compte rendu intégral
PRÉSIDENCE DE M. Guy Fischer
vice-président
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PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
2
Octroi de mer
Adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence
M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi (n° 335, 2003-2004), adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d'urgence, relatif à l'octroi de mer. [Rapport n° 357 (2003-2004).]
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.
Mme Brigitte Girardin, ministre de l'outre-mer. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi relatif à l'octroi de mer que j'ai l'honneur de présenter devant votre assemblée constitue sans aucun doute un texte très important pour nos quatre départements d'outre-mer ; c'est aussi, et c'est le corollaire de son importance, un texte particulièrement attendu ; c'est enfin un texte d'un abord un peu difficile, où se mêlent des compétences de différents niveaux : niveau communautaire, niveau national et niveau décentralisé.
Ce texte est important parce qu'il assure des ressources aux budgets des collectivités, en particulier des communes, et qu'en même temps il favorise le développement des entreprises locales en instaurant des possibilités d'exonérations.
II est très attendu parce que cela fait, en réalité, plus de deux ans qu'un tel texte aurait dû être présenté au Parlement.
Sa bonne compréhension, enfin, ne peut se faire sans que soit exposé le rôle joué par les autorités communautaires - Commission et Conseil - dans sa mise au point.
Aussi, avant de vous préciser les principaux objectifs poursuivis par le Gouvernement à travers ce texte, permettez-moi de faire un bref rappel sur l'origine et les fonctions de l'octroi de mer tout en le replaçant dans le contexte du droit communautaire.
Qu'est-ce que l'octroi de mer ?
C'est une imposition spécifique aux départements d'outre-mer, les DOM. Il s'agit d'un droit de consommation très ancien, perçu depuis le xviie siècle, qui relève aujourd'hui de la compétence des conseils régionaux.
Son produit alimente les budgets des communes des DOM, ainsi que celui du département de la Guyane. Les budgets des régions d'outre-mer sont également bénéficiaires, depuis 1984, d'un droit additionnel à l'octroi de mer, ou DAOM.
En 2003, le produit total de l'octroi de mer pour les quatre DOM s'élevait à 615 millions d'euros, et celui du droit additionnel à l'octroi de mer à 140 millions d'euros. Autant dire que cette ressource tient une place déterminante au sein des budgets des collectivités.
Il s'agit d'une ressource essentielle pour les communes puisqu'elle représente de 25 % à 30 %, en moyenne, de leurs recettes réelles de fonctionnement suivant les DOM.
L'octroi de mer a aussi pour objet d'apporter un soutien aux entreprises des DOM à travers la possibilité d'exonérations totales ou partielles des productions locales, sous certaines conditions, tandis que les importations de produits de même nature peuvent rester taxées.
A cet égard, il apparaît que l'octroi de mer contribue à améliorer la valeur ajoutée des entreprises dans les secteurs agricole et industriel à hauteur de 22 % à la Réunion et jusqu'à 32 % en Martinique.
Sans la mise en place des différentiels d'octroi de mer, la plupart des entreprises des DOM ne pourraient atteindre un seuil de rentabilité économique compte tenu des handicaps auxquels elles sont confrontées.
Toutefois, le maintien de cette forme de soutien économique - dérogatoire au traité instituant la Communauté européenne - suppose l'accord des autorités communautaires sous la forme d'une décision du Conseil européen sur proposition de la Commission. Cette dernière repose, quant à elle, sur une demande de la France, sur la base de l'article 299-2 du traité d'Amsterdam, qui reconnaît les handicaps structurels auxquels sont confrontés les producteurs des régions « ultra-périphériques » de l'Union européenne, et donc des DOM.
Quel est le contexte communautaire ?
Le régime d'exonérations en vigueur est issu de la loi de 1992 et trouvait son origine dans la décision du Conseil européen de 1989. Ce régime arrivait à échéance le 31 décembre 2002.
Ce n'est qu'en mars 2002 que le gouvernement socialiste avait déposé à la Commission européenne une demande relative au maintien de l'octroi de mer, visant à reconduire à l'identique le régime existant. La Commission, jugeant cette demande insuffisamment étayée, l'avait rejetée. L'existence du régime d'exonérations de l'octroi de mer se trouvait en conséquence gravement menacée au-delà du 31 décembre 2002.
En mai 2002, ce dossier a donc été pour nous prioritaire, et nous avons tenté d'obtenir de Bruxelles, en urgence, la prorogation d'un an du régime, jusqu'à la fin de 2003. En contrepartie, une nouvelle demande circonstanciée devait être présentée par la France, dans des délais compatibles avec la prise de décision sur le plan européen.
Le « sursis » ainsi obtenu a été mis à profit pour préparer, en étroite concertation avec les exécutifs régionaux et les acteurs économiques locaux, une nouvelle demande circonstanciée, remise au commissaire Frits Bolkestein en avril 2003.
Sur cette base, cette fois convaincante, des discussions intenses ont eu lieu avec les services de la Commission européenne pour lui permettre de faire sienne, pour une très large part, la demande de la France et présenter, le 17 décembre 2003, une proposition au Conseil et au Parlement européens.
Ainsi le Conseil a-t-il pu adopter, en février dernier, une décision favorable à la France.
Est ainsi instauré dans les DOM, jusqu'au 1er juillet 2014, un régime permettant de faire bénéficier une liste de produits locaux d'écarts de taux d'octroi de mer dans des limites précisément définies. La totalité des productions qui avaient été recensées dans la demande française d'avril 2003 a été prise en compte. Le Conseil européen, à la demande de la France, a même accepté d'ajouter les produits dérivés du rhum dans la liste bénéficiant du maximum d'écart de taux.
La décision du Conseil prévoit que le nouveau régime doit être mis en place le 1er août 2004. Ce calendrier explique la demande d'examen en urgence par le Parlement du projet de loi relatif à l'octroi de mer, qui a principalement pour objet de transposer dans le droit national le nouveau dispositif d'exonérations.
Enfin, pour être complète sur ce volet communautaire, il me reste à préciser que, à la demande de la Commission européenne, le projet de loi a été notifié au titre des « aides d'Etat ». Cette notification, intervenue au début du mois de mars, a donné lieu à quelques questions de la Commission auxquelles le Gouvernement a répondu sans délai. Ainsi, la Commission a pu confirmer à la fin du mois dernier la compatibilité du présent projet de loi avec la réglementation communautaire relative aux aides d'Etat.
C'est donc à l'issue d'un très long processus, qui ne compte pas moins de onze réunions à Bruxelles, que le volet communautaire de ce dossier a pu être conclu.
Vous avez d'ailleurs pu constater vous-même, monsieur le rapporteur, lors de votre récent déplacement à Bruxelles, que le Gouvernement avait su convaincre ses interlocuteurs communautaires du bien-fondé de sa demande.
Quels sont les principaux objectifs du présent projet de loi ?
Tout d'abord, le maintien du soutien économique apporté aux entreprises des DOM, à travers l'outil fiscal qu'est l'octroi de mer ; ensuite, une meilleure utilisation budgétaire du produit de cette taxe ; enfin, une simplification administrative.
En matière économique, le premier objectif du projet est de transposer dans le droit national le nouveau dispositif d'exonérations autorisé par la décision du Conseil européen.
Ce nouveau dispositif repose sur la définition de trois listes de produits dans chaque DOM auxquels sont associés des écarts maxima de taxation entre les produits locaux et les produits importés identiques. L'avantage ainsi conféré aux productions locales doit rester dans une limite de dix, vingt ou trente points. Les listes A, B et C de produits correspondants à ces écarts se réfèrent à la nomenclature douanière et forment l'annexe à la décision du Conseil européen.
Ainsi, par exemple, en Guadeloupe, les eaux minérales produites localement figurent à l'annexe B de la décision du Conseil sous le code 22 01 10. De ce fait, elles peuvent bénéficier d'un écart de taux de vingt points maximum en leur faveur. Si la région décide de taxer cette production locale à 5 %, alors la taxation des importations d'eaux minérales ne peut excéder 25 % pour respecter l'écart maximum de vingt points autorisé par le Conseil.
La décision du Conseil prévoit également que les petites entreprises, c'est-à-dire celles dont le chiffre d'affaires est inférieur à 550 000 euros, pourront continuer à être exonérées d'octroi de mer. Cette disposition est bien reprise dans le projet de loi. En outre, un supplément de protection leur est apporté, qui prend la forme d'une majoration de cinq points des écarts de taux maximum.
Ainsi, pour reprendre mon exemple, une eau minérale guadeloupéenne produite par une petite entreprise sera exonérée d'octroi de mer. L'eau minérale importée sera, quant à elle, taxée à 25 %.
Dans le cas d'un produit ne figurant sur aucune des listes et pour lequel, par conséquent, aucun écart de taux n'est fixé, un maximum de cinq points de taxation pourra être appliqué.
Cette dernière disposition permettra de conserver une gestion de la taxe proche de celle qui a prévalu jusque-là et qui laissait ces petites entreprises hors du champ de l'octroi de mer.
Cependant, il est apparu que l'exonération systématique des entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 550 000 euros pouvait, dans certaines conditions, conduire à abaisser les taux d'octroi de mer appliqués jusqu'alors à certains produits importés, provoquant ainsi une baisse de rendement de la taxe.
II convenait, par conséquent, pour réagir à une telle éventualité, de permettre aux conseils régionaux de déroger à la règle générale d'exonération totale des entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 550 000 euros. Cette solution devra cependant rester tout à fait exceptionnelle.
Un amendement du Gouvernement a été introduit en ce sens à l'article 5 et adopté lors de la lecture du présent texte à l'Assemblée nationale, le 4 juin dernier.
En tout état de cause, la possibilité d'introduire une demande motivée d'actualisation des listes de produits pouvant bénéficier d'écarts de taxation permettra de n'appliquer que de façon très limitée dans le temps la taxation des livraisons concernées.
Ainsi, à la différence du dispositif actuel de l'octroi de mer, qui repose sur un système de taux plafonnés à 30 % - 50 % pour les alcools - pouvant donner lieu à des réductions de taxation au bénéfice de toute production locale sous réserve d'une justification du besoin économique, le nouveau dispositif instaure un système où les taux sont a priori libres, sous réserve du respect des écarts de taxation autorisés, au bénéfice des productions locales pour une liste de produits précisée par la décision du Conseil.
Cette nouvelle approche, qui résulte d'une exigence communautaire, a nécessité un effort important de la part des régions et des socioprofessionnels, qu'il convient de saluer, pour disposer d'une meilleure connaissance des productions locales et de leurs besoins en termes de soutien. En effet, ces écarts et ces listes ont été élaborés avec les acteurs locaux pour rester au plus près des pratiques existantes.
Pour le reste, en matière économique, le projet de loi reconduit l'existant.
Le marché unique antillais, destiné à accroître et améliorer les échanges entre la Guadeloupe et la Martinique, est maintenu. Le chapitre IX regroupe ainsi des dispositions éparses de la loi du 17 juillet 1992 concernant le document d'accompagnement qui couvre la circulation des biens sur ce marché, le régime du versement annuel de la taxe d'octroi de mer dans le département de destination et le régime de sanction applicable aux irrégularités.
Le dispositif antillo-guyanais qui prévoit, pour la circulation des marchandises entre la Guyane et le marché antillais, une perception de l'octroi de mer dans le département d'origine et une exonération dans le département d'arrivée est également inchangé.
Les « régimes suspensifs », tels que le placement de marchandises importées sous entrepôt, sont maintenant explicitement reconnus. Ils permettent de différer le paiement de l'octroi de mer et améliorent en conséquence la trésorerie des entreprises. Ainsi, le dispositif prévu a pour objet de permettre aux opérateurs locaux de ne pas supporter l'octroi de mer sur les biens qu'ils importent et conservent en stock avant de les revendre sur les marchés locaux des départements d'outre-mer.
Le dispositif proposé s'appuie sur les régimes suspensifs douaniers tels qu'ils résultent de la réglementation douanière actuelle. Toutefois, pour ne pas diminuer la recette, le dispositif de suspension de l'octroi de mer ne concerne que l'octroi de mer externe.
En matière budgétaire - c'est le deuxième objectif de ce projet de loi -, le changement introduit par le texte vise à porter remède à une consommation insuffisante, dans certains DOM, des fonds régionaux pour le développement et l'emploi, les FRDE.
Ces fonds ont été institués pour permettre aux régions d'apporter aux communes, sur des ressources d'octroi de mer, des subventions d'investissement destinées à faciliter l'installation d'entreprises et à développer l'emploi.
Pour ce faire, un amendement d'origine parlementaire, soutenu par le Gouvernement et voté par l'Assemblée nationale, prévoit de verser directement aux communes 80 % des FRDE sous la forme d'une dotation d'équipement local destinée à financer l'investissement communal. Les régions recevraient 20 % des FRDE pour financer des investissements réalisés sous leur propre maîtrise d'ouvrage ou celle de syndicats mixtes ou d'établissements publics de coopération intercommunale.
II convient également de noter qu'un autre amendement parlementaire, soutenu par le Gouvernement et voté par l'Assemblée nationale, prévoit de reverser aux communes les soldes des FRDE non engagés par les régions au 31 décembre 2003.
Par ailleurs, le droit additionnel à l'octroi de mer devient l'octroi de mer régional, et reste fixé à 2,5 %. Ce droit régional s'ajoutant à l'octroi de mer devra néanmoins respecter la décision du Conseil en matière d'écarts maxima de taux.
En outre, la situation exceptionnelle de la Guyane, où le département bénéficie, depuis 1975, de 35 % de la dotation globale garantie, alors que dans les autres DOM elle est entièrement versée aux communes, a été modifiée par un amendement parlementaire qui prévoit qu'à compter de 2005 la recette du département sera plafonnée à son niveau de 2003, arrondi au million d'euros supérieur, c'est-à-dire à 27 millions d'euros.
Enfin, troisième objectif, la simplification administrative.
La principale mesure concerne l'organisation de la gestion de l'octroi de mer. Les entreprises locales n'auront plus qu'un seul et même interlocuteur, à savoir les services de la douane, dorénavant compétents pour gérer l'ensemble de l'octroi de mer. Les services de la douane reprennent en effet les attributions des services fiscaux en ce qui concerne l'assiette et le contrôle de la taxe pour les productions locales.
Le projet de loi soumis à votre assemblée intègre les améliorations proposées par les députés ainsi que par la commission des lois de l'Assemblée nationale, qui a travaillé en étroite liaison avec votre propre commission des finances. Je crois pouvoir affirmer que ce texte recueille, à ce stade, un large consensus, puisqu'il a été voté le 4 juin dernier à l'Assemblée nationale à la quasi-unanimité des suffrages exprimés.
En conclusion, le projet de loi qui vous est présenté conforte et modernise un instrument fiscal original et essentiel pour les départements d'outre-mer, permettant d'assurer un niveau pertinent de recettes aux collectivités bénéficiaires tout en constituant un soutien adapté aux entreprises productives. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Roland du Luart, rapporteur de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, depuis deux ans maintenant, en ma qualité de rapporteur spécial des crédits du ministère de l'outre-mer, je me suis fait l'écho des inquiétudes suscitées par la reconduction du régime de l'octroi de mer.
Je rappelle que, historiquement, l'octroi de mer est l'une des plus anciennes taxes du régime fiscal français. Il remonte en effet à Colbert, puisque c'est un édit de décembre 1663 qui est à l'origine de sa pérennisation.
Il représente à la fois la principale ressource des communes d'outre-mer et une protection indispensable pour les économies ultramarines. Toutefois, ce régime s'est trouvé menacé. En effet, il nécessite un accord des autorités communautaires, et l'on sait que ces dernières sont particulièrement attentives à tout ce qui peut affecter le fonctionnement du marché intérieur. Or la loi qui sert de base légale au système actuellement en vigueur, adoptée en 1992, était prévue pour s'appliquer jusqu'en 2002, en vertu d'une décision du Conseil de 1989.
Finalement, le Conseil a rendu une nouvelle décision le 10 février 2004, récemment approuvée par la direction générale de la concurrence de la Commission européenne, qui instaure un nouveau système d'écart de taxation entre les productions locales et les importations, de nature à satisfaire l'ensemble des acteurs. Vous noterez que deux années de discussion avec la Commission européenne ont été nécessaires afin de parvenir à un accord satisfaisant !
Mme la ministre de l'outre-mer, qui a été entendue le 9 juin par la commission des finances, nous a exposé à cette occasion les principales difficultés de la négociation.
Je relève pour ma part que cette négociation a été menée de manière très efficace, en étroite concertation avec les élus d'outre-mer, et trouve sa traduction dans le projet de loi que nous examinons aujourd'hui.
Soucieux d'exercer au mieux la mission de rapporteur au fond que m'a confiée la commission des finances, je me suis rendu à Bruxelles le 19 mai dernier afin de rencontrer des interlocuteurs au sein de la Commission européenne. J'ai pu noter à quel point les autorités communautaires étaient sensibilisées au traitement spécifique que nécessitent nos régions d'outre-mer, contrairement à l'image que l'on peut parfois avoir.
Je voudrais maintenant, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, revenir brièvement sur l'importance toute particulière de l'octroi de mer pour les collectivités d'outre-mer.
De fait, cette importance est double.
D'une part, l'octroi de mer constitue la principale ressource des communes et des régions d'outre-mer. Ainsi, il représente entre 43 % et 47 % des ressources fiscales des communes, entre 11 % à la Réunion et 48 % en Guyane des ressources de la région. Son produit total s'établit à plus de 700 millions d'euros, qui sont directement réinvestis dans l'économie locale.
D'autre part, l'octroi de mer constitue une protection pour les entreprises d'outre-mer. Pour bien comprendre cet aspect, un petit retour en arrière s'impose. Rassurez-vous, je ne remonterai pas jusqu'à mon aïeul Colbert, même si je vous recommande la lecture des premières pages de l'exposé général de mon rapport pour plus de détails historiques ! (Sourires.)
Jusqu'en 1992, l'octroi de mer ne frappait que les importations, c'est-à-dire toutes les marchandises entrant dans les régions d'outre-mer. Naturellement, il s'agissait là d'une protection tarifaire, contraire aux traités européens. C'est pourquoi la première décision du Conseil relative à cette taxe, prise en 1989, pose le principe que tous les produits sont taxés, mais que des exonérations pour les productions locales sont possibles.
Vous noterez qu'il s'agit d'un équilibre assez subtil entre deux articles du traité, à savoir l'article 90 sur la liberté de circulation des marchandises, et l'article 299-2 qui autorise des traitements dérogatoires pour les régions ultrapériphériques.
En tout état de cause, cette protection est indispensable quand on connaît la fragilité des économies d'outre-mer, liée à leurs handicaps structurels. Comme le remarque avec humour Mme la ministre, la Réunion est une île... et le restera longtemps ! (Sourires.)
Le projet de loi que j'ai l'honneur de rapporter devant vous aujourd'hui, et sur lequel l'urgence a été déclarée, pérennise donc jusqu'en 2014 le régime de l'octroi de mer.
Permettez-moi maintenant de vous exposer les deux principales modifications qui ont été apportées par l'Assemblée nationale, dans un climat très consensuel dont je me félicite, lors de la première lecture de ce texte le 4 juin dernier. Elles portent respectivement sur la partie « communautaire » et sur la partie « nationale » du projet de loi.
La première modification concerne la dimension strictement « communautaire » du projet de loi.
La taille du présent texte - cinquante-deux articles - ne doit en effet pas induire en erreur : beaucoup d'articles ne font que reprendre les dispositions de la loi de 1992. Le « coeur » du projet, les articles 27, 28 et 29, est, à l'opposé, la transposition en droit français de la décision du Conseil du 10 février 2004, qui apporte des modifications substantielles.
Ces modifications sont de deux ordres.
D'une part, dans le droit actuel, il n'est pas possible de taxer les produits au-delà de 30 %, exception faite des alcools et du tabac, qui sont taxés à 50 %. Cette limite n'existe plus, et les conseils régionaux ont dorénavant la possibilité de fixer le niveau qui leur paraît le plus adéquat.
D'autre part, le nouveau système repose sur des écarts de taux maxima autorisés entre les productions locales et les importations de produits similaires.
A l'heure actuelle, les conseils régionaux qui désirent « protéger » une production locale, et donc l'exonérer totalement ou partiellement, doivent transmettre la délibération à la Commission européenne. En pratique, ce système s'est révélé très lourd à gérer et peu satisfaisant de part et d'autre.
Dorénavant, trois listes annexées à la décision du Conseil fixent, pour chaque produit et pour chaque région, des écarts de taux maxima autorisés entre dix et trente points.
Par exemple, prenons un produit présent sur la liste C, qui autorise des écarts de taux de trente points. Si le conseil régional fixe la taxation à l'importation à 50 %, celle de la production locale équivalente ne pourra pas descendre en dessous de 20 %. Ce nouveau système permet donc d'assurer un écart « juste et proportionné » entre la production locale et l'importation, pour reprendre les termes employés par la Cour de justice des Communautés européennes.
Je vous signale par ailleurs qu'une procédure d'actualisation des listes est prévue dans la décision du Conseil et dans un amendement introduit par le Gouvernement lors de la discussion à l'Assemblée nationale.
La seconde modification concerne la partie « nationale » du projet de loi, à savoir la répartition du produit de l'octroi de mer.
Il faut en effet savoir qu'une fraction des sommes recueillies est versée, depuis 1992, à un fonds régional pour le développement et l'emploi, le FRDE.
Les FRDE, gérés par les régions, sont destinés à financer des projets associant divers partenaires en vue de favoriser le développement économique et l'emploi.
Trois problèmes, qui sont d'ailleurs probablement liés, sont apparus au fil du temps.
Tout d'abord, on observe un relatif manque de transparence dans leur gestion, à tel point que j'ai eu le plus grand mal à rassembler des données relativement fiables sur leur utilisation.
Ensuite, il existe une sous-utilisation des fonds, qui se traduit par des « stocks » accumulés considérables dans certaines régions. A cet égard, deux changements ont été apportés, le premier par la loi d'orientation du 14 décembre 2000, le second, pour la région Réunion, par la loi de programme du 22 juillet 2003. Ces changements visaient à élargir soit le cercle des bénéficiaires - les EPCI, par exemple - soit les conditions d'attribution.
Enfin, de nombreux élus ont le sentiment que s'exerce une « tutelle » de la région.
Toujours est-il, et c'est un débat maintenant ancien, que cette question n'avait jamais fait l'objet d'un consensus et qu'elle suscitait de nombreuses plaintes de la part des communes, qui avaient le sentiment que l'argent était disponible mais très difficile à obtenir.
