L'article L. 132-23 du code du travail est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« En matière de salaires minima, de classifications, de garanties collectives mentionnées à l'article L. 912-1 du code de la sécurité sociale et de mutualisation des fonds recueillis au titre du livre IX du présent code, la convention ou l'accord d'entreprise ou d'établissement ne peut comporter des clauses dérogeant à celles des conventions de branche ou accords professionnels ou interprofessionnels.
« Dans les autres matières, la convention ou l'accord d'entreprise ou d'établissement peut comporter des dispositions dérogeant en tout ou en partie à celles qui sont applicables en vertu d'une convention ou d'un accord couvrant un champ territorial ou professionnel plus large, sauf si cette convention ou cet accord en dispose autrement. »
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, sur l'article.
M. Roland Muzeau. Monsieur le ministre, votre projet de loi met en question, et de façon radicale, la protection générale des salariés, les droits qu'ils ont acquis hier et leur devenir.
Vous n'avez pas révélé la vérité sur votre texte ni lors de vos auditions par la commission, ni lors des débats à l'Assemblée nationale, ni dans votre discours introductif aux débats du Sénat.
Je souhaite démontrer quelle serait la véritable portée de votre texte s'il était adopté. Pour ce faire, je prendrai appui sur deux jugements, l'un du tribunal de grande instance de Paris, rendu le 14 mai 2002, l'autre, confirmant le premier, de la cour d'appel de Paris en date du 24 septembre 2003.
Cette affaire opposait les parties demanderesses représentant la CGT, FO, la CGC et la CFTC à la Fédération française des sociétés d'assurances, la FFSA, à la CFDT-Assurance et au Groupement des entreprises mutuelles d'assurance.
Il est à noter d'ailleurs que la FFSA était représentée par le cabinet Bélier et associés, celui-là même qui a défendu en commission le texte commun au MEDEF et au Gouvernement.
Quel était le fond du désaccord ?
Les fédérations CFE-CGC et CFTC se sont opposées à l'entrée en vigueur d'un avenant à leur convention collective.
Elles ont fait valoir que cet avenant était illicite, dès lors qu'il consacre le principe selon lequel un accord d'entreprise antérieur ou postérieur à l'accord de branche peut contenir des dispositions contraires à celui-ci et moins favorables au salarié, et confère à la convention collective un caractère supplétif, ce qui est contraire aux dispositions légales et aux principes généraux du droit du travail.
Dix domaines de la convention collective de 1992 avaient été réduits par le biais de l'avenant incriminé, ce qui nous éclaire sur nos débats. Il s'agit de la hiérarchie des normes, du deuxième jour de repos hebdomadaire, des congés payés des cadres, des conditions de travail des personnels de gardiennage et de sécurité, des salaires des standards, des heures supplémentaires, de la durée du travail, des jours fériés et des astreintes, de la rémunération minimale et de la formation.
Sur tous ces points, le principe de faveur, qui est d'ordre public, était bafoué, et l'article L. 132-23 du code du travail ignoré.
Aux termes de cet article : « La convention ou les accords d'entreprise ou d'établissements peuvent adapter les dispositions des conventions de branche ou des accords professionnels ou interprofessionnels applicables dans l'entreprise aux conditions particulières de celle-ci ou des établissements considérés. La convention ou les accords peuvent comporter des dispositions nouvelles et des clauses plus favorables aux salariés. »
L'accord d'entreprise ne peut, en application de ce texte qui met en oeuvre le principe de faveur, lequel est d'ordre public, contenir des dispositions moins favorables aux salariés que l'accord de branche, qu'il a seulement la faculté de compléter par des dispositions nouvelles et d'améliorer.
Les parties ne peuvent, par la voie de l'accord collectif, écarter l'application de ce texte, auquel seule la loi peut déroger.
Il est important de souligner que l'accord du 31 octobre 1995 sur la négociation collective ne peut fonder une dérogation à ces dispositions ; que la circonstance que d'autres accords aient permis la mise en oeuvre d'un mécanisme identique à celui qui est critiqué est inopérante ; que la position qu'a pu prendre l'administration dans des circulaires est également sans incidence sur la solution du litige ;
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. C'est l'ancien texte !
M. Roland Muzeau. ... enfin, que la déclaration commune du 16 juillet 2001 est dépourvue de valeur normative.
En prévoyant que certaines de ses clauses ne s'appliquent qu'à défaut de dispositions différentes résultant d'un accord d'entreprise ou d'établissement, l'avenant méconnaît l'article L. 132-23 susvisé, ainsi que le principe, d'ordre public, de l'effet impératif des conventions collectives consacrées par l'article L. 135-2 du code du travail.
Monsieur le ministre, cet exemple préfigure les conséquences qu'entraînerait votre texte s'il était adopté. La FFSA, qui a perdu en appel, aurait probablement connu un tout autre sort si nous avions délibéré plus tôt.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Mais bien sûr !
M. Roland Muzeau. Ce texte et les dispositions qu'il contient, je le répète, sont réellement de nature à remettre en cause le principe de faveur et l'ordre public social.
Lors de son audition, M. Belier a tenu des propos étonnants. Permettez-moi, comme tout le monde, une citation : « Je pense avant toute chose qu'il faut éviter de dire que déroger est forcément moins favorable. Si nous conservons cette terminologie, nous assisterons à un effet d'annonce qui sera très dommageable. » Bel aveu ! Pourtant, ce texte, c'est cela, monsieur Fillon !
M. le président. Veuillez conclure, monsieur Muzeau.
M. Roland Muzeau. Je termine, monsieur le président.
Enfin, M. Bélier s'indigne et déclare : « Comment peut-on considérer que les partenaires sociaux, les syndicalistes d'une entreprise, vont négocier au-dessous de la branche ? Pour ma part, je n'ai jamais vu cela. »
Dans un contexte particulier d'entreprise, l'environnement économique, par exemple, peut considérablement peser sur ce que vous appelez le dialogue social et conduire à ce que le « donnant-donnant » soit catastrophique pour les salariés.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Chabroux.
M. Gilbert Chabroux. J'ai abondamment cité le MEDEF,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous l'aimez bien !
M. Gilbert Chabroux. ... qui a inspiré ce texte.
Je citerai à présent des syndicalistes et particulièrement le président de la CFTC, qui qualifie cette réforme du dialogue social de « folie douce ».
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Quelle référence !
M. François Fillon, ministre. L'appréciation est mesurée !
M. Gilbert Chabroux. Je reprendrai quelques-unes de ses expressions et je les compléterai.
Qui peut comprendre cette réforme ? C'est vrai qu'elle est assez hermétique : les mécanismes que vous voulez mettre en oeuvre, monsieur le ministre, sont très compliqués.
