M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour un rappel au règlement.
M. Jacques Mahéas. Il se crée une atmosphère inhabituelle d'invectives entre le ministre de l'intérieur et le groupe socialiste. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Alain Gournac. Qui a commencé ?
M. Jacques Mahéas. En effet, lorsque Michel Dreyfus-Schmidt a employé le qualificatif « grotesque », le ministre a été outré. Je me suis donc fait remettre le compte rendu analytique du 9 octobre 2003 où figure la réponse de M. le ministre à mon intervention. Je vous en donne lecture : « Grotesque... »
M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'était mérité !
M. Jacques Mahéas. « ... pardon de vous interrompre, mais votre argumentation est grotesque... »
M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'était deux fois mérité, monsieur Mahéas !
M. Jacques Mahéas. « Il est donc grotesque... » Vous avez employé trois fois le mot « grotesque » !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Et cela en mérite une quatrième !
M. Jacques Mahéas. Ne faites pas ce que vous n'admettez pas des autres, monsieur le ministre. Nos débats y gagneront en sérénité !
Il est rétabli, après l'article 21 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, un article 21 bis ainsi rédigé :
« Art. 21 bis. - I. - Les infractions prévues au I de l'article 21 sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 750 000 EUR d'amende :
« 1° Lorsqu'elles sont commises en bande organisée ;
« 2° Lorsqu'elles sont commises dans des circonstances qui exposent directement les étrangers à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;
« 3° Lorsqu'elles ont pour effet de soumettre les étrangers à des conditions de vie, de transport, de travail ou d'hébergement incompatibles avec la dignité de la personne humaine ;
« 4° Lorsqu'elles sont commises au moyen d'une habilitation ou d'un titre de circulation en zone réservée d'un aérodrome ;
« 5° Lorsqu'elles ont comme effet, pour des mineurs étrangers, de les éloigner de leur milieu familial ou de leur environnement traditionnel.
« II. - Outre les peines complémentaires prévues au II de l'article 21, les personnes physiques condamnées au titre des infractions visées au I du présent article encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis.
« III. - Les étrangers condamnés au titre de l'un des délits prévus au I encourent également l'interdiction définitive du territoire français, dans les conditions prévues par les articles 131-30 à 131-30-2 du code pénal. »
M. le président. L'amendement n° 29, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Compléter le 4° du I du texte proposé par cet article pour l'article 21 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée par les mots : "ou d'un port". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. La commission du délit d'aide à l'entrée ou au séjour irrégulier au moyen d'une habilitation ou d'un titre de circulation en zone réservée d'un aérodrome est une circonstance aggravante. L'amendement étend cette circonstance aux zones réservées des ports.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 29.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article n° 17, modifié.
(L'article 17 est adopté.)
L'article 21 ter de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « de l'infraction à l'article 21 » sont remplacés par les mots : « des infractions prévues aux articles 21 et 21 bis » ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de condamnation pour les infractions prévues au I de l'article 21 bis, le tribunal pourra prononcer la confiscation de tout ou partie des biens des personnes morales condamnées, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. » - (Adopté.)
Après l'article 21 ter de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, il est inséré un article 21 quater ainsi rédigé :
« Art. 21 quater. - I. - Le fait de contracter un mariage aux seules fins d'obtenir, ou de faire obtenir, un titre de séjour, ou aux seules fins d'acquérir, ou de faire acquérir, la nationalité française est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende.
« Ces mêmes peines sont applicables en cas d'organisation ou de tentative d'organisation d'un mariage aux mêmes fins.
« Elles sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 750 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée.
« Les personnes physiques coupables de l'une ou l'autre des infractions visées au présent article encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° L'interdiction de séjour pour une durée de cinq ans au plus ;
« 2° L'interdiction du territoire français, dans les conditions prévues par les articles 131-30 à 131-30-2 du code pénal, pour une durée de dix ans au plus ou à titre définitif ;
« 3° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer l'activité professionnelle ou sociale à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise, sous les réserves mentionnées à l'article 131-27 du code pénal.
« Les personnes physiques condamnées au titre de l'infraction visée au troisième alinéa du présent I encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis.
« II. - Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, des infractions prévues aux deuxième et troisième alinéas du I du présent article.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;
« 2° Les peines mentionnées aux 1° , 2° , 3° , 4° , 5° et 9° de l'article 131-39 du code pénal.
« L'interdiction visée au 2° de l'article 131-39 du même code porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise.