Le projet de loi comportait une légère amélioration à cet égard, mais - et c'est assez rare pour qu'on le souligne - un consensus s'est dégagé lors des débats à l'Assemblée nationale autour d'un amendement cosigné par des députés de la majorité comme de l'opposition.
Dorénavant, les fonds du FRDE seront reversés directement à hauteur de 80 % aux communes, sur leur section d'investissement, afin de les aider à développer l'emploi et à promouvoir le développement économique. Le solde, soit 20 %, restera à la région. C'est donc un profond bouleversement qui a eu lieu, mais il a été décidé de façon consensuelle.
Je me félicite pour ma part de voir que, sur un sujet aussi important, des positions divergentes aient pu être finalement rapprochées.
Dans la foulée de cet amendement, un second a été adopté qui prévoit que les crédits non engagés du FRDE seront redistribués en trois ans aux communes. On ne peut qu'y voir un réel progrès et des perspectives d'investissement considérables pour les années à venir. Vous admettrez, mes chers collègues, qu'il aurait été dommage, compte tenu des besoins sans cesse affirmés par nos élus d'outre-mer, de laisser « croupir » des crédits...
Je n'ignore ni les réserves formulées par certains de nos collègues sur cette redistribution ni le caractère particulièrement « sensible » du sujet. Je précise en conséquence que la position que j'ai adoptée - et qui a été approuvée par la commission des finances - me paraît finalement être de simple bon sens : à partir du moment où l'article 48, modifié par l'Assemblée nationale à une large majorité, change le mode du fonctionnement du FRDE, il paraît difficile de conserver aux fonds accumulés, qui sont parfois considérables, un cadre juridique qui a précisément montré ses limites.
Telles sont, monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les dispositions qui m'ont semblé le plus importantes dans ce projet de loi.
Vous aurez remarqué que la commission ne déposera aucun amendement sur ce texte, ce qui n'est pas banal. J'espère que vous n'y verrez pas un manque d'intérêt ou, pire, de la paresse de ma part ! (Sourires.)
Il y a à cela trois raisons, que je vais rappeler.
La première raison tient aux dispositions les plus importantes de ce texte, qui relèvent de la décision du Conseil et ne sont donc pas « amendables », sous peine de mettre la France en infraction avec le droit communautaire et de remettre en cause un accord largement négocié.
La seconde raison relève de l'urgence. En effet, l'actuel système est prévu pour prendre fin au 1er août 2004, date à laquelle le nouveau système doit entrer en vigueur. Or, dans l'intervalle qui séparera la promulgation de la loi et le 1er août, les conseils régionaux devront prendre de nombreuses délibérations et effectuer plusieurs travaux complexes.
L'examen du projet de loi ayant été retardé de trois semaines, il nous a paru plus pertinent de travailler en étroite concertation avec la commission des lois de l'Assemblée nationale et son rapporteur, notre excellent collègue Didier Quentin, afin d'éviter une commission mixte paritaire et des délais supplémentaires. Je puis vous assurer que ce travail a été utile et nous permet d'arriver devant la Haute Assemblée avec un projet solide.
La troisième raison tient au large consensus qui est apparu à l'Assemblée nationale autour de questions importantes, comme le FRDE. Mon souhait, en tant que rapporteur spécial des crédits du ministère de l'outre-mer, et afin de répondre aux critiques parfois formulées d'un « manque de concertation », était de voir les principaux intéressés parvenir à un accord.
Je ne vois donc pas de raisons de revenir sur des positions qui me paraissent bonnes et largement acceptées. C'est pourquoi nous formulons le souhait, partagé par Didier Quentin - avec lequel j'ai eu l'occasion de discuter longuement -, de parvenir à un vote conforme par le Sénat. Le sujet est en effet assez consensuel et urgent pour justifier cette procédure. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
- Groupe Union pour un mouvement populaire, 50 minutes ;
- Groupe socialiste, 28 minutes ;
- Groupe de l'Union centriste, 13 minutes ;
- Groupe communiste républicain et citoyen, 12 minutes ;
- Groupe du Rassemblement démocratique et social européen, 10 minutes.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, vous le savez, l'octroi de mer a pour origine historique l'octroi municipal, taxe destinée, sous l'Ancien Régime, à alimenter les budgets des collectivités, et particulièrement des communes.
Mais c'est l'article 2 du sénatus-consulte du 4 juillet 1866 qui a défini en premier lieu la nature de l'octroi de mer et en a précisé les différentes destinations.
Les dispositions de ce texte prévoyaient que l'octroi de mer frappait les produits de toute provenance et que les taux, les assiettes, les modalités et les modes de répartition étaient votés par le conseil général.
Les produits de l'octroi de mer étaient affectés, et le sont encore, au budget des communes au prorata de leur population. Le recouvrement était assuré par le service des douanes.
A l'analyse, l'octroi de mer s'apparente donc à un droit de douane.
Mais, le 14 juin 1935, le conseil général de la Guadeloupe adopta une délibération, approuvée en janvier 1936, où il est précisé en substance que les droits d'octroi de mer sont applicables aux objets de toute provenance, qu'ils soient importés, récoltés, préparés ou fabriqués dans la colonie.
Avec la départementalisation de 1946, qui allait ouvrir les portes économiques de l'outre-mer, l'octroi de mer, tel qu'il était autrefois conçu, c'est-à-dire fixé par le conseil général, allait frapper très lourdement les productions locales, et il fut fortement contesté par les élus.
Une circulaire du Gouvernement du 5 mars 1964 est alors intervenue pour supprimer cette taxe et le droit interne. Mais cette circulaire n'avait aucune portée réelle, car elle n'avait la valeur ni d'un décret ni d'une loi.
Aussi, l'Acte unique européen de 1986, ayant pour objectif l'harmonisation fiscale, allait s'attaquer à cette suppression du droit interne et de l'octroi de mer, qui était incompatible avec l'achèvement du marché commun.
La réforme du 22 décembre 1989 tendait, quant à elle, à la reconnaissance du bien-fondé de l'octroi de mer selon les principes d'harmonisation, puis d'intégration.
Il faut toutefois signaler que la taxe d'octroi de mer allait subir de nombreuses modifications, décidées d'abord par les conseils généraux, puis par les assemblées régionales.
Rappelons tout d'abord que les produits importés par les administrations, la justice, l'armée, la sécurité sociale, ont été assujettis au paiement de la taxe, alors qu'ils étaient autrefois systématiquement exonérés. C'est ainsi qu'a été établie cette fameuse règle, qui a permis à Bruxelles de reconnaître le fondement de cette taxe, selon laquelle l'octroi de mer est la règle et l'exonération l'exception.
Puis, les collectivités antillaises se sont engagées contre la procédure de double imposition. En effet, des produits importés en Guadeloupe, pour lesquels la taxe d'octroi de mer avait été acquittée, étaient à nouveau assujettis à l'octroi de mer à la Martinique, parce que les taux y étaient différents.
Nous avons pu, à ce moment-là, harmoniser nos taux d'octroi de mer, de telle sorte qu'un produit assujetti à l'octroi de mer en Guadeloupe ne le supporte plus en Martinique.
Par ailleurs, nous avons engagé un certain nombre de procédures concernant les différentiels de taux applicables entre la Guadeloupe et la Martinique, afin de faciliter les échanges entre nos régions.
La répartition de l'octroi de mer, basée sur le seul critère de population, fut alors modifiée, pour prendre en compte, d'une part, le dépeuplement des centre-bourgs et, d'autre part, le coût de la double insularité, la Guadeloupe étant un archipel.
Mais la nature juridiquement hybride de l'octroi de mer a été mise à mal par les nombreuses décisions de condamnation dont le Gouvernement français a été l'objet et qui ont contraint celui-ci à légiférer en 1992.
Ce texte de 1992 définissait la réelle nature juridique de l'octroi de mer, assimilé désormais à un droit de consommation. Il précisait notamment que toutes les opérations étaient assujetties à l'octroi de mer, que les exonérations pouvaient être accordées par le conseil régional pour les productions locales et prenaient la forme d'un taux réduit ou d'un taux zéro.
La décision de l'assemblée devait être notifiée au préfet dans un délai de huit jours, avec un effet suspensif pendant une durée de trois mois, alors que le Conseil avait fixé cette durée à deux mois sans effet suspensif. Par cette loi de 1992, le Gouvernement allait donc au-delà des recommandations du Conseil.
Une vingtaine de taux plus ou moins disparates figuraient en outre dans ce texte et une partie du produit de l'octroi de mer devait être affecté à une dotation globale annuelle pour les communes, le solde allant aux fonds régionaux pour le développement et l'emploi, utilisés sur décision du conseil régional.
Je précise d'ailleurs, madame le ministre, que le conseil régional de la Guadeloupe, à mon départ, ne disposait plus de ce fonds régional : nous avons en effet tout consommé, dans l'intérêt des entreprises et de l'emploi.
Voilà, sommairement résumée, la situation de l'octroi de mer lors de votre arrivée, madame le ministre, au ministère de l'outre-mer.
Mais, si la loi de 1992 nous avait accordé un délai de dix années - qui est venu à expiration en 2002 -, le Gouvernement français avait, quant à lui, oublié ce texte. Quant à l'octroi de mer, il était remis en cause par les instances communautaires.
Compte tenu de la situation exceptionnelle des DOM, reconnue par certaines dispositions tant de la Constitution française que de l'Acte unique, il était tout à fait possible de réussir, certes non sans difficultés, et de faire reconnaître le caractère dérogatoire de l'octroi de mer.
Pour ce faire, vous avez engagé, madame le ministre, une synergie entre les parlementaires, les collectivités et les acteurs économiques, ce qui n'est pas toujours facile, surtout lorsque les intérêts des élus et ceux des milieux socioprofessionnels divergent. Mais ces nombreuses réunions ont permis de dégager des solutions et de proposer des arguments matériels indiscutables.
A cet égard, permettez-moi d'évoquer l'une de ces réunions, celle à laquelle ont participé les ambassadeurs de la zone, dont la portée fut capitale et qui démontre l'importance de l'octroi de mer pour les productions locales face à l'application des negative lists pénalisant l'exportation de nos produits dans la zone.
Le projet de loi qui nous est soumis aujourd'hui sauve une nouvelle fois l'octroi de mer, car il transpose dans le droit national la décision du Conseil européen autorisant la France à instaurer cette taxe.
Le nouveau dispositif comporte des mesures de simplification, que je me plais à mettre en exergue, concernant les taux de taxation et le système des écarts entre taux internes appliqués aux produits locaux et taux externes grevant les biens importés. Le dispositif sera désormais beaucoup plus facile à appliquer.
Par ailleurs, le projet de loi valorise les petites entreprises, comme vous n'avez pas manqué de le souligner, madame le ministre. Or ce sont les petites entreprises locales qui doivent faire l'objet d'une attention toute particulière de notre part.
En outre, le texte prévoit un complément de soutien financier aux communes, dont les budgets sont parfois limités compte tenu des charges de fonctionnement qu'elles supportent.
En conclusion, ce projet de loi tend à simplifier considérablement la gestion administrative de l'octroi de mer et constitue, pour les collectivités territoriales concernées, un instrument fiscal rénové permettant de maintenir les recettes et d'apporter un appui indispensable au développement économique de nos régions.
Cependant, si l'octroi de mer doit être, pour l'outre-mer, un instrument de soutien à la production locale, il est clair, madame le ministre, que le Gouvernement doit être vigilant devant l'ouverture du grand marché caribéen, qui risque de mettre à mal les efforts consentis en faveur du développement de l'outre-mer au travers tant de la loi de programme que du dispositif rénové de l'octroi de mer.
Il est en effet reconnu que nos régions disposent d'importantes infrastructures et recèlent un gisement d'entreprises performantes constituant incontestablement un atout pour le développement dans la zone et donnant aux régions antillaises, en particulier, un potentiel d'intervention en matière de coopération.
Certes, la réussite de la mise en oeuvre du programme Interreg III, pour lequel la région Guadeloupe était l'autorité de gestion, a permis une action intéressante, grâce à une combinaison financière heureuse entre les crédits du FEDER, le Fonds européen de développement régional, proprement communautaire, et ceux du FED, le Fonds européen de développement, alimenté par des contributions volontaires des Etats membres de l'Union européenne.
Si le dispositif social de la loi de programme permet aux régions françaises des Antilles de faire face, en particulier, au surcoût du travail, il reste que l'ouverture dans deux ans du grand marché caribéen risque d'inciter les Etats de la zone au protectionnisme, par le recours de plus en plus fréquent aux negative lists au détriment de la production locale antillaise.
Par conséquent, il est important de veiller à ce que l'octroi de mer demeure un véritable rempart défendant cette production locale, afin d'éviter que nos régions ne deviennent les consommatrices de produits provenant du monde entier mais labellisés « caribéens », et donc devenus européens.
Cette dernière observation étant faite, je voudrais insister sur le caractère tout à fait novateur du dispositif de l'octroi de mer pour les collectivités territoriales concernées, et vous féliciter personnellement, madame le ministre, d'avoir relevé en peu de temps un grand défi dans des conditions particulièrement difficiles, et ce dans l'intérêt des départements d'outre-mer. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Paul Vergès.
M. Paul Vergès. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi examiné aujourd'hui est un texte très attendu outre-mer, car il vise à transcrire dans la loi française une décision du Conseil de l'Union européenne devant s'appliquer obligatoirement au 1er août 2004, dans six semaines exactement.
C'est dans ce très court délai que la procédure législative devra s'achever, que les décrets d'application devront être soumis aux collectivités locales avant d'être publiés, que les conseils régionaux devront fixer les taux de l'octroi de mer et déterminer les exonérations partielles ou totales, que le contrôle de légalité devra s'exercer... De plus, ne l'oublions pas, les acteurs économiques devront être informés à temps.
Le Gouvernement en est d'ailleurs conscient, puisque, par un courrier en date du 27 mai dernier, il a demandé aux régions de bien vouloir anticiper sur la procédure législative et réglementaire. Ainsi, la longue attente devient précipitation, ce qui prive notre assemblée du temps nécessaire à une réflexion approfondie susceptible de lui permettre d'améliorer et de préciser le texte qui lui est soumis. Ainsi, tout semble avoir été fait pour que le Sénat soit réduit à jouer, s'agissant de ce texte, un rôle de chambre d'enregistrement.
Les régions sont donc contraintes, sauf à prendre le risque de pénaliser les acteurs économiques, de se contenter d'une traduction mécanique de la décision du Conseil de l'Union européenne dans leurs délibérations tendant à fixer les taux de l'octroi de mer.
Or tous les intervenants ont largement souligné la complexité des enjeux liés à l'octroi de mer, dont le cadre vient d'être fixé par Bruxelles pour les dix prochaines années, complexité d'autant plus difficile à maîtriser que bien des incertitudes pèsent sur ces dix années.
Ces incertitudes sont internationales, avec la globalisation et la libéralisation des échanges, qui poussent aux regroupements continentaux et aux accords de partenariat économiques régionaux, dont les conséquences, pour les régions d'outre-mer comme pour les petites économies insulaires, risquent d'être graves.
Ces incertitudes sont communautaires, du fait de la dimension nouvelle de l'Union européenne, qui entraîne la réforme de ses institutions et de ses politiques, dont celles qui affectent les régions ultrapériphériques.
Ces incertitudes sont nationales, enfin, en ce qui concerne l'adéquation des ressources des collectivités locales avec les transferts de compétences liés à l'acte II de la décentralisation.
Ce contexte, ainsi que la considération selon laquelle l'octroi de mer devait devenir l'un des instruments du développement économique, m'avaient amené, en tant que président de région, à plaider pour une prorogation du dispositif actuel pour trois ans : trois ans, le temps d'être fixé sur la Constitution européenne, sur la réforme de la politique agricole commune et des OCM « sucre » et « banane », sur la politique de cohésion, sur les orientations des accords de partenariat en cours de négociation entre les Etats qui nous environnent, sur les conditions de l'approfondissement de la décentralisation... trois ans, c'est-à-dire le temps d'inscrire la réforme de l'octroi de mer dans une approche cohérente des spécificités de nos régions et des moyens d'y faire face, conformément d'ailleurs aux recommandations du Conseil européen de Séville.
Force est de constater que le délai d'une année accordé est un délai technique, mais certainement pas un délai politique !
La capacité de développement du tissu économique de nos régions est davantage liée, on le sait, à ces grandes questions qu'à l'avantage comparatif apporté par la possibilité d'exonérer totalement ou partiellement de la taxe de l'octroi de mer la production locale.
Cet avantage n'est certes pas négligeable, et la concertation a permis d'en démontrer la nécessité pour les acteurs économiques.
Il est regrettable que le Gouvernement n'ait pu défendre les positions qu'il avait annoncées sur la réfaction de 15 % de l'assiette, sur le non-assujettissement des petites entreprises ou sur la validité du système pendant les quinze années prévues par la loi de programme.
Au-delà, et de façon plus fondamentale, on peut s'interroger sur les raisons qui ont amené la Commission européenne à faire encadrer le nouveau système par le Conseil de l'Union européenne, au détriment de la souplesse offerte jusqu'à présent.
De même, on peut s'interroger sur les motivations qui conduisent le Gouvernement à prévoir, dans son projet de loi, que les délibérations des régions justifieront les taux votés eu égard aux handicaps déjà dûment constatés dans la demande circonstanciée de la France et dans la proposition de la Commission européenne. Je défendrai d'ailleurs tout à l'heure un amendement sur ce point.
On a également souligné, devant l'Assemblée nationale, l'importance de l'octroi de mer dans les ressources des collectivités locales, en particulier dans celles des communes. Ce volet de l'octroi de mer ne relève en rien des institutions communautaires, sauf à vouloir démontrer que l'affectation des recettes de cette taxe concourt bien à corriger les retards économiques.
Les dispositions inscrites à ce titre dans le projet de loi sont donc de la responsabilité du Gouvernement et de sa majorité. Autant, sur ce que j'appellerai le volet européen, s'était établi, entre le Gouvernement, les régions et les acteurs socioprofessionnels, un dialogue certes parfois contradictoire ou critique mais réel, autant ce volet n'a fait l'objet d'aucune concertation, puisque Bruxelles n'exigeait rien.
Dans ces conditions, pourquoi avoir décidé, le 4 juin dernier, de modifier substantiellement l'affectation des crédits du Fonds régional pour le développement et l'emploi ? Certes, la sous-consommation des crédits du FRDE est un problème connu, mais, vous le savez tous fort bien, mes chers collègues, nous avions déjà contribué à y remédier par le biais d'une évolution législative tendant à élargir le champ d'éligibilité à ce fonds.
Ainsi, à la Réunion - et je tiens ces chiffres à la disposition de M. le rapporteur, qui a démontré son souci d'objectivité sur cette question -, de 2001 à 2003, le taux d'engagement des crédits du FRDE est passé de 31 % à 57,5 %. La non-consommation totale n'est due, c'est un fait objectif, qu'à une demande insuffisante de la part des collectivités territoriales alors bénéficiaires, à savoir les communes et les établissements publics de coopération intercommunale.
Dès lors, la mise en oeuvre du dispositif voté le 4 juin dernier par les députés améliorera-t-elle vraiment la consommation des crédits du FRDE ? Probablement pas, sauf à s'écarter de la finalité de ce fonds. L'Assemblée nationale a ouvert la porte à toutes les dérives ; j'ose encore espérer que, dans sa sagesse, le Sénat la refermera. Je défendrai un amendement en ce sens dans la suite du débat.
Quant à l'article 48 bis, son existence ne peut tenir qu'à une volonté de déstabiliser les finances des quatre régions d'outre-mer...
M. Roland du Luart, rapporteur. Pas du tout !
M. Paul Vergès. Je n'en dirai pas davantage, mais est-il sage de prendre des risques juridiques pour obtenir ce résultat ?
Monsieur le président, madame la ministre, ce dispositif couvre les dix prochaines années, dont nous savons qu'elles sont incertaines. Ce débat sur l'octroi de mer révèle le défi immense qui est devant nous en vue d'une intégration difficile, mais qui serait profitable à nos économies, au sein de l'Europe communautaire.
Au moment où le Conseil européen vient de s'accorder sur la future Constitution, il s'agira pour nous de trouver cette voie, toujours étroite, qui permet le respect de nos spécificités, la prise en compte de nos particularités et de nos handicaps, dans une Europe qui aborde une nouvelle étape de son intégration. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Rodolphe Désiré.
M. Rodolphe Désiré. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'octroi de mer, cette vieille recette de fonctionnement des collectivités d'outre-mer remontant au sénatus-consulte du 4 juillet 1866, considérée comme une taxe d'effet équivalent à un droit de douane et dont la dernière version date de la loi du 17 juillet 1992, prend aujourd'hui un nouveau visage.
En effet, par la décision adoptée le 10 février dernier par le Conseil de l'Union européenne, l'octroi de mer est devenu une taxe destinée à « compenser les surcoûts » de production des entreprises locales. Cependant, il demeure aussi, ne l'oublions pas, la ressource de fonctionnement essentielle des communes d'outre-mer, à hauteur de 47 % en moyenne de leurs recettes de fonctionnement pour la Martinique.
Il faut garder à l'esprit dans ce débat que, sans l'octroi de mer, les communes des DOM, compte tenu de la faiblesse de leur PIB par habitant - 55 % du PIB moyen métropolitain - seraient inéluctablement condamnées à la faillite, d'autant qu'elles sont obligées, par ailleurs, d'accorder à leurs agents communaux titulaires une majoration pour vie chère de 40 %. Je note donc avec satisfaction la nouvelle répartition du FRDE, qui contribue à améliorer la capacité d'investissement des communes.
L'octroi de mer, rappelons-le, n'a pas altéré les échanges en défaveur de l'Europe : les importations en provenance des pays de l'Union, France métropolitaine comprise, se sont accrues d'environ 5 % par an, et le déficit de notre balance commerciale continue de s'aggraver, nos exportations couvrant moins de 15 % de nos importations. Cela contredit l'argument selon lequel ce régime constitue une dérogation indue au principe de la libre concurrence.
Alors, oui, madame la ministre, je voterai ce projet de loi, même si je me permets de suggérer quelques minimes modifications.
Quoi qu'il en soit, il n'est pas intempestif de poser la question, dès aujourd'hui, de savoir ce que nous ferons à partir du 2 juillet 2014, compte tenu notamment de la complexité des problèmes posés par l'élargissement de l'Europe. Le caractère provisoire de cette disposition semble accréditer l'idée que les DOM bénéficient encore d'un régime de faveur.