Qui peut en percevoir les implications sur les congés, les horaires de travail ou les modalités de licenciement ? Personne ou presque, excepté les experts et les initiés ! Mais les salariés ne tarderont pas à découvrir ce qui les attend.
Si ce texte est voté en l'état, chaque salarié devra craindre pour ses conditions de travail et de rémunération. Cette loi laisse en effet le champ libre à la négociation d'entreprise, en ne préservant que les minima sociaux,...
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Oui !
M. Gilbert Chabroux. ... les classifications et la prévoyance et, faudra-t-il désormais ajouter, la formation.
M. Jean Chérioux, rapporteur. Eh oui !
M. Gilbert Chabroux. Elle rend négociable tout le reste ! M. Denis Gautier-Sauvagnac, que je cite de nouveau, nous a déclaré lors de son audition : « Le principe de faveur, c'est pratiquement fini ! »
Qu'est-ce que cela signifie ? Que veut dire « négociation d'entreprise » ? Cela signifie malheureusement moins d'avantages pour les salariés, car toutes les entreprises, surtout les petites et les moyennes, n'ont pas de délégués syndicaux. Mes chers collègues, en France, seuls 10 % d'entre elles comptent des délégués du personnel. Lorsqu'il y en a, ils ne peuvent pas toujours faire valoir les droits des salariés, le rapport de force leur étant défavorable, face à un patronat de moins en moins conciliant.
Ainsi M. Guillaume Sarkozy, vice-président du MEDEF, n'hésite pas à dire : « Je suis fier d'être un patron qui délocalise ; je peux fermer mes usines. » Il est aisé, pour un chef d'entreprise, de pousser un salarié à négocier dans son sens, en vue d'un petit « arrangement maison ». Quelle sera alors la réalité de ce dialogue social new look, si l'on peut parler ainsi, dans les entreprises de cinq à dix salariés ?
Le projet de loi déverrouille les accords de branche en permettant à l'entreprise, sous couvert d'accords dits « majoritaires », de contourner les conventions collectives qui protègent aujourd'hui les salariés. Finalement, si ce texte est appliqué, les salariés n'auront plus comme protection que le droit commun, que l'on s'apprête par ailleurs à réformer - et tout porte à croire qu'il le sera dans un sens favorable au MEDEF -, ou le socle sommaire de réglementation sociale établi à l'échelon européen : les onze heures de repos quotidien minimal, les huit heures de travail par jour pour les jeunes apprentis de moins de dix-huit ans, l'obligation de reclasser les salariées enceintes sur un poste de jour quand elles sont employées de nuit. Cela s'arrêtera là !
La loi ne s'appliquera pas, en principe, aux conventions collectives existantes. Mais, en pratique, tout bon juriste patronal pourra lancer une procédure de dénonciation des conventions collectives actuelles pour les négocier à la sauce « dialogue social », en permettant aux entreprises d'obtenir les dérogations qu'elles souhaitent !
Prenons quelques exemples très concrets pour illustrer les conséquences auxquelles va aboutir ce texte. Imaginons qu'une convention collective établisse qu'en haute saison les horaires ne peuvent pas dépasser quarante-deux heures par semaine : ce verrou de protection pourra allégrement sauter, car l'entreprise pourra renégocier les horaires sur la base des plafonds prévus dans la loi, soit quarante-quatre, quarante-six, voire, dans certains cas, quarante-huit heures hebdomadaires.
M. Roland Muzeau. Eh oui !
M. Gilbert Chabroux. Deuxième exemple : imaginons qu'un cadre moyen ou commercial itinérant soit amené à prendre des journées de RTT pour conduire son enfant chez le médecin. Là encore, ses après-midi libres pourront, je cite M. Jacques Voisin, « lui passer sous le nez » ; voire, si la branche est court-circuitée - car elle peutl'être -, l'entreprise aura la possibilité de définir si le cadre fait partie de cette catégorie de cadres au forfait dont elle rêve. (Marques d'impatience sur les travées de l'UMP.)
Plusieurs sénateurs de l'UMP. Votre temps de parole est épuisé !
M. Gilbert Chabroux. Troisième exemple : imaginons qu'un salarié prenne deux jours de congé pour se rendre à l'enterrement d'un proche. (Nouvelles marques d'impatience sur les mêmes travées.) La même punition est possible ! Les congés pour événements familiaux, d'ordinaire régis par l'accord de branche ou par la convention collective, pourront être revisités à la baisse.
Enfin, imaginons qu'un salarié craignant d'être licencié après quinze ans d'ancienneté compte sur les indemnités majorées prévues dans la convention collective pour faire face. Il risque d'avoir tout faux. C'est dramatique ! La loi propose en tout et pour tout deux mois de préavis et moins de deux mois de salaire !
La dénonciation, en 1998, de la convention collective nationale du secteur bancaire est l'exemple même de ce qui risque de se produire.
M. le président. Concluez, monsieur Chabroux !
M. Gilbert Chabroux. J'en termine, monsieur le président. (Protestations sur les mêmes travées.)
Vraiment, est-ce au MEDEF qu'il appartient de dicter aux pouvoirs publics leur projet pour la France ? (Exclamations sur les mêmes travées.) Evidemment, non !
M. Nicola About, président de la commission des affaires sociales. Pas plus qu'à M. Blondel !
M. Gilbert Chabroux. A l'heure où notre pays, fragilisé, cherche sa voie dans un monde qui se transforme anarchiquement sous l'emprise des lois du marché, il faut appeler au dialogue social, mais pas à celui que l'on nous propose ou que l'on nous impose, tant il ressemble à un monologue déguisé qui trace une ligne factice entre ceux qui savent ce qui est bon pour la France et les autres !
M. Laurent Béteille. Pour le monologue, vous êtes bon !
M. Gilbert Chabroux. Comment peut-on soutenir qu'une entreprise va bien alors qu'elle licencie,...
M. le président. Monsieur Chabroux, je suis obligé de vous arrêter : votre temps de parole est épuisé.
M. Gilbert Chabroux. ... affirmer que la croissance est à nos portes alors que le chômage et les déficits augmentent, prétendre que la France retrouve une dynamique de succès alors que les inégalités s'accroissent et que six millions de personnes perçoivent des minima sociaux ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. Je suis saisi de seize amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 137 est présenté par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté.
L'amendement n° 172 est présenté par M. Muzeau, Mme Demessine, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
Les onze amendements suivants sont présentés par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté.