« Les personnes morales condamnées au titre de l'infraction visée au troisième alinéa du I encourent également la peine de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 262, présenté par M. Bret, Mmes Borvo, Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 30 rectifié, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par cet article pour l'article 21 quater de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 :
« Art. 21 quater. - I. - Le fait de contracter un mariage aux seules fins d'obtenir, ou de faire obtenir, un titre de séjour, ou aux seules fins d'acquérir, ou de faire acquérir, la nationalité française est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 15 000 EUR d'amende. Ces mêmes peines sont applicables en cas d'organisation ou de tentative d'organisation d'un mariage aux mêmes fins.
« Elles sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 300 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée.
« Les personnes physiques coupables de l'une ou l'autre des infractions visées au présent article encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° L'interdiction de séjour pour une durée de cinq ans au plus ;
« 2° L'interdiction du territoire français, dans les conditions prévues par les articles 131-30 à 131-30-2 du code pénal, pour une durée de dix ans au plus ou à titre définitif ;
« 3° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer l'activité professionnelle ou sociale à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise, sous les réserves mentionnées à l'article 131-27 du code pénal.
« Les personnes physiques condamnées au titre de l'infraction visée au troisième alinéa du présent I encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis.
« II. _ Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, des infractions prévues aux deuxième et troisième alinéas du I du présent article.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;
« 2° Les peines mentionnées aux 1°, 2°, 3°, 4°, 5° et 9° de l'article 131-39 du code pénal ;
« L'interdiction visée au 2° de l'article 131-39 du même code porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise.
« Les personnes morales condamnées au titre de l'infraction visée au troisième alinéa du I encourent également la peine de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. »
La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 262.
Mme Nicole Borvo. Nous reparlons des mariages, puisque l'article 19 crée un nouveau délit pour réprimer le fait de contracter ou d'organiser un mariage dans le seul but d'obtenir un titre de séjour.
Comme si cela ne suffisait pas, les sanctions ont été étendues à l'Assemblée nationale par M. Mariani à ceux qui contractent un mariage aux seules fins d'acquérir ou de faire acquérir la nationalité française.
Bien sûr, je ne dis pas qu'il ne faut pas lutter contre les réseaux qui organisent des unions dans de telles conditions, mais il faudrait au moins que nous disposions d'un état des lieux. En effet, comme en matière de délinquance, nous manquons cruellement de chiffres précis sur ces « mariages blancs ». A combien peut-on estimer le nombre des mariages de complaisance organisés chaque année ? Et qu'en est-il exactement de l'importance et de l'implantation des réseaux que vous évoquez, monsieur le ministre ?
J'estime, pour ma part, qu'appréhender les mariages mixtes sous un angle uniquement répressif, ainsi que vous le faites, c'est un peu court et, que vous l'admettiez ou non, quelle que soit votre intention, cela ne fait que jeter la suspicion sur tous les mariages mixtes, voire sur tous les couples mixtes. C'est pourquoi nous considérons qu'il s'agit d'une disposition stigmatisante.
En fin de compte, ceux qui seront inquiétés, ce ne sont pas les réseaux, mais bel et bien tous ceux qui souhaiteront s'unir en toute liberté avec une personne qui n'est pas de leur nationalité.
Cette disposition est non seulement inutile mais aussi disproportionnée.
Inutile, car les tribunaux ont déjà les moyens de réprimer les faits visés en poursuivant les intéressés pour aide au séjour irrégulier, l'étranger en situation irrégulière étant quant à lui poursuivi pour séjour irrégulier : c'est l'article 21 de l'ordonnance de 1945.
J'ajoute que, s'agissant de réprimer les réseaux qui organisent des mariages frauduleux, le même article de cette ordonnance prévoit déjà une aggravation des sanctions si l'infraction a été commise en bande organisée : dix ans d'emprisonnement et 750 000 euros d'amende.
Commençons par appliquer la loi existante avant de la réformer inutilement. Cela est d'ailleurs vrai dans beaucoup des autres domaines que nous abordons depuis quelque temps sur l'initiative du Gouvernement.
Cette mesure est, de plus, disproportionnée. A tel point d'ailleurs que M. le rapporteur a dû revoir le montant des amendes prévues par le texte initial, et acceptées par l'Assemblée nationale, pour les diviser par deux !