Des voix se sont élevées, notamment au sein de la commission des finances du Sénat, pour dénoncer une fois de plus les niches fiscales qui profitent aux DOM, notamment le dispositif de la TVA non perçue récupérable, que nous avons sauvé de justesse le 24 novembre 2003, lors de la discussion du projet de loi de finances au Sénat.
Il est regrettable que l'on refuse de prendre la mesure du caractère permanent des handicaps que connaissent les économies des régions insulaires, structurellement défavorisées. L'on ferait bien d'examiner avec plus d'attention les avantages fiscaux accordés par l'Espagne aux Canaries, et de les comparer à ceux qui sont accordés par la France aux DOM, notamment dans le domaine de la continuité territoriale.
« La France a toujours cru que l'égalité consistait à trancher ce qui dépasse », disait Jean Cocteau lors de son discours de réception à l'Académie française. Il faut cependant se rappeler les termes de l'arrêt Wagner de la Cour de justice des Communautés européennes du 26 mars 1987 : « La discrimination consiste à traiter de manière différente des situations identiques et de manière identique des situations différentes ».
Il faudrait donc instaurer un dispositif global d'aide aux départements ultrapériphériques, tenant compte de leurs handicaps permanents - éloignement, insularité, étroitesse du marché - et de leur retard de développement.
L'Union européenne a déjà pris en compte ces handicaps dans le paragraphe 2 de l'article 299 du traité d'Amsterdam, et consacré la nécessité d'un rattrapage économique dans l'actuel article III-330 du projet de Constitution européenne, dont il n'est pas inutile de rappeler ici le second paragraphe, qui précise les domaines dans lesquels une dérogation au droit commun communautaire pourrait être envisagée : « Les mesures visées [...] portent notamment sur les politiques douanières et commerciales, la politique fiscale, les zones franches, les politiques dans les domaines de l'agriculture et de la pêche, les conditions d'approvisionnement en matières premières et en biens de consommation de première nécessité, les aides d'Etat, et les conditions d'accès aux fonds structurels et aux programmes horizontaux de l'Union ».
Je me suis efforcé depuis longtemps de faire admettre que ce que d'aucuns pouvaient considérer comme de la discrimination positive, principe très mal perçu en France, pouvait être interprété de manière plus intelligente et plus concrète par le principe de continuité territoriale. Ce principe a déjà été mis en oeuvre avec succès par l'Espagne et le Portugal pour leurs régions ultrapériphériques.
Il faudrait que la notion de « continuité territoriale » en France s'appuie dorénavant non seulement sur les dispositions votées par l'Europe, mais aussi sur le nouvel article 72-2 de la Constitution française, révisée le 28 mars 2003, qui dispose, dans son cinquième alinéa : « La loi prévoit des dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales ».
Il est en effet grand temps, madame la ministre, et vous avez déjà commencé activement en ce sens, de considérer que les aides accordées par la France à ses départements d'outre-mer doivent non pas relever d'un effort de générosité et de charité, mais s'inscrire dans un cadre destiné à compenser leurs handicaps structurels permanents. Il faut avoir le courage d'admettre que certains handicaps sont structurels, et ne pas continuer à les traiter uniquement par des remèdes conjoncturels.
Cela mis à part, madame la ministre, le texte qui nous est soumis aujourd'hui me semble satisfaisant, même si quelques améliorations peuvent lui être apportées.
Concernant tout d'abord l'article 24, vous avez promis à mon collègue Philippe Edmond-Mariette à l'Assemblée nationale, le 4 juin dernier, que les entreprises qui acquittent l'octroi de mer sur les matières premières importées, mais qui n'en perçoivent pas, pourront le comptabiliser en charges d'exploitation ou en provisions, à l'instar de ce qui est pratiqué pour les importateurs de produits revendus en l'état ; j'en ai pris bonne note.
Enfin, et j'ai déposé un amendement en ce sens, l'article 30 me paraît redondant, dans la mesure où les taux sont déjà fixés en fonction des handicaps par l'annexe de la décision du Conseil. Il me semble donc plus cohérent de mentionner cette nécessaire justification pour les « modifications » éventuelles des taux.
Il est indispensable de trouver des solutions pérennes pour soutenir durablement nos économies, notamment en maintenant définitivement l'octroi de mer, surtout dans la perspective de l'élargissement de l'Europe jusqu'au détroit du Bosphore dans les dix prochaines années.
Cette route est encore longue et sinueuse, mais les ressources nombreuses, et l'énergie vivace ! (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, autant vous le dire d'emblée, j'apporterai une petite note discordante dans l'ambiance musicale de ce jour ! (Sourires.)
Je ne trouve pas très satisfaisantes les conditions dans lesquelles l'actuel projet de loi sur l'octroi de mer est examiné par le Parlement, elles le sont moins, en tout cas, que celles que l'on a connues en 1992, lors du débat parlementaire qui a abouti à la première réforme de l'octroi de mer. Un important travail législatif avait alors pu être effectué, et ce malgré le recours à la procédure d'urgence. Ce n'est pas tout à fait le cas aujourd'hui, vous l'avouerez !
Le sujet, vu son importance, méritait pourtant d'être traité autrement ; il aurait dû pouvoir bénéficier d'une place plus convenable dans le calendrier de nos travaux. Nous aurions évité ainsi de perturber la fête de la musique, de laisser la désagréable impression qu'il s'agit d'une affaire réservée à un cercle très restreint d'initiés, et nous aurions contribué enfin à combattre l'idée selon laquelle les problèmes des départements d'outre-mer ne concernent que les élus des DOM.
S'agissant précisément de l'octroi de mer, un autre calendrier aurait probablement permis de voir diminuer quelque peu le nombre de nos collègues qui, a priori, considèrent l'octroi de mer comme une encombrante vieillerie, un vestige de l'époque coloniale auquel seraient curieusement attachés les ultra-marins, un avantage acquis auquel ceux-ci s'accrocheraient abusivement.
En réalité, comme l'ont déjà souligné d'autres intervenants, l'octroi de mer revêt une importance vitale pour les DOM, et ce en assurant deux grandes fonctions.
Il représente, d'une part, une ressource importante et tout à fait indispensable aux budgets communaux - une ressource, soit dit en passant, entièrement financée par les consommateurs des différents DOM ; d'autre part, un outil de politique économique à la disposition des conseils régionaux.
S'agissant de l'apport de cette recette fiscale pour les budgets des communes, je me contenterai de citer quelques chiffres. Selon l'Observatoire des finances locales, en 2002, l'octroi de mer représentait entre 38 % et 56 % des recettes locales - pour la Martinique, c'est environ 56% - et entre 24 % et 35 % des recettes réelles de fonctionnement.
L'octroi de mer constitue, en fait, la première contribution au budget des communes d'outre-mer, devant la taxe d'habitation, sauf sur l'île de la Réunion.
L'octroi de mer est d'autant plus indispensable au budget des communes d'outre-mer que celles-ci doivent faire face à des surcoûts liés à des facteurs comme l'éloignement, l'insularité, le climat, alors que, par ailleurs, leurs recettes fiscales sont moindres qu'en métropole.
A titre d'exemple, en 2000, le potentiel fiscal par habitant des communes des DOM de moins de 10 000 habitants était de 1 115 francs, la moyenne en métropole à la même époque était, pour les communes de même importance, de 2 717 francs. Par ailleurs, le coût d'accès à l'emprunt bancaire reste anormalement plus élevé qu'en métropole, nous le savons.
S'agissant maintenant de l'octroi de mer comme outil de politiques économiques, son importance est telle que, dans un rapport commandé, en 1990, par le gouvernement de l'époque, l'inspecteur général des finances Jean Thill n'hésitait pas à affirmer que « la grande majorité des entreprises industrielles des DOM ne pourra, ni après une période de transition de dix ans, ni probablement même sur le très long terme, s'adapter à la disparition de la protection dont elles bénéficient », sous-entendu, grâce à l'octroi de mer.
En fait, l'octroi de mer intervient pour 7 % en Guadeloupe et pour 11 % en Guyane dans le PIB marchand, soit entre 4,5 % et 7,2 % du PIB régional total. Il génère un surcroît de valeur ajoutée allant de 24,2 % en Guyane à 31,6 % en Martinique.
Tout cela explique que la Commission européenne ait renoncé, au début des années quatre-vingt-dix, à imposer la suppression de l'octroi de mer qu'elle souhaitait pourtant depuis plusieurs années.
Ce changement de position fut toutefois assorti d'une condition, celle de la mise en oeuvre d'une réforme de cette taxe pour que celle-ci ne puisse plus être considérée comme une taxe équivalant à un droit de douane.
Cette condition fut remplie grâce au vote de la loi de juillet 1992, texte qui prit en compte l'exigence de la Commission de voir l'octroi de mer appliqué non seulement aux produits importés mais également à la production locale, celle-ci pouvant, malgré tout, bénéficier de certaines mesures d'exonérations.
Ce dispositif sembla remis en cause par un rapport de la Commission, rédigé en 1999.
Cependant, le gouvernement de l'époque entama d'intenses négociations avec les autorités de Bruxelles en prenant soin de s'appuyer sur un important dossier élaboré, il faut le souligner, de concert avec les régions. Ce dossier fut remis le 12 mars 2002 à M. Bolkestein, commissaire européen, à l'appui d'une demande de maintien de l'octroi de mer.
A cette occasion, le commissaire européen indiqua qu'il était devenu indispensable « d'adapter les régimes d'exonérations », et il réclama des autorités françaises une étude par branche de produits.
La nécessité de disposer d'un temps suffisant pour réaliser une telle étude amena votre prédécesseur, M. Christian Paul - avant que vous ne le fassiez vous-même ensuite, madame la ministre - à solliciter une prorogation d'un an du dispositif d'octroi de mer ; cela fut accepté officiellement en décembre 2002. Le commissaire européen avait d'ailleurs lui-même clairement laissé entendre, dans un courrier adressé à Christian Paul en date du 3 mai 2002, que c'était là la solution à envisager. Je le cite : « Si les éléments sollicités devaient tarder à être fournis, il serait dans ce cas nécessaire d'envisager la prorogation courte d'un an que vous avez sollicitée. »
Cette année supplémentaire obtenue a permis la préparation d'une nouvelle demande de maintien de l'octroi de mer, demande sur la base de laquelle, après d'intenses négociations, le Conseil de l'Union a pris une décision favorable en février dernier.
Ce bref rappel historique a, selon moi, le mérite de souligner deux éléments qu'il ne faut jamais perdre de vue.
Premièrement, l'Europe, tout en reconnaissant les spécificités des départements d'outre-mer - parmi lesquelles les handicaps structurels - s'inscrit toujours dans une logique d'intégration. Deuxièmement, les dérogations qu'elle accepte d'accorder à ces départements, comme les aides qu'elle leur apporte au moyen des fonds structurels, ont toujours pour objet un possible rattrapage du niveau de vie et du PIB moyens européens. Elles sont donc toujours considérées comme transitoires. Cela explique les remises en cause périodiques de l'octroi de mer.
Mais les autorités de Bruxelles savent s'incliner devant les réalités ! Toute la difficulté, en fait, est de parvenir à les leur faire bien appréhender. C'est la raison pour laquelle des négociations bien menées, qui s'appuient sur ceux qui connaissent parfaitement ces réalités pour les vivre au plus près, ont leur importance.
A l'échéance de 2002, la reconduction de l'octroi de mer n'allait pas de soi, il est vrai. Mais les autorités de Bruxelles avaient, malgré tout, conscience des risques que ferait courir aux économies déjà fragiles des DOM une suppression pure et simple de cette taxe. C'est pourquoi la notion de péril évoquée à propos de l'échéance du 31 décembre 2002 demande à être pour le moins relativisée.
C'est si vrai que la décision du Conseil de l'Union du 10 décembre 2002 accordant la prorogation, dans ses considérants nos 5 et 6, précise que, si l'élaboration d'un régime de longue durée exige la fourniture d'informations complémentaires par les autorités françaises et une évaluation émanant de la Commission, « ces développements ne devraient toutefois pas avoir pour effet de porter atteinte à la nécessaire continuité du régime fiscal spécifique applicable dans les départements d'outre-mer ».
Le considérant n° 7 va indiscutablement dans le même sens en indiquant, pour sa part, que « la permanence des handicaps reconnue par l'article 299, paragraphe 2, du traité, continue à hypothéquer lourdement le développement des DOM et à justifier le maintien des mesures qui contribuent à compenser ces handicaps ».
Dans le considérant n° 9, les exonérations d'octroi de mer sont nommément citées comme participant aux mesures de soutien à la production locale. Il se conclut sur l'affirmation suivante : « Il convient d'en assurer la continuité ». Cela m'amène tout naturellement à me demander si, dans les négociations qu'il a menées avec les autorités européennes, le gouvernement actuel n'aurait pas pu obtenir mieux que ce qu'il a obtenu.
Je ne veux en aucune façon, madame la ministre, minimiser vos mérites personnels dans cette affaire. Je sais que vous y avez consacré beaucoup d'énergie, mais je sais aussi que votre ministère n'était pas le seul à négocier. Je me demande si l'on n'a pas trop facilement accepté un excès d'encadrement et de procédures contraignantes qui aboutit notamment à amputer les régions d'une partie de leurs compétences décisionnelles. Je me demande surtout si l'on n'a pas cédé à la logique d'intégration, toujours mise en avant par Bruxelles.
En tout cas, on peut s'interroger sur l'intérêt qu'il y avait à choisir de négocier sur la base du modèle AIEM canarien, un dispositif connu pour son relatif manque de souplesse et pour son caractère précisément transitoire.
M. Claude Lise. C'est bien l'aspect transitoire du nouveau régime d'octroi de mer qu'il faut s'attacher désormais à remettre en cause. Le Gouvernement doit être convaincu qu'il doit préparer dès maintenant l'échéance de 2014. Il doit le faire en s'appuyant résolument sur les élus des DOM et en s'attachant à démontrer qu'il est totalement illusoire d'imaginer que, dans dix ans, ou même dans vingt ans, un certain nombre de handicaps comme l'insularité, le relief, le climat, l'étroitesse des marchés, se seront dissipés comme par enchantement ou auront pu être compensés, on ne sait par quelles politiques miraculeuses...
Cela suppose évidemment que le Gouvernement soit convaincu de la nécessité d'obtenir que les DOM puissent bénéficier d'un véritable système dérogatoire au droit commun européen, un système allant dans le sens d'une prise en compte durable des spécificités irréductibles et des handicaps structurels des départements d'outre-mer. Mais le Gouvernement a-t-il une telle conviction ? J'aimerais que vous m'éclairiez sur ce point, madame la ministre.
J'aimerais également que vous m'expliquiez pourquoi le projet de loi qui nous est présenté comporte des contraintes surajoutées à celles qui sont imposées par l'Union européenne. C'est le cas, par exemple, de l'élargissement de l'assiette de taxation à des prestations de services. C'est le cas de la limitation à une fois par an au maximum de la possibilité pour les conseils régionaux de demander une actualisation des listes de produits. C'est le cas encore de l'obligation pour les conseils régionaux de justifier, selon un principe de proportionnalité, les taux d'octroi de mer qu'ils fixent en fonction des handicaps que supportent les productions locales.
Tout cela ne fait que me conforter dans l'idée que l'on n'a pas dû être particulièrement convaincant, dans les négociations, en matière de demandes d'assouplissement des contraintes voulues par Bruxelles. Comment, en effet, peut-on plaider en faveur d'assouplissements quand on est soi-même enclin à instituer des contraintes ?
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, malgré mes critiques et mes réserves, je vais voter ce projet de loi dont les dispositions essentielles dépendent d'un accord sur lequel il n'est plus possible de revenir, la date butoir du 1er août 2004 étant toute proche. Je le ferai donc sans enthousiasme, car je suis persuadé que l'on aurait pu obtenir mieux de l'Union européenne. J'espère seulement, madame la ministre, que vous aurez à coeur, en acceptant quelques amendements qui visent à supprimer des contraintes inutiles mais nocives, de montrer que ce débat n'est décidément pas de pure forme.
Avant de terminer, et puisqu'il est question de demander au Gouvernement de faire preuve d'un volontarisme politique beaucoup plus affirmé pour défendre l'octroi de mer, je veux appeler au même volontarisme s'agissant d'un secteur absolument déterminant pour les économies de la Guadeloupe et de la Martinique, celui de la filière de la banane, qui traverse à l'heure actuelle, vous le savez, une crise sans précédent. Il faut absolument que l'Europe accepte de reconsidérer le système d'aide compensatoire actuellement en place et qu'elle consente également à la mise en oeuvre d'une réforme de l'OCM qui ne mette pas en péril ce secteur de production.
Lors de sa récente visite aux Antilles, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, a pris sur cette question l'engagement de conduire à Bruxelles une délégation comprenant les exécutifs locaux de Guadeloupe et de Martinique. L'initiative a évidemment reçu un accueil très favorable des élus et des professionnels de la filière. Il importe toutefois de faire de cette initiative une action marquante qui, surtout ne demeure isolée.
Au moment où l'Europe s'engage dans le processus d'adoption d'une Constitution, la voix des départements d'outre-mer doit se faire entendre à Bruxelles plus fortement que d'habitude et absolument sans complexe. L'enjeu, pour ces départements, est d'aboutir à la reconnaissance, dans cette Constitution, d'un véritable droit à dérogation, de telle sorte que celui-ci ne puisse être constamment remis en cause, alors même que l'Europe affiche régulièrement la volonté de prendre en compte leurs spécificités.
J'ajoute qu'il s'agirait non pas seulement, en l'occurrence, de tenir compte des handicaps structurels des DOM, mais de répondre à un droit légitime de territoires qui représentent aussi un atout pour l'Europe, notamment au regard de leur positionnement stratégique dans les différentes régions du monde. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je me réjouis de voir s'engager au Sénat la discussion du projet de loi relatif à l'octroi de mer. En effet, il a fallu toute la détermination de Mme la ministre de l'outre-mer, dont je salue le travail, pour permettre la reconduction de ce dispositif.
Je me permets de rappeler brièvement les différentes étapes qui nous ont conduits jusqu'ici.
A l'origine, l'octroi de mer est un droit de douane hérité de l'Ancien Régime dont les traces les plus anciennes remontent au XVIIe siècle. Réorganisé par le sénatus-consulte du 4 juillet 1886, l'octroi de mer a survécu à la départementalisation des anciennes colonies en 1946. Mais, dans le cadre de la construction européenne, on a pu craindre que ce système d'imposition, assimilable à un droit de douane, ne porte atteinte au principe de libre circulation des marchandises introduit par le traité de Rome.
C'est pourquoi il a été aménagé par la décision du Conseil des Communautés européennes du 22 décembre 1989, qui dispose que l'octroi de mer, qui porte désormais mal son nom, doit être appliqué indistinctement aux importations et à la production locale, tout en autorisant les autorités régionales à exonérer les activités économiques locales pour une période ne dépassant pas dix ans et sous certaines conditions. Ainsi, le Conseil tenait compte de l'achèvement du marché, tout en reconnaissant la réalité régionale.
Par conséquent, l'octroi de mer a changé de nature : il s'agit non plus d'un simple droit de douane, mais d'une taxe fiscale interne qui, à l'instar de la TVA, concerne l'ensemble des produits commercialisés dans les DOM.
La loi du 17 juillet 1992 n'a fait que traduire en droit français la décision européenne de 1989 et institue pour dix ans un régime dérogatoire au droit communautaire de compensation des handicaps structurels permanents, qui trouve son fondement dans le concept de « région ultrapériphérique » dégagé par la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes dès 1979 et consacré par le traité d'Amsterdam en 1997.
Le dispositif de 1992 confirme aux communes le produit de l'octroi de mer qui alimente leur budget et permet par ailleurs au conseil régional d'exonérer totalement ou partiellement d'octroi de mer interne certains produits en cas de nécessité économique, afin de soutenir la production locale.
L'octroi de mer a deux fonctions essentielles : d'une part, il contribue au développement économique et social des DOM par le biais du FRDE, fonds spécial exclusivement consacré à des projets d'équipements communaux dont la gestion incombe à la région ; d'autre part, il alimente de façon substantielle le budget de fonctionnement des communes. Mme la ministre rappelait devant l'Assemblée nationale que l'octroi de mer représente en moyenne 25 % à 30 % des recettes de fonctionnement selon les DOM. A cela, il faut ajouter le droit additionnel à l'octroi de mer, variant de 1 % à 2,5 %, institué en 1984 au profit des régions, et dont le produit s'élève pour l'année 2003 à 140 millions d'euros.
A la Réunion, l'octroi de mer représente, selon le rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Didier Quentin, 37 % à 68 % des recettes des communes. Il s'agit d'un outil fiscal indispensable au développement économique et social de la Réunion. A partir du budget des communes, le produit de l'octroi de mer est directement injecté dans l'économie locale sous deux formes : la commande publique et les dépenses de personnel, qui représentent plus de la moitié des dépenses des communes. Il constitue une réponse aux handicaps structurels de l'économie réunionnaise, qui connaît un fort taux de chômage avoisinant 31 % et dont le niveau moyen du PIB par habitant n'excède pas 45 % de la moyenne communautaire.
Enfin, grâce au régime des exonérations prévues par la loi de 1992, l'octroi de mer permet à la région, en taxant plus lourdement les produits importés, de soutenir le tissu productif local en exonérant les entreprises locales dont le chiffre d'affaires n'excède pas 550 000 euros.
C'est pourquoi il était nécessaire qu'un tel dispositif puisse être reconduit pour dix ans, ce dont nous nous félicitions. Cela n'a pas été facile. En effet, la Commission européenne a d'abord rejeté la demande de prorogation du régime formulée par la France en mars 2002 au motif que celle-ci n'était pas assez étayée. Il a fallu une seconde demande, plus argumentée, pour que le Conseil des ministres reconduise, par sa décision du 10 février 2004, le dispositif en vigueur et le régime des exonérations. Néanmoins, Bruxelles a exigé certaines réformes et le projet de loi actuellement en discussion se doit de les traduire en droit français avant le 1er août.
La principale modification concerne l'instauration a priori d'un encadrement communautaire limitant à dix, vingt ou trente points les différentiels de taxation entre la production locale et les biens importés pour une liste de produits préalablement établie selon la nomenclature des douanes, en lieu et place d'une fixation libre des taux, dans la limite de huit taux différents déterminés par les régions.
