lundi, nous avons tous d'autres activités ; mais enfin, cela nous permettait de nous retourner.
Siéger ce soir, d'accord ; siéger demain, ce n'est ni raisonnable ni sérieux !
M. le président. La parole est à M. Jean-François Voguet, pour explication de vote.
M. Jean-François Voguet. Je suis nouveau dans cette assemblée, et je ne connais sans doute pas le règlement du Sénat aussi bien que d'autres, mais, dans la lettre du ministre délégué aux relations avec le Parlement, il est fait référence à une réunion durant laquelle la commission aurait proposé cette modification de l'ordre du jour.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Non !
M. Jean-François Voguet. Pour ma part, je n'ai pas eu connaissance d'une telle réunion.
M. Jacques Pelletier. Il n'a pas été fait allusion à cela dans la lettre.
Mme Hélène Luc. Il faut réunir la commission, vous avez raison, monsieur Voguet.
M. Jean-François Voguet. Ou bien ai-je mal compris ? Reste que la commission aurait dû être réunie.
Je souscris aux propos de M. Pelletier. Nous sommes ici un certain nombre d'élus locaux et nous avons tous des obligations dans nos départements. Comme on l'a dit, le 19 mars est un jour de commémoration important pour le monde combattant, notamment pour ceux qui ont participé à la guerre d'Algérie et qui se réunissent depuis des décennies tous les 19 mars. Moi-même je dois prononcer une allocution lors d'une cérémonie au cimetière, avant un défilé dans la ville, sans parler de toutes les activités annexes que tous les élus locaux connaissent bien et qui sont concentrées durant les fins de semaine. C'est en effet un moment privilégié pour rencontrer les associations, pour suivre des rencontres sportives, pour participer à des fêtes locales et pour avoir des contacts avec nos administrés.
J'entends bien que ce projet de loi est important, mais c'est précisément la raison pour laquelle le nouveau sénateur que je suis ne comprend pas pourquoi le Sénat ne pourrait pas poursuivre le débat lundi prochain, voire mardi. Ce serait de bon sens.
M. le président. La parole est à M. Ivan Renar, pour explication de vote.
M. Ivan Renar. Une fois encore, on voit de quel péché originel souffre ce projet de loi ; passage en force, déclaration d'urgence et, aujourd'hui, arrogance la majorité du Sénat à vouloir imposer des travaux forcés à notre assemblée !
M. Robert Del Picchia. C'est Cayenne !
M. Ivan Renar. Le peuple souverain qui nous a désignés ne souhaite pas qu'il en soit ainsi. L'opposition s'oppose, elle formule des contre-propositions, qui peuvent être contestées. Mais nous faisons un travail sérieux.
L'ordre du jour ne nous empêche pas de poursuivre la discussion de ce texte la semaine prochaine !
Mme Hélène Luc. Bien sûr !
M. Ivan Renar. Nous pouvons siéger lundi ; des questions orales et des conventions sont prévues mardi matin et mardi après-midi. Une CMP peut se décaler.
Mme Hélène Luc. Bien sûr !
M. Ivan Renar. Les assemblées délibérantes comme les nôtres doivent conserver la maîtrise de leur emploi du temps. Il y a là un dysfonctionnement !
Je partage les propos de mes collègues : à l'échelon local, nous avons des responsabilités envers nos concitoyens. Nous empêcher d'assumer nos responsabilités, c'est mépriser le peuple !
Mme Annie David. Très bien !
M. le président. Mes chers collègues, vous avez tous rappelé l'importance du travail de terrain et du contact avec les populations. Personne ici - et certainement pas la commission - ne la nie.
Afin de lever toute ambiguïté, je rappellerai les termes de la lettre qu'a adressée le ministre délégué aux relations avec le Parlement au président du Sénat : « le Gouvernement demande au Sénat, en accord avec la commission des affaires culturelles, de poursuivre la discussion du projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école ». Cette lettre ne mentionne donc aucune réunion de la commission.
Mme Annie David. La commission est d'accord !
M. le président. Traditionnellement, un dialogue s'établit entre le président de la commission, les rapporteurs et le Gouvernement. Cette pratique n'est donc pas nouvelle, nous pouvons l'admettre.
Personne ne peut soutenir qu'une telle situation ne se serait jamais produite. Nous avons déjà vécu ce cas de figure !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. En effet !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. J'entends vos propos et, dans une certaine mesure, je partage votre sentiment : tous, nous avons des obligations et tous, nous avions organisé notre week-end, surtout samedi et lundi ; nos responsabilités publiques nous prennent beaucoup de temps.
Nous avons commencé l'examen de ce projet de loi d'orientation mardi, à seize heures. Nous y avons déjà consacré de nombreuses heures, après avoir tenté de nous faire une opinion sur ce texte et avoir procédé à des auditions dans des conditions difficiles en raison de l'urgence déclarée sur ce texte - je le dis, madame David - et de la contraction du calendrier. Nous nous sommes adaptés à ces contraintes.
C'est pourquoi nous vous proposons, dans le droit-fil de ce que nous venons de faire, de siéger, comme nous le suggère le ministre délégué aux relations avec le Parlement et en accord avec le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, samedi matin et après-midi, voire le soir, s'il le faut.
Mme Hélène Luc. Pourquoi pas dimanche ?
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Je ne vous ai pas interrompue, madame Luc ! Vous prenez l'habitude d'intervenir à tout-va...
Mme Hélène Luc. C'est révoltant !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. ...et de couper la parole à l'orateur désigné par le président de séance ! Je ne me laisserai pas faire ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Ne perdons pas notre temps dans ces discussions sans objet, puisque nous allons décider par un vote si, oui ou non, nous acceptons la proposition du ministre délégué aux relations avec le Parlement. Travaillons, nous verrons à la fin de l'après-midi et en début de soirée où nous en sommes parvenus.
Je ne veux pas être optimiste à l'excès, mais, si nous travaillons convenablement, peut-être que la précaution que nous prenons ne sera pas utile et que nous ne siégerons pas samedi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Très bien !
M. Ivan Renar. La carotte et le bâton !
M. le président. Lorsqu'un orateur intervient, madame Luc, il est bon de le laisser s'exprimer.
Vous avez la parole, ma chère collègue.
Mme Hélène Luc. Quand d'autres sénateurs réagissent, monsieur le président, vous ne les rappelez pas à l'ordre !
Je vous remercie de me donner tout de même la parole.
Depuis l'instauration de la session unique nous siégions le mardi, le mercredi et le jeudi. Depuis qu'elle est revenue au pouvoir, la droite ne cesse de bafouer cette règle que, naguère, la conférence des présidents faisait respecter !
Monsieur le président, si le groupe CRC refuse de siéger demain, ce n'est pas parce qu'il ne veut pas travailler. Regardez l'hémicycle : nous sommes les plus nombreux et les plus présents !
M. Robert Del Picchia. Ce n'est pas vrai !
M. Ivan Renar. En proportion, si !
Mme Hélène Luc. C'est inadmissible ! Ne me dites pas que c'est digne du projet de loi d'orientation que nous sommes en train d'examiner.
Ici même, le président Poncelet a dit que le Sénat était l'assemblée la plus féminisée. Je prends un exemple précis : Mme Annie David, en tant que membre de la commission des affaires culturelles, est responsable de ce projet de loi au sein du groupe CRC. Elle a quitté son département depuis le début de la semaine : elle a le droit d'avoir une vie de famille et de retrouver ses enfants. (Rires et exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Et nous ?
Mme Hélène Luc. Elle a aussi le devoir, comme tous les élus locaux, de participer aux cérémonies du 19 mars. Il en est de même pour moi, même si je suis élue de la région parisienne.
Puisque vous avez proposé de travailler samedi, monsieur le président de la commission, je me suis permise d'ajouter : « Pourquoi pas dimanche ? »
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. S'il le faut !
Mme Hélène Luc. Nous ne refusons pas de travailler, mais le faire dans ces conditions n'est pas sérieux.
Je rappelle que nous n'avons pas eu le temps de consulter et de rencontrer tous ceux qui nous ont demandé des rendez-vous. En effet, non seulement vous avez supprimé la navette, mais vous avez avancé le débat d'une semaine, sans nous laisser le temps de faire ce que nous avions prévu !
Notre devoir de parlementaire ne consiste pas seulement à participer au débat dans cet hémicycle : il est aussi de rencontrer les enseignants, les parents d'élèves, les élèves, c'est-à-dire ceux dont nous défendons les intérêts.
Il faut en finir avec ces méthodes de travail. Je prends Ivan Renar à témoin, il est sénateur depuis longtemps : jamais nous n'avons travaillé de la sorte ! Ce n'est pas digne du Parlement !
M. Jean-François Voguet. Très bien !
M. Robert Del Picchia. On siégera dimanche !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Comme vous, j'avais pris un certain nombre d'engagements pour demain, notamment des inaugurations,...
Mme Hélène Luc. Prenez vos responsabilités !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. ...mais j'ai pris mes dispositions. Si nous sommes des élus locaux, nous sommes avant tout sénateurs de la République. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) A ce titre, notre première mission, c'est l'élaboration de la loi.
M. Jean-Marc Todeschini. Pas de morale !
Mme Hélène Luc. Regardez l'assiduité sur les travées du groupe UMP !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Madame Luc, laissez-moi parler ! Interrompre les orateurs est une curieuse conception de la démocratie !
Travailler le dimanche, ce n'est pas une première !
Mme Hélène Luc. Cela ne m'effraie pas !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Sous le gouvernement de Lionel Jospin, nous avons voté le budget de l'éducation nationale un dimanche après-midi !
M. le président. Madame Luc, tout orateur mérite d'être écouté. Il nous faut nous respecter et écouter l'autre comme il nous a écoutés. Personne ne vous a interrompue, même pas ceux qui ne partagent votre avis...
Mme Hélène Luc. Ce n'est pas une question d'avis, c'est une question de travail ! Il y a des choses qui sont inacceptables !
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. La sagesse lorraine n'est pas la sagesse de la commission des affaires culturelles, ou celle qui préside actuellement à nos travaux !
J'accepte que l'on nous fasse la morale sur notre travail de parlementaire.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Ce n'est pas de la morale !
M. Jean-Marc Todeschini. Si ! Vous voulez nous mettre une note de conduite !
Je ne vous ai pas interrompu, monsieur le président de la commission, mais nous risquons de beaucoup nous interrompre ce week-end, si vous voulez nous faire travailler dans ces conditions.
Nous siégeons depuis mardi après-midi. Nous en avons tous marre non de travailler, mais de devoir le faire dans l'urgence, sans pouvoir nous concerter ou même réfléchir. Hier, après l'incident relatif à l'article 6, nous avons dû, dans la précipitation, exiger une suspension de séance d'une demi-heure, alors que M. le rapporteur ne voulait nous accorder que deux minutes.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cinq minutes !
M. Jean-Marc Todeschini. Il n'est plus possible de travailler ainsi. En nous contraignant à siéger demain, vous faites preuve du plus total mépris envers les parlementaires.
Ce n'est pas vous qui nous noterez, ce sont les grands électeurs !
Alors que ce texte est annoncé depuis longtemps, il est finalement déclaré d'urgence. Vous êtes mis en minorité par votre propre majorité ! Vous rectifiez l'article 6 ! Vous nous faites travailler au canon ! Nous sommes incapables de poursuivre dans ces conditions ! Il faut être sérieux.
Puisque vous voulez que nous restions, méfiez-vous, nous resterons !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Pas de menaces !
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le président Valade, vous ne voulez pas être interrompu ! Avec vous, je suis courtois !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. La réciproque est vraie !
M. Jean-Marc Todeschini. Un parlementaire de province qui décide de rester à Paris est totalement libre : il a tout annulé dans son département !
Ne nous obligez pas à faire de la procédure, à demander systématiquement un scrutin public, à expliquer et à relire chaque amendement. Ne nous contraignez pas à l'obstruction !
Mme Annie David. On sait le faire !
M. Jean-Marc Todeschini. Le groupe socialiste ne s'y est jamais livré, même sur les assistants d'éducation, alors qu'il était farouchement contre ce que vous proposiez !
Ne nous obligez pas à en arriver là avec un débat de cette importance ! Reportez-le à lundi matin, nous serons frais et dispos. Vous parviendrez à réunir la commission mixte paritaire mardi matin, puisque c'est votre souci. Nous avons reçu, monsieur le président de la commission, la convocation que vous avez envoyée aux groupes. Vous n'osez même pas dire que la commission mixte paritaire est prévue mardi, vous dites « au cas où » !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. C'est réglementaire !
M. Jean-Marc Todeschini. Peut-être, mais vous tenez à ce qu'elle soit réunie mardi.
Cessons nos travaux cette nuit et reprenons lundi.
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Le Gouvernement a pris la responsabilité de déclarer l'urgence sur un projet de loi d'orientation : il est en train de récolter ce qu'il a semé !
Certes, le Gouvernement était dans son droit, mais c'était méconnaître les droits des parlementaires, qui peuvent exiger, si une seule lecture est prévue, qu'elle soit une vraie lecture, effectuée dans la sérénité.
Mme Hélène Luc. Bien sûr !
M. Yannick Bodin. C'est la raison pour laquelle j'ai fait un rappel au règlement à la reprise. Je maintiens donc, pour ma part, la proposition que j'ai formulée au nom de mon groupe, à savoir suspendre nos travaux ce soir pour les reprendre tranquillement en début de semaine prochaine.
Jean-Marc Todeschini l'a dit, ce n'est pas une menace - cela n'aurait pas de sens ! -, mais vous connaissez les moyens dont nous disposons si la majorité du Sénat nous oblige à siéger demain. Je souhaite que soit exaucé notre voeu de poursuivre nos travaux lundi. Dans le cas contraire, sans faire d'obstruction, nous défendrons tous nos amendements avec toutes les possibilités que nous offre le règlement du Sénat. Cela signifie qu'il y a de fortes chances pour que, lundi matin, nous soyons toujours en séance. C'est, en quelque sorte, un choix.
Puisque la proposition de tenir une séance demain va être soumise à notre vote, je demande un scrutin public.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet, pour explication de vote.
Mme Dominique Voynet. J'hésite, en cet instant, à prendre la parole pour une explication qui sera considérée comme dérisoire, marginale et sans doute un peu ridicule par ceux de nos collègues qui ont accompagné de leurs ricanements l'intervention de Mme David, laquelle a insisté sur la dimension personnelle de nos vies.
Il est vrai que, dans le monde politique, on défend volontiers une conception un peu virile, un peu martiale de l'engagement politique, auquel on sacrifie tout. Nous pouvons oser dire ici que nous pourrions être absents demain pour assister à des cérémonies en l'honneur du 19 mars, pour inaugurer des stades ou pour remettre des coupes à des sportifs. En revanche, l'évocation de nos engagements à l'égard de nos proches, de nos familles, de nos enfants, fait sourire et ricaner. Cela m'accable.
Etes-vous conscients que notre discours sur la féminisation et le métissage de la vie politique, sur la nécessité d'attirer à la vie politique des gens qui seraient capables de vivre sans les honneurs, les inaugurations et les moments de reconnaissance officielle aura une portée fort limitée si nous ne sommes pas aussi capables, quand il le faut, de dire que nous avons pris des responsabilités à l'égard de nos proches et que nous ne sommes donc pas si déconnectés de la vraie vie ?
Je prends ma mission très au sérieux : il s'agit de contribuer à élaborer des lois dans l'intérêt général. Je suis prête à travailler ici une quatrième nuit. Je considère même que siéger plusieurs nuits de suite est normal en fin d'année, puisque la règle du jeu de la Ve République nous impose de voter le budget avant le 31 décembre.
Mais je ne comprends pas la perversité à laquelle nous sommes aujourd'hui arrivés. En effet, les membres de la commission Thélot ont commencé leurs travaux il y a deux ans, ils ont rendu leur rapport voilà un an, et nous avons attendu des mois pour savoir quelle était la volonté du Gouvernement. Et voilà que nous sommes sommés de rendre, en quatre jours seulement, une copie ni faite ni à faire pour que sept députés et sept sénateurs puissent se réunir en temps et en heure, comme ils l'ont prévu ! J'avoue ne pas comprendre.
Vous ne parviendrez pas, monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, à me culpabiliser, en me laissant à penser que le fait d'avoir pris des engagements personnels devrait me faire douter de la solidité de la façon selon laquelle je remplis l'engagement que j'ai pris à l'égard des grands électeurs et de mon pays. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Mon propos ira dans le même sens. Je veux, à mon tour, vous appeler à la raison, monsieur le ministre, car, vous aussi, vous avez beaucoup de travail.
Les engagements pris au titre de la vie privée sont tout aussi louables que les autres. Il est impossible de légiférer dans ces conditions. De surcroît, cela donne une image déplorable de nos travaux.
Comme je l'ai dit hier, alors que nous aurions pu faire une grande loi, nous faisons un « petit machin ». Aujourd'hui, ce qui prime, ce n'est plus le débat, c'est une date et la volonté de finir au plus vite. La semaine dernière, nous avions l'impression que vous vouliez aller vite car vous redoutiez la pression de la rue et l'extension du mouvement social. Aujourd'hui, vous claironnez que tout cela est fini. Alors, prenez le temps ! Certes, vous pouvez faire jouer la majorité qui vous soutient, et vous avez la possibilité de nous faire travailler au canon encore davantage. Vous l'avez assez fait jusqu'à présent. N'allez pas jusqu'au ridicule !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La plupart des sénateurs qui se sont exprimés contestent avec force, pour des raisons que j'approuve totalement, le fait que nous soyons convoqués demain. Le terme « convoqués » est choisi à dessein puisque ni la commission des affaires culturelles ni la conférence des présidents ne se sont réunies.
Mme Hélène Luc. Absolument !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. En revanche, nous n'avons pas entendu les raisons qui justifieraient de ne pas poursuivre ce débat la semaine prochaine. Il est regrettable que la majorité nous impose de siéger demain.
Pourtant, le Sénat sait prendre son temps quand il le veut. Certains textes qui avaient un grand intérêt mais d'une importance toute relative ont été examinés pendant des semaines. Ainsi en est-il allé du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux, dont la portée était très limitée et sur lequel nous avons à deux reprises travaillé pendant trois semaines. Ce texte a pu être examiné normalement, puisqu'il n'avait pas été déclaré d'urgence.
Donnez-nous une seule raison de refuser de convoquer le Sénat la semaine prochaine, alors que le calendrier le permet ! Nous avons protesté auprès de la conférence des présidents lorsqu'elle a prévu trois jours seulement pour l'examen de ce texte. Nous avons également protesté à propos de la déclaration d'urgence, qui n'était en rien justifiée. Aujourd'hui, nous butons sur la date de convocation de la commission mixte paritaire.
Monsieur le président, je demande donc officiellement que nous travaillions la semaine prochaine et je souhaite une suspension de séance afin que nous puissions nous consulter car il n'est pas possible de nous faire travailler dans ces conditions. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC. - M. Jean-Marc Todeschini applaudit également.)
M. le président. Nous avons entendu les explications de vote d'un certain nombre de nos collègues. Il me revient d'appliquer le règlement : nous allons donc procéder au vote sur la demande du Gouvernement de tenir une séance demain, samedi. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
Mme Hélène Luc. La suspension de séance est de droit !
M. le président. Madame Luc, nous sommes dans la procédure de vote ! (Protestations sur les mêmes travées.) Après avoir indiqué que nous allions procéder à un vote, j'ai donné la parole pour explication de vote à ceux qui souhaitaient s'exprimer.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Exactement !
M. le président. A la fin des explications de vote, le vote doit avoir lieu.
Mme Hélène Luc. Nous demandons une suspension de séance !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. On ne suspend pas la séance quand le vote est engagé !
M. le président. Si, après le vote, vous maintenez votre demande, je pourrai y accéder. Mais, pour l'instant, la procédure de vote étant engagée, je me dois de la mener à son terme.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. C'est évident !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
En application de l'article 32, alinéa 2, du règlement, je consulte le Sénat sur la tenue d'une séance le samedi 19 mars, à 9 heures 30, à 15 heures et, éventuellement, le soir.
Je suis saisi de trois demandes de scrutin public émanant, la première, de la commission des affaires culturelles, la deuxième, du groupe UMP et, la troisième, du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 129 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 298 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 150 |
Pour l'adoption | 163 |
Contre | 135 |
Le Sénat a adopté.
L'ordre du jour est ainsi modifié.
La demande de suspension de séance est-elle maintenue ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Oui, monsieur le président.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pendant quinze minutes.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faut que nous nous organisions !
M. Jean-Marc Todeschini. Nous avons besoin de trente minutes, monsieur le président. Nous devons appeler en province, réserver des chambres d'hôtel.
M. le président. Mes chers collègues, si une suspension de séance de trente minutes vous permet de prendre vos dispositions pour nous puissions ensuite de travailler dans les meilleures conditions, il me semble légitime d'aller dans votre sens.
Mais je souhaite que nous reprenions le plus rapidement possible, car cela aura une incidence sur la suite de nos travaux. M. le président Valade l'a dit : il ne s'agit pas de travailler dans la précipitation, mais de nous remettre au travail au plus tôt afin de pouvoir, à la fin de la séance, réexaminer l'organisation de la suite de nos travaux.
Je souhaite donc que cette suspension de séance soit la plus brève possible et que vous ne la prolongiez pas dans le but de faire traîner les choses, car en tardant à nous remettre au travail nous perdons un temps qui nous est précieux pour l'examen des amendements.
Je vous ai proposé une suspension de quinze minutes, vous avez souhaité qu'elle soit portée à trente minutes. Mettons-nous d'accord et remettons-nous très vite au travail !
Monsieur Todeschini, vous avez la parole. Nous statuerons ensuite.
M. Jean-Marc Todeschini. Par les propositions ridicules que vous nous faites et que vous avez négociées au préalable pour être sûrs d'être majoritaires, vous nous contraignez au ridicule !
Je rappelle simplement que j'ai été chef de cabinet du secrétariat d'Etat aux anciens combattants. Nous nous sommes d'ailleurs rendus ensemble en Russie, monsieur le président, au sujet du problème alsacien-mosellan.
Les commémorations du 19 mars m'obligent à être présent demain dans mon département, en mémoire du passé et des responsabilités que j'ai exercées. L'organisation de nos travaux n'est en rien respectueuse de nos obligations !
Je vous informe donc que je demanderai une suspension de séance avant la présentation de chaque amendement, que je présenterai et lirai chacun de mes amendements, que j'interviendrai ensuite en explication de vote et que je donnerai de nouveau lecture des amendements. Nous serons ridicules, parce que vous l'êtes !
Ce que vous nous imposez est inadmissible au regard du fonctionnement du Parlement. Nous n'attendrons pas ce soir pour nous organiser. Dans l'esprit du président Valade, « attendre ce soir » signifie « si vous êtes sages et si vous allez vite ! ». Eh bien non !
Nous avons envie de travailler ! Comme j'ai envie de travailler, et puisque vous m'y obligez demain et que je ne pourrai pas en conséquence honorer les engagements que j'ai pris auprès de certaines associations avec lesquelles j'ai travaillé durant quatre ans - les commémorations de demain sont très importantes pour les anciens combattants -, je vous promets d'être présent jusqu'à lundi matin ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Personnellement, je me sens très concerné par ce projet de loi.
M. le président. Mon cher collègue, je comprends parfaitement les difficultés qui sont les vôtres. Sachez cependant que chacun, dans cet hémicycle, doit s'organiser pour demain. Il n'y a pas, d'un côté, ceux qui sont présents sur le terrain, et, de l'autre, ceux qui le ne sont pas.
Vous annoncez d'ores et déjà votre intention de faire le plus d'obstruction possible. Permettez-moi de vous dire qu'il est tout de même contradictoire de demander du temps pour vous organiser tout en prévoyant de faire en sorte que nos travaux se passent mal !
Je vais cependant dans votre sens et je suspends la séance jusqu'à seize heures dix.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à seize heures dix.)
M. le président. La séance est reprise.
4
Avenir de l'école
Suite de la discussion d'un projet de loi d'orientation déclaré d'urgence
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, d'orientation pour l'avenir de l'école.
Article 18 (suite)
M. le président. Nous poursuivons la discussion de l'articler 18.
Je rappelle que les amendements nos 299, 567, 568, 301 et 191 ont déjà été présentés et que la commission et le Gouvernement se sont exprimés.
Nous en sommes parvenus aux explications de vote.
La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote sur l'amendement n° 299.
M. Jean-Marc Todeschini. Cela fait très longtemps que nous avons interrompu l'examen de ces amendements et, jusqu'à présent, les nouveaux élus, dont je fais partie, ont étudié la procédure. Nous devons nous remémorer ces amendements. Par conséquent, monsieur le président, je demande une suspension de séance.
M. le président. Mon cher collègue, nous venons d'en avoir une.
M. Jean-Marc Todeschini. Elle était motivée par une autre raison !
M. le président. Il est important que nous puissions reprendre l'examen des amendements.
M. Jean-Luc Mélenchon. La suspension de séance est de droit !
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le président, si vous considérez que le vote a commencé, je réitérerai ma demande dans quelques instants.
M. le président. Vous connaissez fort bien le règlement du Sénat et vous savez que la suspension que vous demandez est à la discrétion du président de séance.
Je mets aux voix l'amendement n° 299.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote sur l'amendement n° 301.
M. Jean-Marc Todeschini. Il était midi quarante quand nous avons présenté cet amendement. Laissez-moi le temps de retrouver mon papier.
L'article 18 prévoit que le diplôme national du brevet comporte une note de vie scolaire. Comme l'a très bien expliqué M. Bodin, cette note deviendra rapidement une note de comportement, voire de conduite.
A l'instar de la façon dont nous ont été rappelées nos responsabilités de parlementaires nationaux, cette note de conduite n'a pas sa place dans le diplôme du brevet, qui est appelé à sanctionner la maîtrise de connaissances et de compétences. Je n'invente rien : il s'agit des termes mêmes de l'article 18.
Le projet de loi effectue ainsi un amalgame rétrograde et fâcheux entre conduite et pédagogie. Le rapport annexé ne comporte aucune précision relative à cette note de vie scolaire, ce qui n'est pas de nature à nous rassurer. Cette note sera donc soumise à la libre interprétation des organisateurs du brevet. Il est évident qu'elle constituera une variable reposant sur des critères très peu scientifiques et objectifs.
Nous souhaitons mieux encadrer le contenu du brevet et supprimer la référence à une note de vie scolaire qui sera source de dangers et de subjectivité.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 108, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Remplacer les deux derniers alinéas du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Des bourses au mérite, qui s'ajoutent aux aides à la scolarité prévues au titre III du livre V, sont attribuées, sous conditions de ressources et dans des conditions déterminées par décret, aux lauréats qui obtiennent une mention ou à d'autres élèves méritants. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur de la commission des affaires culturelles. Il s'agit d'un amendement de clarification rédactionnelle.
M. le président. L'amendement n° 147, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Dans la première phrase de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 332-6 du code de l'éducation, après les mots :
ouvrent droit
insérer le mot :
prioritaire
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 108 ?
M. François Fillon, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'article 18, modifié.
(L'article 18 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 18
M. le président. L'amendement n° 569, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 112-2 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Art. L. 112-2. - Afin que lui soit assuré un parcours de formation adapté, chaque enfant, adolescent ou adulte handicapé a droit à une évaluation au moins une fois par an de ses compétences, de ses besoins et des mesures mises en oeuvre dans le cadre de ce parcours, selon une période adaptée à sa situation. Cette évaluation est réalisée par l'équipe pluridisciplinaire mentionnée à l'article L. 146-4 du code de l'action sociale et des familles. Les parents ou le représentant légal de l'enfant sont obligatoirement entendus à cette occasion. »
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Notre proposition est empreinte d'une grande humanité.
Nous souhaitons que l'enfant, l'adolescent et l'adulte en situation de handicap soient considérés comme des êtres humains à part entière, susceptibles de progrès, d'évolution, d'adaptation dans des situations parfois difficiles.
Durant des décennies, à l'école comme dans le monde du travail, l'étiquette « handicapé(e) » était mise une fois pour toutes, sans évolution inimaginable.
Or la réalité vécue démontre le contraire. Dans la plupart des situations, que le handicap soit mental ou physique, un travail, une adaptation, permet des progrès plus ou moins significatifs, selon la gravité.
Cette réalité vaut particulièrement pour l'enfant en situation de handicap, à un âge auquel tout bouge, tout évolue.
A l'enfance, chaque mois peut être source de progrès. Un enfant peut commencer une année à l'école maternelle avec un statut d'enfant en situation de handicap et finir l'année en intégrant pleinement la communauté scolaire.
Qui n'a connu la situation, par exemple, d'un enfant présentant en début d'année scolaire des symptômes autistiques et évoluant de façon positive au fil des mois, voire soudainement.
Nombreux sont les enfants qui acquièrent rapidement une maîtrise de leur handicap. Faut-il tenir compte ou non de cet effort si important ?
Avec notre amendement, nous suggérons de réactualiser les projets personnalisés en permanence, au moins une fois par an.
Cette évaluation permettrait d'estimer les compétences, les besoins et la nature des mesures mises en oeuvre dans le cadre de ce parcours.
Nous insistons tout particulièrement sur la dernière phrase de notre amendement aux termes de laquelle les parents ou le représentant légal de l'enfant sont obligatoirement entendus à cette occasion. Nous souhaitons en effet éviter l'anonymat administratif dans la mise en oeuvre de l'évaluation. Les parents ont en effet une connaissance particulièrement fine de leur enfant. Certes, l'émotion peut parfois submerger leur objectivité, mais il n'est pas possible de refuser de les intégrer dans le processus d'évaluation.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission émet un avis défavorable, car ce qui est proposé est déjà prévu dans l'article L. 112-2 du code de l'éducation tel que modifié par la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 569.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 130 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 302, présenté par MM. Mélenchon, Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 333-1, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Afin de faciliter l'acquisition des connaissances et de rendre plus concrètes les qualifications préparées, des travaux personnels encadrés et des projets pluridisciplinaires à caractère professionnel sont proposés respectivement aux élèves de lycée d'enseignement général et technologique et aux élèves de lycée professionnel. »
La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Cet amendement vise à insérer un article qui institutionnaliserait les TPE et les PPCP.
La plupart d'entre vous savent ce que sont des TPE, des travaux personnels encadrés, mais la plupart d'entre vous ne savent pas ce que sont les PPCP. Ce sont des projets pluridisciplinaires à caractère professionnel.
Les projets pluridisciplinaires à caractère professionnel sont une technique pédagogique qui consiste à croiser les enseignements de matières générales avec les enseignements techniques en vue de la production d'un objet qui concentrera dans sa préparation des savoirs généraux et techniques à caractère professionnel, c'est-à-dire un « objet » en relation avec le métier qui est préparé.
Cela constitue certainement l'une des avancées pédagogiques les plus importantes réalisées dans l'enseignement secondaire au cours des dix dernières années puisqu'elle a été mise en place à partir de l'année 2000 et que, progressivement, un nombre croissant d'enseignants ont perfectionné cette technique qui est passée dans d'autres secteurs d'enseignement depuis.
Ces projets pluridisciplinaires à caractère professionnel bénéficient d'un volume d'heures qui leur sont accordées, soit pour les classes de terminales de BEP, soit pour les classes de terminales de baccalauréat professionnel.
Il avait été convenu qu'un volant d'heures serait également libéré pour que les enseignants puissent les préparer, car il est d'extrêmement délicat de les mettre au point.
Avec cette méthode, sur le plan philosophique, pour ceux qui sont intéressés par les sciences de l'éducation, il est admirable de voir comment on peut tirer du concret, de la coutume parfois même, un processus intellectuel qui conduit jusqu'à la règle générale et universelle.
L'on voit bien tout l'intérêt que cela représente pour la pédagogie inductive, qui est pratiquée dans l'enseignement professionnel, au lieu de la pédagogie hypothéticodéductive, qui, elle, est appliquée dans l'enseignement général.
Car, pour faire simple, dans l'enseignement professionnel on part du concret pour aller à l'abstrait alors que dans l'enseignement général on part de l'abstrait et on y reste. (Sourires. - Mme Dominique Voynet applaudit.) C'est une façon de faire qui convient à certains mais pas à d'autres.
Cela étant, la méthode inductive a la faveur des matérialistes, dans la mesure où elle renvoie à la tradition des Lumières.
M. Ivan Renar. S'agit-il du matérialisme dialectique ou du matérialisme historique ? (Sourires.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Le matérialisme dialectique est en général plus pauvre que le matérialisme historique ! Mais, si vous le voulez, cher collègue, je peux déposer un amendement tendant à promouvoir l'enseignement du matérialisme en classe de philosophie dans de meilleures conditions... (Nouveaux sourires.)
En ce qui concerne les PPCP, il est arrivé que, avec beaucoup de désinvolture, un certain nombre d'ignorants considèrent que, de toute façon, tout contact avec la réalité est un abaissement de l'esprit. Ceux-là n'ont jamais examiné de près un PPCP ! (Rires.)
Par ailleurs, d'autres ont jugé que les PPCP ne présentent aucun intérêt, puisqu'ils ne concernent que les lycéens de l'enseignement professionnel.
Nous avons donc rencontré, au fil de l'histoire récente, deux sortes d'ennemis de cette technique pédagogique. Je souhaiterais que l'on remette les choses en ordre une bonne fois pour toutes, en inscrivant dans la loi les PPCP. Permettez-moi de vous dire, mes chers collègues, que cette question revêt une tout autre dimension que celle de la note de comportement, qui a pourtant donné lieu tout à l'heure à un interminable débat, certes fondateur et tout à fait passionnant, comme en témoigne la mobilisation intellectuelle à laquelle nous avons assisté à ce sujet dans cet hémicycle !
Vraiment, mes chers collègues, en adoptant cet amendement, vous ferez oeuvre utile, d'abord parce que vous reconnaîtrez ainsi la valeur novatrice de l'initiative des enseignants qui ont mis au point la technique pédagogique du PPCP. Ensuite parce que vous rendrez hommage aux élèves qui ont bénéficié de celle-ci et que vous montrerez que vous vous intéressez au développement de la pédagogique en tant qu'art vivant et non pas en tant que forme figée à tout jamais. Enfin parce que vous encouragerez ceux qui continuent à défendre et à faire vivre les PPCP.
Je suis bien sûr à votre disposition pour vous donner des explications complémentaires, car je suis passionné par ce sujet (Sourires), étant probablement le seul en France qui continue à recevoir des maquettes de PPCP et à les étudier ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. J'ai écouté avec beaucoup d'attention et d'intérêt les remarquables explications qu'a données notre collègue sur les PPCP. Cependant, la disposition présentée relève du règlement, et non de la loi. Par conséquent, je demanderai à M. Mélenchon de bien vouloir retirer son amendement ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement partage l'avis de la commission.
L'article 16 permettra, après des consultations, de faire évoluer les modalités de délivrance des diplômes, conformément aux engagements que j'ai pris publiquement. Les modalités évoquées sont d'ailleurs déjà appliquées pour la délivrance de certains diplômes, notamment professionnels. Les PPCP présentent certainement de nombreux aspects enthousiasmants, mais il n'est nul besoin de leur consacrer un article dans la loi.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Todeschini. Je n'aurai certainement pas le brio de mon ami Jean-Luc Mélenchon, mais je tiens à apporter mon soutien à cet amendement, qui vise à reconnaître et à pérenniser les TPE et les PPCP, dispositifs pédagogiques innovants dont l'efficacité a été largement démontrée depuis plusieurs années.
Il me paraît nécessaire de rappeler que ces dispositifs privilégient le travail en équipe et l'investissement de l'élève dans un projet faisant appel à plusieurs disciplines d'enseignement. Leur mise en oeuvre doit permettre de couvrir une partie des programmes nationaux dans ces disciplines, et non constituer un simple supplément.
Les résultats doivent être pris en compte pour la délivrance des diplômes auxquels conduisent les classes concernées, s'agissant notamment du baccalauréat, comme cela a déjà été expérimenté avec succès.
Il est très important, pour la réussite de ces projets, qu'un volume horaire leur soit clairement consacré dans les classes de première et de terminale des sections générales et technologiques et dans les classes de terminale BEP et de terminale professionnelle des lycées professionnels.
Dans l'enseignement professionnel, des volumes horaires globaux ont d'ailleurs été spécifiquement prévus pour les PPCP dans les grilles horaires, dès la rentrée de 2000, avec de 100 heures à 125 heures en terminale de BEP et de 150 heures à 180 heures en classe de terminale professionnelle, 10 % de cet horaire étant mis à la disposition de l'équipe pédagogique pour mener la phase de concertation, indispensable à la réussite d'un projet pluridisciplinaire.
Pour appuyer cette demande de reconnaissance des TPE et des PPCP, je tiens à insister sur le fait qu'il ne s'agit nullement là de gadgets éducatifs ou de suppléments récréatifs, mais bien d'une diversification des méthodes d'apprentissage des savoirs et des savoir-faire inscrits aux programmes.
Cette diversification des méthodes est prometteuse, car elle peut permettre à certains élèves en difficulté de renouer avec la réussite scolaire. Dans l'enseignement professionnel, les PPCP ont été conçus comme une partie intégrante du processus d'acquisition des qualifications, et consistent donc en la réalisation d'un objectif de production ou d'une séquence de services.
Pour que l'élève comprenne bien comment les différentes disciplines contribuent à sa qualification, les horaires consacrés aux PPCP sont répartis par moitiés entre les enseignements généraux et les enseignements pratiques. Le résultat est souvent remarquable pour les élèves, notamment en termes d'acquisition de méthodes de travail et de recherche, d'apprentissage du travail en équipe et de développement de la créativité.
Pour toutes ces raisons, ces dispositifs pédagogiques doivent aujourd'hui être pérennisés par la loi.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Je voudrais dire à mon tour tout le bien que je pense des projets pluridisciplinaires à caractère professionnel et indiquer que nous voterons en faveur de l'adoption de cet amendement qui tend à insérer, après l'article L. 333-1 du code de l'éducation, un article dont je rappelle les termes :
« Afin de faciliter l'acquisition des connaissances et de rendre plus concrètes les qualifications préparées, des travaux personnels encadrés et des projets pluridisciplinaires à caractère professionnel sont proposés respectivement aux élèves de lycée d'enseignement général et technologique et aux élèves de lycée professionnel. »
Je ne redéfinirai pas, à la suite de MM. Mélenchon et Todeschini, ce que sont les PPCP. Cela étant, en tant que rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles pour l'enseignement technologique et professionnel, j'ai chaque année l'occasion, lors du débat budgétaire, de rappeler combien ces PPCP sont importants dans nos lycées professionnels.
Je voudrais maintenant évoquer un PPCP qui m'a été présenté. Dans mon beau département de l'Isère - il n'y a pas ici que des sénateurs de la région parisienne, il y a aussi des provinciaux ! -, j'ai rencontré des jeunes filles élèves d'un lycée professionnel et se destinant à travailler dans le secteur du textile.
Ces jeunes filles et leurs professeurs m'ont exposé leur projet pluridisciplinaire à caractère professionnel, qui a constitué une belle réussite, notamment pour certaines d'entre elles qui se trouvaient quelque peu en difficulté dans l'apprentissage de la lecture, de l'écriture ou des mathématiques et guère motivées pour travailler ces fameux fondamentaux, si importants pour l'ensemble de notre jeunesse.
Grâce à l'implication de leurs professeurs de français, de mathématiques et d'arts plastiques, elles ont pu, à l'issue de l'année scolaire, réaliser un superbe défilé de mode présentant de très beaux vêtements pour filles et garçons qu'elles avaient elles-mêmes confectionnés. De nombreuses personnalités politiques et du monde éducatif avaient été conviées.
Je crois donc vraiment important, pour l'ensemble de nos jeunes, filles et garçons, qu'ils étudient dans les lycées professionnels ou, s'agissant des TPE, dans les lycées d'enseignement général et technologique, que l'on maintienne et que l'on renforce les moyens accordés à ce type d'enseignement, qui représente vraiment une voie menant à la réussite, y compris d'ailleurs dans ces disciplines fondamentales auxquelles nous sommes bien évidemment très attachés.
Je tenais à vous faire part, mes chers collègues, de cette expérience très positive des PPCP. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je voudrais tenter d'infléchir quelque peu la position qu'ont adoptée M. le ministre et M. le rapporteur.
Tout d'abord, que l'on ne me dise pas que l'on ne peut pas inscrire dans la loi une disposition relative aux PPCP, alors que l'on a discouru pendant plus d'une heure sur la note de comportement ! (Mmes Annie David et Dominique Voynet applaudissent.)
Du point de vue du niveau intellectuel et du contenu des savoirs transmis, il n'y a tout de même pas photo, pour parler familièrement.
Par ailleurs, je ne disconviens pas que cette matière relève du domaine réglementaire, mais ce n'est pas moi qui ai choisi d'organiser ce débat. Puisqu'il est engagé, autant le consacrer à des sujets qui, me semble-t-il, en valent la peine. D'autant que la question n'est pas si facile à régler, monsieur le ministre !
Je voudrais d'ailleurs évoquer maintenant un autre exemple d'enseignement transversal organisé : les classes à projet artistique et culturel, qui articulaient l'intervention de plusieurs disciplines autour d'un thème culturel.
Plus de 6 000 classes de ce type avaient été créées sous le gouvernement Jospin, dont la moitié dans des établissements d'enseignement professionnel. Or toutes ont été supprimées par le premier budget qui a suivi cette création ! Quelques contractions budgétaires peuvent donc suffire à provoquer la disparition subite du champ pédagogique de tout un travail.
Par conséquent, mon amendement vise à mettre les PPCP à l'abri de ce genre d'aléa. J'y insiste, monsieur le ministre, car chacun d'entre nous est souvent porté à ne considérer que l'horizon immédiat qui le concerne. Pensons dans la durée, nous avons intérêt à protéger cette forme d'enseignement.
Puisque, si ma montre ne me trompe pas, il me reste deux petites minutes de temps de parole (M. le rapporteur rit), je décrirai un autre exemple de PPCP. Je suis sûr qu'il va vous intéresser, mes chers collègues !
Un jour, les enseignants de lycée professionnel de Martinique ont découvert que l'on ne fabriquait plus un bateau traditionnel que l'on appelle le gommier. Pour trouver quelqu'un qui sache construire de tels bateaux, il a été nécessaire de se rendre dans une île voisine, qui est, fort malheureusement pour elle, anglophone. (Sourires.)
Le travail des élèves a donc commencé par la réalisation d'un reportage, ce qui leur a permis de se former à l'expression écrite, ainsi que de pratiquer l'anglais. (Murmures sur les travées de l'UMP.) C'est très intéressant, chers collègues !
Ensuite, il a fallu déterminer quelles espèces d'arbres permettaient de construire les balanciers les plus résistants, la coutume se révélant moins efficace que l'évaluation scientifique de la résistance des matériaux.
Il a encore fallu calculer la courbure de la carène, puis la largeur des étraves, pour finalement réaliser le gommier le plus performant possible.
Voilà ce qu'est un PPCP : le croisement de plusieurs enseignements débouche sur une réalisation concrète et permet l'élévation. N'est-ce pas là l'illustration parfaite de ce qu'écrivait Diderot dans l'Encyclopédie à propos de la différence entre les arts mécaniques et les arts libéraux ?
J'estime qu'un tel effort et une telle réussite méritent que le Sénat s'y intéresse, au moins autant qu'à la note de conduite, qui nous a passionnés pendant plusieurs heures !...
M. Roger Karoutchi. Nous sommes d'accord !
M. Jean-Luc Mélenchon. Je vois que vous êtes quelque peu distraits, chers collègues !
Plusieurs sénateurs de l'UMP. Pas du tout !
M. Jean-Luc Mélenchon. En tout cas, je vous ai sentis légèrement goguenards ! (Protestations sur les travées de l'UMP.) Je ne voudrais pourtant pas que les enseignants qui ont consacré beaucoup de leur énergie à la réussite des PPCP puissent penser que la représentation nationale s'en désintéresse.
Peut-être M. le ministre, m'ayant écouté, se dira que, après tout, il est possible que j'aie raison, et voudra protéger les PPCP en inscrivant leur existence dans la loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Je ne voterai pas en faveur de l'adoption de l'amendement de M. Mélenchon, pour une raison très simple : le choix a été fait, au travers de l'article 19 du projet de loi, de mettre en place le projet d'établissement.