Il convient en outre de souligner que les mariages de complaisance ne concernent pas uniquement les étrangers voulant obtenir un titre de séjour ou la nationalité française. En effet, qui n'a jamais entendu parler de mariages de complaisance entre Français pour obtenir tel ou tel avantage ? Il faut considérer qu'il s'agit d'un délit et le sanctionner en conséquence. Or, en l'espèce, les « mariés complaisants » ne risquent que l'annulation du mariage : aucune amende ni peine de prison n'est prévue.
Au total, nous considérons que, aussi grave soit-elle, cette disposition procède d'un effet d'affichage et qu'elle a pour seul objectif de flatter une partie de l'opinion publique qui ne voit l'immigré que comme un délinquant potentiel, un voleur, un fraudeur, y compris en matière de mariage.
A mes yeux, d'ailleurs, les mariages mixtes constituent avant tout des signes, voire des facteurs d'intégration.
C'est pour toutes ces raisons que nous demandons la suppression de l'article 19.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 30 rectifié et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 262.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. L'article 19 du projet de loi tend à la création d'une infraction pénale spécifique et d'un dispositif cohérent de sanctions à l'encontre du fait de contracter ou d'organiser un mariage aux fins d'obtenir ou de faire obtenir un titre de séjour ou la nationalité française. Ce dispositif permettrait de dissuader les réseaux criminels spécialistes des mariages de complaisance.
La définition du délit semble satisfaisante et assez précise dans la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale.
Avec les montants réalistes que nous proposons pour les amendes à travers l'amendement n° 30 rectifié, le dispositif serait équilibré, mettant simultanément en avant la gravité du détournement des institutions matrimoniales et celle du détournement des dispositions relatives au droit au séjour.
Le mariage n'est pas un chiffon de papier, mes chers collègues, c'est une institution centrale dans notre société, permettant à l'individu et à la famille de s'épanouir.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous sommes défavorables à l'amendement n° 262.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Un nombre considérable d'élus nous ont alertés sur la recrudescence des mariages frauduleux, et ces élus appartiennent à toutes les sensibilités politiques.
J'ai sous les yeux une lettre que m'a adressée le préfet de l'Essonne au mois de mars 2003 pour attirer mon attention sur « l'inquiétude de maires de grandes villes confrontés à une recrudescence des mariages frauduleux ». Et, parmi ces maires qui l'ont saisi, le préfet de l'Essonne cite le sénateur-maire des Ulis, Paul Loridant, le député-maire d'Evry, Manuel Valls, et le maire de Corbeille-Essonne, Serge Dassault.
Dans une autre lettre, que j'ai reçue aujourd'hui même, une femme dont je ne dirai que le prénom, Emmanuelle, m'explique combien elle se trouve désemparée après avoir été abusée par un individu qui, peu après l'avoir épousée, a quitté le domicile conjugal, ne faisant face à aucune de ses obligations à partir du moment où il avait obtenu ses papiers.
Ce n'est pas une question sur laquelle le Gouvernement et l'opposition ne peuvent que s'affronter puisque, je le répète, des maires de toute sensibilité politique nous demandent de réagir : ils n'en peuvent plus de devoir célébrer de telles unions !
Je crois que tous les élus de terrain qui sont ici peuvent en porter témoignage, car ils sont tous confrontés à cette réalité et ont besoin qu'on les aide. C'est ce que le Gouvernement vous propose avec cet article.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 262.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Sur le principe, le fait de rendre condamnables ceux qui ne se marient que dans un but de fraude peut se comprendre. Mais deux écueils se présentent.
Tout d'abord, la preuve sera extrêmement difficile à rapporter.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Ce n'est pas vrai !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Par ailleurs, un mariage de complaisance peut aussi être à l'origine d'un très bon couple ! C'est un peu « Mettez-vous à genoux et vous croirez »...
Cependant, l'article 19 va plus loin puisqu'il prévoit également l'interdiction du territoire français. Vous savez que, tout à l'heure, nous proposerons de supprimer totalement l'interdiction judiciaire du territoire. Je voudrais donc que le débat ne soit pas faussé, qu'il soit complet lorsque nous aborderons cet aspect et que, le cas échéant, monsieur le ministre, vous demandiez une seconde délibération pour supprimer du texte l'interdiction judiciaire du territoire là où elle se serait déjà glissée avant que nous débattions sur sa suppression complète.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Qui dit que nous sommes pour les mariages frauduleux ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Vous !
Mme Nicole Borvo. Mesurez-vous bien la gravité des peines que vous prévoyez pour ce type de délit ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Mais c'est un délit très grave !