Si le principe d'une corrélation entre la taxation interne et externe par le biais du différentiel ne suscite pas d'opposition, je crains toutefois qu'en cas de mise en péril d'une production locale par l'apparition d'un nouveau concurrent sur le marché, la région ne soit pas en mesure de réagir assez rapidement par une hausse de taxation sur les importations, à cause de cette nomenclature figée des produits dont l'actualisation requiert une procédure lourde et complexe : dépôt d'une demande écrite au préfet, qui la transmet au Gouvernement puis à la Commission afin que le Conseil des ministres puisse statuer, tout ceci sans que les délais de transmission à chaque échelon ne soient contraints. Durant tout ce délai, si la région ne dispose pas de moyens d'urgence pour se prémunir contre les attaques du marché local, c'est l'avenir du produit en question qui est en jeu !
Or, dans le jeu subtil de l'équilibre entre production locale et importation, la dissuasion reste souvent l'arme la plus efficace. Je sais que l'article 29 bis, issu d'un amendement du Gouvernement adopté par les députés le 4 juin dernier, institue une clause d'urgence par laquelle le conseil régional peut adresser, en cas de mise en péril d'une production locale, une demande d'actualisation des listes de produits, indépendamment de la périodicité exigée à l'alinéa 1er.
Cependant, le mécanisme reste lourd et la procédure s'avère longue ou du moins inappropriée du fait que les DOM constituent des marchés d'exportation faciles d'accès, lieux privilégiés de dégagement de stocks et de fins de séries pour les industriels européens.
Ne serait-il pas opportun de laisser une totale marge de manoeuvre aux régions dans de pareilles circonstances exceptionnelles, avant que ne soit actualisée par le Conseil la liste répartissant les produits en trois types de différentiels de taxation ? Sans compter que le risque est grand de voir dans un avenir proche des productions sensibles de nos économies insulaires directement fragilisées par des décisions communautaires, dans le cadre de la reprise des négociations avec les pays les moins avancés au titre du cycle de Doha.
De même, je déplore la suppression du taux de réfaction qui permettait de ramener la base d'imposition de l'octroi de mer interne à 85 % du chiffre d'affaires de la production locale pour tenir compte du niveau différent de commercialisation entre le produit local et le produit importé équivalent. Je sais que cette disposition, acceptée en 1989, a été refusée par la Commission européenne, mais cet abandon rompt l'équité économique et introduit une distorsion de concurrence au détriment de la production locale, dans la mesure où l'accroissement de l'assiette de l'octroi de mer pour les produits locaux - en particulier, à la Réunion, pour le tabac, le ciment et la tôle - aura un effet mécanique sur les prix à la consommation.
En outre, si l'on peut se réjouir de la simplification administrative qui fait du service des douanes l'interlocuteur unique des entreprises assujetties à l'octroi de mer, lesquelles n'auront plus à s'adresser à la direction des impôts dans certains cas et à celle des douanes dans d'autres, on peut se demander si certaines formalités administratives introduites par le projet de loi n'alourdissent pas la tâche des entreprises.
Ainsi en est-il des obligations déclaratives, qui sont contraignantes : identification préalable auprès des douanes pour toutes les entreprises du secteur productif ou tenue d'une comptabilité distinguant, au sein d'une même entreprise, les opérations taxables de celles qui ne le sont pas
Il convient en ce domaine d'alléger au maximum les charges qui pèsent sur les entreprises si l'on veut qu'elles puissent être productives !
Enfin, je voudrais évoquer avec vous le problème de la sous-consommation actuelle du FRDE. Ce fonds, institué en 1992, est destiné à allouer aux communes des subventions d'investissement afin de faciliter l'installation d'entreprises et de développer l'emploi.
Or ces crédits ne sont pas totalement utilisés - loin s'en faut ! - du fait, peut-être, que l'on exige des communes, afin qu'elles deviennent éligibles au titre du FRDE, une avance financière préalable, pouvant parfois aller jusqu'à 25 % du coût de l'investissement programmé.
L'Assemblée nationale a décidé d'amender le texte originel, en affectant directement 80 % des ressources du FRDE aux communes au prorata de la population, les 20 % restants devant alimenter, comme aujourd'hui, le budget régional en vue du financement d'investissements contribuant au développement économique.
Sans revenir sur la décision des députés à ce sujet, je souhaiterais, pour ma part, que les possibilités d'affectation de la part régionale du FRDE soient élargies aux entreprises qui subissent les surcoûts de production substantiels liés à l'acheminement des intrants.
J'ai d'ailleurs déposé un amendement afin de permettre aux régions de disposer d'un outil de financement leur permettant de doper la compétitivité du tissu productif et de le soutenir dans sa réponse aux besoins du marché intérieur en croissance.
J'ai enfin noté avec intérêt l'ouverture de l'utilisation du FRDE aux projets de syndicats mixtes, des EPCI ou de la région, ce qui devrait aboutir à une normalisation de la consommation des crédits de ce fonds.
Pour terminer, je poserai les questions qu'ont posées tous ceux qui se soucient de l'avenir des DOM : notre régime dérogatoire sera-t-il supprimé par Bruxelles en 2014 ? Faut-il déjà penser à un régime de substitution, comme le laissait entendre Anne-Marie Comparini, à l'Assemblée nationale, ou faut-il faire confiance au législateur européen pour que la notion de « région ultrapériphérique » soit reprise par la future Constitution européenne et que, par ce biais, notre exception géographique et économique soit pérennisée sur le plan fiscal ?
Ces questions étant posées, je tiens, madame la ministre, à vous remercier de votre contribution à la prorogation du dispositif d'octroi de mer, que je voterai avec mes collègues de l'Union centriste. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé.
M. Jean-Paul Virapoullé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous nous trouvons à un moment important de l'histoire économique de l'outre-mer.
Chacun se souvient ici de l'inquiétude qui avait saisi le monde économique lorsque, en 2002, votre prédécesseur, madame le ministre, n'avait pas obtenu satisfaction auprès de la Commission européenne. Tous ceux qui travaillent en outre-mer, entrepreneurs ou salariés, ont pensé alors que l'Europe, ayant refusé de faire droit à la demande de la France, allait supprimer l'octroi de mer.
Mais, dès votre arrivée au Gouvernement, vous vous êtes rendue à Bruxelles, madame la ministre. Je tiens à cette occasion, madame le ministre, à saluer votre détermination dans la conduite de ce dossier, qui nous a permis d'aboutir à l'heureux résultat que l'on sait.
Vous avez en effet obtenu de M. Bolkestein, commissaire européen, qu'il accorde à la France un délai supplémentaire d'un an pour que le Gouvernement, en relation étroite avec les acteurs économiques, puisse rédiger un nouveau rapport.
Nous sommes donc réunis aujourd'hui, car la Commission et le Parlement européen, dans le cadre de la procédure de codécision, ont bien voulu faire droit à la demande conjointe des régions que vous avez présentée, au nom du gouvernement français, à Bruxelles.
L'octroi de mer est important, en ce qu'il constitue un acte de solidarité de la métropole vers l'outre-mer. Cette taxe, qui s'ajoute souvent à la TVA, par exemple sur les importations de voitures ou de biens de consommation courante, est rendue possible puisque le taux de TVA outre-mer est de 9 %, et non de 19,6 %, comme en métropole. S'il était de 19,6 %, cela réduirait d'autant la possibilité même d'un octroi de mer.
L'octroi de mer est un acte de responsabilité, puisqu'il incombe aux élus locaux d'en décider les taux. C'est aussi un acte essentiel d'incitation au développement économique.
Ainsi donc l'Europe reconnaît de façon claire et explicite que l'outre-mer souffre de handicaps non pas ponctuels et conjoncturels, mais permanents et structurels.
Exception faite de la Guyane, l'outre-mer est avant tout un ensemble d'îles ; ses collectivités, cette fois y compris la Guyane, sont séparées de la métropole, éloignée de plusieurs milliers de kilomètres. Dans un environnement sinon toujours hostile, tout au moins souvent difficile, ces territoires supportent des aléas climatiques que l'Europe ne connaît pas. De plus, leur marché est étroit et tributaire du fret, véritable goulet d'étranglement pour l'économie ultra-marine, à l'importation comme à l'exportation.
A partir du moment où ces handicaps structurels sont reconnus au plus haut niveau par les instances européennes, nos conditions de production, donc de productivité, le sont également. C'est la raison pour laquelle je n'ai pas la même inquiétude que d'autres ici sur l'avenir de l'outre-mer.
Pour moi, dès lors que l'Europe veut créer un observatoire sur les handicaps et sur les moyens d'y faire face, l'octroi de mer est le premier impôt moderne encourageant le développement économique de l'outre-mer. C'est un impératif si l'on veut que la société ultra-marine repose sur le travail et sur la dignité de ses citoyens.
Nous sommes donc, madame la ministre, en présence d'un système qui n'est pas très compliqué. Nous avions demandé non pas un système s'inspirant du modèle canarien - nous l'avons combattu -, mais un système souple. Nous l'avons obtenu, puisque le dispositif comporte trois taux de 10, de 20 ou de 30 points, et que cet écart peut exister sur des listes de produits arrêtées en concertation avec les socioprofessionnels.
A votre demande, madame la ministre, j'ai été désigné parlementaire en mission sur ce dossier et, je puis en témoigner, les socioprofessionnels qui se sont associés à nos travaux - je les en remercie - nous ont remis les listes de produits, en nous signifiant lesquels devaient figurer respectivement dans la gamme des écarts de 10, de 20 ou de 30 points.
Ils nous ont demandé également que les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 550 000 euros puissent bénéficier d'une majoration d'écart de 5 %, ce qui a été obtenu. En revanche, s'agissant de la clause de souplesse qu'ils réclamaient aussi, ils n'ont pas eu gain de cause auprès de la Commission européenne, mais vous l'avez obtenue, madame la ministre, de l'Assemblée nationale.
En clair, madame la ministre, nous avons eu satisfaction sur tout, sauf sur un point : nous voulions avec vous un régime d'exonération valable pour quinze ans ; il ne l'est que pour dix ans. Mais nous n'allons pas faire la grimace pour cela ! Nous avons en effet dix ans devant nous pour consolider l'outil de production et pour continuer à plaider avec conviction, auprès de la Commission et du Parlement européen, les atouts de l'outre-mer français dont il faut convaincre nos interlocuteurs que les territoires sont capables d'un vrai développement économique. Nous avons dix ans pour convaincre Bruxelles de l'existence de savoir-faire dans les domaines de l'agroalimentaire - qu'il s'agisse de l'économie sucrière ou bananière -, du tourisme, des énergies renouvelables, ou encore de la protection de l'environnement.
Encore faut-il que l'Europe fasse confiance à l'outre-mer en investissant davantage dans la production et moins dans le soutien à des secteurs en régression. Protéger la production, c'est garantir la dignité de nos populations.
Je suis d'autant plus confiant que le volet de l'octroi de mer n'est que la première manche du combat que nous avons à mener à l'échelon européen, tous mes collègues en conviendront avec moi.
La deuxième manche se tiendra dans quelques semaines, lorsque la Commission rendra sa réponse sur le rapport que vous lui avez soumis, madame la ministre. Cette réponse, très attendue outre-mer, conditionnera le cadre dans lequel l'économie ultra-marine se développera. Nous attendons de Bruxelles non seulement la reconnaissance de nos handicaps, mais également les moyens d'y faire face, l'octroi de mer n'étant qu'un outil à cet égard.
S'agissant des perspectives de l'outre-mer, madame la ministre, dans le rapport que je vous ai remis et que vous avez largement défendu à Bruxelles, je demandais aux instances communautaires de considérer comme une nécessité que l'outre-mer s'ouvre à son environnement géographique. Loin d'être facile à relever, ce pari est très ardu. C'est que les économies qui entourent l'outre-mer sont elles-mêmes fragiles.
La Réunion, en accord avec les représentants du monde économique, a essayé d'instaurer une zone de complémentarité économique sectorielle, c'est-à-dire qui ne concerne qu'une certaine catégorie de produits, avec l'île Maurice. Les négociations entre les milieux économiques réunionnais et mauriciens ont évolué, et dans le bon sens. Un partenariat est en train de se nouer.
Madame la ministre, jugement portez-vous sur cette création d'une zone de complémentarité sectorielle ?
Cette expérience me paraît d'autant plus nécessaire que, aux termes des accords de Cotonou, des partenariats économiques peuvent être conclus avec les pays qui nous entourent. Encore faut-il qu'une expérience sectorielle soit tentée, afin de mesurer les points positifs et négatifs de ce type d'accord. Ce « galop d'essai » permettrait précisément de mettre en lumière la viabilité d'un tel partenariat, et chacun pourrait mieux y retrouver ses petits.
Vous avez mené à bien les négociations sur ce difficile sujet avec courage et conviction. Je n'étais pas favorable à un moratoire de trois ans : la règle du jeu et le calendrier étant fixés par Bruxelles, nous devions les respecter ; la Commission nous avait accordé jusqu'en 2002 et vous avez obtenu une année de sursis. Le couperet tombant le 1er août, ...
M. Roland du Luart, rapporteur. Tout à fait !
M. Jean-Paul Virapoullé. ... il nous fallait bien traiter le dossier, mes chers collègues, d'autant qu'il était de toute manière plus facile de négocier à Quinze qu'à Vingt-cinq ! Je salue, à cet égard, la perspicacité du Gouvernement, notamment la vôtre, madame la ministre. Allez expliquer à un Slovène le régime de l'octroi de mer en vigueur à la Réunion ! Il faudrait d'abord expliquer où se trouve la Réunion, ce qui n'est pas une tâche aisée, je le sais pour m'y être déjà essayé devant des Canadiens et des Américains ! Et je ne vous parle pas des Caraïbes ! (Sourires.)
Enfin, ma satisfaction est totale, puisque l'Assemblée nationale a, dans un climat de consensus que je salue, exaucé l'un de mes voeux en comblant une lacune du texte, je veux parler de la réforme, qui me paraît juste, du FRDE.
Je rejoins ici les excellentes conclusions de M. le rapporteur général, mon ami Roland du Luart.
M. Roland du Luart, rapporteur. Rapporteur général ? Pas encore !
M. Jean-Paul Virapoullé. Lapsus prémonitoire, mon cher collègue ! (Sourires.)
Il est vrai que des fonds régionaux sont inutilisés ; que les communes doivent parcourir un véritable un chemin de croix pour en bénéficier ; et que l'argent des FRDE n'est pas destiné à alimenter la trésorerie des régions.
M. Roland du Luart, rapporteur. Tout à fait !
M. Jean-Paul Virapoullé. Rendons à César ce qui est à César : l'octroi de mer était initialement réservé aux communes, laissons-le aux communes ! Nous l'utiliserons en complément des fonds européens pour conduire des actions prioritairement économiques, mais non exclusivement.
J'évoquerai à ce sujet le cas d'une commune de la Réunion que je connais bien : Saint-André. (Sourires.) Dans les cinq ans qui viennent, nous allons devoir y ouvrir une trentaine de classes dans le primaire. Vous imaginez l'effort que cela représente pour une commune de 50 000 habitants ! Et, pour une petite commune, c'est évidemment encore plus difficile.
Dans ces conditions, la réforme du FRDE nous sera extrêmement utile, puisqu'elle va nous permettre de réaliser des investissements à l'échelon local et de stimuler ainsi le développement, par un effet de levier dont bénéficieront au premier chef nos entreprises de bâtiment et de travaux publics. Les communes pourraient d'ailleurs aider aussi les artisans et les petites entreprises à s'installer sur leur territoire. Nous disposerions alors d'un véritable outil de développement. Mais j'y reviendrai dans la discussion des articles.
Comme mes collègues du groupe UMP, je voterai ce texte, qui répond à une grande attente de tous ceux qui oeuvrent au développement économique de l'outre-mer, et je tiens, madame la ministre, à vous remercier de tout ce que vous avez fait à cet égard. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Dominique Larifla.
M. Dominique Larifla. Madame la ministre, vous avez saisi l'occasion de la transcription dans le droit national de la décision du Conseil des ministres de l'Union européenne relative à l'octroi de mer pour proposer des aménagements appréciables au dispositif.
Vous vous êtes engagée dans la voie d'une simplification des procédures administratives et budgétaires qui devrait améliorer l'utilisation du produit de l'octroi de mer, tout en rendant ce dispositif plus lisible.
Dans ses principes, l'octroi de mer devait constituer une mesure de protection propre à décourager les importations et donc à favoriser l'essor de la production locale.
Les dispositions introduites dans ce texte en faveur des petites entreprises s'inscrivent dans la ligne de cet esprit originel. Le tissu productif des DOM étant majoritairement composé de petites entreprises, cette démarche relève d'un heureux pragmatisme.
La mesure de rattrapage des sommes dues aux communes au titre du FRDE, adoptée par l'Assemblée nationale, apportera, quant à elle, une « bouffée d'oxygène », bienvenue en ces temps de tension sur les finances locales.
Alors que l'octroi de mer était au départ conçu comme un facteur de limitation des importations, il s'est mué, au fil des années, en une ressource incontournable pour les collectivités locales, représentant parfois plus de la moitié de leurs recettes. Les communes d'outre-mer sont ainsi devenues « prisonnières » de cette ressource, qu'elles espèrent aussi importante que possible. Ces collectivités « comptent » donc désormais sur le produit d'une recette qui reste fragile par nature dès lors qu'elle dépend de l'aboutissement d'une négociation.
Or cette situation est en elle-même symptomatique de l'absence de dynamisme de la production locale et d'une économie fondée sur l'importation des produits de consommation.
En fait, l'évolution des recettes tirées de l'octroi de mer aurait dû être inversement proportionnelle au développement de la production locale. C'est ce qui nous fait souhaiter que cette autorisation accordée par l'Union européenne soit la dernière. En effet, si, à l'issue de la prolongation concédée cette année, c'est-à-dire dans dix ans, nos successeurs sont amenés à examiner un texte entérinant une nouvelle autorisation, cela signifiera bien que la politique de développement des économies de l'outre-mer aura échoué.
Permettez que je m'arrête quelques instants sur la question de fond que soulève l'octroi de mer.
Je n'ai pas besoin d'insister sur les obstacles à l'expansion économique qu'engendre l'insularité. Les contraintes structurelles que celle-ci suppose justifient des mesures de compensation des handicaps. Cependant, des dispositions dérogatoires successives ne permettront jamais d'inscrire durablement le tissu économique des DOM dans une dynamique de développement. En effet, de dérogation en dérogation, toute stratégie de croissance risque de se voir périodiquement remise en cause, eu égard aux incertitudes que fait nécessairement peser la non-conformité à la législation européenne.
Le véritable défi que nous devons en fait relever consiste à éradiquer le mal économique qui ronge l'outre-mer. Ne l'oublions pas, l'autorisation négociée à Bruxelles n'est qu'un moratoire.
La mise en place d'une authentique continuité territoriale entre la France d'outre-mer et ses partenaires européens constitue l'une des réponses de fond à défaut desquelles la politique menée en outre-mer n'aura jamais d'efficacité.
En réalité, les DOM ne peuvent commercer sur un pied d'égalité avec les pays membres de l'Union européenne. Ils ne peuvent pas plus s'intégrer véritablement dans leur environnement régional immédiat du fait des distorsions, notamment législatives, que l'on sait.
Dans ces conditions, ces économies semblent définitivement condamnées à supporter le surcoût tenant à l'acheminement des produits importés et les entreprises locales, à gérer les stocks à flux tendus, ce qui implique une gestion de trésorerie dispendieuse et donc pénalisante.
La loi de programme a ouvert le chantier de la continuité territoriale. Il faut aller plus loin et achever l'édifice.
Madame la ministre, en votant ce texte qui constitue à mes yeux une étape, je vous adresse un encouragement à aller plus loin. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Brigitte Girardin, ministre. Avant de répondre aux interrogations qui ont été formulées au cours de ce débat, je tiens à remercier M. du Luart du travail de coordination qui a été accompli avec la commission des lois de l'Assemblée nationale.
Loin de nous l'idée de considérer le Sénat comme une chambre d'enregistrement, comme j'ai pu l'entendre ici. Cela étant, chacun doit en être bien conscient, ce texte est par nature difficilement « amendable » puisqu'il s'agit, pour l'essentiel, de transposer dans notre droit national une décision du Conseil qui ne peut pas elle-même être amendée, sauf à recommencer une procédure de notification. Or, comme vous le savez, ce dossier est particulièrement urgent pour les communes et pour les entreprises de l'outre-mer, pour l'économie de l'outre-mer en général.
Il est vrai que, à l'Assemblée nationale, nous avons accepté des amendements. Ceux-ci portaient sur la consommation des crédits du FRDE. En effet, à l'exception de la région Guadeloupe, comme Mme Lucette Michaux-Chevry l'a rappelé, les autres régions de l'outre-mer sont confrontées à ce problème.
Je souhaite maintenant rassurer Mme Lucette Michaux-Chevry et M. Jean-Paul Virapoullé, qui ont fait part de leurs préoccupations concernant l'environnement des régions d'outre-mer, singulièrement les pays ACP. Mme Michaux-Chevry a notamment évoqué les negative lists. Il y a là un souci que, bien entendu, nous partageons.
Je rappellerai d'abord que les accords de Cotonou, qui concernent les pays ACP, prévoient bien une clause de sauvegarde permettant de se prémunir contre le risque évoqué.
Par ailleurs, dans sa communication sur le partenariat renforcé pour les régions ultrapériphériques, ou RUP, la Commission a prévu pour les DOM français ce qu'elle appelle leurs « intérêts défensifs et offensifs ». Il s'agit d'une disposition qui vise à identifier précisément leurs intérêts spécifiques dans le cadre des échanges commerciaux régionaux, en tenant compte de la complémentarité économique entre les RUP et les ACP. La Commission demande donc aux régions et aux Etats membres de lui communiquer les secteurs et les types d'échanges qu'ils jugent importants pour les négociations des accords de partenariat économique.
Dans cette perspective, j'ai demandé à mes services de constituer, au niveau local, des séminaires de réflexion avec les élus et les socioprofessionnels, de manière que nous puissions nous préparer à ces différentes éventualités.
Monsieur Vergès, je veux vous rassurer en ce qui concerne la suppression de la réfaction de 15 %.
Les écarts de taux qui sont acceptés ont intégré un supplément d'écart par rapport à la situation actuelle, ce qui revient à disposer en fait d'une réfaction de 15 %. Ainsi, lorsque les écarts sont aujourd'hui de 6 % ou 7 %, ils seront demain autorisés jusqu'à 10 %. Je pense avoir ainsi levé vos craintes à ce sujet.