Or qu'est-ce qu'un projet d'établissement, sinon la résultante de la volonté commune du chef d'établissement et des enseignants d'inventer ou d'adapter des procédures pédagogiques qui leur paraissent correspondre aux finalités des enseignements, à la personnalité des élèves et, ajouterai-je, au talent des professeurs ?
Dans ces conditions, pourquoi diable imposerait-on, par cet amendement, ce que les dispositions de l'article 19 donneront la liberté de mettre en oeuvre ? Les PPCP continueront d'exister, puisqu'ils sont pertinents, mais ils trouveront leur place dans les projets d'établissement.
M. Jean-Luc Mélenchon. Le ministre ne peut pas être d'accord avec vous !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 302.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 131 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 125 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est bien dommage !
M. le président. L'amendement n° 297, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 334-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... ° La prise en compte des travaux personnels encadrés »
La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Il s'agit d'insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 334-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ... La prise en compte des travaux personnels encadrés ».
Cet amendement tend à compléter le code de l'éducation, qui fixe les contrôles opérés par le baccalauréat.
Pour contrer la volonté du ministre de supprimer les TPE, nous souhaitons, pour notre part, les faire figurer au titre des contrôles effectués lors de cet examen.
Mis en place en 1999 à titre expérimental par le gouvernement Jospin, les TPE permettent aux élèves de mener à bien de vrais projets d'équipe pluridisciplinaires. Ils constituent une excellente initiation aux exigences de l'enseignement supérieur et, au-delà, de la vie professionnelle.
L'incontestable réussite des TPE leur ayant fait gagner leurs lettres de noblesse, nous souhaitons les inscrire dans le code de l'éducation, en tant que formation sanctionnée par le baccalauréat.
Vous le constatez, monsieur le ministre, notre volonté va véritablement à l'encontre de la vôtre. Vous avez décidé de supprimer les TPE. Pour notre part, nous souhaitons, au contraire, pérenniser leur prise en compte dans le cadre de la formation des jeunes pour le baccalauréat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement introduit une précision qui relève, à mon sens, non de la loi, mais du domaine réglementaire.
Toutefois, peut-être M. le ministre nous confirmera-t-il les propos qu'il a tenus devant la commission et aux termes desquels les résultats des TPE maintenus en classe de première pourront être pris en compte en épreuve anticipée pour le baccalauréat.
Sous réserve des explications qu'apportera M. le ministre sur ce point, je demande aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. D'abord, je note une légère contradiction. Le groupe socialiste me permettra de relever qu'après avoir voulu supprimer toute référence au contrôle continu s'agissant du baccalauréat, il s'empresse, naturellement, de proposer l'introduction d'une épreuve en contrôle continu, en l'occurrence les TPE.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. C'est vrai !
M. François Fillon, ministre. Ensuite, il faut revenir, d'une part, sur ma décision de suppression des TPE en terminale, tout en les maintenant en première, et, d'autre part, sur ma proposition de prendre en compte au baccalauréat l'évaluation des TPE pratiqués en première.
Il y a une grande cohérence dans cette proposition. En effet, les TPE ne sont pas destinés pour l'essentiel à apporter, des points au baccalauréat. Nous avons assisté à un certain détournement de leur finalité initiale. Aujourd'hui, ils sont insuffisamment mis en oeuvre en première. Or, le fait que cette classe ne soit pas sanctionnée par le baccalauréat laisse une certaine latitude dans l'organisation des emplois du temps, notamment pour dégager des plages consacrées à ce travail pluridisciplinaire.
Pourtant, les TPE interviennent essentiellement en terminale, où l'objectif relève, non de la pédagogie, mais de la préparation de l'épreuve du baccalauréat, ce qui demande à nombre d'élèves un investissement important en temps, au détriment des disciplines fondamentales enseignées.
Non seulement je souhaite que l'on renforce la place des TPE en première, mais je proposerai que l'évaluation du travail effectué dans ce cadre puisse être sanctionnée par une note qui comptera pour le baccalauréat, à l'instar, par exemple, de l'épreuve de français passée en première.
Mais tout cela n'est bien sûr pas d'ordre législatif. C'est la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote.
M. Yannick Bodin. Monsieur le ministre, des exemples de TPE, nous pourrions en citer des milliers. Il est même arrivé que certaines collectivités territoriales, comme le conseil régional d'Ile-de-France, pour ne pas le citer (Exclamations sur plusieurs travées de l'UMP), participent au financement de « projets lycées », qui sont des travaux personnels encadrés.
Vous dites que ces travaux, en quelque sorte superflus, s'effectuent au détriment des disciplines fondamentales. Or, à travers un exemple, je vais vous démontrer le contraire.
Je commencerai par la méthode. Dans la mesure où les TPE sont pluridisciplinaires, ils donnent l'occasion à des professeurs qui n'ont parfois jamais travaillé ensemble de se rencontrer pour préparer en commun un projet, en collaboration avec leurs élèves qui se rejoignent et qui sont parfois issus de classes différentes.
Prenez le thème de la shoah, qui revient assez souvent, et c'est heureux, dans nos lycées, notamment franciliens. Nombre de lycées et de collectivités territoriales s'impliquent pour entretenir le devoir de mémoire.
Quand, dans le cadre d'un TPE, on propose à des élèves de terminale un voyage à Auschwitz, en leur précisant qu'il leur faudra le préparer et en tirer au retour tous les enseignements, ne me dites pas qu'on ne fait pas de l'histoire dans ce qu'elle a de plus essentiel ! Ne me dites pas qu'on ne fait pas de la littérature, de la géographie ou de la philosophie ! De plus, c'est souvent l'occasion de pratiquer le dessin, la peinture ou la photographie, pour faire des expositions, pour illustrer des témoignages de tout ce que les élèves ont vu au cours de leur déplacement.
Cet exemple montre que tout le monde peut travailler ensemble, et sur un sujet important dans la formation des jeunes et véritablement interdisciplinaire puisqu'il couvre toutes les disciplines. N'est-ce pas là l'une des meilleures manières de préparer le baccalauréat ?
Il nous paraît tout à fait normal que ce travail soit pris en compte pour le baccalauréat. Et comme, de surcroît, la méthode de travail impose aux élèves de faire eux aussi, parfois, des démarches de caractère personnel, n'est-ce pas aussi une meilleure façon de les préparer à l'enseignement supérieur ?
Sanctionner les TPE comme vous le faites, c'est une erreur sur tous les plans, sur le plan pédagogique, certes, mais peut-être surtout sur le plan éducatif.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je voudrais relever à cet instant que, quand il est question de TPE, nous avons droit à des réponses argumentées et documentées. Or, lorsqu'il s'agit de PPCP, il en va tout autrement. Est-ce une différence de classe ? Et je suis d'autant moins porté à en sourire que ce n'est pas la première fois que j'y suis confronté !
Je suis désolé de vous le dire, monsieur Longuet, mais, à mon avis, la manière dont la pédagogie est pratiquée dans les établissements ne peut pas être abandonnée à la seule libre appréciation de ces derniers. En tout cas, ce n'est pas du tout l'idée que je m'en fais.
Je me souviens, monsieur le ministre, que, pour commencer à faire appliquer les PPCP, par exemple, il a fallu que toute l'administration de l'éducation nationale prenne un engagement extrêmement vigoureux.
Pourquoi ? Parce que, contrairement à ce que croient les esprits superficiels, la pluridisciplinarité ne se réduit pas à empiler, comme dans un mille-feuilles, des disciplines les unes par-dessus les autres. C'est une technique qui nécessite un investissement, du travail, des comparaisons de caractère scientifique.
Ainsi, dans le cadre des sciences de l'éducation, à l'ENC de Cachan, par exemple, j'ai vu étudier les questions de ces croisements pluridisciplinaires, notamment pour les techniques de l'architecture et pour mettre au point des plans à plusieurs intervenants. Tout cela, c'est beaucoup de travail, et du travail de très haut niveau intellectuel.
C'est la raison pour laquelle, moi, je ne serai pas d'avis d'abandonner purement et simplement la pratique pédagogique dans l'établissement au bon vouloir des intéressés.
Non ! l'école ne s'appartient pas, elle appartient à la nation, qui donne ses consignes, et qui doit être servie et obéie. Si nous avions procédé autrement, eh bien, pour le coup, je crois qu'on aurait aujourd'hui un enseignement à géométrie variable.
Je ne vois pas pourquoi le bénéfice des PPCP serait réservé à certains endroits, alors que d'autres en seraient exclus. Dans la mesure où, comme l'a dit tout à l'heure Yannick Bodin à propos des TPE, ces techniques ont gagné leurs lettres de noblesse, il faut en faire bénéficier tout un chacun.
Je sais que nous sommes en minorité dans cette assemblée, mais je vous mets quand même en garde contre des déclarations de cette nature. Elles peuvent donner à croire des choses qui ne sont pas et qui, si elles étaient, seraient inacceptables. Je suis donc obligé de constater la différence de traitement et de considération suivant les voies d'enseignement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 297.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 132 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 126 |
Contre | 201 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 303, présenté par MM. Mélenchon, Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l'article L. 335-1, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Un label de « Lycée des métiers » peut être délivré par l'Etat aux établissements d'enseignement qui remplissent des critères définis par un cahier des charges national. Ces établissements comportent notamment des formations technologiques et professionnelles dont l'identité est construite autour d'un ensemble cohérent de métiers. Les enseignements y sont dispensés en formation initiale sous statut scolaire, en apprentissage et en formation continue. Ils préparent une gamme étendue de diplômes et titres nationaux allant du CAP aux diplômes d'enseignement supérieur. Ces établissements offrent également des services de validation des acquis de l'expérience.
« Les autres caractéristiques de ce cahier des charges, ainsi que la procédure et la durée de délivrance du label de « Lycée des métiers » sont définies par décret. La liste des établissements ayant obtenu le label est régulièrement publiée par arrêté du ministre chargé de l'Education nationale. »
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le président, nous demandons une suspension de séance de cinq minutes. Nous devons faire le point avec M. Lagauche, qui est le vice-président socialiste de la commission des affaires culturelles. Il était en déplacement, et il vient de rentrer.
M. le président. Mon cher collègue, nous allons d'abord examiner l'amendement n° 303. Nous examinerons ensuite votre demande.
Vous avez la parole, monsieur Mélenchon, pour présenter l'amendement n° 303.
M. Jean-Luc Mélenchon. Cet amendement vise la façon dont sera délivré le label « lycée des métiers ».
Il faut d'abord expliquer ce qu'est un lycée des métiers, ce qui permettra, par la même occasion, de savoir ce qu'il n'est pas et de régler leurs comptes à certaines mises en oeuvre actuelles et à quelques fantasmes exprimés dans le passé.
Un établissement à qui ce label est attribué enseigne un ensemble cohérent de métiers. Je ne parle pas pour le moment de la façon dont cette cohérence est évaluée, c'est un autre sujet.
A l'intérieur de cet ensemble de métiers, tous les niveaux de formation, du CAP jusqu'au BTS, sont représentés. Le premier résultat obtenu est une lisibilité du parcours des apprentissages d'un métier. En outre, les enseignements rassemblés sont dispensés en formation initiale sous statut scolaire, mais également dans les CFA publics, les centres de formation continue et les centres de validation des acquis de l'expérience. Pour chacune de ces catégories, on pourrait faire la démonstration de l'intérêt d'appartenir à un ensemble cohérent de « lycée des métiers du ... ».
Pourquoi vouloir faire attribuer le label par l'Etat ?
Il existe au moins une raison : la carte des formations, qui est essentielle, est une compétence partagée par l'Etat et les régions. Ces dernières ont un pouvoir considérable d'évaluation. Pourquoi pas ! Mais l'Etat ne doit pas simplement servir de témoin des décisions qui sont prises ou de caisse enregistreuse. Il doit être partenaire. C'est en effet lui le dépositaire de l'intérêt national. Or, dans une carte de formation, l'intérêt national joue pleinement.
Par conséquent, si c'est l'Etat qui labellise, il entretient une relation contractuelle plus forte avec les régions. Le dialogue est alors beaucoup plus riche. La preuve en a été donnée bien des fois.
Pour cela, il faut naturellement que la règle du jeu soit respectée, c'est-à-dire que le lycée des métiers ne serve pas de prétexte à la fermeture d'établissements - parce qu'il n'y aurait pas de cohérence autour d'un métier - ou pour faire des lycées des métiers au rabais.
Il est donc extrêmement important que le label soit établi, qu'il donne lieu à une norme et que celle-ci soit publiée. La liste des établissements ayant obtenu le label « lycée des métiers » doit également être publiée chaque année afin de pouvoir juger de la façon dont celui-ci aura été accordé. C'est à ce prix que l'on aura une véritable gestion démocratique des cartes de formation.
C'est fondamental si l'on ne veut pas que ce label soit galvaudé ou qu'il devienne le prétexte, je le répète, à la liquidation d'établissements ou à une mystification en appelant « lycée des métiers » n'importe quel établissement.
Je fais remarquer qu'il y a deux ou trois ans, et jusqu'à l'année dernière encore, on publiait la liste des lycées des métiers. On ne le fait plus. De surcroît, la circulaire qui établissait ces normes est devenue beaucoup plus « légère » en exigence qualitative.
Je vais prendre un exemple : pour obtenir le label « lycée des métiers », doit-on inclure l'internat dans les normes ?
Si la réponse est oui, les régions se sentiront alors obligées de construire l'internat. En revanche, si l'Etat déclare par avance qu'il ne s'occupera plus de cette question et que les régions pourront faire ce qu'elles veulent, il est certain que l'on abaissera progressivement le niveau d'exigence. Or, nous nous prononçons pour que le niveau d'exigence soit extrêmement élevé.
En faisant figurer le label dans la loi, on lui donnera toute sa force, toute sa valeur. Du coup, l'exigence démocratique du contrôle de la liste, des normes et des conditions dans lesquelles ce label sera attribué fera partie de la capacité de l'Etat et de la représentation nationale à mesurer le travail accompli.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission souscrit pleinement au principe que vient de défendre M. Mélenchon par cet amendement qui rappelle l'intérêt du lycée des métiers, label qu'il a d'ailleurs créé quand il était ministre délégué à l'enseignement professionnel. Toutefois, ces dispositions existent déjà.
Cela étant, compte tenu de ce que je viens de dire, et sous réserve de l'avis du Gouvernement, la commission s'en remet à la sagesse positive de notre assemblée.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Je ne savais pas que le Sénat pouvait avoir une sagesse « négative ». (Sourires.)
Pour ma part, je suis tout à fait favorable au développement des lycées des métiers. C'est une excellente initiative qu'avait prise M. Jean-Luc Mélenchon. D'ailleurs, elle se poursuit : de nouveaux lycées des métiers ont été créés. Si l'amendement n° 303 peut renforcer et relancer cette politique, je suis prêt, non seulement à m'en remettre à la sagesse du Sénat, mais également à soutenir cette proposition. Nous verrons comment les régions recevront ces propositions. Je note en effet, ici ou là, quelques réticences et quelques résistances.
Quoi qu'il en soit, le Gouvernement est favorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Todeschini. Le débat avance et je suis satisfait de la position de M. le rapporteur et, surtout, de celle de M. le ministre.
Je rappelle que cet amendement permettra de formaliser l'existence des lycées des métiers - dont la labellisation a été entamée par le ministère de l'éducation nationale en 2001 - dans le cadre du développement d'un large service public d'accès aux qualifications, tel qu'il a été défini par la loi d'orientation de 1989. Faute d'être soutenue, la démarche relative au lycée des métiers aurait été abandonnée. Nous nous félicitons donc de l'orientation qui est prise.
En s'organisant autour d'un ensemble cohérent de métiers, le lycée des métiers permet de renforcer la complémentarité entre les voies technologiques et professionnelles. Il permet notamment de réunir autour d'un plateau technique unique les filières technologiques et professionnelles partageant en commun un même champ d'activité.
Autre intérêt majeur, il peut permettre de réunir dans un même établissement des lycéens, des étudiants - en BTS, voire en licence professionnelle comme cela existe dans certains lycées des métiers -, des apprentis, des jeunes et des adultes sous contrat de formation par alternance, des salariés en formation continue ou encore des adultes souhaitant faire valider les acquis de leur expérience. Ce brassage de public ne peut qu'enrichir les pratiques pédagogiques et accroître la motivation et l'ouverture des jeunes.
En organisant un nouveau modèle éducatif, global et cohérent, enchaînant formation initiale, formation continue et validation des acquis professionnels, le lycée des métiers soutient ainsi l'éducation et la formation tout au long de la vie. Il est donc l'instrument par excellence de l'engagement du service public pour mettre ce droit à la portée des jeunes et des travailleurs.
L'existence d'un label national reposant sur les critères exigeants d'un cahier des charges permettra de valoriser l'appellation de « lycée des métiers » et de soutenir ainsi plus largement le développement de la voie éducative des métiers et la professionnalisation durable des jeunes. D'ailleurs, les lycées des métiers existent déjà dans le paysage des établissements, mais ils ne sont pas toujours mis en avant et valorisés par une démarche de qualité.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Cet amendement nous semble intéressant. Toutefois, j'ai entendu M. le ministre dire que les régions n'allaient pas forcément apprécier le fait que l'Etat décide d'attribuer ou non un label à certains lycées.
Si l'Etat décide qu'un lycée reçoit le label « lycée des métiers », puisqu'il est écrit que le label « peut être délivré par l'Etat », celui-ci ne pourra pas se dédouaner ensuite d'aider la région afin que le lycée puisse véritablement porter son label « lycée des métiers ».
M. Roger Karoutchi. Ça ne veut rien dire !
Mme Annie David. Cet amendement va dans le sens d'un développement des lycées des métiers. Il donnera, là encore, un coup de pouce aux établissements, notamment aux lycées professionnels.
Nous sommes bien sûr très attachés à ces lycées et à l'enseignement professionnel. Nous soutiendrons donc cet amendement, en espérant que l'Etat, s'il décide de délivrer un label, mettra « la main à la poche » et ne se défaussera pas, comme il le fait dans beaucoup domaines, sur les régions.
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Mélenchon. D'abord, le philosophe voudrait répondre à une question que se posait le ministre.
Que peut être une sagesse négative ? C'est, par exemple, de voter non quand on désapprouve un projet de loi.
Je veux aussi remercier le ministre de ce qu'il a bien voulu dire sur les lycées des métiers. Prenant très au sérieux le débat qui nous occupe en cet instant, je voudrais éclairer un point à son sujet.
Le consensus auquel nous sommes parvenus n'éteint pas la discussion contradictoire mais, au contraire, il la rend possible.
En effet, si le label est inscrit dans la loi et si, à l'avenir, sont publiés la liste des établissements ainsi que le contenu des normes que l'Etat exige pour délivrer le label « lycée des métiers », nous rendons la discussion possible. Nous pourrons, par exemple, manifester notre désaccord sur les normes, dire que celles-ci sont trop laxistes et celles-là trop exigeantes. Le débat public pourra enfin avoir lieu.
En ce moment, vous le voyez, beaucoup d'intervenants sont assez désinvoltes à l'égard de l'enseignement professionnel. Ils le considèrent comme un monde exotique. Ils oublient que l'enseignement professionnel et technologique ainsi que l'apprentissage représentent la moitié de chaque classe d'âge scolarisée dans l'enseignement secondaire.
Nous devons donner de la transparence au débat sur l'enseignement professionnel, ce qui signifie en réalité que le débat doit pouvoir avoir lieu. C'est pourquoi il faut à la fois saluer le consensus que nous allons vivre, si nous votons tous cet amendement. Mais nous devons aussi lui donner toute sa signification pour ceux qui s'intéresseront à notre débat : nous n'avons pas voulu sceller définitivement je ne sais quelle définition du lycée des métiers mais rendre possible le débat à son sujet.
J'ajoute que nous faisons oeuvre utile. Vous avez rappelé, monsieur le ministre, que, contrairement au rapport Thélot, qui, lui, passait à côté de cette question, l'objectif de 80 % de chaque classe d'âge au baccalauréat était également le vôtre. J'en prends acte. Cette décision est très importante compte tenu des pressions qui s'exercent de tous côtés pour que l'on renonce à cet objectif.
Je tiens à redire dans cet hémicycle que l'objectif de 80 % de chaque classe d'âge au baccalauréat ne pourra être atteint que si le nombre de bacheliers professionnels augmente, car, dans la voie générale, nous sommes déjà presque au plafond, tandis que dans l'enseignement technologique et dans l'enseignement professionnel - singulièrement dans l'enseignement professionnel -, 50 % des élèves s'arrêtent au BEP.
Par conséquent, tout ce que nous sommes en train de faire pour augmenter la fluidité des parcours et pour donner aux élèves le goût d'apprendre et d'étudier, nous rapproche de l'objectif des 80 %, qui, s'il est atteint, situera la France en tête des pays pour ce qui est des performances éducatives. C'est l'objectif du lycée des métiers.
Vous savez comme moi qu'un élève de l'enseignement professionnel qui prépare son BEP verra, si son établissement prépare au baccalauréat professionnel, ce diplôme comme la marche la plus élevée. Mais si son établissement prépare aussi au BTS, alors il voit quel peut être son parcours d'excellence et le baccalauréat professionnel deviendra son premier objectif, alors qu'il se serait sinon contenté d'un BEP. Il sait surtout que ensuite il y a le BTS, les formations du supérieur
En somme, nous essayons d'inventer une machine à perfectionner les jeunes Français, à les hisser vers leur niveau d'excellence.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 18.
M. le président. Nous profiterons du changement de chapitre avant l'article 19.
M. Jean-Marc Todeschini. Soit !
M. le président. L'amendement n° 304, présenté par MM. Mélenchon, Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 18, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 335-3 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Tous les titulaires du brevet d'études professionnelles doivent être en mesure d'accéder au niveau du baccalauréat professionnel.
« Les titulaires des baccalauréats professionnels et technologiques qui en ont la volonté et la capacité sont accueillis prioritairement dans les sections de techniciens supérieurs et les instituts universitaires de technologie. »
La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Cet amendement s'inscrit dans le même ordre de préoccupation que le précédent. Il s'agit d'améliorer la fluidité de la voie technologique et - essentiellement - de la voie professionnelle.
Je n'approuve pas la définition du baccalauréat professionnel dans la rédaction actuelle du rapport annexé.
Le livret prévoit le baccalauréat général, le baccalauréat technologique et le baccalauréat professionnel.
Après le baccalauréat général, tous les élèves doivent aller dans l'enseignement supérieur : c'est écrit.
Le baccalauréat technologique prépare ceux qui souhaitent à aller dans l'enseignement supérieur technologique, alors que nous savons tous que les élèves ne passent pas de l'un à l'autre, et notamment de la voie technologique aux IUT.
Le baccalauréat professionnel aurait, lui, vocation à faire entrer les jeunes directement dans la vie active.
Je ne suis pas d'accord avec cette idée : le baccalauréat professionnel doit être une qualification acquise après laquelle le cursus peut se poursuivre naturellement.
Mon souhait, et celui de mes amis socialistes, serait qu'à chaque palier d'études corresponde une qualification reconnue. En effet, ces dernières sont reconnues dans les conventions collectives : une qualification égale un niveau de salaire et une certaine reconnaissance sociale.
Vous le savez bien : le bac professionnel représente une certaine élite dans le monde des élèves des filières professionnelles. Ce sont les meilleurs qui le préparent et leur niveau vaut largement celui d'autres bacheliers, je vous prie de le croire, y compris dans les matières générales, par leur capacité à comprendre, à abstraire et à théoriser.
Nous devons donner à ces bacheliers professionnels la possibilité, s'ils le souhaitent, de passer dans le supérieur.
Cependant, pour que cela se fasse, deux conditions doivent être réunies.
D'abord, il faut une période de transition. Dans le passé, on m'a objecté que si on ouvrait des classes préparatoires après les baccalauréats professionnels, il faudrait alors en ouvrir pour toutes les autres filières, et notamment pour l'enseignement général. C'était l'argument de l'égalité utilisé dans le sens contraire : comme on ne peut pas ouvrir ces classes pour tout le monde, on ne les ouvre pour personne, et que chacun se débrouille !
Ensuite, nous tenons compte de la réalité sociale. Dans la réalité, de telles classes existent. Elles ont été ouvertes par certains établissements, sans rien demander à personne, avec l'accord du recteur. Il y en à Paris. Je sais qu'il y en a ailleurs. Par exemple, au lycée de l'Estaque, au nord de Marseille. Une vingtaine de jeunes extraordinairement motivés y sont scolarisés : ils font trois, quatre voire cinq heures de route, chaque jour, dans un sens et dans l'autre, pour suivre les études qui leur permettront d'atteindre le niveau nécessaire pour tenter le BTS ou entrer en IUT. Ces jeunes n'ont cependant aucun statut : il ne sont ni lycéens ni étudiants et, partant, n'ont droit à aucune bourse ni aide d'aucune sorte.
Une manière de faciliter la fluidité est de mettre en place les moyens pour permettre cette transition. Il faut accepter de dire que cela s'appliquera à une voie d'enseignement particulière, et pas aux deux autres, car c'est là que se situent les plus grands besoins.
C'était l'argument humain et pédagogique.
Je suis à présent obligé de faire valoir un argument économique. Si nous ne prenons pas les moyens qui s'imposent pour disposer dans notre pays, en formant les jeunes, d'ouvriers hautement qualifiés, d'ingénieurs, de techniciens dont notre économie a besoin, nous allons vers un bug démographique total.
Au cours des dix prochaines années, nous devons parvenir, même avec un taux de croissance extrêmement faible - disons 1,5 % à 2 % - à mettre huit millions de personnes au travail pour remplacer les partants et pourvoir les nouveaux postes de travail. Il en sort 700 000 de nos établissements scolaires par an ! Ce qui signifie que, du fait de la déperdition, nous allons tout droit au bug. On peut penser que les besoins seront en partie satisfaits par une élévation du niveau de mécanisation de notre économie, de nos services et de notre industrie productive. Tant mieux : cela nous poussera vers le haut. Ceux qui seront disponibles pour l'économie devront néanmoins être au plus haut niveau technique, scientifique et culturel. C'est la raison pour laquelle tout doit être fait pour faciliter la fluidité des parcours des jeunes qui étudient afin de leur permettre d'atteindre le niveau le plus élevé possible : nous avons besoin d'eux, et c'est urgent.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Je suis d'accord avec la conclusion de notre collègue Jean-Luc Mélenchon.
Cependant, le BEP a déjà vocation à être un diplôme propédeutique de poursuite d'études vers le baccalauréat professionnel. La refonte des spécialités prévue dans le rapport annexé tend à consacrer cette finalité. En outre, ce rapport satisfait déjà le deuxième alinéa de cet amendement, relatif à l'accès prioritaire des meilleurs bacheliers professionnels vers les sections de techniciens supérieurs.
Aussi, je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Todeschini. L'amendement défendu par Jean-Luc Mélenchon, au nom du groupe socialiste, vise à inscrire dans la loi les moyens de renforcer la fluidité de la voie éducative des métiers. Cela nous semble en effet important, et nous regrettons la position du rapporteur et du ministre.
Encore aujourd'hui, un titulaire sur deux du BEP ne poursuit pas jusqu'au baccalauréat professionnel, alors même que le BEP a été repositionné comme un diplôme préparant à la poursuite d'études visant au baccalauréat.
Chaque jeune titulaire du BEP doit donc être en mesure de poursuivre sa scolarité jusqu'au baccalauréat professionnel. Il n'en sera que plus autonome dans son futur parcours professionnel. Les savoirs fondamentaux supplémentaires ainsi acquis lui seront indispensables pour accéder éventuellement à la formation continue.
C'est également cohérent avec l'élévation rapide des exigences scientifiques et techniques de la production dans notre pays.
Ce serait, enfin, une contribution décisive pour élever encore la part d'une classe d'âge accédant au baccalauréat. Voilà en effet l'un des principaux moyens pour atteindre l'objectif de 80 % d'une classe d'âge au baccalauréat, objectif à la réalisation duquel la création du baccalauréat professionnel en 1984 et son développement rapide ont largement contribué.
Après le baccalauréat professionnel ou technologique, les jeunes devraient également être en mesure d'accéder plus facilement à la préparation des diplômes de BTS et de DUT, alors que ces formations leur sont aujourd'hui largement fermées, même s'ils ont les capacités requises. Là aussi, cet objectif est cohérent avec l'exigence d'élévation continue du niveau de qualification de notre pays.
Favoriser pour les jeunes de la voie des métiers l'accès au baccalauréat professionnel, comme la possibilité de poursuivre leurs études en BTS, ce serait tirer toute une voie d'enseignement vers le haut ; ce serait montrer que la voie des métiers n'est pas bouchée, et qu'elle permet d'accéder au plus haut niveau de connaissances et de qualifications.
Mais cette poursuite des études ne sera vraiment effective que si l'Etat s'engage aussi à accompagner ces jeunes, souvent modestes et majeurs, avant même l'arrivée au baccalauréat, pour leur garantir une autonomie matérielle suffisante durant leur cursus scolaire. Faute de quoi ils renonceront à obtenir une meilleure qualification et rejoindront précocement le marché du travail. D'ailleurs, soulevée par la commission Thélot, la question d'une allocation d'études pour les jeunes de l'enseignement professionnel mériterait, elle aussi, d'être soutenue.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Nous soutiendrons cet amendement qui concerne, là encore, les jeunes issus de l'enseignement professionnel. Il nous semble en effet très important que tout jeune titulaire d'un brevet d'études professionnelles - BEP - puisse accéder à un baccalauréat professionnel et poursuivre, s'il le souhaite, en BTS ou en IUT.
Il serait intéressant de créer des classes passerelles dans toutes les filières. Bien évidemment, elles ne seront pas, d'un coup de baguette magique, proposées dès la rentrée prochaine, mais chaque filière professionnelle devrait y réfléchir, afin de préparer des baccalauréats professionnels permettant à tous les jeunes d'accéder au plus haut niveau de qualification possible.
Nous continuerons à défendre cette philosophie tout au long de ce débat et, dans l'immédiat, nous apportons notre soutien à l'amendement n° 304.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 304.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 133 :
Nombre de votants | 232 |
Nombre de suffrages exprimés | 229 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 115 |
Pour l'adoption | 28 |
Contre | 201 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures trente-cinq, est reprise à dix-sept heures quarante.)
M. le président. La séance est reprise.
chapitre IV
Dispositions relatives aux écoles et aux établissements d'enseignement scolaire
Article 19
I. - Au début du livre IV, il est inséré un titre préliminaire ainsi rédigé :
« TITRE PRÉLIMINAIRE
« DISPOSITIONS COMMUNES
« Art. L. 401-1. - Dans chaque école et établissement d'enseignement scolaire public, un projet d'école ou d'établissement est élaboré avec les représentants de la communauté éducative. Le projet est adopté par le conseil d'école ou le conseil d'administration, sur proposition de l'équipe pédagogique de l'école ou du conseil pédagogique de l'établissement pour ce qui concerne sa partie pédagogique. Sa validité est comprise entre trois et cinq ans.
« Le projet d'école ou d'établissement définit les modalités particulières de mise en oeuvre des objectifs et des programmes nationaux et précise les activités scolaires et périscolaires qui y concourent. Il précise les voies et moyens qui sont mis en oeuvre pour assurer la réussite de tous les élèves et pour associer les parents à cette fin. Il détermine également les modalités d'évaluation des résultats atteints.
« Art. L. 401-2. - Dans chaque école et établissement d'enseignement scolaire public, le règlement intérieur précise les conditions dans lesquelles est assuré le respect des droits et des devoirs de chacun des membres de la communauté éducative. »
II. - L'article L. 411-2 est abrogé.
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 570, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Actuellement, dans toutes les académies, les conseillers principaux d'éducation, les CPE, sont invités par les inspecteurs pédagogiques à présenter un projet de vie scolaire.
Si les intentions sont fort louables pour une meilleure reconnaissance et une plus grande visibilité de l'action des CPE, il nous semble utile de rappeler préalablement que les missions et les fonctions du CPE sont indiquées dans la circulaire de 1982 - participation du CPE au fonctionnement de l'établissement, collaboration avec le personnel enseignant et, enfin, animation éducative.
Si, comme il est noté, le projet de vie scolaire doit s'inscrire dans le cadre du projet d'établissement, il nous semble difficile d'envisager un projet de vie scolaire défini et proposé par le seul CPE, alors qu'il devrait émaner de l'ensemble de la communauté éducative.
En effet, définir une politique de lutte contre l'absentéisme sans y associer étroitement les personnels enseignants et le personnel médicosocial semble vain, de même qu'il est difficilement concevable que la mise en place d'un projet de vie scolaire assure une meilleure « maîtrise » de la vie scolaire, alors que le personnel de surveillance est en baisse constante et que les contrats précaires d'assistants d'éducation ne permettent pas la stabilité des équipes. Il convient de souligner que cette baisse concerne également le personnel social et les conseillers d'orientation psychologues, les COPSY.
L'argument souvent avancé par les partisans du projet est de permettre aux CPE de prendre du recul par rapport à leur fonction.
Cela soulève une première question : quelles solutions préconisez-vous pour que les personnels ne travaillent plus dans l'urgence, pour que leur bureau, essentiellement au collège, ne soit pas transformé en « infirmerie bis » alors qu'ils constatent une baisse drastique du nombre de surveillants ?
Le projet risque aussi de devenir un outil contractuel qui, au nom de l'autonomie des établissements, permettra d'accroître la mise en dépendance de l'école par rapport aux objectifs et aux critères de rentabilité éducative.
Ce projet et la logique de contractualisation qu'il sous-tend déboucheront inévitablement sur une régulation au mérite des moyens attribués, et donc sur une inégalité entre les établissements.
A lire cet article, monsieur le ministre, le projet d'école ou d'établissement semble constituer une solution aux dysfonctionnements du système scolaire, un sésame, qui malheureusement, ne débouche sur rien.
Pour toutes ces raisons, nous avions proposé, dans le cadre de l'examen des amendements tendant à insérer des articles additionnels avant l'article 9, différents outils à mettre en oeuvre dans notre système éducatif. Nous avions notamment émis l'idée d'un conseil scientifique et pédagogique qui, dans chaque établissement, aurait eu entre autre mission celle de concevoir la réalisation des projets d'établissement et d'aider à leur mise en oeuvre.
Nous souhaitons que ces conseils scientifiques et pédagogiques puissent voir le jour et nous demandons la suppression de cet article 19.
M. le président. L'amendement n° 109, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
I. Rédiger comme suit le début de la deuxième phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 401-1 du code de l'éducation :
Le projet est adopté, pour une durée comprise entre trois et cinq ans, par le conseil d'école ....
II. Supprimer la dernière phrase du même texte.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 571 rectifié, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la dernière phrase du second alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 401-1 du code de l'éducation :
Il procède à l'évaluation des résultats atteints sur la base de critères validés.
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Il est dangereux que le projet d'établissement définisse ses propres modalités d'évaluation des résultats atteints.
Une telle disposition ne ferait qu'accroître les différences entre les établissements et concourrait au développement d'une éducation à plusieurs vitesses. Les critères d'évaluation des résultats du projet d'école ou d'établissement doivent être décidés à l'échelon national et ils doivent être les mêmes pour tous.
Le dépôt de cet amendement est également une manière de réaffirmer notre attachement à l'idée d'une école unique, de haut niveau, sur l'ensemble du territoire de la République.
M. le président. L'amendement n° 410 rectifié, présenté par Mme Hermange et M. Goujon, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 401-1 du code de l'éducation par deux phrases ainsi rédigées :
Avec les moyens dont il dispose, le conseil pédagogique est encouragé à recourir à toutes les initiatives de composition des classes, notamment en matière d'effectifs, de prise en compte du niveau des élèves ou d'aménagement des programmes. L'évaluation de la réussite du projet d'établissement s'effectue, non seulement au vu des moyens pédagogiques, mais également des progrès réalisés par les élèves.
La parole est à M. Philippe Goujon.
M. Philippe Goujon. Cet amendement tend à préciser les conditions dans lesquelles le chef d'établissement peut exercer son autonomie, encourager et reconnaître toutes les initiatives qui, avec les moyens mis à sa disposition, visent à aménager les classes, les effectifs et les niveaux pour donner le plus de chance possible de réussite aux élèves.
M. le président. L'amendement n° 411 rectifié, présenté par Mme Hermange et M. Goujon, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 401-1 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« L'évaluation de la réussite du projet d'établissement s'effectue non seulement au vu des moyens pédagogiques déployés mais aussi au vu des progrès réalisés par les élèves ».
La parole est à M. Philippe Goujon.
M. Philippe Goujon. Cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. L'amendement n° 110, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 401-1 du code de l'éducation par deux alinéas ainsi rédigés :
« Dans le cadre du projet d'école ou d'établissement, après accord du conseil d'école ou d'administration et, le cas échéant, du conseil pédagogique, et sous réserve de l'autorisation par l'autorité académique, des expérimentations peuvent être autorisées dans les domaines suivants : organisation pédagogique, vie scolaire, partenariats extérieurs, coopération internationale.
« La mise en oeuvre des expérimentations fait l'objet d'une évaluation. »
Le sous-amendement n° 226, présenté par M. Demuynck, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 110 pour compléter l'article L. 401-1 du code de l'éducation, remplacer les mots :
des expérimentations
par les mots :
des initiatives
Le sous-amendement n° 225, présenté par M. Demuynck, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 110 pour compléter l'article L. 401-1 du code de l'éducation, après les mots :
des expérimentations
insérer les mots :
, pour une durée maximum de cinq ans,
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 110.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement vise à encourager les initiatives locales par le recours à des expérimentations - l'expérimentation étant aujourd'hui inscrite dans la Constitution -, dans le cadre du projet d'école ou d'établissement.
En effet, ce projet doit être un outil de pilotage de proximité, mis au service de la réussite de tous les élèves.
La souplesse doit prévaloir pour que ce projet soit adapté aux spécificités locales et au contexte de l'établissement. A cette fin, les autorités académiques doivent encourager le développement de projets et d'innovations pédagogiques, dans le respect, bien sûr, des orientations et des programmes nationaux.
Ces expérimentations seront évaluées.
A cet égard, il appartiendra également au corps d'inspection d'assurer une large diffusion des bonnes pratiques, lesquelles restent encore trop souvent confidentielles quand elles existent.
Monsieur le président, je souhaite retirer cet amendement au bénéfice de l'amendement n° 173 rectifié, que je reprendrai au nom de la commission des affaires culturelles, son auteur, M. Gouteyron, n'étant pas là pour le soutenir.
M. le président. Il s'agira donc de l'amendement n° 173 rectifié bis.
L'amendement n° 110 est retiré.
En conséquence, les sous-amendements nos 226 et 225 n'ont plus d'objet.
M. le président. L'amendement n° 173 rectifié bis, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 401-1 du code de l'éducation par trois alinéas ainsi rédigés :
« Sous réserve de l'autorisation préalable des autorités académiques, le projet d'école ou d'établissement peut prévoir la réalisation d'expérimentations portant sur l'enseignement des disciplines, l'interdisciplinarité, l'organisation pédagogique de la classe, de l'école ou de l'établissement, la coopération avec les partenaires du système éducatif, les échanges ou le jumelage avec des établissements étrangers d'enseignement scolaire. Ces expérimentations font l'objet d'une évaluation annuelle.
« Le cas échéant, les autorités académiques affectent des enseignants volontaires sur les postes justifiant des exigences particulières, en relation avec les corps d'inspection et les chefs d'établissement.
« Le Haut conseil de l'éducation établit chaque année un bilan des expérimentations menées en application du présent article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement rejoint celui que je viens de présenter. Il prévoit en plus que le Haut conseil de l'éducation réalise un bilan annuel des expérimentations menées, et que des enseignants volontaires peuvent être affectés sur des postes qui justifient des exigences particulières.
Cet amendement est donc plus complet que l'amendement n° 110. C'est la raison pour laquelle je me suis rallié à la proposition de M. Gouteyron.
M. le président. Le sous-amendement n° 655, présenté par M. Demuynck, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 173 rectifié bis pour compléter l'article L. 401-1 du code de l'éducation, après les mots :
la réalisation d'expérimentations
insérer les mots :
, pour une durée maximum de cinq ans,
La parole est à M. Christian Demuynck.
M. Christian Demuynck. Il s'agit de limiter l'expérimentation à une durée maximum de cinq ans.
M. le président. L'amendement n° 175 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mmes G. Gautier et Férat, MM. Deneux, J.L. Dupont, Nogrix, Badré, C. Gaudin et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 401-1 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Lors de la définition du projet d'école ou d'établissement, les chefs d'établissement consultent le représentant de la collectivité locale ou de l'établissement public de rattachement sur toute mesure nouvelle nécessitant une intervention financière ou matérielle de la collectivité.
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. La nouvelle phase de la décentralisation a augmenté la part prise en charge par les collectivités territoriales dans le coût du système scolaire.
Il s'agit, au travers de cet amendement, de mettre en place, lors de la définition du projet d'école ou d'établissement, un dialogue entre les chefs d'établissement et la collectivité de rattachement, afin que celle-ci ne soit pas placée devant le fait accompli et tenue de participer au financement de mesures au sujet desquelles elle n'a pas été consultée.
Il est vrai que les élus sont davantage présents en droit qu'en fait dans chaque conseil d'administration d'établissement : M. Détraigne, auteur de cet amendement, a certainement voulu faire allusion à cet état de fait.
En tout état de cause, M. Détraigne a souhaité que la communication et les liens entre les collectivités locales et l'établissement soient multipliés.
M. le président. L'amendement n° 148, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Dans le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 401-2 du code de l'éducation, après les mots :
assuré le respect des
insérer les mots :
règles et principes de la République ainsi que des
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. L'amendement n° 570 est contraire à la position de la commission puisqu'il vise à supprimer l'article 19. La commission émet donc un avis défavorable.
A propos de l'amendement n° 571 rectifié, je dirai que l'évaluation des résultats atteints se fera sur la base des objectifs définis dans le cadre du contrat d'objectifs - prévu à l'article 20 - conclu avec l'autorité académique ainsi qu'à partir d'indicateurs élaborés par l'établissement, conformément aux objectifs nationaux et académiques.
L'objet de cet amendement étant satisfait, je demande à ses auteurs de bien vouloir le retirer. A défaut, j'émettrai un avis défavorable.
L'amendement n° 410 rectifié est satisfait par l'amendement n°173 rectifié bis. Je demande donc à M. Goujon de bien vouloir le retirer.
Au sujet de l'amendement n° 411 rectifié, je rappellerai que l'évaluation du projet d'établissement sera basée sur les objectifs fixés, y compris sur ceux du contrat d'objectifs passé avec l'académie, et sera liée aux moyens attribués à l'établissement.
Cet amendement étant également satisfait, je vous demande, monsieur Goujon, de bien vouloir le retirer.
La commission est tout à fait favorable au sous-amendement n° 655.
Quant à l'amendement n° 175 rectifié bis, il va dans le sens de ce que propose la commission relativement aux contrats d'objectifs conclus entre l'établissement et l'autorité académique.
Le projet d'établissement, qui décline ces objectifs en modalités de mise en oeuvre, est élaboré avec l'ensemble de la communauté éducative. Il peut être utile, comme le prévoit cet amendement, d'y associer plus étroitement les collectivités territoriales concernées dès lors que des incidences financières peuvent en découler. La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Comme la commission, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 570. Le projet d'établissement est un point très important qu'il ne convient pas de supprimer.
Je suis favorable à l'amendement n° 109 et défavorable à l'amendement n° 571 rectifié.
En ce qui concerne les amendements nos 410 rectifié et 411rectifié, je demande à son auteur de bien vouloir les retirer dans la mesure où ils sont satisfaits par l'amendement n° 173 rectifié bis.
Quant à ce dernier, il pourrait recevoir l'accord du Gouvernement dans la mesure où il s'inscrit dans l'esprit du projet de loi. Néanmoins, le deuxième alinéa me gêne : ce n'est vraiment pas à la loi de fixer les modalités d'affectation des enseignants. Ces dernières relèvent de la gestion interne des académies. Je demande donc à M. le rapporteur de bien vouloir modifier cet amendement en ce sens en en supprimant le deuxième alinéa.