Mme Nicole Borvo. Monsieur le ministre, je crois que, avec ce dispositif, il sera moins risqué de tuer sa femme...
M. Robert Bret. Ou son mari ! (Sourires.)
Mme Nicole Borvo. ... que d'essayer de chercher à épouser quelqu'un pour avoir la nationalité française !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Voilà un argument brillant !
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.
M. Jacques Mahéas. Permettez-moi d'enfoncer le clou. Dans votre intervention, monsieur le ministre, vous avez clairement indiqué que le groupe socialiste du Sénat était manifestement laxiste alors que, dans l'Essonne, des maires socialistes vous réclamaient une mesure allant dans le sens de la condamnation des mariages blancs.
Mme Nicole Borvo. Ils ne réclament tout de même pas des peines de cinq ans, voire de dix ans d'emprisonnement !
M. Jacques Mahéas. Nous le répétons : nous sommes évidemment contre les mariages blancs et pour la lutte contre les filières plus ou moins mafieuses qui organisent de tels mariages.
En tant que maire d'une ville de plus de 30 000 habitants, depuis plus de vingt ans, je célébre des mariages. Or je n'ai eu l'occasion de saisir le procureur de la République qu'une seule fois. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Mes chers collègues, on ne peut pas à la fois dire que le maire est compétent lorsqu'il s'agit de signer les attestations d'accueil et qu'il est incompétent lorsqu'il s'agit de juger si un mariage est frauduleux ou non.
Evidemment, la saisine du procureur de la République est facilitée s'il y a une opposition au mariage. Mais force est de reconnaître - il serait d'ailleurs très intéressant de disposer de statistiques en la matière - que cela se produit très rarement. Dans le cas unique que je citais, la personne qui s'opposait au mariage ne s'est manifestée qu'après la célébration ; ce n'était qu'un quart d'heure après, mais il était déjà trop tard et c'est alors que j'ai saisi le procureur de la République.
Quoi qu'il en soit, nous ne pouvons que nous interroger sur le niveau des sanctions. D'autant qu'il peut s'agir de situations extrêmement douloureuses. Ainsi, le mariage que j'ai évoqué avait nécessité l'autorisation des parents de la jeune fille compte tenu de l'âge de celle-ci.
Nous ne sommes pas contre une disposition de cet ordre sur le principe, mais, avant que nous soyons amenés à nous prononcer, il serait bon que nous puissions disposer de quelques éléments d'appréciation. Parce qu'il y a tout de même une certaine disproportion entre le nombre de recours en annulation et l'explosion du nombre de mariages blancs que vous nous décrivez, monsieur le ministre.
Y a-t-il peu de recours en annulation parce que, une fois le mariage prononcé, les personnes qui seraient susceptibles de les introduire n'en ont pas la capacité ? Peut-être conviendrait-il alors de leur apporter une aide.
En tout cas, monsieur le ministre, sachez que nous sommes opposés aux mariages blancs, mais que nous aimerions avoir des indications un peu plus précises que les lettres que vous avez mentionnées.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Monsieur Mahéas, je veux rendre hommage à votre grande cohérence : vous êtes contre les mariages blancs, mais vous êtes tout autant contre l'idée de faire quoi que ce soit pour les éviter ! C'est en fait l'attitude que, pendant cinq ans, vous avez eue à propos de l'insécurité : vous étiez contre l'insécurité, mais vous vous demandiez si elle existait vraiment et, à force d'organiser des colloques sur le sujet, vous avez exaspéré les Français, qui vous ont tourné le dos !
S'agissant de l'immigration clandestine, nous nous trouvons exactement dans la même situation : vous n'osez pas dire que vous êtes pour une certaine forme de tolérance, car vous savez que les Français ne la supportent plus, mais, en même temps, vous n'osez pas « enclencher la première » pour faire quelque chose. Ce que vous nous proposez, c'est sans doute de procéder à de nouvelles études, d'organiser de nouveaux colloques, d'élaborer de nouveaux rapports sur un sujet que chacun connaît et sur lequel les Français nous ont demandé, en avril 2002, d'agir.
Nous sommes au coeur d'un débat politique majeur : sommes-nous, oui ou non, décidés à prendre le taureau par les cornes pour éviter que certains abusent de pauvres femmes en vue d'obtenir la nationalité française ?