Plusieurs d'entre vous - M. Désiré, M. Virapoullé, Mme Payet et M. Lise - ont fait part de leur inquiétude quant à ce qui allait se passer en 2014.
En vérité, il me semble tout à fait utile de se préoccuper dès aujourd'hui de ce qui va se passer en 2014. Sans chercher le moins du monde à polémiquer avec vous, monsieur Lise, j'ai envie de vous dire que, si le gouvernement socialiste s'était préoccupé dès 1997 de l'échéance de la fin de 2002, je n'aurais pas eu à gérer ce dossier que j'ai trouvé à mon arrivée au ministère, en mai 2002, après un refus opposé par la Commission à ce même gouvernement socialiste en mars 2002.
Il faut savoir que le gouvernement socialiste a attendu le mois de mars 2002 pour se préoccuper d'une échéance fixée à fin 2002 ! S'il avait traité ce dossier en temps et en heure, je n'aurais pas eu à le faire moi-même, et j'en aurais été très heureuse.
On est donc parfaitement fondé à se demander dès maintenant ce qui va se passer en 2014.
Le régime de l'octroi de mer est fondé sur la possibilité de dérogation au droit communautaire que nous a accordée l'article 299, paragraphe 2, du traité d'Amsterdam. Or ce qui s'est passé vendredi dernier est, à cet égard, tout à fait positif : je vous confirme que le traité constitutionnel qui vient d'être adopté comprend un article III-330 reprenant les dispositions de l'actuel article 299, paragraphe 2.
Si l'on veut préserver l'avenir, il ne faut pas se contenter d'attendre l'arrivée des échéances : il faut d'ores et déjà expliquer sans relâche la justesse des régimes dont on bénéficie. La Commission demande d'ailleurs instamment de justifier en permanence la pertinence des écarts de taux demandés.
Nous ne pouvons pas demander sans cesse des dispositifs spécifiques et nous dispenser de les justifier. C'est en expliquant le bien-fondé de ce qui nous est accordé et en montrant combien cela a des effets positifs sur l'économie locale que l'on prépare l'avenir.
M. Lise m'a adressé des critiques sur des points précis.
Je dois d'abord lui préciser que le travail qui a été fait sur l'octroi de mer n'a absolument pas été mené au sein d'un cercle restreint d'initiés. Nous avons travaillé, dans une concertation parfaitement transparente, avec tous les acteurs intéressés, c'est-à-dire les exécutifs régionaux, leurs experts techniques et les représentants de tous les milieux socio-économiques, notamment les entreprises directement concernées par l'octroi de mer. De la même manière, toutes les directions de la Commission ont été impliquées. C'est donc un travail véritablement collectif qui a été conduit pendant deux ans.
Par ailleurs, nous n'avons pas du tout recopié le « modèle » de l'AIEM. Du reste, un tel modèle n'existe pas, et nous nous sommes d'emblée démarqués de l'accord dont ont bénéficié les îles Canaries. Ainsi, par exemple, l'exonération des petites entreprises n'est pas prévue par l'accord relatif aux Canaries. En fait, notre seul modèle, c'est le traité, dont la Commission est le gardien.
Le projet de loi qui vous est présenté, contrairement à ce que vous semblez craindre, monsieur Lise, n'ajoute pas au dispositif de contraintes particulières. Je le répète, le rapport annuel sur a mise en oeuvre des exonérations prévu à l'article 30 résulte d'une demande de la Commission. C'est une bonne façon de préserver l'avenir, et une occasion pour les exécutifs régionaux d'expliquer en permanence que ce régime est positif pour les économies locales. Ces justifications permettront de faciliter la tâche de ceux qui auront à défendre ce système en 2014.
Monsieur Lise, vous m'avez également reproché de ne pas avoir obtenu mieux de l'Union européenne. Or nous avons répondu à la demande des régions et des socio-professionnels. Cependant, je le reconnais avec M. Virapoullé, nous avons échoué sur un point : nous n'avons pas obtenu un délai de quinze ans pour nous mettre en conformité avec la loi de programme, la Commission n'ayant accepté qu'une prolongation de dix ans.
Mais, pour vous faire une confidence, lorsque je suis arrivée au ministère, l'un des rares dossiers que j'ai pu évoquer avec mon prédécesseur lors de la passation de pouvoirs était explosif. En mai 2002, en effet, on était à quelques mois de l'échéance prévue, et la fin de l'année s'annonçait catastrophique, car la Commission avait clairement rejeté la demande de mon prédécesseur.
C'est donc dans l'urgence, et je le regrette, que nous sommes allés réclamer l'obtention d'un sursis d'un an en vue de pouvoir renouveler notre demande, mais de manière plus étayée. Il faut préciser que le gouvernement précédent n'avait apporté aucune justification et s'était contenté de réclamer la reconduction à l'identique du régime de l'octroi de mer, ce qui était inacceptable pour la Commission.
Nous n'avons pas eu trop d'un an, avec les entreprises et les élus, pour bâtir un dossier de demande circonstancié. Et c'est ensemble, avec les quatre présidents de région, que nous sommes allés plaider auprès du commissaire Bolkestein.
On ne peut donc pas dire que ce dossier a été traité à la légère : il a nécessité un véritable investissement, non seulement de la part de mon ministère, mais également de tous les élus et de tous les milieux économiques concernés. Nous avons travaillé en concertation, dans un esprit de partenariat qui a fini par payer. Car, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons ainsi réussi à convaincre les autorités de la Commission d'accepter, pour l'essentiel, notre demande.
Nous n'avons pas mené une « négociation » ; nous avons engagé une discussion très précise sur chaque point. J'en veux pour preuve le fait que toutes les productions qui ont été signalées à mes services comme méritant un soutien ont pu être défendues. Nous avons même pu ajouter in extremis, grâce à l'argumentation qui m'a été apportée par tous, élus comme socio-professionnels, les produits dérivés du rhum, dont l'importance est bien connue des producteurs.
Mme Payet et M. Virapoullé se sont interrogés sur la clause de souplesse. La Commission en a accepté le principe ; celui-ci est rappelé et précisé à l'article 29 bis, qui a été introduit par le Gouvernement lors de l'examen du texte par l'Assemblée nationale. Cet article a le mérite d'organiser de la façon la plus efficace possible la mise en oeuvre de cette clause. Sur ce point, la Commission s'est engagée, même si elle n'a pas voulu se montrer trop précise, à examiner nos demandes avec célérité. Dès lors, plus les arguments seront percutants, plus les dossiers seront convaincants, plus les choses iront vite.
Il n'y a aucune raison que nous changions de méthode : celle que nous avons utilisée depuis deux ans pour traiter ce dossier a montré son efficacité. Nous devons donc poursuivre le travail en commun, la concertation permanente, afin de faire vivre l'octroi de mer de la façon la plus efficace possible pendant les dix ans à venir, surtout dans l'intérêt de nos collectivités et de nos entreprises d'outre-mer.
Tels sont les quelques points généraux sur lesquels je tenais à vous répondre avant de compléter mon propos à l'occasion de la discussion des articles. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ? ...
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
TITRE Ier
ASSIETTE, TAUX ET MODALITÉS DE RECOUVREMENT DE L'OCTROI DE MER
CHAPITRE Ier
Champ d'application de l'octroi de mer
Article 1er
Dans les régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de La Réunion, les opérations suivantes sont soumises à une taxe dénommée octroi de mer :
1° L'importation de marchandises ;
2° Les livraisons de biens faites à titre onéreux par des personnes qui y exercent des activités de production.
La livraison d'un bien s'entend du transfert du pouvoir de disposer d'un bien meuble corporel comme un propriétaire.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
Toute personne qui exerce de manière indépendante une activité de production dans les régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique ou de La Réunion est assujettie à l'octroi de mer, quels que soient son statut juridique et sa situation au regard des autres impôts.
Sont considérées comme des activités de production les opérations de fabrication, de transformation ou de rénovation de biens meubles corporels, ainsi que les opérations agricoles et extractives. - (Adopté.)
Article 3
I. - Pour l'application de la présente loi, est considérée comme importation de marchandises, l'entrée :
1° Dans les régions de Guadeloupe ou de Martinique, de marchandises originaires ou en provenance de la France métropolitaine, d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, d'un territoire mentionné à l'article 256-0 du code général des impôts, des régions de Guyane et de La Réunion ou d'un Etat ou d'un territoire n'appartenant pas à la Communauté européenne dès lors que, dans ce dernier cas, les marchandises n'ont pas été mises en libre pratique ;
2° Dans la région de Guyane, de marchandises originaires ou en provenance de la France métropolitaine, d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, d'un territoire mentionné à l'article 256-0 du code général des impôts, des régions de Guadeloupe, de Martinique et de La Réunion ou d'un Etat ou d'un territoire n'appartenant pas à la Communauté européenne dès lors que, dans ce dernier cas, les marchandises n'ont pas été mises en libre pratique ;
3° Dans la région de La Réunion, de marchandises originaires ou en provenance de la France métropolitaine, d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, d'un territoire mentionné à l'article 256-0 du code général des impôts, des régions de Guadeloupe, de Martinique et de Guyane ou d'un Etat ou d'un territoire n'appartenant pas à la Communauté européenne dès lors que, dans ce dernier cas, les marchandises n'ont pas été mises en libre pratique.
II. - Pour l'application de la présente loi, les régions de Martinique et de Guadeloupe sont considérées comme un territoire unique dénommé : « marché unique antillais ». - (Adopté.)
Article 4
Sont exonérées de l'octroi de mer :
1° Les livraisons dans la région de La Réunion de biens expédiés ou transportés hors de cette région par l'assujetti, par l'acquéreur qui n'est pas établi dans cette région ou pour leur compte ;
2° Les livraisons dans le territoire du marché unique antillais de biens expédiés ou transportés hors de ce territoire par l'assujetti, par l'acquéreur qui n'est pas établi dans ce territoire ou pour leur compte.
Cette exonération ne s'applique pas aux livraisons de biens expédiés ou transportés hors de ce territoire à destination de la région de Guyane ;
3° Les livraisons dans la région de Guyane de biens expédiés ou transportés hors de cette région par l'assujetti, par l'acquéreur qui n'est pas établi dans cette région ou pour leur compte.
Cette exonération ne s'applique pas aux biens expédiés ou transportés hors de cette région à destination du territoire du marché unique antillais ;
4° Les importations dans la région de Guyane de produits dont la livraison a été taxée dans l'une des régions formant le marché unique antillais et les importations dans le territoire du marché unique antillais de biens dont la livraison a été taxée dans la région de Guyane. - (Adopté.)
Article 5
Sont également exonérées de l'octroi de mer les livraisons de biens faites par des personnes assujetties à l'octroi de mer dont le chiffre d'affaires relatif à leur activité de production définie à l'article 2 est inférieur à 550 000 ? pour l'année civile précédente.
La limite de 550 000 ? est ajustée au prorata du temps d'exploitation pour les personnes qui ont débuté leur activité au cours de l'année de référence. Elle s'apprécie en faisant abstraction de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'octroi de mer lui-même.
Toutefois, lorsqu'une exonération résultant de l'application du premier alinéa aurait pour effet d'impliquer une réduction d'un taux d'octroi de mer perçu à l'importation, les conseils régionaux peuvent ne pas exonérer de l'octroi de mer les opérations des personnes mentionnées au premier alinéa afin d'éviter cette réduction de taux. - (Adopté.)
Article 6
Les conseils régionaux peuvent exonérer l'importation de marchandises, lorsqu'il s'agit :
1° De matériels d'équipement destinés à l'industrie hôtelière et touristique ainsi que de produits, matériaux de construction, engrais et outillages industriels et agricoles figurant sur la liste prévue au a du 5° du 1 de l'article 295 du code général des impôts et qui sont destinés à une personne exerçant une activité économique au sens de l'article 256 A du même code ;
2° De matières premières destinées à des activités locales de production ;
3° D'équipements destinés à l'accomplissement des missions régaliennes de l'Etat ;
4° D'équipements sanitaires destinés aux établissements de santé publics ou privés ;
5° De biens réimportés, dans l'état où ils ont été exportés, par la personne qui les a exportés et qui bénéficient de la franchise des droits de douane ou en bénéficieraient s'ils étaient soumis à des droits de douane. - (Adopté.)
Article 7
Les conseils régionaux peuvent exonérer les livraisons de biens produits localement par des entreprises autres que celles visées à l'article 5.
Ces exonérations prennent la forme d'un taux réduit ou d'un taux zéro. Le taux est arrêté dans les limites fixées à l'article 28. - (Adopté.)
Article 8
Les importations de marchandises dans les régions de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane ou de La Réunion bénéficient des franchises applicables aux autres droits et taxes en vigueur.
La valeur des marchandises importées en franchise de taxes en provenance de la Communauté européenne dans les régions de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane ou de La Réunion ne doit pas dépasser 880 ? pour les marchandises transportées par les voyageurs et 180 ? pour les marchandises qui font l'objet de petits envois non commerciaux. Ces montants évoluent comme l'indice des prix à la consommation hors tabac mentionné dans les documents joints au projet de loi de finances de l'année. - (Adopté.)
CHAPITRE II
Assiette de l'octroi de mer
Article 9
La base d'imposition est constituée par :
1° La valeur en douane des marchandises, telle que définie par la réglementation communautaire en vigueur, pour les opérations mentionnées au 1° de l'article 1er ;
2° Les prix hors taxe sur la valeur ajoutée pour les opérations mentionnées au 2° de l'article 1er ;
3° Le prix payé ou à payer au prestataire situé en dehors de la région, pour les biens qui sont expédiés temporairement hors des régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique ou de La Réunion et réimportés dans la région d'expédition, après avoir fait l'objet d'une réparation, d'une transformation, d'une adaptation, d'une façon ou d'une ouvraison. Ces dispositions ne s'appliquent pas aux biens dont l'importation est exonérée conformément au 4° de l'article 4.
M. le président. La parole est à M. Claude Lise, sur l'article.
M. Claude Lise. Mon intervention porte sur le 3°de cet article.
La base d'imposition de l'octroi de mer sera désormais constituée des factures de prestataires situés en dehors de la région en cas, notamment, de réparation ou de transformation d'un bien.
Je désire le souligner ici, cette modification de l'assiette de taxation ne résulte pas d'une prescription communautaire. Par ailleurs, elle inaugure un octroi de mer sur prestation de service. Il semblerait que cette modalité d'imposition, que vous avez choisi d'inscrire dans le projet de loi, madame la ministre, fasse déjà l'objet d'une pratique douanière contestée. Il y a déjà des contentieux en cours.
Dans le rapport de M. Roland du Luart, il est précisé que cette disposition permet de lever utilement une incertitude juridique qui pesait sur une opération dénommée, en termes douaniers, « régime des perfectionnements ».
Madame la ministre, quel est l'intérêt réel de cette mesure ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Brigitte Girardin, ministre. Je vous répondrai en prenant un exemple : si une machine est expédiée pour être réparée, elle n'est pas soumise au paiement de l'octroi de mer à son retour. Cet article vise ainsi à éviter d'avoir à payer deux fois cette taxe. Il était donc important d'apporter cette précision. Rien n'est changé par rapport au régime antérieur de l'octroi de mer. Sur ce point, le texte du Gouvernement ne contient pas d'innovation.
M. le président. Je mets aux voix l'article 9.
M. Claude Lise. Je m'abstiens.
(L'article 9 est adopté.)
CHAPITRE III
Fait générateur et exigibilité de l'octroi de mer
Article 10
I. - Pour l'application du 1° de l'article 1er, le fait générateur se produit et l'octroi de mer devient exigible au moment où les biens sont importés dans les régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique ou de La Réunion.
II. - L'importation intervient :
1° Pour les biens originaires ou en provenance d'un Etat ou d'un territoire n'appartenant pas à la Communauté européenne et qui n'ont pas été mis en libre pratique :
a) Lors de l'entrée des biens dans les régions de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane ou de La Réunion ;
b) Lors de la mise à la consommation pour les biens qui ont été placés au moment de leur entrée sur le territoire des régions mentionnées au a sous l'un des régimes suivants prévus par les règlements communautaires en vigueur : magasins et aires de dépôt temporaire, zone franche, entrepôt franc, entrepôt d'importation, perfectionnement actif dans le cadre du système de la suspension, transformation sous douane, transit, admission temporaire en exonération totale ;
2° Pour les biens originaires ou en provenance de la France métropolitaine, d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, d'un territoire mentionné à l'article 256-0 du code général des impôts ou d'une autre région d'outre-mer, à l'exclusion des échanges effectués dans le cadre du marché unique antillais, lors de leur entrée dans les régions de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane ou de La Réunion.
Toutefois, lorsque, au moment de leur entrée, les biens sont placés sous l'un des régimes d'entrepôt fiscal mentionnés au 2° du I de l'article 277 A du code général des impôts, l'octroi de mer devient exigible au moment où les biens sont mis à la consommation. Il en est de même pour les biens originaires ou en provenance de la France métropolitaine, d'un autre Etat membre de la Communauté européenne, d'un territoire mentionné à l'article 256-0 du même code ou d'une autre région d'outre-mer, à l'exclusion des échanges effectués dans le cadre du marché unique antillais, qui rempliraient les conditions pour bénéficier d'un régime de transit ou d'admission temporaire en exonération totale s'il s'agissait de biens en provenance de pays tiers.
L'importation est imposable dans la région sur le territoire de laquelle les biens se trouvent au moment de leur entrée ou au moment de leur mise à la consommation. - (Adopté.)
Article 11
Pour les produits pétroliers et assimilés énumérés au tableau B du 1 de l'article 265 du code des douanes, le fait générateur se produit et la taxe devient exigible lors de leur mise à la consommation à l'intérieur des régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique ou de La Réunion. - (Adopté.)
Article 12
Pour l'application du 2° de l'article 1er, le fait générateur de la taxe se produit et la taxe devient exigible au moment de la livraison par les assujettis des biens issus de leurs opérations de production.
Les livraisons sont imposables à l'endroit où les biens se trouvent au moment du départ de l'expédition ou du transport à destination de l'acquéreur ou au moment de leur délivrance à l'acquéreur en l'absence d'expédition ou de transport, y compris lorsque ces livraisons interviennent sous l'un des régimes mentionnés aux 1° et 2° du II de l'article 10. - (Adopté.)
CHAPITRE IV
Liquidation de l'octroi de mer
Section 1
Dispositions générales
Article 13
L'octroi de mer est liquidé :
1° Pour les opérations d'importation mentionnées au 1° de l'article 1er, sur la déclaration en douane ;
2° Pour les opérations mentionnées au 2° du même article, au vu de déclarations trimestrielles souscrites par les assujettis. - (Adopté.)
Section 2
Déductions
Article 14
L'octroi de mer qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de l'octroi de mer applicable à cette opération dans les conditions prévues au présent chapitre. - (Adopté.)
Article 15
Le droit à déduction prend naissance lorsque l'octroi de mer déductible devient exigible dans les conditions déterminées au chapitre III. - (Adopté.)
Article 16
La déduction de l'octroi de mer est opérée par imputation sur l'octroi de mer dû par l'assujetti au titre de la période pendant laquelle le droit à déduction a pris naissance.
Le montant de l'octroi de mer dont la déduction est ouverte doit être mentionné sur la déclaration afférente au trimestre au cours duquel le droit à déduction a pris naissance. Toutefois, à condition qu'elle fasse l'objet d'une inscription distincte, la taxe dont la déduction a été omise sur cette déclaration peut figurer sur les déclarations ultérieures déposées avant le 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l'omission. - (Adopté.)
Article 17
L'octroi de mer dont les assujettis peuvent opérer la déduction est, selon les cas :
1° Celui qui est perçu à l'importation des marchandises ;
2° Celui qui figure sur les factures d'achats qui leur sont délivrées par leurs fournisseurs, si ces derniers sont légalement autorisés à le faire figurer sur lesdites factures. - (Adopté.)
Article 18
Seules les opérations exonérées en application des 1° à 3° de l'article 4 ouvrent droit à déduction dans les mêmes conditions que si elles étaient soumises à l'octroi de mer. - (Adopté.)
Article 19
I. - L'octroi de mer qui a grevé les biens d'investissement affectés pour plus de 50 % à des opérations ouvrant droit à déduction est déductible en totalité. Lorsque ce pourcentage est égal ou inférieur à 50 %, les biens n'ouvrent pas droit à déduction.
II. - Les véhicules ou engins, quelle que soit leur nature, qui sont conçus pour transporter des personnes ou à usage mixte et qui constituent une immobilisation n'ouvrent pas droit à déduction. Il en est de même des éléments constitutifs, des pièces détachées et accessoires de ces véhicules et engins.
Toutefois, cette exclusion ne s'applique pas aux véhicules routiers comportant, outre le siège du conducteur, plus de huit places assises et utilisés par des entreprises pour amener leur personnel sur les lieux de travail. - (Adopté.)
Article 20
La déduction ne peut être opérée si les assujettis ne sont pas en possession soit des factures mentionnant l'octroi de mer, soit de la déclaration souscrite lors de l'importation du bien sur laquelle ils sont désignés comme destinataires.
Lorsque ces factures ou ces documents font l'objet d'une rectification, les assujettis doivent apporter les rectifications correspondantes dans leurs déductions et les mentionner sur la déclaration qu'ils souscrivent au titre du trimestre au cours duquel ils ont eu connaissance de cette rectification. - (Adopté.)
Article 21
Les assujettis sont tenus de procéder à une régularisation :
1° Si les marchandises ont disparu ;
2° Lorsque l'opération n'est pas effectivement soumise à la taxe. - (Adopté.)
Article 22
L'octroi de mer facturé à l'occasion de ventes résiliées, annulées ou restées définitivement impayées est imputé sur l'octroi de mer dû à raison des ventes ultérieures.
Cette imputation est subordonnée à la rectification préalable de la facture initiale. - (Adopté.)
Article 23
Lorsque le montant de l'octroi de mer déductible mentionné sur une déclaration excède le montant de l'octroi de mer dû d'après les éléments qui figurent sur cette déclaration, l'excédent de taxe dont l'imputation ne peut être faite est reporté, jusqu'à épuisement, sur la ou les déclarations suivantes. - (Adopté.)
Article 24
L'octroi de mer dont l'imputation n'a pu être opérée ne peut pas faire l'objet d'un remboursement.