Enfin, le Gouvernement est favorable au sous-amendement n° 655 et à l'amendement n° 175 rectifié bis.
M. le président. Monsieur le rapporteur, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens souhaité par M. le ministre ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. J'aurais préféré que M. Gouteyron soit là pour en décider. Je prends néanmoins la responsabilité de procéder à la rectification souhaitée par le Gouvernement, car je comprends le souci de M. le ministre.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n°173 rectifié ter, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, et ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 401-1 du code de l'éducation par trois alinéas ainsi rédigés :
« Sous réserve de l'autorisation préalable des autorités académiques, le projet d'école ou d'établissement peut prévoir la réalisation d'expérimentations portant sur l'enseignement des disciplines, l'interdisciplinarité, l'organisation pédagogique de la classe, de l'école ou de l'établissement, la coopération avec les partenaires du système éducatif, les échanges ou le jumelage avec des établissements étrangers d'enseignement scolaire. Ces expérimentations font l'objet d'une évaluation annuelle.
« Le Haut conseil de l'éducation établit chaque année un bilan des expérimentations menées en application du présent article.
La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'amendement n° 570.
Mme Annie David. Je voudrais fournir une raison supplémentaire de voter en faveur de cet amendement.
La période de validation du projet d'école ou d'établissement est relativement longue, ce qui pose nécessairement la question de sa réactualisation en fonction d'éléments nouveaux.
Par ailleurs, dans la mesure où ce projet s'impose à l'ensemble des personnels, le problème sera plus aigu encore dans les établissements confrontés à une forte rotation desdits personnels.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 570.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 134 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 226 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 114 |
Pour l'adoption | 23 |
Contre | 203 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 109.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 571 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 135 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Monsieur Goujon, les amendements nos 410 rectifié et 411 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Philippe Goujon. Non, je les retire, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 410 rectifié et 411 rectifié sont retirés.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 655.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote sur l'amendement n° 173 rectifié ter.
M. Jean-Marc Todeschini. M. le rapporteur a demandé le retrait de l'amendement n° 410 rectifié, arguant du fait que celui-ci était satisfait par l'amendement n° 173 rectifié ter.
L'amendement n° 410 rectifié dispose que, pour la composition des classes, le conseil pédagogique peut prendre en compte le « niveau des élèves » et procéder à l'« aménagement des programmes ». Selon moi, la conséquence en serait la création de classes de niveau.
Or l'amendement n° 173 rectifié ter, apparemment, ne tend pas à cela. Si c'était le cas, ce serait redoutable et générateur de dérives importantes.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 173 rectifié ter, modifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'article 19.
Mme Annie David. D'une certaine manière, cet article confère une valeur législative aux projets d'école ou d'établissement. Etait-il bien nécessaire de passer par la loi ? Ne pouvait-on pas, comme dans le passé, se contenter de procéder par la voie réglementaire, d'autant que le ministère de l'éducation nationale est lui-même producteur d'une quantité volumineuse de dispositions à caractère réglementaire, publiées dans son bulletin officiel ?
Si l'on veut donner force de loi à ce qui constitue pour ainsi dire le quotidien des élèves des premier et second degrés, réfléchissons alors au contenu du projet d'école ou d'établissement.
On notera que cette démarche de pédagogie générale constitue dans les faits l'un des noeuds de la concertation au sein de la communauté éducative. Dans les établissements scolaires de l'enseignement public, ce sont les membres des commissions permanentes, des conseils d'école et des conseils d'administration des collèges et des lycées - parents d'élèves, enseignants, personnels techniques, représentants des collectivités locales - qui conçoivent le projet, le discutent et le votent. Ce moment est essentiel dans l'activité des conseils d'école et des conseils d'établissement, élus tous les ans par les différents collèges constituant la communauté éducative.
L'engagement sur le contenu du projet d'école et d'établissement, en application de l'article 19, courrait donc sur une période supérieure à la durée du mandat des membres des conseils d'école ou d'établissement. C'est une des raisons pour lesquelles nous avons demandé la suppression de cet article. Mais pourquoi ne pas valider une démarche nationale d'innovation pédagogique diffusée par les rectorats et les inspections académiques ?
On parle d'expérimentation. Or, lorsque des actions spécifiques sont mises en oeuvre, notamment auprès des élèves en difficulté, finalement, les crédits sont coupés et les expériences sont interrompues. Tel a été le cas du collège hors les murs, expérience mise en oeuvre dans certaines académies de province auprès des enfants en difficulté. Ces expériences, pour l'essentiel, appartiennent aujourd'hui au passé.
Quant au partenariat extérieur, de quoi s'agit-il ? Il a pour objet de permettre aux entreprises de mettre leur nez dans les affaires de l'éducation nationale. Veuillez nous dire, monsieur le rapporteur, si vous souhaitez que non seulement les employeurs, mais aussi les syndicalistes ouvriers soient en mesure des proposer des expériences pédagogiques originales. Si tel était le cas, nous pourrions alors être d'accord avec vous. Mais je ne pense pas que là soit réellement votre intention.
Compte tenu de ces observations, nous ne voterons pas l'article 19.
M. le président. Je mets aux voix l'article 19, modifié.
(L'article 19 est adopté.)
Article additionnel après l'article 19
M. le président. L'amendement n° 572, présenté par MM. Muzeau et Fischer, Mmes Demessine et Hoarau, M. Autain et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 19, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'avant-dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 351-1 est ainsi rédigée :
« A défaut, la décision finale revient aux parents ou au représentant légal. »
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Cet amendement porte sur la scolarisation des enfants en situation de handicap.
Je le répète, nous regrettons de ne trouver dans la partie réellement normative du projet de loi aucune disposition novatrice concernant l'intégration scolaire de ces enfants. Seul le rapport annexé, de manière trop timide, notamment sur le plan budgétaire, évoque cette question.
La loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, prévoit un dispositif de conciliation et des voies de recours en cas de désaccord entre les parents et la commission des droits et de l'autonomie. Notre amendement tend à modifier cette loi afin que les parents d'un enfant en situation de handicap aient le dernier mot en matière d'orientation scolaire.
Le dispositif prévu par la loi du 11 février 2005 est en effet lourd. Il nécessite d'être amélioré et, si possible, allégé.
S'il y a une révolution à faire dans le domaine de l'intégration scolaire des enfants en situation de handicap, en plus de l'adaptation et du déblocage de moyens importants, c'est bien de donner toute leur place aux parents dans ce processus. Un raisonnement identique peut être appliqué au représentant légal, le tuteur par exemple.
Etre parent d'un enfant en situation de handicap sans pouvoir maîtriser le cursus scolaire de celui-ci, est insupportable.
Qui, dans cet hémicycle, ne connaît pas dans sa famille, parmi ses amis, de parents souffrant fortement des silences et de l'opacité de la structure médico-scolaire, de la mauvaise écoute de sa part ?
Nous l'avons dit et répété : l'enfant en situation de handicap a droit à une éducation adaptée à sa situation, il a droit à la réussite scolaire.
Comment imaginer que les parents ou le représentant légal n'aient pas le dernier mot, après conseils et avis circonstanciés des professionnels, sur l'avenir scolaire de l'enfant ?
Bien entendu, notre proposition n'est pas un geste de désaveu à l'égard de la communauté éducative ou médicale. Elle est l'expression d'un profond besoin d'humanité dans le traitement de la question du handicap.
Le groupe communiste républicain et citoyen considère que cette proposition est importante et qu'elle ne peut pas être évacuée par un simple refus.
En conséquence, nous demandons un vote par scrutin public sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Avis défavorable : lors du débat qui a eu lieu, voilà quelques semaines, à l'occasion de l'examen de la loi du 11 février 2005, notre assemblée avait déjà rejeté cette proposition.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. L'article 21 de la loi du 11 février 2005 prévoit que les parents de l'enfant handicapé sont étroitement associés au processus d'élaboration de la décision d'orientation de leur enfant prise par la commission des droits et de l'autonomie en accord avec eux.
Des désaccords pouvant subsister à l'issue de ce processus, il est indispensable, comme le prévoit la loi, que des procédures de conciliation puissent intervenir sans préjudice des droits de recours. C'est une position équilibrée, qui a été prise après des débats approfondis et qui préserve l'intérêt de l'enfant handicapé et des parents. Je suis donc défavorable à cet amendement.
J'ajouterai que, si vous trouvez trop timides les engagements financiers qui sont pris sur ce sujet - c'est une position que l'on peut soutenir -, reconnaissez néanmoins qu'ils sont moins timides que par le passé !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. C'est exact !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 572.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 136 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 125 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Article 19 bis
Après la première phrase de l'article L. 411-1, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions de recrutement, de formation et d'exercice des fonctions spécifiques des directeurs d'école maternelle et élémentaire. »
M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, sur l'article.
M. Serge Dassault. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, je voudrais intervenir en faveur des directeurs et directrices d'écoles maternelles et élémentaires, dont la compétence et le dévouement ne sont pas suffisamment reconnus.
J'en ai l'expérience dans les écoles de ma commune de Corbeil-Essonnes. Je connais bien leurs problèmes et j'apprécie beaucoup leur travail.
Ils enseignent dans des conditions souvent difficiles, à des élèves dont les niveaux sont très différents. Ils doivent accueillir, en cours d'année, des enfants qui n'ont pas du tout suivi le même enseignement. Certains de ces enfants ont un caractère difficile, comprennent mal le français ou ont des problèmes familiaux.
Tout cela donne à ces personnels un surcroît de travail qui rend encore plus difficile l'accomplissement simultané de leurs tâches de professeur et de directeur d'école.
Aussi, dans les conditions actuelles, les candidatures de directeurs d'école se font de plus en plus rares et il manque souvent à la rentrée des titulaires pour occuper ces postes. Ainsi, à la rentrée de septembre 2004, 4 400 postes étaient restés vacants.
C'est pourquoi, je voudrais vous demander, monsieur le ministre, d'être plus conciliant à leur égard.
Je sais qu'à l'Assemblée nationale un article additionnel a été adopté, mais dans des conditions juridiques assez floues.
En effet, lors de la discussion en séance publique, vous précisiez : « Un décret déterminera les voies et moyens permettant d'adapter la définition des fonctions de directeurs d'école aux évaluations de leurs tâches dans un délai de six mois à l'issue des négociations engagées ». On ne peut pas dire que cela soit très clair ni très explicite. Il serait souhaitable de ne pas s'enliser dans des négociations interminables avec des syndicats qui, eux, ne sont pas pressés.
De quoi s'agit-il en réalité ?
Trois demandes fort simples ont été formulées pour les directeurs d'école : une augmentation de leur indemnité ; un aménagement de leur temps de travail pour qu'ils puissent assurer leur fonction ; l'octroi des moyens nécessaires.
Premièrement, une indemnité supérieure, mieux adaptée aux responsabilités qui leur sont confiées, souvent très lourdes, devrait être accordée aux directeurs d'école.
Actuellement, les directeurs d'école perçoivent moins de 1 000 euros d'indemnité par an, quel que soit le nombre de leurs classes. Il serait normal d'échelonner cette somme de 1 000 à 3 000 euros par an pour les écoles de quatre à douze classes. Ce serait très apprécié !
Deuxièmement, il serait souhaitable de faire varier le temps de décharge en fonction du nombre de classes dont ils ont la responsabilité de manière qu'ils puissent assumer leur tâche de directeur. Par exemple, ce temps pourrait être d'une demi-journée pour moins de trois classes - actuellement aucune décharge n'est prévue -, d'une journée à partir de trois classes, de deux journées à partir de sept classes, une décharge totale étant accordée au-delà de treize classes, ce qui est déjà le cas actuellement.
Cette mesure nécessiterait sans doute une augmentation des effectifs, des instituteurs « volants », pour remplacer les directeurs, et des crédits supplémentaires. Mais cela accroîtrait de façon considérable la motivation et l'efficacité de nos directeurs et directrices d'école.
Troisièmement, une augmentation des moyens mis à leur disposition serait nécessaire.
M. Ivan Renar. Article 40 !
M. Serge Dassault. L'affectation d'une secrétaire administrative temporaire, même à mi-temps, leur serait utile pour la rédaction et l'expédition du courrier.
Il serait également légitime de prévoir l'attribution de crédits de fonctionnement, lesquels sont aujourd'hui prélevés sur le budget alloué par la commune et sont relativement faibles.
Les nouveaux directeurs devraient recevoir une sérieuse formation initiale ; elle fait défaut actuellement.
Enfin, leur fonction de directeur devrait être prise en compte pour le calcul de leur retraite.
La mise en place de ces mesures, qui ne me semblent pas très compliquée, est indispensable.
Cette loi d'orientation scolaire, dont j'apprécie beaucoup la teneur, monsieur le ministre, traite de la mission première de l'école : « faire partager aux élèves les valeurs de la République et leur enseigner les connaissances nécessaires ». Mais tout cela ne peut se faire sans un personnel motivé. Or, aujourd'hui, il ne l'est pas, car il est surchargé de travail.
Le succès de votre mission, monsieur le ministre, dépend essentiellement de ceux et celles qui seront chargés d'appliquer cette loi, c'est-à-dire de vos directeurs et directrices d'école.
Je vous demande donc, en leur nom, de bien vouloir les remercier de leurs efforts en leur donnant satisfaction sur tout ou partie de mes propositions, sans attendre des négociations qui peuvent durer longtemps et dont le résultat est toujours hypothétique.
Il est urgent d'agir en faveur des directeurs et directrices d'école. Vous seul pouvez le faire, monsieur le ministre, rapidement et par décret. Je vous fais confiance ; c'est pourquoi je ne dépose pas d'amendement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Ivan Renar. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
Mme Hélène Luc. Vous avez de la chance, monsieur Dassault, on vous répond !
M. François Fillon, ministre. Monsieur Dassault, comme vous venez de l'exprimer, la définition du métier de directeur d'école est restée la même depuis la création des écoles. Pour autant, il est incontestable que les charges qui incombent à ces fonctionnaires aujourd'hui sont plus complexes qu'hier. Les tâches administratives se sont accrues, les nécessaires contacts avec les élus et les partenaires de l'école se sont multipliés. Les parents attendent du directeur une disponibilité plus grande. Cette situation a progressivement fait naître un sentiment d'insuffisante reconnaissance parmi les directeurs d'école et les a conduits, depuis plus de quatre ans, à refuser certaines tâches administratives.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a accepté l'article 19 bis introduit par amendement à l'Assemblée nationale. Vous estimez floue la rédaction de cet article. Elle ne l'est pas : tel qu'il est rédigé, cet article permettra les adaptations nécessaires, dont une partie de celles que vous proposez.
Il faut laisser à la concertation en cours toutes les chances d'aboutir. On ne peut pas imaginer que le Gouvernement engage des efforts très importants, comme vous allez pouvoir le constater, et que perdure ce conflit qui est ouvert depuis quatre ans, qui a déjà fait l'objet d'un certain nombre de gestes de la part des gouvernements successifs, sans résultat.
Les problèmes que vous évoquez et les solutions que vous proposez font partie du champ de concertation ouvert. Toutes ces mesures représentent des charges financières nouvelles pour l'Etat. En voici un exemple.
La mise en place des décharges de direction pour les directeurs d'école à cinq classes, qui a été décidée dans son principe et dont j'ai demandé l'achèvement pour la rentrée prochaine, représente la création de plus de 1 000 postes au total. Vous me demandez d'aller plus loin ; je vous rappelle qu'il y a plus de 50 000 écoles. Vous pouvez donc mesurer les conséquences financières d'une telle décision, dans un contexte budgétaire que vous connaissez comme moi.
M. Ivan Renar. Un mirage ! (Sourires.)
M. François Fillon, ministre. Il ne s'agit effectivement pas de nous engager dans des négociations interminables. Mais la situation ne pourra évoluer que si nos partenaires acceptent de mettre fin à la grève administrative qui dure depuis près de cinq ans, grève qui fragilise nos prévisions d'effectifs et ne nous permet pas de préparer les rentrées scolaires avec toute la clarté souhaitable. Si ce préalable est levé, des avancées pourront alors être envisagées dans le sens que vous souhaitez.
Enfin, c'est bien volontiers que, répondant à votre souhait, je saluerai une nouvelle fois le dévouement et la disponibilité de la grande majorité des directeurs d'école. Le bon fonctionnement de nos écoles dépend pour une large part, je le sais, de la qualité de leur engagement. Il faut donc trouver des réponses à leurs préoccupations. C'est la volonté du Gouvernement, c'est la mienne depuis plusieurs mois, et j'espère bien que la négociation qui se déroule actuellement permettra de résoudre une partie du problème que vous avez, à juste raison, posé devant la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Le groupe socialiste votera contre cet article.
On pourrait croire, après ce que nous venons d'entendre, que tout est merveilleux. Mais, comme le chantait Dalida : « Paroles, paroles » !
M. Jean-Marc Todeschini. En m'interrompant, monsieur le ministre, vous prenez des risques !
M. Jean-Marc Todeschini. Je ne vois pas d'inconvénient à ce que vous m'interrompiez, monsieur le ministre, mais alors, je m'autoriserai à vous interrompre à mon tour tout à l'heure !
Vous dites que vous négociez, mais le problème existe depuis plusieurs années. Et voilà que tout d'un coup la droite la plus libérale interviendrait pour régler la situation ! Je crois rêver et, monsieur le président, vous savez quel était mon métier ! Au demeurant, peut-être n'ai-je pas fini de rêver, d'ici à la fin de mon mandat de sénateur...
J'espère en tout cas que cette négociation sera effectivement menée à son terme, en prenant en compte tous les éléments qui ont été évoqués.
Je donne acte à M. le ministre du fait qu'il négocie. Peut-être ses prédécesseurs, de droite comme de gauche, ont-ils été moins bons que lui à cet égard, mais négocier ne doit pas signifier manier la carotte et le bâton.
Compte tenu du nombre d'écoles et de postes, notamment de directeurs d'écoles, lorsque j'entends dire qu'à la prochaine rentrée les décharges seront mises en place dans toutes les écoles comprenant au moins cinq classes, sans faire de procès d'intention, je demande à voir !
Je sais ce que les gouvernements successifs ont fait dans ce domaine : à la rentrée, comme les inspecteurs d'académie manquent de moyens, c'est là qu'ils se servent.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc.
Mme Hélène Luc. Le problème des conditions de travail des chefs d'établissements est très important.
Pour avoir reçu à plusieurs reprises des directeurs d'école, des principaux de collège et des proviseurs de lycée, je sais que ceux-ci doivent être non seulement de bons enseignants, de bons directeurs, mais aussi des militants. En effet, ils doivent assumer des charges très lourdes en raison de la complexité des problèmes qui se posent dans les écoles, pour ce qui concerne tant les élèves que l'administration des établissements, et de l'importance de leurs responsabilités. On a pu le constater en cas.
Monsieur le ministre, il ne tient qu'à vous de mettre fin à la grève administrative ! Monsieur Dassault, vous devriez demander à M. le ministre de prendre les mesures qui s'imposent, afin que les chefs d'établissement obtiennent le salaire et la reconnaissance qui leur sont dus. Ils mettront alors fin à leur grève administrative : c'est assez simple !
En tout cas, il ne faut pas rejeter la responsabilité de la situation sur les directeurs d'écoles, les principaux et les proviseurs !
Mme Hélène Luc. Vous savez bien, monsieur le ministre, que la question se pose en ces termes : vous seul pouvez mettre fin à cette situation !
M. le président. Je mets aux voix l'article 19 bis.
(L'article 19 bis est adopté.)
Article 20
L'article L. 421-4 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« 4° Il se prononce sur le contrat d'objectifs qui lie l'établissement à l'académie.
« Le conseil d'administration peut déléguer certaines de ses attributions à une commission permanente. »
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 573, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Le souci d'allégement et de simplification qui semble guider le législateur et M. le ministre est certes louable, mais la disposition proposée risque de complexifier la mise en oeuvre de la politique de l'établissement.
En outre, le chef d'établissement pourra modifier de façon structurelle les pouvoirs du conseil d'administration et de la commission permanente, en fonction de sa propre conception de la direction de l'établissement.
Enfin, cet article introduit les notions de « contrat » et de « contrat d'objectif », que nous considérons comme contraires à l'esprit même du processus éducatif.
En effet, nous récusons absolument le leurre que représente un contrat conclu entre l'académie et l'établissement scolaire. Cette contractualisation constitue une entorse au droit et à l'ordre hiérarchique des responsabilités.
Cette disposition n'a aucune force juridique et est impossible à mettre en oeuvre de fait, puisque la définition de la structure pédagogique et l'attribution des postes, décidées par le rectorat, de même que les moyens budgétaires donnés par les collectivités locales, échappent à l'établissement. Il ne peut donc pas y avoir de contrat d'objectifs puisque l'une des parties au contrat, l'établissement, n'est pas libre.
Nous demandons donc la suppression de cet article et surtout de la notion de contrat qu'il suppose.
M. le président. L'amendement n° 111, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa (4°) du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 421-4 du code de l'éducation, remplacer les mots :
qui lie l'établissement à l'académie
par les mots :
conclu entre l'établissement et l'autorité académique, après consultation de la collectivité territoriale de rattachement.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il s'agit d'insister sur la nécessité d'informer la collectivité territoriale de rattachement et de l'associer en amont à la procédure de contractualisation liant l'établissement et l'autorité académique.
En effet, certains objectifs pédagogiques peuvent avoir des conséquences lourdes en matière d'équipements, comme le remarquait notre collègue Pozzo di Borgo, à l'occasion d'un précédent amendement. Ainsi, l'installation d'un laboratoire de langues ou de sciences, la construction de salles adaptées ou d'équipements pour les disciplines professionnelles sont souvent à la charge des départements ou des régions, qui sont responsables et propriétaires des bâtiments scolaires et de leurs équipements.
En outre, du fait des nouveaux transferts opérés par la loi relative aux libertés et aux responsabilités locales, les collectivités sont de plus en plus appelées à s'investir dans la vie des établissements scolaires et à nouer des partenariats avec eux dans le domaine éducatif.
M. le président. L'amendement n° 305 rectifié, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 421-4 du code de l'éducation par les mots :
, ainsi que sur les moyens qui sont dégagés pour leur réalisation.
La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. L'objet de cet amendement est très clair.
(M. Serge Dassault se lève et se dirige vers la sortie de l'hémicycle.)
Mme Hélène Luc. Monsieur Dassault, ne partez pas ! Restez donc, puisque vous avez voté en faveur de la poursuite de la séance ! Il ne faut pas se moquer du monde !
M. le président. Madame Luc, je vous prie de ne pas interpeller vos collègues !
Veuillez poursuivre, monsieur Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Je partage tout à fait l'avis de Mme Luc !
Cet amendement vise à donner un droit de regard au conseil d'administration des collèges et des lycées sur le financement attribué à la réalisation de leurs objectifs en vertu du contrat qui les lie à l'académie. Il ne sert en effet à rien que le conseil d'administration puisse, comme le prévoit le texte, se prononcer sur le contrat d'objectifs s'il n'a aucun droit de regard sur le mode de financement, et donc sur les possibilités de réalisation effective de ces objectifs.
Afin de doter le conseil d'administration d'une réelle efficacité et le contrat d'objectif d'une portée réelle, nous vous demandons, mes chers collègues, de bien vouloir adopter notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 574, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le second alinéa du texte proposé par cet article pour le 4° de l'article L. 421-4 de code de l'éducation.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le ministre, nous récusons absolument le leurre que représente le contrat qui pourrait être conclu entre l'académie et l'établissement scolaire. Cette contractualisation constitue une entorse au droit et à l'ordre hiérarchique des responsabilités.
Cette disposition n'a aucune force juridique et est impossible à mettre en oeuvre de fait, puisque la définition de la structure pédagogique et l'attribution des postes, décidées par le rectorat, ainsi que la détermination des moyens budgétaires donnés par les collectivités locales, échappent à l'établissement. Il ne peut donc pas y avoir de contrat d'objectifs puisque l'une des parties, l'établissement, n'est pas libre.
Si l'existence de la commission permanente ne nous paraît pas devoir être remise en cause, notre refus des contrats d'objectifs implique que la délégation d'attributions en provenance du conseil d'administration n'a pas lieu d'être.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il est défavorable sur les amendements nos 573 et 305 rectifié dans la mesure où l'institution du contrat d'objectifs entre l'établissement et l'académie découle de la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances et répond à une logique d'efficacité.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 574, qui vise à supprimer la possibilité pour le conseil d'administration de déléguer certaines attributions à la commission permanente. Cette disposition tend à améliorer le fonctionnement des conseils d'administration en les recentrant sur leurs tâches essentielles de pilotage et en les soulageant des questions plus courantes.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 573.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 137 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 126 |
Contre | 201 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 111.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 305 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 138 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 126 |
Contre | 201 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 574.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 139 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 20, modifié.
(L'article 20 est adopté.)
Article additionnel après l'article 20
M. le président. L'amendement n° 112 rectifié, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Après l'article 20, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa de l'article L. 421-7 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Les collèges, lycées et centres de formation d'apprentis, publics et privés, relevant de l'éducation nationale, de l'enseignement agricole ou d'autres statuts, peuvent s'associer au sein de réseaux, au niveau d'un bassin de formation, pour faciliter les parcours scolaires, permettre une offre de formation cohérente, mettre en oeuvre des projets communs et des politiques de partenariats, en relation avec les collectivités territoriales et leur environnement économique, culturel et social. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement propose une nouvelle rédaction, plus précise et plus étoffée, du deuxième alinéa de l'article L. 421-7 du code de l'éducation.
Il s'agit tout d'abord de souligner l'importance de la notion de réseaux associant l'ensemble des établissements publics ou privés, aussi bien les collèges et les lycées que les centres de formation des apprentis et les établissements d'enseignement agricole.
Ces réseaux doivent s'inscrire en priorité dans un bassin de formation, bassin qui apparaît comme l'échelon le plus pertinent pour mener des politiques de partenariat, mettre en oeuvre des projets communs ou favoriser la fluidité et la cohérence des parcours de formation, notamment en développant les passerelles entre les différentes voies.
Cet amendement vise donc à inciter les établissements à s'ouvrir sur les collectivités territoriales et sur leur environnement économique, social et culturel, mais aussi à regrouper leurs ressources humaines et matérielles.
Bref, il s'agit de privilégier une logique de complémentarité plutôt qu'une logique de concurrence.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 20.
Article 21
L'article L. 421-5 est ainsi rédigé :
« Art. L. 421-5. - Dans chaque établissement public local d'enseignement, est institué un conseil pédagogique.
« Ce conseil, présidé par le chef d'établissement, réunit au moins un professeur principal de chaque niveau d'enseignement, au moins un professeur par champ disciplinaire, le conseiller principal d'éducation ou un représentant des conseillers principaux d'éducation et, le cas échéant, le chef de travaux. Il a pour mission de favoriser la concertation entre les professeurs notamment pour coordonner les enseignements et les méthodes pédagogiques, la notation et l'évaluation des activités scolaires. Il prépare la partie pédagogique du projet d'établissement. »
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Marc Todeschini. La modification de notre ordre du jour qui vient d'être adoptée a amené notre groupe à procéder en son sein à une réorganisation des présences.
Certains d'entre nous, Mme Voynet notamment, ont été présents dans l'hémicycle depuis le début de l'examen du projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Nous aussi !
M. Jean-Marc Todeschini. Mme Voynet a dû momentanément s'absenter, pour des raisons évidentes d'organisation,...
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Rien n'est plus important que l'avenir de l'école !
M. Jean-Marc Todeschini. ...puisqu'elle sera présente cette nuit et demain.
Or viennent en discussion à l'article 21 deux amendements signés par les sénateurs rattachés au groupe socialiste mais pas par les membres du groupe socialiste eux-mêmes. Puisque nous ne pouvons les reprendre, ces amendements ne vont pas être défendus. Il est regrettable de travailler dans de telles conditions.
Certes, j'interviendrai pour explication de vote sur l'article 21 à défaut de pouvoir le faire sur ces amendements, mais je voudrais au moins avoir l'assurance que, maintenant que vous nous avez contraints à travailler demain, vous n'allez pas en outre nous amener à siéger tard dans la nuit afin de libérer la matinée de demain au bénéfice de certains qui, semble-t-il, ont d'autres préoccupations que de débattre au Parlement.
J'espère, monsieur le président, que la séance s'achèvera ce soir à une heure pas trop tardive : à l'évidence, nous ne pourrons pas tous être présents demain, mais qu'au moins ceux qui le seront puissent reprendre le débat frais et dispos, à neuf heures trente ! Ne pas respecter un horaire « normal » constituerait une manoeuvre supplémentaire. (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Mon cher collègue, en fonction de l'état d'avancement de nos travaux à l'issue de cette séance, nous examinerons ensemble comment organiser le plus raisonnablement possible la suite du débat, au regard des obligations des uns et des autres, en particulier pour la journée de demain.
M. Jean-Marc Todeschini. Je vous sais raisonnable, monsieur le président !
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 575, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Dans la lutte contre l'échec scolaire, force est de constater que toute généralisation institutionnelle d'un dispositif particulier se traduit immanquablement par la création d'une filière de relégation vers laquelle sont presque systématiquement orientés les élèves présentant des difficultés dans les apprentissages scolaires, difficultés dont les origines sont souvent très diverses et qui s'expriment surtout par des problèmes de comportement.
C'est la raison pour laquelle nous estimons nécessaire de développer, au niveau des établissements eux-mêmes, de la maternelle à la terminale de lycée, des outils pédagogiques permettant l'analyse et l'évaluation des causes réelles des difficultés de chacun des élèves concernés, afin de construire les stratégies éducatives et pédagogiques les plus adaptées pour construire les dispositifs de réparation adéquats avec l'aide de toutes les compétences professionnelles utilisables : conseillers d'éducation, conseillers d'orientations, psychologues, etc.
Votre proposition de mettre en place un conseil pédagogique dans chaque collège et chaque lycée ne répond pas à cette préoccupation. De par la composition de ce conseil, le fait qu'il soit placé sous l'autorité du chef d'établissement ne peut qu'introduire un rapport d'autorité hiérarchique entre les personnels et le chef d'établissement, rapport hiérarchique qui sera dommageable à la réflexion pédagogique.
Un flou artistique est d'ailleurs entretenu dans votre texte sur la manière dont seront désignés les professeurs qui participeront à ce conseil, avec le risque d'introduire ainsi une nouvelle hiérarchie, cette fois entre les enseignants eux-mêmes.
Enfin, le texte ne prévoit ni la mise à disposition des outils de recherche ou de formation continue nécessaires pour conduire une véritable réflexion, qu'elle soit individuelle ou collective, ni la décharge de service permettant aux personnels concernés de mener les réflexions pertinentes.
La mise en place du conseil scientifique et pédagogique que nous proposons pour notre part répond en revanche à trois exigences.
Premièrement, ce conseil serait présidé par un enseignant, élu par l'ensemble de ses membres, ce qui devrait assurer son indépendance par rapport à l'autorité hiérarchique.
Deuxièmement, nous souhaitons y associer comme parties prenantes les représentants des parents, des élèves et des élus. Il nous paraît en effet essentiel que chacun puisse apporter dans ce cadre un éclairage particulier à la réflexion collective.
Troisièmement, chacun des membres du conseil serait désigné par ses pairs afin d'éviter que ne s'instaurent des rapports d'autorité d'origine hiérarchique entre les enseignants eux-mêmes et pour que la compétence et l'investissement personnel de chacun prévalent seuls.
Enfin, nous proposons que ces nouveaux organismes travaillent en relation avec les autres structures que nous proposons d'implanter au niveau local, départemental, régional et national, à savoir les observatoires des scolarités et le fonds national de lutte contre les inégalités, et nous souhaitons que s'établissent des relations de travail suivies avec les chercheurs, notamment en sciences de l'éducation, en pédagogie et en didactique des disciplines, travaillant dans les universités de la région.
En outre, nous proposons que les personnels les plus directement concernés par ce travail de recherche, d'élaboration et de conduite des dispositifs de lutte contre l'échec scolaire bénéficient à ce titre d'une décharge partielle de service.
Notre projet présente une tout autre cohérence et une tout autre ambition que le vôtre, monsieur le ministre.
Nous voulons donc la suppression de l'article 21, et nous demanderons naturellement un scrutin public s'agissant d'un sujet d'une telle importance.
M. le président. L'amendement n° 192, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 421-5 du code de l'éducation, remplacer les mots :
par le chef d'établissement
par les mots :
par un enseignant élu pour trois ans,
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 113, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 421-5 du code de l'éducation, remplacer les mots :
le conseiller principal d'éducation ou un représentant des conseillers principaux d'éducation
par les mots :
un conseiller principal d'éducation
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. C'est un amendement rédactionnel.
M. le président. L'amendement n° 193, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 421-5 du code de l'éducation, après les mots :
conseillers principaux d'éducation
insérer les mots :
et, dans les deux dernières classes du collège et au lycée, des élèves élus par leurs condisciples
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. le président. L'amendement n° 114, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du second alinéa du texte proposé par cet article pour l'article L. 421-5 du code de l'éducation, supprimer les mots :
et les méthodes pédagogiques
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer des missions du conseil pédagogique celle qui consiste à coordonner les méthodes pédagogiques, pour être en cohérence avec l'affirmation du principe de liberté pédagogique de l'enseignant, énoncé à l'article 25 du projet de loi.
M. le président. L'amendement n° 576, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par cet article pour l'article L. 421-5 du code de l'éducation, par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans chaque établissement scolaire ou groupement pédagogique, est affectée une équipe permanente comprenant médecin scolaire, infirmier(e) éducatrice et assistant(e) social(e) pour assurer un suivi sanitaire et social global de chaque élève. »
La parole est à M. Ivan Renar.
M. Ivan Renar. Cet amendement tend à imposer l'affectation, dans chaque établissement scolaire ou groupe d'établissements dans le cas d'établissements à faibles effectifs, d'une équipe comprenant au minimum un médecin scolaire, une infirmière éducatrice de santé et une assistante sociale pour assurer un suivi global de chaque élève.
Il est en effet illusoire de prétendre à une transformation de notre système éducatif sans revaloriser les métiers et les conditions de travail des personnels non directement enseignants, ainsi que leur mission éducative toujours injustement sous-estimée.
Les personnels ouvriers, techniciens ou administratifs dans leur diversité, comme les médecins scolaires, les assistantes sociales, les infirmières, ont un rôle important à jouer au sein de l'équipe éducative. Ainsi, dans le cadre du développement de la médecine scolaire, les infirmières devraient voir affirmer leur mission d'éducation à l'hygiène et à toutes les formes de prévention, en matière de diététique, d'éducation sexuelle notamment, comme partie intégrante de la culture scolaire commune, dès l'école maternelle.
De la sorte, les assistantes sociales devraient être plus à même de repérer, dès le début de la scolarité, les difficultés d'origine sociale de certains élèves et d'élaborer, avec les autres personnels, des réponses adaptées à leur cas.
Les mesures de décentralisation imposées par votre gouvernement, monsieur le ministre, font peser un risque grave sur le statut de ces personnels et sur la conception même de leurs missions dans l'équipe éducative.
A la précarisation, particulièrement développée dans ces catégories, s'ajoutent aujourd'hui des risques d'externalisation, voire de privatisation des services. Un processus de retour de ces personnels dans le cadre statutaire des personnels de l'Etat devrait être mis en oeuvre dès que possible.
Parallèlement à ces critiques, nous formulons des propositions.
Premièrement, nous préconisons de créer les postes budgétaires indispensables pour répondre aux besoins insatisfaits et résorber la précarité.
Deuxièmement, nous estimons que, dans une conception plus éducative de leur fonction, les personnels ATOS devraient suivre, au moins pour partie, une formation commune avec les enseignants, délivrée par des IUFM aux fonctions élargies.
Troisièmement, nous proposons qu'à chaque établissement scolaire - ou groupe d'établissements mis en réseaux dans les cas d'unités à faibles effectifs telles que certaines écoles élémentaires ou petits collèges, notamment en zones rurales - soit affectée une équipe comprenant un médecin scolaire, une infirmière et une assistante sociale pour assurer un suivi global de chaque élève.
Quatrièmement, nous pensons qu'il faut engager, pour tous les personnels, une véritable revalorisation des métiers en rapport avec l'importance politique que la nation accorde à son ambition pour l'école.
Sur cet amendement important, je demanderai un scrutin public.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 575, car la création du conseil pédagogique répond, au contraire, à la nécessité de favoriser le travail en équipe et la concertation entre les enseignants.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 276 : d'une part, le mieux étant l'ennemi du bien, il ne semble guère réaliste de prévoir la présence permanente d'un médecin scolaire dans chaque établissement ; d'autre part, concernant les infirmiers scolaires, l'amendement est satisfait par le rapport annexé et les moyens programmés.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 575, car le conseil pédagogique est une innovation très importante, qui faisait d'ailleurs partie des propositions de la commission Thélot.
Il est favorable aux amendements n°s 113 et 114 et défavorable à l'amendement n° 576.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 575.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 140 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 113.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 576.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 141 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote sur l'article 21.
M. Jean-Marc Todeschini. Je vais tenter d'expliquer pourquoi les deux composantes du groupe socialiste - les sénateurs appartenant au groupe et ceux qui y sont rattachés - voteront contre cet article.
Les sénateurs rattachés au groupe socialiste auraient souhaité que le conseil pédagogique soit présidé par un enseignant élu pour trois ans.
Ils considèrent que le conseil pédagogique est l'une des rares innovations potentielles de la loi : personne ne peut en effet nier l'utilité de mieux coordonner les pratiques pédagogiques d'une classe à l'autre, d'une discipline à l'autre et, plus largement, de mieux intégrer la dimension pédagogique au projet global d'établissement.
Toutefois, ils estiment que le fait de le placer sous la direction du chef d'établissement, qui a un pouvoir hiérarchique sur les différents acteurs de la communauté éducative, fausse les enjeux et fait de cette structure, qui devrait être un espace d'expression et de participation, un instrument de pouvoir. Aucun chef d'établissement ne voudra dire qu'un principal ou un proviseur n'est pas forcément le meilleur pédagogue.
Les sénateurs rattachés au groupe socialiste considèrent qu'il serait utile qu'à l'instar de ce qui se pratique à l'université et dans certains pays une dimension élective préside au choix des orientations pédagogiques qui doivent faire l'objet d'un débat, d'une évaluation et, le cas échéant, d'une approbation ou d'une désapprobation de la communauté scolaire.
Ils souhaitent également qu'à côté d'un professeur principal, d'un professeur par champ disciplinaire et des conseillers d'éducation, le conseil pédagogique associe à sa réflexion des élèves élus par leurs condisciples, au moins dans les deux dernières années du collège et du lycée.
En effet, le conseil de classe ou le conseil pédagogique ne sont pas des cadres où s'échangent des secrets ou des informations privées ou confidentielles. Ce doit être des lieux où s'élaborent en commun les orientations pédagogiques de l'établissement.
Quoi de plus normal que les élèves, qui devraient être au centre du dispositif, soient associés à la définition des temps, des rythmes, des projets, de la répartition des moyens pédagogiques, de l'utilisation des divers outils !
Nos collègues rattachés au groupe socialiste ne voient pas au nom de quoi les représentants des élèves seraient écartés du conseil pédagogique.
M. le président. Je mets aux voix l'article 21, modifié.
(L'article 21 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 21
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 115 est présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles.
L'amendement n° 167 rectifié est présenté par M. Longuet, au nom de la commission des finances.
Tous deux sont ainsi libellés :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les lycées d'enseignement technologique ou professionnel peuvent mener, pour une durée maximum de cinq ans, une expérimentation permettant au conseil d'administration d'élire son président parmi les personnalités extérieures à l'établissement siégeant en son sein.
Cette expérimentation donnera lieu à une évaluation.
La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 115.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Par cet amendement, la commission propose d'étendre aux lycées d'enseignement technologique ou professionnel, par la voie d'une expérimentation suivie d'une évaluation, le principe de la présidence du conseil d'administration de l'établissement par une personnalité extérieure, élue en son sein.
Cette disposition prend modèle sur l'organisation qui prévaut dans les établissements d'enseignement agricole, en application du code rural.
Plusieurs avantages peuvent en être attendus pour les lycées professionnels : elle permettrait de recentrer les fonctions du conseil d'administration sur ses missions essentielles de définition de la politique de l'établissement et de ses orientations stratégiques, de favoriser l'ouverture des établissements sur leur environnement, dans le souci notamment de faciliter l'insertion professionnelle des élèves et, enfin, de clarifier les fonctions du chef d'établissement.
Ce dernier serait recentré sur sa mission première d'animation pédagogique. La création du conseil pédagogique qu'il préside incite en effet à repenser son rôle. Le fait qu'il soit à la fois représentant de l'Etat et président du conseil d'administration rend sa position actuelle parfois complexe à gérer. Il serait ainsi dégagé d'une partie de ses charges, ce qui lui permettrait d'exercer pleinement ses attributions essentielles.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour défendre l'amendement n° 167 rectifié.
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Cet amendement a le même objet que l'amendement qui vient d'être défendu.
M. le président. Le sous-amendement n° 654, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
I. Dans le deuxième alinéa de l'amendement n° 115, remplacer le mot :
mener
par le mot :
décider
II. Dans le même alinéa, remplacer les mots :
, une expérimentation permettant au conseil d'administration d'élire
par les mots :
et à titre expérimental que le conseil d'administration élit
III. Dans le dernier alinéa, remplacer le mot :
donnera
par le mot :
donne
Ce sous-amendement n'est pas soutenu.
Le sous-amendement n° 227, présenté par M. Demuynck, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du texte proposé par l'amendement n° 115 pour insérer un article additionnel après l'article 21, remplacer le mot :
expérimentation
par le mot :
initiative
La parole est à M. Christian Demuynck.
M. Christian Demuynck. Je retire ce sous-amendement, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 227 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements identiques nos115 et 167 rectifié ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable.
Dans les établissements publics locaux d'enseignement, le chef d'établissement représente l'Etat, et c'est à ce titre qu'il préside le conseil d'administration. En effet, au-delà de sa mission de responsable administratif et pédagogique et de chef du personnel de son établissement, il est aussi le représentant du ministre dans la mise en oeuvre de la politique de l'établissement.
Même si je comprends bien l'idée qui sous-tend ces deux amendements identiques, je ne voudrais pas qu'un message ambigu soit adressé aux chefs d'établissement quant à la plénitude de leur rôle et la reconnaissance dont ils bénéficient de la part de la souveraineté nationale.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Monsieur le ministre, pour une fois, je suis d'accord avec vous. (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)
Après quelques amendements sur l'expérimentation pédagogique, nous voici en présence d'amendements visant à introduire une certaine forme d'expérimentation institutionnelle.
Relisons le texte de ces deux amendements : « Les lycées d'enseignement technologique ou professionnel peuvent mener, pour une durée maximum de cinq ans, une expérimentation permettant au conseil d'administration d'élire son président parmi les personnalités extérieures à l'établissement siégeant en son sein. Cette expérimentation donnera lieu à une évaluation. »
Sur l'appréciation de cette disposition, je vous rejoindrai, monsieur le ministre...
M. Ivan Renar. Les liaisons dangereuses ! (Sourires.)
M. François Fillon, ministre. C'est toute la différence entre nous : cela vous ennuie, et moi, pas du tout !
Mme Annie David. Je ne suis pas sûre que cela ne vous dérange pas...
Cette disposition ne serait destinée, dans un premier temps, qu'aux établissements d'enseignement technologique et professionnel. Pourquoi ?
La priorité accordée à ces établissements permet une rapide identification de l'objectif fixé : il s'agit de confier la responsabilité de la présidence du conseil d'administration des lycées d'enseignement professionnel et des lycées techniques à des « personnalités extérieures issues de l'environnement économique, social et culturel » des établissements. Cette expression recouvre en quelque sorte de façon pudique le qualificatif plus ordinaire de « chef d'entreprise », pour ne pas dire de « patron ».
En fait, cet amendement commun à la commission des affaires culturelles et à la commission des finances vise, ni plus ni moins, à assimiler l'enseignement technique et professionnel à un vivier de formation à court terme d'une main-d'oeuvre directement employable par les entreprises du bassin d'emploi proche des établissements concernés.