L'amendement n° 138 est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, supprimer le mot : "minima". »
L'amendement n° 139 est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, après le mot : "classifications", insérer les mots : ", d'indemnités de licenciement". »
L'amendement n° 140 est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, après le mot : "classifications", insérer les mots : ", de jours fériés". »
L'amendement n° 141 est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, après le mot : "classifications", insérer les mots : ", d'ancienneté". »
L'amendement n° 142 est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, après le mot : "classifications", insérer les mots : ", d'allocation-maladie". »
L'amendement n° 143 est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, après le mot : "classifications", insérer les mots : ", d'organisation du temps de travail, notamment du travail de nuit et de travaux par roulement, et de contingent annuel d'heures supplémentaires". »
L'amendement n° 144 est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, après le mot : "classifications", insérer les mots : ", de congés pour événement de famille". »
L'amendement n° 145, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, après le mot : "classifications", insérer les mots : ", d'horaire de travail". »
L'amendement n° 146, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, après le mot : "classifications", insérer les mots : ", de temps partiel". »
L'amendement n° 147, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, remplacer les mots : "mutualisation des fonds recueillis au titre du" par les mots : "celles mentionnées au". »
L'amendement n° 148, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, supprimer les mots : "ou d'établissement". »
L'amendement n° 206, présenté par MM. Mercier, Vanlerenberghe et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, remplacer les mots : "peut comporter des dispositions dérogeant en tout ou en partie" par les mots : "ne peut pas comporter de dispositions dérogeant". »
L'amendement n° 49, présenté par M. Chérioux, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, après les mots : "à celles qui", insérer le mot : "lui". »
L'amendement n° 149, présenté par M. Chabroux, Mme Printz, MM. Sueur, Weber et Plancade, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« A la fin du second alinéa du texte proposé par cet article pour compléter l'article L. 132-23 du code du travail, remplacer les mots : "sauf si cette convention ou cet accord en disposent autrement" par les mots : "si cette convention ou cet accord l'autorise expressément". »
La parole est à M. Gilbert Chabroux, pour présenter l'amendement n° 137.
M. Gilbert Chabroux. Cet amendement vise à supprimer l'article 37, dont l'objet est encore de remettre en cause la hiérarchie des normes entre accords d'entreprise et accords de branche ou accords professionnels, et qui pose un double problème juridique.
Sur le plan juridique, comme l'a excellemment démontré notre collègue Henri Weber mardi soir, cet article va à l'encontre d'un principe général du droit : le principe de faveur, ce qui, conformément à l'article 34 de la Constitution, met en jeu la pleine compétence du législateur. Or disposons-nous encore de nos propres compétences quand nous en renvoyons l'exercice aux partenaires sociaux ? Non ! Je le répète : nous n'exerçons pas les compétences qui nous sont confiées par la Constitution en ne faisant pas respecter la mise en oeuvre d'un principe général du droit, en l'occurrence le principe de faveur.
Quant à la portée pratique de cet article, elle s'apparente à un cataclysme, puisque l'accord d'entreprise ou même d'établissement pourra désormais déroger à tout ou presque : c'est une remise en cause potentielle de tout le contenu de la législation sociale.
A cet égard, les exceptions que le MEDEF feint de généreusement consentir sont éclairantes : les salaires minima, les classifications, les garanties de prévoyance et, maintenant, la formation.
L'exemple le plus frappant est celui des salaires. On ne peut pas, officiellement, déroger au SMIC. Pourtant, depuis des décennies, plusieurs dizaines de minima conventionnels sont inférieurs au SMIC. De plus, 14 % des salariés sont rémunérés au SMIC ou aux minima conventionnels, soit 2 150 000 salariés, la proportion atteignant 33 % dans les petites entreprises. Or, monsieur le ministre, vous nous proposez que seuls ces salariés soient protégés dans leur entreprise !
En 2002, date de la dernière statistique publiée, la négociation salariale de branche a connu un recul de 10 %, ce qui est important. Vous ne nous proposez pas d'inciter les branches à poursuivre les négociations sur les bas salaires ni d'inciter les employeurs à réduire la précarité !
Quant aux garanties collectives de prévoyance, vous ne pouvez les inclure dans les possibilités de dérogation : étant donné que les garanties portant sur le financement des retraires complémentaires et de prévoyance sont peu à peu réduites, vous êtes obligé d'en maintenir certaines autres, afin que les salariés continuent à bénéficier d'une couverture minimale. Vous réduisez la garantie au strict minimum, c'est-à-dire à ce à quoi le MEDEF ne peut de toute façon pas déroger : la loi !
Ainsi, l'objectif est atteint : entre l'employeur et le salarié, il n'y a plus que la loi, réduite à son strict minimum, et le contrat. Où allons-nous ?
M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, pour présenter l'amendement n° 172.
M. Roland Muzeau. Depuis le début de ce débat, les penseurs ultralibéraux que vous êtes tentent de nous persuader que le principe de faveur n'est plus d'actualité. Certes, il n'a pas de valeur constitutionnelle, mais il s'impose tout de même en tant que principe général du droit. Je rappelle que, depuis 1936, il a permis la construction et le renforcement d'un socle de droits accompagnant l'essor économique et a contribué à la réduction des inégalités, notamment entre les grandes et les petites entreprises !
Plus exactement, vous avez essayé de nous convaincre que le principe de faveur ne serait plus adapté aux réalités économiques modernes, aux exigences de souplesse du marché. Comment ce principe de la hiérarchie des normes, ce principe de faveur, ne pourrait-il plus s'appliquer à la France d'aujourd'hui, quatrième puissance économique mondiale ? D'aucuns, des juristes, cherchent à justifier la révolution que vous mettez en marche, monsieur le ministre, par la grande incertitude qu'aurait fait naître la combinaison contre nature, disent-ils, du principe hiérarchique et du principe de faveur, et ils vous invitent à aller encore plus loin dans votre logique !
Nous considérons qu'en remettant en cause la hiérarchie des sources entre convention de branche et accord d'entreprise vous consacrez pour les parties la liberté, chère au MEDEF, de définir la portée des accords de niveau supérieur sur les accords d'entreprise. Cette faculté générale de déroger à la norme supérieure dans tous les domaines où le code du travail renvoie pour son application à l'accord de branche est déjà, à elle seule, énorme !
Vous m'objecterez, monsieur le ministre, que, dans quatre matières, cette règle générale de dérogation ne s'applique pas. A l'inverse, cela signifie que, dans l'ensemble des autres domaines, l'accord de branche, pour conserver sa nature impérative, devra expressément interdire que l'accord d'entreprise puisse contenir des dispositions moins favorables aux salariés. Dans mon intervention précédente, j'en citais dix exemples.
C'est bien là l'essentiel de votre réforme. L'entreprise, niveau décentralisé de négociation, devient le lieu où les négociations se dérouleront en fonction de la situation économique de l'entité économique, le lieu où seront remis en cause les acquis à travers des accords immanquablement gagnant-perdant - inutile que je précise en faveur de qui !
Je le redis avec force, monsieur le ministre : nous croyons au rôle et à la place de la loi pour garantir des règles identiques quel que soit le lieu où travaille le salarié. Nous sommes attachés au mécanisme par lequel les droits des salariés sont garantis interprofessionnellement, tout en étant améliorés, spécifiés, au niveau des branches et mis en oeuvre à l'échelon des entreprises. C'est la principale raison de fond justifiant le présent amendement de suppression de l'article.