Toutefois, cette disposition n'est pas applicable à la taxe qui a grevé l'acquisition de biens d'investissement qui ont supporté l'octroi de mer ou les éléments du prix de produits dont la livraison est exonérée en application des 1° à 3° de l'article 4.
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par M. Lise et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Il peut dans ce cas être comptabilisé en charge ou en provision.
La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. Cet amendement concerne les entreprises qui, n'ayant pas la possibilité d'imputer l'octroi de mer acquitté sur leurs matières premières ou sur leurs fournitures, se trouvent en situation d'avoir un crédit d'octroi de mer permanent.
Cette créance sur l'Etat, sur laquelle les entreprises paient par ailleurs des impôts, est pénalisante. Par conséquent, il est proposé, dans un souci d'équité fiscale, de permettre à ces entreprises de comptabiliser en charges ou en provisions l'octroi de mer non imputable.
Je sais que vous avez demandé au secrétaire d'Etat au budget, madame la ministre, de revoir l'analyse réalisée par ses services afin de permettre cette imputation sur le résultat du non-remboursement constaté. Mais il serait bon de rassurer les socio-professsionnels, qui ne sont pas tous convaincus qu'une telle opération comptable puisse être autorisée sans inscription dans la loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Roland du Luart, rapporteur. Comme en commission des finances, ce matin, je peux préciser à mon collègue Claude Lise que l'octroi de mer non remboursable constitue déjà une charge comptable déductible et prise en compte pour le calcul du bénéfice net de l'entreprise.
Si Mme la ministre voulait bien confirmer cette information et, éventuellement, vérifier que cette disposition était bien appliquée, M. Lise pourrait retirer son amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin, ministre. Je confirme totalement ce que vient de dire M. du Luart. J'avais d'ailleurs déjà répondu à l'Assemblée nationale sur ce point. Je peux donc vous assurer, monsieur le sénateur, mon collègue chargé du budget revoit l'analyse qui a été réalisée par certains de ses services.
Le problème que vous évoquez est tout à fait pertinent et nous veillerons à cette imputation sur le résultat du non-remboursement constaté. Des instructions ont été données en ce sens.
Il ne devrait donc pas y avoir, à l'avenir, de nouveaux problèmes sur ce sujet qui relève, je le rappelle, d'une bonne application du code général des impôts.
M. le président. Monsieur Lise, l'amendement est-il maintenu ?
M. Claude Lise. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 6 est retiré.
Je mets aux voix l'article 24.
(L'article 24 est adopté.)
Article 25
L'octroi de mer ayant grevé l'importation ou la livraison de biens qui sont expédiés, dans les deux ans suivant leur importation ou leur livraison, hors de la région de La Réunion ou hors de la région de Guyane ou hors du territoire du marché unique antillais par une personne exerçant une activité économique au sens de l'article 256 A du code général des impôts est remboursable à l'exportateur, dès lors que la taxe a été facturée ou acquittée et qu'elle n'a pas fait l'objet d'une imputation.
Toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables aux biens dont la livraison est imposable dans la région de Guyane et qui sont expédiés vers le marché unique antillais ainsi qu'aux biens dont la livraison est imposable dans les régions de Martinique ou de Guadeloupe et qui sont expédiés vers la région de Guyane. - (Adopté.)
Article 26
Le crédit d'octroi de mer déductible dont le remboursement a été demandé ne peut donner lieu à imputation. Il est annulé lors du remboursement. - (Adopté.)
CHAPITRE V
Taux de l'octroi de mer
Article 27
Les taux de l'octroi de mer sont fixés par délibération du conseil régional.
Les produits identiques ou similaires appartenant à une même catégorie, c'est-à-dire désignés par un même code de la nomenclature combinée, passibles de l'octroi de mer en application de l'article 1er, sont soumis au même taux, quelle que soit leur provenance, sous réserve des dispositions prévues aux articles 28 et 29. - (Adopté.)
Article 28
Lorsque le conseil régional exonère totalement ou partiellement les livraisons de biens faites par les personnes assujetties à l'octroi de mer dont le chiffre d'affaires relatif à leur activité de production mentionnée à l'article 2 est égal ou supérieur à 550 000 ? pour l'année civile précédente, la différence entre le taux applicable aux importations de marchandises et le taux zéro ou le taux réduit applicable aux livraisons de biens faites par ces personnes ne peut excéder :
1° Dix points de pourcentage pour les produits mentionnés dans la partie A de l'annexe à la décision 2004/162/CE du Conseil du 10 février 2004 relative au régime de l'octroi de mer dans les départements français d'outre-mer et prorogeant la décision 89/688/CEE ;
2° Vingt points de pourcentage pour les produits mentionnés dans la partie B de la même annexe ;
3° Trente points de pourcentage pour les produits mentionnés dans la partie C de la même annexe.
Les dispositions du présent article sont également applicables lorsque le conseil régional fait usage, en application de l'article 5, de la possibilité de ne pas exonérer de l'octroi de mer les opérations des personnes mentionnées au même article. - (Adopté.)
Article 29
Lorsque des biens sont produits localement par des assujettis dont les livraisons de biens sont exonérées en application de l'article 5, la différence de taux entre les importations de marchandises et les livraisons de biens produits localement par ces assujettis ne peut excéder :
1° Quinze points de pourcentage pour les produits mentionnés dans la partie A de l'annexe à la décision 2004/162/CE du 10 février 2004 du Conseil précitée ;
2° Vingt-cinq points de pourcentage pour les produits mentionnés dans la partie B de la même annexe ;
3° Trente-cinq points de pourcentage pour les produits mentionnés dans la partie C de la même annexe ;
4° Cinq points de pourcentage pour les autres produits. - (Adopté.)
Article 29 bis
En vue de l'actualisation des listes de produits A, B et C mentionnés en annexe de la décision 2004/162/CE du 10 février 2004 du Conseil précitée, le conseil régional adresse au représentant de l'Etat une demande circonstanciée permettant, notamment, de justifier les différences de taux à retenir au regard des surcoûts supportés par les productions locales dont l'inclusion dans les listes précitées est sollicitée. Cette demande du conseil régional intervient au maximum une fois par an et au cours du premier trimestre de l'année.
En cas de mise en péril d'une production locale ou de besoin impérieux pour une nouvelle production locale, la demande du conseil régional peut être adressée indépendamment de la périodicité et du calendrier prévus au précédent alinéa.
Par dérogation au premier alinéa, pour l'année 2004, la demande peut être adressée au représentant de l'Etat à compter de la mise en oeuvre des dispositions de la présente loi.
M. le président. La parole est à M. Claude Lise, sur l'article.
M. Claude Lise. Cet article relatif à la procédure d'actualisation des listes de produits n'appellerait pas de commentaire particulier s'il se contentait de mettre en application l'article 3 de la décision du Conseil de l'Union européenne du 10 février 2004. Mais le Gouvernement a choisi de l'encadrer de conditions supplémentaires, comme l'obligation pour les autorités régionales de ne recourir à cette procédure qu'une fois par an maximum et au cours du premier trimestre de l'année, hormis les cas d'urgence.
Vous avez déclaré, madame la ministre, que « cette périodicité est à rapprocher de celle de la production du rapport des régions prévue à l'article 30 sur la mise en oeuvre des exonérations ». Mais ce rapport est également une innovation qui n'avait rien d'indispensable.
Ainsi, vous ajoutez une contrainte pour les conseils régionaux à partir d'une autre contrainte que vous avez vous-même créée. En quoi cet article représente t-il « une clause de souplesse », comme vous avez eu l'occasion de le déclarer ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Brigitte Girardin, ministre. Je voudrais vraiment éviter toute ambiguïté : il s'agit réellement d'une clause de souplesse.
Avec cet article, qui a été introduit par un amendement gouvernemental, nous souhaitons pouvoir organiser les choses au mieux. Ces listes de produits peuvent avoir besoin d'être actualisées.
M. Jean-Paul Virapoullé. Absolument !
Mme Brigitte Girardin, ministre. Il faut donc nous y préparer et, surtout, il faut être capable de réagir en cas d'attaque sur un produit ou d'arrivée d'un nouveau produit qui ne bénéficierait pas de protection.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Mais oui !
Mme Brigitte Girardin, ministre. Dans un souci de réactivité et de souplesse, nous avons voulu nous organiser et parer à toute éventualité plutôt que de découvrir subitement un problème grave sur telle ou telle production.
Je vous l'assure, monsieur Lise, loin de nous l'idée d'introduire des contraintes ! Au contraire, nous recherchons vraiment à organiser notre travail de la façon la plus efficace possible pour être en mesure de protéger nos produits et de réagir en cas de besoin, notamment d'attaque.
M. le président. Je mets aux voix l'article 29 bis.
(L'article 29 bis est adopté.)
Article 30
Dans les limites mentionnées aux articles 28 et 29, les taux sont déterminés en fonction des handicaps que supportent les productions locales du fait de leur localisation dans une région ultrapériphérique de l'Union européenne.
Avant la fin du premier trimestre de chaque année, le conseil régional adresse au représentant de l'Etat dans la région un rapport sur la mise en oeuvre des exonérations pendant l'année précédente.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 7, présenté par M. Lise et les membres du groupe socialiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. Cet amendement vise à supprimer l'article 30, instaurant, pour les conseils régionaux, deux contraintes qui ne m'apparaissent pas indispensables.
D'une part, il est demandé aux conseils régionaux de justifier, selon un principe de proportionnalité, chacun des taux qu'ils fixent en fonction des handicaps supportés par les productions locales du fait de leur localisation dans une région ultrapériphérique de l'Union européenne.
D'autre part, il leur est imposé de produire un rapport annuel relatif à la mise en oeuvre des exonérations de l'année précédente.
La première de ces contraintes n'est pas expressément imposée par la décision du Conseil du 10 février 2004, qui prévoit dans son considérant n°14 que « la demande française a été examinée au regard du principe de proportionnalité », celui-ci portant essentiellement sur les différentiels de taux autorisés.
En outre, vous avez affirmé, madame la ministre, que « le nouveau dispositif instaurait un système où les taux étaient, a priori, libres, sous réserve du respect des écarts de taxation autorisés au bénéfice des productions locales pour une liste de produits précisés par la décision du Conseil. »
On peut s'interroger sur le degré de liberté laissé à des collectivités régionales qui doivent justifier chacun des taux qu'elles décident d'appliquer, alors qu'ils sont déjà encadrés, comme vous l'avez indiqué, madame la ministre.
S'agissant de l'actualisation des listes de produits susceptibles d'être exonérés, l'article 29 bis précise que la demande circonstanciée du conseil régional doit permettre « de justifier les différences de taux à retenir au regard des surcoûts supportés par les productions locales dont l'inclusion dans les listes est sollicitée. » Est-il nécessaire d'ajouter un critère supplémentaire ?
Quant au rapport annuel, j'y vois une contrainte supplémentaire qui me paraît venir encore alourdir les tâches administratives des régions.
Je rappelle enfin que la Commission européenne n'exige des autorités françaises qu'un rapport à mi-parcours, soit pour le 31 juillet 2008.
M. le président. L'amendement n° 10, présenté par M. Vergès, est ainsi libellé :
I - Supprimer le premier alinéa de cet article.
II - Compléter le second alinéa de cet article par les mots :
, sur la base des informations fournies par la Direction régionale des douanes concernée.
La parole est à M. Paul Vergès.
M. Paul Vergès. Cet amendement a pratiquement le même objet que celui de notre collègue Claude Lise. La « demande circonstanciée » mentionnée au premier alinéa de l'article est déjà prévue par les articles 27, 28 et 29. Donc, je ne vois pas l'intérêt de répéter ce qui a été dit précédemment, au risque, de surcroît, d'ouvrir la voie à des contentieux.
S'agissant du rapport annuel demandé à la région, nous souhaitons préciser que les régions ne pourront présenter ce rapport qu'après avoir reçu les informations fournies par la direction régionale des douanes, service de l'Etat.
M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Désiré, est ainsi libellé :
Dans le premier alinéa de cet article, remplacer les mots :
taux sont déterminés
par les mots :
modifications de taux sont déterminées
La parole est à M. Rodolphe Désiré.
M. Rodolphe Désiré. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 3 est retiré.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 7 et 10 ?
M. Roland du Luart, rapporteur. Comme je l'ai dit en commission ce matin, l'amendement n° 7 me surprend et me paraît pour le moins dangereux. Je voudrais m'en expliquer devant vous.
D'abord, il y est expliqué que le cadre des exonérations est clairement défini par la décision du Conseil. Ce n'est pas faux. Je rappelle toutefois que cette décision ne peut être applicable qu'après avoir été transposée en droit national - sinon, nous ne servirions pas à grand-chose !
Or, le premier alinéa de cet article donne précisément le cadre général, adapté au droit français, de la décision du Conseil. Sans cet alinéa, les conseils régionaux n'auraient aucune indication quant aux règles qu'ils doivent suivre.
Ensuite, le rapport constitue, certes, une contrainte pour les régions, mais il répond également à une nécessité, compte tenu du manque de lisibilité dont souffrait le précédent système pour les autorités européennes, ce qui explique en grande partie les deux années de discussions supplémentaires.
Pour m'être rendu à Bruxelles et avoir eu des échanges approfondis avec les deux directions concernées, je puis vous assurer qu'elles seront particulièrement attentives à la mise en oeuvre du système. La négociation de 2008 ainsi que le futur octroi de mer - car certains pensent déjà à l'après 2014 -, reposeront en grande partie sur la qualité des argumentaires fournis par le Gouvernement. Or, ce dernier ne peut s'appuyer que sur les régions, puisque ce sont elles qui déterminent les écarts de taux.
Ce rapport prépare, en fait, l'avenir ; il devrait écarter toute suspicion des autorités communautaires et obliger les régions à une vraie réflexion.
J'ajoute enfin, à titre personnel, qu'il ne me paraît pas choquant que les pouvoirs transférés aux régions en matière de fixation des taux s'accompagnent d'une justification de leur action. Cela va dans le sens d'une plus grande clarté.
Pour toutes ces raisons, je demande, au nom de la commission des finances, le retrait de l'amendement n° 7.
S'agissant de l'amendement n° 10, je ne reviendrai pas, monsieur Vergès, sur les explications que j'ai données à M. Lise s'agissant du I. Quant au II, je crois pouvoir vous dire - et je pense que Mme le ministre me rejoindra sur ce point - que la direction des douanes est d'ores et déjà prête à collaborer et à transmettre toutes les informations utiles, à l'exclusion de celles qui relèvent du secret fiscal.
Les inquiétudes dont votre amendement se fait l'écho étant déjà apaisées, je pense que vous devriez le retirer.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin, ministre. J'approuve totalement ce que vient de dire M. le rapporteur.
Monsieur Lise, il s'agit ici de préserver l'avenir. Si la Commission souhaite que la France lui fournisse un rapport annuel, c'est essentiellement à titre d'information. Je ne vois là rien de choquant : nous pourrons en toute transparence transmettre à Bruxelles les éléments et les justificatifs qui nous seront communiqués par les régions. Notre position sera ainsi beaucoup plus confortable et notre argumentation beaucoup plus solide lorsqu'il nous faudra défendre la pérennité d'un tel système.
Je le rappelle, il s'agit de déroger au droit communautaire en se fondant sur les handicaps structurels de nos régions ultrapériphériques, handicaps qui existeront toujours.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Bien sûr !
Mme Brigitte Girardin, ministre. Donc, il n'y a aucune raison de ne pas, en permanence, fournir des justifications, sauf à ne pas pouvoir prévenir leur remise en cause à l'avenir.
S'agissant de l'amendement n° 10, je tiens également à appuyer M. le rapporteur dans les explications qu'il vous a données. Je peux vous l'assurer, les services de l'Etat vous apporteront toute l'aide nécessaire pour vous permettre de confectionner ces rapports. Grâce à aux informations dont ils disposent, notamment aux données statistiques, les conseils régionaux seront en mesure, chiffres à l'appui, de justifier leur choix de soutien à tel ou tel secteur.
C'est un travail de partenariat qui doit continuer à se mettre en place. Je le répète, les services de l'Etat sont là pour vous aider à élaborer ces rapports.
M. le président. Monsieur Lise, compte tenu des explications de la commission et du Gouvernement, maintenez-vous l'amendement n°7 ?
M. Claude Lise. Je le retire, monsieur le président.
M. Paul Vergès. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 10 est retiré.
Je mets aux voix l'article 30.
(L'article 30 est adopté.)
Article 31
Aucune différence de taxation n'est autorisée entre les importations de produits bénéficiant du régime spécifique d'approvisionnement, prévu aux articles 2 et 3 du règlement (CE) n° 1452/2001 du Conseil du 28 juin 2001 portant mesures spécifiques concernant certains produits agricoles en faveur des départements français d'outre-mer, modifiant la directive 72/462/CEE et abrogeant les règlements (CEE) n° 525/77 et (CEE) n° 3763/91 (Poseidom), et les livraisons de produits similaires dans la région. - (Adopté.)
CHAPITRE VI
Redevables de l'octroi de mer
Article 32
I. - L'octroi de mer est dû par :
1° Les personnes désignées comme destinataires réels des biens sur la déclaration en douane pour les opérations d'importation mentionnées au 1° de l'article 1er ;
2° Les personnes qui réalisent des opérations imposables mentionnées au 2° de l'article 1er.
II. - Toute personne qui mentionne l'octroi de mer sur une facture ou sur tout autre document en tenant lieu est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation, hors le cas où elle a corrigé une erreur commise de bonne foi et que la taxe n'a pas été répercutée. - (Adopté.)
CHAPITRE VII
Obligations des assujettis à l'octroi de mer
Article 33
Toute personne assujettie à l'octroi de mer doit s'identifier auprès du bureau de douane territorialement compétent.
Les personnes assujetties à l'octroi de mer, dont les livraisons sont exonérées en application de l'article 5, sont dispensées de produire les déclarations mentionnées à l'article 13. - (Adopté.)
Article 34
I. - Tout assujetti à l'octroi de mer doit délivrer une facture pour les biens livrés à un autre assujetti lorsque la livraison de biens est imposable en application du 2° de l'article 1er.
II. - Les factures doivent faire apparaître distinctement, pour chaque marchandise, les montants de l'octroi de mer, les taux d'imposition applicables ainsi que la nomenclature combinée applicable à chacune des marchandises.
Lorsque les livraisons sont exonérées totalement en application des articles 5 et 7, les factures portent la mention : « livraison exonérée d'octroi de mer ». - (Adopté.)
Article 35
Les personnes assujetties à l'octroi de mer doivent tenir une comptabilité faisant apparaître d'une manière distincte les opérations taxées et celles qui ne le sont pas.
La comptabilité et les pièces justificatives des opérations réalisées par les assujettis à l'octroi de mer doivent être conservées selon les délais et modalités prévus à l'article 65 du code des douanes. Les pièces justificatives relatives à des opérations ouvrant droit à déduction doivent être des pièces d'origine.
Les personnes assujetties à l'octroi de mer doivent fournir à l'administration, au lieu du principal établissement dans la région, toutes justifications nécessaires à la fixation des opérations imposables à l'octroi de mer, sans préjudice de l'exercice par l'administration des douanes du droit de communication qu'elle tient des dispositions de l'article 65 du code des douanes. - (Adopté.)
CHAPITRE VIII
L'octroi de mer régional
Article 36
I. - Les conseils régionaux de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de La Réunion peuvent instituer, au profit de la région, un octroi de mer régional ayant la même assiette que l'octroi de mer.
Sont exonérées de l'octroi de mer régional les opérations mentionnées aux articles 4 et 8 ainsi que celles exonérées en application de l'article 5.
Indépendamment des décisions qu'ils prennent au titre des articles 6 et 7, les conseils régionaux peuvent exonérer de l'octroi de mer régional les opérations mentionnées à ces articles dans les conditions prévues pour l'exonération de l'octroi de mer.
Sous réserve des dispositions du II et du III du présent article, le régime d'imposition à l'octroi de mer régional et les obligations des assujettis sont ceux applicables à l'octroi de mer.
II. - Les taux de l'octroi de mer régional ne peuvent excéder 2,5 %.
III. - L'institution de l'octroi de mer régional, les exonérations qui résultent de l'application du I et la fixation du taux de cette taxe ne peuvent avoir pour effet de porter la différence entre le taux global de l'octroi de mer et de l'octroi de mer régional applicable aux importations de marchandises et le taux global des deux mêmes taxes applicable aux livraisons de biens faites dans la région par les assujettis au-delà des limites fixées aux articles 28 et 29. - (Adopté.)
CHAPITRE IX
Dispositions relatives au marché unique antillais
Article 37
Les mouvements, d'une part, de marchandises importées ou produites en Guadeloupe et expédiées ou livrées en Martinique et, d'autre part, de marchandises importées ou produites en Martinique et expédiées ou livrées en Guadeloupe, font l'objet d'une déclaration périodique et du dépôt d'un document d'accompagnement.
Les modalités de la déclaration et le contenu du document d'accompagnement sont fixés par voie réglementaire. - (Adopté.)
Article 38
L'expédition à destination des régions de Martinique et de Guadeloupe ou la livraison dans ces régions de marchandises qui ont fait l'objet dans l'une de ces régions d'une importation mentionnée au 1° de l'article 1er donnent lieu à un versement annuel affecté aux collectivités territoriales de la région de destination des marchandises.
Le versement est prélevé sur les produits de l'octroi de mer et de l'octroi de mer régional perçus dans la région d'importation. Il vient en complément des produits de l'octroi de mer et de l'octroi de mer régional perçus directement dans la région de destination au titre des articles 1er et 36.
Il est calculé selon des modalités fixées par le décret prévu à l'article 50. Ces modalités reposent sur l'application des taux d'octroi de mer et d'octroi de mer régional exigibles à l'importation dans la région à partir de laquelle les marchandises ont été expédiées ou livrées à :
1° La valeur en douane des marchandises en cas d'expédition sans transfert de la propriété. La valeur en douane est calculée comme en matière de valeur en douane à l'exportation ;
2° Au prix hors taxe facturé en cas de livraison.
Les taux applicables sont ceux en vigueur au 31 décembre de l'année au titre de laquelle le versement intervient.
Il est procédé au versement un an au plus tard après la date à laquelle a été réalisée l'expédition ou la livraison de marchandises dans la région de destination. - (Adopté.)
Article 39
Le défaut de production dans les délais de la déclaration prévue à l'article 37 est passible d'une amende de 750 ?.
L'amende est portée à 1 500 ? à défaut de production de la déclaration dans les trente jours d'une mise en demeure.