Ce ne sont pas là les arguments que vous avez avancés, monsieur le ministre. Aussi était-il important que je fasse part de notre point de vue.
Vous avez toujours privilégié la voie de l'enseignement privé, comme d'ailleurs celle de l'apprentissage. Mais considérons la question au regard des indicateurs de performance de chacun ?
Nous ne sommes pas opposés à l'existence de l'apprentissage, mais nous constatons que les jeunes ne sont pas si enthousiastes que cela pour choisir ce parcours de formation. S'ils préfèrent préparer un brevet d'études professionnelles, puis un baccalauréat professionnel et, ensuite, un diplôme de technicien supérieur dans un établissement public technique, il faut leur en laisser le droit.
L'orientation professionnelle précoce des jeunes, la restriction des filières proposées dans l'enseignement professionnel public sont autant de handicaps que vous cherchez, coûte que coûte, à nous faire valider.
La rénovation de l'enseignement professionnel et technique ne passe pas par un droit de regard renforcé des chambres consulaires, des fédérations professionnelles, du MEDEF ou de leurs groupements locaux sur son fonctionnement et ses évolutions.
Prenons un exemple : les lycéens de Cluses ou de Bonneville n'ont rien à gagner à ce que quelque employeur de l'industrie de décolletage soit partie prenante dans l'orientation générale des établissements techniques et professionnels du bassin de l'Arve, monsieur le rapporteur.
Nous nous opposons donc, sans la moindre hésitation, à ces deux amendements, nostalgiques d'un passé révolu, et nous invitons le Sénat à les rejeter.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Je tiens à préciser que cette disposition n'a aucun caractère obligatoire ou contraignant. Il s'agit simplement de donner aux établissements qui le souhaitent la possibilité de lancer une expérimentation qui sera évaluée au terme de quelques années.
M. Ivan Renar. Il vaudrait mieux retirer les amendements !
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Mélenchon. En fait, il s'agit de savoir pourquoi cette expérimentation est faite et à quoi elle sert.
M. Ivan Renar. Et comment cela marchera !
M. Jean-Luc Mélenchon. Il faudra ensuite effectivement voir comment le système fonctionne.
Notons que, dans l'enseignement agricole, le système a donné des résultats qui sont considérés comme positifs. Je ne cache pas que je m'y suis intéressé, le but étant de rapprocher toutes ces structures et de les mettre sous une autorité politique unique, à condition cependant de le vouloir.
Au demeurant, soyons attentifs au fait que, même si nous utilisons des mots semblables, nous pouvons aboutir à des conclusions diamétralement opposées.
Ainsi, dire que l'on va mettre en place des présidents élus dans les établissements peut conduire aux conséquences suivantes : premièrement, on élit le président dans l'établissement ; deuxièmement, le budget est autonome ; troisièmement, l'établissement a un projet à caractère propre ; quatrièmement, il pratique sa propre pédagogie ; cinquièmement, il entre dans un système d'étalonnage qui permet de comparer les établissements entre eux. Finalement, vous avez non plus une éducation nationale, mais une éducation régionale, voire locale, construite autour d'un mythe, l'établissement d'enseignement professionnel qui formerait à un métier local ; or les métiers locaux n'existent pas.
Les formations et les qualifications professionnelles sont de plus en plus transversales. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles il est possible d'imaginer un statut commun à l'ensemble des établissements d'enseignement professionnel, agricole, maritime et autres.
Les différences entre les métiers sont extrêmement limitées. Par exemple, le secrétariat administratif est identique dans l'agriculture et dans l'industrie. Je pourrais citer d'autres exemples un peu moins caricaturaux, notamment dans les secteurs de la chimie ou de la mécanique.
C'est la raison pour laquelle M. le rapporteur doit nous dire à quoi va servir l'expérimentation et comment elle fonctionnera. Ce faisant, il dissipera l'impression d'approche idéologique que donne ce dispositif ; nous avons en effet l'impression que ce sont des raisons de principe qui conduisent la commission à considérer que le chef d'établissement ne serait pas le mieux placé pour faire vivre l'établissement et présider le conseil d'administration.
N'oublions pas que la tradition dans l'enseignement agricole n'est pas la même que dans l'enseignement professionnel public.
M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Par nature, je ne suis pas très favorable à ce qui porte atteinte à l'organisation des pouvoirs publics et à la place de l'Etat.
Mais il est vrai que, si l'on veut que ce genre d'établissement fonctionne, il faut aussi se tourner vers l'extérieur.
Aussi, dans la mesure où il s'agit d'une expérimentation et où nous avons toujours défendu l'idée qu'il fallait améliorer les choses par l'expérimentation, en dépit de mes réticences, je voterai ces deux amendements identiques en espérant que M. le ministre n'en sera pas trop fâché ! (Sourires.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 115 et 167 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 142 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 226 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 114 |
Pour l'adoption | 201 |
Contre | 25 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 21.
L'amendement n° 176 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mme G. Gautier, MM. Deneux, J.L. Dupont, Nogrix, Badré, C. Gaudin et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa (5°) du I de l'article L. 241-4 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois les délégués départementaux de l'éducation nationale ne peuvent exercer leur mission que dans des établissements autres que ceux de leur commune de résidence. »
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Cet amendement vise à faire en sorte que les délégués départementaux de l'éducation nationale n'exercent pas leur mission dans leur commune de résidence, et ce afin de respecter la neutralité qui sied à leur fonction.
A bien y réfléchir, j'ai peur que, tel qu'il est rédigé, cet amendement ne pose des problèmes dans les zones urbaines. Si la commission et le Gouvernement s'y déclarent favorables, il faudra sans doute le modifier.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il peut être en effet utile de préciser que les délégués départementaux chargés des missions d'inspection des établissements scolaires ne peuvent pas être à la fois juge et partie. Il y va de l'intérêt des délégués, des collectivités et des établissements concernés.
C'est pourquoi la commission émet un avis de sagesse positive sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement s'en remet également à la sagesse du Sénat.
Je comprends fort bien la motivation de M. Pozzo di Borgo. Toutefois, la rédaction de cet amendement pose problème pour la ville de Paris. Il faudrait résoudre cette difficulté technique.
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. En effet, mon amendement pose un problème pour Paris, mais aussi pour Lyon et Marseille, chacune de ses villes constituant une commune divisée en arrondissements.
En conséquence, je rectifie l'amendement n° 176 rectifié bis de façon à prendre en compte cette réalité.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 176 rectifié ter, présenté par M. Détraigne, Mme G. Gautier, MM. Deneux, J.L. Dupont, Nogrix, Badré, C. Gaudin et Pozzo di Borgo, et ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa (5°) du I de l'article L. 241-4 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois les délégués départementaux de l'éducation nationale ne peuvent exercer leur mission que dans des établissements autres que ceux de leur commune ou, à Paris, Lyon et Marseille de leur arrondissement de résidence. »
Je mets aux voix l'amendement n° 176 rectifié ter.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 21.
L'amendement n° 577, présenté par Mme David, MM. Renar, Ralite, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 421-6 du code de l'éducation est ainsi rétabli :
« Art. L. 421-6. - Le Conseil scientifique et pédagogique a pour mission de favoriser, dans le respect de la liberté pédagogique des enseignants, la concertation entre les personnels pour coordonner les enseignements et les méthodes pédagogiques, l'évaluation des activités scolaires, la mise en place et le suivi de dispositifs adaptés pour lutter contre l'échec scolaire constaté au niveau de l'établissement.
« Il peut s'adjoindre à cet effet et en tant que de besoin des collaborations extérieures à l'établissement, notamment liées à la recherche en science de l'éducation et à la politique de la ville.
« Il coordonne ses travaux avec ceux de l'observatoire des scolarités correspondant et, peut faire appel au Fonds national de lutte contre les inégalités ».
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Nous proposons de nouveau la création du Conseil scientifique et pédagogique qui réponde à nos voeux.
Le conseil pédagogique que vous proposez, monsieur le ministre, nous paraît négatif, car il crée, entre les professeurs, un ordre hiérarchique anti-statutaire et contraire à la bonne entente qui devrait régner dans les établissements, et impose, des choix pédagogiques aux enseignants.
Par ailleurs, en matière de lutte contre l'échec scolaire, force est de constater que toute généralisation institutionnelle d'un dispositif se traduit immanquablement par la création d'une filière de relégation.
C'est pourquoi il est nécessaire de développer, au niveau local, des outils nouveaux pour analyser les causes de l'échec scolaire au moment où il se manifeste et élaborer les dispositifs de nature à y porter remède.
C'est la raison pour laquelle nous proposons de mettre en place un Conseil scientifique et pédagogique dans chaque école ou groupement d'écoles, chaque établissement scolaire fonctionnant comme une véritable cellule de mise en commun des expériences, de réflexion collective et d'initiatives.
Regroupant des représentants des personnels, notamment enseignants, des parents et des élèves et fonctionnant indépendamment du conseil d'école ou du conseil d'administration, s'appuyant sur une solide politique de formation continue des personnels et travaillant en collaboration avec l'Observatoire des scolarités et le Fonds national de lutte contre les inégalités à l'école, que nous vous avons également proposé de créer hier par le biais d'un amendement tendant à insérer un article additionnel avant l'article 9, le Conseil scientifique et pédagogique serait chargé d'élaborer, de conduire et d'évaluer les résultats du projet pédagogique de l'établissement. Il pourrait, en outre, s'adjoindre autant que de besoin des collaborations extérieures à l'établissement, notamment en relation avec la recherche en sciences de l'éducation.
Monsieur le président, j'indique dès maintenant que le groupe CRC demandera un scrutin public sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement, qui vise à créer un Conseil scientifique et pédagogique dont les missions sont redondantes avec celles que doit remplir le Conseil pédagogique créé par l'article 21 du projet de loi.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 577.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 143 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante-cinq, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion des articles du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, d'orientation pour l'avenir de l'école.
Rappels au règlement
M. le président. La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Nous en avons déjà longuement débattu en début d'après-midi, mais je souhaite revenir sur l'organisation de nos travaux.
Aujourd'hui vendredi, à vingt et une heures quarante-cinq, il reste 292 amendements à examiner sur le projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école, c'est-à-dire la moitié, ou presque, du total des amendements déposés sur ce texte.
Cet après-midi, par un véritable coup de force, le Gouvernement et la majorité sénatoriale ont imposé au pied levé la tenue d'une séance demain samedi. Du jour au lendemain, il a fallu que les groupes se réorganisent pour permettre la tenue d'un débat digne et efficace. Une telle organisation de dernière minute est d'autant plus difficile que ce samedi est le quarante-troisième anniversaire de la signature des accords d'Evian, signés le 19 mars 1962 et établissant la paix en Algérie. Nous sommes très attachés à cette date et aux cérémonies qui s'y rapportent, car il est toujours important de célébrer la paix.
Il reste donc 292 amendements à examiner et, à l'heure où je vous parle, rien n'indique que nos débats seront achevés samedi soir.
M. Fillon a eu besoin d'une première prolongation et j'ai tendance à penser qu'il en aura besoin d'une seconde pour faire adopter son texte, toujours dans l'urgence, toujours dans la précipitation, c'est le moins que l'on puisse dire, et, de surcroît, en catimini, avant la réunion de la commission mixte paritaire prévue pour le mardi 22 mars par un gouvernement sur ce point inébranlable.
Mme Hélène Luc. Mais non ! Le ministre va repousser cette date...
Mme Annie David. N'oublions pas que cette obstination mise à imposer, après l'urgence déclarée, après la précipitation des débats, la CMP ce jour-là, conduit le Sénat à légiférer dans des conditions inadmissibles pour toute personne convaincue de la nécessité du débat parlementaire.
Nous sommes en première et unique lecture d'un texte important, lui-même objet d'un débat public, rappelons-le. D'ailleurs chacun se revendique de ce débat public, sans pour autant qu'il en ait été beaucoup tenu compte.
Cette peur du temps et, disons-le, cette peur de la démocratie ont amené la majorité sénatoriale à emboîter le pas au Gouvernement en bafouant les prérogatives de son assemblée.
Monsieur le président, pouvez-nous nous confirmer que des séances seront prévues la semaine prochaine pour que nous puissions conclure ce débat dans des conditions respectables ?
M. Bernard Vera. Très bien !
M. le président. Je vous donne acte de votre rappel au règlement, madame David.
Vous parlez de précipitation. Je tiens simplement à rappeler que, cet après-midi, en quatre heures quarante-cinq minutes de débat, nous avons examiné en tout et pour tout quarante-deux amendements.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Ce n'est pas de la précipitation !
M. le président. Je ne pense pas que cela puisse constituer le signe tangible d'une précipitation exagérée. Cela correspond à un rythme d'environ neuf amendements à l'heure, ...
Mme Annie David. A qui la faute ?
M. le président. ... soit un rythme à peu près convenable pour que chacun puisse, de manière tout à fait légitime, s'exprimer sur le fond.
Je suis dans l'impossibilité à cet instant de vous donner des précisions sur la suite de nos travaux. Il faut maintenant laisser les débats se poursuivre. Le Sénat a eu à se prononcer sur la demande formulée par le Gouvernement s'agissant de la tenue d'une séance demain, samedi. Nous ferons le point à l'issue de la séance de ce soir.
Une chose est sûre : nous avons délibéré conformément au règlement du Sénat, en respectant les procédures et en adoptant un rythme que je pense assez raisonnable pour l'examen des amendements.
Bien sûr, chacun d'entre nous a d'autres obligations. Mais nous souhaitons tous que ce débat puisse se dérouler dans les meilleures conditions. C'est en tout cas le voeu que je forme personnellement.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Très bien !
Mme Annie David. Il est regrettable qu'à l'origine on ait prévu si peu de temps pour l'examen d'un tel texte !
M. Yannick Bodin. Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. Yannick Bodin. Monsieur le président, vous venez vous-même d'en apporter la démonstration, nous avons eu, cet après-midi, la possibilité d'examiner un certain nombre d'amendements à un rythme qui a permis aux uns et aux autres de s'exprimer. C'est d'ailleurs ce que nous souhaitions, puisque nous ne voulions pas « bâcler » ce débat, malgré l'urgence déclarée.
Cela étant, il faut bien avouer qu'un tel rythme, que je n'hésite pas à qualifier de « sérieux », me fait craindre également que nous ne puissions pas avoir terminé nos travaux demain samedi. Je reste convaincu qu'il aurait été beaucoup plus sage, beaucoup plus raisonnable, d'interrompre nos travaux pendant le week-end pour les reprendre tranquillement à partir de lundi en prenant tout le temps nécessaire. C'était notre proposition, et elle reste valable.
Si nous devons siéger demain matin, vous serez obligé de lever la séance aux alentours de zéro heure trente, monsieur le président, et donc je crains fort que, demain soir, nous n'ayons à constater que nous sommes loin de la fin de nos travaux.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Nous continuerons dimanche !
M. Yannick Bodin. Je tenais à formuler de nouveau ces quelques remarques qui prouvent que la méthode adoptée n'était pas la bonne.
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, monsieur Bodin.
Mes chers collègues, pour ne pas prendre davantage de retard, je vous propose de poursuivre la discussion des amendements tendant à insérer un article additionnel après l'article 21.
Articles additionnels après l'article 21 (suite)
M. le président. L'amendement n° 553, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article L. 421-8 du code de l'éducation, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L.... ? Dans le cadre de la promotion de l'égalité des chances à l'école, il peut être constitué, dans chaque établissement public local d'enseignement, des équipes de réussite éducative composées de personnels de l'éducation nationale dont les effectifs devront être renforcés à cet effet. Ces équipes devront apporter un soutien éducatif, culturel, social et sanitaire aux enfants relevant de l'enseignement du premier et du second degré. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet amendement est satisfait par les articles 128 et 129 de la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale. Je demande donc aux auteurs de l'amendement de bien vouloir le retirer ; à défaut l'avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 390, présenté par M. Assouline, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 422-3 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
"L'école supérieure des arts appliqués aux industries de l'ameublement et d'architecture intérieure (Boulle), l'école supérieure des arts appliqués (Duperré) et l'école supérieure des arts et industries graphiques (Estienne) sont transformées en établissements publics locaux d'enseignement, conformément aux dispositions de l'article L. 421-1, à la demande de la commune de Paris. Par dérogation aux dispositions de l'article L. 214-6, la commune de Paris assume la charge de ces établissements. Elle exerce aux lieu et place de la région les compétences dévolues par le présent code à la collectivité de rattachement."
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, Paris est la ville d'Europe qui offre le plus grand choix d'établissements d'enseignement supérieur, 263 établissements au total.
Parmi ceux-ci, notre capitale est fière d'accueillir trois établissements essentiels à la pérennité d'une vie artistique riche notamment d'excellence dans les métiers d'art.
Il s'agit d'abord de l'école supérieure des arts appliqués Duperré, fondée en 1856 et de laquelle sortent chaque année cent cinquante diplômés en métiers de la création.
Il s'agit ensuite de l'école Estienne, née en 1883 de la volonté de créer une école municipale professionnelle des arts et industrie du livre et qui forme en quatre ans des graveurs, des lithographes, des doreurs, des typographes et des relieurs.
Il s'agit enfin de l'école supérieure d'arts appliqués aux industries du meuble et de l'architecture intérieure, c'est-à-dire la célèbre école Boulle, créée en 1886.
Ces trois écoles, qui sont aujourd'hui des écoles municipales, ont besoin, pour se développer, à l'instar de la plupart des établissements d'enseignement, d'une réelle autonomie de gestion comme celle dont jouissent les établissements publics. Néanmoins, la relation privilégiée nouée entre ces écoles et la Ville de Paris, qui les a soutenues et accompagnées depuis leur création, a besoin d'être préservée, car elle a permis et doit continuer de permettre d'inscrire pleinement ces établissements dans la vie culturelle de la capitale.
C'est pourquoi l'amendement que je soumets à votre examen prévoit de compléter les dispositions de l'article L. 422-3 du code de l'éducation par un alinéa transformant les écoles Boulle, Duperré et Estienne en établissements publics locaux d'enseignement, ou EPLE, rattachés, par dérogation, à la Ville de Paris.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Je suis personnellement très attaché au principe de subsidiarité. Si les élus parisiens le souhaitent, je ne vois donc pas d'inconvénient à ce que ces trois écoles d'arts appliqués puissent devenir des EPLE tout en conservant leurs liens historiques avec la Ville de Paris.
L'avis de la commission est donc favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, pour explication de vote.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je suis bien désolé pour mon camarade et ami David Assouline, mais je ne partage pas son appréciation. On peut, en effet, s'interroger : pourquoi ces trois écoles, et pas les autres ? Si pas les autres, pourquoi ? Si ces trois-là, pourquoi ? Comme je ne partage pas votre enthousiasme pour la subsidiarité dans ces domaines, monsieur le rapporteur, je ne suis pas favorable à cet amendement.
Je tenais à le dire, sinon ceux qui connaissent les liens qui m'unissent à David Assouline ne comprendraient pas pourquoi je ne lève pas la main en même temps que lui pour voter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Peut-être y a-t-il une certaine méconnaissance du dossier dans l'appréciation que peuvent porter les uns et les autres.
Mes chers collègues, ces trois écoles d'arts appliqués sont aujourd'hui trois écoles municipales dont nous voulons au contraire qu'elles rentrent dans le droit commun, ce qui leur permettra de bénéficier de ce dont bénéficient les lycées à Paris, qui ont des classes préparatoires, des possibilités d'autonomie de gestion et de recherche de financement.
Alors, pourquoi elles ? Tout simplement parce qu'elles sont attachées historiquement à la Ville de Paris et au département de Paris ; elles coûtent très cher à la Ville de Paris et, d'ailleurs, l'autre collectivité territoriale n'a pas prévu dans son budget - et elle n'a pas l'intention de le faire - les sommes que la Ville de Paris a, elle, prévues de longue date à ce titre dans son budget.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Je suis favorable à l'amendement de David Assouline, pour des raisons très particulières, qui honorent le principe de subsidiarité, monsieur Mélenchon.
Il est évident que la Ville de Paris a acquis une notoriété internationale dans le domaine des arts appliqués, notamment dans celui du meuble avec l'école Boulle et dans celui des arts et industries graphiques avec l'école Estienne.
Dès lors que la Ville de Paris revendique la responsabilité de ces établissements, nous aurions mauvaise grâce à ne pas la lui donner. Il faut au contraire soutenir très largement sa demande.
A cet égard, je voudrais rendre hommage à l'école Boulle, qui coopère avec de nombreuses régions de France, y compris la Lorraine, pour organiser la formation de ses élèves à partir de la restauration d'éléments du mobilier du patrimoine historique.
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.
M. Yves Pozzo di Borgo. A la mairie de Paris, je suis dans l'opposition. Toutefois, je voterai cet amendement et souscris à l'ensemble des arguments que David Assouline a développés.
Je n'ai pas consulté mes collègues de l'UMP conseillers de Paris, mais je pense qu'ils seraient d'accord avec moi.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.
Mme Hélène Luc. Je connais bien l'école Boulle pour l'avoir visitée et avoir rencontré son proviseur, qui présidait d'ailleurs le comité de défense des enseignements artistiques.
Cette école est loin de n'appartenir qu'à Paris : elle a un rayonnement national, sinon international.
Pour notre part, nous ne comprenons pas pourquoi la Ville de Paris souhaite prendre la charge financière de ces trois écoles. Mais vos raisons sont certainement légitimes, monsieur Assouline. C'est pourquoi nous ne prendrons pas part au vote.
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote.
M. Yannick Bodin. Les établissements qui, par cet amendement, bénéficieront du statut d'établissements publics locaux d'enseignement sont actuellement sous la responsabilité de la Ville de Paris. J'en prends acte.
Cela m'amène à parler du dialogue entre les différentes collectivités territoriales. En effet, la Ville de Paris souhaite que les autres établissements qui lui sont rattachés, en particulier un certain nombre de lycées professionnels, soient transférés ou « récupérés » par la région d'Ile-de-France.
A titre d'information, l'adoption de cet amendement - pour ma part, je m'en remets à la sagesse du Sénat, si j'ai le droit de m'exprimer ainsi ! (Sourires.) - ne manquera pas d'avoir des conséquences sur l'enthousiasme de la région d'Ile-de-France pour « récupérer » les autres établissements.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 21.
L'amendement n° 306, présenté par MM. Assouline, Bodin, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans le second alinéa de l'article L. 531-1, après les mots : « des ressources de la famille » sont insérés les mots : « et de la distance entre l'établissement scolaire et le domicile de l'élève » et après les mots : « code de la sécurité sociale », sont insérés les mots : « et du coût du transport entre le domicile et l'établissement scolaire. »
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Cet amendement s'inscrit dans le débat que nous avons depuis quelques jours sur l'ambition affichée par le Président de la République dans ce projet de loi, qui est de fixer des objectifs importants pour lutter contre l'échec scolaire et renforcer l'égalité des chances dans le système scolaire.
Nous en sommes loin, nous avons essayé de le démontrer, d'autant que rien n'a été fait pour augmenter le montant des bourses octroyées sur critères sociaux.
Comment atteindre ces louables objectifs, que toutes les formations attachées à l'école de la République partagent, sans améliorer l'aide sociale aux élèves ?
Notre amendement vise à compléter le code de l'éducation en ce sens. Ainsi, pour une famille, le coût de prise en charge d'un élève augmente avec son âge, d'autant que l'établissement qui doit l'accueillir, du fait d'une spécialisation particulière par exemple, peut se trouver éloigné du domicile familial.
Il convient donc d'intégrer, dans les critères d'attribution des bourses, le coût du transport entre le domicile et l'établissement scolaire.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Monsieur le président, au nom de la commission des finances, j'oppose l'article 40 de la Constitution.
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 306 n'est pas recevable.
chapitre V
Dispositions relatives à la formation des maîtres
M. le président. L'amendement n° 116, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Dans l'intitulé de ce chapitre, après le mot :
relatives
insérer les mots :
aux formations supérieures et
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de conséquence avec les nouvelles dispositions qui ont été introduites concernant les formations supérieures.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, l'intitulé du chapitre V est ainsi modifié.
Articles additionnels avant l'article 22
M. le président. L'amendement n° 117, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Avant l'article 22, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l'article L. 614-1 du code de l'éducation est complété par les mots : « , et du respect des engagements européens. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. L'article L. 614-1 du code de l'éducation dispose que les pouvoirs publics prennent les mesures indispensables à la cohésion du service public de l'enseignement supérieur, dans le cadre de la planification nationale ou régionale.
La politique d'enseignement supérieur s'inscrit désormais dans le cadre européen lié à la construction de l'espace européen de l'enseignement supérieur et de la recherche. L'application de celui-ci se traduit notamment par la mise en place du système LMD, licence-master-doctorat.
Il importe désormais d'inscrire cet engagement européen dans le code de l'éducation.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 22.
L'amendement n° 118, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Avant l'article 22, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le dernier alinéa de l'article L. 614-1 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Une large information est organisée au niveau national et régional, ainsi que dans les établissements scolaires et universitaires, sur les formations supérieures, l'évolution de leur organisation et de leur contenu ainsi que sur l'évolution des besoins de la société et de l'économie en termes de qualifications. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. L'article L. 614-1 du code de l'éducation concerne la mission des pouvoirs publics dans le domaine de la cohésion du service public de l'enseignement supérieur. Son dernier alinéa précise : « Une large information est organisée dans les établissements, les régions et le pays sur les formations universitaires, leur évolution et celle des besoins sociaux en qualification. »
Dans le souci de mieux articuler l'organisation de l'orientation entre l'enseignement secondaire et l'enseignement supérieur, et par coordination avec les amendements proposés par la commission, cet amendement tend à améliorer la rédaction de cet alinéa et à prévoir également l'information sur « l'évolution des besoins de la société et de l'économie en termes de qualifications ».
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Cette explication de vote sur l'amendement n° 118 est également valable pour les amendements nos 116 et 117, qui viennent d'être adoptés et auxquels nous étions opposés.
Les dispositions que ces amendements contiennent appellent de notre part plusieurs observations.
L'amendement n° 116, au-delà de son apparence strictement rédactionnelle, consacre de fait la transformation des instituts universitaires de formation des maîtres en éléments de l'enseignement supérieur de caractère banal, niant dans la pratique l'originalité et la spécificité de ces instituts.
Les articles 22 et 23 du projet de loi d'orientation consacrent en effet, quoi que certains puissent en dire, l'extinction progressive du statut des instituts universitaires de formation des maîtres et leur banalisation en unités de formation et de recherche « ordinaires » des universités.
Cette situation nie d'ailleurs l'un des aspects spécifiques de ces instituts, qui est de recruter des étudiants parfois, voire assez souvent, en dehors de l'académie dont ils dépendent.
Il n'est pas rare, pour ne donner qu'un exemple, que les élèves maîtres de l'IUFM de Paris ne soient pas des Parisiens, mais viennent des autres départements de la région d'Ile-de-France, voire de départements de province.
C'est la raison pour laquelle nous avons voté contre l'amendement n° 116, qui consacre cette orientation.
L'amendement n° 117 modifie le contenu de l'article L. 614-1 du code de l'éducation et touche à la question cruciale de la programmation de l'enseignement supérieur.
Cet amendement annoncerait-il le contenu du futur projet de loi d'orientation sur l'enseignement supérieur et la recherche, monsieur le ministre ? Cela commence assez mal !
L'amendement n° 118 n'est pas, quant à lui, des plus engageants. En effet, il consacre une évolution qui n'est pas que sémantique, puisqu'il abandonne la notion d'« évolution » pour celle d'« évolution de leur organisation et de leur contenu ». Dans le même ordre d'idée, la notion de « besoins sociaux en qualification » est délaissée au profit de celle d'« évolution des besoins de la société et de l'économie en termes de qualifications ».
Il est aisé de comprendre que ces amendements ne tendent ni plus ni moins qu'à instrumentaliser les formations et l'enseignement supérieur aux seuls impératifs de « création » d'une main-d'oeuvre qualifiée, ainsi que le demandent les entreprises de ce pays.
Nous passons donc d'un enseignement supérieur ouvert, susceptible, malgré ses difficultés, de répondre aux aspirations des étudiants, à un enseignement supérieur mercantilisé, utilitaire, s'inscrivant dans le prolongement d'une conception purement économiste et financière de la formation des individus.
Tout se passe comme si la dépense publique pour l'éducation devait se traduire par une rentabilisation d'un investissement opéré par la nation.
On rentre dans une logique étroite - aussi étroite que le socle commun de connaissances et de compétences d'ailleurs ! - d'instrumentalisation de l'université au seul bénéfice des besoins à court terme de main-d'oeuvre des entreprises.
Encore faudrait-il que les dirigeants de nos entreprises aient une conscience élevée des besoins réels du pays !
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons à rejeter l'amendement n° 118, même si les amendements nos 116 et 117 ont déjà été adoptés.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 22.
L'amendement n° 307, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l'article 22, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un rapport du Gouvernement sur la nécessité de mettre en place un plan de pré-recrutement à destination des étudiants de 2ème année universitaire qui s'engageraient dans les carrières de l'enseignement, est transmis au Parlement avant le 31 décembre 2005
La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Nous souhaitons que le Gouvernement puisse diligenter un rapport qui serait remis au Parlement, au plus tard à la fin de l'année 2005, pour expertiser les besoins en matière de pré-recrutement d'étudiants de deuxième année d'IUFM.
Toutes les études, notamment celles de l'OCDE, prédisent une grave pénurie d'enseignants d'ici à quelques années et ce, d'autant plus que, dans dix ans, la moitié de l'actuel corps enseignant sera partie à la retraite.
Ce pré-recrutement répondrait donc à un besoin réel et permettrait aussi aux étudiants de poursuivre des études dans des conditions optimales.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Avis défavorable.
La commission des affaires culturelles estime qu'une réflexion doit être engagée à ce sujet. Elle a d'ailleurs déposé à cette fin un amendement au rapport annexé.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 307.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 144 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 162 |
Pour l'adoption | 120 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Article 22
I. - L'intitulé du titre II du livre VI est ainsi rédigé : « Les formations universitaires générales et la formation des maîtres ».
II. - Le même titre est complété par un chapitre V ainsi rédigé :
« CHAPITRE V
« Formation des maîtres
« Art. L. 625-1. - La formation des maîtres est assurée par les instituts universitaires de formation des maîtres. Ces instituts accueillent à cette fin des étudiants préparant les concours d'accès aux corps des personnels enseignants et les stagiaires admis à ces concours.
« La formation dispensée dans les instituts universitaires de formation des maîtres répond à un cahier des charges fixé par arrêté des ministres chargés de l'enseignement supérieur et de l'éducation nationale après avis du Haut conseil de l'éducation. Elle fait alterner des périodes de formation théorique et des périodes de formation pratique. »
M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. Aujourd'hui, plus aucun métier de l'humain ne s'exerce seul. Nous pensons, pour notre part, qu'une conception du travail des enseignants en équipe est l'un des leviers de transformation de l'école.
Le travail d'équipe doit être abordé dans la formation initiale, au cours de laquelle il convient de rompre avec les logiques individuelles et exclusivement disciplinaires pour travailler aussi sur les comportements, les pratiques, les concepts opératoires, l'éthique professionnelle, les cohérences entre continuités et ruptures au sein du système scolaire.
Le progrès historique qu'a constitué la création des IUFM, les instituts universitaires de formation des maîtres, pour le primaire comme pour le secondaire, doit être clairement conforté. L' IUFM doit tout à la fois contribuer à la construction des professionnalités spécifiques à chaque métier de l'enseignement et favoriser la construction d'une culture commune des enseignants de la maternelle au supérieur.
Il doit, en particulier, permettre de dépasser les fausses oppositions entre théorie et pratique, entre enseignants « polyvalents » du primaire et enseignants « monovalents » du secondaire ; entre formation par les pairs ou par des « savants », et mettre l'accent sur les solidarités que les disciplines scolaires entretiennent entre elles.
C'est la continuité et la cohérence des enseignements, la construction de la « culture scolaire commune » qui sont ici en jeu.
La fonction enseignante s'est complexifiée : c'est le résultat de l'évolution des savoirs à enseigner, des connaissances didactiques et des progrès de la recherche en sciences de l'éducation, des évolutions rapides des publics scolaires et de leurs modes d'appropriation des connaissances, des pratiques de l'institution scolaire elle-même au plan pédagogique et, plus généralement, des attentes sociales envers l'école et ses personnels.
Il faut en mesurer les conséquences et cesser enfin de penser que le « terrain » ou la « vocation » suffirait à assurer l'essentiel.
La durée de la formation initiale doit être prolongée pour répondre à ces exigences et aux défis posés par la massification de la scolarisation des jeunes.
Nous proposons, tout d'abord, que soit mis enfin en place un plan de recrutement révisable à cinq ans, incluant des pré-recrutements rémunérés dès le baccalauréat, pour faire face aux besoins d'une transformation démocratique du système éducatif, en commençant par interrompre dès que possible le recours à des personnels vacataires ou précaires.
Nous souhaitons, ensuite, que soit également mis en place un plan de développement de la formation des maîtres, initiale et continue, en relation avec un plan de développement, diffusion et appropriation de la recherche en éducation, recouvrant notamment les sciences de l'éducation, les didactiques des disciplines, chaque enseignant ayant vocation à devenir un véritable enseignant-concepteur dans son champ d'intervention spécifique.
Nous proposons, enfin, que soient développés des programmes ambitieux de recherche à court et à long terme sur les thèmes de la formation et de la réussite scolaire.
Une attention toute particulière doit être attachée à la formation des formateurs en lien direct avec la recherche.
M. le président. Je suis saisi de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 308, présenté par MM. Bodin, Assouline, Collombat, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Enseigner est un métier qui exige l'acquisition de savoirs disciplinaires et de compétences pédagogiques au cours d'une formation qui allie la théorie et la pratique.
Les IUFM sont nés de cette volonté de permettre à l'ensemble des professeurs de bénéficier d'une véritable professionnalisation. Ils ont à peine quinze ans. Au cours de ces quinze années, ils ont subi des attaques venant de toutes parts.
C'est pourquoi, par cet amendement, nous souhaitons supprimer cet article, qui vise, d'une part, à fondre la formation des maîtres dans la formation universitaire, et, d'autre part, à renvoyer au pouvoir réglementaire - le cahier des charges étant arrêté conjointement par les ministres de l'enseignement scolaire et de l'enseignement supérieur après avis du Haut conseil de l'éducation - le soin de fixer la formation dispensée dans les IUFM.
Rien, aux termes de la loi, n'est dit sur cette formation, si ce n'est qu'elle fera « alterner des périodes de formation théorique et des périodes de formation pratique ».
Notre souhait est d'en rester à l'état actuel des choses, aucune évaluation sérieuse, aucun audit sur la gestion et le fonctionnement des IUFM n'ayant été transmis au Parlement préalablement à l'examen de ce projet de loi, ce qui, pourtant, aurait été la moindre des choses : on ne raye pas d'un trait de plume quinze années de gestion des IUFM, même si - nul ne le conteste - des ajustements auraient pu être prévus.
Monsieur le ministre, chacun aura compris que, sous couvert de l'application du LMD, le licence-master-doctorat, en intégrant les IUFM aux universités, vous signez, en réalité, leur arrêt de mort : dans quelques années - je suis malheureusement prêt à le parier - il n'y aura plus de formation spécifique au métier d'enseignant.
Nous nous opposons totalement à cette orientation et vous demandons de bien vouloir supprimer cet article, dont la mise en oeuvre sera lourde de conséquences pour l'école de demain.
M. le président. L'amendement n° 580, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Les troisième et quatrième alinéas de l'article L. 721-1 du code de l'éducation sont ainsi rédigés :
« La formation des enseignants est organisée sous l'égide des instituts universitaires de formation des maîtres. Elle met l'accent sur la transversalité des disciplines d'enseignement et sur le travail en équipe, pour faire de chaque enseignant un véritable enseignant-concepteur, capable d'élaborer des stratégies et dispositifs pédagogiques de lutte pour la réussite scolaire de tous adaptés à la réalité des élèves dont il a la charge. La formation, d'une durée de trois ans, ouvrant l'accès à un diplôme universitaire de niveau mastère et répondant à un cahier des charges qui assure une formation professionnelle en relation avec la recherche en didactique des disciplines et en sciences de l'éducation, prépare les futurs enseignants à la diversité des élèves et de leur situation. Elle comprend également des modules de formation spécifique pour la lutte contre les discriminations, notamment à caractère sexiste.
« Les instituts universitaires de formation des maîtres peuvent organiser des formations complémentaires, initiales et continues destinées aux personnels conseillers d'orientation, psychologues, assistants sociaux et ATOSS de l'éducation nationale. »
La parole est à Mme Hélène Luc.
Mme Hélène Luc. Nous abordons l'examen d'un article très important du projet de loi.
Les directeurs des trente et un IUFM qui avaient élaboré, en prenant totalement conscience de leur mission de service public d'enseignement supérieur, un projet ambitieux de véritable rénovation de la formation des maîtres, ont été surpris, pour ne pas dire choqués, des propositions de réforme du statut juridique des IUFM comme seule réponse à leurs attentes.
Ils n'ont jamais nié qu'il fallait continuer à les faire évoluer, à améliorer la formation des maîtres, même si celle-ci, au fil des années, avait déjà beaucoup progressé et reconnaissent eux-mêmes que l'ampleur qu'il faut donner à ces IUFM n'a pas encore été atteinte.
Pour mémoire, je rappelle que, pendant toutes ces années, les IUFM ont formé entre 20 000 et 30 000 enseignants par an.
Bien entendu, des remarques sont faites sur la formation des maîtres, mais cela me paraît tout à fait normal. Les jeunes stagiaires sont appréciés et leur présence est non seulement bien accueillie, mais, de plus, souhaitée dans la plupart des établissements.
Il faut dire qu'en treize ans des partenariats solides se sont noués entre les IUFM et leurs universités de rattachement et il est faux de dire que des difficultés majeures subsistent encore.
Des conventions ont été signées, qui définissent clairement les rôles complémentaires des deux structures. Les présidents d'université ont donc été surpris et ils n'approuvent pas la suppression des IUFM. Car c'est bien à cela qu'on arrive.
Si, comme le veulent certains d'entre vous, mes chers collègues de la majorité sénatoriale et de la majorité gouvernementale, la responsabilité des universités est transmise aux régions, qu'adviendra-t-il des instituts universitaires de formation des maîtres, qui seront alors non plus des instituts nationaux, mais des instituts régionaux ?
A ce propos, les concours de recrutement doivent encore davantage prendre en compte l'enseignement et les contenus que les futurs enseignants devront dispenser.
Pour notre part, nous sommes favorables, non seulement au pré-recrutement, mais aussi à l'octroi de bourses aux étudiants motivés qui veulent devenir enseignants et dont beaucoup appartiennent à des familles modestes
Pour favoriser la réussite de tous les élèves, l'éducation nationale doit s'appuyer expressément sur la recherche en matière d'éducation et favoriser l'investissement d'équipes en sciences humaines, pédagogiques et médicales, pour faire émerger les questions qui favorisent le renouvellement des pratiques et diffuser les plus efficaces auprès de tous les enseignants grâce à leur intégration dans le programme des IUFM et de la formation continue des enseignants.
La formation continue des enseignants est la grande absente, aussi bien de la situation actuelle que de ce projet de loi, notamment de son article 25, que nous examinerons plus tard.
Mme Hélène Luc. Elle est pourtant indispensable pour améliorer l'efficacité de l'enseignement, en particulier pour accompagner toutes réformes efficaces. Elle devrait donc constituer une ardente obligation pour les IUFM, aussi bien sous forme collective qu'individuelle.
M. le président. L'amendement n° 149, présenté par M. Charasse, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le début du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 625-1 du code de l'éducation :
Sous réserve de l'apprentissage, de la promotion et de la défense des principes et des valeurs de la République, la formation des maîtres est assurée...
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 631 rectifié bis, présenté par Mmes Morin-Desailly et Dini, MM. Détraigne et Nogrix, Mme Férat, MM. Pozzo di Borgo et J.L. Dupont et Mme Létard, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 625-1 du code de l'éducation :
Ils contribuent à la pré-professionnalisation des étudiants préparant les concours d'accès aux corps des personnels enseignants et d'éducation. Ils assurent en deux ans la formation professionnelle des stagiaires admis à ces concours.
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Tout le monde s'accorde à reconnaître que la formation initiale des enseignants ne les prépare que partiellement et de façon imparfaite à leur confrontation avec la réalité du métier, qui a, par ailleurs, beaucoup évolué.
Une année de formation s'avère notablement insuffisante. D'ailleurs, depuis plusieurs années, des dispositifs d'accompagnement de l'entrée dans le métier durant les deux années qui suivent la sortie de l'IUFM ont été mis en place par l'éducation nationale.
Alors qu'il est proposé, dans le projet de loi, que soit conservée la formation initiale actuelle, la première année étant consacrée à la préparation des concours, la seconde, à la formation des stagiaires, le présent amendement a pour objet de mieux préparer les futurs enseignants à un métier complexe dont l'exercice est de plus en plus difficile.
C'est pourquoi, allant dans le sens des préconisations de la commission Thélot, cet amendement vise à instituer une formation de deux années à l'IUFM permettant aux stagiaires d'acquérir une véritable formation professionnelle, disciplinaire et pédagogique.
Le rapport Thélot notait la nécessité de mieux recruter les enseignants par un concours en deux temps, l'un validant les compétences disciplinaires, l'autre, après formation, les compétences professionnelles.
Il ajoutait qu'une réforme des IUFM, fondée sur l'alternance favorisant la présence dans les classes et dans les établissements, permettrait de mieux former les futurs enseignants.
En effet, le maintien du système actuel de formation, alors que 40 % du personnel enseignant doit être renouvelé au cours des dix prochaines années, serait une occasion manquée.
M. le président. L'amendement n° 134 rectifié bis, présenté par Mmes Férat et Dini, MM. Détraigne et J.L. Dupont, Mmes Morin-Desailly et Payet et M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 625-1 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée :
Ils dispensent également la formation des personnels d'éducation.
La parole est à Mme Françoise Férat.
Mme Françoise Férat. Aux côtés des personnels enseignants, les personnels d'éducation, au premier rang desquels les personnes en charge de la vie scolaire, jouent un rôle primordial dans le système éducatif. Est-il nécessaire de le rappeler ce soir ?
Si certains profitent déjà des formations dispensées par les IUFM, d'autres n'y ont pas accès. Il est donc indispensable d'assurer une égalité de formation entre ces corps sur l'ensemble du territoire.
M. le président. L'amendement n° 426, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 625-1 du code de l'éducation, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Elle comprend obligatoirement un mois de stage dans une entreprise.
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Le monde de l'économie et le monde de l'éducation s'ignorent trop souvent. Pourtant, lorsqu'ils se rencontrent, ils font de très belles choses.
Un système éducatif performant doit donner la possibilité aux élèves d'avoir une idée du monde dans lequel ils vont vivre. Il est donc normal que les enseignants qui vont leur donner une perception de ce monde en maîtrisent la réalité.
Cet amendement tend à ce que le cursus actuel d'un enseignant - école maternelle, école élémentaire, collège, lycée, université ou IUFM - soit enrichi par un stage obligatoire d'un mois dans une entreprise. Tel est d'ailleurs le cas, me semble-t-il, pour les stagiaires de l'Ecole nationale d'administration, l'ENA.
Pour des raisons de disponibilité et d'organisation, et afin ne pas alourdir les périodes de cours, ce stage pourrait être effectué durant les vacances, hors des sessions de l'IUFM.
M. le président. L'amendement n° 309, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit la première phrase du second alinéa du texte proposé par le II cet article pour l'article L. 625-1 du code de l'éducation :
La formation dispensée dans les instituts universitaires de formation des maîtres est conduite par la direction de chaque institut, conformément au cahier des charges fixé par arrêté des ministres en charge de l'Education nationale et de l'enseignement supérieur.
La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Cet amendement tend à préciser que la direction de chaque IUFM restera compétente pour conduire les actions de formation que celui-ci dispense.
L'article 22 prévoit qu'un cahier des charges sera défini « par arrêté des ministres chargés de l'enseignement supérieur et de l'éducation nationale après avis du Haut conseil de l'éducation ». Cette disposition est inquiétante, car elle n'est pas suffisamment précise.