Il en existe d'autres, non moins importantes, telles que le manque d'intérêt que présentera désormais la négociation de branche si les normes édictées ne sont que supplétives, ou encore l'inertie, dangereuse pour la démocratie sociale. Il y a, surtout, les risques de dumping économique et social, « la convention de réglementation professionnelle de branche [ayant] pour raison d'être d'unifier les conditions de concurrence au sein d'une même activité économique, en sorte que la concurrence s'exerce sur d'autres points que le coût global du travail », comme l'a rappelé Gérard Lyon-Caen dans un article concis mais sans appel paru dans la revue Droit social de décembre dernier et prenant la forme d'un réquisitoire contre « l'idée d'une négociation d'entreprise entièrement déconnectée de l'ensemble du système juridique, ce qui conduirait à une nouvelle féodalité ».
Telles sont les observations que je souhaitais formuler à l'appui de l'amendement n° 172, sur lequel je demande un scrutin public.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Chabroux, pour défendre les amendements n°s 138 à 148.
M. Gilbert Chabroux. Je souhaite rappeler les divers acquis sociaux, et durement obtenus qui, si le projet de loi est appliqué, risquent d'être remis en cause.
L'amendement n° 138 porte sur la garantie des salaires et sur l'adjectif « minima » qui leur est appliqué et que nous voulons supprimer.
Il est clair, monsieur le ministre, que vous ne pouviez pas prévoir dans le projet de loi la possibilité de déroger aux salaires minima : outre qu'elle aurait été d'une illégalité flagrante, une pareille disposition aurait conduit à un dumping social d'une telle violence que les entreprises auraient eu quelque difficulté à recruter. Seul le revenu minimum d'activité, le RMA, qui met les personnes en difficulté à la disposition des entreprises pour une somme dérisoire, peut permettre de contourner cet obstacle et de donner son plein essor au moins-disant social.
Mais la présence du terme « minima » dans le texte signifie ou peut laisser penser que des dérogations pourraient exister pour les autres niveaux de salaires ainsi que pour les accessoires : on pense évidemment au treizième mois, aux primes et aux indemnités, qui pourront - ou pourraient - être supprimés par l'accord d'entreprise, et ce sans aucun recours.
L'amendement n° 139 concerne les indemnités de licenciement, autre avantage qui serait remis en question, et a pour objet de rendre impossible toute dérogation en la matière. Le plancher légal des indemnités est d'ailleurs à ce point faible...
M. Roland Muzeau. Ah oui !
M. Gilbert Chabroux. ... qu'il est souvent dépassé par toutes les branches qui ont conclu des accords sur ce point.
Le code du travail prévoit un dixième de salaire mensuel par année d'ancienneté, avec une augmentation du pourcentage après dix ans d'ancienneté. Qui, aujourd'hui, peut se prévaloir de dix ans d'ancienneté dans une entreprise ?
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Même pas nous !
M. Gilbert Chabroux. Au demeurant, les accords de branche, compte tenu de la carence de la loi dans ce domaine, sont indispensables pour assurer aux salariés qui sont licenciés pour raisons économiques une indemnité au moins décente. Dès lors, vous nous permettrez de nous interroger sur la dérogation que le Gouvernement veut mettre en place et qui représenterait une pénalité financière venant s'ajouter à la difficulté de se retrouver sans emploi, dans le contexte actuel, avec des allocations de chômage diminuées dans le temps.
Nous savons fort bien que le MEDEF est opposé à toute augmentation des cotisations chômage, dont, au contraire, il demande régulièrement la diminution : cela nous fait très sérieusement craindre que la dérogation ne soit le prochain vecteur de la baisse des cotisations patronales et n'induise une pénalisation supplémentaire des salariés.
L'amendement n° 140, qui traite des jours fériés, important dans la mesure où la quasi-totalité des salariés pensent que les jours fériés sont légalement chômés et payés. Hélas, ils se trompent ! Ils vont bientôt découvrir que seul le 1er-Mai entre dans ce cas de figure et que les autres jours fériés peuvent légalement être travaillés, y compris sans compensation. Il reste donc une marge !
Ce sont en effet les conventions collectives qui ont fixé l'usage en la matière. Or des accords d'entreprise vont pouvoir demain déroger à l'usage et prévoir que les jours fériés, s'ils sont chômés, ne seront plus payés ou moins payés. Rien ne l'interdira formellement !
A partir de 2005, déjà, les salariés vont perdre un jour férié de par la loi, et l'on peut raisonnablement penser que cette mesure va induire une révision des conventions collectives, révision qui, n'étant plus antérieure à la loi, pourra utiliser cette possibilité de dérogation. Le risque nous paraît extrêmement sérieux.
Nous proposons donc, compte tenu de la prochaine évolution législative et de ses conséquences possibles, de rédiger précisément la loi sur ce point, afin de donner un minimum de garanties aux salariés.
L'amendement n° 141 vise à introduire toute dérogation aux dispositions portant sur l'ancienneté. Outre les possibilités ouvertes en matière de salaire pour tenir compte de l'expérience des salariés qui persistent dans certains secteurs, les accords relatifs à l'ancienneté prévoient l'octroi d'une prime ou de jours de congé supplémentaires, en général une journée au bout de dix ans et deux après quinze ans.
Nous avons eu le regret de constater que, dans certaines branches, les employeurs ont su mettre à profit les négociations relatives à la réduction du temps de travail pour supprimer ces jours de congés : une telle possibilité existe dès aujourd'hui, et la situation ne pourra que s'aggraver lorsque cette nouvelle loi entrera en application.
Si l'on y ajoute la disparition prévue du lundi de Pentrecôte comme jour férié, on voit bien qu'il est difficile d'évaluer le profit réel qu'en retirera la nation ; l'avantage retiré par les employeurs, lui, finit par être réellement intéressant !
Il convient par conséquent de mettre un terme à cette tendance qui conduit à une perte non négligeable de pouvoir d'achat des salariés et porte atteinte au retour, que nous espérons tous, de la croissance.
L'amendement n° 142 vise le délai de carence de trois jours en cas d'arrêt maladie.
Je rappelle, mais vous le savez tous, que, en cas d'arrêt maladie, le salarié ne perçoit pas de rémunération les trois premiers jours, bien que ceux-ci lui aient été régulièrement octroyés par un médecin : lorsque les salariés sont payés, c'est que les conventions collectives ou les accords d'entreprise le prévoient. Qu'en sera-t-il dans l'avenir ?
Cette question vous a déjà été posée à l'Assemblée nationale. Malheureusement, monsieur le ministre, vous n'y avez pas répondu. Nous sommes tout disposés à recevoir vos assurances sur ce point.