Je respecte tout à fait le témoignage de M. Mahéas, mais, si les lettres que j'ai citées ne l'ont pas convaincu, sa propre expérience ne m'a pas convaincu davantage. Ce que, moi, je sais, c'est que je reçois quantité de témoignages d'élus, de gauche comme de droite, qui demandent à l'Etat de ne plus les laisser seuls.
Les Français nous ont donné mandat d'agir ; maintenant, la Haute Assemblée est informée ; le Gouvernement propose d'agir ; le groupe socialiste hésite à agir. Eh bien, je propose que nous le laissions à ses hésitations et que, nous, nous avancions ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jacques Mahéas. Il ne s'agit absolument pas de cela !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole.
M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, vous avez déjà expliqué votre vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, je veux seulement dire à M. le ministre que nous nous sommes mal compris. Nous avons simplement demandé des précisions. Nous hésitions à prendre part au vote, mais, pour ne pas fournir d'arguments à M. le ministre, nous voterons l'amendement de la commission et l'article 19 ainsi modifié.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 262.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote sur l'article 19.
M. Jacques Mahéas. Décidément, nous avons du mal à nous faire comprendre, monsieur le ministre ! (Exclamations et rires sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe François. Vous, c'est sûr !
M. Jacques Mahéas. J'ai bien indiqué, et le compte rendu de nos débats en fera foi, que nous étions contre les mariages blancs. J'ai témoigné de mon expérience. Je ne conteste pas qu'ailleurs, par exemple dans l'Essonne, un certain nombre de difficultés puissent se rencontrer.
J'ai constaté, d'autre part, que le niveau des peines était très élevé, et d'ailleurs notre assemblée l'a abaissé sur proposition de la commission.
J'ai aussi demandé que nous soient apportées certaines précisions quant au nombre des recours en annulation, mais, monsieur le ministre, vous n'avez pas pu nous les fournir. Vous vous contentez de nous donner un sentiment et de faire état de deux lettres. Sur votre bonne foi - il est assez rare que je la reconnaisse -, étant contre ces mariages blancs, nous allons voter cet article 19. Alors, monsieur le ministre, ne nous prêtez pas une attitude qui n'est pas la nôtre !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Louis Souvet, pour explication de vote.
M. Louis Souvet. Expérience contre expérience, la mienne vaut peut-être celle de M. Mahéas. Je ne suis le maire que d'une modeste commune de 30 000 habitants et, chez nous, cette année, au moins quatre mariages blancs ont été empêchés. Il n'y a pas forcément de recours en annulation, tout simplement parce que nous les découvrons avant la célébration.
Mme Nicole Borvo. Tant mieux !
M. Louis Souvet. Ce fut encore le cas il y a deux ou trois mois. Nous avons été alertés par la police de l'air et des frontières. Les documents avaient été falsifiés d'une manière si habile que, sans son intervention, nous n'aurions pu déceler la fraude.
Je crois donc qu'il faut s'en tenir à la rigueur de ce que nous faisons. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 19, modifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le groupe socialiste vote pour.
(L'article 19 est adopté.)
Après l'article 21 ter de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 précitée, il est inséré un article 21 quinquies ainsi rédigé :
« Art. 21 quinquies. - Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier sera tenu d'acquitter une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.
M. Robert Bret. Le présent article, qui a été introduit par l'Assemblée nationale, vise à imposer à l'employeur qui a recruté un étranger en situation irrégulière la prise en charge des frais de réacheminement vers le pays d'origine.
A la lecture de cet article, on peut mesurer le déséquilibre qui existe entre la sanction à l'égard de l'employeur de main-d'oeuvre irrégulière et celle dont fait l'objet le travailleur clandestin : ce dernier, à la suite de l'adoption, la semaine dernière, de l'amendement de notre collègue Jean-Jacques Hyest, se verra immédiatement expulsé, au même titre que le proxénète ou le trafiquant de drogue, s'il est titulaire d'une carte qui ne lui donne pas l'autorisation de travailler. Initialement, le travailleur clandestin se voyait même infliger une amende de 3 750 euros et une interdiction du territoire de trois ans !
De l'autre côté se trouve l'employeur qui, lui, a fait consciemment le choix de l'embauche d'un travailleur clandestin, dans le but, faut-il le rappeler ? d'une exploitation éhontée et à bas prix. Il pourra se voir, certes, infliger des amendes et des peines complémentaires, mais l'on sait, monsieur le ministre, que ces poursuites restent rares : 7 % seulement des verbalisations pour travail au noir concernaient des étrangers sans papiers en 2002.