Nous pensons que le fait que les IUFM dépendent désormais de l'université est le signe qu'ils ont vocation à disparaître en tant que tels.
Alors qu'il apparaît nécessaire de renforcer la professionnalisation des enseignants et que le rapport Thélot préconise une année supplémentaire de professionnalisation, vous comprendrez notre inquiétude.
L'adoption de cet amendement permettrait de nous rassurer !
M. le président. L'amendement n° 119, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Dans la première phrase du second alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 625-1 du code de l'éducation, après les mots :
cahier des charges fixé par
remplacer le mot :
arrêté
par le mot :
décret
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission estime que la définition du cahier des charges auquel devront se conformer les IUFM pour organiser les formations qu'ils dispensent doit relever d'un décret plutôt que d'un arrêté.
Toutefois, il est vrai que cette formule est plus lourde. Comme je suis favorable à la simplification, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 119 est retiré.
L'amendement n° 578, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
A la fin de la première phrase du second alinéa du texte proposé par le II de cet article, pour l'article L. 625-1 du code de l'éducation, supprimer les mots :
après avis du Haut conseil de l'éducation
La parole est à Mme Eliane Assassi.
Mme Eliane Assassi. Il s'agit d'un amendement de cohérence.
Selon le rapport annexé, qui n'a pas valeur de loi, le Haut conseil de l'éducation sera un organe consultatif indépendant.
Avec tout le respect que je dois aux auteurs de ce texte, permettez-moi toutefois de douter de l'indépendance de cette instance, appelée à remplacer le Conseil national des programmes et le Haut conseil de l'évaluation de l'école.
En effet, ces derniers sont composés de personnalités appartenant au monde de l'éducation, de représentants syndicaux et des usagers du service public de l'éducation nationale.
Le projet de loi ne précise pas selon quels critères seront désignés les neufs membres du Haut conseil de l'éducation. Je rappelle que trois de ses membres seront désignés par le Président de la République, deux par le président de l'Assemblée nationale, deux par le président du Sénat et deux par le président du Conseil économique et social. Son président sera désigné par le chef de l'Etat.
Ce mode de désignation fait craindre une politisation de cette nouvelle instance, ce qui serait fort regrettable.
Sauf si une explication crédible nous est donnée ce soir sur ce point, nous vous demandons de voter le présent amendement.
M. le président. L'amendement n° 425, présenté par M. Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 625-1 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Chaque enseignant doit maîtriser, en dehors du français, au moins une langue européenne quelle que soit sa matière d'enseignement. »
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Monsieur le président, je souhaite rectifier cet amendement en remplaçant les mots « chaque enseignant » par les mots « chaque nouvel enseignant », afin que ne me soit pas opposé l'article 40 de la Constitution et que les responsables financiers du ministère de l'éducation nationale ne s'arrachent pas les derniers cheveux qui leur restent !
Cet amendement vise à ce que les 30 000 enseignants qui seront recrutés tous les ans au cours des cinq prochaines années maîtrisent, en dehors du français, au moins une langue européenne, quelle que soit leur matière d'enseignement.
Cela peut paraître redondant avec la certification en langues prévue dans le rapport annexé, mais il est nécessaire, me semble-t-il, de mettre ce texte en perspective avec notre environnement européen et de donner une réalité à la pratique d'au moins une langue vivante étrangère prévue dans le socle commun. Cette disposition devrait affirmer la détermination de la France à rattraper son retard dans le domaine de la maîtrise des langues étrangères.
Au-delà de cet amendement, nous pourrions imaginer que chaque enseignant passe au moins une année de formation ou d'enseignement dans un pays européen et puisse enseigner sa matière dans une autre langue que le français. Mais ce sont des rêves !
Au cours de la discussion générale, notre collègue Françoise Férat a évoqué le plan d'action qui « entend généraliser sur notre territoire l'idée actée à Lisbonne en 2000 d'une Europe de la connaissance » et qui « constitue donc une base de propositions permettant à chaque pays membre de prendre des mesures concrètes afin de promouvoir l'apprentissage des langues et la diversité linguistique ».
Adopter cet amendement serait montrer que cette ambition européenne n'est pas qu'un voeu pieux.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 425 rectifié, présenté par M. Pozzo di Borgo, qui est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 625-1 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Chaque nouvel enseignant doit maîtriser, en dehors du français, au moins une langue européenne quelle que soit sa matière d'enseignement. »
L'amendement n° 579, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le II de cet article pour l'article L. 625-1 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Les missions particulières et la spécificité de la profession d'infirmier(e) dans le système éducatif, nécessitent, en plus de la formation initiale, une formation spécifique qui se fait dans un institut de formation des maîtres, avec les personnels d'enseignement et d'éducation. »
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Cet amendement concerne la spécificité de la formation d'infirmier dans le système éducatif.
Les études débouchant sur l'obtention d'un diplôme d'infirmier comportent 4 760 heures de cours, dont 2 240 heures théoriques, quand un DEUG scientifique en comporte seulement 1 400.
Les compétences des infirmiers scolaires prendraient tout leur sens si leur souhait de pouvoir suivre une formation spécifique complémentaire dans le cadre des IUFM était entendu.
La notion d'équipe pluriprofessionnelle est enrichissante à tous points de vue pour l'élève, de la maternelle à la fin de son parcours scolaire. Elle éclaire la pédagogie de l'enseignant et les difficultés scolaires de l'élève, qu'elles soient passagères ou plus profondes, physiques, morales ou psychologiques.
Et puisqu'il est question d'économies, il serait très intéressant de chiffrer la réduction des dépenses de santé provenant du travail des infirmières scolaires en matière d'éducation à la santé, à l'hygiène corporelle et de prévention.
La formation en IUFM des infirmiers scolaires devrait permettre une intégration intelligente de leur travail dans celui des équipes enseignantes et des professionnels de l'éducation, et ce pour le bien-être de nos enfants.
Tel est le sens du présent amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Au nom de la commission des finances, j'oppose l'article 40 de la Constitution sur les amendements nos 580, 631 rectifié bis et 579.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 580, 631 rectifié bis et 579 ne sont pas recevables.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 308, qui est contraire à la position qu'elle a adoptée. Elle souscrit en effet à la réforme des IUFM et de la formation des maîtres.
La commission est défavorable à l'amendement n° 134 rectifié bis. J'ai bien écouté vos propos, madame Férat, mais la notion de « personnels d'éducation » apparaît très large. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement.
L'amendement n° 426 me semble être satisfait par celui de la commission sur le rapport annexé, qui prévoit l'organisation de stages destinés à permettre une meilleure connaissance de l'environnement socio-économique. Le cahier des charges national en précisera les modalités. Je vous demande donc, monsieur Pozzo di Borgo, de bien vouloir retirer votre amendement.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 309. Aux termes de l'article L.713-9 du code de l'éducation, qui s'appliquera désormais aux IUFM, « le directeur de l'institut ou de l'école prépare les délibérations du conseil et en assure l'exécution ».
Il convient donc de s'inscrire dans ce cadre, de reconnaître la responsabilité que devront désormais assumer les universités en matière de formation des enseignants et d'affirmer que la coordination devra s'instaurer entre l'institut et l'université. Il n'est pas nécessaire, me semble-t-il, d'apporter dans le projet de loi des précisions supplémentaires, qui. sont d'ordre réglementaire.
La commission est également défavorable par cohérence à l'amendement n° 578.
En ce qui concerne l'amendement n° 425, le rapport annexé prévoit en effet que les futurs enseignants devront maîtriser au moins une langue étrangère. La loi n'a pas vocation à entrer dans le contenu des formations et des enseignements, lequel sera fixé par décret dans un cahier des charges. La commission émet donc, pour cette raison, un avis défavorable sur cet amendement. Toutefois, sur le fond, je suis, bien entendu, d'accord avec vous, monsieur Pozzo di Borgo. Je vous demande néanmoins de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Avec cet article, nous abordons un point très important de ce projet de loi, à savoir la formation des enseignants.
Nous allons devoir renouveler 150 000 enseignants au cours des cinq prochaines années. Nous avons donc besoin d'une vision d'avenir pour la formation des maîtres dans notre pays.
La loi de 1989 avait créé les IUFM et fait disparaître les écoles normales d'instituteurs et les centres pédagogiques régionaux chargés de former les professeurs du second degré.
Elle leur avait également confié la préparation de tous les concours d'enseignants au niveau de la licence, seule l'agrégation continuait d'être préparée sous la responsabilité exclusive des universités.
Les IUFM sont alors devenus des établissements d'enseignement supérieur, avec un statut d'établissement public administratif.
En réalité, les IUFM définis par la loi de 1989 sont restés depuis leur création dans une situation ambiguë et inconfortable.
Leur autonomie n'était en effet ni vraiment universitaire, ni vraiment professionnelle. Jusqu'à présent, les IUFM n'ont été ni complètement reconnus par les universités, ni capables de fonctionner effectivement sur le modèle des écoles professionnelles.
Je reconnais, bien sûr, les efforts, les progrès, les réussites de ces instituts, même s'il faut bien constater que tous les IUFM n'ont pas su convaincre jusqu'à présent.
Mais je sais aussi que le défi de la formation initiale des enseignants n'est et ne sera jamais facile à relever. C'est la raison pour laquelle je propose de fonder la formation des maîtres sur des bases nouvelles pour leur permettre de faire face à leur mission, qui est fondamentale pour l'éducation nationale.
Mon projet de réforme de la formation des maîtres veut ouvrir une nouvelle époque pour les IUFM. Je propose deux mesures fondamentales, qui sont déclinées dans le rapport annexé et qui sont visées principalement dans les articles 22 et 23 du projet de loi.
En premier lieu, la formation des enseignants, qui sont des fonctionnaires de l'Etat, doit obéir à des principes, à un cadre et à des modalités qui correspondent effectivement aux attentes de l'Etat et de la nation. C'est la raison pour laquelle je propose que la formation dispensée dans les IUFM réponde à un cahier des charges national, fixé après avis du Haut conseil de l'éducation.
Ce cahier des charges aura ainsi un statut beaucoup plus solennel, beaucoup plus fort et beaucoup plus exigeant que les circulaires par lesquelles, jusqu'à présent, on a cherché à cadrer, avec plus ou moins de succès, la formation des enseignants.
Il s'imposera aux IUFM ainsi qu'aux universités qui accepteront la responsabilité de cette formation et il fera l'objet d'une évaluation régulière dans le cadre de la politique contractuelle des établissements d'enseignement supérieur.
Ce cahier des charges national comprendra trois axes : l'approfondissement disciplinaire, la formation pédagogique et la formation du fonctionnaire du service public de l'éducation.
Ces volets correspondent aux trois priorités qui fondent l'identité professionnelle et l'autorité des professeurs du premier comme du second degré : la maîtrise des savoirs à transmettre, la capacité des enseignants à s'adapter à leurs élèves dans leur diversité, enfin, la connaissance de leurs droits et de leurs devoirs de fonctionnaires d'Etat et la capacité à comprendre le fonctionnement de l'éducation nationale.
Le cahier des charges précisera également les modalités d'organisation de la formation dans sa relation avec les classes et les établissements scolaires. Cette formation ne se résumera pas à une simple juxtaposition de formation théorique et pratique, mais reposera sur le principe d'une alternance effective qui sera organisée concrètement par des conventions entre les IUFM et les universités d'appartenance, d'une part, et les services académiques, d'autre part.
Quant aux formateurs des IUFM, ils seront soit des enseignants-chercheurs, soit progressivement des enseignants venant du premier ou de second degré, mais qui garderont un contact direct avec la pratique dans les classes.
En second lieu, et c'est une mesure essentielle de mon projet, la responsabilité de la formation des enseignants sera confiée aux universités et les IUFM seront résolument placés dans les universités avec le statut d'écoles faisant partie des universités.
Sur ce point encore, il faut avancer. Les IUFM ne peuvent plus rester en dehors des universités et les universités doivent s'impliquer beaucoup plus fortement dans la formation des enseignants. Cela suppose l'intégration de chaque IUFM dans une université qui deviendra ainsi réellement responsable de la formation des enseignants.
Mais, naturellement, il ne faut pas que cette intégration aboutisse à ce que les IUFM soient dissous dans l'université et perdent toute capacité à conduire, au sein de celle-ci, la mission qui leur a été confiée. C'est pourquoi on ne doit plus se contenter de demi-mesure ni chercher à concocter je ne sais quel statut spécifique aux IUFM qui laisserait de nouveau ces établissements à la fois dans et hors les universités.
Je vous propose donc d'appliquer aux IUFM le statut d'école faisant partie d'une université régi par l'article L.713-9 du code de l'éducation. C'est la seule possibilité cohérente pour atteindre l'objectif qui a été fixé par les auteurs du projet de loi.
J'en attends les avantages suivants : la garantie de la valeur des enseignements qui sont dispensés par les IUFM - et c'est le rôle de l'université -, le renforcement des liens de la formation des maîtres avec la recherche universitaire, la facilitation de l'intégration progressive de cette formation dans l'architecture européenne des diplômes, enfin, l'implication des universités dans la formation continue des enseignants. Cette intégration se fera dans un délai de trois ans à partir de la publication de la présente loi et en fonction d'un appel à candidatures permettant à chaque académie de retenir l'université qui acceptera de prendre cette responsabilité, si importante pour notre pays.
Dans le cas où cette université ne disposerait pas de toutes les filières correspondantes aux formations offertes par l'IUFM, elle sera alors conduite à passer convention avec d'autres universités.
C'est donc à prendre un véritable tournant que ce projet de loi vous invite. C'est une nouvelle alliance permettant de concilier la liberté universitaire et la responsabilité de l'Etat qu'il s'agit de construire.
Les effets de ce véritable changement de modèle pour la formation des enseignements se feront progressivement sentir. Ce changement permettra à notre pays de bénéficier enfin d'une formation des maîtres pleinement universitaire et professionnelle. Cela devra se faire dans le respect du cahier des charges national fixé par l'Etat, qui continuera donc d'assumer toutes ses responsabilités dans ce domaine si important pour l'avenir de notre école.
Dès lors, le Gouvernement est favorable aux amendements n°s 116, 117...
M. le président. Monsieur le ministre, vous vous trompez de série ; le vote sur ces amendements est déjà intervenu.
M. Jean-Marc Todeschini. Même le ministre ne s'en sort plus !
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 308, qui tend à supprimer un article fondamental.
Il est défavorable à l'amendement n° 134 rectifié bis. En effet, la notion de personnel d'éducation n'a aucune réalité législative. Aucune loi ne la définit. Intégrer cette notion dans le projet de loi générerait une ambiguïté à l'égard de la catégorie des personnels réellement concernés. Cela n'enlève rien au fait que les IUFM ont aujourd'hui vocation à former les conseillers principaux d'éducation, puisque c'est essentiellement de cela qu'il s'agit. Cette mission sera confirmée à l'avenir. Je souhaite donc que l'amendement n° 134 rectifié bis soit retiré.
J'en viens à l'amendement n° 426. Il n'est pas nécessaire que tous les enseignants, en particulier ceux du primaire, aient une connaissance du monde de l'entreprise. Par ailleurs, le rapport annexé précise, en son alinéa 54, que les enseignants bénéficient pendant leur formation initiale d'une information sur la vie économique et de stages de découverte des entreprises. Enfin, les futurs professeurs des lycées professionnels des disciplines technologiques et les conseillers principaux d'éducation effectuent d'ores et déjà un stage en entreprise. Nous ne proposons pas de modification de cette modalité. Par conséquent, monsieur Pozzo di Borgo je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement, qui est largement satisfait.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 309 et 578.
Pour ce qui concerne l'amendement n° 425 rectifié, obligation est faite à tous les enseignants du premier degré de maîtriser une langue étrangère. C'est un effort important. Il est impossible aujourd'hui d'imposer brutalement cette règle à l'ensemble des enseignants, y compris les nouveaux, qui vont être formés, soit 30 000 par an.
L'obligation doit, dans un premier temps, concerner les enseignants du primaire parce que ce sont eux qui vont enseigner la première langue étrangère à l'école primaire. Parallèlement, il convient de favoriser le plus possible la certification en langue pour les professeurs de l'enseignement secondaire. Dans une deuxième étape, il sera peut-être possible de satisfaire l'ambition, pour le moment un peu démesurée par rapport aux moyens dont nous disposons, affichée par M. Pozzo di Borgo.
Même si je partage son point de vue sur le principe, je lui demande de retirer cet amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable..
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur le ministre, vous venez de nous présenter la philosophie de votre réforme. J'apprécie l'effort que vous faites. Vous avez rappelé que les IUFM ont été créés en 1989. Il est évident que c'était une démarche expérimentale puisque l'on passait du système des écoles normales d'instituteurs et des centres régionaux de formation à un système qui reportait la responsabilité de la formation sur de nouveaux établissements qui devaient travailler en parfaite harmonie et relation avec une université.
Je ne peux qu'adhérer à vos propos relatifs à la formation des enseignants et à la nécessité d'un cahier des charges, qui serait national.
Je veux revenir cependant sur une discussion que nous avons eue. Vous évoquez un cahier des charges national pour donner plus de poids au rôle que nous souhaitons assigner aux IUFM.
En déposant l'amendement n° 119, la commission avait préféré que le cahier des charges soit fixé par décret, avec toutes les difficultés qui s'attachent à ce concept, et non par arrêté, procédé qui lui paraissait un peu succinct, un peu moins important, un peu moins solennel, adjectif que vous avez vous-même utilisé. Soit ! Si votre préférence va à l'arrêté plutôt qu'au décret, je me rangerai à votre volonté.
Mais même si le dispositif est un peu plus compliqué, je crois que nous avons tort de ne pas solenniser la fixation du cahier des charges et de ne pas utiliser la procédure du décret plutôt que celle de l'arrêté.
J'en viens à la révolution que vous introduisez. En effet, le rattachement d'une façon institutionnelle à une université est une mesure importante et nouvelle. « Institut universitaire de la formation des maîtres » : il est bien normal qu'un institut universitaire soit parfaitement intégré dans l'université, mais dans quelle université ?
Si l'on se prend à rêver et si l'on envisage une évolution, sans doute lente et difficile, vers des rapprochements universitaires, même s'ils sont centrés sur une métropole importante régionale, l'idéal serait de pouvoir intégrer l'institut universitaire de formation des maîtres à cette sorte de centre interuniversitaire. En l'occurrence, ce n'est pas possible.
Vous nous proposez donc, monsieur le ministre, l'intégration de l'IUFM à l'une des universités qui sera amenée à passer parallèlement toutes conventions nécessaires avec d'autres universités. En effet, toutes les disciplines ne sont pas enseignées dans toutes les universités. Il est bien normal que l'on fasse appel aux autres universités pour qu'elles dispensent les compétences et les formations complémentaires nécessaires.
Je vous donne bien volontiers acte du fait qu'il faut jouer le jeu à fond.
Par conséquent, vous nous proposez que, dans le respect d'un cahier des charges national, les IUFM soient dotés d'un statut d'école, qu'ils soient rattachés à une université et qu'ils aient la possibilité de passer des conventions avec les autres universités.
Ce dispositif est parfait, mais il faudra, malgré tout, que nous réfléchissions ensemble - ce que nous allons certainement faire dans la suite de cette discussion - aux rôles respectifs du président de l'université dans laquelle l'IUFM sera intégré et de ceux qui auront la responsabilité de la gestion quotidienne et de l'animation de l'IUFM.
Faut-il, comme nous le souhaitons, qu'une proposition soit formulée par le directeur, ou faut-il simplement rappeler dans le cahier des charges national l'organisation de la formation des maîtres ? Nous en discuterons tout à l'heure, mais je me rangerai à ce qui nous paraîtra le plus opportun pour que la réelle intégration des IUFM soit réussie.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote sur l'amendement n° 308.
Mme Hélène Luc. Le groupe CRC votera cet amendement de suppression.
Je souhaite vous donner lecture de la déclaration qui a été faite par la conférence des trente et un directeurs d'IUFM, qui s'est réunie à Paris les 27 et 28 janvier 2005 et qui a analysé le projet de loi d'orientation pour l'avenir de l'école.
« Par la présente, ils attirent solennellement votre attention.
« Les directeurs approuvent l'ancrage mieux affirmé des instituts au sein du système universitaire français.
« La conférence des directeurs tient à réaffirmer le caractère national et pluridisciplinaire des IUFM qui ont pour mission de former, pour la nation, tous les professeurs des écoles, des collèges, des lycées généraux et professionnels, ainsi que les conseillers principaux d'éducation et les enseignants spécialisés.
« L'état actuel du projet de loi, en particulier la référence à l'article L. 713-9, ne garantit pas le caractère pluridisciplinaire de la formation, notamment dans le cas où, par exemple, l'intégration de l'IUFM devrait se faire dans un établissement à dominante scientifique ou littéraire.
« Un tel dispositif risque aussi de compromettre le caractère national de la formation des enseignants par une disparité de la mise en oeuvre des missions et du traitement de chaque institut lors de son intégration.
« La formation des enseignants de l'école publique est de la responsabilité de l'Etat. Pour mettre en oeuvre le cahier des charges arrêté par le ministre après avis du Haut conseil de l'éducation, le fonctionnement des IUFM doit être assuré par des moyens spécifiques, humains et financiers, équitables, délégués aux instituts. [...]
« Les directeurs d'IUFM proposent que ce projet de loi soit amendé. [...] »
Je tenais à vous lire cette déclaration que j'approuve et qui permet de comprendre pourquoi nous voterons l'amendement n° 308.
M. Philippe Goujon. Surtout, que rien ne change !
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote.
M. Yannick Bodin. Il me semble que les propos de M. le ministre sur l'avenir des IUFM pourraient assez rapidement faire l'objet d'un consensus, chacun pouvant s'entendre sur le fait que les enseignants doivent être formés au niveau universitaire et dans l'excellence, car il est absolument nécessaire que tous les enseignants puissent avoir le niveau de connaissances le plus élevé possible.
C'est la fin d'une querelle historique dans ce pays, puisque, jusqu'à une certaine époque, il y avait ceux qui enseignaient en lycée et qui avaient suivi des études universitaires, et les instituteurs qui « allaient dans les campagnes » et qui n'avaient pas, eux, de formation universitaire.
Il est vrai que les instituteurs n'enseignaient pas dans les mêmes conditions que les professeurs, puisque la transmission du savoir consistait, pour ceux qui enseignaient dans les lycées, à « réciter ce qu'ils savaient » - n'y voyez rien de péjoratif - devant des élèves qui étaient plutôt motivés et attentifs du fait du mode de recrutement d'alors.
En revanche, les instituteurs devaient trouver d'autres moyens que celui de l'art oratoire pour faire en sorte que ce qui était alors considéré comme le socle commun soit acquis par l'ensemble des petits Français.
Avec la massification de l'enseignement et dès lors que tous les élèves ont commencé à atteindre le niveau du lycée, il a fallu adopter une conception plus synthétique de l'enseignement.
La création des IUFM a d'abord répondu à cette préoccupation., les deux écoles de pensée étant alors fusionnées Or, je crains que nous n'assistions à un retour en arrière si l'on considère que les lycéens d'aujourd'hui sont les mêmes que ceux d'il y a trente ou quarante ans.
Je ne mets pas en cause la formation universitaire des futurs maîtres, je déplore seulement que l'on n'accorde pas un temps de professionnalisation suffisant à ceux qui vont avoir en charge de former l'ensemble de la jeunesse française.
En effet, sortant d'un cursus universitaire, les futurs professeurs ne sont que quelques semaines, voire quelques mois dans l'année au contact des élèves. Vous faisiez référence, monsieur le ministre, il y a peu, à la formation des médecins dans les CHU. Or, ils sont très rapidement au cours de leur formation, et pendant des années, au contact des malades.
Nous savons pourtant que le métier d'enseignant est de plus en plus difficile, car il ne s'agit pas uniquement de transmettre un savoir ; l'enseignant doit avoir une ouverture sur la société, sur le monde, sur l'économie, sur l'entreprise. Sa tâche a une dimension éducative, il doit aussi accompagner l'orientation, qui n'est pas uniquement réservée aux spécialistes.
C'est un travail qui est devenu beaucoup plus difficile, qui comporte une partie théorique et une partie pratique. Il faut l'apprendre et c'est pourquoi une véritable professionnalisation devrait comporter deux ans après la première année de fin de cycle universitaire.
Nous nous opposons donc à votre projet et nous espérons en présenter un nouveau dans quelque temps ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Roger Karoutchi. Dans longtemps !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 308.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 145 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 328 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 165 |
Pour l'adoption | 126 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 134 rectifié bis est-il maintenu, madame Férat ?
Mme Françoise Férat. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L'amendement n° 134 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 426 est-il maintenu, monsieur Pozzo di Borgo ?
M. Yves Pozzo di Borgo. Oui, monsieur le président, je le maintiens.
Je ne suis en désaccord ni avec la commission ni avec le Gouvernement, mais j'ai la volonté de solenniser l'amendement que j'ai déposé et je m'en remets donc à la sagesse de mes collègues.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 426.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 146 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 207 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 104 |
Pour l'adoption | 38 |
Contre | 169 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 309.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 147 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 125 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
La parole est à Mme Eliane Assassi, pour explication de vote sur l'amendement n° 578.
Mme Eliane Assassi. Mon explication de vote exprimera en quelque sorte un mouvement d'humeur ! (Ah ! sur les travées de l'UMP.)
Depuis que je participe aux travaux de la Haute Assemblée, il est parfois arrivé que certains de vos collègues, monsieur le ministre, me reprochent de me montrer trop vive en défendant des amendements déposés par mon groupe.
Cependant, s'agissant de l'amendement n° 578, je crois m'être montrée prudente : usage de formules de politesse, verbes au conditionnel, tout y était, ou presque...
Ainsi, j'ai usé de précautions pour évoquer les doutes que je nourrissais quant à l'indépendance du Haut conseil de l'éducation, au regard des critères qui prévaudront pour désigner ses membres.
Je suppose que vous avez entendu mes arguments, monsieur le ministre, ...
M. Roger Karoutchi. Oui ! Un peu trop, même ! Je les connais par coeur !
Mme Eliane Assassi. ...du moins je l'espère, mais, de toute évidence, vous refusez d'y répondre, ou plutôt vous y répondez par un rapide et banal « avis défavorable ».
M. David Assouline. La pédagogie, c'est la répétition !
Mme Eliane Assassi. Dont acte, mais ce silence, puisque c'est ainsi que j'interprète votre attitude, valide l'amendement n° 578 présenté par mon groupe.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Todeschini. Je voudrais rappeler pourquoi le groupe socialiste est opposé à la création du Haut Conseil de l'éducation, comme je l'avais déjà indiqué avant que nous n'entamions la discussion des articles.
M. le ministre a décidé de mettre en place une sorte d'autorité administrative indépendante, qui serait compétente pour se prononcer, à sa demande bien sûr, sur les questions relevant des domaines de la pédagogie, des programmes, de l'évaluation des connaissances des élèves, de l'organisation et des résultats du système éducatif, de la formation des enseignants, et j'en passe.
Cette nouvelle structure va donc se substituer à deux instances existant actuellement, le Haut Conseil de l'évaluation de l'école et le Conseil national des programmes, qui étaient composées de personnes qualifiées : enseignants, chercheurs, représentants des partenaires et des usagers de l'école, ainsi que des syndicats, des associations de parents d'élèves et des élus.
Ainsi, cinquante-six personnes expérimentées seront remplacées par neuf personnalités, dont on nous dira, bien entendu, qu'elles seront sélectionnées selon des critères de compétence. Cependant, on peut douter de leur indépendance et de leur neutralité, puisque, je le rappelle, elles seront désignées par le Président de la République, par le président du Sénat et par le président de l'Assemblée nationale.
C'est donc une véritable reprise en main politique du système éducatif de notre pays qui nous attend demain. (M. Jean-Pierre Sueur approuve.) C'est pourquoi nous ne pouvons que soutenir cet amendement du groupe CRC. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 578.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 148 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 126 |
Contre | 201 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Monsieur Pozzo di Borgo, l'amendement n° 425 rectifié est-il maintenu ?
M. Yves Pozzo di Borgo. La commission et le Gouvernement ne sont pas en désaccord avec ma proposition, mais me demandent de retirer cet amendement.
Comme pour le précédent, je souhaitais marquer ma position avec une certaine solennité. Je considère en outre que le texte présenté est trop franco-français, et qu'il est nécessaire d'adresser, par une mesure symbolique forte, un signal à l'opinion publique française, pour rappeler que la France et son système éducatif participent à l'aventure européenne.
J'avais l'intention de m'en remettre là encore à la sagesse du Sénat, mais puisque nos collègues de l'opposition « sabotent » la discussion en demandant un scrutin public sur presque tous les amendements, je vais retirer celui-ci afin d'éviter d'alourdir le débat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
MM. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles, et Jean-Claude Carle, rapporteur. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 425 rectifié est retiré.
La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote sur l'article 22.
M. Jean-Marc Todeschini. Les IUFM, qui ont quinze ans, arrivaient à un tournant. Dans les dix ans qui viennent, c'est la moitié des enseignants qu'il va nous falloir renouveler, ce qui demande des investissements massifs et une mobilisation accrue des moyens.
Dans le monde en mutation que nous connaissons aujourd'hui, la loi ne dit pas quelle formation il va falloir mettre en oeuvre, en tout cas quelles compétences seront attendues de nos enseignants.
Face à la diversité des élèves, il n'est plus possible de se contenter d'une formation initiale standardisée, où le disciplinaire continuerait à être au coeur. La démocratisation de l'enseignement passe par la prise en charge individualisée des élèves, mais, là encore, le texte est vide de toute proposition.
Ce projet de loi, je le disais, n'apporte pas de réponse sur l'évolution du métier d'enseignant : rien sur les contenus, rien sur l'évaluation, rien sur la durée de formation. Tout cela est esquivé.
De quels enseignants la nation a-t-elle besoin pour atteindre les objectifs qu'elle se fixe ? J'ai cherché vainement la réponse dans le texte.
Quelles sont les compétences attendues des enseignants pour atteindre ces objectifs ? Sur ce point non plus, je n'ai pas trouvé de propositions qui me fassent vraiment miroiter une formation qui allierait la formation professionnelle et la formation universitaire. La réponse se réduit à une simple modification des structures. Avec l'intégration de l'IUFM à l'université, on a trouvé la panacée !
Ce n'est pas ainsi que, demain, nos enfants bénéficieront d'enseignants mieux formés. J'irai même jusqu'à dire que, dans le projet de loi d'orientation, le métier d'enseignant est absent.
Parmi les exemples sur lesquels j'aurais aimé avoir plus de précisions, je citerai les formateurs de terrain. Or, là encore, je n'ai rien trouvé. Ni la loi ni le rapport annexé n'y font explicitement référence, alors que maîtres-formateurs, conseillers pédagogiques dans le premier degré, tuteurs dans le second degré sont cette interface indispensable entre la théorie et la pratique.
Quelle place l'université va-t-elle réserver à ces personnels ? J'ai cherché vainement la réponse. Que vont devenir les écoles d'application ? Pas de réponse ! Comment vont s'inscrire les maîtres-formateurs dans ce nouveau dispositif ? Pas de réponse ! Ces formateurs devraient pourtant être reconnus du fait de leur qualification, de la professionnalisation qui est la leur sur le terrain. La pire des choses serait d'en faire des prestataires de service déconnectés des enseignements théoriques et disciplinaires dispensés par l'université.
Lors des auditions auxquelles a procédé la commission des affaires culturelles,...
Je vois que l'on s'amuse, sur le banc des commissions !
Mme Hélène Luc. Oui ! Je ne sais pas ce qu'ils se disent, mais ils pourraient nous en faire profiter !
M. Jean-Marc Todeschini. On dirait vraiment que cette réforme n'intéresse ni les deux rapporteurs, ni le président de la commission !
Je disais donc qu'avait été évoquée l'importance de la formation des formateurs. Pourtant, le texte est muet sur ce point.
Sur la formation des enseignants, qui nécessite une professionnalisation, laquelle devrait au moins être reconnue aux formateurs, pas un mot non plus.
Quant à la formation continue, j'ai bien peur que sa cohérence n'ait à souffrir de l'intégration des IUFM au sein de l'université. Je crains qu'à l'avenir la formation continue, notamment dans le premier degré, ne soit simplement initiée par les corps d'inspection. Et je redoute une réelle coupure entre la formation initiale et la formation continue.
Et puis, avec l'intégration des IUFM dans les universités, que vont devenir les 130 sites départementaux ? On ne manquera pas de nous rétorquer qu'ils font partie des IUFM. Mais c'est au conseil d'administration de l'université qu'il reviendra de décider du maintien des sites sur place. Et comme, à l'évidence, il n'aura pas les moyens d'assurer leur maintien, il décidera de les fermer !
Certes, ce n'est pas pour demain. Je ne dis pas non plus que telle soit l'intention de M. le ministre, mais cela peut arriver, puisque les conseils d'administration des universités auront ce pouvoir de décision.
Donc, à l'avenir, ces antennes locales de formation, qui jouaient jadis un rôle important en matière de ressources documentaires, et qui n'étaient d'ailleurs pas réservés à la seule éducation nationale, seront fermés.
Telles sont les interrogations que je voulais soulever. Je dirai, en conclusion, qu'enseigner est un métier merveilleux et difficile. La préparation des enseignants qui formeront les nouvelles générations aux défis du monde de demain relève des missions de l'Etat.
Croire que la formation des enseignants relève du tour de main, du livre de recettes, du compagnonnage est une illusion qui sent la naphtaline.
M. Jean-Marc Todeschini. S'engager dans cette voie, c'est conduire les futurs enseignants, mais aussi les élèves, dans une impasse.
J'ai bien peur, hélas ! que cette intégration des IUFM au sein des universités ne conduise, sous cinq ou dix ans, à leur disparition totale. En tout cas, je pense que la formation des maîtres du premier degré est très menacée par ce que vous nous proposez, monsieur le ministre.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc, pour explication de vote.
Mme Hélène Luc. Si les IUFM ont pour vocation de former les professeurs des collèges et des lycées, ils forment aussi les futurs professeurs des écoles. Or, le projet de loi en cours d'adoption ne saurait assurer une formation professionnelle de qualité aux enseignants des écoles maternelles et élémentaires de demain.
Je dois vous faire part de la grande inquiétude des élèves des IUFM. Ils ont fait le point sur les textes disponibles : texte de loi amendé par les députés, projet de loi, projet de modifications du concours de recrutement des professeurs des écoles.
Ce texte fait naître des inquiétudes fortes sur certains points qui touchent à l'ensemble de la formation des maîtres du premier et du second degré : modalités de rattachement des IUFM à l'université, autonomie du budget, recrutement des formateurs, surstabilité des équipes de formateurs à plein temps.
La formation initiale et continue des enseignants du premier degré fait l'objet d'une régression sans précédent. En effet, contrairement aux enseignants du second degré, qui ont suivi un cursus universitaire dans la spécialité qu'ils enseignent, les enseignants du premier degré n'ont pas bénéficié d'un enseignement universitaire préalable dans toutes les disciplines au programme. C'est la formation professionnelle à l'IUFM qui doit leur apporter ce complément d'enseignement.
Déjà, actuellement, les enseignements en arts plastiques, en musique, en sciences et technologie, en psychopédagogie sont réduits à quinze ou vingt heures pour la plupart des stagiaires. Aucun temps de formation n'est prévu pour l'apprentissage des nouvelles technologies de l'information.
Or la réforme envisage pour les stagiaires de deuxième année une diminution d'environ 108 heures de formation à l'IUFM, conséquence de l'augmentation de la durée du stage de responsabilité.
Certes, il semble prévu dans la loi une licence pluridisciplinaire de pré-professionnalisation à l'enseignement, sur le modèle de ce qui existe déjà dans certaines universités : des modules de didactique de la discipline principale et un module dans une seconde discipline, dispositif plutôt destiné aux enseignants du second degré.
Mais nous sommes loin de la satisfaction des besoins de formation dans toutes les disciplines au programme de l'enseignement primaire. Une licence multidisciplinaire pose, par ailleurs, de nombreux problèmes à l'université, dont la vocation est la spécialisation dans un champ de connaissances.
En outre, pour des raisons - forcément ! - d'économie, il est prévu une formation continue en dehors du temps de travail.
Mme Hélène Luc. Cela aura des conséquences graves sur la qualité des formations, comme sur leur durée, qui est actuellement de trois semaines.
Une plate-forme, élaborée pour demander la garantie d'une véritable formation professionnelle des enseignants du premier degré, a été adoptée le 8 mars 2005 en assemblée générale de l'Intersyndicale des formateurs du centre de Seine-Saint-Denis et de l'IUFM de Créteil. Nous voulons, à ce moment de la discussion, dire que telle est également la demande des enseignants de la plupart des IUFM.
Beaucoup d'autres questions restent sans réponse. Lors de l'élaboration de la carte contractuelle des préparations au concours, qui prendra en compte et soutiendra une formation qui n'entrera pas dans le champ des spécialités de l'université d'intégration ? Faudra-t-il aller vers des coagréments multiples ?
M. le président. Il vous reste trente secondes !
Mme Hélène Luc. Les choses ne vont pas être simples. Je crains qu'à terme, avec l'éparpillement des différentes préparations sur différents sites, l'IUFM n'en soit plus maître, chacun s'appropriant à sa façon le cahier des charges national, peu compatible avec la culture d'autonomie des universités.
Verrons-nous, dans quelques années, la création d'un IUFM par université concernée par des préparatifs au concours ?
M. le président. Madame, veuillez conclure !
M. Roger Karoutchi. C'est fini !
Mme Hélène Luc. Nous y reviendrons.
M. Roger Karoutchi. Raison de plus pour vous arrêter !
Mme Hélène Luc. J'espère, monsieur le ministre, que vous allez répondre à ces questions. Les directeurs des IUFM n'ont, en effet, pas eu à donner leur avis.
Mme Hélène Luc. Il n'y a pas eu de concertation.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Nous les avons reçus !
Mme Hélène Luc. Ils ont été informés, mais il n'y a pas eu de véritable concertation ! Comme ils n'ont pas pu vous poser toutes ces questions, je vous les pose !
M. le président. Madame Luc, je tiens à vous dire que vous avez largement utilisé votre temps de parole !
La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Cet article fait référence à la formation des maîtres. Le métier d'enseignant a beaucoup évolué. Nous sommes nombreux à l'avoir dit ici, y compris vous, monsieur le ministre.
Dans l'objectif de mieux travailler les savoirs avec les élèves, les enseignants ont tout mis en oeuvre pour créer les conditions de ce travail.
Ils ont progressivement intégré dans leurs missions davantage d'aide à l'étude, d'aide à l'orientation, de tutorat et de suivi des élèves. Ils ont développé les relations avec les parents d'élèves, le travail collectif. Ces différentes interventions ont notablement alourdi le temps de travail des enseignants. Ces derniers auraient besoin de retrouver une marge de manoeuvre pour pouvoir gérer eux-mêmes leur temps en fonction des besoins et travailler davantage en équipe afin de conforter leurs missions.
Il s'agit bien, en effet, de créer les conditions d'un apprentissage plus efficace pour tous les élèves, non de décentrer l'activité professionnelle en empilant différentes tâches s'ajoutant aux heures d'enseignement.
Le propre du métier d'enseignant réside dans cette capacité à analyser les situations d'enseignement, à trouver les réponses les plus adaptées au travail sur les savoirs.
Cette mission centrale doit être réaffirmée dans la loi et des mesures doivent être prises dans le cadre d'une programmation pour améliorer la condition enseignante, permettre une meilleure reconnaissance des métiers de l'éducation nationale et les rendre plus attractifs.
Permettre un véritable travail des équipes suppose la présence dans les établissements de personnels qualifiés en nombre suffisant : les co-psys, les assistantes sociales, les infirmières, les MI-SE, dont je vous rappelle que le statut est malheureusement en cours de disparition.
Le travail de collaboration des équipes pédagogiques, la complémentarité des interventions croisées en direction de l'élève permettent, en effet, de répondre au mieux aux attentes des adolescents.
Dans ce cadre, les missions des CPE prennent tout leur sens, favorisent l'écoute, le dialogue et la prise en compte de l'individualité des jeunes.
Exerçant dans le champ éducatif, les CPE, les étudiants-surveillants sont sans cesse confrontés à l'influence de la société sur la relation des jeunes à l'école. L'absentéisme, évoqué tout à l'heure dans le cadre de cette fameuse note de vie scolaire, la violence, les comportements anomiques, les difficultés familiales sont autant de problèmes qui aboutissent dans le bureau des CPE, point de passage obligé des informations de tout provenance.
L'institution doit reconnaître et garantir ce travail en équipe, ce regard croisé sur l'élève, cette complémentarité du rôle de chacun, en instituant un temps pour la concertation.
Voilà, monsieur le ministre, ce que nous aurions aimé voir figurer dans votre projet de loi et dans votre article 22. Malheureusement, nous en sommes bien loin ! Pour toutes ces raisons, nous ne le voterons pas.
M. le président. Je mets aux voix l'article 22.
(L'article 22 est adopté.)
Article additionnel avant l'article 23
M. le président. L'amendement n° 177 rectifié ter, présenté par M. Détraigne, Mme G. Gautier, MM. Deneux, J.L. Dupont, Nogrix, Badré, C. Gaudin et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Avant l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la première phrase du deuxième alinéa de l'article L. 713-9, après les mots : « personnalités extérieures » sont insérés les mots : « dont un ou plusieurs représentants des acteurs économiques».
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Cet amendement vise à renforcer la présence des représentants des acteurs économiques dans la composition des futurs conseils d'orientation des IUFM.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission a émis un avis favorable, car, en application de l'article L. 713-9 du code de l'éducation, à l'issue de leur intégration au sein de l'université, les IUFM seront dotés d'un conseil dont l'effectif ne pourra dépasser quarante membres, et qui comprendra 30 % à 50 % de personnalités extérieures.
Il paraît en effet souhaitable que, parmi ces personnalités extérieures, figure au moins un représentant du monde économique. Cette présence pourrait contribuer au développement des partenariats entre les IUFM et les entreprises en vue d'organiser des stages pour les futurs enseignants et d'encourager leur sensibilisation aux réalités des milieux socio-économiques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 23.
Article 23
I. - Les deux premiers alinéas de l'article L. 721-1 sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Les instituts universitaires de formation des maîtres sont régis par les dispositions de l'article L. 713-9 et sont assimilés, pour l'application de ces dispositions, à des écoles faisant partie des universités. »
II. - L'article L. 721-3 est abrogé.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. J'interviens sur l'article 23 au nom du groupe CRC, mais surtout au nom de notre collègue Ivan Renar, qui a dû partir et qui ne peut donc pas participer au débat de ce soir.
M. Renar tient à nous alerter sur la situation des directeurs d'IUFM, qui avaient élaboré un projet ambitieux comportant une véritable rénovation de la formation des maîtres. Ils sont donc assez surpris que la « réforme du statut juridique » des IUFM soit la seule réponse à leurs attentes.
Les IUFM n'ont jamais nié, compte tenu du contexte difficile qui a accompagné leur création, qu'il fallait continuer à faire évoluer et à améliorer la formation des maîtres, même si celle-ci, au fil des années, a beaucoup progressé. Si certains reproches leur sont faits, ils n'ont pas l'ampleur que l'on veut bien leur donner, et ils ne sont pas tous fondés.
Vous le savez comme moi, ceux qui sortent d'une école ou d'un institut, quels qu'ils soient, ont une opinion « nuancée et hétérogène » sur la formation qui leur a été dispensée. Ce n'est parfois que quelques années plus tard qu'ils se rendent compte du bien-fondé des messages qui leur ont été délivrés.
Les IUFM n'échappent pas à cette règle. C'est normal, et ce n'est pas plus alarmant qu'ailleurs. Pour mémoire, je rappelle que, pendant toutes ces années, les IUFM ont formé entre 20 000 et 30 000 enseignants par an. Si l'on en croit les chefs d'établissement scolaire et les corps d'inspection, ils sont plutôt mieux formés qu'autrefois. Les jeunes stagiaires sont d'ailleurs appréciés et leur présence est non seulement bien accueillie, mais également souhaitée dans la plupart des établissements.