L'amendement n° 143 aborde le problème du contingent annuel d'heures supplémentaires. Contrairement à ce que l'on croit généralement, les horaires de travail atypiques - le travail posté, le travail de nuit, le travail par roulement, le travail en continu - ne relèvent pas exclusivement du domaine de la loi ou du règlement, puisqu'ils peuvent aussi être autorisés par la convention collective et, surtout, par un accord d'entreprise ou d'établissement non frappé d'opposition. Nous sommes donc de plain-pied dans le champ des possibles conséquences du projet de loi.
Si nous abordons ce sujet, c'est parce que les horaires atypiques ont une très grave incidence sur la santé des salariés. Ils provoquent des dérèglements du sommeil, une fatigue anormale, des troubles nerveux, ils sont, en un mot, une cause d'accidents du travail et de maladies professionnelles, lesquelles sont, comme vous le savez tous, mes chers collègues, en très sensible augmentation.
Il est donc dans l'intérêt des salariés et, accessoirement, des employeurs qui cotisent à la branche accidents du travail - maladies professionnelles de la sécurité sociale de ne pas aggraver la situation à cet égard. Il importe que les garanties prévues par les branches ou par les seules entreprises en matière de compensation salariale ou de repos compensateurs soient maintenues.
Or nous avons quelques inquiétudes sur ce point, puisque, dans de trop nombreux cas, la garantie relève seulement de l'échelon de l'entreprise. C'est dire si le risque est grand qu'un employeur prenne prétexte d'une concurrence exacerbée pour imposer un accord qui développerait les horaires atypiques ou les heures supplémentaires, avec toutes les conséquences néfastes qui en découleraient. Comme la gangrène, ce mode de dumping social ne tarderait pas à se répandre dans l'ensemble du monde économique, ce qui entraînerait une considérable aggravation des conditions de travail et des menaces sur la santé des salariés. Nous souhaiterions là encore, monsieur le ministre, que vous puissiez nous éclairer.
L'amendement n° 144, tend à exclure les clauses dérogatoires en matière de congés pour événement de famille.
Le code du travail est d'une extrême discrétion sur ce sujet et ne prévoit que quatre jours de congé pour le mariage du salarié, trois jours pour la naissance d'un enfant, deux jours pour le décès du conjoint, un jour pour le mariage d'un enfant du salarié - le cas du mariage d'un enfant du conjoint n'est pas visé - et un jour pour le décès du père ou de la mère du salarié.
Si ces dispositions n'ont pas été modifiées jusqu'à présent, c'est tout simplement parce que l'on s'en est remis aux conventions collectives et aux accords dans les grandes entreprises, infiniment plus généreux, un jour de congé pour déménagement étant même accordé dans la plupart des cas, ce qui n'est évidemment pas excessif.
Cependant, le vent de réforme qui souffle désormais en tempête sur les structures mêmes du droit du travail nous fait craindre un prochain effondrement de l'édifice. (M. Paul Dubrule s'exclame.) Parfaitement, mes chers collègues !
Il est regrettable que cette question n'ait pas été abordée jusqu'à présent et que l'on ait laissé ainsi subsister dans le code du travail des dispositions a minima. C'est pourquoi, dans un esprit humaniste - nous en sommes tous imprégnés ! - nous demandons que les congés pour événement de famille ne puissent faire l'objet de clauses dérogatoires.
L'amendement n° 145 concerne, quant à lui, les horaires de travail. Là aussi, nous voudrions que des protections, des garanties soient apportées, notamment pour les salariés dont les horaires de travail sont atypiques et sont répartis selon des emplois du temps « à trous », pour dire les choses simplement. Si ces horaires ne sont pas nécessairement trop lourds, l'amplitude journalière est, quant à elle, excessive et parfaitement insupportable.
Le problème touche particulièrement le secteur de la distribution, où il est demandé aux salariés, qui sont généralement des femmes, d'être présents aux heures d'affluence de la clientèle. Cela est certes logique d'un point de vue commercial, mais impose non seulement une présence des salariés les vendredis et les samedis sur une grande amplitude de temps, mais aussi des horaires éclatés entre le milieu de la journée et le début de soirée les autres jours. A cela viennent s'ajouter les « nocturnes », pour lesquelles la présence du personnel est souhaitée.
Il résulte de cette organisation des journées de travail hachées, avec des temps de transport et des périodes d'attente entre deux plages de travail souvent très longs, qui rallongent d'autant la journée.
De plus, les personnes concernées sont très souvent employées sous contrats à durée déterminée et à temps partiel, ce qui ajoute à la pénibilité de leurs conditions de vie.
Nous avions mis à profit, je le rappelle, une négociation sur la réduction du temps de travail pour aborder cette question et oeuvrer avec les partenaires des branches à la résolution du problème. Nous voudrions que ce travail, qui a donné des résultats, ne soit pas anéanti et que les branches, et surtout les entreprises, ne puissent pas profiter de la latitude nouvelle qui leur sera laissée pour revenir à la situation antérieure.
L'amendement n° 146, a trait à l'organisation du travail à temps partiel. La liste des avantages qui risquent d'être remis en question est décidément longue !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il en manque encore, pourtant, puisqu'il n'y a dans vos propos rien sur la santé, rien sur la sécurité ! Vous ne pensez qu'à l'argent.
M. Gilbert Chabroux. En effet, il en manque encore ! Ce sera un véritable cataclysme ! J'ai parlé d'humanisme, monsieur About, mais vous n'avez pas suivi !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Vous n'en avez pas parlé en présentant les amendements !
M. Roland Muzeau. Déposez-en ! Vous en avez le droit !
M. Gilbert Chabroux. Nous aimerions vous entendre, en effet !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Nous faisons confiance au texte !
M. Roland Muzeau. Il balance tout par-dessus bord !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Chabroux !
M. Gilbert Chabroux. L'amendement n° 146 vise donc à assurer un minimum de protection aux travailleurs à temps partiel, sachant que, dans l'immense majorité des cas, cette forme d'emploi est subie et non pas choisie. Il est important de ne pas laisser se dégrader les conditions de travail des salariés concernés, qui sont, pour 80 % d'entre eux, des femmes.
Dans la plupart des situations, ces dernières perçoivent des salaires relativement bas et doivent supporter des conditions de travail peu enviables, pénibles, du fait notamment des horaires hachés. Par conséquent, permettre une remise en question de l'organisation même du travail à temps partiel, qui est la forme majoritaire d'emploi dans la grande distribution, accentuerait une précarité déjà existante et contribuerait sans nul doute à aggraver les conditions de vie des salariés et de leurs familles. Il est indispensable d'oeuvrer non à la précarisation, mais bien à l'amélioration desdits emplois. Je parle ici non pas d'argent, monsieur About, mais de conditions de travail et de vie. J'exprime des préoccupations humanistes.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Il s'agit tout de même aussi d'argent dans cette affaire !