Pourtant, ces pratiques sont loin d'être des cas isolés. Voilà quelques jours, nous en avons eu à nouveau un exemple avec la mise en examen et l'incarcération à Bordeaux d'un homme qui proposait, contre rémunération, aux exploitants agricoles de la Gironde les services d'ouvriers agricoles marocains à des conditions « très avantageuses », en infraction, bien sûr, avec toutes les dispositions régissant l'emploi de personnes étrangères. Ces ouvriers entrés avec des visas touristiques étaient contraints de verser des « droits d'inscription » de 1 500 euros chacun !
Cette affaire, monsieur le ministre, confirme l'exploitation des personnes étrangères dans le cadre des travaux saisonniers, sur laquelle, il n'y a pas si longtemps, j'ai attiré l'attention de votre ministère à travers une question écrite.
Comme le souligne Pierre Brelan, chercheur à l'Institut national de la recherche agronomique, l'INRA, dans un article d'avril 2003 publié dans Le Monde diplomatique, alors que la production des fruits et légumes constitue l'un des secteurs les plus soumis au libéralisme sauvage dans le cadre de la PAC, « il faut une armée de réserve d'ouvriers agricoles qui est assurée par la main-d'oeuvre immigrée clandestine. Il y a une véritable articulation, une complémentarité officielle ».
On le sait, les rares études menées en ce domaine confirment que certaines pratiques confinent à un véritable esclavagisme. Je souhaite à nouveau dire ici que ce n'est pas par la pénalisation du travailleur clandestin, qui est avant tout victime, que l'on combattra le travail clandestin et les filières qui en découlent. Dans l'exemple récent que j'ai cité, il y avait des rabatteurs qui oeuvraient au Maroc : c'est à eux qu'il convient de s'attaquer, monsieur le ministre !
De plus, l'amendement voté à l'article 6 bis suscite d'autres interrogations : par exemple, expulsera-t-on le demandeur d'asile qui travaillera ?
Cet article, qui pose donc de réels problèmes, mérite, monsieur le ministre, un débat de fond.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, sur l'article.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'article 19 - que nous avons voté - avait, par rapport à beaucoup d'autres articles de ce projet de loi, le mérite de faire la différence entre les filières et les cas particuliers.
Mme Borvo nous dit que les peines sont élevées. Cinq ans, c'est tout de même moins que pour l'assassinat ou le meurtre, même de son conjoint, et, par-dessus le marché, nous devons rappeler qu'en France les textes indiquent des peines maximales mais que les tribunaux ont la latitude de descendre jusqu'à l'exemption de peine ! Le chiffre n'est donc pas extrêmement important.
Mais la différence était faite dans l'article 19 : les peines étant portées à dix ans lorsque l'infraction était commise en bande organisée, contre cinq ans dans les autres cas.
Ici, avec l'article 19 bis, il en va tout autrement puisque, nous allons le voir, on ne fait pas de différence entre le responsable de la filière et les employeurs en général - à cette réserve près que l'on ne prévoit cependant pas le bannissement si l'employeur est français : s'il était étranger, on pourrait toujours lui retirer sa carte de résident...
M. Jean-Jacques Hyest. C'est le cas !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non ! Ce n'est pas du tout le cas ! Le texte prévoit : « Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger... ». Celui qui est visé, c'est donc l'employeur en général.
Effectivement, on peut considérer que ce qui est prévu contre le négrier est tout à fait insuffisant et qu'il faudrait frapper beaucoup plus fort. Nous avons d'ailleurs déposé un amendement à cette fin.
En revanche, il faut faire une différence s'il s'agit d'un petit employeur - qu'il soit ou non étranger - qui rend service, par exemple, à quelqu'un qui n'est ni régularisable ni expulsable, ou à quelqu'un qui n'a pas le droit de travailler bien qu'ayant un titre de séjour. En effet, autant il est tout à fait normal, dans le premier cas, de demander que le billet d'avion soit payé par l'employeur, autant cela ne va pas de soi dans le second cas.
Nous avons donc déposé un amendement qui tend à ce que ce dispositif soit facultatif et, surtout, à ce qu'il soit judiciaire. Si des peines doivent intervenir, il faut que les tribunaux se prononcent et arbitrent.