En quatorze ans, des partenariats solides se sont noués entre les IUFM et leurs universités de rattachement. Il est donc inexact de dire que des difficultés majeures subsistent encore. Des conventions ont été signées, qui définissent clairement les rôles complémentaires des deux structures.
Les présidents d'université ont donc été aussi surpris que les directeurs d'IUFM par les propositions d'intégration de ces derniers dans les universités, même s'ils n'y sont pas a priori opposés. Ils n'ont d'ailleurs pas été consultés en amont.
Tous les IUFM ont logiquement créé des liens solides avec « l'Etat employeur », qu'il s'agisse du rectorat ou des inspections académiques. On voit mal comment il aurait pu en être autrement pour la mise en stage des futurs enseignants en école, en collège et en lycée.
Il convient de rappeler que le recteur est président du conseil d'administration de l'IUFM et que, parmi les membres de ce conseil scientifique et pédagogique, siègent des représentants des corps d'inspection ainsi que des universités partenaires.
Chaque représentant est donc associé à l'ensemble de la politique de l'IUFM, à l'élaboration du projet d'établissement, des plans de formation et des modalités d'évaluation des stagiaires. Par conséquent, chacun d'eux a tout loisir de s'exprimer et de faire modifier des dispositifs.
On imagine mal le recteur d'académie laisser passer des dispositions qui seraient contraires au cahier des charges de la formation définie par circulaire ministérielle. Il est d'ailleurs surprenant d'écrire qu'un cahier des charges national cadrera la formation en IUFM, puisque c'est déjà le cas. A cet égard, je vous invite, mes chers collègues, à consulter le bulletin officiel du ministère de l'éducation nationale n° 15 du 11 avril 2002 : Principes et modalités d'organisation de la deuxième année de formation des enseignants et des conseillers principaux d'éducation stagiaires - sous-titré Plan de rénovation de la formation des enseignants -, notamment le chapitre III intitulé Cahier des charges de la deuxième année de formation ou l'annexe : Eléments d'aide à la réalisation du cahier des charges.
Il faut préciser, en outre, que les plans de formation des IUFM, qui doivent répondre à ce cahier des charges, sont votés en conseil d'administration - présidé, donc, par le recteur -, puis analysés par une commission d'expertise nationale comprenant, notamment, des représentants des directions du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, des présidents d'université, des inspecteurs généraux. Cette commission a la possibilité de refuser les plans proposés ou de demander des modifications - il existe, en effet, des navettes - avant de délivrer un agrément contractuel.
Il faut également évoquer les « commandes » successives et de tous ordres qui sont venues alourdir la formation et la détourner de ses objectifs principaux, dans le temps déjà trop court qui lui est imparti. Cela participe au mécontentement de certains stagiaires, qui, à juste titre, nous reprochent de nous éloigner de l'essentiel. Mais, dans ce cas, les IUFM ne sont pas plus fautifs que le ministère lui-même.
La réactivité des IUFM n'est pas à remettre en cause. Ils viennent encore de le prouver en mettant en place, lors de cette dernière rentrée, de nouvelles certifications en adaptation et intégration scolaires, alors que les textes ne sont sortis qu'en 2004. On peut difficilement aller plus vite.
M. le président. Je suis saisi de douze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 313, présenté par MM. Bodin, Assouline, Collombat, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Monsieur le ministre, nous souhaitons supprimer cet article, qui complète le dispositif qui fixe le sort que vous réservez aux IUFM.
Avec cet article, les IUFM seront désormais assimilés à des universités et intégrés, dans chaque académie, à une et une seule université. Ainsi, ces instituts ne disposeront plus ni d'un conseil d'administration ni d'une administration autonomes. Leurs directeurs seront placés sous l'autorité des présidents d'université. Seuls trente et un pôles universitaires devraient, à terme, dispenser une formation aux futurs maîtres, qui sera, par nature, forcément plus théorique que pratique.
Tout cela est irréaliste ! Comment organiser la scolarité des futurs enseignants, qui devront parfois faire plusieurs centaines de kilomètres pour rejoindre leur « universIUFM » ? Il va en effet falloir renommer ces structures ! Or la formation des maîtres est traditionnellement une formation de proximité.
Comme pour l'article 22, nous estimons que, le Parlement n'ayant été saisi d'aucun bilan préalable à la réforme des IUFM, il convient d'en rester au statu quo actuel.
Des évolutions sont, bien entendu, possibles, mais ce type d'évaluation est nécessaire. Une vraie concertation doit donc avoir lieu afin de ne pas fragiliser l'« existant ». Quand l'« existant » a réussi, on peut penser, quinze ans après, qu'il a besoin d'être modernisé, mais sans fragiliser les acquis de ce qui a été engrangé.
Telles sont les raisons qui nous conduisent à demander la suppression de ce dispositif.
M. le président. L'amendement n° 368 rectifié ter, présenté par Mme Payet, MM. C. Gautier, Nogrix, Deneux et Détraigne, Mme Férat, MM. Amoudry et Badré, Mmes Dini et Morin-Desailly, M. Merceron et Mme Létard, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour remplacer les deux premiers alinéas de l'article L. 721-1 du code de l'éducation :
« Les instituts universitaires de formation des maîtres sont régis par les dispositions de l'article L. 719-10. Un décret en Conseil d'Etat fixe la date d'effet de leur changement de statut juridique, définit leur mode de fonctionnement, leurs missions spécifiques, les moyens humains et financiers dont ils disposent pour les mettre en oeuvre, et précise les modalités de leur rattachement aux universités de l'académie dont ils font partie. »
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. J'approuve l'ancrage mieux affirmé des IUFM au sein du système universitaire français. Cependant, l'article L. 713-9 du code de l'éducation ne garantit pas le caractère pluridisciplinaire de la formation, notamment si l'intégration de l'institut doit se faire dans un établissement à dominante scientifique ou littéraire.
Un tel dispositif risque aussi de compromettre le caractère national de la formation des enseignants, qui doit rester de la responsabilité de l'Etat. Voter cet article sans modification risquerait de faire perdre aux IUFM leur personnalité juridique et morale.
L'IUFM doit garder son autonomie financière et bénéficier de moyens spécifiques équitables afin, notamment, de mettre en oeuvre le cahier des charges arrêté par le ministre après avis du Haut conseil de l'éducation.
Par ailleurs, à la Réunion, où il existe un seul IUFM et une seule université, les lauréats au concours du second degré seront lésés. Seuls quelques-uns d'entre eux pourront effectuer le stage de deuxième année sur place. En effet, on tiendra compte des voeux des candidats, mais le principal critère de sélection sera le rang de classement au concours. Le retour à la situation antérieure, où tous les enseignants du secondaire étaient métropolitains, n'est pas à exclure.
Actuellement, 70 % des reçus sont affectés à la Réunion, ce qui a représenté, ces dernières années, environ 1 000 nouveaux titulaires dans les lycées et les collèges de l'île. Leur présence a grandement facilité l'adaptation de leurs collègues métropolitains. Il ne s'agit pas de nuire au recrutement de professeurs métropolitains, mais il faut savoir que, dans certaines disciplines, comme l'histoire, la géographie, les mathématiques et les lettres, les reçus réunionnais ne sont que 12 sur un total de 800 professeurs de lycée et de collège.
En outre, dans le cadre de la réforme de la carte nationale des formations, M. le ministre pourrait être tenté de limiter le nombre de formations offertes dans chaque IUFM. Un bon taux de réussite ne correspond pas forcément à un grand nombre de reçus, et la simple logique comptable pourrait entraîner la fermeture de certaines formations.
Or nous ne devons pas oublier que les étudiants réunionnais privilégient le lieu d'exercice au métier lui-même. C'est ainsi que le métier de professeur des écoles attire les meilleurs étudiants, car l'affectation locale est garantie. Ainsi, nous enregistrons environ 2 000 candidatures chaque année à l'entrée à l'IUFM pour 220 postes mis au concours.
Si la formation à un concours du second degré n'est pas proposée ou si la deuxième année de formation doit se faire en métropole, l'étudiant réunionnais préférera préparer le concours de professeur des écoles, déjà saturé, au lieu d'accepter une offre de mobilité. Pour prendre un exemple concret, l'université de la Réunion a produit ces dernières années le plus grand nombre de licenciés en allemand de France, mais aucun d'entre eux n'est allé présenter le CAPES en métropole.
Toute fermeture affectera l'université de la Réunion, car l'IUFM, qui constitue le principal débouché de ces diplômés, ne sera plus en mesure d'offrir une vaste palette de formations.
Pour toutes ces raisons, je propose que le rattachement de l'IUFM à l'université se fasse dans le cadre de l'article 43 du code de l'éducation et non de l'article 33 du même code. Cette disposition garantirait une plus grande autonomie de gestion à tous les IUFM de France et assurerait à tout Réunionnais reçu au concours du second degré une affectation à l'IUFM de la Réunion pour sa deuxième année de stage, suivie d'une titularisation dans le département. Quand je dis tout lauréat réunionnais, je ne fais, bien évidemment, pas de discrimination ; je pense également à tous les métropolitains qui vivent à la Réunion. (Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF.)
M. le président. L'amendement n° 314, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour remplacer les deux premiers alinéas de l'article L. 721-1 du code de l'éducation :
« Les instituts universitaires de formation des maîtres sont des établissements inter-universitaires. Ils sont rattachés aux universités de chaque académie. »
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Nous avons déjà exprimé en partie notre point de vue sur le regroupement des IUFM, que nous jugeons inacceptable, à une et une seule université par académie.
Est-il raisonnable de prévoir trente et un pôles pour former l'ensemble des enseignants français, alors que l'on sait que, dans les dix ans à venir, il va falloir former l'équivalent de la moitié du corps actuel - appelée à partir à la retraite -, que, avec le baby-boom des années 2000, les effectifs scolaires vont inévitablement croître dans les prochaines années - ces enfants arrivant à l'âge de la scolarité obligatoire -, et que la formation des enseignants a toujours été une formation de proximité ?
Cela n'est pas raisonnable. Je vous le répète, monsieur le ministre : vous tuez à petit feu la formation spécifique des enseignants, pourtant l'un des fleurons du service public français de l'éducation !
Nous souhaitons donc préciser le caractère interacadémique des IUFM, qui seraient ainsi répartis sur l'ensemble d'une académie et de ses pôles universitaires. Il s'agit pour nous du minimum requis.
M. le président. L'amendement n° 584 rectifié, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi le texte proposé par le I de cet article pour remplacer les deux premiers alinéas de l'article L. 721-1 du code de l'éducation :
« Les instituts universitaires de formation des maîtres sont des établissements publics à caractère scientifique culturel et professionnel rattachés aux universités. Ils accueillent les étudiants préparant les concours d'accès au corps des personnels éducatifs de l'éducation nationale. »
La parole est à Mme Hélène Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le ministre, notre amendement, chacun l'aura compris, vise à refuser le prévisible démantèlement des IUFM et leur perte d'autonomie contenus dans votre projet de loi.
Monsieur le ministre, nous ne pouvons accepter, au même titre que l'ensemble des directeurs, des personnels, des enseignants et des étudiants de ces instituts, la disparition brutale de trente et un établissements publics administratifs chargés de la formation des maîtres. Sans aucune concertation, ni consultation sérieuse et approfondie avec les intéressés, vous changez le statut des centres de formation, qui ont pourtant fait leurs preuves, ce dont vous semblez douter.
Pendant dix-neuf ans j'ai été membre du conseil d'administration, d'abord de l'école normale que le conseil général du Val-de-Marne a construite - ce fût même son premier acte - puis de l'IUFM. Pour avoir fréquenté le conseil d'administration et travaillé avec le directeur de l'établissement, pour avoir participé à plusieurs réunions et à une mission - M. Gouteyron était alors président de la commission des affaires culturelles - je me refuse à penser que les directeurs d'IUFM mentent lorsqu'ils affirment qu'ils n'ont pas été consultés sérieusement. La preuve en est qu'ils se sont tournés vers nous pour que nous relayions leurs questions auprès de vous, monsieur le ministre.
Par cet amendement, nous vous proposons, mes chers collègues, de renforcer les liens qui unissent déjà les IUFM avec les universités de leur région, en les y rattachant. Tel est notre souhait et tel est également celui des directeurs d'IUFM et des présidents d'universités.
Contrairement à vous, monsieur le ministre, nous proposons de sauvegarder la personnalité morale des IUFM, leur autonomie de gestion, pédagogique et financière, en les transformant en des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel.
Tout le monde a reconnu que les IUFM représentaient un progrès par rapport aux écoles normales. Même si des améliorations doivent encore être réalisées, la solution n'est pas de supprimer ces établissements publics ; elle est de tenter d'améliorer leur fonctionnement en faisant appel aux directeurs, aux personnels et aux conseils d'administration. Or, ces derniers n'ont pas été consultés sur cette réforme.
Par ailleurs, votre texte est particulièrement complexe à appliquer. Qui va, par exemple, décider de l'université de rattachement de tel institut ? Quels types de relations l'IUFM devra-t-il nouer avec les universités autres que la sienne ? Que deviendra le statut des enseignants-chercheurs des IUFM lorsqu'ils appartiendront à des disciplines différentes de celles qui existent dans l'université de rattachement ? Ces simples questions montrent l'abîme de complexité et de perplexité dans lequel nous plonge votre proposition, monsieur le ministre.
Nous tentons, à travers notre amendement, de répondre à bon nombre de préoccupations exprimées par les professionnels de ce secteur. C'est la raison pour laquelle nous vous demandons de l'adopter. Comme il s'agit d'un amendement très important, je vous informe, monsieur le président, que le groupe CRC demandera un scrutin public.
M. le président. L'amendement n° 194, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene-Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le I de cet article pour remplacer les deux premiers alinéas de l'article L. 721-1 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée :
Ces écoles sont autonomes, elles disposent de leur budget, de leurs propres instances d'animation, de décision et de pilotage administratif et pédagogique.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Monsieur le ministre, nous ne pensons pas que vous ayez eu raison d'insister pour procéder, à la hussarde, à l'intégration des IUFM dans les universités. Non pas que l'idée d'y réfléchir nous révulse, mais nous déplorons le manque de concertation avec les personnels.
De plus, aucune étude d'impact sérieuse n'a été réalisée. On voit bien par exemple que, selon l'université de rattachement, la transversalité et la pluridisciplinarité seront plus ou moins assurées, la recherche sera plus ou moins crédible.
Au cours de la discussion, nous n'avons par ailleurs obtenu aucune garantie concernant les moyens tant financiers qu'en termes de personnels.
Bref, nous avons le sentiment de n'avoir été ni écoutés ni entendus.
Cependant, comme nous cherchons à sauvegarder l'essentiel, nous vous proposons cet amendement n° 194 que l'on peut considérer comme étant un amendement de repli. Il tend à réaffirmer que les écoles de formation des maîtres sont autonomes, qu'elles disposent de leur budget, de leurs propres instances d'animation, de décision et de pilotage administratif et pédagogique.
En effet, nous ne sommes pas favorables à la disparition de la personnalité morale des IUFM, quelles que soient leurs insuffisances et leurs limites, que personne ici ne songe à nier.
Si tel est également votre avis, monsieur le ministre, il vaut mieux l'écrire dans la loi, car, vous le savez bien, les ministres passent... Dans le cas contraire, il existe entre nous une sérieuse divergence.
Pour l'heure, le texte n'apporte aucune garantie, tant en termes de postes que de moyens, qui soit de nature à préserver les IUFM d'une dilution dans les universités.
L'articulation, déjà difficile et souvent jugée insuffisante, entre la théorie et la pratique, sera encore plus aléatoire. Le risque de penser la formation comme une juxtaposition de savoirs dispensés par l'université et de savoir-faire gérés par le compagnonnage, c'est-à-dire sous forme de stages en situation réelle, est grand. Or, en matière d'accès aux sciences de l'éducation, nous avons non pas trop de travaux, mais pas assez de contacts entre la recherche et les acteurs sur le terrain ; ce n'est donc pas le moment d'élargir encore la coupure.
Dans ce contexte, plusieurs de nos collègues ont souligné le risque que ne se produise un décrochage entre les formations des enseignants des premier et second degrés. La reconnaissance en termes de master ou de crédits de master peut également devenir une source de différenciation encore plus grande entre eux.
Nous sommes, pour notre part, favorables aux formations partagées, qui doivent être maintenues et développées afin de diffuser une culture commune d'appartenance à la même maison et de tendre à réduire les écarts excessifs existant en matière de hiérarchie et de représentation entre les différentes catégories d'enseignants.
Je comprends que de telles considérations vous effraient, monsieur le ministre, mais l'honneur de la politique est aussi de parler vrai quand c'est utile ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. L'amendement n° 315, présenté par MM. Bodin, Assouline, Dauge, Guérini, Lagauche, Mélenchon, Repentin et Signé, Mme Tasca, M. Todeschini, Mme Voynet et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le I de cet article pour remplacer les deux premiers alinéas de l'article L. 721-1 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée :
Les instituts universitaires de formation des maîtres gardent leur autonomie pédagogique et financière.
La parole est à M. David Assouline.
M. David Assouline. Cet amendement est encore guidé par un motif très clair : nous avons dit et redit notre opposition au rattachement d'un IUFM à une et une seule université.
Nous souhaitons, afin que ces instituts puissent continuer à former correctement les enseignants dont la France a besoin, leur octroyer au minimum une autonomie pédagogique et financière.
Pédagogique, car cette autonomie est garante du maintien d'une formation ad hoc de qualité, articulant correctement les moments de formation théorique et ceux de formation pratique.
Financière, car, sans autonomie financière, aucun choix pédagogique ne peut être effectué.
Les directeurs d'IUFM que nous avons reçus au groupe socialiste sont très inquiets, en particulier par cette absence d'autonomie, et ils revendiquent au moins un « fléchage d'action » au titre de la loi organique relative aux lois de finances.
C'est uniquement en cas de maintien de cette double autonomie que les IUFM pourront poursuivre correctement leur mission : former des maîtres et des enseignants.
M. le président. L'amendement n° 120 rectifié, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
A - Compléter le texte proposé par le I de cet article pour les deux premiers alinéas de l'article L. 721-1 par deux alinéas ainsi rédigés :
« Des conventions peuvent être conclues, en tant que de besoin, sur proposition du directeur de l'institut universitaire de formation des maîtres, avec d'autres établissements d'enseignement supérieur.
« D'ici 2010, le comité national d'évaluation des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel procède à une évaluation des modalités et des résultats de l'intégration des instituts universitaires de formation des maîtres au sein des universités, notamment au regard des objectifs qui leur sont fixés. »
B - En conséquence, dans le premier alinéa du I de cet article, remplacer les mots :
un alinéa ainsi rédigé
par les mots :
trois alinéas ainsi rédigés
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Mes chers collègues, votre commission, si elle approuve cette réforme, estime néanmoins que cette dernière soulève des questions quant à ses modalités d'application et aux conséquences des choix d'intégration d'un IUFM dans l'une ou l'autre des universités concernées.
Il ne faudrait pas, en particulier dans le cas où un institut serait intégré à une université monodisciplinaire, que la formation dispensée aux futurs enseignants puisse en souffrir, ou que les universités ne comportant pas d'IUFM s'en trouvent affaiblies.
Ces écueils devraient être évités par le biais de conventions, mais votre commission souhaite que soit explicitement prévue la possibilité, en tant que de besoin, et sur proposition du directeur de l'IUFM, que soient passées des conventions avec les établissements d'enseignement supérieur autres que l'université à laquelle l'institut est intégré.
Par ailleurs, compte tenu de l'enjeu prioritaire que constitue la formation des futurs enseignants, votre commission souhaite qu'il soit procédé, d'ici à 2010, à une évaluation des modalités et des résultats de l'intégration des IUFM au sein des universités. Cette évaluation sera notamment effectuée au regard des objectifs fixés aux IUFM.
M. le président. L'amendement n° 581 rectifié, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Après le texte proposé par le I de cet article pour remplacer les deux premiers alinéas de l'article L. 721-1 du code de l'éducation, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le conseil d'administration de ces instituts comprend notamment, outre les représentants des enseignants-chercheurs, des représentants des autres enseignants ainsi que des représentants des personnels et des étudiants en formation. »
La parole est à Mme Annie David
Mme Annie David. Par cet amendement, nous demandons des précisions quant à la composition du conseil d'administration des IUFM. Nous souhaitons qu'il comprenne notamment, outre des représentants des enseignants-chercheurs, des représentants des autres enseignants ainsi que des représentants des personnels et des étudiants en formation.
Effectivement, l'intégration des IUFM dans les universités risque de conduire à la suppression de certains emplois propres aux IUFM, pour des raisons de non compatibilité statutaire.
Parmi les emplois concernés, citons : les agents comptables, les ingénieurs d'hygiène et sécurité ainsi que certaines fonctions exercées par des personnels techniques. Quel sera le devenir des personnels IATOSS, les ingénieurs, administratifs, techniciens, ouvriers et de service, et notamment celui des TOS, les personnels techniciens, ouvriers et de service, qui sont actuellement affectés dans les IUFM ?
Quel sera le devenir des personnels administratifs et techniques, autres que ceux précités, si leurs postes sont supprimés, tant dans les services centraux que dans les sites départementaux, pour des raisons d'économie d'échelle ? N'y a-t-il pas un risque de voir les recrutements globalisés au sein de l'université de rattachement ? L'IUFM conservera-t-il ses propres commissions de spécialistes ? La pérennité des postes à temps plein des personnels des premier et second degrés est-elle assurée ? Qui aura la maîtrise du recrutement de ces personnels ?
Toutes ces questions restent en suspens, car rien n'est indiqué dans votre article, mise à part l'intégration des IUFM dans les universités. C'est pour cette raison que nous demandons qu'au sein des conseils d'administration apparaisse chacune des catégories de ces personnels.
M. le président. L'amendement n° 582, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le I de cet article pour remplacer les deux premiers alinéas de l'article L. 721-1 du code de l'éducation par un alinéa ainsi rédigé :
« Les instituts universitaires de formation des maîtres reçoivent du ministre chargé de l'éducation nationale, leur dotation en personnel. »
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Cet amendement recouvre un certain nombre d'amendements déjà proposés, mais, s'agissant du devenir des IUFM, il vaut mieux se répéter que se renier.
L'article L.713-9 du code de l'éducation semble garantir pour les IUFM, au sein des universités, une relative autonomie financière et la nomination des directeurs par le ministre. Y aura-t-il, comme pour les IUT, des postes fléchés dans la dotation ministérielle ? Comment s'établira la décision de rattacher l'IUFM à une université plutôt qu'à une autre quand il existe plusieurs universités dans une académie ? Les autres universités ne risquent-elles pas, dès lors, de se désengager ? Si l'IUFM est rattaché à une université de sciences humaines qui ne dispose pas des ressources appropriées aux disciplines scientifiques - qui n'a pas, par exemple, de labos - on peut dès lors s'interroger sur l'organisation de la formation.
De plus, l'université n'est pas actuellement préparée à former les professeurs des lycées professionnels. Quelle place sera réservée aux inspecteurs et aux maîtres formateurs ? Sur quels critères seront recrutés les enseignants des IUFM ? L'université peut avoir tendance à privilégier les critères académiques, la théorie à la pratique. Quel fonctionnement est-il prévu concernant les lieux de stages pratiques ?
On compte actuellement trente et un IUFM et cent trente sites départementaux. Le changement de statut devant se faire à coût constant, on peut s'interroger sur le maintien des sites départementaux, qui jouent pourtant un rôle important en matière de développement local. Bien souvent, ils servent de centre de ressources et sont fortement mobilisés dans certains départements pour la formation continue des enseignants et d'autres types de personnels.
Leur disparition rendrait plus difficile l'accès à la formation continue dans les zones éloignées des grands centres. Elle aurait, par ailleurs, des répercussions fâcheuses en termes d'aménagement du territoire.
Toutes ces remarques et ces questions justifient le présent amendement, qui vise à garantir une stabilité, et même un développement de l'encadrement enseignant et en personnel des IUFM. Monsieur le ministre, nous vous demandons d'y souscrire ou, sinon, de bien vouloir répondre à nos questions.
M. le président. L'amendement n° 585, présenté par Mme David, MM. Renar, Ralite, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le II de cet article :
II. Après l'article L. 721-3, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Les personnels des instituts universitaires de formation des maîtres sont nommés dans une des universités de rattachement et affectés à l'institut. Ils comprennent un noyau stable de formateurs à temps plein composé d'enseignants - chercheurs, de professeurs des lycées et collèges et de professeurs des écoles, ainsi que des formateurs associés à temps partiel ».
La parole est à Mme Eliane Assassi.
Mme Eliane Assassi. S'agissant de la formation initiale, la décision que vous voulez prendre, si elle reste en l'état, risque de nous faire revenir plusieurs décennies en arrière.
Mme Eliane Assassi. Certains prétendent que, sous couvert d'une « universitarisation » - selon votre propre terme, monsieur le ministre -, on revient aux écoles normales. Votre projet est porteur de menaces directes...
Mme Eliane Assassi. ...pour les emplois des certifiés, des agrégés et des professeurs d'école qui travaillent dans les IUFM. Ces emplois pourraient disparaître, puisque le projet prévoit de ne garder que des enseignants-chercheurs et des formateurs associés en service partagé.
C'est pourquoi nous vous soumettons le présent amendement de cohérence.
M. le président. L'amendement n° 586 rectifié, présenté par Mme David, MM. Renar, Ralite, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter in fine cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - Après l'article L. 721-3, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. L. ... - Un plan de recrutement pluriannuel révisable chaque année est mis en place afin de prendre en compte les besoins prévisibles à échéance de trois ans maximum en personnels du système éducatif. Les personnels ainsi recrutés accèdent au statut d'enseignant en formation, qui sera défini par décret.
« Des pré-recrutements aux instituts universitaires de formation des maîtres sont organisés dans le cadre d'un plan pluriannuel de recrutements selon des modalités définies par décret. Ces pré-recrutements sont accessibles sur concours à tout titulaire d'un baccalauréat .
« Une rémunération dont le montant sera indiqué par décret est garantie par l'Etat aux enseignants en formation jusqu'au passage des concours de recrutement aux métiers d'enseignant dans le cadre d'un engagement décennal à servir dans le service public de l'éducation nationale ».
... - Pour compenser la perte de recettes résultant de la rémunération des enseignants en pré-recrutement, les taux prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts sont relevés à due concurrence.
La parole est à Mme Hélène Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le ministre, vous réduisez la réforme de la formation à un changement statutaire des IUFM sans mettre en oeuvre ni le sens ni les moyens nécessaires à son amélioration.
D'ici à 2015, près de la moitié des enseignants du premier et du second degré sera renouvelée. Le recrutement et la formation de ces dizaines de milliers de maîtres sont donc des enjeux majeurs pour la réussite des millions d'élèves qui seront scolarisés dans la première moitié de ce siècle.
Ce sont des enjeux décisifs pour que ces nouveaux enseignants soient capables de travailler en équipes, de mettre en oeuvre des pratiques pédagogiques différenciées, de construire des pratiques et des contenus d'enseignement favorisant la réussite de tous les élèves.
Cela suppose une capitalisation des pratiques innovantes et des savoirs issus de la recherche. Vous proposez une modification de structure, mais vous ignorez les contenus de la formation, la rénovation des concours, la pré-professionnalisation et le nécessaire allongement de la formation.
Il est indispensable que la formation des maîtres soit universitaire et professionnelle. Or votre projet met aussi en péril la nécessaire professionnalisation de la formation, qui devrait au contraire être développée, et la place donnée aux formateurs non universitaires.
De ce point de vue, les IUFM, même s'ils ne sont pas exempts de tout défaut, demeurent les seuls lieux pensés et construits en vue de cette articulation entre la théorie et la pratique.
Sur le volet de la formation des enseignants, les modalités prévues par le texte ne garantissent pas aux IUFM les moyens de leur autonomie du point de vue de la pédagogie, du budget et des emplois, pour assurer une formation universitaire professionnelle de qualité, à la hauteur des enjeux du renouvellement massif des enseignants. L'équilibre entre, d'une part, les stages dans les établissements scolaires et la formation et, d'autre part, le travail en équipes pluricatégorielles est mis en péril.
Les formateurs et les chercheurs redoutent une réduction masquée des moyens de la formation des enseignants. Il faut que les formateurs et les chercheurs soient associés à un véritable projet d'amélioration de la formation des maîtres.
Le concours est maintenu à la fin de la première année, qui restera essentiellement, pour les étudiants, une année de préparation du concours, au détriment de la formation professionnelle.
Nous suivons avec attention les travaux du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche, le CNESER, portant sur « le développement de dispositifs préparant aux concours des métiers de l'enseignement » afin de « présenter aux étudiants qui envisagent de devenir professeur des parcours repérables et adaptés à leur projet professionnel ».
Cet aspect prend d'autant plus d'acuité que les concours de recrutement vont comporter une épreuve obligatoire de langue et imposer une certification préalable en technologie de l'information et de la communication. Or, la durée actuelle de formation ne permet pas d'atteindre les compétences nécessaires dans plusieurs champs disciplinaires.
Votre projet de loi, monsieur le ministre, par divers biais, ouvre la porte à la bivalence, voire à la polyvalence des enseignants.
Tel est, chers collègues, l'amendement, gagé, porteur d'une contre-proposition, que je souhaitais vous présenter. Je vous propose de l'adopter par scrutin public.
M. le président. L'amendement n° 583, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter in fine cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Un décret en Conseil d'Etat précise les dispositions du présent article.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Une fois n'est pas coutume, monsieur le ministre, nous demandons par cet amendement qu'un décret en Conseil d'Etat précise les dispositions de l'article 23. Habituellement, nous réfutons systématiquement les articles mentionnant un décret d'application, mais l'article 23 est tellement vague et incomplet qu'il fait exception !
Nous préférons un décret à un arrêté. Bien entendu, nous ne doutons pas que M. le ministre prendra soin de consulter les directeurs d'IUFM avant de rédiger le décret d'application, afin de définir avec eux la meilleure rédaction possible.
M. le président. Pour information, je vous signale, mes chers collègues, que je suis d'ores et déjà saisi de six demandes de scrutin public.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 313, car il vise à supprimer l'article 23, ce qui est contraire à la position qu'elle a exprimée.
L'amendement n° 368 rectifié ter, en prévoyant le rattachement des IUFM aux universités en application de l'article L. 719-10 du code de l'éducation plutôt que l'intégration à une université en application de l'article L. 713-9 du même code, revient sur la réforme proposée, ce qui est contraire à la position de la commission. Je vous demanderai, madame Payet, de bien vouloir le retirer, sinon je serais obligé d'émettre un avis défavorable.
La commission est défavorable à l'amendement n° 314. Son adoption aboutirait, en effet, à l'annulation de la réforme proposée par le projet de loi, qui prévoit l'intégration de l'IUFM au sein de l'université. La commission a préféré prévoir que des conventions seront passées avec les autres établissements d'enseignement supérieur afin d'assurer pleinement leur mission.
La commission est également défavorable, pour les mêmes raisons, à l'amendement n° 584 rectifié.
L'adoption de l'amendement n° 194 reviendrait à annuler tous les effets de la réforme proposée par le projet de loi ; la commission y est donc défavorable.
La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement n° 315, car l'article L. 713-9 du code de l'éducation garantit d'ores et déjà à l'IUFM son autonomie financière. L'autonomie pédagogique devra s'exercer dans le respect de l'autonomie de l'université, et la coopération devra prévaloir entre l'université et l'IUFM.
S'agissant de l'amendement n° 581 rectifié, il paraît évident que les catégories visées seront représentées, mais cette liste n'est pas exhaustive et il n'y a pas lieu d'entrer dans le détail de la composition, d'autant que 50 % à 70 % des membres du conseil d'administration seront des personnels internes à l'IUFM.
Mme Hélène Luc. Avec quel statut ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. La commission a donc émis un avis défavorable.
Quant à l'amendement n° 582 visant à instituer un fléchage des moyens en personnel des IUFM, comme pour l'amendement n° 178 qui viendra ultérieurement en discussion, il me paraît difficile de revenir ainsi sur le principe d'autonomie des universités. La commission y est par conséquent défavorable.
L'amendement n° 585 est un amendement de cohérence contraire à la position de la commission ; celle-ci y est défavorable.
En ce qui concerne l'amendement n° 586 rectifié, le rapport annexé prévoit le recrutement de 30 000 professeurs au cours des cinq prochaines années. Par ailleurs, nous avons proposé qu'une réflexion soit engagée sur un dispositif éventuel de pré-recrutement ; l'amendement est donc partiellement satisfait.
Enfin, pour ce qui est de l'amendement n° 583, de même qu'un décret prévoit les modalités d'application de l'article L. 713-9 du code de l'éducation aux IUT ou aux instituts universitaires professionnalisés, par exemple, il paraît utile qu'un tel décret précise les modalités d'application pour les IUFM. La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. J'oppose, au nom de la commission des finances, l'article 40 de la Constitution à l'amendement n° 586 rectifié. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Hélène Luc. Il est gagé !
M. le président. L'article 40 étant applicable, l'amendement n° 586 rectifié n'est pas recevable.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble des amendements ?
M. François Fillon, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai eu longuement l'occasion de vous indiquer quelle était la philosophie de cette réforme et les conditions dans lesquelles nous comptions la mettre en oeuvre.
Pour ma part, j'ai confiance dans l'université. Elle a besoin de se renforcer. La responsabilité de la formation des maîtres, c'est la vocation de l'université, et je trouve très surprenant le discours frileux, inquiet, que certains tiennent à cet égard ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Bien entendu, des questions doivent être réglées. C'est la raison pour laquelle nous avons prévu un délai de trois ans pour réaliser l'intégration des IUFM dans les universités.
Mme Hélène Luc. Vous allez voir comment cela va se passer !
M. François Fillon, ministre. La loi ne va pas déterminer dans le détail les conditions dans lesquelles cette intégration se réalisera, elle fixe les principes. Ensuite, le Gouvernement, dans le cadre de dispositions réglementaires qui feront naturellement l'objet des consultations et des concertations prévues, fixera les règles de cette intégration.
Je veux simplement répondre à quelques-unes des principales questions qui ont été posées.
Le choix de l'université - je l'avais d'ailleurs indiqué - se fera par un conventionnement avec l'Etat, au vu d'une proposition de l'université. L'Etat devra choisir la meilleure proposition, dans l'intérêt des stagiaires, pour une formation de qualité.
Cette proposition ne manquera pas, en cas de nécessité, de faire référence à des partenariats avec d'autres universités. Mais le rattachement à plusieurs universités n'est pas une bonne solution. Ce serait en réalité - et c'est sans doute pour cela que certains la réclament - la négation de toute réforme ; ce serait renoncer au renforcement de la qualité universitaire de la formation des maîtres ; ce serait aussi renoncer à la suggestion de mettre l'université en situation de responsabilité pour chaque institut universitaire de formation des maîtres.
Evidemment, aucune menace ne pèse sur les enseignants-chercheurs. Au contraire, ils seront bien mieux intégrés et considérés comme enseignants-chercheurs de rang universitaire ; je m'étonne même que l'on puisse s'interroger sur ce point !
Quant aux moyens des IUFM, ils seront évidemment fléchés, tout comme ils le sont au bénéfice des IUT.
L'amendement n° 120 rectifié, présenté par le président Valade et par le rapporteur, vise à renforcer la proposition du Gouvernement et répond, pour une très large part, aux craintes qui ont été évoquées.
Je cite le quatrième alinéa de l'article L. 713-9 du code de l'éducation : « Le directeur de l'institut ou de l'école prépare les délibérations du conseil et en assure l'exécution. Il est ordonnateur des recettes et des dépenses. Il a autorité sur l'ensemble des personnels. Aucune affectation ne peut être prononcée si le directeur de l'institut ou de l'école émet un avis défavorable motivé. »
Le cahier des charges national de la formation des maîtres, fixé par le ministre après avis du Haut conseil, précisera les objectifs de cette formation, de son organisation, ainsi que l'articulation avec les services académiques et les relations fonctionnelles entre l'université d'accueil et, le cas échéant, d'autres établissements d'enseignement supérieur qui feront alors l'objet de conventions.
Ce cahier des charges national définira, en particulier, le rôle du directeur de l'IUFM dans l'élaboration et dans la mise en place de ces conventions.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 120 rectifié, sous réserve que M. le rapporteur accepte de le modifier en supprimant, dans le premier alinéa, « sur proposition du directeur de l'institut universitaire de formation des maîtres ».
En effet, il n'est pas apparu juridiquement opportun d'indiquer dans l'article que ces conventions seront conclues dans ces conditions, en préjugeant, d'une certaine manière, les concertations à venir.
S'agissant de la Réunion, madame Payet, le projet de loi ne change rien par rapport à la situation actuelle. L'intégration de l'IUFM dans l'université de la Réunion ne posera aucune difficulté puisqu'il n'y a, en effet, qu'une université pluridisciplinaire à la Réunion.
Pour le reste, les règles resteront celles que l'on connaît aujourd'hui, notamment lorsqu'il s'agit des stages que font les étudiants des IUFM.
Enfin, je vous rappelle, madame la sénatrice, que l'article L.713-9 du code de l'éducation prévoit l'autonomie financière des IUFM.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques réponses que je souhaitais apporter.
Le président de séance vient de nous faire savoir que six demandes de scrutin public ont été déposées sur cet article.
M. le président. Il y en a dix maintenant, monsieur le ministre !
M. François Fillon, ministre. Depuis le début de la soirée, nous en sommes à vingt-deux demandes de scrutin public !
En conséquence, en application de l'article 44, dernier alinéa, de la Constitution et de l'article 42, alinéa 7, du règlement du Sénat, je demande au Sénat de se prononcer par un vote unique sur l'article 23, assorti du seul amendement n°120 rectifié, sous réserve que M. le rapporteur accepte de le modifier. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. Monsieur le rapporteur, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens souhaité par M. le ministre ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Nous aurions préféré que cette phrase figure dans l'article, mais compte tenu des précisions de M. le ministre - cette disposition ne relève peut-être pas de la loi et le rôle du directeur d'IUFM figurera dans le cahier des charges -, j'accepte de modifier cet amendement.
Mme Annie David. Le ministre fait confiance aux universités, mais pas aux directeurs d'IUFM !
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 120 rectifié bis, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, et ainsi libellé :
A - Compléter le texte proposé par le I de cet article pour les deux premiers alinéas de l'article L. 721-1 par deux alinéas ainsi rédigés :
« Des conventions peuvent être conclues, en tant que de besoin, avec d'autres établissements d'enseignement supérieur.
« D'ici 2010, le comité national d'évaluation des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel procède à une évaluation des modalités et des résultats de l'intégration des instituts universitaires de formation des maîtres au sein des universités, notamment au regard des objectifs qui leur sont fixés. »
B - En conséquence, dans le premier alinéa du I de cet article, remplacer les mots :
un alinéa ainsi rédigé
par les mots :
trois alinéas ainsi rédigés
En application...
Mme Hélène Luc. Rappel au règlement !
M. le président. Vous aurez la parole, madame Luc, mais permettez au président de séance, lorsqu'il intervient, de terminer sa phrase !
En application de l'article 44, dernier alinéa, de la Constitution et de l'article 42, alinéa 7, de notre règlement, le Gouvernement demande au Sénat de se prononcer par un seul vote sur l'article 23 dans la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, modifiée par l'amendement n° 120 rectifié bis à l'exclusion de tous les autres amendements.
Je vais donc mettre aux voix, par un seul vote, l'article 23, modifié par l'amendement n° 123 rectifié bis (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.) ...
Mme Hélène Luc. Rappel au règlement !
M. Jean-Marc Todeschini. Le ministre est pressé ! Vous refusez le débat ! Vous ne voulez pas parler de l'école !
M. le président. Monsieur Todeschini, je rappelle simplement les éléments de la Constitution qui fondent, avec le règlement du Sénat, notre façon d'organiser les débats.
M. Jean-Marc Todeschini. Je ne fais que répondre au brouhaha que le ministre a créé ! Il nous mène à la baguette !
M. le président. Il est tout à fait légitime et parfaitement conforme, à la fois à la Constitution et au règlement du Sénat, je le répète, de fonctionner ainsi ! Il s'agit d'une procédure que vous connaissez, mon cher collègue, comme tous ceux qui siègent dans cette assemblée depuis longtemps.
Bien entendu, avant de voter, les uns et les autres ont la possibilité d'expliquer leur vote. Par conséquent, il est tout à fait légitime que vous puissiez donner votre opinion, madame Luc.
Je vous donne donc la parole, pour explication de vote !
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, je demande la parole pour un rappel au règlement et non pour une explication de vote !
M. le président. Quel article du règlement invoquez-vous? (Sourires.)
Mme Hélène Luc. Appelez cela comme vous voudrez, monsieur le président ! (Nouveaux sourires)
M. le président. Madame Luc...
Mme Hélène Luc. Soit, c'est une explication de vote ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Cela étant, M. le ministre exagère : non seulement il supprime deux lectures de cet important projet de loi, sur lequel - j'insiste - les directeurs d'IUFM n'ont pas été consultés de manière sérieuse, non seulement il a avancé d'une semaine la date de discussion de ce texte, initialement prévue le 22 mars, mais de plus, maintenant, parce que nous nous permettons de demander des scrutins publics - ce qui est notre droit le plus absolu - sur un certain nombres d'amendements majeurs, il remet en cause le droit des parlementaires d'amender un texte, et il demande un vote bloqué !(Vives protestations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Je tiens à élever une vive protestation. Monsieur le ministre, vous dépassez les bornes, car vous êtes très inquiet ! Vous savez ce qui se passe dans le pays ! Vous savez qu'il y a de grandes manifestations de lycéens, d'enseignants, de parents d'élèves (Rires sur les travées de l'UMP.) ! Vous savez qu'un certain nombre de lycées ont été occupés ! Vous savez sans doute également que, lundi, de nouvelles manifestations sont prévues !
Vous êtes en difficulté, car le référendum constitutionnel européen...
Plusieurs sénateurs de l'UMP. Nous y voilà !
Mme Hélène Luc. Bien sûr ! Il est évident que cela a une conséquence et que vous y voyez une corrélation !
Si le « non » progresse, monsieur le ministre - avez-vous lu les sondages ce matin ? - c'est parce que vous êtes en train de nous y aider ! (Exclamations sur les mêmes travées.)
M. Christian Demuynck. Vous devez être contente !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. C'est de l'amalgame !
M. le président. Laissez Mme Luc s'exprimer !
Mme Hélène Luc. En effet, les différentes catégories de la population ne supportent plus toutes les attaques que le Gouvernement conduit en ce moment, contre les enseignants, contre les emplois, etc. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. Roger Karoutchi. C'était une explication de vote sur quoi ?
M. Christian Demuynck. Qu'est-ce que cela a à voir le projet de loi ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Todeschini. En guise de rappel au règlement, je veux faire une remarque. Vous nous avez longuement expliqué cet après-midi, monsieur le ministre, que le Gouvernement souhaitait que l'on aille au fond de la discussion. En réalité, ce n'était que simulacre et, maintenant, les masques tombent !
Mme Hélène Luc. C'était un faux-semblant !
M. Jean-Marc Todeschini. Le ministre, pas plus que la majorité, ne veut que l'on débatte de son projet de loi !
Plusieurs sénateurs de l'UMP. Mais si !
M. Jean-Marc Todeschini. Mais non ! Sur le terrain, vous êtes les premiers à manifester avec les parents d'élèves dès qu'une classe est fermée dans vos départements : vous avez peur du résultat des urnes ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Quoi qu'il en soit, vous refusez d'écouter la rue, vous refusez d'écouter les parlementaires !
Pour ma part, je souhaite simplement que les débats soient beaucoup plus sereins, du moins dans la façon de les conduire, car je n'ai rien contre les échanges vifs.
Nous sommes en train d'examiner un texte qui concerne le rythme des enfants, la formation, l'école en général : si vous ne respectez ni le rythme des enfants ni celui des enseignant, monsieur le ministre, respectez au moins le rythme des parlementaires ! Ne nous menez pas au canon !
Le Gouvernement n'a pas d'autre solution, au Sénat, que de demander des votes bloqués - à l'Assemblée nationale, c'est différent. Il utilise toutes les procédures. L'article 40 est invoqué dès que cela semble possible !