M. Gilbert Chabroux. Il faut bien payer un peu !
Le projet de loi dont nous débattons est décidément une curiosité : non seulement parce qu'il comporte deux parties n'ayant aucun rapport entre elles, mais aussi parce que, si l'on nous propose d'inscrire dans la législation le fruit d'un accord interprofessionnel approuvé à l'unanimité par les partenaires sociaux, ce qui est un motif de satisfaction, on nous demande en outre d'acquiescer à la démolition des structures du droit du travail et surtout à la perte de valeur des conventions et accords collectifs, dont on nous chante les louanges par ailleurs ! Où est la cohérence ?
S'agissant de l'amendement n° 147, nous proposons que les garanties relatives à la formation professionnelle que nous avons déjà prévues soient au moins épargnées. Le texte ne vise en effet que les aspects financiers - je vous rejoins sur ce point, monsieur About ! - et il pourrait en résulter que les conditions d'application de l'accord, sinon de la loi, soient affectées par des dérogations. Nous n'entendons pas que l'on prenne le risque de détruire aujourd'hui le dispositif que nous avons élaboré hier et qui n'est pas encore définitivement adopté. J'en appelle à la cohérence de la démarche.
Enfin, par l'amendement n° 148, nous proposons d'exclure que des accords d'établissement puissent comporter des dispositions dérogatoires à celles d'une convention ou d'un accord couvrant un champ territorial ou professionnel plus large. Cela serait en effet particulièrement dangereux dans le cas de dérogations dont le sens n'est plus a priori garanti. C'est ici le cas de figure inverse de celui de la loi relative à la réduction du temps de travail, qui prévoyait que l'on puisse améliorer par cette voie la condition des salariés. Il peut déjà exister des différences entre salariés au sein d'une même entreprise, mais le dispositif présenté risque d'aggraver encore cette situation et d'engendrer de véritables inégalités.
M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, pour présenter l'amendement n° 206.
M. Jean Boyer. Cet amendement vise à modifier la rédaction présentée pour le second des deux alinéas destinés à compléter l'article L. 132-23 du code du travail.
Les accords d'entreprise ne doivent pas pouvoir déroger à l'accord de branche, sauf stipulation expresse de ce dernier.
M. le président. La parole est à M. Jean Chérioux, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 49.
M. Jean Chérioux, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de précision.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Chabroux, pour présenter l'amendement n° 149.
M. Gilbert Chabroux. La dérogation, je le redis, ne peut devenir la règle.
L'amendement n° 149 participe de la même logique que ceux que j'ai déjà présentés. A l'échelon de l'entreprise, il n'est pas admissible que la possibilité de dérogation soit instituée en principe sans que l'on sache exactement quel peut être le contenu de cette dernière. Par la rédaction actuelle de l'article, qui vise à instaurer un champ dérogatoire immense et aux limites mal définies, on entreprend de détruire le code du travail.
Pour notre part, nous souhaitons que les négociateurs définissent expressément les thèmes pour lesquels des dérogations pourront jouer. Cela procède de la nécessaire clarification due à l'ensemble des salariés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean Chérioux, rapporteur. Mes chers collègues, quelle vision apocalyptique ! Quel chaos !
M. Roland Muzeau. Vous avez compris !
M. Jean Chérioux, rapporteur. Quel sort funeste est réservé à ces malheureux salariés, si l'on en croit M. Chabroux ! Le plus extraordinaire est que, selon M. Chabroux, cela tient au fait que la loi va les livrer aux accords de branche et d'entreprise. C'est bien ce que vous avez dit tout à l'heure, mon cher collègue ! Cela signifie donc que, à vos yeux, les partenaires sociaux seraient incapables de négocier des accords de branche garantissant les droits des salariés ! Dans ces conditions, à quoi servent les syndicats ?
Vous affirmez que les salariés seront livrés à l'arbitraire ! Quelle est l'utilité des négociations collectives si tout doit être déterminé par la loi ? Vraiment je ne comprends pas votre logique : finalement, depuis le début de ce débat, vous ne cessez de vous en prendre aux syndicats, de mettre en doute leur capacité à négocier et à parvenir à des résultats !
M. Gilbert Chabroux. Je me méfie du MEDEF !
M. Jean Chérioux, rapporteur. Vous vous défiez des partenaires sociaux et des syndicats ; pour notre part, au contraire, nous leur faisons confiance, et c'est pour cette raison que nous soutenons ce texte ! La preuve de votre méfiance à l'égard des syndicats est que lorsque vous êtes au pouvoir, vous ne les consultez pas ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Cela prouve que vous ne vous fiez pas à ce qu'ils vous disent ! (M. Roland Muzeau brandit un document.)
M. Gilbert Chabroux. J'ai largement cité M. Voisin !
M. Jean Chérioux, rapporteur. Vous pouvez brandir tous les documents que vous voulez, cela ne servira à rien, monsieur Muzeau ! (M. Roland Muzeau s'exclame.)
Permettez que je m'exprime, monsieur Muzeau ! Je ne vous ai pas interrompu tout à l'heure, et Dieu sait pourtant que j'en ai eu parfois l'envie ! (Sourires.) Mais je vous ai laissé parler, car pour ma part j'ai un certain sens de la démocratie !
M. Gilbert Chabroux. Restez calme, ne vous énervez pas !
M. Roland Muzeau. Je veux seulement nourrir le débat ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean Chérioux, rapporteur. Vous l'encombrez, le débat !
M. Gilbert Chabroux. On peut s'en aller, si vous voulez ! Il ne restera que vous !
M. Jean Chérioux, rapporteur. J'en viens aux amendements n°s 137 et 172, qui visent à supprimer l'article 37.
Je rappelle que le principe d'une plus grande autonomie de l'accord d'entreprise a été inscrit dans la Position commune, document qui a été signé par les syndicats. Peut-être est-ce la raison pour laquelle vous faites si peu de cas de ce principe !
J'indique que le projet de loi comporte déjà plusieurs « verrous ». Vous avez beaucoup cité mon rapport, mes chers collègues : lisez-le sur ce point, ce sera extrêmement instructif !
Ces « verrous » devraient être de nature à apaiser certaines de vos craintes, à moins que vous n'ayez des idées préconçues, ce que je me refuse à penser !
Premier « verrou » : l'accord de branche aura vocation à délimiter le champ des dérogations. Evidemment, vous vous méfiez, puisque ce sont les syndicats qui négocieront ces accords !
Deuxième "verrou" : les signataires de l'accord d'entreprise resteront bien entendu libres d'en déterminer le contenu. Là encore, tout repose sur des négociations, auxquelles participeront des représentants des salariés, des délégués syndicaux. Mais vous n'avez confiance ni dans les syndicats ni dans les salariés, que vous tenez vraiment en piètre estime ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mais oui, puisque vous ne leur faites pas confiance ! Ils sont pourtant capables de se défendre, tout de même ! Vous n'avez confiance ni dans les salariés ni dans les syndicats !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. M. le rapporteur a raison !
M. Jean Chérioux, rapporteur. Vous les considérez comme des incapables, comme des mineurs ! C'est pourquoi il serait nécessaire, selon vous, de les encadrer, de les enfermer à l'intérieur d'un système censé les protéger. Vous pensez qu'ils ne sauront pas se défendre eux-mêmes ! (M. le président de la commission des affaires sociales applaudit.)
Eh bien si, ils savent se défendre, et nous en sommes heureux et fiers ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. Jean-Pierre Plancade. Nous n'avons vraiment pas les mêmes idées que vous, c'est sûr !
M. Jean Chérioux, rapporteur. Troisième « verrou » : à l'article 39 du projet de loi, il est prévu la non-rétroactivité des nouvelles dispositions. Vous n'en faites pas état ! Cela signifie que les accords qui seront conclus dans le cadre du nouveau dispositif ne remettront pas en cause la valeur hiérarchique accordée par leurs signataires aux conventions et accords signés avant l'entrée en vigueur de la loi. Vous avez affirmé que nous aurions ouvert un épouvantable chantier de démolition : c'est faux !
M. Gilbert Chabroux. Et les conventions collectives ?
M. Jean Chérioux, rapporteur. C'est là un dispositif de sécurisation des accords conclus avant l'entrée en vigueur de la loi.
A cet égard, le risque de dénonciation des accords ainsi sécurisés qui a été évoqué apparaît bien mince, de l'avis même des partenaires sociaux et des experts que nous avons interrogés. Vous les avez entendus comme nous, mais bien entendu vous ne les citez pas !
M. Roland Muzeau. Ils dépendent tous du patronat !
M. Jean Chérioux, rapporteur. En effet, la procédure de dénonciation est particulièrement lourde et aléatoire.
Quatrième « verrou » : l'article 34 du projet de loi prévoit que les accords de branche et les accords d'entreprise devront être conclus selon le principe majoritaire. C'est tout de même une avancée par rapport à la situation que nous connaissons aujourd'hui, où il suffit que l'accord ait été signé par un seul syndicat ! Il faudrait que vous l'admettiez !
Enfin, cinquième « verrou » : quatre domaines de négociation sont définis pour lesquels l'accord de branche restera impératif, c'est-à-dire qu'une partie de l'ordre social public est maintenue. Nous en sommes fort satisfaits, et cela correspond, je le rappelle, au souhait des signataires de la Position commune.
Par conséquent, la commission a bien évidemment émis un avis défavorable sur les amendements identiques n°s 137 et 172.
M. Christian de La Malène. Très bien !
M. Jean Chérioux, rapporteur. L'amendement n° 138 paraît quant à lui inutile. Dans la mesure où l'article 37 interdit toute dérogation en matière de salaires minima et de classifications, la préoccupation exprimée par les auteurs de l'amendement est déjà prise en compte. Même lorsque nous adoptons une position de nature à apaiser vos craintes, mes chers collègues, vous émettez des doutes ! Vous ne faites confiance à personne : ni à vos collègues, ni aux salariés, ni aux syndicats ! Vous n'avez confiance qu'en vous-mêmes, mais peut-être avez-vous tort ! (Applaudissements et rires sur les travées de l'UMP. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Roland Muzeau. Certains d'entre nous sont issus du monde syndical !
M. Jean Chérioux, rapporteur. La commission est donc défavorable à l'amendement n° 138.
Les amendements n°s 139, 140, 141, 142, 143, 144, 145, 146, 147 et 148 constituent en fait une déclinaison d'une même logique. Peut-être s'agit-il, avec ce « découpage », d'allonger quelque peu le débat... (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Gilbert Chabroux. Mais non !
M. Jean Chérioux, rapporteur. Mais si, et c'est de bonne guerre !
En tout cas, ces amendements méritent le même sort que les précédents. La commission y est défavorable.
Quant à l'amendement n° 206, la commission a considéré qu'il est contraire à la logique du texte et à sa propre position. Par conséquent, la commission n'a pu émettre un avis favorable, cela va de soi. Elle souhaiterait que M. Jean Boyer accepte de retirer son amendement.
M. Guy Fischer. Il va le faire !
M. Jean Chérioux, rapporteur. Enfin, la commission est défavorable à l'amendement n° 149.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. François Fillon, ministre. Quel est l'objet de l'article 37 ? Il vise à reprendre dans la loi très exactement les termes de la Position commune. Dans sa page 2, celle-ci dispose : « En outre, un certain nombre de limites peuvent tenir à l'objet de la négociation, comme c'est le cas des mécanismes de mutualisation inter-entreprises, des classifications et des minima de branche par exemple, au degré d'homogénéité des entreprises comprises dans le champ de la négociation ou au souci des signataires de garantir l'équilibre des parties à la négociation. »
Chacun constatera que le Gouvernement est allé plus loin que la Position commune, puisque nous, nous avons décidé d'inscrire dans la loi les sujets qui ne peuvent pas être soumis à l'application des autres règles du texte. Nous sommes donc, en termes de garanties, un peu au-delà de l'équilibre auquel les partenaires sociaux eux-mêmes étaient parvenus dans la Position commune.
Dans ces conditions, vous comprendrez que je sollicite le rejet de tous les amendements visant à rajouter des sujets que la Position commune n'avait pas prévus. C'est le cas des amendements n°s 137, 172, 138, 139, 140, 141, 142, 143, 144, 145, 146 et 147.
En ce qui concerne l'amendement n° 148, monsieur Chabroux, le code du travail ne distingue pas les accords d'entreprise et les accords d'établissement. D'ailleurs, il y a un bel exemple : c'est la loi du 19 janvier 2000 sur la RTT qui prévoyait que l'accord de RTT était soit un accord d'entreprise, soit un accord d'établissement. De même, la négociation annuelle prévue par le code peut avoir lieu dans un établissement.
Dans son argumentation, M. Chabroux a semblé ignorer que la négociation collective au sein d'un établissement distinct permet d'établir des différences de traitement entre les salariés d'une même entreprise, et ce depuis 1982. Nous ne souhaitons pas a priori que ces différences de traitement se développent. Mais on peut tout de même concevoir que, dans un établissement où existent par exemple des sujétions particulières, il y ait des avantages particuliers par rapport à d'autres établissements. Nous faisons confiance aux négociateurs syndicaux dans les branches et dans les entreprises pour déterminer le meilleur niveau de négociation, dans le respect des règles de négociation posées par la jurisprudence. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement n° 148.
S'agissant de l'amendement n° 206, je souhaiterais, comme M. le rapporteur, que M. Boyer le retire. Ainsi qu'il a pu le constater, cet amendement se place dans une logique radicalement différente de celle de la Position commune, puisqu'il vise, au fond, à inverser les termes de l'équilibre trouvé par cette dernière.
Concernant l'amendement n° 49, le Gouvernement émet un avis favorable.
En revanche, il est défavorable à l'amendement n° 149.
M. le président. Monsieur Jean Boyer, l'amendement n° 206 est-il maintenu ?
M. Jean Boyer. Non, monsieur le président, je le retire.
M. Roland Muzeau. C'est le double jeu de Bayrou !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Non, c'est une grande sagesse !
M. le président. L'amendement n° 206 est retiré.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 137 et 172.
M. Jean-Pierre Sueur. Je voudrais d'abord faire une observation par rapport aux propos de M. le rapporteur. M. Chérioux a en effet déclaré tout à l'heure, et cela figurera dans le compte rendu des débats, que plusieurs d'entre nous - si j'ai bien compris, situés du côté gauche de l'hémicycle - encombraient le débat. (M. Jean Chérioux, rapporteur, proteste.) C'est ce que nous avons entendu ! C'est ce que vous avez dit !
M. Jean Chérioux, rapporteur. Cela figurera dans le compte rendu des débats : je l'ai dit à propos de certains ajouts...
M. le président. Monsieur le rapporteur, il vaut mieux que vous laissiez M. Sueur terminer son propos ; vous prendrez la parole ensuite.
Veuillez poursuivre, monsieur Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Je vous remercie, monsieur le président.
La parole est libre et il peut arriver que certains propos dépassent la pensée de celui qui les tient, j'en conviens volontiers.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Cela vous est arrivé !
M. Jean-Pierre Sueur. Je pense avoir entendu, comme tout le monde,...
M. Claude Estier. Absolument !
M. Jean-Pierre Sueur. ... que les propos de M. le rapporteur portaient non pas sur telle ou telle disposition,...
M. Jean Chérioux, rapporteur. Mais si !
M. Jean-Pierre Sueur. ... mais sur un certain nombre de sénateurs, qui « encombraient » le débat. Je lui ferai observer que nous participons au débat. D'ailleurs, si les sénateurs de gauche n'« encombraient » pas le débat, il n'y aurait pas de débat du tout !
M. Roland Muzeau. Effectivement !
M. Jean-Pierre Sueur. Il est vrai que, du côté de l'UMP, on ne peut pas dire qu'il y ait un encombrement manifeste du débat !
M. Jean-Pierre Plancade. Même quand un membre de l'Union centriste intervient, il est renvoyé dans les cordes !
M. Jean-Pierre Sueur. Voilà la remarque préalable que je souhaitais formuler.
M. le président. Vous avez la parole, monsieur le rapporteur, pour répondre sur ce point à l'orateur.
M. Jean Chérioux, rapporteur. Comme toujours, vous me faites dire ce que je n'ai pas dit. D'ailleurs, il en est de même s'agissant des textes. Je n'ai pas dit que les orateurs de l'opposition encombraient le débat ! (Si ! sur les travées du groupe CRC.) Mais non ! Ce serait absurde ! J'ai parlé d'encombrement au moment où j'étais interrompu par des vociférations et par certains de nos collègues qui brandissaient des papiers ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Roland Muzeau. Mais non !
M. Jean Chérioux, rapporteur. Il ne s'agissait que de cela ! Je le précise afin que cela soit porté au procès-verbal, pour contredire l'interprétation malveillante que vous avez faite de mes propos !
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Je voudrais faire observer que l'article 37 du projet de loi est difficilement compatible avec l'article 34 de la Constitution qui - M. Henri Weber l'a évoqué voilà quelques jours - indique clairement que la loi détermine les principes fondamentaux du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale. A nos yeux, les règles de la négociation et, surtout, la hiérarchie des normes en matière de négociation font incontestablement partie des principes généraux du droit auxquels le Parlement doit veiller, et qu'il a même vocation, en vertu de la Constitution, à définir.
Or ce que vous mettez en place ici - et vous le savez bien, monsieur le ministre -, c'est une désintégration de ce principe. Vous remettez en cause non pas telle ou telle disposition, mais l'organisation même en vertu de laquelle il existe une cohérence du droit du travail dans notre pays. A partir de ce moment-là, il est clair que, dans chaque entreprise, on sera fondé à déroger sur presque tout.
Je citerai un extrait du rapport de M. Robineau, conseiller d'Etat - vous avez également, monsieur le ministre, en plusieurs circonstances, fait référence à ce rapport auquel on fait dire aussi un certain nombre de choses où il est précisé : « Le Parlement méconnaîtrait sa propre compétence si l'ampleur du champ ouvert à la négociation dérogatoire par branche ou par entreprise conduisait à restreindre à l'excès le tronc commun du droit du travail d'application uniforme sur le plan national que sont les principes fondamentaux visés à l'article 34 de la Constitution. »
Les choses sont très clairement formulées ! L'article 34, en vertu de l'analyse de cet éminent juriste, implique un tronc commun du droit du travail d'application uniforme sur le plan national. Il est clair qu'avec l'article 37 vous restreignez à l'excès le champ d'application du droit du travail. C'est pourquoi nous considérons qu'il faut supprimer cet article. C'est également pourquoi nous soutenons tous les amendements présentés par M. Chabroux. Je crains, malheureusement, qu'ils ne soient refusés, comme ils l'ont été à l'Assemblée nationale. Mais réfléchissons-y.
Ces amendements portent tous sur des points importants de la vie sociale, de la vie dans les entreprises, des droits des salariés, des accords qui ont été passés sur des points essentiels.
Vous citez trois cas dans lesquels il ne pourrait pas y avoir de dérogation au niveau de l'entreprise, mais ce faisant, par soustraction, si je puis dire, vous démontrez par l'absurde qu'il en est beaucoup d'autres, ceux justement qui sont énumérés dans les amendements présentés par M. Chabroux, qui échappent complètement au dispositif.
A partir de là, on est dans le non-principe. Ce que vous érigez, c'est le principe en vertu duquel il n'y a plus de principe qui s'applique, et c'est donc la négation du droit. C'est pourquoi nous voterons contre cet article, en soulignant l'extrême gravité que présenterait son adoption. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 137 et 172.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu).
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du
scrutin n° 144
:
Nombre de votants | 319 |
Nombre de suffrages exprimés | 317 |
Pour | 112 |
Contre | 205 |
Je mets aux voix l'amendement n° 138.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 139.
(L'amendement n'est plus adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 140.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 141.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 142.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 143.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 144.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 145.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 146.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 147.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 148.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 149.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 37, modifié.
(L'article 37 est adopté.)