M. Jacques Mahéas. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 31, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par cet article pour l'article 21 quinquies de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, après les mots : "sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourraient être engagées à son encontre", insérer les mots : "et de la contribution spéciale au bénéfice de l'Office des migrations internationales prévues à l'article L. 341-7 du code du travail". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Il s'agit d'un amendement précisant que la contribution forfaitaire à la charge des employeurs ne se substitue pas à la contribution à l'Office des migrations internationales en cas d'introduction d'un travailleur étranger sans passer par l'intermédiaire de l'OMI.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 155, présenté par Mme M. André, MM. Dreyfus-Schmidt, Mahéas et Sueur, Mme Blandin et les membres du groupe socialiste et apparenté, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du texte proposé par cet article pour insérer un article 21 quinquies dans l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945, remplacer les mots : "sera tenu d'acquitter" par les mots : "pourra avoir à acquitter". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je reviens d'un mot sur l'amendement n° 31 : il n'y a pas que l'OMI, il y a également les services municipaux, par exemple. Mais je n'insiste pas, c'est voté. Un peu rapidement à mon goût, mais c'est voté...
J'en viens à l'amendement n° 155.
Le texte qui est proposé dispose : « L'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier sera tenu d'acquitter une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. »
Nous proposons de remplacer « sera tenu d'acquitter » par « pourra avoir à acquitter », pour que la porte reste ouverte, étant entendu que la sanction doit être obligatoire pour le négrier et facultative pour le petit employeur, qu'il soit français ou étranger.
Monsieur le ministre, je fais appel à votre appréciation : si vous estimez que notre idée n'est pas fausse et qu'il faut faire une différence entre les filières et l'individu qui agit non pour s'enrichir mais pour rendre service, alors il serait normal, à ce moment-là, que la juridiction se prononce à cet égard.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Les auteurs de l'amendement souhaitent que les sanctions contre les employeurs d'étrangers en situation irrégulière soient facultatives et appréciées en fonction de la gravité de l'infraction.
L'article 19 bis tend à créer, à la charge de l'employeur, une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement.
Il convient que cette sanction soit toujours infligée, afin de dissuader réellement les employeurs.
L'avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Je suis désolé, monsieur Dreyfus-Schmidt, mais, si l'on adoptait votre amendement, une famille bourgeoise qui a fait venir une petite Philippine sans papiers pour ne pas acquitter de charges n'aurait pas à payer le billet de retour et l'ensemble des contribuables, notamment les plus modestes, devraient payer à sa place !
Voyez-vous, telle n'est pas ma conception de l'égalité républicaine ! La famille bourgeoise qui fait venir une irrégulière, qui l'emploie sans la déclarer, devra payer le billet d'avion lorsque cette personne aura été trouvée. Il est parfaitement normal que l'employeur assume les conséquences de son choix. Sinon, comment faire respecter la loi ?
De plus, comment faire la différence entre la petite entreprise et la moyenne entreprise ? Trouvez-vous plus judicieux qu'un artisan ou un agriculteur emploie au noir plutôt qu'un industriel ?
Il y a une règle : il est interdit de faire travailler des gens sans les déclarer, parce que la personne qui est employée sans être déclarée n'est pas la seule à être pénalisée, c'est l'ensemble de nos compatriotes qui sont pénalisés par ces comportements, ceux qui ne paient pas faisant payer tous les autres.
Je souhaite donc le maintien de l'article du Gouvernement.
Je ne désire pas du tout peiner M. Dreyfus-Schmidt, mais je lui rappelle que, lorsque nous avions débattu en son temps de l'amendement visant à augmenter la défiscalisation du personnel employé par des familles, le groupe socialiste s'était ému de cette situation. Or il nous propose un dispositif qui reviendrait à les exonérer de ce que devraient payer par ailleurs les chefs d'entreprise !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pas du tout !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il n'y a aucune raison d'agir ainsi.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mahéas, pour explication de vote.
M. Jacques Mahéas. Une fois de plus, nous nous sommes mal fait comprendre ! (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Nous avons dit non pas que l'employeur bourgeois d'une petite Philippine ne devrait pas payer,...
M. Nicolas Sarkozy, ministre. C'est pourtant un « petit employeur » !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous avons dit : « pourra » payer !
M. Jacques Mahéas. ... mais que la possibilité devrait être laissée, après jugement, de mettre ou non le billet d'avion à la charge de l'employeur.
Il faudrait, tout d'abord, définir qui est employeur.
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il faut créer une commission ! On en reparlera dans trois ans !