Chaque omission ou inexactitude dans la déclaration produite est passible d'une amende de 15 ?, sans que le total puisse excéder 1 500 ?.
L'amende ne peut être mise en recouvrement avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contrevenant la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations.
L'amende est prononcée par l'administration des douanes dans le même délai de reprise qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Le contentieux de cette amende est soumis aux mêmes procédures et son recouvrement bénéficie des mêmes garanties, sûretés et privilèges que ceux prévus pour la taxe sur la valeur ajoutée. - (Adopté.)
Article 40
Les agents des douanes peuvent adresser aux personnes tenues de souscrire la déclaration mentionnée à l'article 37 des demandes de renseignements et de documents destinées à vérifier qu'elles se sont acquittées des obligations mises à leur charge par ledit article. Ces demandes fixent un délai de réponse qui ne peut être inférieur à cinq jours.
L'administration peut procéder à la convocation du redevable de la déclaration. Celui-ci est entendu, à sa demande, par l'administration. L'audition donne lieu à l'établissement d'un procès-verbal dont une copie est remise au redevable. Celui-ci peut se faire représenter.
Le refus de déférer à une convocation, le défaut de réponse à une demande de renseignement écrite ou la non-remise des documents nécessaires à l'établissement de la déclaration mentionnée à l'article 37 est passible d'une amende de 1 500 ?.
Cette amende est prononcée par l'administration des douanes. Elle est recouvrée selon les modalités prévues aux quatrième et cinquième alinéas de l'article 39. Le contentieux de cette amende est soumis aux mêmes procédures et son recouvrement bénéficie des mêmes garanties, sûretés et privilèges que ceux prévus pour la taxe sur la valeur ajoutée. - (Adopté.)
CHAPITRE X
Contrôle, sanctions et recouvrement de l'octroi de mer
Article 41
L'octroi de mer et l'octroi de mer régional sont perçus, contrôlés et recouvrés par la direction générale des douanes et droits indirects, selon les règles, garanties, privilèges et sanctions prévus par le code des douanes. Les infractions sont constatées, réprimées et les instances instruites et jugées conformément aux dispositions du même code. - (Adopté.)
Article 42
L'article 411 du code des douanes est ainsi modifié :
1° Le h du 2° devient le i ;
2° Il est rétabli un h ainsi rédigé :
« h) Toute manoeuvre ayant pour but ou pour résultat de faire bénéficier indûment son auteur ou un tiers d'une exonération, d'un dégrèvement, d'une déduction, d'un remboursement ou d'une taxe réduite prévus en ce qui concerne l'octroi de mer et l'octroi de mer régional ; ». - (Adopté.)
Article 43
L'Etat perçoit sur le produit de l'octroi de mer un prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement égal à 2,5 % du montant dudit produit.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 2 est présenté par Mme Michaux -Chevry.
L'amendement n° 8 est présenté par M. Lise et les membres du groupe socialiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Dans cet article, remplacer le taux :
2,5 %
par le taux :
1,5 %
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'Etat de la fixation à 1,5 % du taux de prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry, pour défendre l'amendement n° 2.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Nous demandons la réduction de 2,5 % à 1,5 % du taux de prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement au profit de l'Etat.
Personne, dans les départements d'outre-mer, ne peut ignorer le travail effectué par la douane pour la perception de l'octroi de mer et personne ne peut davantage ignorer que cette perception est faite dans d'excellentes conditions.
Encore faut-il savoir que, dans cette collecte, nombre de fonctionnaires sont confrontés à un problème de dépassement du plafond. Que se passait-il jusqu'à présent, mes chers collègues ? Le trop-perçu par les fonctionnaires de l'Etat revenait au budget du ministère des finances !
En réalité, et deux délibérations du conseil régional de la Guadeloupe adoptées à l'unanimité l'ont démontré, une partie des sommes versées et perçues sur place par les contribuables locaux s'en va !
Je vous le dis d'emblée, je ne suis pas d'accord avec l'exposé fait par le rapporteur à l'Assemblée nationale et dont j'ai pris connaissance. Ce que j'affirme, je peux le prouver avec les délibérations que je cite.
Sans doute, madame la ministre, allez-vous me demander tout à l'heure de retirer mon amendement. Si le Gouvernement nous donne l'assurance que, sur les sommes perçues par les fonctionnaires, le trop-plein qui résulte de l'application du plafond ne tombera pas dans l'escarcelle du ministère de l'économie et des finances, je retirerai mon amendement.
Je suis toutefois contrainte de l'exposer parce que, en dépit de deux délibérations, les assemblées n'ont pas obtenu de réponse de l'Etat.
M. le président. La parole est à M. Claude Lise, pour défendre l'amendement n° 8.
M. Claude Lise. Je n'ai rien à ajouter à ce qui vient d'être dit.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Roland du Luart, rapporteur. Je répondrai globalement aux auteurs des deux amendements que les frais d'assiette et de recouvrement représentaient environ 15 millions d'euros pour l'Etat en 2003.
Il ne me paraît pas opportun d'abaisser le pourcentage actuellement perçu, et ce pour trois raisons.
Premièrement, ce taux a été, dans le passé, nettement plus élevé et différent selon chaque région. Le niveau actuel paraît plutôt modeste et satisfaisant.
Deuxièmement, ce taux de 1,5% est déjà faible, rapporté aux 3,6% perçus par l'Etat pour les impôts locaux en application de l'article 1641 du code général des impôts.
Troisièmement, en ma qualité de rapporteur de la commission des finances et en l'absence de son président, il me paraît difficile, dans cette période particulièrement tendue sur le plan budgétaire, de réduire les ressources de l'Etat, fût-ce dans des proportions minimes.
Je suis d'ailleurs surpris, madame Michaux-Chevry, de lire, dans l'objet de votre amendement, que le « le taux actuel de 2,5 % génère des sommes importantes, supérieures aux frais d'assiette et de recouvrement supportés par l'Etat. »
Vous disposez donc d'informations que je n'ai pu obtenir ! Les différents services contactés au ministère de l'économie et des finances nous ont fait valoir qu'il était très difficile d'isoler le coût exact de ce recouvrement.
Je pense qu'il serait souhaitable que vous acceptiez de retirer cet amendement. Je vais écouter avec beaucoup d'intérêt le commentaire de Mme le ministre sur ce taux. C'est après l'avoir entendue que la commission se prononcera sur votre proposition.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin, ministre. Il me paraît en effet très difficile de revenir sur le taux actuel du prélèvement de 2,5 %.
Compte tenu des échanges qui viennent d'avoir lieu, nous sommes en présence soit d'un déficit d'information, soit d'éléments insuffisamment clairs pour les uns et les autres. Dans ces conditions, je veux bien m'engager à examiner plus attentivement cette question pour apprécier si nous disposons éventuellement de marges de manoeuvre.
En tout état de cause, je rejoins M. le rapporteur pour considérer qu'il est difficile, y compris sur ce point, de diminuer les recettes de l'Etat.
M. Roland du Luart, rapporteur. Mme la ministre vient de préciser qu'elle allait faire procéder à une vérification du coût du recouvrement et qu'il serait tenu compte d'un éventuel boni.
J'ai été très sensible à l'observation formulée par M. Claude Lise ce matin, en commission des finances. Il expliquait qu'en Martinique quatre-vingt-dix agents étaient chargés de ce recouvrement, ce qui lui paraissait un peu. beaucoup.
M. Claude Lise. Non, j'ai dit que le total du recouvrement correspondait à quatre-vingt-dix agents !
M. Roland du Luart, rapporteur. Et cela vous semble excessif ? Cette position est très constructive. (Sourires.) Peut-être pourrait-on redéployer les postes d'agents chargés du recouvrement, ou réduire leur nombre. En qualité de membre de la commission des finances, je ne puis qu'être très sensible à de tels arguments, puisque notre objectif consiste à réaliser des économies budgétaires.
Sur le fond, il faut le savoir, le Gouvernement souhaite mettre en adéquation les modalités du recouvrement et la réalité.
Dès lors que nous poursuivons un objectif commun, et dans l'attente des chiffres exacts que Mme la ministre nous communiquera lors de la discussion du projet de loi de finances, la commission souhaite le retrait des amendements nos 2 et 8.
M. le président. Madame Michaux-Chevry, l'amendement n° 2 est-il maintenu ?
Mme Lucette Michaux-Chevry. Permettez-moi de verser un élément au débat.
Le calcul du prélèvement pour frais d'assiette se fonde sur l'effectif total des agents des douanes. Or tous ne sont pas mobilisés pour la perception de l'octroi de mer.
Nous reconnaissons le travail exemplaire des agents, le problème n'est pas là. Le problème est qu'il s'agit d'une recette locale : chez nous, c'est le contribuable guadeloupéen qui paie.
Il est, certes, légitime que l'Etat soit rémunéré pour le travail qui est accompli par ses fonctionnaires. Mais, lorsque les fonctionnaires ont atteint le plafond, pourquoi ces sommes retournent-elles au ministère des finances au lieu d'être affectées aux communes ? Telle est notre interrogation.
Toutefois, pour faire plaisir à Mme la ministre, et pour ne pas mettre mes collègues en difficulté, je vais retirer l'amendement. Je vous demande néanmoins, madame la ministre, d'examiner ce dossier avec attention, car il y a là une injustice qui pénalise lourdement les communes. Je vous communiquerai d'ailleurs les chiffres le moment venu. Dans l'immédiat, soucieuse de permettre le vote de ce texte, je retire l'amendement n° 2.
M. Claude Lise. Non, je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n°8 est retiré.
Je mets aux voix l'article 43.
(L'article 43 est adopté.)
CHAPITRE XI
Dispositions diverses
Article 44
Par exception aux dispositions du 1° du I de l'article 267 et du 1° de l'article 292 du code général des impôts et pour l'application de ces articles dans les régions d'outre-mer, l'octroi de mer et l'octroi de mer régional ne sont pas compris dans la base d'imposition de la taxe sur la valeur ajoutée. - (Adopté.)
Article 45
Par dérogation à l'article 6 de la loi n° 75-622 du 11 juillet 1975 relative à la nationalisation de l'électricité dans les départements d'outre-mer, les montants de l'octroi de mer et de l'octroi de mer régional peuvent être répercutés dans le prix de vente de l'électricité. - (Adopté.)
TITRE II
AFFECTATION DU PRODUIT DE L'OCTROI DE MER
Article 46
Dans chacune des régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de La Réunion, le produit de l'octroi de mer fait l'objet, après le prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement prévu par l'article 43, d'une affectation annuelle à une dotation globale garantie répartie entre les communes et, en Guyane, entre le département et les communes. Le montant de cette dotation est égal au montant de l'année précédente majoré d'un indice égal à la somme du taux d'évolution de la moyenne annuelle du prix de la consommation hors tabac des ménages et du taux d'évolution du produit intérieur brut total en volume, tels qu'ils figurent dans les documents annexés au projet de loi de finances de l'année en cours.
Dans le cas où, pour une année, le produit global de l'octroi de mer est inférieur au montant de la dotation globale garantie répartie l'année précédente augmentée de l'indice prévu à l'alinéa précédent, la dotation globale garantie de l'année en cours est réduite à due concurrence. Par dérogation au premier alinéa, le montant de la dotation globale garantie de l'année suivante est alors égal au montant de la dotation de l'antépénultième année majoré des indices mentionnés au premier alinéa correspondants à l'année précédente et à l'année en cours.
S'il existe un solde, celui-ci est affecté à une dotation au fonds régional pour le développement et l'emploi institué par l'article 48. - (Adopté.)
Article 47
Les modalités de répartition de la dotation globale garantie mentionnée à l'article 46 sont celles qui sont en vigueur à la date du 1er août 2004. Elles peuvent être modifiées par décret pris sur la proposition du conseil régional dans un délai de deux mois à compter de la transmission de cette proposition au représentant de l'Etat dans la région. Passé ce délai, et en l'absence de décision contraire du Gouvernement, la délibération du conseil régional devient applicable.
Nonobstant les dispositions du précédent alinéa, le département de la Guyane reçoit, en 2004, 35 % de la dotation globale garantie. A compter de l'exercice 2005, le département de la Guyane reçoit une part de la dotation globale garantie fixée à 35 % et plafonnée à 27 millions d'euros. - (Adopté.)
Article 48
I. - Le fonds régional pour le développement et l'emploi créé dans chacune des régions de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique et de La Réunion est alimenté par le solde du produit de l'octroi de mer, après affectation à la dotation globale garantie prévue à l'article 46.
Les ressources disponibles du fonds régional pour le développement et l'emploi sont affectées, chaque année, à une part communale et à une part régionale :
1° La part communale est égale à 80 % du fonds régional pour le développement et l'emploi. En Guadeloupe, 10 % de cette part communale est exclusivement consacrée aux îles du sud, à savoir, Grand-Bourg, Saint-Louis, Capesterre-de-Marie-Galante, La Désirade, Terre-de-Haut et Terre-de-Bas. Cette part communale est constituée par une dotation d'équipement local répartie entre les communes au prorata de leur population. La population prise en compte pour cette répartition est majorée de 20 % pour les communes chefs-lieux de département et de 15 % pour les communes chefs-lieux d'arrondissement.
La dotation d'équipement local est inscrite en recette de la section d'investissement de chaque commune bénéficiaire, pour financer, prioritairement, des projets facilitant l'installation d'entreprises et la création d'emplois ou contribuant à la réalisation d'infrastructures et d'équipements publics nécessaires au développement ;
2° La part régionale est constituée de 20 % des ressources annuelles du fonds régional pour le développement et l'emploi. Cette ressource est affectée, par délibération du conseil régional, au financement d'investissements contribuant au développement économique, à l'aménagement du territoire et au désenclavement, sous maîtrise d'ouvrage de la région, de syndicats mixtes ou d'établissements publics de coopération intercommunale.
Ces subventions sont cumulables avec celles dont peuvent bénéficier les communes, les établissements publics de coopération intercommunale, les régions, les départements et les syndicats mixtes, de la part de l'Etat ou d'autres collectivités publiques, ou au titre des fonds structurels européens.
Dans les trois mois qui suivent l'achèvement du projet, les bénéficiaires de subventions de la part régionale du fonds régional pour le développement et l'emploi transmettent au conseil régional un rapport de réalisation des investissements financés par le fonds.
II et III. - Supprimés.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 11, présenté par M. Vergès, est ainsi libellé :
Après les mots :
répartie entre les communes
rédiger comme suit la fin du premier alinéa du 1° du I de cet article :
selon les mêmes dispositions que celles prévues pour la répartition de la dotation globale garantie aux communes aux articles 46 et 47.
La parole est à M. Paul Vergès.
M. Paul Vergès. Comme je l'ai indiqué dans mon propos liminaire, les crédits des FRDE sont uniquement destinés aux communes, sous réserve du respect de deux conditions posées par la Commission européenne et par le Parlement : les crédits doivent être affectés au développement économique et à la création d'emplois.
Lorsque nous sommes arrivés à la tête du conseil régional de la Réunion, nous avons constaté que de nombreux crédits du FRDE n'étaient pas utilisés. Nous avons alors adressé à toutes les communes une demande de présentation de projets. J'ai donné les chiffres tout à l'heure. Cela nous a permis de doubler pratiquement le taux d'utilisation de ces crédits.
Toutefois, celles que l'on appelle chez nous les petites communes sont inquiètes, car elles n'ont pas les moyens de recourir à des bureaux d'études et à des bureaux techniques pour présenter des projets. Nous avons donc facilité la création de bureaux d'études pour éviter que seules les « grosses communes » puissent utiliser les crédits du FRDE.
Disperser les crédits entre les communes au lieu de les utiliser pour des projets d'importance régionale ne permettra pas de résoudre les problèmes d'aménagement structurant à la Réunion.
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Larifla, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du 1° du I de cet article, par les mots :
, et en Guadeloupe, de 100 % pour les communes des îles du sud visées plus haut.
La parole est à M. Dominique Larifla.
M. Dominique Larifla. Les communes des îles du sud de l'archipel de la Guadeloupe, Grand-Bourg, Saint-Louis et Capesterre-de-Marie-Galante, Terre-de-Haut, Terre-de-Bas, La Désirade accusent un double handicap : d'une part, l'accumulation d'un retard considérable en biens d'équipements publics de toute nature a conduit à un dépeuplement massif ; d'autre part, leur « double insularité », du fait de leur éloignement des îles de Grande-Terre et de Basse-Terre, engendre un surcoût dans l'acheminement des marchandises, matériaux et biens de consommation, notamment. Ces communes ne sont en effet pas en mesure d'organiser un acheminement direct de leurs importations.
C'est pourquoi, en plus de l'affectation exclusive d'une part de 10 % du FRDE à ces communes, il convient, compte tenu de leur population peu importante, de majorer de 100 % la population prise en compte pour l'attribution de la part communale du fonds.
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Othily, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du 1° du I de cet article par trois phrases ainsi rédigées :
En Guyane, 15 % de cette part communale est exclusivement consacrée aux communes rencontrant, de part leurs caractéristiques, un cumul de contraintes et de handicaps. Cette part communale est constituée par une dotation d'équipement local entre les communes concernées sur la base des critères tenant à l'enclavement et à l'éloignement desdites communes par rapport au chef-lieu de région, de département et de canton, à leur population scolaire ainsi qu'à leur retard en équipement. Une délibération du conseil régional répartira cette dotation d'équipement local sur la base de trois critères précités.
La parole est à M. Georges Othily.
M. Georges Othily Les communes guyanaises concernées ne perçoivent aucune recette fiscale. Comme les communes du sud de l'archipel de la Guadeloupe, elles rencontrent des difficultés. Nous souhaitons donc qu'elles bénéficient d'une dotation équivalant à 15 % de la part communale du FRDE.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Roland du Luart, rapporteur. S'agissant de l'amendement n° 11, je tiens à souligner, monsieur Vergès, que la population est un critère de répartition dominant pour la dotation de garantie qui alimente le budget de fonctionnement.
En ce qui concerne la part du FRDE destinée à l'investissement, il me semble que le critère de population, modulé pour les communes chefs-lieux, est suffisamment simple et clair pour ne pas être modifié.
De plus, les petites communes pourront, elles, bénéficier, si les exécutifs régionaux le souhaitent, de la fraction laissée aux régions.
Je suis enclin à développer les mêmes arguments à l'encontre de l'amendement n° 5. La région a toute latitude de financer les communes par le biais des 20 % qui lui reviennent au titre du FRDE.
M. Larifla nous propose, par l'amendement n° 4, de renforcer les aides spécifiques destinées aux îles du sud de la Guadeloupe. Nous sommes conscients des difficultés particulières que rencontrent ces communes. Cependant, je vous le rappelle, une fraction de 10 % leur est déjà acquise, sans préjudice d'autres mesures de soutien.
Il ne me paraît donc pas opportun d'augmenter les aides dont ces bénéficient, car cela se ferait au détriment des autres communes. Je considère qu'il convient de se servir des moyens laissés aux régions avec la part de 20 % qu'elles peuvent affecter de manière spécifique aux petites communes.
La commission est donc défavorable à ces trois amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin, ministre. La Gouvernement est également défavorable à ces trois amendements.
Monsieur Vergès, la partie de l'article 48 du projet de loi dont la rédaction résulte des travaux de l'Assemblée nationale - rédaction approuvée par le Gouvernement - prévoit que les ressources du FRDE sont partagées entre les communes au prorata de leur population et majorées de 20 % pour les communes chefs-lieux de département et de 15 % pour les communes chefs-lieux d'arrondissement.
Ces majorations se justifient par le rôle de commune centre que remplissent les communes chefs-lieux de département et d'arrondissement. Elles doivent en effet supporter les charges liées à de plus importants besoins d'équipements publics - écoles, équipements sportifs, salles de spectacles. La refonte d'ensemble du FRDE profite à toutes les communes, petites ou grandes. Il n'est pas illégitime que celles qui sont, en règle générale, confrontées à des charges d'investissement plus élevées perçoivent une dotation majorée. Il n'y a donc pas lieu, me semble-t-il, de revenir sur la répartition que prévoit la rédaction actuelle de l'article 48 du projet de loi.
S'agissant de l'amendement n° 4, comme l'a rappelé M. le rapporteur, le texte actuel dégage une enveloppe de 10 % au sein de la part communale affectée à la Guadeloupe, de façon à réserver aux îles du sud du département une majoration significative de leurs dotations pour faire face à leur situation de double insularité.
L'objectif de compensation et de rattrapage est déjà atteint avec ce texte, sans préjuger d'autres dispositifs complémentaires. Je me suis engagée, vous le savez, à prévoir pour les îles du sud de la Guadeloupe une véritable stratégie de développement à moyen et long terme. Le FRDE ne sera pas le seul fonds mobilisé dans le cadre de cette stratégie.
M. Othily attire l'attention du Gouvernement sur la situation particulière, en termes de contraintes et de handicaps, que connaissent les communes enclavées de Guyane.
Le texte actuel correspond à un équilibre d'ensemble de l'emploi de la recette de l'octroi de mer. Les communes de Guyane n'en ont évidemment pas été écartées, puisque le mécanisme de l'article 47, qui plafonne la part d'octroi de mer revenant au département de Guyane, profitera progressivement à ces communes.
De plus, la situation des communes de Guyane est déjà prise en compte à travers plusieurs divers dispositifs nationaux. Je citerai notamment la possibilité ouverte par le décret du 7 février 2001 relatif aux subventions de l'Etat de porter à 100 % le montant des aides publiques, contre un maximum de 80 % en règle générale, et la majoration de 10 % de la réduction d'impôt sur le revenu au titre de l'aide fiscale à l'investissement en outre-mer.
En outre, monsieur le sénateur, dans la réforme, en cours, des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales, il est envisagé de retenir un critère fondé sur la superficie dans le calcul de la dotation forfaitaire, part de la dotation globale de fonctionnement, qui profiterait en particulier à ces communes enclavées de la Guyane.
La situation, bien connue, de ces communes me semble être déjà traitée à travers plusieurs dispositifs. Il ne faut pas penser que le FRDE est le seul fonds que l'on peut mobiliser pour remédier à tous ces problèmes particuliers. Il existe d'autres mécanismes, qui sont d'ailleurs en cours de réforme ou de refonte, pour répondre aux difficultés, réelles, des communes enclavées de Guyane, auxquelles le Gouvernement est très attentif.