Je suis d'ailleurs surpris que M. Longuet ait, tout à l'heure, opposé l'article 40 à un amendement du groupe CRC, et ce sans aucune explication !
Mme Annie David. Et alors que cet amendement était gagé !
M. Jean-Marc Todeschini. Lorsque nous demandons des explications, que fait M le ministre ? Il demande que le Sénat se prononce par un vote unique !
Monsieur le ministre, nous sommes des parlementaires et nous avons le droit de comprendre. Expliquez-vous lorsque vous utilisez des artifices de procédure ! En tout état de cause, le dernier artifice auquel vous avez eu recours est clair : vous ne voulez pas du débat ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Christian Demuynck. Mais si !
M. Jean-Marc Todeschini. Bien sûr que non ! Cela gêne la majorité de se prononcer sur tous les amendements par un scrutin public : vous ne voulez pas, messieurs, que vos noms figurent dans les journaux comme ayant voté cette loi car, demain, les enseignants sauront que l'UMP travaille au canon avec le ministre ! (Rires sur les travées de l'UMP.)
Quinze ans après la loi de 1989, le Gouvernement veut faire adopter, dans la précipitation, un nouveau texte sur l'école sans avoir dressé, au préalable, un bilan approfondi de la précédente loi et en fuyant le débat !
M. Fillon ne s'attaque pas en profondeur aux conditions de la réussite de tous les élèves : 160 000 jeunes sortent chaque année du système éducatif sans diplôme ; ils seront plus de 1,5 million dans dix ans ; douze enfants pauvres contre un enfant de cadre se retrouvent, à dix-sept ans, dans cette situation. Et vous voudriez que nous nous taisions ? C'est inadmissible !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Calmez-vous ! Vous, qu'avez-vous fait ?
M. Christian Demuynck. C'est votre bilan !
M. Jean-Marc Todeschini. La pauvreté est un facteur déterminant. Pourtant, monsieur le ministre, vous avez refusé tout au long du débat de tenir compte des conditions sociales. Or, si l'école ne s'efforce pas de contrebalancer les diverses inégalités, elle perpétue l'exclusion ou elle l'aggrave. Mais de tout cela, l'UMP se moque éperdument !
Au-delà d'une réorganisation en profondeur du système scolaire, monsieur le ministre, vous inscrivez votre réforme dans le moins d'Etat. Vous l'avez d'ailleurs déclaré : il n'est pas possible de suivre les préconisations de la commission Thélot, car l'on ne peut accroître de 8 milliards à 10 milliards d'euros un budget qui représente déjà 23 % du budget général de l'Etat ! (M. le ministre proteste.)
Parfaitement, monsieur le ministre ! Tout à l'heure, lorsque nous vous disions des vérités que vous n'aimiez pas entendre, vous riiez, vous vous amusiez ; alors, continuez !
Monsieur le président, la vérité est que l'on veut nous museler ! Le groupe socialiste vous demande une suspension de séance d'au moins un quart d'heure afin que nous puissions nous déterminer sur ce vote bloqué et mettre au point une réflexion commune. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement, depuis le début du débat, mardi après-midi, a fait preuve d'une extrême patience.
M. Roger Karoutchi. C'est vrai !
Mme Annie David. C'est bien le rôle du Gouvernement que d'écouter les parlementaires !
M. François Fillon, ministre. Nous sommes en train de faire évoluer une loi - celle de 1989 - qui, elle aussi, avait été votée selon la procédure d'urgence. Pourtant, les débats au Sénat avaient été beaucoup moins longs à l'époque qu'ils ne le sont aujourd'hui !
Mme Hélène Luc. Et alors ?
M. François Fillon, ministre. Par ailleurs, je veux souligner que c'est la première fois, depuis mardi, que le Gouvernement utilise la procédure du vote unique. Nous le faisons afin que les débats se déroulent normalement.
Je vous le dis clairement, mesdames, messieurs les sénateurs : si vous demandez des scrutins publics sur chaque amendement, le Gouvernement demandera des votes bloqués sur chaque article ! (Très bien ! sur les travées de l'UMP.)
Mme Hélène Luc. Mais c'est une menace !
Mme Annie David. C'est du chantage, monsieur le ministre !
M. François Fillon, ministre. Vous faites de l'obstruction caractérisée : le Gouvernement vous répond de la manière qui convient !
Au Sénat, le débat sur la loi de 1989 avait duré trois jours ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme Hélène Luc. Et alors, qu'est-ce que ça prouve !
M. le président. S'il vous plait, mes chers collègues, reprenons nos travaux !
Au début de la séance, certains d'entre vous ont dit qu'ils utiliseraient tous les artifices de procédure pour retarder autant que possible l'examen du texte, et que la majorité ne gagnerait rien à organiser ainsi nos débats !
Mme Annie David. Personne ne gagnera rien !
M. le président. Madame David, permettez-moi de terminer ! Je vous laisserai la parole aussi longtemps que vous l'aurez, dans le respect du règlement du Sénat !
Mme Annie David. Mais nous avons de droit de demander des scrutins publics !
M. le président. Vous avez raison, madame David, chacun peut demander un scrutin public et il s'agit là d'une démarche légitime. Mais, de la même façon, il est tout aussi légitime que le Gouvernement demande au Sénat de se prononcer par un vote unique...
Mme Hélène Luc. Ce n'est pas légitime ! (Protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Cela vous contrarie, madame Luc, mais c'est légitime !
M. le président. Madame Luc, ce qui est prévu par la Constitution et par le règlement est légitime !
Mme Hélène Luc. C'est plutôt une preuve de faiblesse !
M. le président. Chère collègue, il est utile que nous n'ajoutions pas à la confusion, et que nous puissions rester dans le cadre d'un dialogue constructif !
Je ne comprends pas que, lorsque le Gouvernement recourt aux procédures prévues par le règlement, vous estimiez que cela n'est pas adapté !
Je vous rappelle - mais vous le savez parfaitement - qu'un scrutin public a été demandé par l'opposition sénatoriale sur chacun des amendements déposés à l'article 22. Vous avez ouvertement déclaré que vous souhaitiez faire usage de toutes les procédures disponibles.
Dans ces conditions, le Gouvernement est bien évidemment amené à réagir pour faire en sorte que le débat puisse avancer. (Très bien ! sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
Nous allons donc poursuivre les explications de vote.
M. Jean-Marc Todeschini. J'ai demandé une suspension de séance !
M. le président. La suspension de séance n'est pas de droit ! Tout à l'heure, nous aurons l'occasion, comme cet après-midi, d'examiner votre demande. Pour l'instant, nous en sommes aux explications de vote sur un article.
M. Jean-Marc Todeschini. Mais nous avons besoin de réorganiser nos réponses ! Je demande la parole pour un rappel au règlement ! J'interviendrai pour explication de vote ensuite !
M. le président. J'ai bien noté, je le répète, votre demande d'une suspension de séance. Mais pour l'instant, nous allons terminer les explications de vote sur la procédure engagée par le Gouvernement et prévue par le règlement, à savoir un seul vote sur l'article 23, modifié par le seul amendement n° 120 rectifié bis ; nous allons entendre tout d'abord Mme David.
M. Jean-Marc Todeschini. Nous accorderez-vous ensuite la suspension de séance que nous avons demandée, monsieur le président ?
M. le président. Je serai amené à vous accorder cette suspension, mais à condition que nous puissions avancer dans le débat et que l'obstruction soit donc réduite au minimum.
M. Jean-Marc Todeschini. Le ministre utilise le règlement du Sénat comme il veut. Il a raison ! L'opposition fait de même. Pourquoi donc n'a-t-il pas protesté, hier, lorsque vous avez demandé que le Sénat se prononce par scrutin public sur l'article 6 ?
M. le président. Vous remarquerez que je vous ai laissé la parole, que vous vous êtes exprimé une nouvelle fois et que je vous ai laissé terminer. Cela prouve que, au-delà du règlement, la parole est libre lorsque nous respectons certaines limites.
La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Vous conviendrez qu'il nous est très difficile d'expliquer notre position compte tenu du recours au vote bloqué. Nous avions déposé plusieurs amendements sur cet article. Je veux faire remarquer à la Haute Assemblée que nos demandes de scrutins publics sur l'ensemble des amendements sont motivées par la grande importance que nous portons à ces derniers.
M. Roger Karoutchi. Bien sûr...
Mme Annie David. Initialement, nous n'avions pas l'intention de recourir à ce type de procédure, car il nous semblait qu'un débat de fond serein, calme et courtois pouvait s'instaurer. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.) Or nous constatons qu'un tel débat n'a pas lieu puisque nous n'avons pas de réponse.
Nous avons été prévenus la veille pour le lendemain que nous allions siéger. Il était prévu que la séance serait levée à minuit et demi. A tout le moins, nous devions disposer d'informations sur la suite de l'organisation des débats. Or il est minuit cinquante. Nous aimerions savoir jusqu'à quelle heure les débats vont se prolonger. Devons-nous aller plus loin ? Nous avons entendu dire que la séance pourrait se tenir jusqu'à trois heures du matin, parce que certains, notamment M. le ministre, ont des obligations demain matin.
Mme Annie David. On ne respecte pas le travail des parlementaires de province, de ceux qui ne sont pas élus en région parisienne et qui ne peuvent donc pas rentrer chez eux à cette heure-ci. Ils seront donc bloqués et devront attendre jusqu'à quinze heures, demain, la reprise des débats parce que cela arrange certains parlementaires de l'UMP, voire le ministre !
Mme Annie David. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi de m'élever vivement contre cette façon de procéder. Je suis parlementaire depuis septembre 2001, soit depuis peu de temps. Cette façon de travailler contribue à éloigner davantage nos concitoyens de la politique. Débattre dans de telles conditions ne ressemble en effet plus à rien !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. C'est sûr, compte tenu de votre attitude !
Mme Annie David. Nous débattons depuis mardi après-midi. Nous essayons d'avancer des propositions. Compte tenu de la déclaration d'urgence sur ce texte, nous n'aurons pas l'occasion d'en discuter à nouveau. Aussi nous semble-t-il important d'examiner à fond certains articles du projet. Mardi prochain aura lieu la commission mixte paritaire. Ceux d'entre nous qui en feront partie - je représenterai probablement mon groupe -, enfermés dans une pièce, n'auront qu'une faible possibilité de faire évoluer les choses. Tout se déroulera dans un cercle bien fermé et votre agenda sera ainsi respecté, monsieur le ministre. Ce faisant, on ne respecte absolument pas notre travail, non plus que ce qu'exprime l'ensemble de la communauté éducative et lycéenne.
Vraiment, nous nous élevons contre cette façon de faire. Nous aurons du mal à nous exprimer sur l'article 23, sur lequel nous avions déposé plusieurs amendements. Nous voulions expliquer notre vote à l'issue de l'examen de ces amendements. Je demande donc également une suspension de séance pour nous permettre de remettre un peu d'ordre dans nos explications de vote et de retrouver un peu de calme et de sérénité.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. Elu sénateur encore plus récemment que Mme David, je suis étonné de la façon dont le Parlement est traité. En vérité, je ne le suis pas totalement, car je savais déjà que, sous la vè République, le mépris envers le Parlement relève presque de la tradition.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il ne fallait pas vous faire élire !
M. David Assouline. Ce qui m'a le plus étonné, c'est que les parlementaires eux-mêmes, parce qu'ils soutiennent un gouvernement - je parle pour vous, messieurs de la droite - acceptent de se taire quand on met à mal leur propre fonction !
M. Roger Karoutchi. Pas de leçons !
M. David Assouline. Je ne donne pas de leçons ! J'affirme des convictions, monsieur Karoutchi !
M. Roger Karoutchi. Voyez donc comment nous étions traités sous le gouvernement Jospin !
M. David Assouline. Vous le laissez m'interrompre, monsieur le président ?
M. le président. Monsieur Assouline, sans doute n'avez-vous pas encore eu l'occasion de prendre connaissance du règlement. Il n'est pas autorisé d'interpeller d'autres parlementaires dans l'hémicycle !
M. David Assouline. C'est lui qui m'a interpellé !
M. le président. Non !
M. David Assouline. Il m'a interpellé sans que vous lui demandiez de s'interrompre ! Je me suis donc senti obligé de lui répondre !
M. le ministre nous reproche, comme si nous étions dans une cour de récréation, d'avoir demandé, à dix reprises, un vote par scrutin public. Il s'engage à ne plus recourir à la procédure du vote bloqué si nous-mêmes, en contrepartie, nous nous engageons à ne plus demander des votes par scrutin public.
Le problème est que les choses ne se sont pas déroulées de la sorte. Un grand débat national a eu lieu, auquel ont participé un million de personnes.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Vous n'en vouliez pas !
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Qui en a pris l'initiative, si ce n'est le Gouvernement ?
M. David Assouline. Il en est résulté un rapport dont il n'a pas été tenu compte. Un conseil supérieur de l'éducation nationale a été créé, et tous les syndicats se sont prononcés contre votre projet. Cela ne vous a pas empêché de persévérer.
Si l'urgence a été déclarée sur le texte, c'est non pas parce qu'il était urgent que la loi fût votée - à l'Assemblée nationale, le débat a commencé selon la procédure normale -, mais bien parce que les lycéens sont descendus dans la rue. Subitement, il devenait urgent de faire adopter une grande loi déterminant l'avenir de notre éducation nationale au cours des vingt prochaines années, selon les propos du Président de la République.
Compte tenu de la déclaration d'urgence, une seule lecture aura lieu sur ce texte. On pouvait donc envisager d'aller au fond des choses, d'apporter un éclairage sur ce projet de loi. Or il a été décidé de ne tenir compte qu'au compte-gouttes des amendements soutenus par l'opposition.
Malgré tout, bien que vous opposiez une fin de non-recevoir à notre volonté de débattre, nous sommes là, assidus. Après avoir été mis en minorité, de manière légitime et démocratique, au cours d'un vote, vous avez inventé un artifice procédural pour y obvier. L'un d'entre vous osera-t-il un jour, pour en montrer le ridicule, expliquer aux Français, à la télévision, la manière dont cet article de loi a été adopté ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Mais bien sûr !
M. David Assouline. On nous annonce ensuite que nous siégerons cette nuit et demain,...
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Et alors ?
M. David Assouline.... dans des conditions lamentables pour tout le monde. Vous savez tout aussi bien que nous qu'on ne travaille pas de manière satisfaisante dans de telles conditions ! Nous ne l'acceptons pas et le disons ! Quant à vous, mesdames et messieurs de la majorité, vous continuer à vous comporter en béni-oui-oui !
Maintenant, vous invoquez à tout va l'article 40 de la Constitution. Encore un artifice ! Aucune explication n'est donnée aux novices comme moi ! Pourquoi invoquer l'article 40 quand l'amendement est gagé ? Ce n'est pas nécessaire ! Notre séance n'est pas télévisée, et les Français ne voient donc pas ce que vous faites !
Ensuite, il est fait recours à la procédure du vote bloqué. On nous explique que c'est notre faute, que nous essayons de jouer la montre.
Mme Annie David. C'est du chantage !
M. David Assouline. Nous tentons, à votre corps défendant, de réhabiliter le Parlement ! (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.) Les Français se détournent de la politique parce qu'ils ne croient plus en leurs institutions. A cet égard, le Sénat n'est pas le mieux placé dans leur estime. Laissez-nous alors faire cette oeuvre-là !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. C'est un privilège d'être nouveau. Encore ne faut-il pas en abuser. On peut apprendre le règlement du Sénat, qui nous permet de travailler ensemble.
L'article 45 de ce règlement est ainsi rédigé : « Tout amendement dont l'adoption aurait pour conséquence, soit la diminution d'une ressource publique non compensée par une autre ressource, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique peut faire l'objet d'une exception d'irrecevabilité soulevée par le Gouvernement, la commission des finances, la commission saisie au fond ou tout sénateur. L'irrecevabilité est admise de droit, sans qu'il y ait lieu à débat, lorsqu'elle est affirmée par la commission des finances. L'amendement est mis en discussion lorsque la commission des finances ne reconnaît pas l'irrecevabilité. »
M. Robert Del Picchia. Très bien !
Mme Hélène Luc. On peut quand même poser des questions !
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Nous pouvons naturellement modifier ce règlement. Mais ce soir, cher collègue, je vous propose simplement de l'appliquer. En effet, le règlement me donne la possibilité, en tant que représentant de la commission des finances, d'opposer l'article 40 dès lors qu'un amendement aurait pour conséquence de diminuer une ressource publique non compensée par une autre ressource, ou, madame Luc, de créer ou d'aggraver une charge publique. Qu'il soit gagé n'y change rien. C'est ainsi !
La Constitution de 1958 a mis en place un parlementarisme rationalisé. Notre règlement intérieur en procède. Grâce à cela, le fonctionnement des institutions est devenu plus stable. Je suis désolé de vous imposer cette leçon, monsieur Assouline. Mais la relative brièveté de mon expérience de sénateur ne m'empêche pas d'être convaincu de l'utilité des dispositions qui s'imposent à nous. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. David Assouline. Nous demandons une suspension de séance pour nous permettre de rassembler nos arguments !
M. le président. La parole est à M. Jean-François Voguet, pour explication de vote.
M. Jean-François Voguet. Être un nouvel élu n'est pas un privilège, c'est un fait. Précisément, en tant que nouvel élu, je dois dire que je suis stupéfait de la façon dont se déroulent les débats.
De quoi discutons-nous ? D'un projet de loi d'orientation pour les quinze prochaines années, projet qui concerne donc l'avenir de millions de jeunes et d'enfants. C'est évidemment une question primordiale. Chacun sait l'importance qu'ont, pour les parents, pour la société, pour nous-mêmes, les questions d'éducation dans notre pays.
On nous dit que c'est important, et que le débat doit être engagé.
Or, s'agissant d'une question qui engage l'avenir de la France pour quinze ans, ainsi que M. le ministre nous l'a dit et répété, le Gouvernement a déclaré l'urgence. Et comme l'urgence n'est pas suffisante - mais peut-être est-ce la conséquence de la déclaration d'urgence -, nous sommes contraints de travailler dans des conditions extravagantes, durant quatre nuits qui, d'ailleurs, vont se poursuivre. Ainsi, mardi, la séance a été levée à une heure vingt, mercredi et jeudi, à zéro heure trente ; ce matin, nous avons repris nos travaux à neuf heures trente ; nous ignorons à quelle heure la séance s'achèvera cette nuit - nous aimerions d'ailleurs bien le savoir -, et nous allons devoir travailler samedi et peut-être dimanche. Et l'on parle de l'avenir de nos enfants !
Je pose donc simplement la question : pourquoi cette précipitation ? Sommes-nous à deux ou trois heures près ? La raison de cette précipitation est-elle la réunion de la commission paritaire, qui doit avoir lieu mardi prochain ?
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Pas du tout !
M. Jean-François Voguet. Qu'est-ce que cela changerait fondamentalement qu'elle se réunisse mercredi ou jeudi ? Par conséquent, pourquoi une telle précipitation ? Peut-être, monsieur le ministre, pourrez-vous répondre à cette question.
Aucune assemblée dans notre pays, du conseil municipal au conseil général ou régional, ne se comporte de cette manière ! Aucune ! (Vives protestations sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
En tout cas - et je m'adresse aux élus locaux qui sont nombreux dans cette assemblée -, je considère que se comporter ainsi dans un conseil municipal, compte tenu de la proximité des électeurs, c'est de la folie ! Mais c'est aussi de l'irrespect vis-à-vis de nos concitoyens !
A un moment où la classe politique - chacun le pense et beaucoup le disent - est contestée, traiter de cette façon l'avenir de millions d'enfants et de jeunes, c'est, en quelque sorte, faire preuve d'irrespect envers les familles et les enfants de notre pays.
Vous avez dit tout à l'heure : « on a été traité ainsi par M. Jospin ! ».
M. Jean-François Voguet. Ce n'était pas bien ! (Rires et exclamations sur les mêmes travées.) Mais avoir été - soi-disant - traités d'une mauvaise manière par M. Jospin n'est pas une raison pour vous comporter de la même façon !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. C'est un aveu !
M. Jean-François Voguet. Cela est fini et a d'ailleurs été réglé par l'électorat. (M Roger Karoutchi applaudit.) Il faut faire de la politique autrement, respecter les citoyens, les entendre, les écouter, ce que vous refusez ! Votre attitude est non seulement irrespectueuse, mais aussi dangereuse pour l'avenir.
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Monsieur le président, mes chers collègues, le moins que l'on puisse dire c'est que, depuis un certain temps, je n'ai pas abusé de la parole. Je le regrette !
Mme Annie David. Nous le regrettons aussi !
M. David Assouline. C'est parce qu'on vous a demandé de vous taire ! Parlez donc !
M. Jacques Legendre. En effet, quand un vrai débat a lieu sur l'éducation, sur les sujets de fond, tout le monde a des choses à dire et souhaite pouvoir s'exprimer. Mais nous sommes un parlement et, à ce titre, nous devons le faire dans des délais raisonnables.
Vous avez eu raison de rappeler que la loi Jospin avait été débattue sur trois jours, comme d'ailleurs la loi Haby.
Mme Hélène Luc. Qu'est-ce que cela veut dire ?
M. Jacques Legendre. Ces débats n'avaient pas fourni le prétexte, ni à la majorité ni à l'opposition de l'époque, du spectacle lamentable que nous risquons de donner ce soir.
Il y a une façon très facile de voir si un débat est conduit loyalement ou bien si certains ont entrepris d'empêcher le débat et de « jouer la montre ». (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. David Assouline. Qui a commencé ?
M. Jacques Legendre. Chacun sait que déposer dix demandes de scrutin public sur un seul article, ce n'est pas vouloir favoriser un débat de fond, c'est vouloir gagner du temps et ajouter du temps au temps !
M. Jean-Marc Todeschini. Vous dites cela pour vous dédouaner !
M. Jacques Legendre. J'ai entendu M. Assouline se poser en restaurateur de la dignité du Parlement. (M. Roger Karoutchi approuve.) Ce que nous vivons ce soir me rappelle quelques souvenirs, monsieur Assouline, qui peut-être nous sont communs.
Mme Annie David. Monsieur le président, vous laissez interpeller les sénateurs !
M. Jacques Legendre. Nous sommes quelques-uns à avoir commencé notre vie politique par le syndicalisme étudiant. Je crois qu'on ne gagnera pas grand-chose à apporter à la Haute Assemblée les moeurs qui furent celles de certains amphithéâtres de l'UNEF à la grande époque ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. David Assouline. Pendant que d'autres assistaient aux assemblées générales du GUD !
M. Jacques Legendre. Ce n'est pas un progrès pour le Parlement. !
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le président, M. Assouline est interpellé !
M. Jacques Legendre. Il doit être bien clair que le débat qui se déroule au Parlement porte sur un sujet de fond important : l'amélioration de l'éducation dispensée à nos enfants.
La majorité entend - c'est légitime - faire passer ce qu'elle croit être bon pour le pays ; l'opposition le conteste - c'est son droit -, mais nous irons au fond des choses et, soyez-en assurés, ce texte sera voté ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF. - Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Yannick Bodin, pour explication de vote.
M. Yannick Bodin. Monsieur le ministre, artifice de procédure pour artifice de procédure, si vous n'aviez pas demandé un vote bloqué sur l'article 23, nous en serions peut-être à l'article 26 ou 27, à cette heure-ci !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Non, on vous fait confiance !
M. Yannick Bodin. En d'autres termes, croyez-moi, cela ferait belle lurette qu'il aurait été procédé aux neuf scrutins publics, et nous serions sans doute beaucoup plus loin dans la discussion.
En réalité, nous sentons bien votre inquiétude.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Il n'y a aucune inquiétude !
M. Yannick Bodin. Vous ne voulez pas, pour votre part, prendre le risque que ce débat dure trop longtemps, en tout cas trop longtemps pour vous. Je le comprends puisque vous avez déclaré l'urgence.
Même si vous aviez eu la possibilité, en déclarant l'urgence - mais, évidemment, ce n'est pas prévu par les textes -, de demander un vote bloqué sur l'ensemble de votre projet de loi,...
M. David Assouline. Une ordonnance !
M. Yannick Bodin.... nous aurions débattu en vingt minutes ; c'était terminé et l'on n'en parlait plus ! C'est évidemment ce que vous auriez souhaité !
D'ailleurs, on le voit très bien, puisque, au fur et à mesure que le débat avance, vous faites en sorte que le Parlement, en tout cas le Sénat pour l'instant, puisse de moins en moins s'exprimer.
Vous déclarez l'urgence ; ensuite, M. Longuet qui est resté muet pendant deux jours ou, en tout cas, qui ne se préoccupait pas de nos travaux, a fait une subite poussée de fièvre et crie maintenant tous les quarts d'heure « 40 » pour nous rappeler à ce fameux article !
Nous voyons bien que vous avez effectivement l'intention d'accélérer les choses pour nous empêcher de nous exprimer. Maintenant, vous faites une tentative de blocage, qui est d'ailleurs réussie puisque nous en discutons depuis quarante minutes ! Si vous voulez qu'elle dure encore autant de temps, c'est possible !
Monsieur le ministre, laissez donc le Parlement s'exprimer à sa manière. Je crois savoir que les scrutins publics sont prévus par le règlement intérieur du Sénat. Ce n'est pas un artifice, c'est un moyen pour chacun d'exprimer clairement et hautement son opinion, de dire publiquement ce qu'il pense de chacun des amendements, et tout le monde y retrouve ses petits puisque les votes sont ensuite consignés.
Ce n'est pas un artifice de procédure, c'est au contraire une manière d'apporter transparence et compréhension dans le débat.
Je vous en prie, monsieur le ministre, laissez le Parlement délibérer sur votre projet de loi comme cela lui convient !
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Comme cela convient au groupe socialiste !
M. Yannick Bodin. C'est ainsi que nous entendons poursuivre nos travaux jusqu'à leur terme.
M. le président. Je vais mettre aux voix, par un seul vote, l'article 23, modifié par l'amendement n° 120 rectifié bis de la commission.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, une suspension de séance vous a été demandée avant le vote !
M. le président. Madame Luc, je vous ai expliqué que nous examinerions votre demande après le vote. (Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Jean-Marc Todeschini. Nous voulons mettre au point nos explications de vote !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Les explications de vote sont terminées !
Mme Hélène Luc. Je n'ai pas expliqué mon vote !
M. Robert Del Picchia. Si, vous l'avez fait !
Mme Hélène Luc. Nous devons nous réunir avant les explications de vote !
M. le président. Madame Luc, je me souviens vous avoir entendu dire tout à l'heure : « C'est une explication de vote ». (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. Jean-Marc Todeschini. Le groupe socialiste n'a pas expliqué son vote !
M. le président. Permettez-moi, chers collègues, de rappeler que, lorsque nous sommes dans une procédure de vote, après que le Gouvernement et la commission ont donné leur avis, nous passons aux explications de vote qui interviennent avant le vote lui-même. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le président, vous biaisez le débat !
M. le président. J'ai eu l'occasion d'indiquer à Mme Luc, lorsqu'elle est intervenue, que nous étions dans la procédure des explications de vote.
Mme Hélène Luc. Parce que vous l'imposez ; on aurait pu procéder autrement ! On n'est pas obligé de voter tout de suite parce que le ministre le demande !
M. le président. Madame Luc, la procédure est conforme à notre règlement. Au total, sept explications de vote ont été faites. Vous avez pu exprimer les raisons de votre désaccord avec la commission et le Gouvernement.
Nous allons donc pouvoir procéder au scrutin public.
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le président, au moment où le ministre a demandé le vote bloqué, j'ai souhaité une suspension de séance et vous avez dit qu'on allait examiner ma demande !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Après le vote !
M. Jean-Marc Todeschini. Non, avant !
M. le président. Monsieur Todeschini, je vous ai déjà répondu.
M. Jean-Marc Todeschini. Le groupe socialiste a demandé une explication de vote sur l'article 23 !
M. le président. Vous aviez en effet demandé à expliquer votre vote. S'agissant de votre demande de suspension de séance - et c'est l'une des prérogatives du président de séance que d'y donner suite ou non -,...
M. Jean-Marc Todeschini. Je doute que vous nous l'accordiez !
M. le président.... je vous ai indiqué que nous reparlerions de la suspension de séance une fois la procédure du vote sur l'article 23 achevée.
M. Jean-Marc Todeschini. C'est faux !
M. le président. Nous passons au vote.
M. Jean-Marc Todeschini. Ce n'est pas possible ! Personne ne s'est exprimé sur cet article. Nous devons nous réunir pour mettre au point nos explications de vote !
M. David Assouline. Laissez-nous au moins en faire une !
Mme Annie David. Nous voulons également nous exprimer !
Mme Hélène Luc. Il n'y a pas de débat ! Personne ne parle, de l'autre côté de l'hémicycle !
M. Jean-Marc Todeschini. On nous empêche de débattre !
M. Roger Karoutchi. Cela suffit !
M. le président. Revenez à la réalité, monsieur Todeschini !
M. Jean-Marc Todeschini. Je suis tout à fait réaliste : des milliers de classes vont fermer, et c'est tout ce que vous trouvez à nous opposer !
Mme Eliane Assassi. Il manque des infirmières !
Mme Annie David. Il n'y a pas assez de médecins ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Quel rapport avec le débat ?
M. le président. Je rappelle que, en application de l'article 44, dernier alinéa, de la Constitution et de l'article 42, alinéa 7, du règlement du Sénat, le Gouvernement a demandé au Sénat de se prononcer par un seul vote sur l'article 23, modifié par l'amendement n° 120 rectifié bis de la commission.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 149 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 202 |
Contre | 125 |
Le Sénat a adopté.
Mme Hélène Luc. C'est un vote acquis par la force !
M. le président. Monsieur Todeschini, maintenez-vous votre demande de suspension ?
M. Jean-Marc Todeschini. Le but de cette demande de suspension de séance était de mettre au point notre explication de vote. Nous ne voulons pas d'une interruption pour rien !
Je regrette en tout cas, monsieur le président, que vous ayez pour la première fois empêché l'opposition de s'exprimer !
Mme Annie David. Je demande une suspension de séance.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons donc interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue le samedi 19 mars, à une heure vingt, est reprise à une heure vingt-cinq.)
M. Jacques Pelletier. Monsieur le président, il est une heure trente du matin. Je croyais avoir compris tout à l'heure que le Sénat avait décidé de siéger samedi, le matin, l'après-midi et le soir.
Si nous levions la séance maintenant, nous ne reprendrions nos travaux que demain matin, à dix heures trente. J'aimerais donc connaître les intentions de la présidence.
M. le président. Je me tourne vers la commission et le Gouvernement.
Nous avions souhaité, les uns et les autres, faire progresser le débat le plus vite et le plus loin possible. Or nous avons constaté de part et d'autre l'utilisation de procédures de ralentissement ou d'accélération.
Je m'adresse donc à tous : serait-il possible de retrouver des modalités de fonctionnement nous permettant d'examiner les amendements à un rythme normal et, par conséquent, d'envisager, pour cette fin de séance et pour la prochaine, de meilleures conditions de travail ?
Je vous rappelle que nous avons encore 273 amendements à étudier. Ceux-ci ne doivent pas être examinés à une vitesse telle qu'ils ne pourraient pas être correctement défendus et compris. Néanmoins, il serait bon d'éviter de recourir systématiquement à un vote par scrutin public afin que nous puissions progresser.
Dans ces conditions, je suis persuadé que le Gouvernement renoncerait à utiliser la procédure du vote unique.
Mme Hélène Luc. Pas de menace, monsieur le président !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Ce n'est pas une menace !
Mme Hélène Luc. Je n'ai jamais vu cela ici !
M. le président. Cela nous permettrait de faire avancer le débat dans de bonnes conditions, d'interrompre et de reprendre nos travaux dans des délais raisonnables. Mais tout dépend de la bonne volonté de chacun.
Je ne peux pas prendre seul de décision, car celle-ci dépend de chaque membre de cette assemblée et, en particulier, de chaque groupe politique.
La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Vos paroles, monsieur le président, sont des paroles de sagesse.
Nous ne serions pas dans cette situation, sachant que nous avons commencé la discussion mardi dernier à seize heures, si, de part et d'autre, n'avaient pas été utilisées toutes les possibilités que nous offre notre règlement.
A l'évidence, si nous prenons, les uns et les autres, l'engagement d'éviter d'utiliser le règlement à des fins dilatoires, d'une part, nous pourrons travailler plus sereinement et plus convenablement et, d'autre part, nous gagnerons du temps.
Votre proposition, monsieur le président, est empreinte de sagesse, et je l'apprécie tout à fait.
M. Robert Del Picchia. Très bien !
M. le président. Je me permets donc de suggérer aux responsables des groupes de prendre position et, mes chers collègues, je propose que nous poursuivions le débat.
M. Jacques Pelletier. Jusqu'à quelle heure ?
M. le président. J'avoue que je préférerais ne pas avoir à présider une séance où les questions de procédure prennent le pas sur le débat de fond.
Par ailleurs, j'invite les orateurs des divers groupes à faire preuve de brièveté.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Monsieur le président, je refuse de porter la responsabilité de la situation dans laquelle nous nous trouvons.
Dès nos interventions dans la discussion générale, nous avons dénoncé le recours à la procédure de l'urgence et regretté que, pour un texte d'une telle ampleur, il n'ait été prévu de débattre que du mardi au jeudi, et « éventuellement » le vendredi.
C'est sans doute ce qui explique que nous soyons où nous en sommes, à une heure et demie du matin un samedi, après quatre jours passés sur ce texte !
Je refuse donc, je le répète, de porter la responsabilité de la situation.
Pour notre part, nous avons effectué un travail sérieux, nous avons préparé des amendements, nous avons des propositions à faire dans le cadre de ce projet de loi et nous estimons avoir le droit de nous exprimer.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Personne ne le conteste !
Mme Annie David. Nous avons été prévenus hier après-midi seulement que nous siégerions aujourd'hui et peut-être demain. C'est d'autant plus inacceptable que l'on ne voit vraiment pas pourquoi !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Pour avancer !
Mme Annie David. Apparemment en effet, il n'y a aucune raison pour que le débat ne se tienne pas lundi.
Aussi ma position est-elle, pour l'instant, la suivante : j'ai bien entendu votre demande, monsieur le président, ainsi que celle de M. Valade, mais notre groupe constitue une équipe et je ne suis pas seule à décider de l'organisation de nos travaux.
Quand bien même cela relèverait de ma responsabilité, j'avoue que j'aurais du mal à accepter de me plier à ce chantage.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Ce n'est pas du chantage !
Mme Annie David. Le groupe CRC va donc attendre de voir comment la situation évolue et, en fonction de l'évolution, il s'adaptera, dans un sens ou dans l'autre, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini.
M. Jean-Marc Todeschini. Nous débattons de ce texte depuis mardi, le ton monte, on s'échauffe...
M. Roger Karoutchi. Pas nous !
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur Karoutchi, je n'ai pas oublié certains termes venus de l'autre côté de l'hémicycle !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Todeschini !
M. Jean-Marc Todeschini. Chers collègues de la majorité, depuis que je suis entré en politique, un seul personnage est parvenu à me faire taire et, depuis, je me suis juré que plus personne n'y parviendrait. Tant que j'aurai de la voix, je continuerai donc à m'exprimer !
Cela étant dit, je ne veux ni empoisonner le débat ni bloquer le fonctionnement de notre assemblée,...
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Très bien ! Alors on poursuit !
M. Jean-Marc Todeschini.... mais, comme Mme David, je regrette que le Gouvernement recourre à des artifices de procédure, même s'il le fait dans le respect du règlement. Jeudi, par exemple, il a bien été obligé de le faire à cause du nombre insuffisant de sénateurs de l'UMP présents en séance, ce qui nous a d'ailleurs fait perdre une demi-journée !
Aujourd'hui, nous avons avancé, mais permettez à un sénateur de province de redire que nous n'avons pas apprécié d'apprendre cet après-midi que le Gouvernement nous convoquait demain. Nous l'avons même très mal pris, mais que faire puisqu'on nous oblige à siéger ? Eh bien, nous faisons notre travail !
Monsieur le président, on nous reproche de recourir systématiquement au scrutin public - soit dit en passant, nous avons constaté que, lorsqu'il le fallait, le ministre ou en tout cas la commission n'hésitaient pas à y recourir aussi -, mais je vous assure que nous n'apprécions pas trop non plus son usage systématique.
J'ai siégé dans une autre assemblée, qui était présidée par M. Longuet. Jamais je n'ai fait d'obstruction. M. Longuet, à l'époque, laissait parler tout le monde, et il répondait même. Nous étions rarement d'accord, mais au moins le dialogue avait lieu.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il fallait le garder !
M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Vous savez ce qu'il vous reste à faire !
M. Jean-Marc Todeschini. Comment ?....
M. le président. Mes chers collègues, pas de discussions personnelles !
M. Jean-Marc Todeschini. Les socialistes n'entendent pas du tout bloquer le fonctionnement de notre assemblée,...
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Très bien !
M. Jean-Marc Todeschini.... mais ils utilisent eux aussi les armes que leur fournit le règlement pour pouvoir s'exprimer.
Comme l'a dit M. Pelletier, il a été décidé - nous avons, je le rappelle, voter contre - que le Sénat siégerait demain matin. Or il est tard, et il sera bientôt trop tard pour pouvoir siéger demain matin. Nous estimons qu'il est temps d'aller nous coucher, non pas pour ramener les esprits au calme mais pour nous permettre de nous reposer et de mieux défendre demain nos amendements.
Nous souhaitons donc, monsieur le président, que le Sénat arrête très bientôt ses travaux pour pouvoir les reprendre demain matin.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Luc.
Mme Hélène Luc. Si nous avions été entendus et qu'au lieu de prévoir quatre jours de discussion pour ce projet de loi la conférence des présidents avait organisé le débat sur deux semaines comme à l'Assemblée nationale, nous n'en serions pas là ce soir. Le comble est que vous nous imputiez toute la responsabilité !
Mme Hélène Luc. Eh bien, nous, nous prenons le temps nécessaire ! J'ai d'ailleurs suivi une partie du débat à l'Assemblée nationale et constaté que, sur un certain nombre d'articles, beaucoup de choses n'ont pas été dites. Nous, nous prenons nos responsabilités, et chaque sénateur a le devoir de faire de même !
Par ailleurs, monsieur le président, à l'Assemblée nationale, il arrive parfois que le président résiste au Gouvernement quand ce dernier tente de précipiter la discussion, et le devoir d'un président de séance est bien de faire en sorte que les parlementaires puissent s'exprimer.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Vous vous êtes largement exprimée, madame Luc !
Mme Hélène Luc. Je sais que le Gouvernement a le droit de demander le vote unique sur un article, mais, quand il le demande dans les mêmes conditions que ce soir, c'est-à-dire après avoir supprimé la deuxième lecture en déclarant l'urgence sur le projet de loi, c'est inadmissible !
M. le président. Vous l'avez déjà dit, madame Luc.
Mme Hélène Luc. Monsieur le président, il est d'autant plus nécessaire que vous permettiez aux parlementaires de s'exprimer. Ainsi, sur un autre sujet,...
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Il n'y a pas d'autre sujet !
M. le président. Madame Luc, nous devons reprendre l'examen des amendements !
Mme Hélène Luc.... il faut que j'informe M. le ministre de l'éducation nationale de ce qui s'est passé ce soir à Maisons-Alfort. (Vives protestations sur les travées de l'UMP.)
M. Robert Del Picchia. C'est désolant !
Mme Hélène Luc. Une minute ! Deux cents lycéens ont invité le président de l'association départementale des parents d'élèves,...
M. Christian Cambon. Ils n'étaient que quarante !
Mme Hélène Luc.... mais le chef d'établissement n'a pas voulu le laisser entrer malgré l'intervention de l'inspecteur d'académie et du recteur.
Que pensez-vous, monsieur le ministre, de cette façon de faire ? (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous admettrez d'abord que, jusqu'à présent, je n'ai pas abusé de la parole,...
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Vous n'étiez pas là !
M. Jean-Pierre Sueur.... mais j'ai tenu à écouter le débat sur ces sujets tellement importants en matière d'éducation que sont la formation des maîtres et le statut des enseignants. Voilà des sujets qui méritent des débats sereins !
Cependant, monsieur le président, mon intervention aura trait à la présidence. Depuis un quart d'heure, vous vous évertuez à nous appeler à un débat normal, mais je m'interroge : qu'est-ce qu'un débat normal ? On a toujours tendance à considérer que la norme est conforme à l'idée du monde tel qu'on voudrait qu'il fût, mais chacun peut avoir son idée de la chose.
Le président de séance, monsieur le président, n'a pas pour rôle de mener des négociations diplomatiques ou d'adresser des admonestations : son rôle, c'est d'appliquer le règlement, comme l'a d'ailleurs fort bien dit M. Longuet tout à l'heure.
Le règlement prévoyant toutes les procédures, pourquoi, depuis une heure et demie, n'entend-on parler que de procédure et pas du tout du fond ?
M. Jean-Pierre Sueur. Moi, j'ai une explication, qui a d'ailleurs déjà été donnée par plusieurs de nos collègues : ce qui ne va pas dans ce débat, c'est qu'il faut absolument que la commission mixte paritaire se réunisse mardi. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Roger Karoutchi. Qui a dit cela ?
M. Jean-Pierre Sueur. La date a d'ailleurs été annoncée. Et pourquoi veut-on qu'une commission mixte paritaire se réunisse si vite ?
Le raisonnement est implicite mais explicitons-le, puisque nous sommes là pour nous parler : on s'est dit que les manifestations, les protestations, les marques de mécontentement actuelles étaient dus à la discussion sur le présent projet de loi, et on s'est imaginé que plus vite il serait définitivement adopté plus vite le mouvement cesserait.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Pas du tout !
M. Jean-Pierre Sueur. C'est la vérité, et tout le monde le sait. Eh bien, je vous dis, monsieur le ministre, que ce n'est pas un bon calcul !
Je me rappelle avoir passé un mois en séance à l'Assemblée nationale à débattre de la loi sur l'enseignement supérieur, dite depuis « loi Savary ». Ce fut très long, car nous avons examiné les choses au fond et dans le détail, ces choses ayant suscité, M. Fillon s'en souviendra aussi, beaucoup d'opposition à l'époque.
Or, aujourd'hui, le malaise naît de la volonté du Gouvernement de faire vite passer son texte parce qu'il croit que cela aura pour effet de supprimer la contestation.
C'est un mauvais calcul parce que toute l'histoire de l'éducation dans ce pays montre que, pour avancer dans ce domaine, il faut obtenir l'assentiment des Français et avoir leur confiance. En définitive, ce n'est pas avec des méthodes de procédure et dans l'urgence que l'on peut faire oeuvre de conviction.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Sueur !
M. Jean-Pierre Sueur. Pour que les choses redeviennent tout à fait « normales », il serait bon que le Gouvernement fasse un geste ou un acte politique montrant que nous ne sommes pas à quelques jours près afin que nous puissions continuer à discuter de l'annexe.
Vous verrez que vous obtiendrez alors le débat serein que vous appelez de vos voeux, monsieur le président, et vous serez un président heureux !
M. le président. Je vous remercie, monsieur Sueur, d'avoir évoqué la nécessité de faire appliquer le règlement. J'ai cependant eu un peu de mal à discerner dans votre propos ce qui pouvait justifier un rappel au règlement.
Article additionnel après l'article 23
M. le président. L'amendement n° 178 rectifié bis, présenté par M. Détraigne, Mmes G. Gautier et Férat, MM. Deneux, J.L. Dupont, Nogrix, Badré, C. Gaudin, Pozzo di Borgo et Merceron, est ainsi libellé :
Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la seconde phrase du dernier alinéa de l'article L. 713-9, les mots : « peuvent leur affecter directement » sont remplacés par les mots : « leur affectent directement ».
La parole est à Mme Françoise Férat.
Mme Françoise Férat. Par cet amendement, il s'agit d'éviter que l'intégration des IUFM dans l'université ne se traduise par une inégalité des moyens qui leur sont attribués en fonction de la plus ou moins grande importance qu'accorderaient les universités aux IUFM.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. L'adoption de cet amendement serait, il est vrai, de nature à rassurer les directeurs d'IUFM qui craignent d'éventuelles conséquences budgétaires de leur intégration au sein des universités.