M. Jacques Mahéas. Si, à la sortie d'une grande surface de bricolage, Mme Dupont confie la pose de son papier peint à une personne de bonne volonté qui lui propose ses services, devient-elle pour autant employeur ? (Oui ! sur les travées de l'UMP.)
Quoi qu'il en soit, nous demandons que le juge puisse décider si cette dame doit payer le billet d'avion de retour. Mais nous considérons que c'est un non-sens, pour ce type de délit, d'obliger le juge à ordonner le paiement du billet de retour.
De surcroît, la personne qui fait poser son papier peint ne sait peut-être même pas que son employé est en situation irrégulière ! Nous avons tous vu, à la porte de grandes surfaces de bricolage, des gens venir faire leur « marché » de travailleurs au noir le matin !
Si les statistiques que j'ai lues sont exactes, 70 % de Français travaillent au noir...
M. Hilaire Flandre. Encourageons-les ! Allons-y !
M. Jacques Mahéas. ... et environ 30 % de travailleurs étrangers font de même. Ils sont aussi condamnables les uns que les autres, mais laissez au juge le soin d'apprécier !
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Après les mariages blancs, le travail au noir !
Comme l'a très bien rappelé M. Mahéas, seuls les employeurs d'étrangers seraient durement sanctionnés financièrement par la disposition que nous condamnons. Les Français qui sont employés au noir ou qui travaillent au noir, eux, ne sont pas visés par ce dispositif.
M. Jean-Jacques Hyest. On ne va pas les renvoyer s'ils sont Français !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. On ne va pas expulser des Français, quand même !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. M. Jacques Mahéas vous dit que nous n'avons pas réussi à nous faire comprendre. Il n'est pire sourds que ceux qui ne veulent pas entendre !
Monsieur le ministre, vous dites que nous ne voulons pas que les bourgeois paient pour la petite Philippine. Or ceux-là devraient payer deux fois !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Pourquoi ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Mais il ne s'agit pas de cela. Lorsque nous proposons d'écrire : « pourra avoir à acquitter », cela signifie que la juridiction devra être saisie et devra apprécier selon les cas.
M. Hilaire Flandre. Cinq ans plus tard !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Les bourgeois ne sont en effet peut-être pas les seuls à avoir recours aux services d'un travailleur étranger, ne serait-ce que dans un but caritatif, par exemple en employant une personne qui a besoin de travailler mais qui ne peut pas le faire régulièrement.
Alors, monsieur le ministre, ne déformez pas nos propos ! Dites plutôt que vous ne voulez pas retenir nos idées, qui ont pourtant le mérite de faire la différence entre les situations. Pour faire de la bonne justice, il faut considérer les cas d'espèce !
Vous, vous ne le voulez pas. Dites-le franchement, mais ne caricaturez pas nos propositions !
M. le président. La parole est à M. Patrice Gélard, pour explication de vote.
M. Patrice Gélard. J'en arrive à ne plus rien comprendre !
M. Alain Gournac. Moi non plus !
M. Patrice Gélard. Les sénateurs de l'opposition nous disent qu'ils sont contre les mariages blancs, puis ils déposent des amendements ou votent dans le sens de la perpétuation de ce phénomène.
Ils nous disent qu'ils sont contre le travail au noir et le travail clandestin, puis ils nous proposent des amendements qui, en fin de compte, permettront de les généraliser.
MM. Jacques Mahéas et Michel Dreyfus-Schmidt. C'est faux !
M. Patrice Gélard. Où va-t-on ?
Nous en avons assez de ces débats et de ces discussions qui dégénèrent et qui n'ont qu'un seul but : nous faire perdre du temps. Nous ne l'acceptons pas ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. - Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 155.
Mme Nicole Borvo. Le groupe CRC s'abstient.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Même les communistes ne vous suivent pas !
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Courtois, au nom de la commission, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par cet article pour l'article 21 quinquies de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 par une phrase ainsi rédigée : "Le montant total des sanctions pécuniaires pour l'emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail ne peut excéder, selon le cas, le montant de l'amende encourue en cas d'infraction aux articles 21 ou 21 bis de la présente ordonnance ou à l'article L. 364-3 du code du travail". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Patrick Courtois, rapporteur. Cet amendement vise à plafonner le montant cumulé des amendes pénales et administratives encourues par un employeur pour l'emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail, afin de respecter le principe de proportionnalité posé par le Conseil constitutionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 19 bis, modifié.
(L'article 19 bis est adopté.)