M. le président. La parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry, pour explication de vote sur l'amendement n° 4.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Je tiens simplement à préciser que les îles de l'archipel de la Guadeloupe bénéficient déjà d'une dotation complémentaire, y compris la petite commune située au sud de Basse-Terre.
Par ailleurs, une dotation supplémentaire est allouée à ces communes au titre de la continuité territoriale.
Cet amendement n'améliore donc en rien les dispositions existantes.
M. le président. La parole est à M. Dominique Larifla, pour explication de vote.
M. Dominique Larifla. Compte tenu des explications de Mme la ministre et de l'engagement qu'elle a pris de soutenir par d'autres voies ces communes du sud de la Guadeloupe, je retire l'amendement.
M. Georges Othily. Les explications apportées par Mme la ministre me contraignent à le retirer, par gentillesse... (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 5 est retiré.
L'amendement n° 12, présenté par M. Vergès, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa du 1° du I de cet article supprimer le mot :
, prioritairement,
La parole est à M. Paul Vergès.
M. Paul Vergès. Comme je l'ai dit tout à l'heure, ma crainte est grande que la répartition entre les communes, le plus souvent pour leur fonctionnement, des crédits regroupés dans le FRDE et normalement mis à la disposition des communes et des communautés de communes pour réaliser des équipements structurants facilitant le développement économique et l'emploi, ne ralentisse le rattrapage des retards d'équipement dans notre île.
Je prends le cas de Sainte-Rose, qui n'est ni chef-lieu d'arrondissement ni chef-lieu du département : cette commune a construit un port grâce à un apport décisif du FRDE, ce qu'elle n'aurait pas pu faire si la part qui lui avait été dévolue avait été fonction de sa population.
Je prends le cas de Saint-André, qui n'est pas un chef-lieu d'arrondissement : cette commune a réalisé, au centre de la région Est, un grand équipement de loisirs, le parc nautique et touristique du Colosse, ce qu'elle n'aurait jamais pu faire sans le FRDE.
Je prends le cas du Tampon, qui n'est pas un chef-lieu d'arrondissement : cette commune dispose d'un grand équipement pour l'irrigation et un équipement pour l'aide à tous les planteurs dans les zones montagneuses qu'elle n'aurait jamais pu construire si les crédits du FRDE avaient été répartis en fonction de la population.
L'équipement du port de Sainte-Rose, celui du Colosse, à Saint-André, et ceux du Tampon ont un rayonnement régional, c'est d'ailleurs l'argument principal qu'ont mis en avant les maires de ces communes pour défendre leur projet.
Saupoudrer les crédits sur les communes sera cause de dérives, alors que, si le FRDE garde exclusivement pour objectif le développement économique des communes et des groupements de communes développant l'emploi, son efficacité sera infiniment plus grande.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Roland du Luart, rapporteur. Comme je l'avais laissé présager à Paul Vergès, et malgré toute l'amitié que j'ai pour lui, la commission est défavorable à son amendement et en souhaite le retrait.
Cela étant, notre collègue met l'accent sur une véritable contradiction, car aujourd'hui la Réunion totalise 107 millions d'euros de crédits non consommés, ce qui ne devrait pas être le cas si tout fonctionnait aussi bien qu'on le dit.
Grâce à l'amendement voté, avec l'accord du Gouvernement, à l'Assemblée nationale, nous espérons une mobilisation désormais beaucoup plus active des fonds.
Si cette mobilisation se produit, elle donnera lieu à la relance économique qui est attendue par tous les partenaires, qu'il s'agisse des parlementaires, des conseillers régionaux, des conseillers généraux ou des maires.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Virapoullé, pour explication de vote.
M. Jean-Paul Virapoullé. Je voterai contre cet amendement, mais pas parce qu'il est présenté par notre collègue Paul Vergès. (Sourires.)
Il est vrai que le FRDE a favorisé la réalisation de projets structurants à la Réunion, mais il vrai aussi qu'il faut clarifier le débat.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, je souhaite interroger Mme la ministre pour qu'après l'entrée en application de la réforme que nous votons aujourd'hui les choses soient claires.
D'abord, les crédits sont versés à un fonds local d'investissement et non à un fonds local de fonctionnement, n'est-ce pas, madame la ministre ? (Mme la ministre opine.)
Il ne peut donc pas y avoir d'abus : les maires devront utiliser ces crédits comme levier d'investissement, donc comme levier de développement.
M. Jean-Paul Virapoullé. Ensuite, l'amendement vise à supprimer le mot « prioritairement », raison pour laquelle je voterai contre.
En effet, celles des régions qui ont de grosses de réserves, la Réunion et la Martinique - la Guyane en a encore, tandis que la Guadeloupe fait au contraire figure de bon élève - ont été gênées par la rédaction antérieure du texte.
Je voudrais cependant être certain que, vu l'importance de ceux qui nous seront délégués, les fonds devront bien « prioritairement » servir aux projets visés à l'article 48 et non pas leur être exclusivement consacrés, en d'autres termes que nous aurons à les utiliser exclusivement pour l'investissement et prioritairement - et non exclusivement - dans le domaine économique.
Lorsque, pour construire une école, j'utilise ces fonds, je crée de l'emploi, puisque je fais travailler l'industrie du bâtiment. Sans ces crédits, je ne pourrais pas faire construire l'école.
Lorsque, pour aménager des chemins, j'utilise ces fonds, j'investis dans la création d'emplois, car je favorise la desserte des élevages et des exploitations de canne à sucre ou de banane.
Je demande donc à Mme la ministre de bien préciser le sens du mot « prioritairement », pour que nous ne soyons pas gênés ensuite par le contrôle de l'égalité, parfois trop pointilleux.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Brigitte Girardin, ministre. Je veux rassurer M. Jean-Paul Virapoullé sur les deux points qu'il a soulevés.
Si les crédits du FRDE ne sont pas intégralement consommés, c'est essentiellement parce que les communes ne présentent pas de demandes et, si elles ne le font pas, c'est en effet en raison du caractère jusqu'à présent trop contraignant que revêtait leur utilisation.
Notre objectif est donc bien d'élargir l'emploi du FRDE afin de supprimer cet effet limitatif. Cela étant, en élargissant les possibilités d'emploi, nous souhaitons également éviter toutes les dérives.
Je vous le confirme donc, les crédits seront affectés uniquement au budget d'investissement des communes, sous forme de dotations d'investissement, sans dérapage possible, sans dérive vers ce qui ne relèverait pas de l'investissement. Bien sûr, cela exige de fixer des priorités - ce sont celles que vous connaissez -, et de procéder avec un maximum de souplesse pour que les crédits soient consommés.
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par Mme Payet, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du 2° du I de cet article par les mots :
ou à l'alimentation d'une dotation régionale destinée à faciliter le désenclavement économique par une aide au coût d'acheminement des intrants.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Cet amendement vise à élargir les possibilités d'affectation de la part régionale du FRDE aux entreprises qui subissent une hausse substantielle de leur coût de production liée à l'acheminement des intrants.
Pour situer l'enjeu et la portée de cet amendement, je rappelle la situation toute particulière de la Réunion, situation qui est largement déterminée par le cumul de handicaps structurels dont la persistance et la combinaison nuisent gravement au développement de l'île et la placent dans un état de fragilité économique et sociale beaucoup plus marquée que celle des autres régions de l'Union européenne.
Eloignement, insularité, faible superficie, relief et climat difficiles, dépendance à l'égard d'un certain nombre de produits, phénomènes naturels perturbants - cyclones, éruptions volcaniques -, tout cela a des conséquences directes en termes de coût et donc de rentabilité des entreprises.
L'éloignement entrave de manière significative la libre circulation des personnes, des biens et des services. La dépendance à l'égard du transport aérien et maritime est accrue par la libéralisation imparfaite de ces modes de transport. S'agissant de modes de transport moins efficaces et plus onéreux que la route, le rail ou les réseaux transeuropéens, ils ont des conséquences directes sur les coûts de production.
Je ne vous citerai qu'un exemple, que je tire du rapport sur les régions ultrapériphériques publié en 2003 et signé par notre collègue M. Jean-Paul Virapoullé. Ce dernier, au terme d'un savant calcul, a montré que le coût du transport d'un conteneur de la métropole vers la Réunion, soit une distance de 10 000 kilomètres, correspond au coût de transport d'un conteneur par camion sur une distance de 58 000 kilomètres !
La dépendance à l'égard des matières premières et de l'énergie nécessite la constitution de stocks plus importants qu'en métropole, ce qui est à l'origine de surcoûts, tandis que la capacité de production est entravée par les difficultés d'approvisionnement en biens d'équipement.
La faible dimension du marché local combinée à une activité exportatrice peu développée en raison de l'éloignement par rapport à l'Europe ainsi que la faiblesse du pouvoir d'achat des pays de la zone rendent obligatoire le maintien de lignes de production diversifiées mais limitées en volume, ce qui réduit les possibilités d'économies d'échelle.
La quasi-impossibilité de recourir à la sous-traitance oblige par ailleurs les entreprises à mettre en place des équipes de maintenance dont elles assurent préalablement la formation, ce qui augmente leurs charges récurrentes et influe de ce fait sur leur compétitivité.
Dans ce contexte, la compensation des surcoûts du fret sur les intrants industriels constitue l'une des mesures de réduction des handicaps et d'amélioration de la compétitivité des entreprises de production à mettre en oeuvre.
Je rappelle, en outre, que, dans ce même rapport, M. Virapoullé signale qu'en Guadeloupe et en Guyane de tels mécanismes de compensation existent déjà par le biais du FEDER, le Fonds européen de développement régional, qui finance une partie de l'aide à l'acheminement des intrants. Il n'en est pas de même pour la Réunion.
Ce sont toutes ces raisons qui m'ont poussée à déposer l'amendement n°1.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Roland du Luart, rapporteur. Nous sommes tout à fait conscients des difficultés particulières liées à l'enclavement économique, conséquence de l'éloignement des départements d'outre-mer, et des difficultés propres à la géographie. Mme Payet a donc le mérite de poser une vraie question. Cependant, je me permets deux observations.
La première est qu'un tel régime d'aide au transport nécessiterait en tout état de cause une notification aux autorités communautaires. Nous sommes donc face à une impossibilité juridique.
La seconde est qu'il existe déjà des mécanismes, notamment de baisse des charges, qui visent à permettre de développer les transports et qui doivent encore faire leur preuve.
En conséquence, madame Payet, je souhaiterais que vous retiriez votre amendement, mais soyez assurée que, comme Mme la ministre, je suis particulièrement attentif aux problèmes du transport et de la continuité territoriale, que nous avons abordés lors de l'examen de ce qui allait devenir la loi de programme pour l'outre-mer.
Il faut certes que, tous ensemble, nous progressions dans ce domaine, mais, dans le cadre du présent projet de loi, je ne peux que vous demander avec insistance le retrait de votre amendement, ma chère collègue.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin, ministre. Le Gouvernement partage totalement vos préoccupations, madame Payet, mais nous butons en effet sur un problème juridique, à savoir la nécessité de notifier à la Commission européenne un tel régime si nous l'adoptions aujourd'hui, ce qui remettrait en cause la présente procédure législative.
Je voudrais cependant faire une réflexion plus générale sur ce problème dont nous sommes saisis depuis un certain temps déjà et qui, il faut le dire, ne se pose réellement qu'à la Réunion.
Les autres régions d'outre-mer, pour financer les surcoûts liés aux intrants, ont en effet recours aux fonds structurels européens, et non aux FRDE. Une réflexion s'impose peut-être à la Réunion sur ce point afin que l'on parvienne à trouver d'autres moyens de mobiliser les ressources nécessaires.
Nous sommes conscients de ce problème, qu'il faut régler ; mais le mécanisme du FRDE n'est sans doute pas le plus approprié pour ce faire et, en tout cas, nous mettrait aujourd'hui dans une difficulté considérable.
Peut-être le sujet devrait-il être revu d'une autre façon, et peut-être pourrions-nous nous inspirer des solutions adoptées dans les trois autres régions d'outre-mer.
M. le président. L'amendement n° 1 est-il maintenu, madame Payet ?
Mme Anne-Marie Payet. Je le retire, monsieur le président.
En déposant l'amendement n° 1, j'ai voulu attirer l'attention sur ce problème : j'espère que le président de ma région, qui est présent parmi nous, saura s'inspirer des dispositifs en vigueur dans les autres régions !
M. le président. L'amendement n° 1 est retiré.
L'amendement n° 14, présenté par M. Othily, est ainsi libellé :
Compléter le I de cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Les ressources disponibles du fonds régional pour le développement et l'emploi peuvent être affectées, par délibération du conseil régional, à l'alimentation d'une aide régionale destinée à faciliter l'accès des entreprises aux marchés extérieurs par le biais d'une prise en charge d'une partie du coût du fret maritime ou aérien des marchandises exportées.
La parole est à M. Georges Othily.
M. Georges Othily. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 14 est retiré.
Je mets aux voix l'article 48.
(L'article 48 est adopté.)
Article 48 bis
Les montants non engagés par les régions au titre du fonds régional pour le développement et l'emploi depuis sa création jusqu'au 31 décembre 2003 sont répartis entre les communes et utilisés conformément aux dispositions de l'article 48. Ces montants sont versés aux communes par tranches à raison d'un tiers par an en 2005, 2006 et 2007. Les versements interviennent en quatre fois chaque année, au plus tard le 31 mars, le 31 juillet, le 30 septembre et le 31 décembre.
Les ressources du fonds régional pour le développement et l'emploi encaissées par les régions en 2004 qui n'ont pas fait l'objet d'un engagement au 31 décembre 2004 sont versées en 2005 aux communes, au plus tard le 30 janvier 2005, et utilisées selon les modalités de l'article 48.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 9 est présenté par M. Lise et les membres du groupe socialiste.
L'amendement n° 13 est présenté par M. Vergès.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Claude Lise, pour présenter l'amendement n° 9.
M. Claude Lise. Cet amendement vise à supprimer un article aux termes duquel serait imposée de manière rétroactive l'affectation aux communes des sommes non engagées depuis dix ans au titre du fonds régional pour le développement de l'emploi.
Je vois dans cet article une atteinte à l'autonomie de gestion des collectivités régionales ; il me paraît par ailleurs très dangereux d'admettre ainsi un dispositif législatif à effet rétroactif ; enfin, son application risquerait d'entraîner des problèmes de trésorerie qui, pour certaines de ces collectivités, pourraient même être graves.
M. le président. La parole est à M. Paul Vergès, pour présenter l'amendement n° 13.
M. Paul Vergès. Cet amendement vise à supprimer l'article 48 bis, qui prévoit que « les montants non engagés par les régions au titre du fonds régional pour le développement et l'emploi depuis sa création jusqu'au 31 décembre 2003 sont répartis entre les communes et utilisés conformément aux dispositions de l'article 48 ».
Les dispositions de cet article soulèvent quelques interrogations, sur le plan même des principes.
Bien que ces dispositions bouleversent l'économie générale du texte et du dispositif, les collectivités concernées, consultées sur le projet de loi, n'ont pu les évaluer puisqu'elles ont été introduites par voie d'amendement parlementaire. Sur ce point précis, madame la ministre, vous ne connaissez pas l'avis des collectivités locales normalement saisies.
Ces dispositions présentent un caractère rétroactif, qui, comme vient de l'exposer mon collègue M. Lise, est contraire aux principes de l'annualité budgétaire.
Elles s'opposent aux budgets et aux comptes administratifs votés par les régions, qui encadrent leurs politiques budgétaires et financières.
Enfin, ces dispositions éloignent davantage l'utilisation de ce fonds de sa finalité, qui était le développement de l'économie et de l'emploi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Roland du Luart, rapporteur. Le problème des stocks du FRDE est ancien, et il en a été longuement question lors de l'examen à l'Assemblée nationale de l'amendement qui est à l'origine de l'article 48 bis.
Je voudrais revenir sur les chiffres - et j'ai pu constater à quel point ils étaient difficiles à obtenir et, quelquefois, sujets à caution : les crédits non consommés s'élèvent à 107 millions d'euros à la Réunion, à 24 millions d'euros en Guyane et à 6 millions d'euros en Martinique ; le reliquat est nul en Guadeloupe.
Le système actuel a montré ses limites, malgré les adaptations successives. Face à cette situation, la majorité comme l'opposition ont adopté à l'Assemblée nationale un amendement à l'article 48 qui permet de redistribuer 80 % des fonds aux communes.
Je vois mal, pour ma part, comment on peut, d'un côté, reconnaître que le système ne fonctionnait pas et, de l'autre, refuser la redistribution, étalée sur trois années. Aurait-il fallu maintenir une disposition spécifique précisant que le stock restait régi par des règles anciennes ?
La position adoptée à l'Assemblée nationale me paraît vraiment être la bonne : elle permettra de donner vite des moyens aux communes, d'entrer rapidement dans le nouveau système et, de plus - c'est un élément de réponse important à la question de M. Vergès -, que la redistribution soit prévue sur trois ans, évitant ainsi aux régions d'être confrontées à des problèmes de trésorerie. Vous avouerez que le FRDE n'avait pas pour objet d'assurer la trésorerie des régions !
En réponse à M. Lise, qui a abordé le problème de la rétroactivité, je voudrais souligner, au nom de la commission des finances, que la rétroactivité, hélas ! n'a pas été inventée ce soir par le gouvernement actuel, ni même par les gouvernements précédents !
Je suis donc défavorable à ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Brigitte Girardin, ministre. Je répondrai aux trois critiques que j'ai entendues sur ce sujet.
Je rappellerai que la loi peut toujours comporter des dispositions rétroactives, contrairement au règlement. Seules des sanctions pénales plus sévères ne peuvent pas avoir de caractère rétroactif.
Sur l'annualité budgétaire, seules les dépenses non engagées au 31 décembre 2003 seront versées aux communes, à concurrence d'un tiers par an sur trois années à partir de 2005. L'exécution budgétaire de l'exercice 2003 n'est donc pas remise en cause, et les ressources encaissées en 2004 au titre des FRDE pourront être versées par les régions aux communes. Seules les dépenses éventuellement non engagées au titre des FRDE au 31 décembre 2004 seront versées directement aux communes au début de l'année 2005.
Enfin, je ne vois pas en quoi le principe de libre administration serait remis en cause, car les ressources du FRDE ont vocation à être versées aux communes : elles ne constituent pas une recette libre d'emploi pour les régions, qui n'agissent ici que comme gestionnaires d'un fonds.
Il n'y a donc pas lieu d'invoquer en l'espèce le principe de libre administration. Bien au contraire, on rend au fonds sa vocation première, qui est d'être au service de l'investissement des communes, au profit desquelles se trouve donc renforcé ce même principe.
M. le président. La parole est à Mme Lucette Michaux-Chevry, pour explication de vote.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Je souhaiterais que Mme la ministre me rassure en m'apportant une précision.
Lorsqu'une collectivité vote son compte administratif, les restes à réaliser sont reportés sur l'exercice suivant. Cependant, si on les prend intégralement, et même si on est d'accord sur la répartition, comment les comptes administratifs, qui ont été votés et notifiés au préfet sans que celui-ci ait fait d'observations sur l'affectation réelle de ce fonds, seront-ils définitivement stabilisés ?
Si Mme la ministre peut répondre à cette question, je ne voterai pas ces amendements ; sinon, je serai inquiète.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Brigitte Girardin, ministre. Sur la révision des comptes, je rappelle que c'est dans les comptes de 2004 que se traduira l'effet de la loi, puisque ce sont ceux-là qui auront repris les reports de FRDE. L'absence d'utilisation en 2003 et avant 2003 a été constatée et cela ne change rien à la procédure qui est mise en place.
Mme Lucette Michaux-Chevry. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 9 et 13.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 48 bis.
(L'article 48 bis est adopté.)
TITRE III
DISPOSITIONS FINALES
Article 49
Les dispositions du titre Ier ne s'appliquent pas aux communes de Saint-Barthélemy et Saint-Martin. - (Adopté.)
Article 50
Un décret fixe, en tant que de besoin, les modalités d'application de la présente loi, notamment celles :
1° De la section 2 du chapitre IV du titre Ier, en particulier pour ce qui concerne les régularisations auxquelles les assujettis peuvent procéder, les délais de dépôt des demandes de remboursement et les seuils applicables à ces demandes ;
2° Du chapitre VII du titre Ier relatif aux obligations déclaratives auxquelles sont soumises les personnes assujetties à l'octroi de mer à raison des opérations réalisées conformément au 2° de l'article 1er, en particulier pour ce qui concerne le contenu des déclarations ainsi que les conditions et délais dans lesquels elles doivent être remises à l'administration, notamment en cas de cession ou de cessation d'activité ;
3° Des articles 30, 37 et 38 ;
4° et 5° Supprimés. - (Adopté.)
Article 51
La loi n° 92-676 du 17 juillet 1992 relative à l'octroi de mer et portant mise en oeuvre de la décision du conseil des ministres des Communautés européennes n° 89-688 du 22 décembre 1989 est abrogée à compter du 31 juillet 2004.
Dans l'avant-dernier alinéa (6°) de l'article L. 3332-1 du code général des collectivités territoriales, les mots : « la loi n° 92-676 du 17 juillet 1992 relative à l'octroi de mer et portant mise en oeuvre de la décision du Conseil des ministres des Communautés européennes n° 89-688 du 22 décembre 1989 » sont remplacés par les mots : « la loi n° ... du ... relative à l'octroi de mer ». - (Adopté.)
Article 52
Les dispositions de la présente loi entrent en vigueur à compter du 1er août 2004. - (Adopté.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Roland du Luart, rapporteur. Je tiens à remercier Mme la ministre et tous nos collègues ici présents de l'unanimité qui s'est exprimée et qui paraît fondamentale sur un sujet aussi important, sujet complexe mais majeur pour assurer des ressources aux communes d'outre-mer.
C'est sans doute le regard que Colbert jette sur nous depuis le centre de l'hémicycle qui nous a permis de trouver un consensus, et je l'en remercie. Il est tout de même très intéressant de voir que le droit fiscal français assure aujourd'hui la pérennité à une mesure prise en 1663, abolie à la Révolution et rétablie en 1819. J'espère, pour répondre au souci de M. Virapoullé, qu'elle sera toujours en vigueur après 2014, compte tenu de la façon constructive dont nous avons abordé la question.
Je saluerai aussi, c'est une innovation, l'étroite collaboration entre la commission des lois de l'Assemblée nationale et la commission des finances du Sénat pour aboutir à un texte conforme qui permette de résoudre avant le 1er août 2004 un problème en suspens depuis trop longtemps.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ? ...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté à l'unanimité.)