Il me paraît cependant difficile de modifier l'article L.713-9 du code de l'éducation. En effet, dans la mesure où il vise également les IUT et les écoles internes aux universités, l'adoption de ce texte irait à l'encontre du principe d'autonomie des universités. Vous comprendrez donc, ma chère collègue, que je ne peux pas être favorable à cet amendement. Mais, pour répondre à votre souci, je demanderai à M. le ministre de vous donner toutes les garanties que les IUFM disposeront des moyens nécessaires à leur bon fonctionnement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Madame le sénateur, il n'est pas possible de modifier l'article L.713-9 pour les seuls IUFM : la modification s'appliquerait en effet à toutes les composantes de l'université fonctionnant dans le cadre de cet article qui assure l'unité de l'université.
En tout état de cause, l'article 60 du projet de loi prévoit un transfert des droits et des obligations, à compter de la date d'intégration de l'IUFM dans l'université : c'est dire que les moyens actuellement affectés aux IUFM seront intégralement transférés aux universités.
J'ai indiqué à plusieurs reprises depuis le début de la soirée que, comme c'est le cas, par exemple, pour les IUT aujourd'hui, il y aurait un « fléchage » des crédits et des postes pour veiller à ce que les IUFM disposent de l'intégralité de leurs moyens.
M. le président. Madame Férat, l'amendement n° 178 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Françoise Férat. Vous m'avez pleinement rassurée, monsieur le ministre, et je retire donc l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 178 rectifié bis est retiré.
Mme Annie David. Je le reprends, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 178 rectifié ter.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement présente un avantage essentiel à nos yeux : il confirme nos craintes quant à une possible dissolution des institutions universitaires de formation des maîtres. Il vise, en effet, à prémunir les anciens IUFM contre le risque d'une déperdition des moyens consacrés au développement de leurs missions de formation.
Je vous propose de relire le texte de l'amendement et de l'exposé des motifs pour bien comprendre de quoi il s'agit. L'amendement est ainsi libellé : « Après l'article 23, insérer un article additionnel ainsi rédigé : Dans la seconde phrase du dernier alinéa de l'article L. 713-9, les mots : " peuvent leur affecter directement " sont remplacés par les mots : " leur affectent directement". »
L'objet de l'amendement est plus explicite puisqu'il précise ceci : « Par cet amendement, il s'agit d'éviter que l'intégration des IUFM dans l'université ne se traduise par une inégalité des moyens qui leur sont attribués en fonction de la plus ou moins grande importance qu'accorderaient les universités aux IUFM. »
Nous reprenons cet amendement pour plusieurs raisons. La première raison, et non la moindre, c'est qu'il souligne, outre la disparition des IUFM et leur intégration dans les universités que nous avons déjà pointées, le fait qu'il s'agit bel et bien de se garantir contre une forme de « moindre mal ».
La seconde raison, c'est que cet amendement, qui reconnaît précisément la spécificité des IUFM, est en quelque sorte l'aveu de la profonde erreur que constituent les articles 22 et 23 de ce texte.
Nous ne pouvons avoir de politique éducative ambitieuse sans mener une action tout aussi ambitieuse de formation des maîtres. C'est même la condition sine qua non pour atteindre les objectifs que l'on pourrait assigner à cette loi d'orientation. Recrutement d'enseignants à la hauteur des besoins ouverts par le mouvement naturel et le déroulement des carrières, renforcement de la qualité de leur formation initiale, revalorisation de la profession : tout doit concourir à la réussite scolaire dans le contexte d'aujourd'hui. Je veux notamment parler du défi permanent de l'accroissement du nombre de jeunes scolarisés et de l'allongement de la durée effective de la scolarité.
Tous ces arguments que nous avons déjà développés lors de la discussion des articles 22 et 23 illustrent notre conception de ce que devraient être les IUFM et la formation de nos enseignants. Il s'agit d'un amendement très important, et c'est pourquoi nous vous demandons de l'adopter par scrutin public.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 178 rectifié ter.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 150 :
Nombre de votants | 329 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 164 |
Pour l'adoption | 159 |
Contre | 168 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Article 23 bis
Après l'article L. 721-1, il est inséré un article L. 721-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 721-1-1. - Les actions de formation initiale des personnels enseignants comprennent une partie spécifique à l'enseignement en école maternelle. »
M. le président. L'amendement n° 121, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. L'article 23 bis, adopté par l'Assemblée nationale, tend à insérer un nouvel article après l'article L. 721-1 du code de l'éducation, de façon à préciser que les actions de formation initiale des personnels enseignants comprennent une partie spécifique à l'enseignement en école maternelle.
La commission, tout en comprenant et en soutenant cette disposition sur le fond, relève que cette dernière n'est pas d'ordre législatif et qu'elle figure déjà dans le rapport annexé. Elle n'est donc pas favorable à son adoption dans le texte même du projet de loi et propose sa suppression afin d'éviter des redondances.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Je vous propose d'étudier, dans un premier temps, la rédaction de cet article 23 bis sur lequel nous sommes appelés à discuter à cette heure un peu particulière.
« Après l'article L. 721-1, il est inséré un article L. 721-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 721-1-1. - Les actions de formation initiale des personnels enseignants comprennent une partie spécifique à l'enseignement en école maternelle. »
C'est là une proposition tout à fait intéressante, que nous pouvons soutenir.
Or, l'amendement n° 121 de la commission des affaires culturelles ne propose rien d'autre que la suppression pure et simple de cet article 23 bis pour des motifs que M. Carle vient partiellement de nous exposer mais que complète son rapport.
On peut y lire en effet ceci : « L'Assemblée nationale a adopté, la commission et le Gouvernement l'ayant accepté sans cependant manifester beaucoup d'enthousiasme, un article tendant à insérer un nouvel article après l'article L. 721-1 du code de l'éducation de façon à préciser que les actions de formation initiale des personnels enseignants comprennent une partie spécifique à l'enseignement en école maternelle.
« Tout en soutenant cette disposition sur le fond, votre commission relève qu'elle n'est pas d'ordre législatif et qu'elle figure déjà dans le rapport annexé. N'étant pas favorable à son adoption dans le texte même du projet de loi, elle en propose donc la suppression. »
Cet amendement est assez symptomatique du problème posé. Le rapport annexé n'ayant qu'une valeur de caractère indicatif, même si nous risquons de consacrer à son examen une grande partie de la journée, voire de la nuit, de demain, nous trouvons inutile que la loi statue sur le caractère spécifique de l'enseignement en maternelle...
Nous avons d'ailleurs déjà indiqué que le concept d'école maternelle posait problème, mais là n'est pas la question.
Le véritable problème, le non-dit du rapport de notre collègue Jean-Claude Carle, c'est que, dans la majorité, nombreux sont ceux qui estiment que la scolarisation précoce des enfants n'est pas une nécessité au regard de leur développement et de leur future scolarité obligatoire. Sans doute certains préféreraient-ils, dans le cadre de cette démarche, que les parents renoncent progressivement à la possibilité qui leur est offerte de scolariser précocement leurs enfants pour faire l'économie de la dépense éducative liée à la rémunération des enseignants de ces écoles maternelles.
Rappelons qu'à plus de 95 % ces enseignants sont des enseignantes : à l'heure où l'on parle de parité et de mixité, chacun appréciera !
Posons-nous plutôt la question suivante : quelle économie allons-nous faire en privant les enfants des avantages d'une scolarité précoce et en contraignant, par voie de conséquence, les mères de famille à cesser leur activité professionnelle ? En privant les mères de famille de la possibilité de poursuivre leur activité professionnelle, on prive aussi l'économie de leur apport à la création de richesses, ce qui a un coût autrement plus important que l'économie réalisée sur la dépense publique pour l'éducation.
Ne serait-ce que pour ces raisons, et sans demander, cette fois, un vote par scrutin public, nous ne pouvons que vous inviter à rejeter cet amendement de la commission.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Le président de séance a demandé tout à l'heure que l'on retrouve une sérénité, que j'ai personnellement souhaitée. Nous devons rester dans cette ligne.
Dès la reprise, le groupe communiste républicain et citoyen a demandé un scrutin public sur le premier amendement que le Sénat avait à examiner. Je ne remets pas en question ce scrutin, mais j'étais quelque peu inquiet quant à l'attitude du groupe CRC sur le deuxième amendement.
Je tiens à vous confirmer, monsieur le ministre, que nous souhaitons travailler, comme cela a été rappelé sur plusieurs de ces travées.
Mme Annie David. Sur toutes les travées !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Nous avons perdu près d'une heure et demie dans des palabres qui n'ont débouché sur rien. A présent, nous souhaitons adopter une démarche pragmatique, expérimentale peut-être (Sourires), pour avancer dans la direction que nous souhaitons tous, l'examen de ce texte d'une façon convenable, comme nous en avons l'habitude, et dynamique.
Monsieur le président, je vous remercie de conduire le débat dans cet esprit et en ce sens.
Mme Annie David. Vous faites du chantage, monsieur le président !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Je ne fais pas de chantage, je rappelle les règles !
M. le président. En conséquence, l'article 23 bis est supprimé.
Article additionnel après l'article 23 bis
M. le président. L'amendement n° 122, présenté par M. Carle, au nom de la commission des affaires culturelles, est ainsi libellé :
Après l'article 23 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans l'article L. 721-2 du code de l'éducation, après les mots : « peuvent organiser » les mots : «, à titre expérimental, » sont supprimés.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. Cet article, introduit par la loi du 17 janvier 1992, prévoit que les IUFM qui possèdent une capacité d'accueil adaptée à la formation des enseignants de l'enseignement technique peuvent organiser, à titre expérimental, des stages de formation continue des enseignants de centres de formation d'apprentis.
Quinze ans après la loi de 1992, le terme « expérimental » n'est plus pertinent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 23 bis.
chapitre VI
Dispositions relatives au personnel enseignant
Article 24
L'article L. 912-1 est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est complété par les mots : « et aux formations par apprentissage » ;
2° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ils contribuent à la continuité de l'enseignement sous l'autorité du chef d'établissement en assurant des enseignements complémentaires. »
M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. Cet article est consacré au remplacement des professeurs absents. Là encore, vous donnez une mauvaise réponse à un problème que vous avez vous-même créé.
A de nombreuses reprises au cours de cette année scolaire, les enseignants n'ont pas été remplacés. Cette situation, contraire à la continuité du service public, réduit la qualité d'enseignement que les élèves sont en droit d'attendre, entraîne des difficultés dans la gestion de la sécurité, suscite des tensions avec les élèves les plus difficiles et provoque l'épuisement des enseignants.
Cette dégradation générale, particulièrement dans de nombreux établissements situés en zones d'éducation prioritaires, ou ZEP, est insupportable.
Face aux menaces de rupture de l'équilibre obtenu par les équipes pédagogiques à force de conscience et de détermination, l'Etat a le devoir d'assumer ses responsabilités.
Pourtant, les solutions proposées seront inefficaces.
Le remplacement en interne, pédagogiquement peu souhaitable, est impossible dans la plupart des cas. Chacun sait que les emplois du temps des enseignants et des élèves ne sont que rarement compatibles, et le retour aux deux heures supplémentaires imposables ne changera rien à ce problème.
Après avoir démantelé le système des remplacements, vous vous défaussez sur les établissements sans leur donner les moyens de satisfaire les exigences légitimes des parents. Pis, vous imposez aux personnels une flexibilité plus grande.
Une fois encore, les problèmes pédagogiques et professionnels sont assimilés à des difficultés techniques. Cette vision « managériale » n'est pas nouvelle et de plus en plus répandue dans l'administration de l'éducation nationale.
Telles sont les quelques indications que je souhaitais donner sur cet article 24.
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 588, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Le présent article ne prévoit rien de moins que de redéfinir le service des enseignants des collèges et des lycées en les obligeant à assurer des tâches de formation continue des adultes et à remplacer au pied levé les collègues absents, même si la spécialité disciplinaire de l'enseignant remplacé ne correspond pas à celle de l'enseignant sollicité.
Ces situations peuvent durer jusqu'à trois semaines, voire plus. Il n'est pas rare, en effet, de voir des absences de plus d'un mois non remplacées dans nos établissements, faute d'un nombre suffisant de postes d'enseignants titulaires en zone de remplacement, ou TZR, et de recrutements suffisants d'enseignants.
Le 1° de l'article 24 oblige les enseignants à délivrer tout ou partie de leur service, avec éventuellement des heures supplémentaires et des remplacements de collègues absents, dans les formations générales et - pourquoi pas ? - spécialisées, dans le cadre du statut d'apprentissage.
Monsieur le ministre, il n'est ni très sérieux ni très prudent de vouloir ainsi, permettez-moi l'expression, « charger la barque » dans la redéfinition du statut des enseignants, tant ce sujet de l'apprentissage est sensible dans le milieu enseignant, comme le sont d'ailleurs plus globalement les questions statutaires d'obligations de service.
S'agissant des remplacements, nous avons là un exemple caractéristique de la fausse bonne solution pour résoudre un problème qui est effectivement récurrent et qui mécontente les parents à juste titre.
Il n'est pas acceptable que la continuité des enseignements ne soit pas assurée sous prétexte qu'un enseignant serait malade, parfois plusieurs semaines consécutives ou pendant la durée d'un congé de maternité.
Mais l'enseignement ne se réduit pas à faire de la garderie !
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles, et M. Gérard Longuet, rapporteur pour avis. Personne ne leur demande de faire de la garderie !
M. Bernard Vera. Si le système de prise en charge des élèves d'un collègue absent peut avoir du sens dans le premier degré où les enseignants ne sont pas spécialistes d'une discipline et assument l'intégralité des programmes d'enseignement, il n'en va pas de même au collège et au lycée.
En effet, les professeurs certifiés et agrégés qui enseignent au collège et au lycée sont des enseignants spécialistes d'un champ disciplinaire et n'ont aucune compétence dans les disciplines autres que la leur.
Monsieur le ministre, nos propositions ne consiste pas à payer des professeurs de catégorie A de la fonction publique pour faire un travail de garderie !
Pour assurer les remplacements de moyenne et de longue durée, nous proposons, nous, de recruter en nombre suffisant, par discipline concernée, des enseignants titulaires en zone de remplacement. Pour les remplacements de courte durée, soit de deux jours maximum, nous préconisons de laisser les chefs d'établissement négocier avec les personnels de l'établissement les meilleures solutions sur le plan local pour occuper les élèves concernés de manière pédagogiquement utile au bon déroulement de leur scolarité, étant bien entendu que nul enseignant ne peut statutairement se voir imposer plus de deux heures supplémentaires hebdomadaires de service devant élèves.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous proposons de voter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 593, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
L'article L. 912-1 du code de l'éducation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Au sein de chaque établissement, les équipes pédagogiques mettent en oeuvre les objectifs et les contenus des programmes d'enseignement. Elles accompagnent chaque jeune dans son choix d'orientation et favorisent le travail en équipe et la pluridisciplinarité. »
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. L'article L 912-1 du code de l'éducation prévoit les missions des enseignants et mentionne l'existence d'équipes pédagogiques sans préciser leur rôle ni leurs missions.
Il convient donc de préciser dans le code de l'éducation que les équipes pédagogiques mettent en oeuvre les objectifs et les contenus des programmes, accompagnent chaque jeune dans son choix d'orientation et favorisent le travail en équipes et la pluridisciplinarité.
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 592 rectifié est présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 620 rectifié bis est présenté par Mme Morin - Desailly, M. Nogrix, Mmes Dini, Férat et Payet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après le premier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
... ° Après les mots : « exerçant dans le même champ disciplinaire et des personnels spécialisés » la fin de la deuxième phrase du premier alinéa est remplacée par les dispositions suivantes : « avec des psychologues de l'Education nationale. Les psychologues de l'Education nationale ont un statut particulier de psychologue pris conformément à la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, et à la loi n° 85-772 du 25 juillet 1985, statut qui fera l'objet d'un décret. »
La parole est à Mme Annie David, pour défendre l'amendement n° 592 rectifié.
Mme Annie David. L'école est un lieu privilégié où les difficultés scolaires révèlent les symptômes du mal-être des enfants.
La plupart des enseignants reconnaissent que de plus en plus d'enfants présentent des troubles du comportement, quel que soit leur environnement social.
Une prise en charge de type psychologique est souvent indispensable pour remédier à ces problèmes qui peuvent conduire certains enfants à l'échec de toute leur scolarité ou en mettre d'autres, plus gravement atteints, sur le chemin de la délinquance.
Les psychologues de l'éducation nationale, en relation avec les parents et les enseignants, accueillent les enfants et les jeunes pour les aider à exprimer et à analyser les causes de l'échec. Ils contribuent également à détecter les cas d'enfants à risques ou maltraités, soutiennent l'intégration des enfants handicapés et mènent des actions de prévention en partenariat avec d'autres personnels, notamment les médecins et les infirmiers scolaires.
Or, les psychologues exerçant dans l'éducation nationale, qui sont très sollicités pour leurs compétences et dont l'autorité est largement reconnue, manquent à ce jour d'une protection statutaire en rapport avec leur titre et leur profession.
Tel est le sens de cet amendement que je vous propose d'adopter, mes chers collègues.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat, pour présenter l'amendement n° 620 rectifié bis.
Mme Françoise Férat. De plus en plus d'enfants présentent des troubles du comportement, quel que soit leur environnement social. Une prise en charge de type psychologique est souvent indispensable pour remédier à ces problèmes qui peuvent conduire certains enfants à l'échec de toute leur scolarité ou en mettre d'autres, plus gravement atteints, sur le chemin de la délinquance.
Les psychologues de l'éducation nationale contribuent également à détecter les enfants à risques ou maltraités, soutiennent l'intégration des enfants handicapés et mènent des actions de prévention en partenariat avec d'autres personnels, dont les médecins et les infirmières scolaires.
Or, ces professionnels que sont les psychologues exerçant dans l'éducation nationale manquent à ce jour d'une protection statutaire, en rapport avec leur titre et leur profession. Ils sont encore considérés comme faisant partie du corps enseignant, avec un statut d'instituteur ou de professeur d'école qui ne correspond ni à leur fonction ni à leur qualification de psychologue.
L'exercice de la psychologie est protégé par le titre de psychologue que possèdent effectivement les psychologues scolaires, lesquels sont soumis, comme leurs collègues, à l'obligation de s'inscrire sur les listes professionnelles.
Le décalage entre leurs missions, reconnues nécessaires par tous les acteurs du système éducatif, et ce statut inadéquat tend à les disqualifier. Il peut conduire à des dysfonctionnements dus à la non-reconnaissance de leur formation et à d'éventuelles confusions relatives à leur rôle.
Certains enfants en souffrance peuvent alors être privés de l'accès à un psychologue dans le service public d'éducation, et donc de la prévention, des aides et de l'éventuelle expertise dont ils ont besoin
La reconnaissance du statut et du rôle des psychologues dans l'éducation nationale doit au contraire permettre une meilleure collaboration avec les équipes enseignantes et les autres personnels chargés de l'aide et du suivi.
De même, le partenariat avec les psychologues des autres secteurs et les divers services médico-sociaux ne peut que bénéficier de cette clarification de l'identité professionnelle des psychologues du système éducatif.
Ce statut contribuerait à mettre les psychologues de l'éducation nationale à parité avec ceux des autres fonctions publiques, grâce à un même niveau de recrutement et à l'organisation d'un double concours : un concours interne ouvert à toutes les catégories de personnels de l'éducation nationale et un concours externe sur titre de psychologue, après l'obtention d'un diplôme de psychologie requis par la loi, ce qui permettrait et faciliterait la mobilité.
La mise en cohérence de notre législation est nécessaire puisque les psychologues de l'éducation nationale, dits scolaires, sont déjà soumis à l'obligation de s'inscrire sur la liste professionnelle des psychologues, suivant la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002.
En outre, la régularisation statutaire des psychologues de l'éducation nationale n'engagerait pas un surcoût financier puisque ceux-ci appartiennent déjà à la grille indiciaire des cadres A de la fonction publique d'Etat.
M. le président. L'amendement n° 590, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer le 2° cet article.
La parole est à Mme Eliane Assassi.
Mme Eliane Assassi. Le principe selon lequel aucun élève ne doit rester sans professeur durant sa présence à l'école est un bon principe, unanimement approuvé non seulement par tous les parents d'élèves, mais aussi par les personnels du système éducatif lui-même.
Pour l'heure, la gestion des remplacements des professeurs absents pour raison de maladie ou pour toute autre raison suscite de la colère chez les parents d'élèves, voire chez les élèves eux-mêmes ou chez les enseignants.
En aucun cas, un élève ne peut être dispensé de l'obligation d'assiduité scolaire, même temporaire et même motivée par l'insuffisance de personnels de surveillance et d'éducation.
Le premier remède consisterait donc, monsieur le ministre, à rétablir dans l'urgence les postes de surveillants d'externat et d'aides éducateurs que vous avez supprimés depuis 2002.
Nous considérons également que, en cas d'absence prolongée d'un enseignant, l'élève doit se voir offrir dans son établissement une occupation à caractère pédagogique liée aux apprentissages scolaires, qui constituent l'étape en cours de sa scolarité.
Il est normalement une question qui ne devrait pas poser problème, c'est celle des remplacements de moyenne ou de longue durée, c'est-à-dire d'une durée supérieure à trois jours consécutifs.
En effet, il existe un corps de titulaires remplaçants, les TZR, les titulaires sur zone de remplacement. Mais il est vrai que l'insuffisance des recrutements en personnels titulaires oblige de plus en plus les recteurs et inspecteurs d'académie à nommer des personnels TZR en remplacement à l'année. De ce fait, ces titulaires remplaçants ne sont plus disponibles pour remplir leur mission originelle, à savoir les remplacements de professeurs momentanément absents.
Monsieur le ministre, au lieu de supprimer des postes à tour de bras comme vous le faites, au lieu de réduire le nombre de recrutements de titulaires, recrutez ! recrutez ! et, vous le verrez, le système fonctionnera beaucoup mieux !
Mais bien sûr, quel que soit le niveau considéré, la question qui pose le plus problème est celle des remplacements de courte durée, imprévisibles par définition puisqu'ils sont motivés en général par les petits incidents de santé de la vie quotidienne auxquels n'échappent pas les enseignants, pas plus d'ailleurs que les autres salariés.
Précisons d'abord qu'il s'agit ici de traiter des absences de deux jours consécutifs au maximum, et pas plus. Au-delà, le système des TZR devrait être opérationnel.
Nous proposons que ce problème soit résolu au niveau des établissements, en concertation avec la direction de l'établissement et les représentants des enseignants, et que toutes les ressources éducatives de l'établissement soient sollicitées - enseignants, conseillers d'éducation et surveillants d'externat ou d'internat, bibliothécaires-documentalistes, autres éducateurs présents dans l'établissement -, afin d'offrir aux élèves concernés une réelle activité d'appropriation de connaissances et de compétences.
Mais il ne saurait être question, par exemple, d'imposer à un enseignant d'improviser des cours dans des classes qui ne sont pas les siennes, c'est-à-dire dont il ignore la progression pédagogique et les problèmes, encore moins dans une discipline d'enseignement qui n'est pas la sienne.
Pour finir, je veux rappeler que, pour respecter le statut de ces personnels, on ne peut leur imposer plus de deux heures supplémentaires par semaine, ce qui ne couvre pas l'horaire hebdomadaire de certaines disciplines d'enseignement.
Votre proposition n'est donc pas viable, monsieur le ministre. C'est la raison pour laquelle je vous invite, mes chers collègues, à supprimer le 2° de l'article 24.
M. le président. L'amendement n° 594, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le texte proposé par le 2° de cet article pour compléter l'article L. 912-1 du code de l'éducation :
« Un forfait dans le service statutaire des enseignants est dégagé pour leur permettre d'assurer l'indispensable travail de concertation disciplinaire, interdisciplinaire et pluri professionnel. »
La parole est à M. Jean-François Voguet.
M. Jean-François Voguet. Cet amendement vise à faciliter, grâce à l'instauration d'une décharge forfaitaire de service devant élève, le travail collectif interdisciplinaire au sein de l'équipe pédagogique.
Vous le savez, monsieur le ministre, depuis plusieurs années, la charge de travail des enseignants ne cesse de s'accroître sous l'effet non seulement de l'alourdissement des effectifs par classe dû aux suppressions de postes, mais également de la diminution d'heures d'enseignement dans certaines disciplines, qui aboutissent à multiplier le nombre de classes dont certains enseignants ont la charge.
Par ailleurs, le nombre de copies à corriger, de dossiers individuels à gérer est de plus en plus important.
En outre, depuis de nombreuses années, on a constamment tendance à faire reposer sur les enseignants des responsabilités et des charges nouvelles.
Je prendrai seulement l'exemple de l'élaboration et du suivi du projet personnel d'orientation des élèves qui incombe pour l'essentiel aux professeurs principaux, alors que les conseillers d'orientation psychologues, du fait là encore de l'insuffisance en personnels, ne peuvent intervenir que dans des situations particulières, et le plus souvent à la demande des enseignants notamment.
Depuis quelques années - on le constate quotidiennement dans nos communes -, se développe une propension au travail en équipe, au travail interdisciplinaire, que nous estimons tout à fait juste.
En effet, la complexité des situations d'échec scolaire que nous constatons aujourd'hui pose des problèmes redoutables, notamment dans l'élaboration de solutions pédagogiques innovantes pour y faire face, et il est nécessaire, dans ce cas, de mettre en commun toutes les compétences disponibles au niveau de l'équipe pédagogique et éducative. Aujourd'hui, plus personne ne pouvant prétendre détenir à lui seul la bonne solution aux problèmes posés, la concertation est quasiment devenue une question d'efficacité.
La mise en place d'un conseil pédagogique, tel que vous le préconisez, monsieur le ministre, ou - ce serait mieux - d'un conseil scientifique et pédagogique tel que nous le préconisons, va d'ailleurs tout à fait dans ce sens.
Mais, chacun le sait bien, le travail collectif est fortement consommateur de temps et d'énergie. Cela n'est pas spontané, cela s'apprend ; or, la formation initiale n'intègre que très rarement cette dimension nouvelle de la profession. C'est pourquoi il faut avoir recours, en la matière, à la formation continue.
Pour toutes ces raisons, les organisations de personnels sont particulièrement demandeuses d'un temps forfaitaire inclus dans le service des enseignants, qu'elles évaluent, pour la plupart d'entre elles, à deux heures hebdomadaires.
Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 589, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le 2° de cet article pour compléter l'article L. 912-1 du code de l'éducation par les mots :
organisés par leur établissement d'affectation
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement est défendu.
M. le président. L'amendement n° 591, présenté par Mme David, MM. Ralite, Renar, Voguet et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Compléter in fine le texte proposé par le 2° de cet article pour compléter l'article L. 912-1 du code de l'éducation par les mots :
sur la base du volontariat
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Cet amendement est également défendu.
M. le président. L'amendement n° 195, présenté par Mmes Voynet, Blandin et Boumediene - Thiery et M. Desessard, est ainsi libellé :
Compléter le texte proposé par le 2° de cet article pour insérer un alinéa après le deuxième alinéa de l'article L. 912-1 du code de l'éducation par une phrase ainsi rédigée :
Ces enseignements complémentaires ne peuvent excéder deux semaines.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 588, l'article 24 du projet de loi vise à donner aux chefs d'établissement les moyens de répondre plus efficacement aux besoins ponctuels de suppléance. Il serait préjudiciable pour le bon fonctionnement des établissements d'en proposer la suppression. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Pour ce qui concerne l'amendement n° 593, la loi prévoit déjà que les enseignants ont pour première mission de mettre en oeuvre les objectifs sous-tendus par les programmes nationaux et qu'ils doivent aider les élèves dans l'élaboration de leur projet.
L'article 25 du projet de loi relatif à la liberté pédagogique prévoit ainsi que la mission des enseignants s'exerce dans le respect des objectifs et des programmes nationaux.
Cet amendement semble donc très largement satisfait par les dispositions existantes. Dans ces conditions, la commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
La commission est également défavorable aux amendements identiques nos 592 rectifié et 620 rectifié bis, qui tendent à créer un statut de psychologue de l'éducation nationale.
Actuellement, dans le premier degré, les psychologues intervenant dans les RASED, les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté, sont des enseignants spécialisés titulaires du CAPSAIS, le certificat d'aptitude aux actions pédagogiques spécialisées d'adaptation et d'intégration scolaires. La création d'un statut spécifique n'apporterait donc rien de plus.
L'objet du 2° de l'article 24 que l'amendement n° 590 vise à supprimer est de donner au chef d'établissement les moyens de répondre aux besoins ponctuels de suppléance dans l'intérêt premier des élèves. La commission est donc défavorable à cet amendement.
La commission est également défavorable à l'amendement n° 594, car l'adoption de cette disposition entraînerait un coût pour le système éducatif. Par ailleurs, le conseil pédagogique permettra d'assurer le travail de concertation disciplinaire et interdisciplinaire.
S'agissant de l'amendement n° 589, l'article 24 prévoit déjà que les enseignements complémentaires sont assurés sous l'autorité du chef d'établissement. L'objet de cet amendement semble donc satisfait. Par conséquent, la commission en demande le retrait ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Quant à l'amendement n° 591, si la continuité de l'enseignement sera désormais inscrite dans les missions statutaires des enseignants de collège et de lycée, l'article 24 n'a pas pour objet de donner aux chefs d'établissement un pouvoir de réquisition. La mise en oeuvre de ces dispositions devra privilégier le recours à des solutions de bon sens, souples et concertées. L'implication de chacun sera donc un facteur déterminant. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 588 qui vise à supprimer purement et simplement l'article 24 du projet de loi.
Il est également défavorable à l'amendement n° 593. La mise en oeuvre des objectifs et le contenu des programmes d'enseignement relèvent prioritairement de la responsabilité individuelle de chaque enseignant. Le code de l'éducation prévoit d'ailleurs la participation des enseignants au projet d'orientation des élèves. L'organisation de l'école en cycles et la création du conseil pédagogique au collège et au lycée prévues dans la loi sont, par ailleurs, de nature à permettre la mise en oeuvre d'une démarche d'équipe entre les enseignants.
Le Gouvernement est également défavorable aux amendements identiques nos 592 rectifié et 620 rectifié bis. Les fonctions de psychologue dans l'éducation nationale sont exercées par les psychologues scolaires dans le premier degré et par les conseillers d'orientation psychologues dans le second degré. Ces derniers ne sont pas dépourvus d'une protection statutaire puisqu'ils appartiennent au corps des professeurs des écoles ou à celui des instituteurs, s'agissant des psychologues scolaires.
La création d'un statut particulier n'est donc pas nécessaire à la définition de la profession et n'aurait pas, de toute façon, sa place à l'article L. 912-1 du code de l'éducation.
Actuellement, les missions des psychologues scolaires sont définies dans une circulaire, en cours d'actualisation.
Par ailleurs, le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 590, qui vise à supprimer les enseignements complémentaires. Cette notion a pour objet de répondre à un souci de continuité de l'enseignement, et ce dans l'intérêt de l'élève.
Le Gouvernement est également défavorable à l'amendement n° 594. Les obligations de service incluent déjà le temps que chaque enseignant doit consacrer au travail en équipe.
Quant à l'amendement n° 589, il est en réalité satisfait, et le Gouvernement y est donc défavorable.
Enfin, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 591 qui vide complètement l'article 24 de sa portée.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur les amendements identiques nos 592 rectifié et 620 rectifié bis.
Mme Annie David. Ces amendements relatifs au statut des psychologues de l'éducation nationale sont importants.
Monsieur le ministre, la circulaire à laquelle vous avez fait allusion permettrait de répondre à l'inquiétude exprimée par les psychologues scolaires qui, aujourd'hui, n'ont pas de statut ou, en tout cas, ont la sensation de ne pas en avoir. A cet égard, je souhaiterais que vous nous donniez quelques informations supplémentaires quant à son contenu : quand, comment, et surtout avec qui la préparez-vous ?
Nous attendons votre réponse, monsieur le ministre. Si celle-ci ne nous satisfait pas, nous maintiendrons alors cet amendement et demanderons un scrutin public : il s'agit en effet d'une question essentielle et sensible.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre. Madame David, comme je vous l'ai indiqué, la circulaire qui fixe les missions des psychologues scolaires existe ; elle n'est pas en cours de rédaction. Simplement, nous sommes en train d'examiner, avec l'ensemble des organisations représentatives et des instances qui ont à connaître de ce dossier, les moyens d'actualiser cette circulaire, et donc les missions des psychologues scolaires, pour répondre précisément à un certain nombre d'interrogations des professionnels.
Ce travail d'actualisation va se poursuivre, mais il existe d'ores et déjà un texte, d'ailleurs ancien, qui fixe les missions des psychologues scolaires. Voilà pourquoi je disais qu'il n'était pas nécessaire de définir un nouveau statut pour la profession.
La question qui est posée aujourd'hui est de savoir comment on peut actualiser cette définition de la profession, naturellement selon les règles en vigueur au ministère de l'éducation nationale qui veulent que les diverses organisations représentatives soient consultées.
M. le président. Madame David, l'amendement n° 592 rectifié est-il maintenu ?
Mme Annie David. Monsieur le président, je peux retirer cet amendement, puisque M. le ministre me confirme que cette circulaire existe et qu'elle est en cours d'actualisation précisément pour répondre aux difficultés que connaissent les personnels psychologues aujourd'hui.
Je vous ai entendu, monsieur le ministre, et je vous fais confiance, à vous et à vos services, pour mener à bien cette actualisation.
Nous retirons donc cet amendement, preuve que nous sommes capables de travailler concrètement et, malgré ce que vous voulez croire, dans l'intérêt du service public de l'éducation nationale.
M. le président. L'amendement n° 592 rectifié est retiré.
Madame Férat, qu'en est-il de l'amendement n° 620 rectifié bis ?
Mme Françoise Férat. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 620 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 590.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote sur l'article 24.
Mme Annie David. Nous avons retiré notre amendement n° 592 rectifié, mais nous ne voterons pas pour autant cet article 24.
Il nous semble en effet inacceptable d'imposer aux enseignants d'intervenir dans des formations par apprentissage, dans la mesure où cette disposition risque d'entraîner une globalisation annuelle de tout ou partie de leur service et d'aggraver leurs conditions de service.
De même, on ne peut accepter l'obligation d'effectuer deux heures supplémentaires hebdomadaires pour assurer des enseignements complémentaires.
Le remplacement de collègues absents relève de la responsabilité de l'Etat, lequel doit permettre dans tous les cas une continuité pédagogique assurée par des personnels qualifiés et recrutés en nombre suffisant. C'est ce que nous venons de démontrer dans nos amendements.
Cette mesure démagogique n'aura aucune efficacité pédagogique et risque d'instaurer des tensions au sein de la communauté éducative.
J'en reviens à la responsabilité professionnelle des enseignants pour la formation des adultes : l'apprentissage n'est pas défini dans cet article non plus que les lieux où seraient effectuées ces formations. C'est un pied mis hors de la fonction publique.
Il est nécessaire que les droits et devoirs de chacun soient clairement établis, par exemple la responsabilité en matière d'accidents du travail ; or ce texte ne le permet pas.
Les enseignements complémentaires ne sont pas plus définis. Il n'est pas question de laisser croire aux parents et aux élèves qu'un professeur d'une discipline peut remplacer n'importe lequel de ses collègues et assurer des enseignements complémentaires. C'est, à coup sûr, dégrader la qualité de l'enseignement et enfoncer tout le système scolaire dans les procès pour non-exécution du contrat individualisé dit « de réussite éducative », qui s'intitule désormais « parcours personnalisé de réussite éducative », comme le prévoit l'article L. 311-3-1.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cet article.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est tard. Nous allons maintenant aborder l'article 25, sur lequel M. Sueur est inscrit. Si vous en étiez d'accord, nous pourrions lever la séance après avoir entendu notre collègue, ce qui nous permettrait de reprendre nos travaux à une heure raisonnable demain, c'est-à-dire à quinze heures.
M. Jean-François Voguet. Très bien !
M. le président. Qu'en pense le Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Le Gouvernement est d'accord, monsieur le président.
Article 25
Après l'article L. 912-1, sont insérés deux articles L. 912-1-1 et L. 912-1-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 912-1-1. - La liberté pédagogique de l'enseignant s'exerce dans le respect des programmes et des instructions du ministre chargé de l'éducation nationale et dans le cadre du projet d'école ou d'établissement avec le conseil et sous le contrôle des membres des corps d'inspection.
« Art. L. 912-1-2. - Lorsqu'elle correspond à un projet personnel concourant à l'amélioration des enseignements et approuvé par le recteur, la formation continue des enseignants s'accomplit en priorité en dehors des obligations de service d'enseignement et peut donner lieu à une indemnisation dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Elle peut intégrer les dispositifs de formation à distance agréés par le ministère chargé de l'éducation nationale. Elle est prise en compte dans la gestion de leur carrière. »
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, sur l'article.
M. Jean-Pierre Sueur. Je me réjouis de prendre la parole peu avant que nous interrompions nos travaux. Puissent mes propos inciter à la poursuite de la réflexion, à un moment si propice, puisque la nuit commence... (Sourires.)
Monsieur le ministre, nous légiférons sous le regard, certes de marbre mais vigilant, de Portalis. Je voudrais simplement faire observer à notre assemblée combien il était fâcheux que certains des articles qui nous sont proposés dans ce projet de loi sur l'avenir de l'école soient écrits dans un français si embrouillé, si amphigourique ; de telles formulations seraient certainement censurées par les enseignants que nous sommes, du moins pour un certain nombre d'entre nous, si elles leur étaient soumises par des élèves !
Je prendrai l'exemple de ce seul article 25 pour contribuer à la réflexion.
Vous nous proposez, monsieur le ministre de l'éducation nationale, de consacrer dans la loi de la République française la phrase suivante : « La liberté pédagogique de l'enseignant s'exerce dans le respect des programmes et des instructions du ministre chargé de l'éducation nationale et dans le cadre du projet d'école ou d'établissement avec le conseil et sous le contrôle des membres des corps d'inspection. » Je pose la question : quel enseignant accepterait une telle rédaction ?
On nous dit que la liberté pédagogique de l'enseignant s'exerce, premièrement, « dans le respect », deuxièmement, « dans le cadre », troisièmement, « avec le conseil » et, quatrièmement, « sous le contrôle ». Il y a là une succession de conjonctions et de prépositions qui, mal harmonisées les unes avec les autres, donnent une syntaxe particulièrement difficile à comprendre. Songeons à Boileau et revenons à plus de clarté dans ce que nous concevons !
J'éprouve donc un certain sentiment de malaise, monsieur le ministre, à penser qu'une loi sur l'école de la République puisse être écrite dans une telle langue.
En plus, si j'ai bien compris, dès lors que l'on fait ce que dit le ministre, ce que dit l'inspecteur, ce que disent les instructions, ce que disent les programmes, ce que dit l'équipe pédagogique, ce que dit le projet d'établissement, on est libre... Curieuse liberté pédagogique ! A quoi cette précision sert-elle ?
J'ai sous les yeux la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, magnifiquement écrite : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la société la jouissance de ces mêmes droits. » Tout est dit ! Par comparaison, la phrase si lourde, si mal écrite, si mal rédigée dont je vous ai donné lecture voilà un instant n'apporte rien.
Le paragraphe suivant n'est guère meilleur : « Lorsqu'elle correspond à un projet personnel concourant à l'amélioration des enseignements et approuvé par le recteur, la formation continue des enseignants s'accomplit en priorité... ». Mais enfin, qui irait soutenir une formation continue des enseignants qui ne concourrait pas à l'amélioration des enseignements ? Vous imaginez ce que serait une formation continue qui contribuerait à la détérioration des enseignements ? Faut-il écrire cela dans la loi ? A quoi cela sert-il ?
Et que penser d'une formation qui « s'accomplit » ? Pour ma part, je ne comprends pas ce que cela veut dire. On peut considérer que des personnes reçoivent une formation, que des enseignants délivrent une formation, mais écrire qu'une formation puisse « s'accomplir », c'est contraire à la clarté que l'on est en droit d'exiger d'une loi qui traite de l'école de la République.
Monsieur le ministre, je plaide ici pour la langue française.
M. Jacques Valade, président de la commission des affaires culturelles. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre. J'apprécie beaucoup les leçons de français de M. Sueur ; je l'invite d'ailleurs à déposer des amendements pour améliorer la rédaction d'un texte dont je précise qu'il a fait l'objet d'un certain nombre de modifications à l'Assemblée nationale.
Sur le fond, en revanche, M. Sueur a vraiment tout faux, et d'abord parce que, si nous avons voulu inscrire la liberté pédagogique dans la loi, c'est pour éviter que les enseignants ne soient soumis, comme c'est le cas aujourd'hui, à cette sorte de pression qui est exercée sur eux - on ne sait pas très bien avec quelle autorité, d'ailleurs - pour les contraindre à recourir à des méthodes pédagogiques imposées par telle ou telle école.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez tous des exemples en tête de ces enseignants qui cherchent à innover ou qui recourent à des méthodes anciennes, des méthodes éprouvées, par exemple dans le domaine de l'apprentissage de la lecture, et qui se font sanctionner par l'inspection au motif qu'ils n'utilisent pas les méthodes qui doivent être utilisées.
Pour moi, et c'est d'ailleurs un vieux principe, l'enseignant est maître de sa pédagogie dans sa classe ; le travail de l'inspection consiste à vérifier que ses méthodes pédagogiques donnent de bons résultats et qu'elles sont efficaces, et non pas à imposer une méthode pédagogique à l'enseignant à l'intérieur de sa classe. Voilà pourquoi cette phrase figure dans la loi, et je la crois, moi, très importante.
M. Jean-Pierre Sueur. Les instructions sont pleines de méthodes pédagogiques : il y en a des dizaines, et même des centaines !
M. François Fillon, ministre. Eh bien, il y en aura de moins en moins !
Quant au second paragraphe cité, si nous écrivons, parlant de la formation continue des enseignants, qu'elle « s'accomplit en priorité en dehors des obligations de service d'enseignement », lorsqu'elle concourt « à l'amélioration des enseignements », c'est parce que nous ouvrons un droit nouveau aux enseignants en permettant aux recteurs de rémunérer ces formations continues.
Au titre de ce droit nouveau que nous offrons aux enseignants, sur le modèle de celui qui a été accordé aux salariés du secteur privé, grâce à une loi que j'avais eu l'honneur de vous présenter et que vous avez bien voulu voter, l'institution peut rémunérer des formations choisies par les enseignants, à condition toutefois que ces formations présentent un intérêt pour elle. On peut en effet imaginer qu'un enseignant ait envie de suivre une formation dans un secteur qui soit totalement étranger à l'éducation nationale ; il pourra le faire, mais, dans ce cas-là, la formation continue ne donnera pas lieu à rémunération décidée par le recteur.
Donc, quelle que soit la qualité de leur rédaction, ces deux paragraphes manifestent une intention forte du Gouvernement qui, je l'espère, sera suivi par le législateur.
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, conformément au souhait du président de la commission des affaires culturelles, nous allons interrompre nos travaux.
Je souhaite que nous puissions continuer dans le même esprit constructif que celui qui nous a guidés à la fin de cette séance. J'en remercie par avance les uns et les autres.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
5
ORDRE DU JOUR
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd'hui, samedi 19 mars 2005, à quinze heures et, éventuellement, le soir :
Suite de la discussion du projet de loi (n° 221, 2004-2005), adopté par l'Assemblée nationale, après déclaration d'urgence, d'orientation pour l'avenir de l'école.
Rapport (n° 234, 2004-2005.) fait par M. Jean-Claude Carle, au nom de la commission des affaires culturelles.
Avis (n°239, 2004-2005.) de M. Gérard Longuet, au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Délai limite pour les inscriptions de parole et pour le dépôt des amendements
Projet de loi portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique (n° 172, 2004-2005) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mardi 22 mars 2005, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mardi 22 mars 2005, à dix-sept heures.
Projet de loi organique relatif aux lois de financement de la sécurité sociale (n° 208, 2004-2005) ;
Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 23 mars 2005, à dix-sept heures ;
Délai limite pour le dépôt des amendements : mercredi 23 mars 2005, à seize heures.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le samedi 19 mars 2005, à deux heures quarante-cinq.)
La Directrice
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD