SOMMAIRE
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
1. Procès-verbal (p. 1).
2. Evolutions de la criminalité. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 2).
Article 1er (suite) (p. 3)
Article 706-81 du code de procédure pénale (p. 4)
Amendement n° 291 de M. Robert Badinter. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, François Zocchetto, rapporteur de la commission des lois ; Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. - Rejet.
Amendement n° 408 de Mme Nicole Borvo. - Mme Nicole Borvo, MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 303 rectifié de M. Robert Badinter. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Adoption de l'article du code.
Article 706-82 du code de procédure pénale (p. 5)
Amendement n° 409 de Mme Nicole Borvo. - MM. Robert Bret, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendements n°s 410 de Mme Nicole Borvo et 12 de la commission. - MM. Robert Bret, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet de l'amendement n° 410 ; adoption de l'amendement n° 12.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article 706-83 du code de procédure pénale. -
Adoption (p. 6)
Article 706-84 du code de procédure pénale (p. 7)
Amendement n° 292 de M. Robert Badinter. - MM. Robert Badinter, le rapporteur, le secrétaire d'Etat, PierreFauchon. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article 706-85 du code de procédure pénale (p. 8)
Amendements n°s 13 rectifié de la commission et 251 de M. Michel Mercier. - MM. le rapporteur, PierreFauchon, le secrétaire d'Etat, Robert Badinter. - Retrait de l'amendement n° 251 ; adoption de l'amendement n° 13 rectifié rédigeant l'article du code.
Article 706-86 du code de procédure pénale.
Adoption (p. 9)
Article 706-87 du code de procédure pénale (p. 10)
Amendements n°s 14 de la commission et 293 de M. Robert Badinter. - MM. le rapporteur, Robert Badinter, le secrétaire d'Etat. - Retrait de l'amendement n° 293 ; adoption de l'amendement n° 14 rétablissant l'article du code.
Article 706-88 du code de procédure pénale (p. 11)
Amendements identiques n°s 294 de M. Robert Badinter et 411 de Mme Nicole Borvo ; amendement n° 15 de la commission et sous-amendements n°s 295 rectifié, 469, 296 rectifié, 283 rectifié et 297 rectifié de M. Robert Badinter. - M. Michel Dreyfus-Schmidt, Mme Nicole Borvo, MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Christian Cointat, Robert Badinter. - Retrait de l'amendement n° 296 rectifié ; rejet des amendements n°s 294, 411, des sous-amendements n°s 295 rectifié, 469, 283 rectifié et 297 rectifié ; adoption de l'amendement n° 15 rédigeant l'article du code.
Article additionnel après l'article 706-88
du code de procédure pénale (p. 12)
Amendement n° 298 de M. Robert Badinter. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Article 706-89 du code de procédure pénale.
Adoption (p. 13)
Article 706-90 du code de procédure pénale (p. 14)
Amendements n°s 412 de Mme Nicole Borvo et 16 de la commission. - MM. Robert Bret, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet de l'amendement n° 412 ; adoption de l'amendement n° 16 rédigeant l'article du code.
Article 706-91 du code de procédure pénale (p. 15)
Amendement n° 17 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article du code.
Article 706-92 du code de procédure pénale (p. 16)
Amendement n° 18 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article 706-93 du code de procédure pénale.
Adoption (p. 17)
Article 706-94 du code de procédure pénale (p. 18)
Amendement n° 19 de la commission. - Adoption de l'amendement supprimant l'article du code.
Article 706-95 du code de procédure pénale (p. 19)
Amendement n° 299 de M. Robert Badinter. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Adoption de l'article du code.
Article 706-96 du code de procédure pénale (p. 20)
Amendement n° 20 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Amendement n° 300 de M. Robert Badinter. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Rejet.
Amendement n° 21 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Intitulé de la section 6 du chapitre II du titre XXV du livre IV
du code de procédure pénale (p. 21)
Amendement n° 22 de la commission. - MM. le rapporteur, le secrétaire d'Etat, Robert Badinter. - Adoption de l'amendement rédigeant l'intitulé de la section du code.
Article 706-97 du code de procédure pénale (p. 22)
Amendement n° 23 de la commission. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article du code.
Article 706-97-1 du code de procédure pénale (p. 23)
Amendement n° 24 de la commission. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article du code.
Article 706-97-2 du code de procédure pénale (p. 24)
Amendement n° 25 de la commission. - Adoption de l'amendement rédigeant l'article du code.
Article additionnel après l'article 706-97-2
du code de procédure pénale (p. 25)
Amendement n° 26 de la commission. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel du code.
Articles 706-98 et 706-99 du code de procédure pénale. -
Adoption (p. 26)
Article 706-100 du code de procédure pénale (p. 27)
Amendements n°s 302 de M. Robert Badinter et 27 de la commission. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. - Rejet de l'amendement n° 302 ; adoption de l'amendement n° 27.
Amendement n° 28 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article 706-101 du code de procédure pénale.
Adoption (p. 28)
Amendements identiques n°s 29 de la commission et 244 de M. Hubert Haenel, rapporteur pour avis. - MM. Paul Girod, en remplacement de M. Hubert Haenel, rapporteur pour avis, le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article 1er modifié.
Articles additionnels après l'article 1er (p. 29)
Amendement n° 413 de Mme Nicole Borvo. - MM. Robert Bret, le rapporteur, le garde des sceaux, Michel Dreyfus-Schmidt. - Rejet.
Amendement n° 30 rectifié de la commission et sous-amendement n° 245 rectifié bis de M. Hubert Haenel, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le garde des sceaux, Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois ; Robert Badinter, Laurent Béteille, Jean-Philippe Lachenaud. - Rejet du sous-amendement ; adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Articles 1er bis et 1er ter. - Adoption (p. 30)
Article 2 (p. 31)
Amendement n° 31 de la commission. - Adoption.
Amendement n° 414 de Mme Nicole Borvo. - MM. Robert Bret, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.
Amendement n° 32 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 33 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 34 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 2 bis (p. 32)
Amendement n° 305 de M. Robert Badinter. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article 2 ter. - Adoption (p. 33)
Suspension et reprise de la séance (p. 34)
PRÉSIDENCE DE M. Christian Poncelet
3. Questions d'actualité au Gouvernement (p. 35).
INSTITUTION D'UNE TAXE
SUR LES POIDS LOURDS (p. 36)
MM. Josselin de Rohan, Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre.
PERSPECTIVES DE CROISSANCE (p. 37)
MM. François Marc, Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
PRÉVENTION DES INCENDIES (p. 38)
MM. François Trucy, Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
ENSEIGNEMENT AGRICOLE (p. 39)
Mme Françoise Férat, M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
PLAN DE RÉNOVATION DES SERVICES D'URGENCE (p. 40)
MM. Alain Dufaut, Christian Jacob, ministre délégué à la famille.
SITUATION DE L'EMPLOI
ET HAUSSE DU CHÔMAGE (p. 41)
Mme Nicole Borvo, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
ACCORD SYNDICAL RELATIF
À LA FORMATION PROFESSIONNELLE (p. 42)
MM. Alain Fouché, François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
PROJET DE CONSTITUTION EUROPÉENNE (p. 43)
MM. André Vallet, Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères.
SITUATION EN CÔTE D'IVOIRE (p. 44)
MM. Jean-Pierre Cantegrit, Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères.
DÉSINDUSTRIALISATION DE LA FRANCE (p. 45)
M. Daniel Raoul, Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie.
Suspension et reprise de la séance (p. 46)
PRÉSIDENCE DE M. Bernard Angels
4. Evolutions de la criminalité. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 47).
Article 3 (p. 48)
Amendements identiques n°s 306 de M. Robert Badinter et 415 de Mme Nicole Borvo ; amendement n° 35 de la commission et sous-amendements n°s 254 rectifié de M. Michel Mercier et 475 rectifié de M. Michel Dreyfus-Schmidt ; amendements n°s 253 de M. Michel Mercier et 307 à 309 de M. Robert Badinter. - M. Michel Dreyfus-Schmidt, Mme Nicole Borvo, MM. François Zocchetto, rapporteur de la commission des lois ; Yves Détraigne, Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. - Rejet des amendements n°s 306 à 309, 415 et du sous-amendement n° 475 rectifié ; adoption du sous-amendement n° 254 rectifié et de l'amendement n° 35 modifié, l'amendement n° 253 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Article 4 (p. 49)
Amendements n°s 310 de M. Robert Badinter et 416 de Mme Nicole Borvo ; amendements n°s 36 à 38 de la commission et 311 à 313 de M. Robert Badinter. - MM. Robert Badinter, Robert Bret, le rapporteur, le garde des sceaux, Michel Dreyfus-Schmidt, Jean-Jacques Hyest. - Retrait des amendements n°s 310, 312, 313 et 37 ; reprise de l'amendement n° 37 rectifié par M. Michel Dreyfus-Schmidt ; retrait de l'amendement n° 37 rectifié ; rejet des amendements n°s 416 et 311 ; adoption des amendements n°s 36 et 38.
Adoption de l'article modifié.
Article 5 (p. 50)
Amendement n° 39 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 40 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendements n°s 41 et 42 de la commission. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Article 5 bis. - Adoption (p. 51)
Articles additionnels après l'article 5 bis (p. 52)
Amendement n° 314 de M. Robert Badinter. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.
Amendement n° 259 de M. Jean-Pierre Schosteck. - MM. Jean-Jacques Hyest, le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 6 (p. 53)
Mme Nicole Borvo.
Amendements n°s 43 à 61 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption des dix-neuf amendements.
Amendement n° 273 de M. Pierre Fauchon. - MM. Pierre Fauchon, le rapporteur, le garde des sceaux, Robert Badinter, Robert Bret. - Adoption.
Amendement n° 62 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux, Robert Badinter. - Adoption.
Amendement n° 63 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 6 (p. 54)
Amendement n° 274 de M. Pierre Fauchon. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 65 de la commission. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 64 de la commission. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Intitulé du chapitre III (p. 55)
Amendement n° 66 de la commission. - Adoption de l'amendement modifiant l'intitulé du chapitre.
Article 7 (p. 56)
Article 705-1 du code de procédure pénale (p. 57)
Amendements n°s 67 et 68 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article 705-2 du code de procédure pénale (p. 58)
Amendements n°s 70 et 69 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article du code, modifié.
Amendements n°s 71 rectifié et 72 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article 7 modifié.
Article 7 bis (p. 59)
Amendement n° 73 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 7 bis (p. 60)
Amendement n° 465 rectifié du Gouvernement. - MM. le garde des sceaux, le rapporteur, Robert Badinter. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 8 (p. 61)
Amendement n° 74 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 8 (p. 62)
Amendement n° 255 rectifié bis de M. Nicolas About, repris par la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Division et article additionnels
après l'article 8 (p. 63)
Amendements n°s 75 et 76 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption des amendements insérant une division additionnelle et son intitulé, un article additionnel.
Article 9 (p. 64)
M. Robert Bret.
Article 706-102 du code de procédure pénale (p. 65)
Amendement n° 466 du Gouvernement. - MM. le garde des sceaux, le rapporteur. - Adoption.
Amendement n° 455 de M. Josselin de Rohan. - MM. Jean-Claude Carle, le rapporteur, le garde des sceaux. - Retrait.
Reprise de l'amendement n° 455 rectifié par M. Robert Bret. - MM. Robert Bret, Henri de Richemont. - Rejet.
Adoption de l'article du code, modifié.
Articles 706-103 et 706-104
du code de procédure pénale. - Adoption (p. 66)
Article 706-105 du code de procédure pénale (p. 67)
Amendements n°s 77 à 79 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article du code, modifié.
Article 706-106 du code de procédure pénale (p. 68)
Amendements n°s 81 et 80 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article du code, modifié.
Amendement n° 467 du Gouvernement. - MM. le garde des sceaux, le rapporteur. - Adoption.
Adoption de l'article 9 modifié.
Article 10 (p. 69)
Amendement n° 271 rectifié de M. Henri de Richemont. - MM. Henri de Richemont, le rapporteur, le garde des sceaux Robert Bret, Mme Nicole Borvo. - Adoption.
Amendement n° 272 rectifié de M. Henri de Richemont. - MM. Henri de Richemont, le rapporteur, le garde des sceaux, Robert Badinter. - Adoption.
Amendement n° 456 de M. Josselin de Rohan. - Devenu sans objet.
Amendement n° 82 de la commission. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Division et articles additionnels
après l'article 10 (p. 70)
Amendements n°s 256 à 258 de M. Jean-Claude Carle. - MM. Jean-Claude Carle, le rapporteur, le garde des sceaux, Robert Bret. - Adoption des amendements insérant une division additionnelle et son intitulé, deux articles additionnels.
Amendement n° 417 de Mme Nicole Borvo. - Mme Nicole Borvo, MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet.
Article 11 (p. 71)
Amendement n° 83 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendement n° 84 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Amendements n°s 85 à 87 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux, Mme Nicole Borvo. - Adoption des trois amendements.
Amendement n° 246 de M. Hubert Haenel, rapporteur pour avis. - MM. Joël Bourdin, en remplacement de M. Hubert Haenel, rapporteur pour avis, le rapporteur, le garde des sceaux. - Retrait.
Adoption de l'article modifié.
Article 11 bis (p. 72)
Amendements n°s 247 et 248 de M. Hubert Haenel, rapporteur pour avis. - MM. le rapporteur pour avis, le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 11 bis (p. 73)
Amendement n° 260 de M. Jean-Pierre Schosteck. - MM. Jean-Jacques Hyest, le rapporteur, le garde des sceaux, Michel Dreyfus-Schmidt. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 261 de M. Jean-Pierre Schosteck. - MM. Jean-Jacques Hyest, le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Division et article additionnels
après l'article 11 bis (p. 74)
Amendements n°s 462 et 463 du Gouvernement. - MM. le garde des sceaux, le rapporteur, Mme Nicole Borvo, M. Michel Dreyfus-Schmidt. - Adoption des amendements insérant un article additionnel, une division additionnelle et son intitulé.
Article 12 A (p. 75)
MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le garde des sceaux, Jean-Jacques Hyest.
Adoption de l'article.
Articles 12 à 14. - Adoption (p. 76)
Article 14 (p. 77)
Amendement n° 418 de Mme Nicole Borvo. - Mme Nicole Borvo, MM. le rapporteur, le garde des sceaux, Michel Dreyfus-Schmidt, Christian Cointat. - Rejet par scrutin public.
Amendement n° 419 de Mme Nicole Borvo. - Rejet.
Adoption de l'article.
Article 15 (p. 78)
Amendement n° 88 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Division et articles additionnels
après l'article 15 (p. 79)
Amendements n°s 457, 420 et 421 de Mme Nicole Borvo. - Mme Nicole Borvo, MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Rejet des trois amendements.
5. Dépôt d'un rapport du Gouvernement (p. 80).
Suspension et reprise de la séance (p. 81)
PRÉSIDENCE DE M. Adrien Gouteyron
6. Evolutions de la criminalité. - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 82).
Intitulé de la section 2 et articles additionnels
avant l'article 16 (p. 83)
Amendements n°s 422 à 428 de Mme Nicole Borvo, 317 à 321 et 327 de M. Robert Badinter. - MM. Robert Bret, François Zocchetto, rapporteur de la commission des lois ; Michel Dreyfus-Schmidt, Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice ; Robert Badinter, Jean-Pierre Sueur, Jean-Jacques Hyest, Mme Nicole Borvo. - Rejet des amendements n°s 422, 423, 317, 424 et, par scrutin public, de l'amendement n° 318 ; rejet des amendements n°s 425, 319, 426, 320, 427, 321, 327 et 428.
Article 16 (p. 84)
Amendements n°s 328 rectifié de M. Robert Badinter et 89 de la commission. - MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement n° 328 rectifié rédigeant l'article, l'amendement n° 89 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Division et articles additionnels après l'article 16 (p. 85)
Amendement n° 90 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Adoption de l'amendement insérant une division additionnelle et son intitulé.
Amendement n° 91 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux, Robert Badinter. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 92 rectifié de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux, Michel Dreyfus-Schmidt, Robert Badinter.
Suspension et reprise de la séance (p. 86)
MM. Robert Badinter, le garde des sceaux, le rapporteur, Mme Nicole Borvo. - Rectification de l'amendement n° 92 rectifié ; adoption de l'amendement n° 92 rectifié bis insérant un article additionnel.
Amendement n° 93 de la commission et sous-amendements n°s 474 de M. Robert Badinter et 460 du Gouvernement. - MM. le rapporteur, Robert Badinter, le garde des sceaux, Christian Cointat, Michel Dreyfus-Schmidt, Mme Nicole Borvo, MM. Jean-Jacques Hyest, Pierre Fauchon, vice-président de la commission des lois.
Suspension et reprise de la séance (p. 87)
MM. le rapporteur, le garde des sceaux. - Rectification du sous-amendement n° 460.
MM. Michel Dreyfus-Schmidt, le rapporteur, le garde des sceaux, Robert Badinter, Jean-Jacques Hyest. - Rejet du sous-amendement n° 474 ; adoption, par scrutin public, du sous-amendement n° 460 rectifié ; adoption de l'amendement n° 93 modifié insérant un article additionnel.
Amendement n° 94 de la commission. - MM. le rapporteur, le garde des sceaux, Michel Dreyfus-Schmidt, Robert Badinter. - Adoption, par division, de l'amendement insérant un article additionnel.
Renvoi de la suite de la discussion.
7. Transmission d'un projet de loi (p. 88).
8. Dépôt d'une proposition de loi (p. 89).
9. Texte soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 90).
10. Renvoi pour avis (p. 91).
11. Ordre du jour (p. 92).
COMPTE RENDU INTÉGRAL
PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON
vice-président
M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures cinquante.)
PROCÈS-VERBAL
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
ÉVOLUTIONS DE LA CRIMINALITÉ
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi (n° 314, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité. - Rapport n° 441 (2002-2003) et avis n° 445 (2002-2003).
Le Sénat a commencé hier l'examen de l'article 1er, dont je rappelle les termes :
M. le président. Art. 1er. - I. - Après le titre XXIV du livre IV du code de procédure pénale, il est inséré un titre XXV ainsi rédigé :
« Titre XXV. - De la procédure applicable à la criminalité et à la délinquance organisées.
« Art. 706-73. - La procédure applicable à l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement des crimes et des délits suivants est celle prévue par le présent code, sous réserve des dispositions du présent titre :
« 1° Crime de meurtre commis en bande organisée prévu par le 7° de l'article 221-4 du code pénal ;
« 2° Crime de tortures et d'actes de barbarie commis en bande organisée prévu par l'article 222-4 du code pénal ;
« 3° Crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-42 du code pénal ;
« 4° Crimes et délits d'enlèvement et de séquestration prévus par les deux premiers alinéas de l'article 224-1 et par les articles 224-2 à 224-5 du code pénal ;
« 5° Crimes et délits aggravés de traite des êtres humains prévus par les articles 225-4-2 à 225-4-7 du code pénal ;
« 6° Crimes et délits aggravés de proxénétisme prévus par les articles 225-7 à 225-12 du code pénal ;
« 7° Crime de vol commis en bande organisée prévu par l'article 311-9 du code pénal ;
« 8° Crimes aggravés d'extorsion prévus par les articles 312-6 et 312-7 du code pénal ;
« 8° bis Crime de destruction, dégradation et détérioration d'un bien commis en bande organisée prévu par l'article 322-8 du code pénal ;
« 9° Crimes et délits constituant des actes de terrorisme prévus par les articles 421-1 à 421-5 du code pénal ;
« 10° Délits en matière d'armes commis en bande organisée prévus par l'article 3 de la loi du 19 juin 1871 qui abroge le décret du 4 septembre 1870 sur la fabrication des armes de guerre, les articles 24, 26 et 31 du décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions, l'article 6 de la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des poudres et substances explosives, l'article 4 de la loi n° 72-467 du 9 juin 1972 interdisant la mise au point, la fabrication, la détention, le stockage, l'acquisition et la cession d'armes biologiques ou à base de toxines ;
« 10° bis Délits d'aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d'un étranger en France commis en bande organisée prévus par le quatrième alinéa du I de l'article 21 de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
« 10° ter Délits de blanchiment prévus par l'article 324-1 du code pénal, ou de recel prévus par l'article 321-1 du même code, du produit, des revenus, des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° à 10° bis ;
« 11° Délits d'association de malfaiteurs prévus par l'article 450-1 du code pénal, lorsqu'ils ont pour objet la préparation de l'une des infractions mentionnées aux 1° à 10° ter.
« Pour les infractions visées aux 3°, 6° et 9°, sont applicables, sauf précision contraire, les dispositions du présent titre ainsi que celles des titres XV, XVI et XVII.
« Art. 706-74. - Lorsque la loi le prévoit, les dispositions du présent titre sont également applicables :
« 1° Aux crimes et délits commis en bande organisée, autres que ceux relevant de l'article 706-73 ;
« 2° Aux délits d'association de malfaiteurs prévus par le deuxième alinéa de l'article 450-1 du code pénal autres que ceux relevant du 11° de l'article 706-73.
« Chapitre Ier
« Compétence des juridictions spécialisées
« Art. 706-75. - La compétence territoriale d'un tribunal de grande instance et d'une cour d'assises peut être étendue au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement des crimes et délits entrant dans le champ d'application des articles 706-73, à l'exception du 9° , ou 706-74, dans les affaires qui sont ou apparaîtraient d'une grande complexité.
« Cette compétence s'étend aux infractions connexes.
« Un décret fixe la liste et le ressort de ces juridictions, qui comprennent une section du parquet et des formations d'instruction et de jugement spécialisées pour connaître de ces infractions.
« Art. 706-76. - Le procureur de la République, le juge d'instruction, la formation correctionnelle spécialisée du tribunal de grande instance et la cour d'assises visés à l'article 706-75 exercent, sur toute l'étendue du ressort fixé en application de cet article, une compétence concurrente à celle qui résulte de l'application des articles 43, 52, 382, 663 (deuxième alinéa) et 706-42.
« La juridiction saisie demeure compétente, quelles que soient les incriminations retenues lors du règlement ou du jugement de l'affaire. Toutefois, si les faits constituent une contravention, le juge d'instruction prononce le renvoi de l'affaire devant le tribunal de police compétent en application de l'article 522.
« Art. 706-77. - Le procureur de la République près un tribunal de grande instance autre que ceux visés à l'article 706-75 peut, pour les infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-73, à l'exception du 9°, et 706-74, requérir le juge d'instruction de se dessaisir au profit de la juridiction d'instruction compétente en application de l'article 706-75. Les parties sont préalablement avisées et invitées à faire connaître leurs observations. L'ordonnance est rendue huit jours au plus tôt après cet avis.
« Lorsque le juge d'instruction décide de se dessaisir, son ordonnance ne prend effet qu'à compter du délai de cinq jours prévu par l'article 706-78 ; lorsqu'un recours est exercé en application de cet article, le juge d'instruction demeure saisi jusqu'à ce que soit porté à sa connaissance l'arrêt de la chambre de l'instruction passé en force de chose jugée ou celui de la chambre criminelle de la Cour de cassation.
« Dès que l'ordonnance est passée en force de chose jugée, le procureur de la République adresse le dossier de la procédure au procureur de la République près le tribunal de grande instance compétent en application de l'article 706-76.
« Les dispositions du présent article sont applicables devant la chambre de l'instruction.
« Art. 706-78. - L'ordonnance rendue en application de l'article 706-77 peut, à l'exclusion de toute autre voie de recours, être déférée dans les cinq jours de sa notification, à la requête du ministère public ou des parties, soit à la chambre de l'instruction si la juridiction spécialisée devant laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la même cour d'appel, soit, dans le cas contraire, à la chambre criminelle de la Cour de cassation. La chambre de l'instruction ou la chambre criminelle désigne, dans les huit jours suivant la date de réception du dossier, le juge d'instruction chargé de poursuivre l'information.
« L'arrêt de la chambre de l'instruction ou de la chambre criminelle est porté à la connaissance du juge d'instruction ainsi qu'au ministère public et notifié aux parties.
« Les dispositions du présent article sont applicables à l'arrêt de la chambre de l'instruction rendu sur le fondement du quatrième alinéa de l'article 706-77, le recours étant alors porté devant la chambre criminelle.
« Art. 706-79. - Les magistrats mentionnés à l'article 706-76 ainsi que le procureur général près la cour d'appel compétente peuvent demander à des assistants spécialisés, désignés dans les conditions prévues par les dispositions de l'article 706, de participer, selon les modalités prévues par cet article, aux procédures concernant les crimes et délits entrant dans le champ d'application des articles 706-73 ou 706-74.
« Chapitre II
« Procédure
« Section 1
« De la surveillance
« Art. 706-80. - Les officiers de police judiciaire et, sous leur autorité, les agents de police judiciaire, après en avoir informé le procureur de la République et sauf opposition de ce magistrat, peuvent étendre à l'ensemble du territoire national la surveillance de personnes contre lesquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de les soupçonner d'avoir commis l'un des crimes et délits entrant dans le champ d'application des articles 706-73 ou 706-74 ou la surveillance de l'acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission de ces infractions ou servant à les commettre.
« L'information préalable à l'extension de compétence prévue par le premier alinéa doit être donnée, par tout moyen, au procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations de surveillance sont susceptibles de débuter ou, le cas échéant, au procureur de la République saisi en application des dispositions de l'article 706-76.
« Section 2
« De l'infiltration
« Art. 706-81. - Lorsque les nécessités de l'enquête ou de l'instruction concernant l'un des crimes ou délits entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 le justifient, le procureur de la République ou, après avis de ce magistrat, le juge d'instruction saisi peuvent autoriser qu'il soit procédé, sous leur contrôle respectif, à une opération d'infiltration dans les conditions prévues par la présente section.
« L'infiltration consiste, pour un officier ou un agent de police judiciaire spécialement habilité dans des conditions fixées par décret et agissant sous la responsabilité d'un officier de police judiciaire chargé de coordonner l'opération, à surveiller des personnes suspectées de commettre un crime ou un délit en se faisant passer, auprès de ces personnes, comme un de leurs coauteurs, complices ou receleurs. L'officier ou l'agent de police judiciaire est à cette fin autorisé à faire usage d'une identité d'emprunt et à commettre si nécessaire les actes mentionnés à l'article 706-82. A peine de nullité, ces actes ne peuvent constituer une incitation à commettre des infractions.
« L'infiltration fait l'objet d'un rapport rédigé par l'officier de police judiciaire ayant coordonné l'opération, qui comprend les éléments strictement nécessaires à la constatation des infractions et ne mettant pas en danger la sécurité de l'agent infiltré et des personnes requises au sens de l'article 706-82.
« Art. 706-82. - Les officiers ou agents de police judiciaire autorisés à procéder à une opération d'infiltration peuvent, sur l'ensemble du territoire national, sans être pénalement responsables de ces actes :
« 1° Acquérir, détenir, transporter, livrer ou délivrer des substances, biens, produits, documents ou informations tirés de la commission des infractions ou servant à la commission de ces infractions ;
« 2° Utiliser ou mettre à disposition des personnes se livrant à ces infractions des moyens de caractère juridique ou financier ainsi que des moyens de transport, de dépôt, d'hébergement, de conservation et de télécommunication.
« L'exonération de responsabilité prévue au premier alinéa est également applicable aux personnes requises par les officiers ou agents de police judiciaire pour permettre de procéder à l'opération d'infiltration.
« Art. 706-83. - A peine de nullité, l'autorisation donnée en application de l'article 706-81 est délivrée par écrit et doit être spécialement motivée.
« Elle mentionne la ou les infractions qui justifient le recours à cette procédure et l'identité de l'officier de police judiciaire sous la responsabilité duquel se déroule l'opération.
« Cette autorisation fixe la durée de l'opération d'infiltration, qui ne peut pas excéder quatre mois. L'opération peut être renouvelée dans les mêmes conditions de forme et de durée. Le magistrat qui a autorisé l'opération peut, à tout moment, ordonner son interruption avant l'expiration de la durée fixée.
« L'autorisation est versée au dossier de la procédure après achèvement de l'opération d'infiltration.
« Art. 706-84. - L'identité réelle des officiers ou agents de police judiciaire ayant effectué l'infiltration sous une identité d'emprunt ne doit apparaître à aucun stade de la procédure.
« La révélation de l'identité de ces officiers ou agents de police judiciaire est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.
« Lorsque cette révélation a causé, même indirectement, des violences, coups et blessures à l'encontre de ces personnes ou de leurs conjoints, enfants et ascendants directs, les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 euros d'amende.
« Lorsque cette révélation a causé, même indirectement, la mort de ces personnes ou de leurs conjoints, enfants et ascendants directs, les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 150 000 euros d'amende, sans préjudice, le cas échéant, de l'application des dispositions du chapitre Ier du titre II du livre II du code pénal.
« Art. 706-85. - En cas de décision d'interruption de l'opération ou à l'issue du délai fixé par la décision autorisant l'infiltration et en l'absence de prolongation, l'agent infiltré peut poursuivre les activités mentionnées à l'article 706-82, sans en être pénalement responsable, le temps strictement nécessaire pour lui permettre de cesser sa surveillance dans des conditions assurant sa sécurité. Le magistrat ayant délivré l'autorisation prévue à l'article 706-81 en est informé dans les meilleurs délais. Il est également informé de l'achèvement de l'opération d'infiltration.
« Art. 706-86. - L'officier de police judiciaire sous la responsabilité duquel se déroule l'opération d'infiltration peut seul être entendu en qualité de témoin sur l'opération.
« Toutefois, s'il ressort du rapport mentionné au troisième alinéa de l'article 706-81 que la personne mise en examen ou comparaissant devant la juridiction de jugement est directement mise en cause par des constatations effectuées par un agent ayant personnellement réalisé les opérations d'infiltration, cette personne peut demander à être confrontée avec cet agent dans les conditions prévues par l'article 706-61. Les questions posées à l'agent infiltré à l'occasion de cette confrontation ne doivent pas avoir pour objet ni pour effet de révéler, directement ou indirectement, sa véritable identité.
« Art. 706-87. - Supprimé.
« Section 3
« De la garde à vue
« Art. 706-88. - Pour l'application des articles 63, 77 et 154, si les nécessités de l'enquête ou de l'instruction relatives à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 l'exigent, la garde à vue d'une personne peut, à titre exceptionnel, faire l'objet de deux prolongations supplémentaires de vingt-quatre heures chacune. Toutefois, lorsque l'enquête porte sur une infraction entrant dans le champ d'application des dispositions des 6°, 8°, 8° bis et 11° de l'article 706-73 ou lorsqu'elle porte sur une infraction commise en bande organisée prévue par l'article 224-3 du code pénal, la garde à vue peut faire l'objet d'une seule prolongation exceptionnelle de quarante-huit heures.
« Ces prolongations sont autorisées, par décision écrite et motivée, soit, à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, soit par le juge d'instruction saisi.
« La personne gardée à vue doit être présentée au magistrat qui statue sur la prolongation préalablement à cette décision. La seconde prolongation prévue par le présent article peut toutefois, à titre exceptionnel, être accordée sans présentation préalable de la personne en raison des nécessités des investigations en cours ou à effectuer.
« Dans le cas où la prolongation est décidée, un examen médical est de droit à la demande de la personne gardée à vue. Le procureur de la République ou le juge d'instruction est compétent pour désigner le médecin chargé de cet examen.
« La personne dont la garde à vue est prolongée en application des dispositions du présent article peut demander à s'entretenir avec un avocat, selon les modalités prévues par l'article 63-4, à l'issue de la quarante-huitième heure puis de la soixante-douzième heure de la mesure, sauf lorsque l'enquête porte sur une infraction entrant dans le champ d'application de l'avant-dernier alinéa de l'article 63-4 auquel cas l'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à l'issue de la soixante-douzième heure de la garde à vue.
« Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-16 ou 706-26, dont le régime de garde à vue est prévu respectivement aux articles 706-23 et 706-29.
« Section 4
« Des perquisitions
« Art. 706-89. - Si les nécessités de l'enquête de flagrance relative à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 l'exigent, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance peut, à la requête du procureur de la République, autoriser, selon les modalités prévues par l'article 706-92, que les perquisitions, visites domiciliaires et saisies de pièces à conviction soient opérées en dehors des heures prévues par l'article 59.
« Art. 706-90. - Si les nécessités de l'enquête préliminaire relative à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 l'exigent, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance peut, à la requête du procureur de la République, autoriser, selon les modalités prévues par l'article 706-92, que les perquisitions, visites domiciliaires et saisies de pièces à conviction soient faites, par dérogation aux dispositions de l'article 76, sans l'assentiment de la personne chez laquelle elles ont lieu.
« Lorsque ces opérations ne concernent pas des locaux d'habitation, le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions, autoriser leur réalisation en dehors des heures prévues à l'article 59.
« Art. 706-91. - Si les nécessités de l'instruction relative à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 l'exigent, le juge d'instruction peut, selon les modalités prévues par l'article 706-92, autoriser les officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire à procéder à des perquisitions, visites domiciliaires et saisies de pièces à conviction en dehors des heures prévues par l'article 59, lorsque ces opérations ne concernent pas des locaux d'habitation.
« En cas d'urgence, le juge d'instruction peut autoriser les officiers de police judiciaire à procéder à ces opérations dans des locaux d'habitation lorsqu'il s'agit d'un crime ou d'un délit flagrant ou lorsqu'il existe un risque immédiat de disparition des preuves ou des indices matériels.
« Art. 706-92. - A peine de nullité, les autorisations prévues par les articles 706-89 à 706-91 sont données pour des perquisitions déterminées et font l'objet d'une ordonnance écrite, précisant la qualification de l'infraction dont la preuve est recherchée ainsi que l'adresse des lieux dans lesquels les visites, perquisitions et saisies peuvent être faites ; cette ordonnance, qui n'est pas susceptible d'appel, est motivée par référence aux éléments de fait et de droit justifiant que ces opérations sont nécessaires. Les opérations sont faites sous le contrôle du magistrat qui les a autorisées, et qui peut se déplacer sur les lieux pour veiller au respect des dispositions légales.
« Dans le cas prévu par le deuxième alinéa de l'article 706-91, l'ordonnance comporte également l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision par référence aux seules conditions prévues par cet alinéa.
« Art. 706-93. - Les opérations prévues aux articles 706-89 à 706-91 ne peuvent, à peine de nullité, avoir un autre objet que la recherche et la constatation des infractions visées dans la décision du juge des libertés et de la détention ou du juge d'instruction.
« Le fait que ces opérations révèlent des infractions autres que celles visées dans la décision du juge des libertés et de la détention ou du juge d'instruction ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes.
« Art. 706-94. - Les dispositions des articles 706-89 à 706-93 ne sont pas applicables aux infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-16 ou 706-26, dont le régime des perquisitions est prévu respectivement aux articles 706-24 et 706-24-1 et à l'article 706-28.
« Art. 706-95. - Lorsque, au cours d'une enquête de flagrance ou d'une instruction relative à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-73, la personne au domicile de laquelle est faite une perquisition est en garde à vue ou détenue en un autre lieu et que son transport sur place paraît devoir être évité en raison des risques graves soit de troubles à l'ordre public ou d'évasion, soit de disparition des preuves pendant le temps nécessaire au transport, la perquisition peut être faite, avec l'accord préalable du procureur de la République ou du juge d'instruction, en présence de deux témoins requis dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 57.
« Les dispositions du présent article sont également applicables aux enquêtes préliminaires, lorsque la perquisition est faite sans l'assentiment de la personne dans les conditions prévues à l'article 706-90. L'accord est alors donné par le juge des libertés et de la détention.
« Section 5
« Des interceptions de correspondances émises
par la voie des télécommunications
« Art. 706-96. - Si les nécessités de l'enquête de flagrance ou de l'enquête préliminaire relative à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 l'exigent, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance peut, à la requête du procureur de la République, autoriser l'interception, l'enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications selon les modalités prévues par les articles 100-1 et 100-3 à 100-7, pour une durée maximum de quinze jours, renouvelable une fois dans les mêmes conditions de forme et de durée. Ces opérations sont faites sous le contrôle du juge des libertés et de la détention.
« Pour l'application des dispositions des articles 100-3 à 100-5, les attributions confiées au juge d'instruction ou à l'officier de police judiciaire commis par lui sont exercées par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire requis par ce magistrat.
« Le juge des libertés et de la détention qui a autorisé l'interception est informé dans les meilleurs délais par le procureur de la République des actes accomplis en application de l'alinéa précédent.
« Section 6
« Des dispositions relatives à la sonorisation
de certains lieux ou véhicules
« Art. 706-97. - Lorsque les nécessités de l'instruction concernant l'un des crimes ou délits entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 l'exigent, le juge d'instruction peut prescrire la mise en place d'un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, l'interception, l'enregistrement, y compris audiovisuel, et la transcription des paroles prononcées par eux-mêmes ou par plusieurs autres personnes à titre privé dans tout lieu ou véhicule public ou privé.
« Ces opérations sont effectuées sous son autorité et son contrôle. La décision d'interception est écrite. Elle n'a pas de caractère juridictionnel et n'est susceptible d'aucun recours.
« Art. 706-97-1. - Cette décision est prise pour une durée maximum de quatre mois. Elle ne peut être renouvelée que dans les mêmes formes. Elle est exécutée selon les modalités prévues aux articles 100-3 à 100-6.
« Art. 706-97-2. - Ces opérations ne peuvent concerner les lieux visés aux articles 56-1, 56-2 et 56-3 ni être mises en oeuvre dans le véhicule, le bureau ou le domicile des personnes visées à l'article 100-7.
« Section 7
« Des mesures conservatoires
« Art. 706-98. - En cas d'information ouverte pour l'une des infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-73 et 706-74 et afin de garantir le paiement des amendes encourues ainsi que, le cas échéant, l'indemnisation des victimes et l'exécution de la confiscation, le juge des libertés et de la détention, sur requête du procureur de la République, peut ordonner, aux frais avancés du Trésor et selon les modalités prévues par les procédures civiles d'exécution, des mesures conservatoires sur les biens, meubles ou immeubles, divis ou indivis, de la personne mise en examen.
« La condamnation vaut validation des saisies conservatoires et permet l'inscription définitive des sûretés.
« La décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement emporte de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures ordonnées. Il en est de même en cas d'extinction de l'action publique et de l'action civile.
« Pour l'application des dispositions du présent article, le juge des libertés et de la détention est compétent sur l'ensemble du territoire national.
« Section 8
« Dispositions communes
« Art. 706-99. - Le fait qu'à l'issue de l'enquête ou de l'information ou devant la juridiction de jugement la circonstance aggravante de bande organisée ne soit pas retenue ne constitue pas une cause de nullité des actes régulièrement accomplis en application des dispositions du présent titre.
« Art. 706-100. - Lorsque, au cours de l'enquête il a été fait application des dispositions des articles 706-80 à 706-96, la personne ayant été placée en garde à vue six mois auparavant et qui n'a pas fait l'objet de poursuites peut interroger le procureur de la République dans le ressort duquel la garde à vue s'est déroulée sur la suite donnée ou susceptible d'être donnée à l'enquête. Cette demande est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
« Lorsque le procureur de la République décide de poursuivre l'enquête préliminaire et qu'il envisage de procéder à une nouvelle audition de la personne au cours de cette enquête, cette personne est informée, dans les deux mois suivant la réception de sa demande, qu'elle peut demander qu'un avocat désigné par elle ou commis d'office à sa demande par le bâtonnier puisse consulter le dossier de la procédure. Le dossier est alors mis à la disposition de l'avocat au plus tard dans un délai de quinze jours à compter de la demande et avant, le cas échéant, toute nouvelle audition de la personne.
« Lorsque le procureur de la République a décidé de classer l'affaire en ce qui concerne la personne, il l'informe dans les deux mois suivant la réception de sa demande.
« Dans les autres cas, le procureur de la République n'est pas tenu de répondre à la personne. Il en est de même lorsqu'il n'a pas été fait application des dispositions des articles 706-80 à 706-96 au cours de l'enquête.
« Art. 706-101. - Lorsque, au cours de l'enquête, il a été fait application des dispositions des articles 706-80 à 706-96, la personne qui est déférée devant le procureur de la République en application des dispositions de l'article 393 a droit à la désignation d'un avocat. Celui-ci peut consulter sur-le-champ le dossier et communiquer librement avec elle, conformément aux dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article 393. La personne comparaît alors en présence de son avocat devant le procureur de la République qui, après avoir entendu ses déclarations et les observations de son avocat, soit procède comme il est dit aux articles 394 à 396, soit requiert l'ouverture d'une information.
« Si le procureur de la République saisit le tribunal correctionnel selon la procédure de comparution immédiate, les dispositions du deuxième alinéa de l'article 397-1 permettant au prévenu de demander le renvoi de l'affaire à une audience qui devra avoir lieu dans un délai qui ne peut être inférieur à deux mois sans être supérieur à quatre mois sont applicables, quelle que soit la peine encourue. »
II. - Après le titre XXIV du livre IV du même code, il est inséré un titre XXV bis ainsi rédigé :
TITRE XXV bis
Dispositions relatives à la répartition
du produit des amendes et confiscations
« Art. 706-101-1. - I. - La part attribuée au Trésor dans les produits d'amendes et de confiscations prononcées par les juridictions pénales est de 40 % du produit net des saisies.
« II. - Les conditions dans lesquelles le surplus est réparti sont déterminées par arrêtés conjoints du ministre de la justice, du ministre chargé de l'intérieur et du ministre de l'économie et des finances. Dans le cas de limitation des sommes revenant aux ayants droit, les arrêtés sont applicables à la répartition des produits non distribués à la date de publication desdits arrêtés au Journal officiel. »
Au sein de cet article, nous en sommes parvenus à l'article 706-81 du code de procédure pénale.
ARTICLE 706-81 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 291, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-81 du code de procédure pénale, après les mots : "fixées par décret", insérer les mots : "en Conseil d'Etat". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous avons défendu hier un amendement de même nature, mais le Sénat s'y est opposé : je ne me fais donc guère d'illusions.
Cela étant, M. le garde des sceaux n'a pas répondu hier à la question de savoir où le Gouvernement a l'intention d'installer les juridictions interrégionales spécialisées en matière de criminalité organisée. La réponse à cette question devrait pourtant intéresser tout le monde ! Si M. le secrétaire d'Etat voulait bien me l'apporter, j'en serais très heureux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zochetto, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. J'avais cru comprendre que M. Dreyfus-Schmidt tenait beaucoup à cet amendement. Il nous avait expliqué que les conditions d'habilitation des personnes appelées à procéder à des opérations d'infiltration devaient être déterminées par un décret en Conseil d'Etat et non par un décret simple. J'ai le sentiment qu'il est désormais moins attaché à cet amendement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Pas du tout !
M. François Zocchetto, rapporteur. Quoi qu'il en soit la commission souhaite entendre le Gouvernement sur cet amendement avant de se prononcer.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat aux programmes immobiliers de la justice. Je tiens d'abord à dire à M. Dreyfus-Schmidt que, bien entendu, nous lui apporterons, sur l'installation des juridictions interrégionales, les réponses qu'il attend lorsque ce sujet viendra à l'ordre du jour. Or je ne crois pas qu'il en soit question dans ce texte. En tout cas, je peux lui assurer que nous travaillons d'arrache-pied à ces implantations, qu'elles ne sont pas encore définitives, mais que, naturellement, le moment venu, le Parlement en sera informé.
Pour ce qui est de cet amendement, nous y sommes défavorables pour deux raisons.
D'une part, le fait d'habiliter des OPJ et des APJ à procéder à des infiltrations n'implique pas des modifications structurelles des services. Il s'agit, si j'ose dire, de nominations individuelles, qui ne remettent pas en cause l'organisation administrative du service concerné. Cela ne justifie donc pas la lourdeur d'un décret en Conseil d'Etat.
D'autre part, cette procédure est assez semblable à celle des écoutes téléphoniques, pour laquelle un décret simple suffit. Nous ne voyons pas pourquoi, dans un cas, il faudrait un décret simple et, dans l'autre, un décret en Conseil d'Etat.
M. le président. Quel est, maintenant, l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. La commission se rallie à l'avis du Gouvernement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 291.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 408, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-81 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "officier de police judiciaire" par les mots : "commissaire divisionnaire". »
La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. La légalisation de l'infiltration, que prévoit votre projet de loi, pose de multiples problèmes, nous l'avons déjà dit. Personne ne nie, par exemple, que ces missions d'infiltration peuvent être dangereuses pour les fonctionnaires concernés, jusqu'à mettre leur vie en jeu. Il est à craindre que ce risque ne soit d'ailleurs accru du fait de la suppression, par la commission des lois de l'Assemblée nationale, du caractère « exceptionnel » de ces opérations d'infiltration, suppression qui ouvre la voie sinon à une généralisation du moins à une banalisation de ces opérations puisqu'elles pourront être entreprises dans un grand nombre de situations.
On peut craindre également que leur multiplication n'expose ces fonctionnaires à un risque majeur de corruption morale, de perte de repères dans la mesure où ils seront parfois amenés à commettre des infractions.
Pour toutes ces raisons, nous proposons que le contrôle de ces opérations d'infiltration soit confié à un fonctionnaire de responsabilité tel que le commissaire divisionnaire, qui possède les compétences indispensables pour fixer précisément le cadre de l'opération et déterminer exactement le moment opportun pour y mettre un terme.
La spécificité de ces opérations ne nécessiterait-elle pas que des brigades soient spécialement formées et entraînées, toujours dans le souci de protéger les officiers de police judiciaire ? Notre police y gagnerait sans doute en sécurité et en efficacité.
On peut également s'interroger sur la valeur des preuves rassemblées par ce moyen. Quid de la loyauté dans le recueil des preuves dans un tel cadre ? Dès lors que l'agent infiltré est anonyme et doit le rester - cela va de soi -, pourra-t-on débattre contradictoirement du caractère légal du recueil de la preuve ? Un dossier pourra-t-il être fondé uniquement sur des preuves obtenues au moyen de l'infiltration, à savoir sur la base de procès-verbaux établis dans des conditions qui verraient le rôle de l'avocat de la défense se réduire comme peau de chagrin ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Mme Borvo propose que la coordination des opérations d'infiltration ne puisse être effectuée que par un commissaire divisionnaire, ce qui, dans la pratique, rendrait ces opérations beaucoup trop complexes. C'est pourquoi la commission ne peut souscrire à une telle proposition.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Naturellement, le législateur est souverain, mais il ne me paraît pas judicieux d'entrer ainsi, dans la loi, dans le détail des grades de l'administration de la police. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement demande le retrait ou, à défaut, le rejet de cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 408.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 303, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-81 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "suspectées de commettre un crime ou un délit" par les mots : "contre lesquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elles ont commis l'un des crimes et délits entrant dans le champ d'application de l'article 706-73". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. La formule « suspectées de commettre un crime ou un délit » ne nous paraît pas très juridique. Le Sénat, suivi par l'Assemblée nationale, a retenu dans le passé une autre formule, qui ne nous satisfaisait pas forcément mais qui figure désormais dans de très nombreux articles : il s'agit des personnes « contre lesquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elles ont commis l'un des crimes et délits entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 ». Telle est la définition, juridiquement plus stricte, du suspect.
Si le Sénat n'a pas l'intention d'adopter une « loi des suspects » - cela s'est déjà vu dans l'histoire -, il adoptera notre amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. La commission a étudié de près la proposition de M. Dreyfus-Schmidt. Elle peut être intéressante, à condition toutefois qu'elle n'implique pas que l'infiltration n'est entreprise qu'une fois l'infraction commise.
La commission souhaite recueillir l'avis du Gouvernement sur ce point.
M. le président. Quel est, donc, l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Cet avis est défavorable.
L'opération d'infiltration est une procédure spécifique, consistant, je le rappelle, pour l'officier ou l'agent de police judiciaire spécialement habilité, à infiltrer un groupe criminel qui, ayant déjà commis des infractions, est soupçonné de vouloir en commettre à nouveau. C'est précisément la raison pour laquelle la loi permet à l'agent infiltré, pour les besoins de l'opération à laquelle il participe, de commettre lui-même - sans être pénalement responsable - un certain nombre d'infractions limitativement énumérées.
Dès lors, l'adoption de cet amendement, qui ne vise que les personnes « contre lesquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elles ont commis l'un des crimes et délits entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 », entraînerait, de notre point de vue, une inefficacité de la procédure d'infiltration. (M. Dreyfus-Schmidt s'esclaffe.)
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 303.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je rappelle qu'il s'agit ici de la définition de l'infiltration, laquelle consiste, pour un policier spécialement habilité, à surveiller des personnes. Le texte actuel vise des « personnes suspectées de commettre un crime ou un délit ». Nous proposons qu'il s'agisse des « personnes contre lesquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elles ont commis l'un des crimes et délits entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 ». Sans doute la formulation « qu'elles ont commis » ne convient-elle pas en l'occurrence, et je rectifie mon amendement, monsieur le président, de manière qu'y soient visés les crimes et délits « qu'elles s'apprêtent à commettre ou qu'elles commettent ».
Quoi qu'il en soit, à ma connaissance, dans le code de procédure pénale, il n'est nulle part question de « suspects ». C'est contre cette formule que nous nous élevons.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 303 rectifié, qui est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-81 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "suspectées de commettre un crime ou un délit" par les mots : "contre lesquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elles s'apprêtent à commettre ou qu'elles commettent l'un des crimes et délits entrant dans le champ d'application de l'article 706-73". »
L'avis de la commission et celui du Gouvernement restent-ils défavorables ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Oui, monsieur le président.
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Idem.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 303 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le texte proposé pour l'article 706-81 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 706-82 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 409, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« A la fin du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-82 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "de ces actes" par les mots : "des actes effectués pour les stricts besoins de l'enquête ou de l'instruction". »
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Le projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité ouvre très largement, on le sait, les possibilités d'infiltration.
Dans le cadre de ces opérations, l'officier de police judiciaire peut être amené à commettre un ou plusieurs actes illégaux sans être préalablement inquiété.
On doit tout d'abord noter que cette liste d'actes est particulièrement étendue, nous l'avons souligné hier dans la discussion générale, par rapport à l'état actuel du droit en matière de stupéfiants : en effet, si l'achat de stupéfiants fait partie des actes « autorisés » lors des infiltrations, il n'en est pas de même des « coups de vente » - formule utilisée par la police - de ces substances, selon la jurisprudence actuelle.
Par ailleurs, à la différence de la législation actuelle sur les stupéfiants, ces actes peuvent être commis sur l'ensemble du territoire national.
Cette appréhension très extensive de l'exonération des actes commis par l'agent infiltré justifie un strict encadrement.
Tel est le sens de notre amendement : nous préconisons que ces actes ne puissent donner lieu à irresponsabilité pénale que pour les « stricts besoins de l'enquête ou de l'instruction ».
Je rappelle que ces actes ne constituent nullement des procédés « nouveaux » d'enquête.
Mes chers collègues, nous vous demandons d'adopter cet amendement, qui répond d'ailleurs au souci de rigueur juridique évoqué par la commission des lois pour expliquer l'encadrement souhaité de l'irresponsabilité des personnes requises par un officier de police judiciaire.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Nous considérons que cet amendement sera satisfait par l'amendement n° 12, que j'exposerai tout à l'heure.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Défavorable.
Les actes, limitativement énumérés, pouvant être accomplis par un agent lors d'une opération d'infiltration sont déjà strictement encadrés par les dispositions de l'article 706-81 du code de procédure pénale.
Par ailleurs, j'ose dire - j'espère que vous ne le prendrez pas mal, monsieur le sénateur ! - qu'ajouter ces mots me paraît un peu superfétatoire et risque d'alourdir le texte, même si j'approuve les intentions que vous avez exprimées.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 409.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 410, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade etM. Vergès, est ainsi libellé :
« Supprimer le quatrième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-82 du code de procédure pénale. »
L'amendement n° 12, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le dernier alinéa du texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-82 du code de procédure pénale :
« L'exonération de responsabilité prévue au premier alinéa est également applicable, pour les actes commis à seule fin de procéder à l'opération d'infiltration, aux personnes requises par les officiers ou agents de police judiciaire pour permettre la réalisation de cette opération. »
La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 410.
M. Robert Bret. Dans le prolongement de l'amendement précédent, nous soutenons que le nouveau régime de l'infiltration ne constitue pas une clause d'irresponsabilité.
Le champ particulièrement vaste de l'exonération de responsabilité, du point de vue tant géographique que des actes « permis » à l'officier de police judiciaire, doit s'accompagner d'un strict encadrement. Au regard de la justice et du code pénal, cette mesure n'a rien de superfétatoire, monsieur le secrétaire d'Etat !
Il nous paraît particulièrement dommageable que des personnes requises par les officiers de police judiciaire puissent bénéficier du même régime : il ne peut être en effet question d'ériger la commission d'actes illégaux en norme, quand bien même elle servirait les besoins de l'enquête.
L'encadrement prévu par la commission des lois, qui réserve l'exonération de responsabilité de ces personnes aux actes « commis à seule fin de procéder à l'opération d'infiltration », constitue sans doute une amélioration, mais il nous paraît insuffisant.
C'est pourquoi nous vous proposons la suppression pure et simple de cet alinéa.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 12.
M. François Zocchetto, rapporteur. Le projet prévoit une exonération de responsabilité pénale pour les personnes qui facilitent la réalisation d'une opération d'infiltration. La rédaction proposée est cependant ambiguë, car cette disposition peut viser aussi bien les personnes requises par la police pour apporter une contribution technique que des membres du groupe criminel qui faciliteraient l'infiltration de l'officier de police judiciaire.
Selon nous, il convient donc de préciser clairement que l'exonération de responsabilité ne peut, en tout état de cause, valoir que pour les actes commis à seule fin de procéder à l'infiltration.
En conséquence, la commission est défavorable à l'amendement n° 410.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. L'amendement n° 12, présenté par la commission, améliore grandement le texte.
Un débat sur ce sujet a déjà eu lieu à l'Assemblée nationale. La formule retenue par la commission des lois du Sénat est, me semble-t-il, la bonne, parce qu'elle permet de sécuriser la procédure tout en évitant les dérives.
L'amendement n° 410 ne peut, selon moi, tendre au même résultat. J'y suis donc défavorable. Permettez-moi de prendre un exemple concret : si, dans le cadre d'une opération d'infiltration, un agent demande à un banquier d'ouvrir un compte pour y déposer de l'argent « sale », peut-on considérer que le banquier doit être exonéré de responsabilité ? La réponse est manifestement positive ! Toutefois, dans le cadre de la procédure mise en place, il faut naturellement que le « délit » s'arrête là et, si le banquier adopte une autre attitude, il faudra qu'il puisse être poursuivi.
Le Gouvernement est donc favorable à l'amendement n° 12 et défavorable à l'amendement n° 410.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 410.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 706-82 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 706-83 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. Je mets aux voix le texte proposé pour l'article 706-83 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 706-84 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 292, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans les avant-dernier et dernier alinéas du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-84 du code de procédure pénale, supprimer les mots : ", même indirectement,". »
La parole est à M. Robert Badinter.
M. Robert Badinter. Il s'agit là simplement d'une question de clarté. L'insertion des mots « même indirectement » n'apporte rien. Le lien de causalité entre l'acte et sa conséquence dans le cadre d'une infraction est toujours laissé à l'appréciation du juge du fait ! La précision proposée est inutile et ne fera que nourrir la controverse.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. La commission est favorable à l'amendement que vient d'exposer M. Badinter. La précision selon laquelle la révélation de l'identité d'un infiltré est pénalement sanctionnée lorsqu'elle a causé indirectement des violences ou la mort de cet agent ou de ses proches risque de rendre la mise en oeuvre du dispositif de l'infiltration particulièrement délicate. Il paraît donc préférable de supprimer cette précision.
M. Pierre Fauchon. Dans les deux derniers alinéas de l'article ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. En entrant dans cet hémicycle, j'étais plutôt défavorable à la suppression de cette précision, mais je ne suis pas insensible aux arguments de M. Badinter et de M. le rapporteur. Je demeure toutefois un peu sceptique. En effet, surprotéger ceux qui vont prendre des risques importants me semble après tout normal. De ce point de vue, l'expression « même indirectement » ne me choque donc pas.
Toutefois, pour tenir compte des arguments qui ont été développés, je m'en remets à la sagesse du Sénat, même si je continue à penser que nous devons surprotéger les agents qui prennent ce genre de risques.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ou cela a causé, ou cela n'a pas causé !
M. le président. La parole est à Pierre Fauchon, pour explication de vote.
M. Pierre Fauchon. Il me paraît important de supprimer les mots « même indirectement » : sinon, on pourrait tirer argument du maintien de cette expression dans le présent texte pour dire que, dans d'autres textes, la causalité doit être directe. Comme le disait M. Badinter, les juristes savent que la causalité peut être directe ou indirecte ! Ne modifions pas ce schéma, parce que nous ne le ferions pas sans risque et sans dommages collatéraux.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 292.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 706-84 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 706-85 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 13, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-85 du code de procédure pénale :
« Art. 706-85. - En cas de décision d'interruption de l'opération ou à l'issue du délai fixé par la décision autorisant l'opération et en l'absence de prolongation, le magistrat ayant délivré l'autorisation prévue à l'article 706-81 fixe un délai pendant lequel l'agent infiltré peut poursuivre les activités mentionnées à l'article 706-82 sans en être pénalement responsable, afin de lui permettre de cesser sa surveillance dans des conditions assurant sa sécurité. »
L'amendement n° 251, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-85 du code de procédure pénale :
« Art. 706-85. - En cas de décision d'interruption ou à l'issue du délai fixé par la décision autorisant l'opération et en l'absence de prolongation, l'agent infiltré peut poursuivre, sur autorisation du magistrat qui a délivré l'autorisation prévue à l'article 706-81, les activités mentionnées à l'article 706-82, sans en être pénalement responsable, le temps strictement nécessaire pour lui permettre de cesser sa surveillance dans des conditions assurant sa sécurité. Le magistrat est informé de l'achèvement de l'opération d'infiltration. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 13.
M. François Zocchetto, rapporteur. Toujours dans le souci de protéger juridiquement l'agent infiltré, il paraît souhaitable que le magistrat ayant autorisé l'opération d'infiltration lui fixe un délai butoir, en tenant compte des particularités de l'affaire, pour cesser son opération.
En l'absence d'un tel délai, l'appréciation du « temps strictement nécessaire » mentionné dans le projet de loi pourrait donner lieu à des contentieux.
Par ailleurs, monsieur le président, je rectifie cet amendement, en ajoutant, après les mots : « le magistrat ayant délivré l'autorisation prévue à l'article 706-81 fixe », les mots : « , par une décision renouvelable, ».
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 13 rectifié, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-85 du code de procédure pénale :
« Art. 706-85. - En cas de décision d'interruption de l'opération ou à l'issue du délai fixé par la décision autorisant l'opération et en l'absence de prolongation, le magistrat ayant délivré l'autorisation prévue à l'article 706-81 fixe, par une décision renouvelable, un délai pendant lequel l'agent infiltré peut poursuivre les activités mentionnées à l'article 706-82 sans en être pénalement responsable, afin de lui permettre de cesser sa surveillance dans des conditions assurant sa sécurité. »
La parole est à M. Pierre Fauchon, pour défendre l'amendement n° 251.
M. Pierre Fauchon. D'une manière générale, dans ces affaires d'infiltration extraordinairement nécessaires mais aussi extraordinairement délicates, on multiplie les prescriptions de telle sorte que l'infiltré devrait se déplacer un code de procédure à la main pour être sûr qu'il n'est pas en train de commettre une erreur. Je doute alors du résultat heureux de ses opérations ! Ne prendrait-il pas encore plus de risques ?
Quoi qu'il en soit, face à ce travers tout à fait français qui consiste à introduire toujours plus de réglementations, le groupe de l'Union centriste avait envisagé d'aménager les conditions dans lesquelles l'infiltré pouvait se retirer : il ne suffit pas de s'infiltrer, encore faut-il pouvoir s'exfiltrer en toute sécurité !
Toutefois, la commission, dans sa grande sagesse, a prévu un dispositif similaire. Il est même certainement meilleur, puisqu'il émane de la commission des lois... et donc notamment d'un membre du groupe de l'Union centriste.
Dans ces conditions, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 251 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 13 rectifié ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Je remercie M. Fauchon d'avoir retiré un amendement qui était assez similaire à celui que la commission a déposé.
Je n'étais pas favorable à l'amendement initial de la commission, mais la modification introduite par M. le rapporteur me convient tout à fait, dans la mesure où elle évite toute rigidité excessive. A partir du moment où cet amendement rectifié redonne de la souplesse au dispositif de l'infiltration - qui, comme le disait M. Fauchon, est extraordinairement délicat et complexe - nous ne pouvons qu'être satisfaits.
Je suis donc favorable à cet amendement rectifié.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. La précision apportée par la commission des lois est tout à fait souhaitable. Il faut en effet que le délai soit fixé par une décision renouvelable. Il s'agit là d'un domaine très difficile et les circonstances peuvent commander un renouvellement.
Par conséquent, nous voterons cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article 706-85 du code de procédure pénale est ainsi rédigé.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 706-86 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. Je mets aux voix le texte proposé pour l'article 706-86 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 706-87 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. Le texte proposé pour l'article 706-87 du code de procédure pénale a été supprimé par l'Assemblée nationale. Mais je suis saisi de deux amendements tendant à le rétablir et qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 14, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rétablir dans la rédaction suivante le texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-87 du code de procédure pénale :
« Art. 706-87. - Aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement des déclarations faites par les officiers ou agents de police judiciaire ayant procédé à une opération d'infiltration.
« Les dispositions du présent article ne sont cependant pas applicables lorsque les officiers ou agents de police judiciaire déposent sous leur véritable identité. »
L'amendement n° 293, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Rétablir le texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-87 du code de procédure pénale dans la rédaction suivante :
« Art. 706-87. - Aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement des déclarations faites par les officiers ou agents de police judiciaire ayant procédé à une opération d'infiltration. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 14.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'Assemblée nationale a supprimé la disposition interdisant de condamner une personne sur le seul fondement des déclarations d'officiers de police judiciaire ayant procédé à une infiltration. Elle a estimé que cette règle n'avait pas à s'appliquer à des officiers de police judiciaire, dès lors qu'ils étaient assermentés.
Toutefois, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme interdit de fonder une condamnation essentiellement sur des déclarations anonymes, même lorsqu'il s'agit de déclarations de policiers. Cela résulte clairement de l'arrêt Van Mechelen.
La commission des lois propose donc de rétablir le texte initial du projet de loi tout en précisant que l'interdiction ne vaut que pour les déclarations faites anonymement. Si l'officier de police infiltré choisit de dévoiler son identité, ses déclarations pourront naturellement constituer, éventuellement, le seul fondement de la condamnation.
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. C'est logique !
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour présenter l'amendement n° 293.
M. Robert Badinter. Notre amendement est identique au premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 14 de la commission pour l'article 706-87 du code de procédure pénale. En conséquence, nous retirons notre amendement.
S'agissant du second alinéa de l'amendement n° 14, selon lequel les dispositions du présent article ne sont pas applicables lorsque les officiers ou agents de police judiciaire déposent sous leur véritable identité, je pourrais presque dire que cela va de soi au regard de la jurisprudence. Il appartient au magistrat d'apprécier si la déposition et le rapport présenté suffisent. Cette disposition me gêne un peu dans la mesure où elle rappelle un principe général.
J'observerai, pour conclure, que nous avons ici une illustration supplémentaire des transformations constantes de notre procédure pénale à la faveur de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, sans laquelle cet amendement de la commission des lois n'aurait pas vu le jour.
M. le président. L'amendement n° 293 est retiré.
Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 14 ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement émet un avis totalement favorable sur l'amendement n° 14. J'en profite pour souligner encore une fois la qualité du travail accompli par la commission qui nous permet de parvenir à un parfait équilibre entre les intentions du législateur et la nécessité de défendre les libertés individuelles.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article 706-87 du code de procédure pénale est rétabli dans cette rédaction.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 706-88 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 294 est présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.
L'amendement n° 411 est présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade etM. Vergès.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-88 du code de procédure pénale. »
L'amendement n° 15, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-88 du code de procédure pénale :
« Art. 706-88. _ Pour l'application des articles 63, 77 et 154, si les nécessités de l'enquête ou de l'instruction relatives à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 l'exigent, la garde à vue d'une personne peut, à titre exceptionnel, faire l'objet de deux prolongations supplémentaires de vingt-quatre heures chacune.
« Ces prolongations sont autorisées, par décision écrite et motivée, soit, à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, soit par le juge d'instruction.
« La personne gardée à vue doit être présentée au magistrat qui statue sur la prolongation préalablement à cette décision. La seconde prolongation peut toutefois, à titre exceptionnel, être autorisée sans présentation préalable de la personne en raison des nécessités des investigations en cours ou à effectuer.
« Lorsque la première prolongation est décidée, la personne gardée à vue est examinée par un médecin désigné par le procureur de la République, le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire. Le médecin délivre un certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l'aptitude au maintien en garde à vue, qui est versé au dossier. La personne est avisée par l'officier de police judiciaire du droit de demander un nouvel examen médical. Ces examens médicaux sont de droit. Mention de cet avis est portée au procès-verbal et émargée par la personne intéressée ; en cas de refus d'émargement, il en est fait mention.
« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, si la durée prévisible des investigations restant à réaliser à l'issue des premières quarante-huit heures de garde à vue le justifie, le juge des libertés et de la détention ou le juge d'instruction peuvent décider, selon les modalités prévues au deuxième alinéa, que la garde à vue fera l'objet d'une seule prolongation supplémentaire de quarante-huit heures.
« La personne dont la garde à vue est prolongée en application des dispositions du présent article peut demander à s'entretenir avec un avocat, selon les modalités prévues par l'article 63-4, à l'issue de la quarante-huitième heure puis de la soixante-douzième heure de la mesure ; elle est avisée de ce droit lorsque la ou les prolongations lui sont notifiées et mention en est portée au procès-verbal et émargée par la personne intéressée ; en cas de refus d'émargement, il en est fait mention. Toutefois, lorsque l'enquête porte sur une infraction entrant dans le champ d'application des 3° et 9° de l'article 706-73, l'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à l'issue de la soixante-douzième heure. »
Le sous-amendement n° 469, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans le cinquième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 15 pour l'article 706-88 du code de procédure pénale, après les mots : "le juge des libertés et de la détention ou le juge d'instruction peuvent décider," insérer les mots : "à la suite d'un débat contradictoire, en présence de l'avocat,". »
L'amendement n° 295, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Supprimer la seconde phrase du troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-88 du code de procédure pénale. »
L'amendement n° 296, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter in fine le troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-88 du code de procédure pénale par une phrase ainsi rédigée : "Elle fait l'objet d'une décision écrite et spécialement motivée". »
L'amendement n° 283, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« I. - Au début de l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-88 du code de procédure pénale, insérer une phrase ainsi rédigée :
« Dès le début de la garde à vue ainsi qu'à l'issue de la vingtième heure, la personne peut demander à s'entretenir avec un avocat selon les modalités prévues à l'article 63-4 du code de procédure pénale. »
« II. - Dans l'avant-dernier alinéa du même texte, après les mots : "par l'article 63-4", remplacer les mots : "à l'issue de la quarante-huitième heure puis de la soixante-douzième heure de la mesure" par les mots : "à l'issue de la douzième heure de la mesure et de la trente-sixième heure". »
L'amendement n° 297, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-88 du code de procédure pénale, après les mots : "par l'article 63-4, à l'issue", insérer les mots : "de la trente-sixième heure,". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 294.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il s'agit de nouveau de la garde à vue, sujet que nous évoquons depuis longtemps dans cet hémicycle.
Le projet de loi vise à étendre de manière très importante la garde à vue, puisqu'elle peut se prolonger jusqu'à quatre-vingt-seize heures.
La garde à vue correspondait, à l'origine, au temps nécessaire pour que la personne arrêtée se rende au bureau du juge devant lequel il était normal de la déférer le plus rapidement possible. Mais, à l'époque, les routes n'étaient pas ce qu'elles sont devenues, il n'y avait pas de TGV, pas d'avion. Le délai maximal de vingt-quatre heures était celui de l'habeas corpus.
L'introduction de l'avocat dans le cabinet du juge d'instruction a contrarié ceux qui ont la religion de l'aveu et qui pensent que la garde à vue est devenue un moyen d'obtenir des aveux indépendamment de la présence de cet importun qu'est l'avocat, et dans des conditions telles que, comme de nombreuses jurisprudences, hélas !, le démontrent, il y a, bien souvent, rétractation des aveux et la preuve est faite ensuite qu'ils ne reflétaient pas la vérité.
J'évoquais hier, lors de la discussion générale, l'affaire Roman dont chacun se souvient. A l'époque, fort heureusement, les gendarmes et les policiers n'agissaient pas de concert, comme aujourd'hui avec M. Sarkozy, et la concurrence permettait aux uns de révéler la vérité sur ce qui s'était passé chez les autres.
Il faut dire que les conditions matérielles dans lesquelles la garde à vue est effectuée sont indignes d'une démocratie moderne. Vous avez le droit, mes chers collègues, d'aller visiter les locaux de garde à vue.
Il s'agit de locaux sans lumière, avec une simple planche en guise de lit, dans lesquels sont maintenues, pour leur temps éventuel de repos, les personnes qui sont placées en garde à vue.
Qui qu'elles soient et quel que soit le motif de la garde à vue, quitte à être finalement le plus souvent blanchies - et de nombreux élus sont passés par là, comme M. Alain Vasselle nous l'a rappelé -, on leur enlève leurs lacets, leur ceinture. On leur donne s'ils ont de l'argent un sandwich, et encore, pas dans tous les cas.
Vingt-quatre heures de ce régime, c'est déjà long ! Mais le prolonger pendant quarante-huit heures, soixante-douze heures, quatre-vingt-seize heures, est inacceptable. Peut-être un jour sera-t-il admis que les personnes placées en garde à vue soient nourries et traitées avec égards.
Certes, dans les cas qui peuvent se produire où la personne risque de se suicider avec sa ceinture, il vaut peut-être mieux la lui ôter. Mais il n'y a pas de raison de brimer une personne respectable qui n'a rien à se reprocher.
Or, tant que les conditions de la garde à vue seront ce qu'elles sont, il n'est pas tolérable qu'elle dure plus de vingt-quatre heures. Tel est le sens de notre amendement. Nous refusons une garde à vue de quatre-vingt-seize heures.
Je vous rappelle que les personnes placées en garde à vue peuvent parfaitement être innocentes, ce qui arrive évidemment.
M. Pierre Fauchon. Il arrive aussi qu'elles soient coupables !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Certes, il arrive aussi qu'elles soient coupables, mais qu'elles soient innocentes ou coupables, nous estimons que plus une affaire est grave, plus le procès doit être équitable et plus l'intéressé doit bénéficier de garanties.
La garde à vue prolongée existait déjà, hélas !, en matière de trafic de stupéfiants. Elle a été ensuite étendue aux affaires de terrorisme. Et aujourd'hui on veut l'instaurer pour de très nombreux autres cas. Il suffira qu'il y ait bande organisée, c'est-à-dire au moins deux personnes. Cette disposition nous paraît absolument contraire à un droit moderne et indigne de la France.
Je sais que c'est le ministre de l'intérieur qui a la responsabilité des locaux de garde à vue et non le garde des sceaux. Mais il me semble que lorsque l'on est chargé de construire les prisons, on pourrait tout de même s'intéresser aussi aux annexes de prison que sont les locaux de garde à vue. Après tout, il y a suffisamment de relations et même souvent d'entente entre le ministère de l'intérieur et celui de la justice pour que cela soit possible. Ce que je dis est vrai pour tous les gouvernements précédents, sans exception.
Il serait souhaitable que l'on n'étende pas la durée de la garde à vue tant que l'on ne disposera pas de conditions et de locaux de garde à vue décents.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 411.
Mme Nicole Borvo. Monsieur le président, je ne répéterai pas les excellents propos tenus par mon collègue Michel Dreyfus-Schmidt. J'ajoute simplement que de nombreux problèmes sont posés par l'extension à quatre-vingt-seize heures de la garde à vue pour un grand nombre d'infractions dont, je l'ai dit, la qualification est sujette à interprétation.
En réalité, la mesure excessive qui est proposée s'apparente à une « prédétention provisoire », autant le dire ! De plus, ce nouveau régime dérogatoire vient s'ajouter à ceux qui existent déjà et tend à faire des régimes d'exception la règle. J'avais espéré que la durée de la garde à vue ne serait plus remise en question puisque nous semblions tous d'accord il n'y a pas si longtemps pour la limiter le plus possible d'une façon générale. Les conditions de la garde à vue sont de surcroît humiliantes, ce qui ne devrait pas être le cas dans notre système judiciaire, selon moi.
La commission a par ailleurs refusé nos propositions d'humanisation des conditions de garde à vue en répondant qu'elles relevaient non pas de la loi mais du décret.
Je pense qu'il revient à la loi de dire que les conditions de garde à vue doivent être dignes de la personne humaine.
Nous sommes donc franchement opposés à une garde à vue de quatre-vingt-seize heures.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 15.
M. François Zocchetto, rapporteur. Sur le thème de la garde à vue, la commission des lois du Sénat se montre particulièrement vigilante. Lors de l'examen de la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, elle avait déjà tenu à rappeler les grands principes, notamment le fait que, dans l'écrasante majorité des cas, la présence de l'avocat doit être prévue dès la première heure de la garde à vue.
Ce principe n'est pas remis en cause par le texte. D'ailleurs, il n'y a quasiment aucune remise en cause.
Nous aurons l'occasion de parler des conditions de garde à vue ultérieurement, lorsque nous débattrons de l'article 5. La commission fera des propositions allant dans le sens de la préservation des moyens de la défense.
S'agissant de l'article qui nous intéresse maintenant, nous avons le souci de faire en sorte que la procédure soit sécurisée au maximum et qu'il y ait le moins de risques de nullité possible. Il est vrai que le projet de loi, à l'origine, avait pour effet de complexifier gravement les régimes de garde à vue, avec une difficulté pour les différents intervenants, c'est-à-dire les officiers de police judiciaire, les magistrats, les avocats, voire le gardé à vue, de se retrouver dans ce maquis.
L'Assemblée nationale a simplifié ces règles, mais elle l'a fait notamment en reculant la visite de l'avocat à la soixante-douzième heure pour un grand nombre d'infractions. Nous reviendrons sur ce point lorsque nous aborderons l'article 5.
L'amendement n° 15 a pour objet de simplifier le dispositif qui nous vient de l'Assemblée nationale dans un souci d'équilibre. Il prévoit d'abord la possibilité de prolonger la garde à vue jusqu'à quatre-vingt-seize heures par deux prolongations supplémentaires de vingt-quatre heures chacune, la personne étant obligatoirement présentée au juge des libertés et de la détention ou au juge d'instruction lors de la première prolongation. Nous tenons à cette précision.
L'amendement prévoit ensuite un examen du gardé à vue par un médecin lors de la première prolongation de la garde à vue ainsi que le droit pour la personne de demander d'autres examens médicaux du même type. Il s'agit de faire en sorte que le médecin puisse confirmer la compatibilité de l'état de santé de la personne avec sa situation de garde à vue.
L'amendement vise également à prolonger directement la garde à vue de quarante-huit heures supplémentaires lorsque la durée prévisible des investigations restant à réaliser à l'issue des premières quarante-huit heures le justifie.
Enfin, l'amendement confirme le droit de s'entretenir avec un avocat à l'issue de la quarante-huitième heure, puis de la soixante-douzième heure de garde à vue. Je rappelle qu'en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants l'avocat ne pourrait venir qu'à la soixante-douzième heure, mais cette disposition ne change rien par rapport à la situation actuelle.
Les propos tenus par les deux précédents intervenants m'ont amené à distinguer deux problèmes. Il s'agit d'abord d'un problème de fond qui est de savoir si l'on veut le système de la garde à vue en France ou si l'on n'en veut pas. Le Gouvernement souhaite pour sa part le maintien en France du système de garde à vue qui a été mis en place par la loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes.
L'autre question consiste à savoir dans quelles circonstances et quelles conditions sont gardées à vue les personnes qui sont suspectées d'avoir commis des faits.
Le ministre de l'intérieur a rappelé récemment que les conditions dans lesquelles les personnes étaient gardées à vue étaient très variables. Cet hémicycle compte de nombreux praticiens du droit qui, étant eux-mêmes entrés dans des locaux de garde de vue, ont pu constater que, selon les commissariats et les gendarmeries, selon l'heure du jour ou de la nuit, les circonstances peuvent varier.
Je pense que nous pouvons saluer l'initiative toute récente du ministre de l'intérieur qui a rappelé les droits fondamentaux du gardé à vue et qui envisage, s'il ne l'a pas déjà fait, de donner des moyens matériels aux services de police et de gendarmerie pour permettre de garder à vue les personnes dans des conditions décentes, en préservant les droits de la défense et les libertés individuelles.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter le sous-amendement n° 469.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je vous indique, monsieur le président, que nous souhaitons transformer les amendements n°s 295, 296, 283 et 297 en sous-amendements à l'amendement n° 15 de la commission des lois.
M. le président. Le sous-amendement n° 295 rectifié, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Supprimer la seconde phrase du troisième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 15 pour l'article 706-88 du code de procédure pénale. »
Le sous-amendement n° 296 rectifié, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter in fine le troisième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 15 pour l'article 706-88 du code de procédure pénale par une phrase ainsi rédigée : "Elle fait l'objet d'une décision écrite et spécialement motivée". »
Le sous-amendement n° 283 rectifié, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« I. - Au début du dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 15 pour l'article 706-88 du code de procédure pénale, insérer une phrase ainsi rédigée : "Dès le début de la garde à vue ainsi qu'à l'issue de la vingtième heure, la personne peut demander à s'entretenir avec un avocat selon les modalités prévues à l'article 63-4 du code de procédure pénale."
« II. - Dans le dernier alinéa du même texte, après les mots : " par l'article 63-4", remplacer les mots : "à l'issue de la quarante-huitième heure puis de la soixante-douzième heure de la mesure" par les mots : "à l'issue de la douzième heure de la mesure et de la trente-sixième heure". »
Le sous-amendement n° 297 rectifié, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans le dernier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 15 pour l'article 706-88 du code de procédure pénale, après les mots : "par l'article 63-4, à l'issue", insérer les mots : "de la trente-sixième heure,". »
Veuillez poursuivre, monsieur Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le cinquième alinéa de l'amendement n° 15 précise : « Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, si la durée prévisible des investigations restant à réaliser à l'issue des premières quarante-huit heures de garde à vue le justifie, le juge des libertés et de la détention ou le juge d'instruction peuvent décider, selon les modalités prévues au deuxième alinéa, que la garde à vue fera l'objet d'une seule prolongation supplémentaire de quarante-huit heures. »
Autrement dit, il s'agit non pas d'ajouter d'abord vingt-quatre heures puis encore vingt-quatre heures, mais de passer tout de suite à quarante-huit heures.
Le sous-amendement n° 469 vise à instaurer un débat contradictoire devant le juge des libertés et de la détention ou devant le juge d'instruction en présence de l'avocat de l'intéressé de manière que l'avocat puisse faire valoir les raisons pour lesquelles il n'y a pas lieu de prolonger d'un seul coup de quarante-huit heures une garde à vue qui a déjà duré quarante-huit heures !
J'en viens au sous-amendement n° 295 rectifié. Nul ne conteste la disposition de l'amendement n° 15 selon laquelle la personne gardée à vue doit être présentée au magistrat qui statue sur la prolongation préalablement à cette décision. Il s'agit là d'une bonne idée, car il est tout de même intéressant de savoir dans quel état se trouve l'intéressé après avoir subi des interrogatoires parfois très prolongés, dans les conditions matérielles que j'ai décrites et en l'absence totale ou partielle de l'avocat.
Cependant, la seconde phrase du troisième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 15 dispose que la seconde prolongation peut toutefois, à titre exceptionnel, être autorisée sans présentation préalable de la personne en raison des nécessités des investigations en cours ou à effectuer.
Or nous estimons que, dans tous les cas, avant qu'une prolongation ne soit ordonnée, l'intéressé doit être présenté au procureur de la République ou au juge d'instruction - à moins que le procureur, ou le juge d'instruction, ne se déplace pour des raisons pratiques.
Ce débat a déjà eu lieu devant le Sénat. Nous avions alors été nombreux à être d'accord, y compris sur les bancs de la majorité sénatoriale. Le garde des sceaux de l'époque, Mme Guigou, nous avait donné la preuve que, dans l'esprit du gouvernement, ce qui était qualifié de « à titre exceptionnel » serait en vérité la règle générale. Elle nous a même expliqué que cela coûterait beaucoup trop cher de déplacer à chaque fois le magistrat vers l'intéressé ou d'amener ce dernier au magistrat, et nous a opposé, à nous !, l'article 40 de la Constitution.
M. Jean-Jacques Hyest. Quelle horreur ! (Sourires.)
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous avions trouvé cela scandaleux à l'époque et nous l'avons dit. Nous avions du mérite, car c'était le gouvernement que nous soutenions qui avait opposé l'article 40. Mais vous, pour la plupart, étiez d'accord avec nous. Aujourd'hui, nous vous demandons d'être fidèles à vos positions d'hier : lorsqu'une garde à vue qui a déjà duré quarante-huit heures est prolongée, soit pour vingt-quatre heures, soit pour quarante-huit heures, la moindre des choses est qu'il n'y ait pas une exception dont on pense en vérité qu'elle doit être la règle. Il faut supprimer une telle exception. Tel est l'objet de notre sous-amendement.
Le sous-amendement n° 296 rectifié est un sous-amendement de repli. S'il y a - hélas ! - une prolongation sans présentation, faute d'avoir retenu notre sous-amendement précédent, nous demandons que le magistrat se donne la peine de décrire et de motiver de manière spécifique, compte tenu de l'affaire, la prolongation.
Il est trop facile de donner son accord par téléphone ou que le procureur le donne par avance sans même que les officiers de police judiciaire prennent la peine de le demander, ce qui pourrait - on peut l'imaginer - se produire dans des cas très rares, évidemment.
Encore une fois, c'est donc à titre subsidiaire que nous présentons ce sous-amendement.
Avec le sous-amendement n° 283 rectifié - il s'agit d'une gradation - nous demandons le rétablissement de ce qui est aujourd'hui la règle.
Aujourd'hui, l'avocat est présent à la première heure de la garde à vue, d'une part, à la vingtième heure, d'autre part, c'est-à-dire avant qu'il soit question de prolongation. Cela peut être intéressant, car l'avocat a alors la possibilité de faire valoir au magistrat qu'il n'y a pas de prolongation possible. Il peut même arriver que, pour éviter l'entretien avec l'avocat à la vingtième heure, la garde à vue prenne fin avant la vingtième heure.
Dans l'état actuel des choses, s'il y a prolongation à la trente-sixième heure, c'est-à-dire au bout de douze heures, il y a de nouveau un entretien possible avec l'avocat.
Or, très curieusement, même en droit commun - mais ce n'est pas le cas ici -, seraient supprimées la vingtième heure, la trente-sixième heure. En revanche, serait mise en place la vingt-quatrième heure, ce qui paraît tout de même assez extraordinaire ! On ne comprend pas pourquoi la vingt-quatrième heure.
Le sous-amendement n° 283 rectifié tend donc à en revenir à la situation actuelle, et à ce que la présence de l'avocat soit possible à l'issue de la douzième heure et de la trente-sixième heure.
Enfin, par notre sous-amendement n° 297 rectifié, qui est aussi de repli, nous demandons que l'avocat soit présent au moins à la trente-sixième heure.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Pour éclairer complètement nos collègues, je tiens à rappeler dans quel cadre se situent lesdites prolongations.
Il s'agit bien de la criminalité organisée. Je citerai quelques-unes des incriminations : le crime de meurtre commis en bande organisée, le crime de tortures et d'actes de barbarie commis en bande organisée, les crimes et délits de trafic de stupéfiants, les crimes et délits d'enlèvement et de séquestration, les crimes et délits aggravés de traite des êtres humains, les crimes et délits aggravés de proxénétisme. La liste figure à l'article 706-73 du code de procédure pénale. Il ne s'agit donc pas d'infractions supposées classiques...
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et délits connexes !
M. François Zocchetto, rapporteur. ... ou ordinaires.
Dans le cadre que je viens de rappeler, des prolongations seront possibles, dont nous avons souhaité qu'elles soient strictement encadrées ; je l'ai dit tout à l'heure, mais je le répète.
Le première prolongation se fera sur autorisation par décision écrite et motivée par le juge des libertés et de la détention ou le juge d'instruction. Vous avez suffisamment invoqué le juge du siège hier soir et même ce matin pour que je fasse confiance à ce dernier : il est capable de se prononcer, par une décision écrite et motivée, sur une prolongation ou des conditions de la garde à vue.
Pour la deuxième prolongation, ce n'est qu'à titre exceptionnel qu'il n'y aurait pas de présentation préalable de la personne.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Allons !
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit de circonstances rares.
Nous sommes parvenus à une rédaction équilibrée que j'ai exposée à la commission des lois sur la question de la prolongation de la garde à vue en matière de criminalité organisée. C'est la raison pour laquelle nous sommes défavorables aux différents amendements et sous-amendements, à l'exception de l'amendement n° 15, que la commission vous demande d'adopter.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. A l'exception de l'amendement n° 15 présenté par la commission, le Gouvernement est défavorable à tous les autres amendements et sous-amendements.
Je veux insister sur deux points.
Premièrement, l'allongement de la garde à vue est l'un des piliers du projet de loi que nous examinons. Le remettre en cause revient par conséquent à remettre en cause l'ensemble du texte.
Deuxièmement, comme l'a excellemment rappelé M. le rapporteur, le système est extrêmement encadré. De surcroît, cette mesure vise des actes particulièrement graves. Enfin, les longues gardes à vue étant déjà prévues par le droit, il n'y a donc là rien d'extraordinaire.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 294 et 411.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. J'ai l'impression qu'on ne s'entend pas. On n'a pas répondu aux arguments que nous avons développés. Jusqu'à présent, personne n'avait éprouvé le besoin de demander une garde à vue de quatre-vingt-seize heures dans tous les cas qui ont été énumérés.
Vous parlez des faits, vous ne parlez pas forcément des coupables. Surtout, vous parlez d'hommes qui risquent des peines très importantes parce que les faits sont graves et qui méritent d'autant plus de bénéficier d'un procès équitable et de garanties. A l'évidence, pouvoir bénéficier de garanties en matière de justice est plus important lorsqu'on est accusé de faits graves que lorsqu'on est accusé de faits moins graves.
Pour le reste, j'ai parlé des conditions matérielles dans lesquelles se déroule actuellement la garde à vue : pas un mot de réponse ! Or vous savez que ce que j'ai dit est vrai. Il faudrait tout de même en tenir compte avant d'étendre à de très nombreuses affaires une garde à vue de quatre-vingt seize heures.
Enfin, ne me dites pas, monsieur le rapporteur, que c'est à titre exceptionnel que les intéressés ne seraient pas présentés à un magistrat. J'ai démontré tout à l'heure que, dans l'esprit de l'exécutif, quel qu'il soit - en tout cas dans un passé récent -, on veut que l'exception soit la règle pour éviter des transferts, et pour ne pas perdre du temps sur la garde à vue.
On ne peut pas l'accepter et la solution la plus radicale, celle à laquelle nous nous rallions, c'est de supprimer purement et simplement cette extension considérable d'un moyen de pression qui n'a qu'un objet, celui d'obtenir un aveu par tous les moyens, ce qui n'est évidemment pas digne d'une justice moderne.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Nous avions eu ce débat au moment de l'examen de la loi renforçant la présomption d'innocence en 2000 mais, évidemment, en sens inverse. Je trouve regrettable qu'aujourd'hui ce débat soit rouvert dans de telles conditions.
Il nous est répondu que la prolongation de la garde à vue est consubstantielle de ce texte. En définitive, ce texte n'a pour objet qu'une prolongation très extensive des gardes à vue à la demande de la police, qui n'a jamais admis la loi renforçant la présomption d'innocence. Les choses sont claires. Tel est bien l'un des objets de ce texte, et c'est précisément cela qui est inadmissible !
Sous l'angle de la protection des libertés, cette logique de prolongation de la garde à vue n'est pas bonne. En outre, depuis 2000, les conditions de la garde à vue ne se sont en rien améliorées. Il s'agit donc d'une véritable régression. On n'a jamais démontré que la prolongation de garde à vue permettait une meilleure justice. Aujourd'hui, il est de bon ton de dire, avec la police, qu'il faut pouvoir placer les gens en garde à vue plus longtemps. C'est tout à fait regrettable !
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. J'évoquais hier l'extraordinaire inflation législative, ou harcèlement législatif, ces mesures qui se succèdent de façon précipitée sur des sujets qui sont bien connus sans que l'on ait l'impression que l'on prenne véritablement en compte ce qui devrait dominer cette matière.
Permettez-moi de rappeler que l'article 5 de la Convention européenne des Droits de l'homme énonce simplement mais clairement : « Toute personne arrêtée (...) doit être aussitôt traduite devant un juge. » J'insiste : « aussitôt traduite devant un juge ». C'est le fondement de la sûreté individuelle depuis l'habeas corpus, qui marqua un moment décisif dans le progrès des libertés. Inévitablement - notre ami Michel Dreyfus-Schmidt a eu raison de le rappeler -, il y a un délai entre le moment ou l'on arrête une personne et le moment où on la présente au juge, mais le fondement est là.
La garde à vue n'a donc pas été inventée pour la commodité de l'interrogatoire policier. Nous assistons à une dérive constante au regard des principes ! Lorsque j'évoquais la nécessité de reconstruire, enfin, la procédure pénale au niveau de l'enquête et de l'instruction, je pensais en premier lieu à cela. On peut parfaitement élaborer une procédure pénale qui, croyez-moi, donnera à la police et au parquet tous les moyens d'action, sans pour autant construire un système dans lequel on fait tout ce que l'on veut dans un tête-à-tête prolongé avec une personne seule pendant des jours et des jours, placée dans des conditions détestables, il faut, hélas !, le reconnaître, en pensant qu'ainsi on aura réussi l'enquête. Ce n'est pas la voie que nous devons prendre.
Je déplore que, pour la cinquième fois en dix ans, on revienne sur le sujet pour durcir encore les conditions. Après le terrible attentat de 2001 et face à la menace du terrorisme, on pouvait admettre que dans ce domaine, et dans ce domaine-là seulement, soient prises des dispositions exceptionnelles. Mais toutes les autres infractions qui figurent dans le texte actuel sont des infractions de droit commun archiconnues depuis des décennies : l'association de malfaiteurs, la bande organisée - c'est moi-même qui ai introduit ce concept dans le code pénal -, etc.
Pourquoi, soudainement, a-t-on besoin aujourd'hui de prolonger la garde à vue jusqu'à quatre-vingt-seize heures ? Parce que la police n'a pas pu travailler jusque-là ? Ce n'est pas exact. Parce que c'est plus commode ?
Sur ce point, je citerai l'un de mes amis, l'un des plus grands juristes au monde, qui est juge à la Cour suprême des Etats-Unis. Quand le ministère chargé des poursuites ou de la police demande toujours plus de droits, il répond : « Vous nous demandez quelque chose qui déroge au principe fondamental de la liberté individuelle, alors expliquez-nous non pas pourquoi ce sera plus commode, mais pourquoi c'est indispensable ; sinon c'est contraire à la Constitution. »
Je répondrai de la même façon. Ce que j'attends, c'est non pas qu'on m'explique que ce sont des crimes graves, mais pourquoi l'état actuel de notre droit ne permet pas aujourd'hui à la justice de fonctionnner. Tant que vous direz que c'est plus commode et que vous n'apporterez pas la preuve que c'est indispensable, nous dirons toujours non.
Je remercierai tout à l'heure M. Zocchetto pour les progrès concernant les modalités, mais je tenais à expliquer pourquoi nous voterons l'amendement n° 294.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. J'avais l'intention d'aborder un peu plus tard les conditions matérielles de la garde à vue, mais, puisque M. Dreyfus-Schmidt et Mme Borvo m'ont interpellé sur ce sujet, je vais le faire dès maintenant.
Tout à l'heure, j'ai rappelé que les conditions de garde à vue étaient inégales et qu'elles variaient selon les locaux de gendarmerie ou de police. Mais je vais vous citer la circulaire du ministre de l'intérieur du 11 mars 2003, qui est extrêmement précise en la matière. Certaines phrases de cette circulaire répondront aux questions qui m'ont été posées et, par anticipation, aux amendements que présentera Mme Borvo à ce sujet.
Parmi les six pages d'instructions très précises que donne le ministre de l'intérieur aux policiers et aux gendarmes figurent les mesures suivantes :
« Les personnes gardées à vue doivent être alimentées avec des repas chauds, aux heures normales, et composés selon les principes religieux dont elles font état.
« Il conviendra de vérifier que les examens médicaux ordonnés par les magistrats ou demandés par les gardés à vue se déroulent effectivement dans les plus brefs délais et sans attente inutile.
« En attentant une redéfinition des locaux de garde à vue, les cellules doivent être maintenues dans un bon état de propreté par des nettoyages quotidiens (M. Michel Dreyfus-Schmidt s'exclame), disposer des éléments d'hygiène nécessaires et permettre le repos auquel les personnes gardées à vue peuvent prétendre.
« La possibilité pour le gardé à vue de faire prévenir sans délai par téléphone "une personne avec laquelle il vit habituellement" [...] devra être effectivement assurée.
« La confidentialité de l'entretien entre le gardé à vue et son avocat devra être rendue effective. »
Par ailleurs, le ministre de l'intérieur demande aux chefs de service de police ou d'unité de gendarmerie de désigner un officier qui aura la charge du suivi administratif de l'ensemble des personnes qui sont placées en garde à vue dans son service.
Il demande aussi aux chefs de service de contrôler au quotidien les conditions de déroulement des gardes à vue.
Je vous renvoie instamment à cette circulaire qui me paraît être de très bonne inspiration et qui semble répondre à une légitime préoccupation, que nous partageons tous ici. Chacun sait ce que peut être une garde à vue.
Pour revenir très brièvement sur les conditions dans lesquelles des prolongations peuvent avoir lieu, je m'étonne que l'on puisse admettre une exception, par exemple pour le terrorisme et le trafic de stupéfiants, et que l'on refuse de l'envisager pour les réseaux organisés ou la grande criminalité. Soit l'on n'admet aucune exception, soit l'on examine de près les exceptions qui peuvent être admises. Je conviens que celles-ci doivent être limitées. Tel est le cas dans le texte, me semble-t-il. En outre, nous avons essayé d'encadrer le dispositif sur plusieurs points.
Premièrement, dans l'écrasante majorité des cas, l'avocat continue d'être présent dès la première heure de garde à vue ; nous reviendrons sur ce point tout à l'heure. Je proposerai que, dans les autres cas, il soit présent plus rapidement que ne le souhaite l'Assemblée nationale.
Deuxièmement, nous souhaitons que la procédure soit « dès le début », et non « dans les meilleurs délais », placée sous la responsabilité du procureur de la République ; nous y reviendrons lors de l'examen des amendements.
Troisièmement, nous pensons que la personne doit pouvoir bénéficier d'un examen médical, à sa demande, ce qui représente une garantie supplémentaire en cas de prolongation de la garde à vue.
Enfin, quatrièmement - et ce n'est pas la moindre des choses -, nous nous sommes attachés à ce que les prolongations ne puissent avoir lieu, dans la plupart des cas, que par décision écrite et motivée et sous le contrôle d'un magistrat du siège, c'est-à-dire du juge des libertés et de la détention, dont je demanderai tout à l'heure qu'il soit un magistrat expérimenté ayant au moins le rang de vice-président, ou du juge d'instruction, dont personne ici ne songe à mettre en cause les compétences.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 294 et 411.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 295 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt M. le rapporteur nous lire la circulaire de M. le ministre de l'intérieur. Il y est indiqué que l'on doit servir des repas chauds. J'aimerais savoir si cela se passe ainsi et si c'est gratuit, c'est-à-dire si le repas est servi même lorsque l'intéressé n'a pas d'argent.
M. Robert Bret. A ma connaissance, il n'y a pas eu de progrès !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il y est par ailleurs précisé que les cellules doivent permettre le repos des personnes gardées à vue et que l'on doit veiller à la présence d'un médecin, le cas échéant, et à la propreté des locaux. Or les locaux continuent d'être obscurs et dotés d'une planche en tout et pour tout ! Vous ne nous dites pas le contraire, monsieur le rapporteur ! Et la manière dont est traité le gardé à vue demeure : il doit retirer les lacets de ses chaussures, sa ceinture, etc. Autrement dit, les conditions de la garde à vue sont toujours indignes.
Si vous vous contentez de cette circulaire pour prétendre que, maintenant, la situation est satisfaisante et que la garde à vue peut durer jusqu'à quatre-vingt-seize heures, je vous en laisse la responsabilité.
Ou bien l'on est contre tout, ou bien il n'y a pas de raison de s'arrêter. C'est à peu près ce que vous nous dites, monsieur le rapporteur. Je suis assez de votre avis. Je suis, je l'avoue, jusqu'au-boutiste, estimant que les conditions d'une bonne justice ne sont pas assurées, quels que soient les cas, par exemple à Guantanamo, et je ne suis sans doute pas le seul à le penser. Mais, fort heureusement, nous n'en sommes pas encore là !
Cela étant dit, par le sous-amendement n° 295 rectifié nous défendons le principe de présentation de la personne gardée à vue à un magistrat.
A l'évidence, la commission des lois travaille dans des conditions épouvantables : dans chacun de nos groupes, certains ont préparé ce projet de loi, d'autres travaillent sur les textes relatifs à l'immigration, au droit d'asile, à la décentralisation.
Mme Nicole Borvo. C'est vrai !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. A l'époque, nombre de nos collègues qui étaient intervenus dans le débat - tout à l'heure, j'ai cité notamment Alain Vasselle - avaient soutenu un point de vue identique. Notre collègue Jean-Jacques Hyest avait même déposé des amendements afin que la personne gardée à vue soit présentée à un magistrat.
Ceux qui sont présent, aujourd'hui ou bien n'ont pas suivi ces débats, ou bien sont là pour permettre que les travées de la majorité soient plus remplies que celles de l'opposition. (Protestations sur les travées de l'UMP.) Ils sont là pour voter ce qui leur est proposé.
Je le regrette, car j'ai connu une époque, pas si lointaine, où un certain nombre de nos collègues - il y en a encore au moins un, que je ne nommerai pas - ne se comportaient pas ainsi.
Cela étant, le problème qui est soulevé est extrêmement grave.
Monsieur le rapporteur, je le répète, vous n'avez pas le droit de dire que la non-présentation au magistrat de la personne placée en garde à vue est une exception. Ce n'est pas vrai : c'est la règle ! Il est hypocrite d'écrire dans un code qu'une mesure est exceptionnelle tout en sachant parfaitement qu'en vérité c'est la règle.
Il est écrit à différents endroits, dans le code pénal, que la liberté est la règle et que l'incarcération ou la détention provisoire est l'exception. On sait bien ce qu'il en est ! Ici, c'est pire : ce ne serait pas une exception, ce serait une règle. Si vous ne voulez pas qu'il y ait une exception, mes chers collègues, vous voterez notre sous-amendement prévoyant que, dans tous les cas, la personne placée en garde à vue est présentée à un magistrat.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 295 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 296 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le sous-amendement n° 295 rectifié ayant été rejeté, je rappelle que le sous-amendement n° 296 rectifié prévoit que la prolongation de la garde à vue doit au moins faire l'objet d'une décision écrite et spécialement motivée. Ce n'est tout de même pas trop demander si l'on veut éviter que cela ne devienne une routine et que non seulement l'exception ne devienne la règle, mais, en outre, que la décision ne soit tacite.
La prolongation de vingt-quatre heures, voire de quarante-huit heures, d'une garde à vue qui a déjà duré quarante-huit heures est tout de même quelque chose de grave. Qu'une telle décision soit écrite et spécialement motivée est quand même un minimum ! Tel est l'objet du présent sous-amendement.
M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Je comprends très bien la réaction de M. Dreyfus-Schmidt. Ce qui est exceptionnel n'est pas anodin et doit être motivé. Mais cela est prévu dans le troisième alinéa de l'amendement n° 15 présenté par la commission : « Ces prolongations sont autorisées, par décision écrite et motivée. » Il serait redondant de le préciser de nouveau à l'alinéa suivant.
Dans ces conditions, ce sous-amendement est satisfait et n'a pas raison d'être. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, le sous-amendement n° 296 rectifié est-il maintenu ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous avez raison, mon cher collègue. Je retire donc ce sous-amendement, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 296 rectifié est retiré.
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 469.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous demandons qu'un débat ait lieu et que l'avocat puisse faire valoir les raisons de ne pas prolonger la garde à vue. Je ne crois pas que cela figure dans l'amendement n° 15.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 469.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 283 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous demandons, par ce sous-amendement, le rétablissement de la règle. Sur ce point, M. le rapporteur est allé un peu trop vite.
Actuellement, je le répète, la présence de l'avocat est de règle à la première heure, à la vingtième heure et à la trente-sixième heure de garde à vue. Vous oubliez de nous dire, monsieur le rapporteur, que vous acceptez que l'on remplace l'entretien de la personne gardée à vue avec un avocat à la vingtième et à la trente-sixième heure par un entretien à la vingt-quatrième heure, dont nous ne voyons pas très bien l'intérêt, je dois le dire. C'est pourquoi nous maintenons ce sous-amendement.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 283 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 297 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Par ce sous-amendement, nous demandons que l'avocat soit présent au moins à la trente-sixième heure. Ce n'est quand même pas extraordinaire !
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 297 rectifié.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, contre l'amendement n° 15.
M. Robert Badinter. Je tiens à dire à notre excellent rapporteur que cet amendement représente indiscutablement un progrès sensible par rapport au texte qui a été présenté par le Gouvernement. Ce qui me préoccupe, c'est la cadence des interventions de l'avocat et des présentations au magistrat de la personne gardée à vue. En effet, plus la durée de la garde à vue s'étend, plus il convient de l'entourer de garanties, ne serait-ce qu'en raison de la résistance humaine. N'oublions jamais que la personne qui est placée en garde à vue bénéficie de la présomption d'innocence ; nous l'avons longuement rappelé au cours des débats qui ont eu lieu en 2000.
Il faut veiller au maintien des droits du justiciable, voire à leur renforcement à mesure que la durée de la garde à vue s'allonge. Dès lors, pourquoi ne pas prévoir une intervention régulière de l'avocat à partir de la vingt-quatrième heure, toutes les douze heures, et ce jusqu'à la fin de la garde à vue ? J'avoue ne pas comprendre cette disparition en ce qui concerne la dernière période.
Je souhaiterais donc que M. le rapporteur nous fournisse une explication convaincante.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Je ne sais pas si je vais répondre précisément à votre dernière question, monsieur Badinter, mais je m'exprimerai sur le fait que l'on passe, s'agissant de la présence de l'avocat, de la première et la vingtième heure à la première et vingt-quatrième heure. Cela me paraît en effet important. M. Dreyfus-Schmidt et Mme Borvo ont évoqué ce point tout à l'heure, me semble-t-il.
Pour ce qui est de l'intervention de l'avocat à la première heure, il est inutile de donner une explication. Mais quel est l'intérêt de sa présence à la vingtième heure ? Les praticiens savent que cet intérêt est quasiment nul. En effet, soit la garde à vue n'est pas prolongée et c'est alors à une espèce de service après-vente que va se livrer l'avocat - il ne sert à rien -, soit la garde à vue est prolongée et l'intervention de l'avocat à la vingt-quatrième heure, c'est-à-dire au tout début de la deuxième période de garde à vue, prend alors tout son sens.
Nous sommes convaincus que la présence de l'avocat à la première heure, à la vingt-quatrième heure et à la quarante-huitième heure, permettra à la défense de mieux exercer ses droits. L'intervention de l'avocat est en effet beaucoup plus utile au début de la deuxième ou de la troisième prolongation qu'à la fin de la garde à vue, où il ne se passe pas grand-chose.
Je pense avoir répondu en grande partie à votre question, monsieur Badinter.
M. Robert Badinter. Pas sur la fin !
M. François Zocchetto, rapporteur. Nous reviendrons sur les problèmes posés par la trente-sixième heure et la soixante-douzième heure ultérieurement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 15.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article 706-88 du code de procédure pénale est ainsi rédigé.
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 706-88
M. le président. L'amendement n° 298, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée est ainsi libellé :
« Après le texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-88 du code de procédure pénale, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Dans le temps prévu pour cette garde à vue, la personne mise en cause est déférée devant un magistrat. »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il semble qu'un délai de quatre-vingt-seize heures ne soit pas suffisant pour interroger l'intéressé, même s'il prend son repos sur place - dans un local spartiate que l'on espère propre -, et pour le déférer devant le magistrat. Alors, on nous propose un délai supplémentaire de vingt heures. C'est vraiment incroyable !
Si quatre-vingt-seize heures ne vous suffisent pas, ajoutez-en ! Mais le délai de garde à vue, c'est tout de même celui au terme duquel l'intéressé doit être déféré devant un magistrat.
Certes, on nous objecte que, si l'on finit trop tard, le magistrat ne sera peut-être plus là et qu'il faudra l'attendre jusqu'au lendemain matin, voire jusqu'au lendemain après-midi.
Non, mes chers collègues, il faut faire en sorte d'en terminer dans le très large délai qui est ouvert - quatre-vingt-seize heures ! - pour déférer l'intéressé.
Franchement, où allez-vous vous arrêter ? Quatre-vingt-seize heures plus vingt ? Or c'est très exactement ce qui nous est proposé et c'est très exactement ce que nous vous proposons de ne pas accepter !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Lorsqu'une personne a été placée en garde à vue et qu'elle doit être déférée devant un magistrat, elle doit l'être dans les plus brefs délais. Dans l'écrasante majorité des cas, fort heureusement, c'est ce qui se passe. A Paris et dans deux ou trois autres juridictions, pour des raisons d'organisation matérielle tenant notamment au nombre de personnes à transférer et à présenter devant les magistrats, une pratique existe, celle du dépôt. Ce n'est pas nous qui l'avons inventée, cette pratique ! Elle existe depuis la nuit des temps !
M. Jean-Jacques Hyest. Des temps immémoriaux !
M. François Zocchetto, rapporteur. Nous ne faisons que constater l'existence de cette situation et nous préférons qu'elle soit encadrée juridiquement plutôt que de rester dans le flou juridique actuel.
Je rappelle que la Cour de cassation s'est déjà prononcée sur ce sujet : elle a autorisé un délai maximal de vingt heures entre la fin de la garde à vue et le moment où la personne est déférée devant le magistrat.
Cela ne veut pas dire pour autant que l'on peut allonger la garde à vue de vingt heures ; ce sont des conditions complètement différentes. En effet, quand une personne est placée en garde à vue, elle est sous la responsabilité de l'officier de police judiciaire et sous le contrôle du magistrat du parquet. En revanche, lorsque, à l'issue de la garde à vue, la personne attend d'être déférée, elle est sous la responsabilité du magistrat.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Absent !
M. François Zocchetto, rapporteur. Plutôt que de laisser perdurer des pratiques floues, le Gouvernement a préféré prendre les devants et encadrer cette pratique du dépôt dans un délai maximal de vingt heures.
Vous attirez notre attention sur le cas particulier des personnes qui auraient déjà été gardées à vue pendant quatre-vingt-seize heures. Vous vous le rappelez sans doute, l'un des amendements que j'ai présentés devant la commission consiste précisément à prévoir que, lorsqu'une personne a été gardée à vue pendant quatre-vingt-seize heures, elle doit non pas être placée au dépôt, mais présentée le jour même au magistrat. Si ce n'est pas possible, le temps de défèrement doit être décompté du temps de la garde à vue.
Je crois deviner que, avec votre amendement n° 298, vous voulez en fait généraliser cette disposition et en étendre le bénéfice à toutes les durées de garde à vue. Ce n'est pas possible. Nous sommes en présence de deux situations différentes. Il y a, d'une part, la garde à vue, avec toutes les durées et toutes les conditions que nous avons évoquées tout à l'heure, d'autre part, la période du défèrement. Il ne faut pas mélanger les deux.
L'avis de la commission est donc défavorable sur l'amendement n° 298.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Dans la mesure où le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 122, qui a été déposé sur l'article 29 ter par la commission, il est naturellement défavorable à l'amendement n° 298.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. M. le rapporteur me rassure, car il propose très exactement ce que nous demandons pour toutes les gardes à vue.
Son explication, c'est Paris. Je dois dire que l'on fait assez souvent à Paris un sort spécial, pour y installer une juridiction particulière compétente pour le terrorisme, ou encore pour lui donner compétence particulière en ce qui concerne la pollution des mers, et de nombreux autres exemples pourraient être donnés.
Je ne vois pas pourquoi, si véritablement votre explication était la bonne, monsieur le rapporteur, on ne l'écrirait pas dans la loi. Je ne vois pas d'inconvénient à ce que vous sous-amendiez notre amendement pour prévoir que cette règle s'appliquera exclusivement à Paris !
Plus sérieusement, nous estimons que, même à Paris, il y a suffisamment de magistrats pour calculer en conséquence.
Mais vous nous dites, monsieur le rapporteur, que, à l'issue de la garde à vue, la personne qui va être déférée est sous le contrôle du magistrat. Si je comprends bien, la personne est sous le contrôle du magistrat qui n'est pas là pour pouvoir la recevoir... Ce n'est pas sérieux ! Et dans quel local est-elle gardée ? Comment mange-t-elle ?
M. Jean-Jacques Hyest. Ne nous dites pas que vous ne connaissez pas le dépôt de Paris !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. On me parle du dépôt de Paris. Mais attention ! Je le répète : vous ne parlez pas seulement de Paris. Si vous voulez réserver un sort spécial à la capitale en la matière et si vous pouvez convaincre la majorité sénatoriale que Paris l'exige, dites-le, mais ne nous laissez pas penser que votre délai de vingt heures sera valable pour toute la République.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 298.
(L'amendement n'est pas adopté.)
ARTICLE 706-89 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. Je mets aux voix le texte proposé pour l'article 706-89 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 706-90 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 412, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Supprimer le texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-90 du code de procédure pénale. »
L'amendement n° 16, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-90 du code de procédure pénale :
« Art. 706-90. - Si les nécessités de l'enquête préliminaire relative à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 l'exigent, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance peut, à la requête du procureur de la République, décider, selon les modalités prévues par l'article 706-92, que les perquisitions, visites domiciliaires et saisies de pièces à conviction pourront être effectuées en dehors des heures prévues par l'article 59, lorsque ces opérations ne concernent pas des locaux d'habitation. »
La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 412.
M. Robert Bret. L'article 706-90 du code de procédure pénale traite des perquisitions.
Les perquisitions posent bien évidemment le problème de l'inviolabilité du domicile en ce qu'elles représentent une atteinte à ce principe.
Je ne vous rappellerai pas que la multiplication des régimes d'exception de perquisition des domiciles des personnes privées est la malheureuse conséquence de l'accumulation des lois relatives à la sécurité.
De la loi sur la sécurité quotidienne aux lois « Sarkozy », nous assistons à une extension démesurée du champ des investigations, de la surveillance des biens et des personnes, des écoutes téléphoniques, des perquisitions : ces mesures attentatoires à la liberté individuelle qui sont, pourtant, aujourd'hui encore, aggravées par ce projet de loi.
Désormais, ces perquisitions pourront avoir lieu en dehors des heures prévues par l'article 59 du code de procédure pénale, autrement dit, pendant la nuit, sans l'assentiment de la personne chez qui elles seront effectuées, et cela « si les nécessités de l'enquête préliminaire ou de flagrance l'exigent ».
Où sont les principes qui sont pourtant à la base de notre droit pénal et de notre procédure pénale ? Inviolabilité du domicile et présomption d'innocence pèsent de bien peu de poids face à votre arsenal pénal et judiciaire, face à votre enchevêtrement de procédures dérogatoires au droit commun.
Le nouvel article 706-90 du code de procédure pénale, comme toute la section 4, relative aux perquisitions, est la parfaite illustration de ce que je viens de dire.
Les perquisitions pourront avoir lieu non seulement la nuit en cas d'enquête de flagrance, mais aussi sans l'assentiment de la personne dans le cadre d'une enquête préliminaire. Il n'est pourtant pas précisé dans l'article 706-90 que ces perquisitions sont justifiées par des indices ou des raisons de soupçonner la personne chez qui aura lieu cette perquisition. Et pourtant, même si elle s'y oppose, son domicile pourra être perquisitionné.
Autrement dit, si une infraction est commise dans un appartement situé dans un immeuble, par exemple un trafic de stupéfiants, il sera possible de perquisitionner chez les voisins, sans leur assentiment, uniquement au motif que « les nécessités de l'enquête » l'exigent. L'expression « nécessités de l'enquête » ne doit pas pouvoir justifier tous les abus, et c'est pourtant ce que vous êtes en train de faire.
Tel est l'esprit de notre amendement, que nous vous demandons de bien vouloir adopter, d'autant que l'amendement n° 16, proposé par la commission, nous semble être une fausse amélioration.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 16 et donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 412.
M. François Zocchetto, rapporteur. Le droit actuel des perquisitions en enquête préliminaire est devenu trop complexe. En effet, ces perquisitions-là doivent en principe être effectuées avec l'accord de la personne. Toutefois, des exceptions ont été prévues pour certaines infractions.
Le projet de loi permet des perquisitions sans l'accord de la personne pour les infractions relevant de la criminalité organisée. Nous considérons que les règles proposées sont particulièrement complexes. Il y aurait, en effet, une dizaine de régimes différents pour les perquisitions.
Le présent amendement tend à simplifier ces règles pour éviter que, du fait d'erreurs de procédure, des pans entiers d'une enquête ne se trouvent réduits à néant.
La commission, à travers un certain nombre d'amendements que nous examinerons au fur et à mesure du débat, vous propose, tout d'abord, que les perquisitions puissent être effectuées en enquête préliminaire sans l'accord de la personne, mais sur autorisation motivée du juge des libertés et de la détention pour les infractions punies d'au moins cinq ans d'emprisonnement. Cette disposition permettra d'éviter la multiplication des dérogations à la règle du consentement sans remettre en cause le contrôle, puisque seul le juge des libertés et de la détention, et non le procureur, sera habilité à autoriser les perquisitions.
Aujourd'hui, de nombreuses informations sont ouvertes simplement pour permettre de perquisitionner un local dont l'occupant n'a pas donné son consentement. La seule voie de contournement est l'ouverture d'une information et l'autorisation du juge d'instruction. C'est une procédure bien trop lourde. D'où l'intérêt de la disposition que nous proposons.
Nous vous proposons également de mettre en place un régime unique pour les perquisitions de nuit qui s'appliquerait à la criminalité organisée, y compris le terrorisme et le trafic de stupéfiants.
En enquête de flagrance, les perquisitions seraient possibles dans tous les locaux sur autorisation du juge des libertés et de la détention ; en enquête préliminaire, elles ne seraient possibles que dans des locaux ne servant pas à l'habitation.
Enfin, à l'instruction, nous rendons possibles ces perquisitions de nuit dans les locaux d'habitation à condition que l'on soit toujours dans le temps de la flagrance, qu'il y ait un risque de disparition des preuves ou que des infractions de même nature soient en train d'être commises dans les locaux.
Telle est notre position sur ces perquisitions. La commission est donc défavorable à l'amendement n° 412.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 412 parce qu'il est tout à fait favorable à l'amendement n° 16 de la commission.
Encore une fois, et en toute sincérité, je remercie la commission de la qualité de son travail.
Nous avons tout à l'heure évoqué les conditions de la garde à vue. Ce sujet avait été examiné à l'Assemblée nationale et les deux chambres ont donc de concert, me semble-t-il, fortement amélioré le texte du Gouvernement, mais l'Assemblée nationale ne s'était pas penchée sur cette question des perquisitions. Votre assemblée l'a fait, et bien fait ; soyez remerciés de cette simplification, toujours gage d'une meilleure application du droit. Je pense d'ailleurs que tous les professionnels seront reconnaissants au Sénat d'avoir amélioré le dispositif. Il y aura désormais un régime unique en matière de délinquance et de criminalité organisées qui englobe les questions de terrorisme et de trafics de stupéfiants. En outre, la distinction sera désormais bien plus nette entre ce que l'on pourrait appeler le « régime général » et ce régime beaucoup plus spécial, en particulier sur cette question des perquisitions de nuit.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est favorable à cet amendement n° 16. Pour faire avancer nos débats, certes, à un rythme raisonnable, donc aussi à mon rythme (Sourires), j'en profite pour dire que le Gouvernement sera favorable à tous les autres amendements déposés par la commission des lois sur ce sujet.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 412.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 16.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article 706-90 du code de procédure pénale est ainsi rédigé.
ARTICLE 706-91 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 17, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-91 du code de procédure pénale :
« Art. 706-91. - Si les nécessités de l'instruction relative à l'une des infractions entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 l'exigent, le juge d'instruction peut, selon les modalités prévues par l'article 706-92, autoriser les officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire à procéder à des perquisitions, visites domiciliaires et saisies de pièces à conviction en dehors des heures prévues par l'article 59, lorsque ces opérations ne concernent pas des locaux d'habitation.
« En cas d'urgence, le juge d'instruction peut également autoriser les officiers de police judiciaire à procéder à ces opérations dans les locaux d'habitation :
« 1° Lorsqu'il s'agit d'un crime ou d'un délit flagrant ;
« 2° Lorsqu'il existe un risque immédiat de disparition des preuves ou des indices matériels ;
« 3° Lorsqu'il existe des présomptions qu'une ou plusieurs personnes se trouvant dans les locaux où la perquisition doit avoir lieu sont en train de commettre des crimes ou des délits entrant dans le champ d'application de l'article 706-73. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 17 est une déclinaison des principes que je viens d'énoncer concernant les perquisitions de nuit. J'ajoute qu'il en est de même des amendements n°s 18 et 19.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article 706-91 du code de procédure pénale est ainsi rédigé.
ARTICLE 706-92 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 18, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le second alinéa du texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-92 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "par le deuxième alinéa de l'article 706-91" par les mots : "par les 1°, 2° et 3° de l'article 706-91". »
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 18.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 706-92 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 706-93 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. Je mets aux voix le texte proposé pour l'article 706-93 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 706-94 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 19, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Supprimer le texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-94 du code de procédure pénale. »
Cet amendement a déjà été défendu.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 19.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé pour l'article 706-94 du code de procédure pénale est supprimé.
ARTICLE 706-95 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 299, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Compléter in fine le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-95 du code de procédure pénale par les mots : "ou d'un avocat désigné par celui dont le domicile est en cause". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Aux termes de l'article 706-95, dans certains cas, « la perquisition peut être faite avec l'accord préalable du procureur de la République ou du juge d'instruction, en présence de deux témoins requis dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 57 ». Ne serait-il pas possible, si la personne dont le domicile est en cause a un avocat, d'autoriser ce dernier à assister à la perquisition et de le mettre en mesure de le faire ?
En matière de perquisition, nous avons tous de nombreux souvenirs. Il arrive, - c'est triste mais il faut le dire -, que les policiers trouvent ce qu'ils cherchaient alors même que ce n'était pas là avant. Je ne veux pas m'étendre sur ce point, mais tout le monde le sait.
M. Jean-Jacques Hyest. Vous parlez des Irlandais de Vincennes ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Entre autres.
M. Robert Bret. Ce n'est pas le seul exemple, hélas !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je n'ai pas de tabou sur ce sujet ; je dis que cela arrive et qu'il faut donc se méfier au maximum. Le texte n'est pas assez précis sur ce point. La présence d'un témoin, même s'il reste muet, devrait être possible pour observer la manière dont se passent les choses.
Dans ma carrière professionnelle, j'ai eu l'occasion de voir beaucoup de choses et je suis prêt à vous les raconter. Voilà pourquoi notre amendement prévoit la présence d'un avocat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. La commission s'est interrogée sur la suggestion de M. Dreyfus-Schmidt qui prévoit la possibilité pour l'avocat d'une personne chez laquelle se déroule une perquisition d'y assister lorsque la personne ne peut, pour des raisons de sécurité, être transportée sur les lieux.
Il s'agit peut-être d'une possibilité qui mérite d'être étudiée, sous réserve des observations que pourrait formuler le Gouvernement au regard des pratiques en la matière. Nous allons donc entendre avec attention vos explications, monsieur le secrétaire d'Etat.
M. le président. Quel est donc l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement est défavorable à cette proposition. Ce serait en effet la première fois qu'une telle disposition serait introduite dans notre droit, ce qui entraînerait un alourdissement considérable de la prodédure.
Je voudrais revenir sur la philosophie du texte dont nous débattons aujourd'hui. Il s'agit de s'attaquer à une très grande criminalité qui a évolué de façon extraordinaire depuis 1989. La disparition à cette époque d'une frontière absolue en Europe a provoqué des mutations considérables.
Les bandes organisées disposaient-elles auparavant d'armes de guerre ? Aujourd'hui, c'est désormais relativement fréquent. Par ailleurs, avait-on jamais vu, dans un secteur qui m'est cher, un établissement pénitentiaire pris d'assaut avec des armes de guerre ?
Nous constatons donc que cette criminalité a considérablement évolué. Il ne me semble donc pas possible, à l'occassion de l'examen de ce projet de loi, de bouleverser notre droit face à cette criminalité extrêmement dure et spécifique, et de multiplier les obstacles administratifs à la réalisation d'une enquête diligente.
C'est pourquoi nous sommes défavorables à cet amendement.
M. le président. Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Après avoir entendu les explications de M. le secrétaire d'Etat, la commission se rallie à la position du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous ne sommes évidemment en rien convaincus par les explications de M. le secrétaire d'Etat.
Retenons seulement qu'il est question ici de lutter, non plus seulement contre la grande criminalité - ce qui était déjà une bonne chose - mais contre la très grande criminalité. Quels que soient les faits - et, comme je l'ai déjà dit, plus les faits sont graves, plus les garanties doivent être nombreuses -, je ne vois pas en quoi la présence d'un avocat peut être gênante. Je ne vois pas ce qui s'oppose à ce que l'on dise à cet avocat, une fois sur les lieux, qu'il peut venir assister à la perquisition - et uniquement à celle-ci - s'il le souhaite. Si l'on trouve des canons, il pourra alors le constater.
C'est le droit commun, monsieur le secrétaire d'Etat, vous ne l'ignorez pas. Actuellement, lorsque le juge d'instruction décide de perquisitionner chez l'intéressé, l'avocat est évidemment présent, ce qui lui permet parfois de voir des choses intéressantes.
Vos explications n'en sont pas. La commission a voulu entendre le Gouvernement avant de se prononcer elle-même. Elle l'a fait, mais son point de vue m'étonne. Lorsque l'on est accusé, surtout si l'on est accusé à tort, la présence d'un avocat devrait être une garantie.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 299.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix le texte proposé pour l'article 706-95 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 706-96 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 20, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-96 du code de procédure pénale, après les mots : "prévues par les articles", insérer la référence : "100, deuxième alinéa,". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Le projet de loi initial prévoyait que les interceptions de correspondances autorisées au cours des enquêtes en matière de criminalité organisée devaient respecter les formalités des articles 100, 100-1 et 100-3 à 100-7 du code de procédure pénale.
L'Assemblée nationale a cru bon de supprimer la référence à l'article 100, où sont pourtant bel et bien définies certaines des modalités des interceptions et où est prévu, en particulier, que la décision d'autorisation est écrite.
Nous vous proposons donc de revenir au texte initial et de rétablir la référence à l'article 100 du code de procédure pénale.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Vous comprendrez, monsieur le président, que, s'agissant d'un débat aussi éminent entre vos deux assemblées, le Gouvernement s'en remette entièrement à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 20.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 300, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-96 du code de procédure pénale, après les mots : "exercées par le" insérer les mots : "juge des libertés et de la détention saisi par le". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le deuxième alinéa de l'article 706-96 du code de procédure pénale indique que « les attributions confiées au juge d'instruction ou à l'officier de police judiciaire commis par lui sont exercées par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire requis par ce magistrat ».
Or il existe tout de même un juge dont la mission est de veiller au respect des libertés : c'est évidemment le juge des libertés et de la détention.
C'est pourquoi notre amendement tend à préciser que les attributions en question « sont exercées par le juge des libertés et de la détention saisi par le procureur de la République ou l'officier de police judiciaire requis par ce magistrat ». Cela paraît simple à comprendre !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Ce qui est également simple, c'est qu'il ne faut pas confondre les rôles des uns et des autres, notamment le rôle du procureur et le rôle du juge des libertés et de la détention.
Dès lors que le juge des libertés et de la détention a autorisé l'opération d'interception de correspondances, il ne lui appartient pas de la mettre en oeuvre. C'est au procureur de le faire, et la commission pense que la garantie est suffisante.
Elle émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 300.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Même avis.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 300.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 21, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-96 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "dans les meilleurs délais" par les mots : "sans délai". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 21 consiste en un changement de terminologie que nous aborderons souvent au cours du débat. La commission des lois du Sénat pense qu'un certain nombre d'informations doit être délivré tant au procureur qu'au juge des libertés et de la détention, comme c'est le cas aujourd'hui, « sans délai » et non pas « dans les meilleurs délais ».
Pour le cas particulier des interceptions de correspondances, nous proposons que le juge des libertés et de la détention soit informé « sans délai » et non « dans les meilleurs délais » comme l'avait proposé l'Assemblée nationale qui a substitué cette expression à la réaction initiale.
L'amendement n° 21 tend par conséquent à revenir à la rédaction initiale du texte.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Sur ce débat sémantique entre les deux assemblées, le Gouvernement veut naturellement s'en remettre à la sagesse du Sénat.
Dans la mesure où il est proposé de revenir à la rédaction initiale du Gouvernement, oserais-je dire que cette sagesse est très bienveillante à l'égard de votre assemblée ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 21.
(L'amendement est adopté à l'unanimité.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 706-96 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
INTITULÉ DE LA SECTION 6
DU CHAPITRE II DU TITRE XXV
DU LIVRE IV DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit l'intitulé du texte proposé par le I de cet article pour la section 6 du chapitre II du titre XXV du livre IV du code de procédure pénale :
« Des sonorisations et des fixations d'images de certains lieux ou véhicules. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Les amendements n°s 22, 23, 24, 25 et 26 traitent du même sujet, celui de la sonorisation ou de la possibilité de fixer les images, pour reprendre la terminologie consacrée, de certains locaux ou véhicules au cours d'une instruction.
L'Assemblée nationale a souhaité, à juste titre certainement, compléter le projet de loi pour permettre de sonoriser et de fixer les images de certains locaux ou véhicules.
Il ne s'agit pas d'une nouveauté, car cette pratique existe déjà, mais cela fait partie des pratiques que nous souhaitons encadrer juridiquement.
Toutefois, les dispositions prévues par l'Assemblée nationale sont insuffisamment précises. Ainsi, rien n'est dit des conditions dans lesquelles les officiers ou agents de police judiciaire chargés de ces opérations peuvent pénétrer dans des véhicules ou des locaux d'habitation aux fins d'installer les dispositifs. La pénétration par effraction dans les domiciles sans autorisation risquerait d'entraîner l'annulation de la procédure.
L'amendement n° 22, ainsi que les amendements n°s 23, 24, 25 et 26, tendent à préciser les modalités selon lesquelles se dérouleront les opérations de sonorisation ou de fixation d'images de certains locaux ou véhicules.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Bédier, secrétaire d'Etat. Mon avis vaudra également pour les amendements n°s 23, 24, 25 et 26.
Ces amendements visent à préciser le régime des sonorisations et des fixations d'images dont le principe a été adopté par l'Assemblée nationale, sur proposition de sa commission des lois.
L'amendement n° 22 indique notamment dans quel cadre pourra être autorisée la pénétration dans un lieu privé ou dans un véhicule pour y installer des dispositifs et comment devront être effectuées les retranscriptions des conversations ainsi captées.
Lors du débat à l'Assemblée nationale, M. le garde des sceaux avait indiqué qu'il souhaitait que la navette permette justement d'approfondir la réflexion sur ce sujet. Les éléments du débat, me semble-t-il, sont désormais assez clairs.
Par définition, cette procédure de sonorisation est extrêmement attentoire aux libertés publiques puisqu'elle revient à écouter et à observer des personnes se trouvant à leur domicile ou dans leur bureau sans leur consentement. Cependant, ces sonorisations apparaissent extrêmement utiles en matière de grande criminalité, les écoutes téléphoniques présentant des limites, en raison de la méfiance accrue des personnes mises en cause.
Les éléments ainsi captés sont indéniablement d'une richesse considérable, que ce soit pour orienter les investigations ou pour confondre les malfaiteurs. Par ailleurs, soulignons-le, des dispositifs similaires existent chez nombre de nos principaux partenaires, la Grande-Bretagne, l'Allemagne, les Etats-Unis. Or, aujourd'hui, nous ne pouvons satisfaire de nombreuses demandes de coopération internationale à cause de l'état de notre droit.
Toutefois, M. le garde des sceaux est extrêmement attaché à ce que les libertés de chacun soient respectées. Il lui paraît donc absolument indispensable que l'atteinte aux libertés que représentent les sonorisations soit strictement encadrée. La réécriture des dispositions relatives aux sonorisations que propose aujourd'hui la commission des lois nous semble répondre à cette recherche constante et difficile d'un équilibre entre l'efficacité nécessaire et la liberté ou, plus exactement, la défense des libertés indispensables.
Ainsi, lorsque les dispositifs doivent être installés dans un lieu d'habitation et de nuit, l'autorisation sera donnée par le juge des libertés et de la détention saisi à cette fin par le juge d'instruction, après l'avis initial du procureur de la République.
Compte tenu de l'aspect particulièrement attentatoire aux libertés individuelles de cette mesure - je le répète parce que c'est vrai - ce n'est donc qu'après le regard de trois magistrats, dont deux magistrats du siège, que cette autorisation sera délivrée. Les garanties qui sont offertes nous paraissent donc extrêmement satisfaisantes.
Quant au régime de retranscriptions proposé, il est similaire à celui des écoutes téléphoniques, dont la qualité n'est pas - ou n'est plus - discutée.
Le dispositif élaboré nous semble donc particulièrement complet, prenant en considération les différentes situations dans lesquelles il est possible de se trouver au cours des investigations et proposant pour chacune d'elles une procédure qui offre à la fois les garanties d'efficacité et de protection des libertés individuelles.
Je suis entièrement convaincu par ce dispositif qui permettra d'utiliser des moyens techniques sophistiqués auxquels M. le garde des sceaux et moi-même sommes très attachés, tant ils nous semblent en pleine corrélation avec les objectifs que le Gouvernement s'est fixés de lutter de façon efficace et moderne contre l'une des formes - je le répète - les plus dangereuses de la délinquance, dont les protagonistes disposent souvent de moyens considérables, à la hauteur de leurs actes.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. Je ne m'exprimerai pas contre cet amendement, parce que je crois beaucoup à la nécessité du développement des moyens scientifiques de recherche.
Je suis cependant extraordinairement préoccupé par l'atteinte très grave aux libertés individuelles que cette mesure représente, libertés individuelles auxquelles nous sommes très attachés.
Les précautions prises, les autorisations successives que la commission des lois a mises au point, avec beaucoup de précision, je tiens à le souligner, vont dans le bon sens. Je voudrais seulement attirer votre attention, monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d'Etat, sur la question de la conservation.
Il est en effet prévu que les enregistrements seront détruits à l'expiration du délai de prescription de l'action publique, qui sera considérablement accru.
Je m'interroge donc, indépendamment de la quantité d'archives que cela représente, sur l'utilité des enregistrements à domicile, conservés pendant des périodes extrêmement longues, et dont une très grande part ne servira certainement à rien.
Peut-être faudra-t-il revenir au cours de la navette sur cette question de conservation qui ne me paraît pas, au vu de l'allongement de prescription prévisible, devoir être maintenue.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 22.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé du texte proposé par le I de l'article 1er pour la section 6 du chapitre II du titre XXV du livre IV du code de procédure pénale est ainsi rédigé.
ARTICLE 706-97 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 23, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-97 du code de procédure pénale :
« Art. 706-97. - Lorsque les nécessités de l'information concernant un crime ou un délit entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 l'exigent, le juge d'instruction peut, après avis du procureur de la République, autoriser par ordonnance motivée les officiers et agents de police judiciaire commis sur commission rogatoire à mettre en place un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, la captation, la fixation, la transmission et l'enregistrement de paroles prononcées par une ou plusieurs personnes à titre privé ou confidentiel, dans des lieux ou véhicules privés ou publics, ou de l'image d'une ou plusieurs personnes se trouvant dans un lieu privé. Ces opérations sont effectuées sous l'autorité et le contrôle du juge d'instruction.
« En vue de mettre en place le dispositif technique mentionné au premier alinéa, le juge d'instruction peut autoriser l'introduction dans un véhicule ou un lieu privé, y compris hors des heures prévues à l'article 59, à l'insu ou sans le consentement du propriétaire ou du possesseur du véhicule ou de l'occupant des lieux ou de toute personne titulaire d'un droit sur ceux-ci. S'il s'agit d'un lieu d'habitation et que l'opération doit intervenir hors des heures prévues à l'article 59, cette autorisation est délivrée par le juge des libertés et de la détention saisi à cette fin par le juge d'instruction. Ces opérations, qui ne peuvent avoir d'autre fin que la mise en place du dispositif technique, sont effectuées sous l'autorité et le contrôle du juge d'instruction. »
Cet amendement a déjà été défendu.
Je mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé par le I de l'article 1er pour l'article 706-97 du code de procédure pénale est ainsi rédigé.
ARTICLE 706-97-1 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 24, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-97-1 du code de procédure pénale :
« Art. 706-97-1. - Les décisions prises en application de l'article 706-97 doivent comporter tous les éléments permettant d'identifier les véhicules ou les lieux privés ou publics visés, l'infraction qui motive le recours à ces mesures ainsi que la durée de celles-ci. »
Cet amendement a déjà été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé par le I de l'article 1er pour l'article 706-97-1 du code de procédure pénale est ainsi rédigé.
ARTICLE 706-97-2 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 25, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-97-2 du code de procédure pénale :
« Art. 706-97-2. - Ces décisions sont prises pour une durée maximum de quatre mois. Elles ne peuvent être renouvelées que dans les mêmes conditions de forme et de durée. »
Cet amendement a déjà été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, le texte proposé par le I de l'article 1er pour l'article 706-97-2 du code de procédure pénale est ainsi rédigé.
ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 706-97-2
M. le président. L'amendement n° 26, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après le texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-97-2 du code de procédure pénale, insérer quatre articles additionnels ainsi rédigés :
« Art. 706-97-3. - Le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui peut requérir tout agent qualifié d'un service, d'une unité ou d'un organisme placé sous l'autorité ou la tutelle du ministre de l'intérieur ou du ministre de la défense et dont la liste est fixée par décret, en vue de procéder à l'installation des dispositifs techniques mentionnés à l'article 706-97.
« Les officiers ou agents de police judiciaire ou les agents qualifiés mentionnés au premier alinéa du présent article chargés de procéder aux opérations prévues par l'article 706-97 sont autorisés à détenir à cette fin des appareils relevant des dispositions de l'article 226-3 du code pénal.
« Art. 706-97-4. - Le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui dresse procès-verbal de chacune des opérations de mise en place du dispositif technique et des opérations de captation, de fixation et d'enregistrement sonore ou audiovisuel. Ce procès-verbal mentionne la date et l'heure auxquelles l'opération a commencé et celles auxquelles elle s'est terminée.
« Les enregistrements sont placés sous scellés fermés.
« Art. 706-97-5. - Le juge d'instruction ou l'officier de police judiciaire commis par lui décrit ou transcrit, dans un procès-verbal qui est versé au dossier, les images ou les conversations enregistrées qui sont utiles à la manifestation de la vérité. Les conversations en langue étrangère sont transcrites en français avec l'assistance d'un interprète requis à cette fin.
« Art. 706-97-6. - Les enregistrements sonores ou audiovisuels sont détruits, à la diligence du procureur de la République ou du procureur général, à l'expiration du délai de prescription de l'action publique.
« Il est dressé procès-verbal de l'opération de destruction. »
Cet amendement a déjà été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 706-97-2 du code de procédure pénale.
ARTICLES 706-98 ET 706-99
M. le président. Je mets aux voix les textes proposés pour les articles 706-98 et 706-99 du code de procédure pénale.
(Ces textes sont adoptés.)
ARTICLE 706-100 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 302, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-100 du code de procédure pénale :
« Lorsque le procureur de la République décide de poursuivre l'enquête préliminaire, cette personne est informée, dans les deux mois suivant la réception de sa demande, qu'elle peut demander qu'un avocat désigné par elle ou commis d'office à sa demande par le bâtonnier puisse consulter le dossier de la procédure. »
L'amendement n° 27, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« I. - Dans le deuxième alinéa du texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-100 du code de procédure pénale, après les mots : "une nouvelle audition", insérer les mots : "ou à un nouvel interrogatoire".
« II. - Après les mots : "toute nouvelle audition", rédiger comme suit la fin du deuxième alinéa du texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-100 du code de procédure pénale : "ou tout nouvel interrogatoire de la personne". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 302.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. L'article 706-100 traite du droit d'information de l'intéressé qui a été placé en garde à vue six mois avant et qui n'a pas fait l'objet de poursuites. Il est prévu dans le premier alinéa de cet article que ce dernier puisse interroger le procureur de la République pour connaître la suite donnée ou susceptible d'être donnée à l'enquête. Cette demande est faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Pourquoi pas ? Je veux bien.
« Lorsque le procureur de la République décide de poursuivre l'enquête préliminaire et qu'il envisage de procéder à une nouvelle audition de la personne au cours de cette enquête, cette personne est informée, dans les deux mois suivant la réception de sa demande, » - le procureur dispose donc de deux mois pour répondre, mais le malheureux ploie sous tant de tâches que l'on comprend que cela n'aille pas plus vite - « qu'elle peut demander qu'un avocat désigné par elle ou commis d'office à sa demande par le bâtonnier puisse consulter le dossier de la procédure. Le dossier est alors mis à la disposition de l'avocat au plus tard dans un délai de quinze jours à compter de la demande et avant, le cas échéant, toute nouvelle audition de la personne. »
Ne pourrait-on pas supprimer cette dernière condition ? En effet, qu'il soit ou non envisagé de procéder à une nouvelle audition, il est normal que la personne ayant été placée en garde à vue six mois auparavant puisse avoir accès au dossier, ce qui ne sera possible que si le procureur compte faire procéder à une nouvelle audition.
Notre amendement n° 302 tend donc à supprimer, dans le deuxième alinéa de l'article 706-100 du code de procédure pénale, les mots : « et qu'il envisage de procéder à une nouvelle audition ».
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 27 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 302.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 27 est un amendement rédactionnel.
Quant à l'amendement n° 302, il vise à faciliter l'accès des personnes ayant fait l'objet d'une garde à vue dans le cadre d'une enquête préliminaire au dossier. Ce n'est cependant pas parce qu'une personne a été en garde à vue qu'elle doit avoir accès au dossier, et, si les investigations la concernant sont abandonnées mais que l'enquête se poursuit à l'égard d'autres personnes, il n'est franchement pas souhaitable qu'elle puisse, même par l'intermédiaire d'un avocat, consulter le dossier.
La commission est donc défavorable à l'amendement n° 302.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Je suis également défavorable à l'amendement n° 302.
Comme l'a dit M. le rapporteur, il n'y a pas lieu d'autoriser un avocat à consulter le dossier de procédure s'il n'est pas envisagé d'entendre de nouveau son client, en particulier si d'autres personnes sont concernées par la procédure.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 27.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 302.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je ne comprends pas très bien la réponse de M. le rapporteur, à laquelle s'est rallié M. le garde des sceaux.
La personne qu'il est envisagé d'entendre de nouveau a, elle, le droit de consulter le dossier. Or elle aussi pourrait renseigner les autres membres de la bande. L'explication n'en est donc pas une, ou alors il faudrait enlever aux procureurs la possibilité de procéder de nouveau à l'audition d'une personne mise en garde à vue six mois auparavant, car cela revient également à lui donner accès au dossier alors que l'enquête se poursuit.
Tout cela n'est pas très logique !
Si vous êtes prêts à autoriser la consultation du dossier six mois après le placement en garde à vue, reconnaissez au moins que ce n'est pas un délai normal ! Il est donc légitime que l'intéressé qui n'a pas été interrogé depuis six mois, qui est en liberté - ce qui n'est d'ailleurs pas même certain, mais, s'il est en prison, il a accès au dossier -, puisse savoir ce qu'il est advenu de la procédure.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 302.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 27.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 28, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 706-100 du code de procédure pénale par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'enquête n'a pas été menée sous la direction du procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel la garde à vue a été réalisée, celui-ci adresse sans délai la demande au procureur qui dirige l'enquête. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 28 me donne l'occasion de rappeler à M. Dreyfus-Schmidt que le nouvel article 706-100 constitue une avancée intéressante pour les droits de la défense : lorsqu'il a été fait usage des instruments prévus pour renforcer la lutte contre la criminalité organisée, la personne qui a été placée en garde à vue peut interroger le procureur de la République dans le ressort duquel la garde à vue s'est déroulée sur les suites données à la procédure.
Cet amendement de précision a pour objet de pallier une difficulté technique : dans le cas où le lieu dans lequel la garde à vue s'est déroulée n'est pas dans le ressort du procureur qui dirige l'enquête, il convient de prévoir la transmission de la demande de la personne placée en garde à vue au procureur compétent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 28.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 706-100 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté).
ARTICLE 706-101 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. Je mets aux voix le texte proposé pour l'article 706-101 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 29 est présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois.
L'amendement n° 244 est présenté par M. Haenel, au nom de la commission des finances.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer le paragraphe II de cet article. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Paul Girod, en remplacement de M. Hubert Haenel, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. Le rapporteur de la commission des lois a l'extrême courtoisie de laisser celui qui remplace le rapporteur de la commission des finances s'exprimer le premier.
Comme la commission des lois, la commission des finances estime que le paragraphe II de l'article 1er n'a pas sa place à cet endroit du texte.
Il introduit une certaine confusion, en particulier du fait que les dispositions relatives à la rémunération des indicateurs ne s'adressent pas uniquement à ceux qui aident la police, mais également à ceux qui aident les gendarmes et les douanes.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour défendre l'amendement n° 29.
M. François Zocchetto, rapporteur. La position de la commission des lois est absolument identique à celle de la commission des finances.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 29 et 244.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Articles additionnels après l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 413, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 63 du code de procédure pénale, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Toute personne gardée à vue a droit au respect de son intégrité physique et morale.
« Lors de la garde à vue, un repas chaud par vingt-quatre heures ainsi qu'une installation sanitaire décente doivent être mis à la disposition de la personne gardée à vue. »
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Notre amendement ne pourra qu'être accepté tant par M. le rapporteur que par le Gouvernement. En effet, il tend à poser le principe d'une garde à vue décente et qui ne soit pas dégradante pour les personnes qui y sont placées.
Il est vrai que nous n'avions pas connaissance, en le déposant, de la circulaire que nous a lue M. le rapporteur voilà un instant. Il serait d'ailleurs intéressant de savoir quelles évolutions ont connues depuis le mois de mars les locaux de garde à vue.
Personne ne peut nier que les conditions de garde à vue sont actuellement loin d'être des modèles en matière de respect de la dignité humaine et ne font pas de la France un exemple à suivre.
La Grande-Bretagne fait déjà bénéficier les personnes gardées à vue des droits minimaux que nous visons dans notre amendement. Chez nos voisins, il est normal qu'une personne en garde en vue ait droit à un repas chaud et à des toilettes dans sa cellule. Un officier est d'ailleurs spécialement chargé de veiller au respect de ces règles.
Il en va tout autrement en France, où les mauvais traitements sont davantage l'apanage des gardes à vue que ne l'est le respect de la personne.
Notre pays a d'ailleurs été sévèrement rappelé à l'ordre par le comité de prévention de la torture s'agissant des locaux de gardes à vue et des conditions dans lesquelles étaient maintenues les personnes.
Il a fallu qu'un drame survienne dernièrement au terme de deux jours d'audition à la brigade financière pour que l'on s'interroge de nouveau sur le déroulement des gardes à vue.
Combien de fois entendons-nous parler de harcèlement moral des enquêteurs, de pressions psychologiques, de coups et blessures, parfois mortels, de non-assistance à personne en danger, de suicides, ce qui, malheureusement, résument trop souvent les conditions ou les conséquences des gardes à vue ?
Même M. Sarkozy semble s'émouvoir de ces traitements dégradants. C'est bien, mais il aura quand même fallu le décès d'une femme pour que le ministre de l'intérieur demande que les gardes à vue soient proportionnées à l'atteinte à l'ordre public et à la « dangerosité » de la personne.
Il est évident que tel n'est pas le cas aujourd'hui. Par notre amendement, nous ne faisons que poser des règles minimales, qui ne demandent qu'à être enrichies et complétées, pour être mises en pratique par les policiers.
Les conditions de garde à vue ne doivent pas avoir uniquement pour objet de faire céder les personnes concernées à la pression pyschologique des enquêteurs, au détriment de leurs droits fondamentaux. Nous ne devrions d'ailleurs pas avoir à déposer cet amendement : la règle devrait déjà être le respect de la dignité de la personne lors des gardes à vue.
Malheureusement, c'est loin d'être le cas, et nous vous demandons, en adoptant notre amendement, de poser les bases et donc de faire entrer la circulaire du ministre de l'intérieur dans la loi.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Monsieur Bret, vous avez eu l'amabilité de reconnaître que j'avais répondu par anticipation à votre amendement en lisant des extraits de la circulaire du ministre de l'intérieur. Je rappelle que cette circulaire date du mois de mars dernier. On ne peut donc pas dire, monsieur Bret, que le ministre de l'intérieur ait attendu l'événement malheureux qui vient de se produire pour intervenir.
M. Robert Bret. Je faisais allusion à ses dernières déclarations dans la presse.
M. François Zocchetto, rapporteur. Les dispositions que vous proposez vont d'elles-mêmes et relèvent tout au plus des instructions ou des circulaires. Elles n'ont en tout cas pas leur place dans la loi, même si tout le monde s'accorde à reconnaître que les conditions de garde à vue doivent être décentes, mais je ne reviens pas sur ce sujet dont nous avons déjà débattu.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement a la même position que la commission : les conditions de garde à vue relèvent de l'action ministérielle.
Le ministre de l'intérieur, voilà déjà plusieurs mois, s'est mobilisé en ce sens et a donné des instructions précises, il a fait allouer des moyens financiers pour que les conditions de la garde à vue soient améliorées.
Qui dit « améliorer » sous-entend que les conditions ne devaient pas être satisfaisantes auparavant...
En tous les cas, comme l'a dit le rapporteur, on n'est pas là dans le domaine de la loi. Il faudrait, bien entendu, que les choses s'améliorent. Éventuellement, on pourra aller plus loin sur un certain nombre de points, mais le Gouvernement est défavorable à l'inscription dans la loi de dispositions qui relèvent d'une circulaire. En le disant lui-même, M. Bret fixait d'ailleurs les limites de sa démarche.
M. le président. La parole est à M. Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. M. Bédier n'a pas eu le temps de rendre compte à M. le garde des sceaux des débats qui se sont déroulés tout à l'heure dans cette enceinte. Nous avons traité de ce sujet et entendu l'extrait de la circulaire du ministre de l'intérieur. Nous n'en avons pas retenu grand-chose, sinon que les locaux devaient être propres.
M. Robert Bret. Et le repas chaud !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est déjà cela, mais ce n'est pas suffisant. Nous avons précédemment rappelé quelles étaient les conditions de la garde à vue. Vous pourriez dire, monsieur le garde des sceaux, qu'elles ne relèvent pas de votre responsabilité mais de celle du ministre de l'intérieur, mais vous avez pris la responsabilité au nom du Gouvernement - et vous avez bien fait - de reconnaître qu'elles n'étaient pas satisfaisantes. Nous l'avons nous-mêmes dit : ce n'est pas une attaque contre l'actuel gouvernement mais contre tous les gouvernements qui se sont succédé depuis fort longtemps. Mais il faut le dire, les gardes à vue étaient beaucoup moins longues auparavant...
Toujours est-il que les locaux de garde à vue sont insanes et que les conditions mêmes dans lesquelles les gardes à vue se déroulent - ne sont pas à l'honneur de la République.
La loi a donné aux parlementaires le droit de visiter tous les locaux de garde à vue comme les prisons. Nous ne serons jamais suffisamment nombreux pour le faire, mais c'est notre devoir d'alerter le Gouvernement.
Vous nous dites que des crédits sont prévus, mais le moins que l'on puisse dire est que l'on ne sait pas où on va !
M. Robert Bret. C'est bientôt le budget !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Même dans les commissariats modernes, les locaux de garde à vue sont ce qu'ils ont toujours été. La tâche est énorme et il serait peut-être bon d'avoir un programme de planification. Nous avons d'ailleurs demandé tout à l'heure à M. Bédier, qui se consacre à l'immobilier, de bien vouloir se pencher sur ce problème, même s'il relève du ministère de l'intérieur.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 413.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 30, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article 15 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité, un article 15-1 ainsi rédigé :
« Art. 15-1. _ Les services de police, de gendarmerie et des douanes peuvent rétribuer toute personne étrangère aux administrations publiques qui leur a fourni des renseignements ayant amené directement soit la découverte de crimes ou de délits, soit l'identification des auteurs de crimes ou de délits. »
L'amendement n° 245, présenté par M. Haenel, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article 15 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité, un article 15-1 ainsi rédigé :
« Art. 15-1. _ Les services de police, de gendarmerie et des douanes peuvent rétribuer toute personne étrangère aux administrations publiques qui leur a fourni des renseignements ayant amené directement soit la découverte de crimes ou de délits, soit l'identification des auteurs de crimes ou de délits.
« Cette rétribution ne peut bénéficier aux auteurs, co-auteurs et complices de l'infraction faisant l'objet des renseignements. »
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l'amendement n° 245.
M. Paul Girod, rapporteur pour avis. Décidément, la courtoisie du rapporteur, qui me laisse parler en premier, n'a pas de limite ! L'amendement que j'ai l'honneur de présenter est un amendement de conséquence de la suppression du II de l'article 1er. Les dispositions relatives à la rémunération des indicateurs ont en effet davantage leur place dans de la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995.
La rémunération des indicateurs des services de police, de gendarmerie et des douanes est actuellement régie par la coutume. Elle n'est donc pas encadrée par la loi et des dérapages se produisent. En ce moment même, à Toulouse, un procès retentissant fait apparaître les dérives qui peuvent survenir lorsque ce genre de pratique n'est pas strictement encadré par la loi.
Il a par ailleurs semblé à la commission des finances qu'un indicateur ne saurait être rémunéré lorsqu'il est en même temps auteur ou complice des faits sur lesquels il renseigne la gendarmerie ou la police. Cela aboutirait en effet à des situations ubuesques : une personne pourrait être à la fois « récompensée » et condamnée, et on peut se demander quelle serait la position juridique du service de police concerné dans une telle situation.
C'est la raison pour laquelle la commission des finances vous propose l'amendement n° 245, qui est un peu plus long que celui de la commission des lois.
J'ajoute que, dès lors que nous sommes dans le cadre interministériel fixé par la loi relative à la sécurité, le contrôle parlementaire s'exercera sur l'emploi des fonds.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Sur le fond, nous sommes bien sûr d'accord avec la commission des finances.
La commission des lois considère qu'il est nécessaire d'affirmer la légalité de la rémunération des indicateurs et d'encadrer cette rémunération. Il reviendra donc à la loi de finances de prévoir une éventuelle affectation de recettes, de créer une ligne budgétaire spécifique ou encore de recourir à une ligne budgétaire existante, par exemple celle du ministère de l'intérieur qui est consacrée aux enquêtes.
La commission des lois, comme l'a souligné M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, a une position quelque peu différente, dans la mesure où elle considère que l'on ne peut, à ce stade de l'élaboration de la loi, prévoir tous les cas de figure. Il s'agit ici d'un domaine extrêmement délicat, que nous ne connaissons pas suffisamment et que nous ne connaîtrons sans doute jamais suffisamment. De même qu'en matière d'infiltration, il est difficile de tout prévoir. Par conséquent, exclure explicitement qu'une rétribution puisse être attribuée aux auteurs, coauteurs et complices de l'infraction serait peut-être par trop limiter la portée du dispositif. La commission des lois préfère ouvrir aux services de police et de gendarmerie la possibilité de rétribuer toute personne ayant fourni des renseignements. Ce ne sera, j'y insiste, qu'une possibilité, et j'espère que, dans la majorité des cas, les auteurs ou coauteurs de l'infraction faisant l'objet des renseignements ne seront pas rémunérés.
Sous cette réserve, qui n'est pas uniquement de nature rédactionnelle, nous souscrivons au principe énoncé par la commission des finances, et nous proposons au Sénat d'adopter l'amendement n° 30.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. J'évoquerai trois points.
Tout d'abord, le Gouvernement est globalement favorable à la réécriture de la disposition qui a été votée à l'Assemblée nationale.
Ensuite, il n'est pas utile ni même souhaitable de mentionner les services des douanes, puisqu'ils bénéficient déjà d'un régime spécifique. N'abandonnons pas un système qui fonctionne bien pour un dispositif qu'il faudra roder : je souhaiterais donc une rectification de l'amendement n° 30, tendant à ce que les services des douanes ne soient plus visés.
Enfin, s'agissant du léger désaccord entre les deux commissions, je m'en remets sur ce point à la sagesse du Sénat, au risque de le décevoir ! (Rires au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois.
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois. Je souhaiterais que nos collègues de la commission des finances retirent le second alinéa du texte qu'ils ont présenté et se rallient à la proposition de la commission des lois. En effet, je crains que le maintien de leur texte ne rende totalement inapplicable le système de la rétribution.
M. Laurent Béteille. Très juste !
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois. Il vaut mieux conserver une certaine souplesse, de façon qu'un dispositif trop rigide ne rende pas en pratique impossible le recours à des « repentis » ou l'obtention de renseignements auprès de personnes ayant pris part à une infraction.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Paul Girod, rapporteur pour avis. Tout d'abord, je constate la grande sagesse du Gouvernement, qui s'en remet à celle du Sénat, ce qui est un hommage à la Haute Assemblée que nous prenons au passage pour ce qu'il vaut, monsieur le garde des sceaux ! (Sourires.)
Cela étant, je serais quelque peu ennuyé de voir coexister dans notre législation deux textes divergents portant sur un même thème : le texte relatif aux aviseurs des douanes comporte bien la restriction prévue par la commission des finances, et il me semble gênant de ne pas inscrire celle-ci dans le dispositif concernant les indicateurs de la police et de la gendarmerie. Dans ce cas, les agents des douanes risqueraient d'être placés dans une situation relativement difficile par rapport à leurs collègues !
C'est pourquoi je souhaite transformer mon amendement en sous-amendement à l'amendement de la commission des lois. Le Sénat sera ainsi obligé de statuer sur notre proposition.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 245 rectifié, présenté par M. Haenel, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :
« Cette rétribution ne peut bénéficier aux auteurs, co-auteurs et complices de l'infraction faisant l'objet des renseignements. »
La parole est à M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois.
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois. On ne peut, à mon sens, établir de parallèle entre le champ d'intervention des services des douanes et les infractions qui sont visées par le présent texte. Il s'agit ici d'un tout autre domaine : celui de la grande criminalité, du crime organisé. C'est tout à fait différent.
Par ailleurs, monsieur le rapporteur pour avis, ne soyons pas hypocrites : je vis dans une ville où les services des douanes pratiquent couramment le genre de rétribution dont il est question et il est bien évident que si les complices de ceux qui importent de la drogue ou des substances illicites ne fournissaient pas aux douanes des renseignements contre rétribution, on ne parviendrait jamais à procéder à des saisies de douane significatives.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. Je pense, comme M. Paul Girod, qu'il serait assez singulier de traiter différemment les informateurs des services des douanes et ceux de la police et de la gendarmerie. Il me semble nécessaire de procéder à une harmonisation.
En outre, une question me vient à l'esprit : jusqu'à présent, les services de police et de gendarmerie ont-ils déjà rétribué ceux qui leur fournissaient des renseignements ?
MM. François Zocchetto, rapporteur, et Paul Girod, rapporteur pour avis. Bien sûr !
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois. Ne soyons pas naïfs !
M. Robert Badinter. Alors nous légalisons une pratique qui n'aurait pas dû exister auparavant !
M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille, pour explication de vote.
M. Laurent Béteille. Il s'agit ici d'une question de principe, mais aussi d'une question pratique. A mes yeux, interdire la rétribution pour renseignements des auteurs d'infraction est naturellement une bonne chose. S'agissant en revanche des complices, une difficulté se pose, car la notion de complicité est très large, et la plupart des informateurs sont nécessairement, d'une façon ou d'une autre, complices de l'infraction commise.
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois. Voilà !
M. Laurent Béteille. Par conséquent, pour que nous puissions suivre la commission des finances, il conviendrait de supprimer la référence aux complices dans le texte du sous-amendement. Je ne connais pas la position de M. le rapporteur pour avis de la commission des finances sur ce point, mais je souhaiterais que nous puissions aboutir à ce compromis.
M. le président. La parole est à M. Jean-Philippe Lachenaud, pour explication de vote.
M. Jean-Philippe Lachenaud. Je vais exprimer de nouveau la position que j'avais adoptée en commission des finances, en indiquant ma préférence pour la rédaction présentée par la commission des lois.
En effet, je ne suis pas certain que le champ d'application de la nouvelle disposition soit limité aux grands crimes et délits. A mon sens, la rédaction actuelle vise également des infractions commises en matière de trafic de drogue, d'urbanisme ou de droit de l'environnement.
Par ailleurs, il me paraît souhaitable de prévoir un encadrement législatif. Nous avons appris, lors d'une réunion de la commission des finances, que les pratiques des services des douanes n'avaient actuellement aucun fondement législatif et que, pour cette raison, elles pouvaient à tout moment être frappées de nullité. Un débat s'était déjà alors engagé sur ce point. Pour progresser dans la réflexion, je souhaiterais interroger le Gouvernement : ne serait-il pas préférable, au regard de cette situation, de maintenir dans le texte du projet de loi la référence aux services des douanes ?
En revanche, s'agissant d'un certain nombre de crimes et délits perpétrés par des bandes organisées, les sources d'information des services de gendarmerie, de police ou des douanes sont souvent des « repentis »...
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois. Voilà !
M. Jean-Philippe Lachenaud. ... ou des personnes ayant renoncé à participer à tel ou tel trafic ou se trouvant en situation de rivalité avec d'autres délinquants. Il serait donc souhaitable, à mes yeux, de retenir la proposition de la commission des lois. Cela évitera des difficultés et donnera un support légal minimal à des pratiques existantes.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Pour répondre à la question précise qui vient d'être posée à propos des douanes, je renverrai M. Lachenaud à l'article 391 du code des douanes. La matière est de niveau législatif.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Paul Girod, rapporteur pour avis. Je souhaite rectifier le sous-amendement n° 245 rectifié en supprimant la référence aux complices.
M. le président. Il s'agit donc du sous-amendement n° 245 rectifié bis, présenté par M. Haenel, au nom de la commission des finances, et ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par cet amendement pour l'article 15 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette rétribution ne peut bénéficier aux auteurs et co-auteurs de l'infraction faisant l'objet des renseignements. »
Je mets aux voix le sous-amendement n° 245 rectifié bis.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Avant de mettre aux voix l'amendement n° 30, monsieur le rapporteur, je dois vous demander si vous acceptez de le rectifier en supprimant la référence aux services des douanes.
M. François Zocchetto, rapporteur. Oui, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 30 rectifié, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :
« Après l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 15 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité, il est inséré un article 15-1 ainsi rédigé :
« Art. 15-1. - Les services de police et de gendarmerie peuvent rétribuer toute personne étrangère aux administrations publiques qui leur a fourni des renseignements ayant amené directement soit la découverte de crimes ou de délits, soit l'identification des auteurs de crimes ou de délits. »
Je mets aux voix l'amendement n° 30 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.
M. le président. Art. 1er bis. - L'article 77-2 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ces dispositions ne sont pas applicables aux enquêtes portant sur l'un des crimes ou délits entrant dans le champ d'application de l'article 706-73. » - (Adopté.)
Article 1er ter
M. le président. Art. 1er ter. - Après le deuxième alinéa de l'article 100-7 du code de procédure pénale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Aucune interception ne peut avoir lieu sur une ligne dépendant du cabinet d'un magistrat ou de son domicile sans que le premier président ou le procureur général de la juridiction où il réside en soit informé. » - (Adopté.)
Section 2
Dispositions relatives à la répression
de la délinquance
et de la criminalité organisées
M. le président. Art. 2. - I. - Il est inséré, après le 6° de l'article 221-4 du code pénal, un 7° ainsi rédigé :
« 7° Par plusieurs personnes agissant en bande organisée. »
II. - L'article 221-5-1 du même code devient l'article 221-5-2 et il est rétabli, après l'article 221-5, un article 221-5-1 ainsi rédigé :
« Art. 221-5-1. - Le fait de faire à une personne des offres ou des promesses ou de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques afin qu'elle commette un assassinat ou un empoisonnement est puni, lorsque ce crime n'a été ni commis ni tenté, de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 EUR d'amende. »
III. - Dans le premier alinéa de l'article 222-4 du même code, après les mots : « lorsqu'elle est commise », sont insérés les mots : « en bande organisée ou ».
IV. - Au deuxième alinéa de l'article 222-49 du même code, les mots : « et 222-38 » sont remplacés par les mots : « , 222-38 et 222-39-1 ».
V. - L'article 227-22 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et 1 000 000 EUR d'amende lorsque les faits ont été commis en bande organisée. »
VI. - A l'article 227-23 du même code, il est inséré, après le quatrième alinéa, un alinéa ainsi rédigé :
« Les infractions prévues aux deuxième, troisième et quatrième alinéas sont punies de dix ans d'emprisonnement et de 500 000 EUR d'amende lorsqu'elles sont commises en bande organisée. »
VI bis. - Après l'article 312-7 du même code, il est inséré un article 312-7-1 ainsi rédigé :
« Art. 312-7-1. - Le fait de ne pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes ayant commis les infractions prévues aux articles 312-6 et 312-7 ou le fait de faciliter la justification de ressources fictives pour ces mêmes personnes sont punis de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 EUR d'amende. »
VII. - L'article 313-2 du même code est ainsi modifié :
1° Le 5° est abrogé ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 1 000 000 EUR d'amende lorsque l'escroquerie est commise en bande organisée. »
VIII. - L'article 421-5 du même code est ainsi modifié :
1° Il est inséré, après le premier alinéa, un alinéa ainsi rédigé :
« Le fait de diriger ou d'organiser le groupement ou l'entente défini à l'article 421-2-1 est puni de vingt ans de réclusion criminelle et de 500 000 EUR d'amende. » ;
2° Au dernier alinéa, les mots : « aux délits prévus » sont remplacés par les mots : « aux infractions prévues ».
IX. - L'article 434-30 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « ou lorsqu'elles ont été commises dans le cadre d'une action concertée entre plusieurs détenus » sont supprimés ;
2° Le deuxième alinéa est complété par les mots : « ou lorsque les faits sont commis en bande organisée, que les membres de cette bande soient ou non des détenus ».
X. - Après le premier alinéa de l'article 442-1 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Est punie des mêmes peines la fabrication des pièces de monnaie et des billets de banque mentionnés à l'alinéa précédent réalisée à l'aide d'installations ou de matériels autorisés destinés à cette fin, lorsqu'elle est effectuée en violation des conditions fixées par les institutions habilitées à émettre ces signes monétaires et sans l'accord de ces institutions. »
XI. - L'article 442-2 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 442-2. - Le transport, la mise en circulation ou la détention en vue de la mise en circulation des signes monétaires contrefaits ou falsifiés mentionnés au premier alinéa de l'article 442-1 ou des signes monétaires irrégulièrement fabriqués mentionnés au deuxième alinéa de cet article est puni de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 EUR d'amende.
« Les infractions prévues au précédent alinéa sont punies de trente ans de réclusion criminelle et de 450 000 EUR d'amende lorsqu'elles sont commises en bande organisée.
« Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables aux infractions prévues au deuxième alinéa du présent article. »
XII. - Il est inséré, après l'article 450-4 du même code, un article 450-5 ainsi rédigé :
« Art. 450-5. - Les personnes physiques et morales reconnues coupables des infractions prévues au deuxième alinéa de l'article 450-1 et à l'article 450-2-1 encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. »
XIII. - L'article 3 de la loi du 19 juin 1871 qui abroge le décret du 4 septembre 1870 sur la fabrication des armes de guerre est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée. »
XIV. - Le premier alinéa du I de l'article 24 du décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée. »
XV. - Le premier alinéa de l'article 26 du décret du 18 avril 1939 précité est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée. »
XVI. - Le premier alinéa de l'article 31 du décret du 18 avril 1939 précité est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée. »
XVII. - Le I de l'article 6 de la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des poudres et substances explosives est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée. »
XVIII. - Le premier alinéa de l'article 4 de la loi n° 72-467 du 9 juin 1972 interdisant la mise au point, la fabrication, la détention, le stockage, l'acquisition et la cession d'armes biologiques ou à base de toxines est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée. »
XIX. - Le premier alinéa de l'article 4 de la loi du 2 juin 1891 ayant pour objet de réglementer l'autorisation et le fonctionnement des courses de chevaux est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée. »
XX. - Le premier alinéa de l'article 1er de la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée. »
XXI. - Le premier alinéa de l'article 2 de la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 précitée est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée. »
L'amendement n° 31, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« A. - Au début du second alinéa du paragraphe I de cet article, remplacer la référence : "7°" par la référence : "8°".
« B. - En conséquence, rédiger comme suit le premier alinéa du paragraphe I de cet article :
« Il est inséré, après le 7° de l'article 221-4 du code pénal, un 8° ainsi rédigé : ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Cet amendement vise simplement à la correction d'une erreur matérielle.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 31.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 414, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Supprimer le II de cet article. »
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. Les dispositions de l'article L. 221-5-1 que l'on nous propose d'introduire dans le code pénal visent à créer un nouveau type d'infraction, l'infraction virtuelle.
En effet, selon les termes du projet de loi, « le fait de faire à une personne des offres ou des promesses ou de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques afin qu'elle commette un assassinat ou un empoisonnement est puni, lorsque ce crime n'a été ni commis ni tenté, de dix ans d'emprisonnement et de 150 000 EUR d'amende. »
Serait ainsi créé le délit d'intention criminelle. Une telle rédaction déroge à un principe fondamental du droit pénal, selon lequel si la tentative est certes punissable, celle-ci ne peut être constituée que s'il y a commencement d'exécution, et non en cas de simples actes préparatoires, encore moins sur le fondement d'offres ou de promesses, comme le prévoit le projet de loi.
Par exemple, le fait de se trouver devant une banque avec un revolver ne constitue pas une tentative de « braquage » : tout au plus la personne pourra-t-elle se voir interpeller pour délit de port d'arme prohibé. Un film récent de Steven Spielberg brossait le portrait d'une société en quête d'idéal dans laquelle les criminels étaient arrêtés avant de commettre leur crime grâce à des oracles. Le dispositif pénal dont il s'agit ici se rapproche de cette utopie, et il n'est guère étonnant qu'un syndicat ait parlé, à ce propos, de « transportation d'une fiction hollywoodienne dans la réalité pénale française ».
Arrêtons donc ce cinéma et votez, mes chers collègues, l'amendement n° 414 : le droit pénal français ne s'en portera que mieux !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. La commission des lois est très étonnée que l'on propose de supprimer la création d'une incrimination pourtant très utile, puisqu'elle permet de sanctionner une personne ayant passé un « contrat » en vue de faire abattre un tiers.
La commission des lois émet par conséquent un avis défavorable sur l'amendement n° 414.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Défavorable, pour la même raison.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 414.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le paragraphe XIX de cet article :
« XIX. - Le premier alinéa de l'article 4 de la loi du 2 juin 1891 ayant pour objet de réglementer l'autorisation et le fonctionnement des courses de chevaux est ainsi modifié :
« 1° Les mots : "de deux ans et d'une amende de 9 000 EUR" sont remplacés par les mots : "de trois ans et d'une amende de 45 000 EUR" ;
« 2° Il est ajouté une phrase ainsi rédigée : "Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et 100 000 EUR d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'Assemblée nationale a complété la loi sur les paris sur les courses de chevaux pour créer une circonstance aggravante de bande organisée.
Le présent amendement tend en outre à aggraver les peines encourues en cas de paris illégaux, pour les porter à trois ans d'emprisonnement au lieu de deux, ce qui pourra permettre le recours à la détention provisoire si cela s'avère indispensable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 32.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 33, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le paragraphe XX de cet article :
« XX. - Le premier alinéa de l'article 1er de la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard est ainsi modifié :
« 1° Les mots : "de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende" sont remplacés par les mots : "de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende" ;
« 2° Il est ajouté une phrase ainsi rédigée : "Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée." »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 33 tend lui aussi à aggraver les peines encourues, s'agissant ici de la participation à la tenue d'une maison de jeux de hasard.
Mme Nicole Borvo. Encore l'aggravation des peines !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 34, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le paragraphe XXI de cet article :
« XXI. - Le premier alinéa de l'article 2 de la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 précitée est ainsi modifié :
« 1° Les mots : "de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende" sont remplacés par les mots : "de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende" ;
« 2° Il est ajouté une phrase ainsi rédigée : "Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Cet amendement a pour objet d'aggraver les peines encourues en ce qui concerne l'infraction d'importation ou de fabrication d'appareils dont le fonctionnement repose sur le hasard.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
M. le président. Art. 2 bis. - Après l'article 322-6 du code pénal, il est inséré un article 322-6-1 ainsi rédigé :
« Art. 322-6-1. - Le fait de diffuser par tout moyen, sauf à destination des professionnels, des procédés permettant la fabrication d'engins de destruction élaborés à partir de poudre ou de substances explosives, de matières nucléaires, biologiques ou chimiques, ou à partir de tout autre produit destiné à l'usage domestique, industriel ou agricole, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 EUR d'amende.
« Les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 EUR d'amende lorsqu'il a été utilisé, pour la diffusion des procédés, un réseau de télécommunication à destination d'un public non déterminé. »
L'amendement n° 305, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 322-6-1 du code pénal, remplacer les mots : "d'un an" par les mots : "de 3 ans" et les mots : « 15 000 euros" par les mots : "45 000 euros".
« II. - Dans le second alinéa du même texte, remplacer le mot : "trois" par le mot : "cinq" et les mots : " 45 000 euros" par les mots : "75 000 euros". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cet amendement a ceci de particulier qu'il tend, ce qui est assez exceptionnel de notre part, à aggraver une peine encourue !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. De façon générale, je regrette vivement que l'on n'ait pas inscrit dans le code pénal, comme nous l'avions d'ailleurs demandé, que la peine prévue représente un maximum, et non une sorte d'idéal à atteindre. Les choses auraient été plus claires pour tout le monde, y compris pour les magistrats.
Cela étant dit, on a la manie, dans ce pays, et plus particulièrement à la droite de l'échiquier politique, d'aggraver les peines encourues, sans bien se rendre compte de la réalité des pratiques. Si aucun tribunal n'a jamais rendu de jugement condamnant quelqu'un au maximum de la peine, il n'est peut-être pas utile d'alourdir la peine encourue. Si des difficultés se présentaient, si en effet les juges étaient limités dans leur action par le niveau de la peine maximale, on pourrait alors envisager une telle évolution, mais cela ne doit pas être systématique. Procéder ainsi ne présente aucun intérêt, pas même en termes d'effet d'affichage, puisque les intéressés ne lisent pas le code pénal tous les jours et ne se demandent malheureusement pas, avant d'agir, ce qu'ils risquent.
Mme Nicole Borvo. Si, mais cela ne les empêche pas de passer à l'acte !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous avons découvert, dans le projet de loi, la rédaction suivante, proposée à l'article 2 bis nouveau :
« Art. 322-6-1. - Le fait de diffuser par tout moyen, sauf à destination des professionnels, des procédés permettant la fabrication d'engins de destruction élaborés à partir de poudre ou de substances explosives, de matières nucléaires, biologiques ou chimiques, ou à partir de tout autre produit destiné à l'usage domestique, industriel ou agricole, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 EUR d'amende.
« Les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 EUR d'amende lorsqu'il a été utilisé, pour la diffusion des procédés, un réseau de télécommunication à destination d'un public non déterminé. »
On en reste pantois !
Evidemment, je ne peux pas demander au Gouvernement de me dire combien de fois le cas s'est posé, car j'espère qu'il ne s'est pas posé. Mais, s'il se posait, il est évident que les peines seraient insuffisantes. Aussi, nous proposons de porter la peine à trois ans d'emprisonnement et à 45 000 euros dans la première hypothèse, et à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 euros dans la seconde hypothèse. Notre amendement est très modéré. Si on nous avait laissés, nous serions allés beaucoup plus loin. En effet, je rappelle qu'il s'agit d'un maximum et que, suivant les circonstances de l'affaire, les tribunaux peuvent prononcer une peine bien moindre, puisque aucun minimum n'est fixé.
Voilà pourquoi nous présentons cet amendement. Une simple peine d'un an d'emprisonnement pour les personnes qui expliquent comment il faut se servir de n'importe quel produit, y compris de matières nucléaires, pour réaliser des engins explosifs, cela nous paraît singulièrement grave.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Le groupe socialiste se montre particulièrement vigilant quant à la répression de certaines infractions. S'agissant de la fabrication d'engins de destruction, la commission a été convaincue par les arguments évoqués. Aussi, elle a donc émis un avis favorable sur ce durcissement, qui est proposé par nos collègues du groupe socialiste.
M. Jean-Jacques Hyest. Ce qui est à noter !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 305.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 bis, modifié.
(L'article 2 bis est adopté.)
M. le président. Art. 2 ter. - Dans l'article 421-2 du code pénal, après les mots : « dans le sous-sol », sont insérés les mots : « , dans les aliments ou les composants alimentaires ». - (Adopté.)
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Christian Poncelet.)
PRÉSIDENCE DE M. CHRISTIAN PONCELET
M. le président. La séance est reprise.
QUESTIONS D'ACTUALITÉ
AU GOUVERNEMENT
M. le président. L'ordre du jour appelle les questions d'actualité au Gouvernement.
Monsieur le Premier ministre, je vous remercie de participer à cette séance. Votre présence nous touche beaucoup. Elle montre l'intérêt que vous portez à notre institution, et nous y sommes bien sûr sensibles.
Conformément à la règle posée à l'unanimité par la conférence des présidents, je rappelle que l'auteur de la question et le ministre qui lui répond disposent, chacun, de deux minutes trente. Chaque intervenant aura à coeur, par courtoisie, de ne pas dépasser cette durée. Je ferai d'ailleurs rigoureusement respecter le temps de parole imparti à chacun.
INSTITUTION D'UNE TAXE SUR LES POIDS LOURDS
M. le président. La parole est à M. Josselin de Rohan. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Josselin de Rohan. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, lors des débats parlementaires du printemps dernier sur les infrastructures, il a été envisagé d'instaurer des taxes sur les camions et des péages sur les autoroutes et les voies express qui n'en étaient pas pourvues jusqu'à présent.
Je voudrais vous faire part, monsieur le Premier ministre, de l'hostilité profonde et unanime des Bretons à la perspective que leur soient imposés des péages sur les voies express.
En 1968, en effet, le plan routier breton avait expressément prévu que les voies express de Bretagne ne seraient pas frappées de péages en raison de l'éloignement de cette région. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
En ce qui concerne la taxe sur les camions, j'observe que 80 % de nos expéditions et 80 % de nos approvisionnements dépendent de la voie routière, notamment des camions. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
M. le président. Veuillez écouter M. de Rohan, mes chers collègues !
M. Josselin de Rohan. Imposer une taxe sur les camions reviendrait à pénaliser gravement non seulement les producteurs et les consommateurs bretons, mais aussi et surtout les petites et moyennes entreprises de transport en Bretagne.
Monsieur le Premier ministre, quelles sont vos réflexions sur ce point et quels sont les projets du Gouvernement ? Les Bretons seront très attentifs à la réponse que vous allez leur apporter. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, l'ensemble du Gouvernement est très heureux en cette rentrée parlementaire de vous saluer et de vous dire leur plaisir de se retrouver ici pour répondre le plus directement et le plus précisément possible aux questions que, au nom de vos électeurs, vous poserez.
M. Claude Estier. Y compris à celles de l'opposition ?
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. A celles de la majorité et de l'opposition, le Gouvernement restera attentif !
Je répondrai au président du groupe de l'opposition... (Rires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Bernard Piras. Vous anticipez ! (Nouveaux rires sur les mêmes travées.)
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Pas du tout ! Je répondais à M. Estier, président d'un groupe de l'opposition, et je me tournais vers le président d'un groupe de la majorité, faisant ainsi le chemin du passé vers l'avenir. (Rires et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Raymond Courrière. Cela commence mal !
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Monsieur le président de Rohan, je suis très attentif à l'ensemble des débats qui ont eu lieu au Sénat comme à l'Assemblée nationale sur les grandes infrastructures, ainsi qu'au travail qu'ont mené plus précisément certains sénateurs : je pense notamment à MM. Haenel et Gerbaud en ce qui concerne le fret ferroviaire, à M. de Richemont en ce qui concerne le maritime. Je pense aussi à toutes les contributions, aux travaux de la DATAR et aux études d'audit qui ont permis au Gouvernement de préparer un schéma national des grandes infrastructures sur les vingt-cinq prochaines années.
Je souhaite que nous ayons cette discussion essentielle pour l'avenir des voies de communication dans notre pays.
Dans le passé, on a négligé quelque peu les efforts d'investissement, donnant toujours la priorité au fonctionnement,...
MM. Adrien Gouteyron et René Trégouët. C'est vrai !
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. ... ce qui a entraîné notamment en matière ferroviaire, beaucoup de retard par rapport à nos voisins, allemands par exemple. (Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Je rappelle qu'une structure aussi importante que Réseau ferré de France est endettée à hauteur de 23 milliards d'euros qui, par décision récente de Bruxelles, viennent de nous être imputés comme déficit.
Cette somme n'était pas considérée comme un déficit en 2002. Elle l'est aujourd'hui, ce qui prive la France d'une capacité d'investissement. D'où les efforts nécessaires, et que nous faisons, afin de désendetter RFF et de redonner à notre pays une capacité d'investissement très importante en matière ferroviaire (M. Didier Boulaud s'exclame), notamment pour faire en sorte que nous puissions avoir les infrastructures de communication adaptées à l'économie de notre pays.
M. Didier Boulaud. Et la réponse !
M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre. Je sais la place de la Bretagne dans l'ensemble du dispositif de communications, je connais sa situation périphérique, d'autant plus périphérique que le centre de gravité de l'Europe se déplace vers l'Est.
Les efforts faits dans le passé par les gouvernements précédents pour faire en sorte que la Bretagne dispose d'infrastructures performantes et non payantes doivent être prolongés pour assurer l'avenir de ce territoire périphérique. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Je suis très attaché à ce que la « périphéricité » ne constitue pas un handicap nouveau en termes d'aménagement du territoire dans une Europe qui se construit davantage vers l'Est. Voilà pourquoi vous n'avez rien à craindre des réflexions que nous mènerons, des décisions financières que nous prendrons, pour la Bretagne comme pour toutes les régions de l'Arc atlantique, afin que ces territoires bénéficient des grandes infrastructures auxquelles vous êtes attachés. En disant cela, je pense au TGV Bretagne-Pays de la Loire, mais aussi à l'aéroport Notre-Dame-des-Landes et aux grandes infrastructures qu'attend et mérite l'Ouest. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Monsieur le ministre, les mois d'octobre se suivent et ne se ressemblent pas. Souvenez-vous : en octobre 2002, c'était vraiment l'euphorie ! Que ne disiez-vous pas en présentant votre budget aux parlementaires !
« Notre politique, c'est de mettre en oeuvre une stratégie économique qui favorise la croissance. » (Rires sur les travées du groupe socialiste.)
« Notre ambition, c'est de préparer l'avenir en préservant les chances de nos enfants. »
« Les finances publiques dérivaient lorsque nous avons pris les rênes de ce pays. » (Nouveaux rires sur les mêmes travées.)
Plusieurs sénateurs de l'UMP. Mais ça, c'était vrai, hélas !
M. François Marc. « Le premier objectif du Gouvernement a été de stopper le déficit. » Je pourrais poursuivre les citations !
Nous sommes en octobre 2003 et, en un an seulement, l'euphorie a fait place au désarroi.
Vous vouliez apporter la confiance. Pourtant, le moral des Français est au plus bas. Par crainte des lendemains qui déchantent, ils épargnent à tour de bras : leur taux d'épargne est de 18 %, soit le record d'Europe.
Il est vrai que la montée du chômage inquiète au plus haut point. L'augmentation des taxes sur le gazole, des tarifs publics, du forfait hospitalier, et j'en passe, additionnée à l'accroissement des impôts locaux représentera près de 3,2 milliards d'euros en 2004, soit le double de ce qui est consacré à la baisse de l'impôt sur le revenu. Nos concitoyens ont vite compris le tour de passe-passe !
Vous annonciez une maîtrise du déficit public. Celui-ci a, en fait, été multiplié par 2,5 % en trois ans et il atteint 4 % du PIB en 2003 : la France est discréditée en Europe et, selon l'OCDE, cette dérive budgétaire est imputable pour les deux tiers aux choix budgétaires et fiscaux du Gouvernement.
Un sénateur de l'UMP. Du gouvernement précédent !
M. François Marc. Vous vous engagiez à mieux préparer l'avenir de nos enfants. Or les choix budgétaires en matière de recherche et d'investissement apportent la démonstration du contraire, tandis que l'endettement de la France explose : plus 20 % en trois ans, plus de 1 000 milliards d'euros en 2004.
M. Philippe François. A cause de qui ?
M. François Marc. Rude constat pour les jeunes générations !
M. le président. Votre question, monsieur Marc !
M. François Marc. Vous vous faisiez fort de muscler la croissance économique. Mais, au lieu des 2,5 % annoncés pour 2003, ce sera 0,5 %, voire moins. Le Gouvernement s'est trompé au minimum de 80 % dans ses prévisions. C'est du jamais vu !
M. le président. Monsieur Marc, votre question !
M. François Marc. Monsieur le ministre, de graves erreurs ont été commises en 2003. (Protestations sur les travées de l'UMP.)
Pour 2004, allez-vous changer votre doctrine...
M. René-Pierre Signé. Non !
M. François Marc. ... ou avez-vous l'intention de persister dans l'erreur ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Marc, nous avons l'intention de persister dans notre politique (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP)...
M. Roland Courteau. Dans l'erreur !
M. René-Pierre Signé. Maigres applaudissements !
M. Francis Mer, ministre. ... qui n'est pas une politique conduisant à l'erreur.
Vous avez raison quand vous citez un certain nombre de prévisions qui ne sont réalisées ni en France ni dans la plupart des pays européens, à quelques exceptions près. Personne ne peut le contester : la reprise a du mal à apparaître. (Murmures sur les travées du groupe socialiste.)
Vous pourriez rappeler que, actuellement, tout le monde, en France comme en Europe, considère que la reprise est au coin du bois et qu'elle est déjà pratiquement active aux Etats-Unis ; mais ce n'est pas cela le problème.
Ce qu'il faut, c'est avoir un certain nombre de convictions, c'est-à-dire avoir une politique économique comme une politique sociale...
M. Jacques Mahéas. Sociale, sociale !
M. Francis Mer, ministre. ... et mettre en oeuvre cette politique tout au long du temps qui nous est réservé.
Nous avons cinq ans pour rectifier vingt ans d'erreurs. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. - Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Didier Boulaud. Mais c'était Chirac de 1986 à 1988 !
M. Francis Mer, ministre. Cinq ans, c'est peut-être trop court, car les nombreuses erreurs et la situation dramatique que nous avons trouvée dans beaucoup de domaines font que, peut-être, nous aurons besoin de cinq ans de plus pour rectifier le tir !
M. Didier Boulaud. Vous ne les aurez pas !
M. Francis Mer, ministre. Rassurez-vous : nous sommes dans une situation où nous commençons à bâtir les conditions d'une croissance soutenable.
Quand vous découvrez la situation d'un certain nombre d'entreprises publiques, la difficulté que nous avons d'organiser la fonction publique d'une manière normale pour remotiver les fonctionnaires et, plus généralement les Français, vous vous dites que nous avons du travail. C'est vrai, mais nous en sommes ravis.
Beaucoup de gens se plaignent peut-être. Mais vous avez oublié de citer ceux qui ne devraient pas se plaindre, par exemple les quelques millions de Français qui, au 1er juillet, ont vu leur pouvoir d'achat augmenter. (Rires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Bernard Piras. C'est honteux de dire cela !
M. Francis Mer, ministre. Vous avez également oublié de parler de ceux qui ont vu leur situation s'améliorer grâce à l'augmentation de la prime pour l'emploi - qui a été d'ailleurs lancée par le précédent gouvernement -, à travers l'activation du revenu minimum d'activité, en remplacement du revenu minimum d'insertion, et à travers le renouvellement des contrats initiative-emploi.
Voilà toutes les mesures que nous sommes en train de prendre et qui vont, à leur rythme, créer les conditions pour que la France retrouve le chemin de la croissance.
M. Bernard Piras. Vous donnez aux riches et vous enlevez aux pauvres !
M. Francis Mer, ministre. Rassurez-vous, monsieur Marc, nous ne changerons pas de politique, car c'est la meilleure ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. François Trucy.
M. François Trucy. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Quand un drame se produit, le temps passe et, une fois atténuée l'émotion, le risque est grand que l'oubli ne s'installe, oubli des faits, de leur cause et, pis, des leçons que l'on devrait tirer des événements.
Pendant cet été 2003, la France a connu deux drames majeurs. Je ne les confonds pas. Ils ne sont pas de même nature.
Dans le domaine des incendies de forêt, le Var a payé un tribut exceptionnel et quatorze autres départements ont connu eux aussi un sort funeste. Nous avons tous en tête les morts, au nombre de huit, les 63 000 hectares de forêt incendiés en France - dont 20 000 dans le Var -, les dizaines d'habitations, d'exploitations agricoles, de campings détruits, et les ravages sur l'environnement.
Nous connaissons le coût exorbitant de la lutte contre les incendies : 20 000 euros par jour pour une colonne de secours, 39 millions d'euros cette année pour 7 000 heures d'avions Canadair auxquels s'ajoute le coût inchiffrable de la réparation des dégâts.
Monsieur le ministre, si la canicule, la sécheresse et un vent démoniaque sont à l'évidence les responsables de la violence des incendies et de la rapidité de leur progression, s'il y a eu, comme d'habitude, des incendiaires, il y a eu des facteurs aggravants qui dépendent des personnes.
Il en est ainsi des retards pour la mise en place des plans de prévention des incendies de forêt, de l'irrespect des règlements d'urbanisme en forêt, de la largeur insuffisante des voies d'accès, du non-respect de l'obligation de disposer de points d'eau, de l'absence de débroussaillement des sous-bois, même aux abords des habitations.
J'évoquerai enfin le comportement irresponsable face aux risques d'incendie des touristes français ou étrangers, voire des autochtones. Contre cette inconscience, cette ignorance, ne faut-il pas une information solide et constante ?
M. le président. Votre question, monsieur Trucy !
M. François Trucy. Mais je suis dans les temps ! (Rires.)
N'est-il pas aussi nécessaire, monsieur le ministre, de mieux prévenir par la fermeture des pistes en forêt et de mieux surveiller ?
Si nous nous félicitons des réactions immédiates et efficaces des préfets face aux sinistres, de l'état d'esprit et de la détermination des comités de pilotage, nous voudrions bien que cette détermination résiste au temps qui passe. On nous dira plus tard ce qu'il faut penser des changements climatiques.
Mais aujourd'hui, vous avez soutenu avec beaucoup de coeur les familles des pompiers morts au feu. Vous les avez confortées et aidées. C'est très bien !
Alors même que vous avez engagé avec les responsables de ce corps des discussions approfondies, quels engagements tirez-vous des incendies de cet été ?
Quels sont les points qui retiennent particulièrement votre attention, dans le domaine des matériels et de la dangerosité du métier de pompier, notamment ?
Quelles dispositions pensez-vous prendre ou avez-vous déjà prises en ce domaine ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales. La première chose à faire, et cela concerne toutes les travées de la Haute Assemblée, c'est de rendre hommage aux sapeurs-pompiers, qu'ils soient militaires, professionnels ou volontaires, qui ont payé un lourd tribut.
Ce matin même, je représentais le Premier ministre à l'enterrement de l'un des leurs à Aix-en-Provence, mort après deux mois de souffrances terribles des conséquences de ses brûlures.
Deuxième chose, il faut absolument mettre au clair les relations entre les collectivités départementales et l'Etat sur cette question.
M. René-Pierre Signé. Voilà ! Ce sont elles qui paient !
M. Nicolas Sarkozy, ministre. Il n'est pas question de fonctionnariser les sapeurs-pompiers, mais nous ne pouvons pas nous décharger sur les collectivités territoriales du coût de cette lutte intense.
Cela se traduira par un certain nombre d'événements.
Premièrement, le Premier ministre a décidé que les deux Fokker 27 seront remplacés - ils avaient trente-trois et trente-deux ans - par deux bombardiers d'eau, et nous allons acquérir de nouveaux hélicoptères bombardiers d'eau. Cette décision était très attendue pour aider au sol les sapeurs-pompiers.
Deuxièmement, nous allons, au titre du retour d'expérience, prépositionner les forces nationales avant que la catastrophe ne se développe. Il coûte moins cher - y compris sur le budget de l'Etat - de prépositionner des colonnes de renfort pour aider les pompiers du Sud à éteindre les feux que d'attendre que la catastrophe se soit répandue. Et cette année, 60 000 hectares sont partis en fumée !
Troisièmement, Mme Bachelot-Narquin et moi-même travaillons sur les plans de prévention des risques incendie et sur la question du débroussaillage. Il faut dire les choses comme elles sont : l'Etat, comme les collectivités territoriales, doit faire preuve de plus de fermeté. Plus question d'accepter des permis de construire n'importe comment !
Pour les propriétés qui ne sont pas débroussaillées, nous étudions, avec Mme Bachelot-Narquin, la mise en place d'un fonds qui permettrait aux préfets d'engager aux frais de l'Etat le débroussaillage, ce qui reviendrait moins cher que de supporter le coût d'une catastrophe.
Quatrièmement, s'agissant de l'arrestation des incendiaires, policiers et gendarmes ont bien travaillé ; quatre-vingt-huit arrestations, vingt-cinq incendiaires sous les verrous, cela ne s'était jamais vu !
Enfin, dernier point, nous sommes en train de négocier avec les sapeurs-pompiers professionnels - avec les sapeurs-pompiers volontaires, c'est arrangé - un aménagement du congé pour difficultés opérationnelles. Un accord a été trouvé hier.
Je crois qu'ainsi, monsieur le sénateur, toutes les conditions sont réunies pour que cela se passe mieux l'année prochaine. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. René-Pierre Signé. Et les pompiers, qui les paiera ? Toujours les départements !
M. le président. La parole est à Mme Françoise Férat.
Mme Françoise Férat. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.
Monsieur le ministre, je tenais à vous faire part des inquiétudes suscitées par l'absence de publication de la circulaire sur les bourses et la suppression des emplois-jeunes dans l'enseignement privé.
Concernant le versement des bourses, il semble qu'un gel des crédits empêche votre ministère de disposer de tout moyen de paiement. Pourtant, sur votre proposition, le Parlement a reconduit une enveloppe spécifique de 71,24 millions d'euros à l'occasion du vote de la loi de finances pour 2003.
Comme vous pouvez l'imaginer, cette situation, des plus inquiétantes pour les 52 759 élèves concernés, nuit gravement à l'image des formations aux métiers agricoles.
Ayant particulièrement apprécié, en qualité de rapporteur pour avis du budget de l'enseignement agricole, votre volonté de soutenir cette filière et de mettre un terme au contentieux entre l'Etat et les établissements privés, il me semble que la persistance de ce blocage pourrait nuire à un climat désormais empreint de confiance et de sérénité.
Dans cette hypothèse, il reviendrait aux parents ou aux associations subrogées au droit de perception des familles de se substituer à une éventuelle défaillance de l'Etat. Cette nouvelle charge entraînerait inévitablement leur mécontentement.
Cette perspective me semble d'autant plus inquiétante qu'elle coïncide avec la disparition des emplois-jeunes.
Si le retrait de ce dispositif s'explique notamment par ses lacunes en termes d'intégration et de formation professionnelles, force est de constater qu'il a favorisé l'émergence de nouvelles activités telles que les nouvelles technologies de l'information et de la communication.
Dans l'enseignement agricole public, ces suppressions sont compensées par la création de postes d'assistants d'éducation. En revanche, aucun dispositif de substitution n'est envisagé pour le privé.
En l'absence de toute reconduction de l'aide accompagnant les emplois-jeunes, les associations de gestion devront opter soit pour la suppression de ces contrats, soit pour la pérennisation de ces postes par une augmentation significative des contributions familiales.
Monsieur le ministre, consciente des efforts que vous avez accomplis pour accompagner le développement de cette formation, je souhaiterais connaître les mesures que vous envisagez de prendre pour, d'une part, honorer les engagements de l'Etat tels qu'ils résultent de la loi de finances pour 2003 et, d'autre part, éviter une disparité de services ou de traitement entre les secteurs publics et privés de l'enseignement agricole. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales. Madame la sénatrice, je voudrais tout d'abord relever devant la Haute Assemblée l'excellence de notre enseignement professionnel agricole,...
M. Jean-Claude Carle. Tout à fait !
M. Hervé Gaymard, ministre. ..., qu'il soit public ou privé, qui représente environ le quart de l'enseignement professionnel dans notre pays. Il est complètement en phase avec le développement des territoires et apporte aux élèves une bonne formation adaptée à l'emploi dans tous les métiers.
Il est vrai que deux problèmes se posent en cette année 2003.
Il s'agit, tout d'abord, de la question des bourses.
Comme vous l'avez rappelé, madame la sénatrice, nous avons doté substantiellement la ligne budgétaire affectée aux bourses de l'enseignement agricole pour l'année 2003. Au printemps, est intervenu un gel républicain, mais il n'a pas porté atteinte au versement des bourses pour le premier semestre. (Murmures sur les travées socialistes.)
M. René-Pierre Signé. Qu'est-ce que c'est qu'un gel républicain ?
M. Hervé Gaymard, ministre. Pour la rentrée des classes, nous avons considéré la ligne budgétaire en fonction des besoins.
Je peux donc vous rassurer aujourd'hui : ces sommes gelées de façon « républicaine » (Rires sur les travées socialistes) sont désormais dégélées de façon tout aussi « républicaine ». La publication de la circulaire d'application est imminente, il n'y aura pas de problème pour les bourses de l'enseignement agricole, bourses dont l'importance est d'autant plus grande que 60 % des élèves de l'enseignement agricole sont internes et que 40 % de ces bourses sont attribuées sur des critères sociaux.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle je proposerai au Parlement, pour 2004, d'augmenter de 3,2 % les crédits affectés à ce poste.
M. Didier Boulaud. Qu'en pense M. le ministre des finances ?
M. Hervé Gaymard, ministre. Bref, qu'il s'agisse de l'enseignement public ou de l'enseignement privé agricole, nous conservons un bon dispositif d'attribution des bourses.
S'agissant maintenant des assistants d'éducation, des maîtres d'internat, des surveillants d'externat, des titulaires d'emplois-jeunes exerçant dans l'enseignement agricole privé, nous avons, comme l'ont dit à plusieurs reprises MM. Luc Ferry et Xavier Darcos, un travail important à réaliser : il s'agit de la mise en oeuvre du dispositif des assistants d'éducation.
M. le président. Je vous prie de conclure, monsieur le ministre.
M. Hervé Gaymard, ministre. En relation avec les associations gestionnaires de l'enseignement agricole privé, nous sommes en train de chercher les voies et les moyens de pérenniser un dispositif au service de tous les élèves de l'enseignement agricole de notre pays. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
PLAN DE RÉNOVATION DES SERVICES D'URGENCE
M. le président. La parole est à M. Alain Dufaut.
M. Alain Dufaut. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la France a vécu un drame, cet été, avec le décès de nombreuses personnes âgées qui se trouvaient soit chez elles, soit en établissement, en famille ou isolées. Les Français ont été à la fois choqués et surpris par les différentes situations décrites dans les médias.
Le Sénat a d'ailleurs décidé, hier après-midi, la création d'une mission d'information sur la canicule.
MM. Jacques Mahéas et Claude Estier. Mais pas d'une commission d'enquête !
M. Alain Dufaut. Notre système sanitaire a effectivement montré ses limites malgré le dévouement des personnels, face à un afflux de patients provoqué par une vague de chaleur exceptionnelle en intensité et en durée.
Je tiens d'ailleurs, en cette occasion, à rendre hommage à tous les urgentistes et à l'ensemble des professionnels qui ont accueilli ces personnes âgées en détresse et leur ont prodigué des soins.
Aujourd'hui, il était donc nécessaire de repenser la place des urgences dans notre système hospitalier. Le Gouvernement en a pris l'initiative.
Pour la première fois, c'est toute la chaîne des urgences qui est considérée : en aval, avec une revalorisation des services d'urgence, mais aussi en amont, avec une réorganisation nécessaire du système des gardes. Un travail de cohérence et de complémentarité est nécessaire afin d'améliorer la permanence des soins et de désengorger les services hospitaliers, y compris au mois d'août.
Des moyens financiers et humains considérables ont été d'ores et déjà annoncés par le Gouvernement dans le cadre d'un plan quinquennal.
M. Didier Boulaud. Comment seront-ils financés ?
M. Jean-Pierre Sueur. Brosse à reluire !
M. Alain Dufaut. Pouvez-vous aujourd'hui nous préciser, monsieur le ministre, les lignes directrices de ce plan et les objectifs précis qu'il poursuit ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste.)
M. Claude Domeizel. Ils se réveillent quand c'est fini !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Christian Jacob, ministre délégué à la famille. Monsieur Dufaut, je voudrais tout d'abord vous présenter les excuses de M. Jean-François Mattei, qui, en ce moment même, défend à l'Assemblée nationale un projet de loi sur la santé publique.
Je vais ensuite, pour répondre à votre question, montrer l'ampleur de ce plan. Il s'agit effectivement d'un plan quinquennal dont le montant - inégalé, je pense - de 500 millions d'euros est destiné aux services des urgences. Ce plan vise à permettre la création de 10 000 postes, parmi lesquels 1 000 postes seront prévus pour les médecins et 4 000 pour les infirmières. Les autres postes seront attribués aux secrétaires médicales et autres personnels liés aux urgences. Ces créations de postes prouvent l'importance de l'effort qui va être mené en direction de ces services.
Au-delà des services hospitaliers d'urgence, les SAMU, les services mobiles d'urgence et de réanimation, les SMUR, vont être également concernés par les affectations supplémentaires.
Le Gouvernement a voulu que ce plan soit global, c'est-à-dire qu'il vise aussi bien l'amont que l'aval. En amont, l'action est menée en direction de l'organisation des maisons de santé et du travail qui est réalisée par les médecins généralistes pour assurer les gardes.
Ces mesures permettront d'éviter qu'une pression trop forte ne pèse à certains moments sur les services des urgences qui supportent actuellement des soins pouvant être assurés par les médecins généralistes.
En aval est prévue l'ouverture de 15 000 lits supplémentaires pour les soins de suite alors que, depuis des années, on ne parle que de fermeture de lits. Ces 15 000 lits supplémentaires représenteront plus de 15 % des lits qui existent aujourd'hui. Vous pouvez donc apprécier les efforts qu'une telle mesure représente.
Ce plan correspond à la fois au souci de M. Jean-François Mattei de rendre hommage aux services des urgences et aux personnels qui y travaillent, mais aussi à sa volonté de répondre aux souhaits du Premier ministre et du Président de la République, qui désiraient en effet revaloriser les métiers liés aux urgences et donner les moyens d'éviter l'émergence de dysfonctionnements tels que ceux que nous avons constatés cet été. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
SITUATION DE L'EMPLOI ET HAUSSE DU CHÔMAGE
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
Monsieur le ministre, 130 000 chômeurs ont appris avec stupéfaction à la fin du mois de septembre que le Gouvernement entendait faire des économies sur leur dos en limitant le versement de l'allocation spécifique de solidarité et en les renvoyant au RMI. Tout un programme : économie d'argent public sur les plus pauvres d'un côté, dépenses publiques pour les plus aisés avec l'allégement de l'impôt sur le revenu de l'autre.
Monsieur le ministre, l'emploi est la première préoccupation de nos concitoyens, et pour cause : depuis presque dix-huit mois, le chômage ne cesse d'augmenter ; les plans sociaux, les fermetures de sites et la déstructuration de bassins d'emplois se succèdent inexorablement, laissant sur le carreau des familles entières dans toutes les régions de notre pays.
Notre société porte les stigmates du chômage, de la précarisation, des bas salaires. Selon les chiffres officiels - M. le Premier ministre fait bien de s'en méfier -, le nombre de chômeurs atteint 2 600 000 et nous frôlons la barre fatidique des 10 %. Mais la réalité est bien plus terrible : il y a 4 200 000 personnes sans emploi dans ce pays !
Fait nouveau depuis 1993 l'économie marchande ne crée plus d'emplois ; 63 000 devraient même être détruits.
Le Gouvernement n'en continue pas moins comme si de rien n'était. M. le ministre des finances vient de le confirmer : priorité est donnée aux allégements de cotisations sociales sur les bas salaires puisque, dans la loi de finances pour 2004, 1,8 milliard d'euros supplémentaires sont prévus à cet effet.
Au besoin de sécurité sociale et professionnelle - qui n'a rien d'« une plaisanterie », mais dont rit certainement le MEDEF -, vous répondez : flexibilisation de notre droit du travail, nouveau contrat à durée déterminée.
De plus, et c'est un comble pour un gouvernement qui entend réhabiliter la valeur du travail, vous participez à la casse de l'assurance chômage par la remise en cause de l'un des principes fondamentaux de notre système de protection sociale, à savoir la solidarité entre les actifs et ceux qui sont privés d'emploi, en décidant de réformer l'allocation spécifique de solidarité et en rejetant les chômeurs dans l'assistanat, à la charge des collectivités territoriales.
Monsieur le ministre, ma question se termine par une requête : renoncez à économiser 150 millions d'euros en 2004 et quelque 550 millions d'euros en 2005 sur le dos des Françaises et des Français privés d'emploi et suspendez immédiatement la décision de réduire l'allocation spécifique de solidarité, comme cela est envisagé dans le projet de budget pour 2004. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. J'ai beaucoup trop de respect pour Mme Borvo...
M. René-Pierre Signé. Cela commence mal !
M. François Fillon, ministre. ... pour penser qu'elle ignore que le chômage a commencé d'augmenter dans notre pays dès le début de l'année 2001, c'est-à-dire depuis que la croissance a faibli dans l'ensemble des pays développés. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Robert Bret. Vous l'avez aggravé !
M. Didier Boulaud. Vous l'avez accéléré !
M. François Fillon, ministre. La vérité, c'est que, malgré tous les dispositifs que vous avez mis en place et que vous voudriez qu'aujourd'hui nous perpétuions, le chômage n'a pas résisté dès que la croissance a commencé à baisser.
La vérité, c'est que cette situation dure dans notre pays depuis près d'une quinzaine d'années. En effet, depuis plus de quinze ans, quel que soit le niveau de croissance, nous sommes l'un des pays européens où le taux de chômage est le plus élevé.
Aujourd'hui même, la Grande-Bretagne connaît un taux de chômage de 4,5 % et le Danemark de 4 %, avec des niveaux de croissance qui ne sont pas très différents des nôtres.
C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de nous attaquer aux blocages structurels qui expliquent cette situation.
Le premier de ces blocages, c'est la formation.
Notre pays souffre d'un déficit en matière de formation professionnelle. C'est pourquoi nous avons incité les partenaires sociaux à conclure un accord sur la formation professionnelle. Nous l'enrichirons d'un dispositif sur l'apprentissge, qui sera soumis au Parlement dès l'automne.
Le deuxième blocage structurel est le coût du travail.
Nous avons entrepris d'alléger les charges des entreprises à compter du 1er juillet de cette année. Pour certaines entreprises, l'allégement du coût du travail pourra atteindre 5 %. Ses effets se manifesteront dans les mois qui viennent.
Enfin - c'est le troisième blocage -, nous pensons que les dispositifs d'assistance qui ont été mis en place dans un certain nombre de cas isolent les chômeurs et les dissuadent de retrouver le chemin du travail.
C'est d'ailleurs ce que les partenaires sociaux avaient bien compris en 2001 lorsqu'ils ont mis en place le plan d'aide au retour à l'emploi, le PARE, et je regrette que le Gouvernement et la majorité de l'époque ne les aient pas un peu plus soutenus alors.
C'est dans le même objectif que les partenaires sociaux viennent de réformer le régime de l'UNEDIC et que le Gouvernement vient de modifier les dispositifs d'indemnisation en mettant en oeuvre, avec le revenu minimum d'activité, le RMA, une mesure qui permettra de ramener les chômeurs de longue durée vers l'emploi. Cette mesure - je vous rassure - ne sera pas supportée par les collectivités locales, car, contrairement à ce qui se passait lorsque vous étiez aux affaires, nous, nous compensons intégralement les dépenses nouvelles que nous transférons. (Protestations sur les travées du groupe socialiste. - Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Robert Bret. On en reparlera !
M. René-Pierre Signé. On a créé 900 000 emplois !
ACCORD SYNDICAL
RELATIF À LA FORMATION PROFESSIONNELLE
M. le président. La parole est à M. Alain Fouché.
M. Alain Fouché. Ma question s'adresse à M. Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité.
C'est un accord historique qui vient d'être signé par les partenaires sociaux, historique de par son contenu, puisqu'il consacre un droit à la formation tout au long de la vie, ce qui constitue pour chacun un atout essentiel face aux aléas du parcours professionnel.
De fait, la formation professionnelle est une arme décisive dans la bataille de la croissance et de l'emploi.
Ce texte tend donc à assurer un droit personnel à la formation et à réduire les inégalités entre les salariés des grandes et des petites entreprises.
Il est également historique de par les conditions de sa signature puisque la CFDT, FO, la CFTC, la CGC et la CGT ont d'ores et déjà donné leur aval à cet accord. La CGT, je le rappelle, n'avait pas signé de grand accord interprofessionnel depuis trente-trois ans !
Nous devons nous féliciter de ce que les partenaires sociaux aient permis cette étape essentielle en faveur de la formation et de l'emploi.
La politique du dialogue social pratiquée par ce gouvernement démontre encore une fois ses qualités et sa plus grande efficacité, préférables à l'autoritarisme qui a prévalu sous l'ancienne majorité (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC)...
M. Raymond Courrière. Et les retraites !
M. Didier Boulaud. N'importe quoi !
M. Alain Fouché. ... et qui s'est illustré par la mise en place des 35 heures. (Protestations sur les mêmes travées.)
Pouvez-vous nous confirmer, monsieur le ministre, votre volonté d'utiliser le dialogue social, enfin réhabilité, pour favoriser l'emploi et lutter contre le chômage ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. René-Pierre Signé. On connaît la chanson !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité. Monsieur le sénateur, vous avez raison de dire que cet accord est historique (Eh oui ! sur les travées de l'UMP.) C'est d'abord un accord qui montre que le dialogue social est une réalité dans notre pays depuis que Jean-Pierre Raffarin dirige le Gouvernement. (Rires sur les travées du groupe socialiste.)
Les ricanements sur les travées de gauche sont particulièrement malvenus quand on fait le bilan des accords qui ont été signés pendant les cinq dernières années ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
On nous promettait une rentrée sociale brûlante. A la place, nous avons un accord historique sur la formation professionnelle, des négociations sur les restructurations...
M. Roland Muzeau. Vous avez oublié le mois de juin !
M. François Fillon, ministre. ... et une discussion qui s'ouvre sur les conditions de modernisation de la démocratie sociale, sujet qui n'a pas été abordé dans notre pays depuis les années soixante !
M. Jacques Mahéas. Et la presse qui ne paraît pas aujourd'hui.
M. François Fillon, ministre. L'accord qui vient d'être signé permet de poser les bases d'un véritable droit individuel à la formation professionnelle.
M. René-Pierre Signé. Il ne crée pas d'emplois !
M. François Fillon, ministre. Vous, vous ne perdez vraiment jamais une occasion de vous taire ! (M. Claude Estier proteste.)
Or ce droit individuel à la formation professionnelle est vraiment au coeur de trois préoccupations majeures des Français.
Je veux d'abord parler de l'emploi, bien sûr : lorsque l'on est capable d'améliorer sa formation professionnelle, de se reconvertir si l'on travaille dans un secteur en déclin, on a beaucoup plus de chances de retrouver un travail.
Ce sujet est également au coeur de la question de la promotion sociale. Depuis quelques années, dans notre pays, la promotion sociale est complètement en panne, alors qu'elle y constituait, dans les années soixante, un véritable enjeu. Les statistiques montrent qu'aujourd'hui 80 % des enfants d'ouvriers sont assurés de devenir ...
M. René-Pierre Signé. Chômeurs !
M. François Fillon, ministre. ... ouvriers. Jamais la promotion sociale n'a été, en France, à un niveau aussi faible qu'au cours des dernières années.
Enfin, ce sujet est au coeur de la compétivité de notre économie : cela va de soi, notre économie sera plus compétitive et notre croissance sera donc plus forte si nous avons des salariés mieux formés.
Le Gouvernement va non seulement reprendre l'ensemble des termes de cet accord dans un projet de loi qui vous sera soumis, mais encore l'enrichir, et cela en y adjoignant deux textes : d'une part, un texte sur la deuxième chance, notamment pour toutes les personnes qui sont au chômage de longue durée, afin qu'elles puissent bénéficier des mêmes droits à la formation professionnelle ; d'autre part, un texte sur l'apprentissage ou sur la formation en alternance, de manière à améliorer nos performances dans ce domaine. J'espère d'ailleurs que les partenaires sociaux parviendront à se mettre d'accord avec nous pour que nous puissions y ajouter un volet sur la modernisation de la démocratie sociale. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
PROJET DE CONSTITUTION EUROPÉENNE
M. le président. La parole est à M. André Vallet.
M. André Vallet. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, pour les membres du Rassemblement démocratique et social européen, la question européenne est identitaire. C'est pourquoi nous avons souhaité, à deux jours de l'ouverture de la conférence intergouvernementale qui va examiner le projet de Constitution européenne, y consacrer notre première question d'actualité.
Et d'abord pour saluer le travail du président Giscard d'Estaing, car celui-ci, non sans difficultés, mais avec persévérance, a su établir, à l'heure où la guerre en Irak menaçait l'équilibre démocratique européen, un compromis qui constitue une avancée incontestable.
Les équilibres institutionnels sont maintenus et la démocratie européenne sortira renforcée de la création d'une présidence stable, d'un Conseil européen, d'un ministère des affaires étrangères, d'un Parlement européen qui verra ses pouvoirs s'accroître, d'une Commission plus resserrée.
Ce projet, par ailleurs, affirme les valeurs et les objectifs de l'Union, intègre la charte des droits fondamentaux, clarifie la répartition des compétences.
Ce texte peut paraître insuffisant à certains égards : je pense à la coordination des politiques économiques, à la place des services publics, à notre défense commune, à l'exception culturelle ou au maintien de l'unanimité dans certains domaines essentiels. Il s'agit, comme l'a dit M. Giscard d'Estaing, d' « un résultat imparfait mais inespéré ».
Il trace des perspectives et nous souhaitons, à Rome, que le Gouvernement français favorise un accord intergouvernemental pour permettre la ratification prochaine, dans l'ensemble des pays européens, le même jour, par le suffrage universel, de ce projet qui constitue la dernière chance d'approfondissement avant un élargissement qui, à l'évidence, impliquera des contraintes nouvelles.
Notre groupe est conscient des risques d'une telle consultation. C'est pourtant la seule voie d'adhésion des citoyens européens. Cela nous évitera une contestation permanente de la légimité des institutions européennes, une montée des scepticismes et des populismes, avec, à la clé, un affaiblissement collectif.
Je vous remercie, monsieur le ministre des affaires étrangères, de nous éclairer sur la position qu'entend défendre le Gouvernement français au sein de la conférence intergouvernementale. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères. Le Gouvernement partage votre analyse, monsieur le sénateur : oui, le résultat de la convention est un bon résultat, et même un résultat inespéré. Ce projet de Constitution, adopté, il faut le souligner, par consensus et au terme d'un véritable débat démocratique,...
MM. René-Pierre Signé et Paul Loridant. Il faut un référendum !
M. Dominique de Villepin, ministre. ... répond à notre objectif : la mise en place d'institutions fortes permettant d'apporter à l'Union européenne plus de démocratie, plus de transparence, plus d'efficacité.
Nous avons donc un acquis à préserver, une ambition à défendre. D'où la position de la France : ne pas détricoter, ne pas déconstruire ce projet. Certes, le texte peut être amélioré et la France proposera un certain nombre d'amendements de clarification ou d'ajustement qu'elle juge nécessaires, qu'il s'agisse du rôle du président du Conseil, du ministre des affaires étrangères de la gouvernance économique et sociale, et ce sont là des thèmes importants.
Mais nous devons avant tout poursuivre un travail rigoureux et, pour ce faire, définir une méthode.
Il convient d'abord, à cet égard, de faire en sorte que le consensus soit maintenu. Cela implique que les amendements fassent eux-mêmes l'objet d'un consensus.
Il faut aussi un principe : le principe d'égalité entre l'ensemble des pays de l'Union européenne, qui est aussi bien une union d'Etats qu'une union de peuples.
Il faut enfin un calendrier afin que la dynamique de la conférence intergouvernementale puisse être lancée rapidement, ce qui suppose de commencer par apporter les précisions et les clarifications indispensables.
Cette conférence est essentielle pour que les grands rendez-vous qui nous attendent - la ratification de la Constitution, la définition, à partir de 2006, du financement de l'Union élargie - puissent être réalisés dans de bonnes conditions.
Faudra-t-il que la Constitution fasse l'objet d'un référendum ? C'est une question importante,...
M. Robert Bret. C'est en effet une vraie question !
M. Dominique de Villepin, ministre. ... qu'il faut apprécier avec un esprit de responsabilité. Or, vous le savez, la décision appartient souverainement au Président de la République. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la Côte d'Ivoire est à nouveau l'objet de nos inquiétudes.
Depuis plus d'un an, le déclenchement de la guerre civile en Côte d'Ivoire a donné lieu à de nombreux commentaires et à de nombreuses interventions, y compris au sein de cette assemblée.
L'action menée, le samedi 27 septembre, par 200 à 300 soldats français à Bouaké, au Nord, à la suite de l'attaque dont a été victime la Banque centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest et qui a fait au moins vingt-trois morts - si ce n'est plus -, Africains, tous militaires, relance nos interrogations sur le processus de paix. Certes, il s'agissait d'une tentative de cambriolage, mais l'intervention des troupes françaises et la récente déclaration de notre ministre de la défense, Mme Alliot-Marie, sur la présence de 4 000 militaires français de l'opération « Licorne » nous interpellent.
Un climat malsain règne en Côte d'Ivoire.
Dans une lettre aux Ivoiriens, le président Laurent Gbagbo se déclare à bout de concessions et dans l'impossibilité d'organiser des élections en octobre 2005.
Qu'en est-il de l'accord et du processus de Marcoussis ?
Quant aux forces du Nord, elles décident de ne plus participer au conseil des ministres ; elles s'interrogent, dit-on, sur une éventuelle partition de la Côte d'Ivoire. Tout cela ne peut que nous rendre inquiets.
Pour leur part, nos compatriotes, de plus en plus rares en Côte d'Ivoire, assistent impuissants à la dégradation de la situation. Il paraît donc étonnant que, sur consultation de votre ministère, notre ambassadeur ait indiqué que, le 30 novembre prochain, des élections pour la représentation des Français de l'étranger pourraient avoir lieu.
Quel est ce simulacre ? Qui seront les votants ?
M. Paul Loridant. Ah, ça, c'est fondamental !
M. Jean-Pierre Cantegrit. Quelle sera leur liberté d'expression ? Les élèves français sont caillassés à la sortie du lycée français. Faudra-t-il faire garder les bureaux de vote par les troupes françaises ?
On ne peut que s'interroger : pourquoi, dans la même situation, avoir en Algérie repoussé de trois ans la tenue des élections au Conseil supérieur des Français de l'étranger, ce qui avait été accepté alors par le Conseil constitutionnel, et ne pas avoir appliqué cette même solution pour la Côte d'Ivoire ?
Il est encore temps, par un simple texte législatif, de reporter ces élections et d'espérer ainsi une expression libre et démocratique de nos compatriotes restant ou revenant en Côte d'Ivoire. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Dominique de Villepin, ministre des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, dès le début de cette crise ivoirienne, la France a été aux côtés du peuple ivoirien.
M. Raymond Courrière. Lequel ?
M. Dominique de Villepin, ministre. Pour quoi faire ? Pour ramener la paix, pour oeuvrer dans le sens de la réconciliation et dans le sens de la reconstruction. Où en sommes-nous actuellement en Côte d'Ivoire ?
M. René-Pierre Signé. Mais on en est toujours au même point !
M. Dominique de Villepin, ministre. Sur le terrain, nos soldats et ceux des forces de la CDAO ont préservé l'ordre public, y compris après les incidents récents survenus à Bouaké. Les frontières avec le Mali et le Burkina Faso ont été rouvertes.
Sur le plan politique, le gouvernement de réconciliation est en place. Une loi d'amnistie a été votée et le processus de Marcoussis est en marche, même si des difficultés demeurent, comme le montre la menace des forces nouvelles de se retirer du Gouvernement.
La France veut marquer sa détermination au service des Ivoiriens. Il faut tenir le cap et continuer à franchir les étapes.
Le gouvernement ivoirien doit se remettre au travail avec un objectif prioritaire : répondre aux inquiétudes et aux besoins de son peuple. Il faut respecter le calendrier prévu à Marcoussis : préparation des élections annoncées pour le mois d'octobre 2005, mise en oeuvre de la loi foncière, restructuration des forces armées parallèlement au processus de cantonnement et de désarmement, retour de l'administration territoriale et des services publics sur l'ensemble du territoire.
C'est le respect de l'esprit et de la lettre de Marcoussis qui permetta enfin à la communauté internationale de se mobiliser concrètement, comme elle le souhaite, pour la reconstruction du pays. La tâche est lourde, le défi est considérable, mais je veux redire ici solennellement la volonté de la France de tout faire pour que la Côte d'Ivoire retrouve toute la place qui a été la sienne, pour qu'elle retrouve sa vocation d'exemple.
Parce que nous avons confiance, nous voulons aller de l'avant avec la communauté française de Côte d'Ivoire, dont je salue l'attachement à ce pays. Nous avons décidé, tous ensemble, de tenir des élections au Conseil supérieur des Français de l'étranger à la fin du mois de novembre. Ce sera une nouvelle illustration de notre engagement commun. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
DÉSINDUSTRIALISATION DE LA FRANCE
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse au Premier ministre puisqu'elle concerne ce qui constitue, paraît-il, une priorité du Gouvernement.
La très grande, trop grande, liste récente des fermetures et des plans de licenciements collectifs, que l'on appelle par euphémisme PSE, témoigne de la crise que nous traversons : 25 000 dépôts de bilan et 60 000 suppressions d'emplois sur les six premiers mois de 2003.
C'est, une fois de plus, l'industrie, dans tous ses secteurs, qui paie le plus lourd tribut. Et ce ne sont plus uniquement certaines régions du Nord et de l'Est qui sont touchées, mais bien l'ensemble de nos départements.
Après Alcatel, ACT, Moulinex, c'est aujourd'hui Alstom Belfort - 915 emplois supprimés -, Marine Telecom - 510 emplois -, Fortech-Aubert et Duval - 220 emplois dans le Puy-de-Dôme -, ST Microelectronics Rennes - 575 supressions -, Metaleurop Nord - 83 emplois -, Daewoo-Orion - 550 suppressions d'emplois -, GIATT dans la Loire et les Hautes-Pyrénées, Teneco et Merlont, en Moselle, sans oublier Sacilor, et ses filiales.
Chaque collègue peut compléter cette liste.
Demain, quel avenir pour Bull, déjà épinglé par l'Europe, pour Thomson, que vous souhaitiez brader pour le franc symbolique et que l'Etat actionnaire va maintenant liquider aux Chinois, ou encore pour les chantiers de l'Atlantique après le Queen Mary II ?
L'industrie a besoin de stratégie, de recherche, d'innovation et de modernisation, et non pas de cadeaux fiscaux et autres baisses d'impôts. Elle n'aura pas de salut hors du développement des productions à forte valeur ajoutée et à haute technicité.
Plus grave encore, la recherche-développement devient une variable d'ajustement économique pour les grands donneurs d'ordre, comme l'a souligné notre collègue M. Dubrule.
Alors qu'à grand renfort de communication vous appelez à « libérer les énergies », vous ne réussissez qu'à libérer le chômage, et vos discours sur la valorisation du travail et la réduction de l'aide aux chômeurs apparaissent, dans ce contexte, comme de véritables provocations.
La situation économique internationale a bon dos : comment expliquez-vous que, lorsque la droite est au pouvoir, la croissance française est en dessous de la croissance européenne, alors que c'est l'inverse sous les gouvernements de gauche ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - Rires et exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. René-Pierre Signé. C'est une question de confiance !
M. Raymond Courrière. La droite n'en inspire aucune !
M. Daniel Raoul. Monsieur le Premier ministre, quelle est réellement votre politique économique et industrielle ? Quel avenir pour nos intercommunalités après le départ de nos industries, qui affectera forcément les recettes de la taxe professionnelle ?
Un sénateur de l'UMP. Et les 35 heures ?
M. Daniel Raoul. Quand allez-vous prendre conscience de la gravité de la situation et définir une vraie stratégie industrielle, une stratégie qui réponde aux besoins du pays, de ses salariés, et non à ceux du MEDEF ou aux intérêts financiers à court terme ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. Didier Boulaud. Très bonne question !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée à l'industrie. Au risque de vous décevoir, monsieur Raoul, je vous dirai tout d'abord que je ne suis pas de ceux qui voudraient accréditer l'idée d'un déclin de la France.
La réalité n'est pas celle que vous décrivez. La réalité, c'est que la France a de nombreux atouts, des entreprises qui marchent, des entrepreneurs motivés, imaginatifs, qui veulent pouvoir innover et exporter.
M. Bernard Piras. Et des chômeurs qui souffrent !
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Le volume de l'activité industrielle de notre pays est en croissance parce que l'industrie gagne constamment en productivité. Elle abaisse les prix de ses produits, ce qui augmente le pouvoir d'achat des Français. Elle contribue aussi à la croissance, avec un mouvement de pertes et de créations d'emplois dont le solde est globalement positif.
M. Jacques Mahéas. Vous avez vu cela dans les livres !
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. Notre industrie est saine, mais nous voulons aller encore plus loin pour écarter le risque de désindustrialisation.
Vous avez demandé, monsieur le sénateur, si nous avions une stratégie industrielle. Oui, vous le savez parfaitement ! Nous avons une politique résolue, qu'illustrent concrètement, entre autres, la loi pour l'initiative économique, le plan pour l'innovation ou, encore récemment, l'initiative européenne de croissance.
M. Didier Boulaud. Bref, tout va très bien, madame la marquise !
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. S'agissant des situations difficiles, douloureuses que vous avez évoquées et qui sont liées aux effets des restructurations, je puis vous dire que je veille toujours à ce que les plans soient accompagnés des mesures de justice qui s'imposent à l'égard des salariés. Chaque fois qu'ils m'en font la demande, je reçois personnellement les syndicats concernés.
Un sénateur de l'UMP. C'est vrai !
Mme Nicole Fontaine, ministre déléguée. De même, inlassablement, nous travaillons aux mesures qui sont de nature à redynamiser les bassins d'emplois fragilisés. C'est le cas, par exemple, monsieur Raoul, pour le contrat de site que nous allons signer à Angers le 21 novembre prochain.
Enfin, je suis convaincue, monsieur le sénateur, qu'au fond de vous-même vous êtes parfaitement conscient du fait que l'accord sur le droit individuel à la formation professionnelle, évoqué il y a un instant par FrançoisFillon, constitue une avancée sociale significative, et même une avancée sociale majeure, qui va permettre aux salariés de s'adapter à un contexte économique en constante évolution. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. René-Pierre Signé. Nous l'avons fait avant vous !
M. le président. Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Nous allons interrompre nos travaux pendant quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Bernard Angels.)
PRÉSIDENCE DE M. BERNARD ANGELS
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
ÉVOLUTIONS DE LA CRIMINALITÉ
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l'article 3.
M. le président. Art. 3. - I. - L'intitulé de la section 3 du chapitre II du titre III du livre Ier du code pénal est ainsi rédigé : « De la définition de certaines circonstances entraînant l'aggravation, la diminution ou l'exemption des peines ».
II. - Il est inséré, après l'article 132-77 du même code, un article 132-78 ainsi rédigé :
« Art. 132-78. - La personne qui a tenté de commettre un crime ou un délit est, dans les cas prévus par la loi, exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et, le cas échéant, d'identifier les autres auteurs ou complices. »
« Dans les cas prévus par la loi, la durée de la peine privative de liberté encourue par une personne ayant commis un crime ou un délit est réduite si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis de faire cesser l'infraction, d'éviter que l'infraction ne produise un dommage ou d'identifier les autres auteurs ou complices.
« Les dispositions de l'alinéa précédent sont également applicables lorsque la personne a permis soit d'éviter la réalisation d'une infraction connexe de même nature que le crime ou le délit pour lequel elle était poursuivie, soit de faire cesser une telle infraction, d'éviter qu'elle ne produise un dommage ou d'en identifier les auteurs ou complices.
« Les personnes ayant fait l'objet des dispositions des alinéas précédents ou susceptibles d'en faire l'objet peuvent, en tant que de besoin, bénéficier, sur réquisitions du procureur de la République, de la part des autorités publiques d'une protection destinée à assurer leur sécurité. En cas de nécessité, ces personnes peuvent être autorisées, par ordonnance motivée rendue par le président du tribunal de grande instance, à faire usage, après leur condamnation, d'une identité d'emprunt, en utilisant à cette fin les moyens qui seront mis à leur disposition par les autorités publiques. Les dispositions du présent alinéa sont également applicables aux membres de la famille de ces personnes et à leurs proches.
« Le fait de révéler l'identité d'emprunt, prévue à l'alinéa précédent, est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.
« Lorsque cette révélation a causé, même indirectement, la mort des personnes concernées, les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 150 000 euros d'amende.
« Aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement de déclarations émanant de personnes ayant fait l'objet des dispositions du présent article. »
III. - Il est inséré, après l'article 221-5-2 du même code, un article 221-5-3 ainsi rédigé :
« Art. 221-5-3. - Toute personne qui a tenté de commettre les crimes d'assassinat ou d'empoisonnement est exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la mort de la victime et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices.
« La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice d'un empoisonnement est ramenée à vingt ans de réclusion criminelle si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis d'éviter la mort de la victime et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. »
IV. - Il est inséré, après l'article 222-6-1 du même code, un article 222-6-2 ainsi rédigé :
« Art. 222-6-2. - Toute personne qui a tenté de commettre les crimes prévus par le présent paragraphe est exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices.
« La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice d'un des crimes prévus au présent paragraphe est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser l'infraction ou d'éviter que l'infraction n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. Lorsque la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité, celle-ci est ramenée à vingt ans de réclusion criminelle. »
V. - L'article 222-43 du même code est ainsi modifié :
1° Les mots : « les articles 222-34 à 222-40 » sont remplacés par les mots : « les articles 222-35 à 222-39 » ;
2° Il est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Dans le cas prévu à l'article 222-34, la peine de la réclusion criminelle à perpétuité est ramenée à vingt ans de réclusion criminelle. »
VI. - Il est inséré, après l'article 222-43 du même code, un article 222-43-1 ainsi rédigé :
« Art. 222-43-1. - Toute personne qui a tenté de commettre les infractions prévues par la présente section est exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices.
VII. - Il est inséré, après l'article 224-5 du même code, un article 224-5-1 ainsi rédigé :
« Art. 224-5-1. - Toute personne qui a tenté de commettre les crimes prévus par la présente section est exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices.
« La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice d'un des crimes prévus à la présente section est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser l'infraction ou d'éviter que l'infraction n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. Lorsque la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité, celle-ci est ramenée à vingt ans de réclusion criminelle. »
VIII. - Il est inséré, après l'article 224-8 du même code, un article 224-8-1 ainsi rédigé :
« Art. 224-8-1. - Toute personne qui a tenté de commettre les crimes prévus par la présente section est exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices.
« La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice d'un des crimes prévus à la présente section est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser l'infraction ou d'éviter que l'infraction n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. Lorsque la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité, celle-ci est ramenée à vingt ans de réclusion criminelle. »
IX. - Il est inséré, après l'article 225-4-8 du même code, un article 225-4-9 ainsi rédigé :
« Art. 225-4-9. - Toute personne qui a tenté de commettre les infractions prévues par la présente section est exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices.
« La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice d'une des infractions prévues à la présente section est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser l'infraction ou d'éviter que l'infraction n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. Lorsque la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité, celle-ci est ramenée à vingt ans de réclusion criminelle ».
X. - Il est inséré, après l'article 225-11 du même code, un article 225-11-1 ainsi rédigé :
« Art. 225-11-1. - Toute personne qui a tenté de commettre les infractions prévues par la présente section est exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices.
« La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice d'une des infractions prévues à la présente section est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser l'infraction ou d'éviter que l'infraction n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. Lorsque la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité, celle-ci est ramenée à vingt ans de réclusion criminelle. »
XI. - Il est inséré, après l'article 311-9 du même code, un article 311-9-1 ainsi rédigé :
« Art. 311-9-1. - Toute personne qui a tenté de commettre un vol en bande organisée prévu par l'article 311-9 est exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices.
« La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice d'un vol en bande organisée est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser l'infraction en cours ou d'éviter que l'infraction n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. »
XII. - Il est inséré, après l'article 312-6 du même code, un article 312-6-1 ainsi rédigé :
« Art. 312-6-1. - Toute personne qui a tenté de commettre une extorsion en bande organisée prévue par l'article 312-6 est exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices.
« La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice d'une extorsion en bande organisée est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser l'infraction ou d'éviter que l'infraction n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. Lorsque la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité, celle-ci est ramenée à vingt ans de réclusion criminelle. »
XIII. - Il est inséré, après l'article 3 de la loi du 19 juin 1871 précitée, un article 3-1 ainsi rédigé :
« Art. 3-1. - La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice des infractions prévues à l'article 3 est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser les agissements incriminés et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. »
XIV. - Il est inséré, après l'article 35 du décret du 18 avril 1939 précité, un article 35-1 ainsi rédigé :
« Art. 35-1. - La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice des infractions prévues aux articles 24, 26 et 31 est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser les agissements incriminés et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. »
XV. - Il est inséré, après l'article 6 de la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970 précitée, un article 6-1 ainsi rédigé :
« Art. 6-1. - La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice des infractions prévues à l'article 6 est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser les agissements incriminés et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. »
XVI. - Il est inséré, après l'article 4 de la loi n° 72-467 du 9 juin 1972 précitée, un article 4-1 ainsi rédigé :
« Art. 4-1. - La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice des infractions prévues par la présente loi est réduite de moitié si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis de faire cesser les agissements incriminés et d'identifier, le cas échéant, les autres auteurs ou complices. »
Je suis saisi de sept amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 306 est présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.
L'amendement n° 415 est présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 35, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« A. - Après le paragraphe II de cet article, insérer un paragraphe II bis ainsi rédigé :
« II bis. - Après l'article 706-63 du code de procédure pénale, il est inséré un titre XXI bis ainsi rédigé :
« Titre XXI bis.
« Protection des personnes bénéficiant d'exemptions ou de réductions de peines pour avoir permis d'éviter la réalisation d'infractions, de faire cesser ou d'atténuer le dommage causé par une infraction, ou d'identifier les auteurs ou complices d'infractions. »
« Art. 706-63-1. - Les personnes mentionnées à l'article 132-78 du code pénal font l'objet, en tant que de besoin, d'une protection destinée à assurer leur sécurité. Elles peuvent également bénéficier de mesures destinées à assurer leur réinsertion.
« En cas de nécessité, ces personnes peuvent être autorisées, par ordonnance motivée rendue par le président du tribunal de grande instance, à faire usage d'une identité d'emprunt.
« Le fait de révéler l'identité d'emprunt de ces personnes est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende. Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende lorsque cette révélation a causé, directement ou indirectement, la mort des personnes concernées.
« Les mesures de protection et de réinsertion sont définies, sur réquisitions du procureur de la République, par une commission nationale dont la composition et les modalités de fonctionnement sont définies par décret en Conseil d'Etat. Cette commission fixe les obligations que doit respecter la personne et assure le suivi des mesures de protection et de réinsertion, qu'elle peut modifier ou auxquelles elle peut mettre fin à tout moment.
« Les dispositions du présent article sont également applicables aux membres de la famille et aux proches des personnes mentionnées à l'article 132-78. »
« B. _ En conséquence, supprimer les quatrième à sixième alinéas du texte proposé par le II de cet article pour l'article 132-78 du code pénal. »
Le sous-amendement n° 254, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Remplacer la seconde phrase du sixième alinéa du A du texte de l'amendement n° 35 par deux phrases ainsi rédigés : "Lorsque cette révélation a causé, même indirectement, des violences, coups et blessures à l'encontre de ces personnes ou de leurs conjoints, enfants et ascendants directs, les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 euros d'amende. Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 150 000 euros d'amende lorsque cette révélation a causé, même indirectement, la mort de ces personnes ou de leurs conjoints, enfants et ascendants directs". »
L'amendement n° 253, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste, est ainsi libellé :
« Remplacer l'avant-dernier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 132-78 du code pénal par deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque cette révélation a causé, même indirectement, des violences, coups et blessures à l'encontre de ces personnes ou de leurs conjoints, enfants et ascendants directs, les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 euros d'amende. Lorsque cette révélation a causé, même indirectement, la mort de ces personnes ou de leurs conjoints, enfants et ascendants directs, les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 150 000 euros d'amende. »
L'amendement n° 307, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Supprimer le III de cet article. »
L'amendement n° 308, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Supprimer le XI de cet article. »
L'amendement n° 309, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Supprimer le XII de cet article. »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 306.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Nous vous proposons de supprimer l'article 3. Nous sommes en effet opposés à l'extension du régime d'atténuation ou d'exemption de peine. Ces dispositions doivent être réservées aux formes les plus graves de criminalité.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour présenter l'amendement n° 415.
Mme Nicole Borvo. Le système des collaborateurs de justice existe déjà dans notre droit pénal de façon très limitée, en cas de terrorisme ou de trafic de stupéfiants. Ici, on va vers une généralisation de ce système. En effet, on l'étend à l'ensemble des crimes et des délits relevant de la criminalité organisée. On en fait un élément normal du droit pénal et de la procédure pénale.
Nous insistons sur le caractère particulièrement flou et extensif du concept de criminalité organisée, qui permet l'application de ces dispositions dérogatoires dans un très grand nombre de situations - j'ai évoqué à dessein l'arrachage d'OGM ou le délit d'hospitalité pour les étrangers - au point d'en faire le droit commun.
Le système de repentis, qui consiste à atténuer la peine, voire à en exonérer une personne pour un délit effectivement commis en échange de sa collaboration avec la justice, ne satisfait aucunement aux exigences d'une justice équitable aux résultats incontestables.
Juste, elle ne l'est pas lorsqu'elle constitue un moyen de pression sur le prévenu, la présence de l'avocat n'étant pas de nature à contrebalancer le déséquilibre des parties.
Equitable, elle ne l'est pas non plus lorsque ces atténuations de peine ne pourront concerner que ceux qui auront quelque chose à vendre, donc ceux à l'encontre de qui, en réalité, existeront les charges les plus lourdes. Les simples lampistes risqueront, en fin de compte, d'être condamnés plus durement. C'est ainsi que l'on brade la justice.
Incontestable dans ses résultats, elle ne l'est pas non plus, comme le montrent les exemples américain ou italien. La législation italienne a ainsi dû s'adapter en 2001 pour répondre aux perversions de ce système.
Nous sommes opposés à ce système, tant dans sa portée que dans sa philosophie, car il s'apparente à une réelle prime à la délation et déresponsabilise les criminels les plus dangereux. Les victimes elles-mêmes n'ont rien à gagner de cette négociation de la peine, qui ne permet pas de faire toute la lumière sur les affaires et d'organiser un procès, lequel est souvent un élément déterminant pour la reconstruction psychologique des victimes.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons d'adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 35.
M. François Zocchetto, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. La commission des lois considère que le système des repentis, tel qu'il nous est proposé, est excellent. A la lumière de ce que nous avons observé, notamment en Italie, nous sommes renforcés dans nos convictions.
Par ailleurs, la commission des lois émet un avis défavorable sur les deux amendements qui viennent d'être présentés, tant par M. Dreyfus-Schmidt que par Mme Borvo.
Cela étant, le projet de loi demeure assez vague - pour ne pas dire plus... - sur les mesures de protection qui seront prises à l'égard des personnes qui collaboreront avec la justice. L'expérience italienne, précisément, nous montre qu'en l'absence de mesures de protection le système ne peut pas fonctionner : au début, l'Italie n'avait pas mis en place une véritable administration chargée de gérer les repentis, et il est arrivé ce qui devait arriver, c'est-à-dire l'élimination physique de ceux qui avaient accepté de collaborer ; ensuite, plus personne ne souhaitait entrer dans le cercle des repentis. Aussi, ce pays - mais ce n'est pas le seul, un certain nombre de pays démocratiques l'ont fait également - a rapidement mis en place une véritable administration chargée de gérer les repentis.
Certes, la France n'est pas l'Italie, mais il convient, à la lumière de cette expérience, de veiller à l'applicabilité de la loi. Selon nous, rien ne serait pire que d'introduire ce dispositif dans notre droit pour qu'il demeure lettre morte.
Aussi, dans notre amendement, nous proposons de prévoir plus précisément que les personnes concernées bénéficieront en tant que de besoin de mesures de protection et qu'une commission nationale sera chargée de suivre la mise en oeuvre de ces mesures.
M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour présenter le sous-amendement n° 254 et l'amendement n° 253.
M. Yves Détraigne. Le sous-amendement n° 254 complète l'amendement n° 35 de la commission, qui vise à instituer une véritable protection du repenti, en y ajoutant des sanctions lorque la révélation d'identité a causé des violences, coups et blessures à l'encontre des repentis.
Le sous-amendement tend également à prévoir des sanctions lorque la révélation d'identité a causé soit des violences à l'encontre des conjoints, enfants et ascendants directs du repenti, soit la mort de ce dernier et de sa famille. Ces dispositions reprennent en fait le système de sanctions applicables en cas de révélation de l'identité d'un infiltré.
Quant à l'amendement n° 253, il a le même objet.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter les amendements n°s 307, 308 et 309.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ces trois amendements tendent à exclure du bénéfice du régime d'atténuation ou d'exemption de peine les crimes d'assassinat ou d'empoisonnement, compte tenu de leur gravité, le vol dans un souci de dissuasion et les extorsions.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 306 et 415, sur le sous-amendement n° 254 et sur les amendements n°s 253, 307, 308 et 309 ?
M. François Zocchetto, rapporteur. S'agissant des amendements n°s 306 et 415, j'ai indiqué précédemment que la commission émet un avis défavorable.
Le sous-amendement n° 254 apporte une précision tout à fait opportune qui va dans le sens du renforcement de la protection des repentis souhaité par la commission. Je suggère néanmoins aux auteurs de ce sous-amendement de bien vouloir retirer les termes « même indirectement » de la rédaction qu'ils proposent.
Quant à l'amendement n° 253, il me paraît satisfait par les amendements qui précèdent. Aussi, je suggère à M. Détraigne de le retirer.
Enfin, la commission est défavorable aux trois amendements n°s 307, 308 et 309 qui entendent réduire le champ d'application des règles relatives aux repentis.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux, ministre de la justice. Le Gouvernement est défavorable aux amendements n°s 306 et 415 qui visent à supprimer un certain nombre de propositions importantes du projet de loi.
S'agissant de l'amendement n° 35 de la commission des lois, le Gouvernement émet un avis favorable. Je trouve très bonne l'idée de confier la gestion de la question des repentis à une commission nationale qui précisera au cas par cas les modalités de protection.
Sur le sous-amendement n° 254, j'émets un avis favorable sous réserve d'une modification de sa rédaction. L'expression « même indirectement » pourrait être remplacée utilement par la formule « directement ou indirectement » que l'on retrouve fréquemment dans le code de procédure pénale.
L'amendement n° 253 me paraissant maintenant inutile, je suggère à ses auteurs de bien vouloir le retirer.
Enfin, je suis défavorable aux amendements n°s 307, 308 et 309 qui ont pour objet de restreindre le champ de la disposition.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur les amendements identiques n°s 306 et 415.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je souhaite rappeler à M. le garde des sceaux les propos qu'il a tenus devant l'Assemblée nationale : « Quant à la protection des repentis, je puis vous assurer et je crois pouvoir m'exprimer également au nom des autres membres du Gouvernement, en particulier du ministre de l'intérieur, que nous mettrons en place les moyens financiers et techniques nécessaires pour garantir la sécurité de ces personnes et de leur famille. Il s'agit d'une exigence morale mais également d'une question d'efficacité du fonctionnement de l'Etat. Il suffirait que cette protection ne soit pas assurée une fois pour que définitivement le dispositif ne puisse plus fonctionner. Je vous apporte donc très solennellement cette garantie. » Je pensais que ces précisions pourraient peut-être nous être apportées aujourd'hui.
Nous avons souligné lors de la discussion générale que ce système coûte très cher. Il représente en Italie entre 50 millions et 60 millions d'euros et, aux Etats-Unis, 30 millions de dollars. Sommes-nous prêts à faire cet effort ?
Le projet de loi initial mentionnait uniquement l'identité d'emprunt. Or nous savons, pour avoir observé le fonctionnement du dispositif aux Etats-Unis, que cette disposition ne suffit pas. Il sera proposé tout à l'heure au Sénat de voter en faveur de la constitution d'une commission - curieuse d'ailleurs - qui définirait, à la demande du procureur de la République, des mesures de protection des repentis, voire des témoins.
Aux Etats-Unis, c'est le ministre de la justice, l'attorney general lui-même, qui demande la mise en oeuvre de mesures de protection. Le système est très coûteux car, chaque année, une centaine d'individus sont ainsi complètement suivis. Les mesures de protection peuvent aller très loin, comme cela a été rappelé ce matin. Rien n'est impossible ! On peut transformer entièrement les livrets scolaires, les diplômes des intéressés. On peut protéger ces derniers même dans les prisons, le cas échéant, ou encore les envoyer très loin, les insérer, leur payer une indemnité.
En outre, le témoignage anonyme n'existant pas les mesures de protection commencent à s'appliquer lorsque les témoins et les repentis viennent témoigner. Ensuite, ces derniers sont protégés en permanence.
Est-ce ce système-là que nous voulons mettre en place en France ? Si c'est le cas, et je l'ai déjà dit, l'étude d'impact ne prévoit aucune estimation financière.
J'ajoute en passant que l'étude d'impact est difficile à trouver ! Le seul document qui existe rappelle le dispositif de chaque article. Ce n'est donc pas une étude d'impact ! On attend d'une étude d'impact qu'elle indique les répercussions de futures mesures si elles sont adoptées.
Monsieur le garde des sceaux, puisque vous ne l'avez pas fait hier soir lors de votre réponse à notre intervention dans la discussion générale, le moment est à mon avis venu que vous nous indiquiez la position du Gouvernement à cet égard.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques n°s 306 et 415.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Monsieur Détraigne, acceptez-vous de modifier le sous-amendement n° 254 comme vous y invitent la commission et le Gouvernement ?
M. Yves Détraigne. Oui, monsieur le président. Comme m'y invitent M. le garde des sceaux et M. le rapporteur, je rectifie le sous-amendement n° 254, afin de remplacer les mots : « même indirectement » par les mots : « directement ou indirectement ».
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 254 rectifié, présenté par M. Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste et ainsi libellé :
« Remplacer la seconde phrase du sixième alinéa du A du texte de l'amendement n° 35 par deux phrases ainsi rédigées : "Lorsque cette révélation a causé, directement ou indirectement, des violences, coups et blessures à l'encontre de ces personnes ou de leur conjoint, enfants et ascendants directs, les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 euros d'amende. Les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 150 000 euros d'amende lorsque cette révélation a causé, directement ou indirectement, la mort de ces personnes ou de leur conjoint, enfants et ascendants directs". »
Je le mets aux voix.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, sur l'amendement n° 35.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Monsieur le président, sans vouloir prolonger les débats, je répondrai brièvement à la question que m'a posée M. Dreyfus-Schmidt.
Le dispositif que vise à instaurer l'amendement n° 35 me paraît satisfaisant. L'amendement étant récent, le Gouvernement mènera une réflexion sur la composition et le mode de fonctionnement de la commission nationale. La navette parlementaire nous permettra sans doute de poursuivre cette réflexion. Nous aurons alors la possibilité de mettre en place progressivement ce dispositif et de procéder à des évaluations financières, ce qui est difficile à l'heure actuelle tant que le système n'est pas opérationnel. Tout dépendra de la manière dont les services d'enquête, les parquets entreront progressivement dans ce dispositif.
D'ores et déjà, l'estimation que l'on peut faire, c'est que, par rapport à l'Italie, par exemple, qui a connu malheureusement une situation extraordinairement difficile en matière de criminalité organisée, avec des phénomènes de pénétration dans l'ensemble des corps sociaux du pays, la France sera sans doute extrêmement loin de ses voisins latins.
Je crois donc qu'il est tout à fait prématuré de lancer des chiffres à la cantonade et je ne m'y risquerai pas. Il faut mettre en place ce dispositif progressivement et avec prudence. En tout cas, je le répète, la commission nationale suggérée par la commission des lois me paraît constituer un bon dispositif technique.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je souhaite déposer un sous-amendement à l'amendement n° 35 afin de remplacer les mots : « sur réquisitions du procureur de la République » par les mots : « sur réquisitions du ministre de la justice ».
C'est à ma demande, lors de nos travaux en commission, qu'a été inséré dans l'amendement n° 35, après le mot « commission », la précision « nationale ». En effet, l'expression « sur réquisitions du procureur de la République » pouvait donner à penser que la commission était locale.
On a évoqué le ministre de l'intérieur, mais je pense que cette commission doit, là encore, dépendre du ministre de la justice. Il ne faut pas que ce soit le procureur de la République qui propose les mesures de protection et de réinsertion, surtout si l'on veut en limiter le nombre. C'est le ministre de la justice qui doit les demander à la commission nationale. Cela me paraît la moindre des choses. Pourquoi confier ce rôle au procureur de la République alors que c'est un problème national ?
Vous souhaitez mettre le dispositif en place et l'évaluer chemin faisant. En matière budgétaire, c'est une démarche curieuse car il faut tout de même savoir où l'on va.
Il serait d'ailleurs bon que, à l'occasion de la navette parlementaire, nous débattions de nouveau sur ce point, que nous fassions des propositions, de manière à déterminer si le jeu en vaut la chandelle et surtout si la protection des repentis et des témoins sera assurée de manière satisfaisante.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 475, présenté par M. Dreyfus-Schmidt et ainsi libellé :
« Dans le quatrième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 35 pour l'article 706-63-1 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "sur réquisitions du procureur de la République" par les mots : "sur réquisitions du ministre de la justice". »
Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Je crois que notre collègue n'a pas bien saisi le fonctionnement de la commission nationale tel que le propose la commission des lois.
Il serait créé une commission nationale dont la composition et les modalités de fonctionnement seraient définies par un décret en Conseil d'Etat. Une fois cette commission nationale constituée, ce serait le procureur de la République qui, pour chaque cas particulier de repenti, prendrait des réquisitions pour que la commission définisse les mesures de protection et de réinsertion s'appliquant au repenti en question. Je ne vois donc pas en quoi le ministre de la justice interviendrait à ce stade.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si, comme aux Etats-Unis !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Tout d'abord, je veux dire à M. Dreyfus-Schmidt que je ne revendique pas de prendre des « réquisitions » - il a utilisé cette expression -, je n'ai pas cette prétention.
Ensuite, je rappelle que notre débat s'inscrit dans la lutte contre la criminalité organisée. Il s'agit donc de plusieurs juridictions interrégionales avec chacune à leur tête un procureur. Je le dis pour situer l'enjeu.
Par ailleurs, très franchement, je pense qu'il n'appartient pas au ministre, dans une telle affaire où il s'agit de proposer au coup par coup des mesures, d'être saisi personnellement, sauf à vouloir la concentration. Dans ce cas, ce ne serait ni le procureur ni évidemment le ministre, mais un chef de bureau ou son collaborateur qui prendrait la décision. Pour ma part, je préfère que cette dernière soit prise par l'un des sept à neuf procureurs de la République des juridictions interrégionales.
M. le président. Monsieur Dreyfus-Schmidt, maintenez-vous le sous-amendement n° 475 ?
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je souhaite remplacer le mot « réquisitions » par le mot « demande ». Je m'explique : le système que nous avons vu fonctionner aux Etats-Unis nous paraît convaincant. Les repentis à protéger, ne l'oublions pas, coûteront très cher, ne l'oublions pas, et nous avons tout intérêt à ce qu'ils soient les moins nombreux possible. Aux Etats-Unis, je l'ai dit, ils sont une centaine par an. L'attorney general saisit les marshalls, et ces derniers déterminent s'il y a un besoin de protection et prennent les mesures nécessaires.
Il ne serait pas plus mal, à mon avis, que le système dépende du garde des sceaux. Vous optez pour le procureur de la République, mais pourquoi pas pour le procureur général, sachant que le système est très lourd ?
Par ailleurs, il est normal que le ministre de la justice ait le souci de protéger les témoins. Ce n'est pas forcément celui des procureurs. Encore une fois, je pense qu'il appartient au ministre de la justice de demander que les personnes soient protégées, pour que la commission nationale, une fois en place, prenne les mesures nécessaires.
Certes, la navette parlementaire nous permettra d'en débattre à nouveau et d'améliorer le dispositif. Mais en l'état actuel des choses, puisqu'il s'agit d'une commission nationale, il serait tout de même préférable, sachant que les procureurs généraux ne sont qu'au nombre de neuf, qu'ils remontent jusqu'à vous, monsieur le ministre, afin de vous permettre de demander que les repentis ou les témoins soient protégés.
Je maintiens donc le sous-amendement en le rectifiant, pour vous éviter, monsieur le ministre, d'avoir à prendre des réquisitions.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 475 rectifié, présenté par M. Michel Dreyfus-Schmidt et ainsi libellé :
« Dans le quatrième alinéa du texte proposé par l'amendement n° 35 pour l'article 706-63-1 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "sur réquisitions du procureur de la République" par les mots : "sur demande du ministre de la justice". »
Je le mets aux voix.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35, modifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 253 n'a plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 307.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 308.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 309.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.).
M. le président. Art. 4. - Il est inséré, après l'article 434-7-1 du code pénal, un article 434-7-2 ainsi rédigé :
« Art. 434-7-2. - Le fait, pour toute personne qui, du fait de ses fonctions, a connaissance, en application des dispositions du code de procédure pénale, d'informations issues d'une enquête ou d'une instruction en cours concernant un crime ou un délit, de révéler, directement ou indirectement, ces informations à des personnes susceptibles d'être impliquées, comme auteurs, coauteurs, complices ou receleurs, dans la commission de ces infractions, lorsque cette révélation est de nature à entraver le déroulement des investigations ou la manifestation de la vérité, est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 EUR d'amende. »
Je suis saisi de huit amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 310 est présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée.
L'amendement n° 416 est présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
« Supprimer cet article. »
L'amendement n° 36, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Au début du texte proposé par cet article pour l'article 434-7-2 du code pénal, insérer les mots : "Sans préjudice des droits de la défense,". »
L'amendement n° 311, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par cet article pour l'article 434-7-2 du code de procédure pénale, après les mots : "du fait de ses fonctions", insérer les mots : "participe à l'enquête". »
L'amendement n° 312, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par cet article pour l'article 434-7-2 du code de procédure pénale après les mots : "du fait de ses fonctions", insérer les mots : ", sans préjudice des droits de la défense". »
L'amendement n° 37, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par cet article pour l'article 434-7-2 du code pénal, supprimer les mots : ", directement ou indirectement,". »
L'amendement n° 313, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par cet article pour l'article 434-7-2 du code de procédure pénale, après les mots : "de révéler, directement", supprimer les mots : "ou indirectement". »
L'amendement n° 38, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par cet article pour l'article 434-7-2 du code pénal, remplacer les mots : "est de nature à entraver" par les mots : "a pour objet d'entraver". »
La parole est à M. Robert Badinter, pour défendre l'amendement n° 310.
M. Robert Badinter. La discussion de l'article 4 doit tenir compte, me semble-t-il, des propositions de la commission.
Le problème est clair : il s'agit de l'éventuelle mise en cause d'un avocat à l'occasion de la révélation directe ou indirecte, selon le texte adopté par l'Assemblée nationale, d'informations qu'il aurait recueillies du fait de ses fonctions.
Il apparaît très clairement que, s'agissant des avocats, il existe une obligation de secret professionnel assortie de sanctions pénales. De plus, il est nécessaire de sauvegarder les droits de la défense. Enfin, il est certain que les mots : « cette révélation est de nature à entraver le déroulement » ouvraient la voie à des poursuites trop larges.
La commission ayant rectifié le tir, nous nous rallions à son amendement.
M. le président. L'amendement n° 310 est retiré.
La parole est à M. Robert Bret, pour présenter l'amendement n° 416.
M. Robert Bret. Cet article crée un nouveau délit pour punir de cinq ans de prison et de 75 000 euros d'amende le fait de révéler des informations issues d'une enquête ou d'une instruction à des personnes susceptibles d'être impliquées dans la commission de l'infraction.
Comme moi, certainement, votre attention a été attirée par la profession d'avocat sur les risques que fait peser cette nouvelle incrimination sur les droits de la défense. En effet, alors que des textes existent déjà sur le secret de l'enquête, on peut s'interroger sur les implications de cette infraction à caractère très général.
Comme le note d'ailleurs M. le rapporteur, l'avocat ne pourrait-il pas être visé quand, découvrant dans le dossier de la procédure des actes concernant une personne qui lui est inconnue, il interroge son client et, par là même, contribue à la divulgation d'une information ?
Telle était d'ailleurs la crainte exprimée par la Commission nationale consultative des droits de l'homme, qui soulignait, je le rappelle, que la règle du secret énoncée dans l'article 11 du code de procédure pénale ne s'appliquait pas en tant que telle aux avocats soumis à d'autres devoirs. En conséquence, elle se déclarait opposée à la définition floue de cet article, qui brandit une « menace inacceptable » dont on discerne mal la justification et qui serait manifestement incompatible avec le libre exercice des droits de la défense.
Nous notons avec satisfaction que la commission des lois, dans sa majorité, a retenu un encadrement plus stricte de cet article en précisant qu'il s'applique sans préjudice des droits de la défense et en supprimant la précision ambiguë de révélation directe ou indirecte. Enfin, elle précise que la révélation doit avoir pour objectif d'entraver le déroulement de la procédure.
Néanmoins, au vu de ces modifications, soit cette infraction est redondante avec l'article 11 du code de procédure pénale, soit elle laisse subsister une ambiguïté, notamment quant à la notion de personnes susceptibles d'être impliquées dans la commission d'infraction. Dans les deux cas, il faut la supprimer.
Tel est le sens de l'amendement que les sénateurs communistes vous demandent d'adopter.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 36.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 36 a été annoncé, paradoxalement d'ailleurs, par les auteurs des deux précédents amendements, puisque tant MM. Dreyfus-Schmidt et Badinter que M. Bret nous proposent de supprimer cette nouvelle incrimination qui est proposée par le texte et qui vise à sanctionner la divulgation d'informations concernant la procédure lorsque cette divulgation est de nature à entraver le cours de la justice.
La commission est défavorable aux amendements n°s 310 et 416 puisque - cela a été rappelé à l'instant - elle vous propose d'encadrer le dispositif en précisant que cette infraction sera identifiée sans préjudice des droits de la défense qui, bien évidemment, doivent être préservés.
M. le président. La parole est M. Robert Badinter, pour présenter les amendements n°s 311 et 312.
M. Robert Badinter. Mes observations s'intègrent dans mes explications précédentes. Nous retrouvons là le texte de la commission. La seule différence est un souci de précision.
Avec l'amendement n° 311, je souhaite que soient insérés, après les mots « du fait de ses fonctions », les mots « participe à l'enquête », de façon qu'il n'y ait aucune équivoque s'agissant de la profession d'avocat.
L'amendement n° 312 est satisfait, puisqu'il apporte une précision que l'on retrouve dans le texte de la commission. Je le retire donc.
M. le président. L'amendement n° 312 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 37.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il est normal de sanctionner une personne qui divulgue des informations confidentielles auxquelles elle a accès de par ses fonctions. La commission est donc défavorable au précédent amendement exposé par M. Badinter, lequel permettrait de divulguer des informations à un complice et ainsi aux personnes de s'échapper.
Nous nous sommes interrogés en commission sur les mots « directement ou indirectement », qui nous ont semblé quelque peu ambigus. C'est pourquoi la commission souhaite recevoir plus d'informations de la part du Gouvernement, afin de savoir ce qu'il faut entendre concrètement par ces termes.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 313.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je le retire.
M. le président. L'amendement n° 313 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 38 et pour donner l'avis de la commission sur les amendements n°s 416 et 311.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 38 apporte une précision importante, puisque nous souhaitons que la nouvelle incrimination ait vocation à ne s'appliquer qu'à des personnes qui utilisent sciemment les informations dont elles disposent pour entraver le cours de la justice.
M. Jean-Jacques Hyest. Eh oui !
M. François Zocchetto, rapporteur. La commission est défavorable aux amendements n°s 416 et 311.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Etant bien entendu défavorable à la suppression de l'article 4, je suis donc défavorable à l'amendement n° 416.
Je suis favorable à l'amendement n° 36. Il apporte une précision utile, qui cadre bien les choses.
Je suis défavorable à l'amendement n° 311, car il tendrait à limiter beaucoup trop, à mon sens, la portée du texte.
J'en viens à l'amendement n° 37. Permettez-moi de relire le membre de phrase en question : « ... de révéler, directement ou indirectement, ces informations à des personnes susceptibles d'être impliquées, comme auteurs, coauteurs, complices ou receleurs... ».
L'adverbe « directement » signifie que l'information est directement transmise à une personne susceptible d'être impliquée. L'adverbe « indirectement » suppose une personne pouvant jouer le rôle d'intermédiaire.
Prenons un exemple concret : l'information est transmise à l'épouse de quelqu'un, à des parents, à un proche, à une personne dont on sait très bien qu'elle répétera l'information.
Sans ces adverbes, qui sont utiles, le texte de loi perdrait de son efficacité. Il suffirait en effet de transmettre l'information à quelqu'un qui, effectivement, n'est pas impliqué ou n'est pas susceptible d'être impliqué, mais dont on sait parfaitement qu'il va se faire le porte-parole de cette information. Je suis donc hostile à l'amendement n° 37 de suppression de ces adverbes.
Enfin, je suis favorable à l'amendement n° 38 de la commission des lois.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 416.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 36.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je voudrais m'expliquer sur les trois amendements de la commission.
Le Gouvernement est d'accord sur cet amendement n° 36, insérant les mots : « Sans préjudice des droits de la défense, ». Dont acte.
Il est d'accord sur l'amendement n° 38, avec lequel la révélation est punie sévèrement quand elle a pour objet d'entraver le déroulement des investigations ou la manifestation de la vérité.
Dès lors, je ne comprends pas pourquoi le Gouvernement n'accepte pas de supprimer les mots « directement ou indirectement ».
A partir du moment où la révélation est faite pour gêner l'enquête, qu'elle le soit directement ou indirectement n'a aucune incidence !
C'est une formule qui revient fréquemment et que l'on a déjà supprimée plusieurs fois dans ce texte. Elle n'a aucun intérêt !
Aux Etats-Unis, on discute beaucoup pour savoir qui a révélé ou qui n'a pas révélé et à qui on aurait révélé que la femme de tel conseiller était membre de la CIA ou non.
M. Robert Bret. Il n'y a pas qu'aux Etats-Unis !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Oui, bien sûr !
M. Jean-Jacques Hyest. Vous êtes décidément un admirateur des Etats-Unis !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non, je prends un exemple !
La seule question est de savoir qui a révélé. Là, c'est la même chose. Je ne comprends donc pas pourquoi il faudrait rechercher si cette personne a révélé directement ou non, dès lors que cette révélation avait pour objet de nuire à l'enquête et à la manifestation de la vérité.
M. Jean-Jacques Hyest. Vous ne lisez pas tout !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Si, j'ai tout lu ! Nous sommes donc favorables à l'amendement n° 36, mais nous pensons aussi que ces trois amendements forment un tout. J'aurais d'ailleurs aimé convaincre M. le ministre que, dès lors qu'il acceptait le troisième, il n'y avait plus aucun inconvénient à ce qu'il accepte le deuxième.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 36.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 311.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Monsieur le rapporteur, maintenez-vous l'amendement n° 37 ?
M. François Zocchetto, rapporteur. A partir du moment où l'amendement n° 36 définit bien le cadre de l'incrimination et consacre les droits de la défense, je retire l'amendement n° 37.
M. le président. L'amendement n° 37 est retiré.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je le reprends !
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 37 rectifié.
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour le défendre.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. J'entends bien que nous sommes en navette et que ça n'a pas une importance primordiale. C'est simplement pour que la loi soit bien écrite. Il ne s'agit pas d'autre chose.
Encore une fois, cela n'ajoute rien et ce n'est pas la peine qu'on perde du temps dans un procès éventuel à rechercher si c'est directement ou non dès lors que la révélation est faite à qui que ce soit avec l'intention de commettre le délit.
Voilà pourquoi je me permets d'insister, et je regrette que M. le rapporteur ait retiré un amendement que la commission avait adopté, me semble-t-il, à l'unanimité.
Cela étant, si je comprends que, dans ses rapports avec le Gouvernement, il puisse penser que c'est de bonne politique ou de bonne opportunité, j'estime que cela n'ajoute strictement rien. Au contraire, cela ne fait que compliquer les choses.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote sur l'amendement n° 37 rectifié.
M. Jean-Jacques Hyest. Les explications de M. le garde des sceaux étaient extrêmement claires. Si l'on ne fait pas figurer les termes « directement ou indirectement », il faut que la révélation soit directe aux auteurs. Si c'est par l'intermédiaire d'une autre personne, cela ne fonctionne plus !
Monsieur Dreyfus-Schmidt, je vous invite donc à relire attentivement le texte de l'article. Vous constaterez que cette précision devient indispensable, et c'est pourquoi je suis contre cet amendement n° 37 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. C'est vrai ! Je retire donc cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 37 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 38.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Section 3
Dispositions diverses
M. le président. Art. 5. - I. - Au dernier alinéa de l'article 63-4 du code de procédure pénale, les mots : « lorsque la garde à vue est soumise à des règles particulières de prolongation » sont remplacés par les mots : « lorsque la garde à vue concerne une des infractions entrant dans le champ d'application des articles 706-16 ou 706-26 ».
II. - L'article 85 du même code est complété par les mots : « en application des dispositions des articles 52 et 706-42 ».
III. - A l'article 706-26 du même code, la référence : « 222-39 » est remplacée par la référence : « 222-40 ».
IV. - Les articles 706-24-2, 706-30, 706-32 et 706-36-1 du même code sont abrogés.
L'amendement n° 39, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le paragraphe I de cet article :
« I. - Les trois derniers alinéas de l'article 63-4 du code de procédure pénale sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Si la personne est gardée à vue pour une infraction mentionnée aux 6°, 8°, 8° bis, et 11° de l'article 706-73 ou, lorsqu'elle est commise en bande organisée, mentionnée au 4° de cet article, l'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de trente-six heures. Si elle est gardée à vue pour une infraction mentionnée aux 3° et 9° du même article, l'entretien avec un avocat ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de soixante-douze heures. Le procureur de la République est avisé de la qualification des faits retenue par les enquêteurs dès qu'il est informé par ces derniers du placement en garde à vue. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Par cet amendement, que j'avais annoncé ce matin, nous en revenons à la garde à vue.
Alors que l'Assemblée nationale a repoussé à la soixante-douzième heure l'intervention de l'avocat pour certaines infractions relevant de la criminalité organisée, la commission estime préférable d'en rester au droit actuel et de prévoir une première intervention de l'avocat dès la trente-sixième heure.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. La réflexion engagée à l'Assemblée nationale se poursuit au Sénat pour adapter les régimes de garde à vue en fonction de la nature des infractions, des nécessités des enquêtes et des instructions, d'une part, et pour répondre au souci légitime de simplifier les choses, d'autre part.
L'Assemblée nationale avait formulé une proposition ; le Sénat la modifie très légèrement. Je m'en remets à la sagesse du Sénat, car je pense que votre formulation comporte certaines améliorations.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 39.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 40, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après le paragraphe I de cet article, insérer un paragraphe I bis ainsi rédigé :
« I bis. _ L'article 76 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Si les nécessités de l'enquête relative à un délit puni d'une peine d'emprisonnement d'une durée égale ou supérieure à cinq ans l'exigent, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance peut, à la requête du procureur de la République, décider, par une décision écrite et motivée, que les opérations prévues au présent article seront effectuées sans l'assentiment de la personne chez qui elles ont lieu. A peine de nullité, la décision du juge des libertés et de la détention précise la qualification de l'infraction dont la preuve est recherchée ainsi que l'adresse des lieux dans lesquels ces opérations peuvent être effectuées ; cette décision est motivée par référence aux éléments de fait et de droit justifiant que ces opérations sont nécessaires. Les opérations sont effectuées sous le contrôle du magistrat qui les a autorisées, et qui peut se déplacer sur les lieux pour veiller au respect des dispositions légales. Ces opérations ne peuvent, à peine de nullité, avoir un autre objet que la recherche et la constatation des infractions visées dans la décision du juge des libertés et de la détention. Toutefois, le fait que ces opérations révèlent des infractions autres que celles visées dans la décision ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 40, qui concerne les perquisitions - nous en avons également déjà parlé ce matin - tend à prévoir que les perquisitions sans l'assentiment de la personne, mais, je le répète, sous le contrôle du juge des libertés et de la détention, sont possibles pour les délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 40.
Mme Nicole Borvo. Le groupe CRC vote contre.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 41, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après le paragraphe III de cet article, insérer un paragraphe III bis ainsi rédigé :
« III bis. _ L'article 706-28 du même code est ainsi modifié :
« 1° Le premier alinéa est complété par les mots : "lorsqu'il ne s'agit pas de locaux d'habitation" ;
« 2° Le deuxième alinéa est supprimé. »
L'amendement n° 42, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le paragraphe IV de cet article :
« IV. _ Les articles 76-1, 706-23, 706-24, 706-24-1, 706-24-2, 706-29, 706-30, 706-32 et 706-36-1 du même code sont abrogés. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit d'amendements de coordination avec les amendements précédents.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 41.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 42.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
M. le président. Art. 5 bis. - Dans la première phrase de l'article L. 10 B du livre des procédures fiscales, les références : « 225-5, 225-6, 321-1, deuxième alinéa, et 321-6 » sont remplacées par les références : « 225-4-8, 225-5, 225-6, 321-1, deuxième alinéa, 321-6, 421-2-3 et 450-2-1 ». - (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 5 bis
M. le président. L'amendement n° 314, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Après l'article 5 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article 145-4 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée : "Les prévenus peuvent communiquer librement avec leur conseil, verbalement ou par écrit, et toute facilité compatible avec les exigences de sécurité dans les juridictions judiciaires pour l'exercice de leur défense". »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. A l'évidence, si un avocat souhaite s'entretenir en confidence avec son client, il doit pouvoir le faire. C'est prévu dans les prisons et dans les commissariats de police depuis la présence d'un avocat lors de la garde à vue. En revanche, aucune disposition légale n'est prévue pour cette libre communication dans le cadre des juridictions judiciaires. Une telle mesure serait souhaitable.
Nous avons tous en mémoire l'affaire récente du tribunal de grande instance de Versailles : celui-ci se fait l'écho de cette revendication dans une ordonnance de référé relative à la cage de verre du box des accusés de la salle de la cour d'assises des Yvelines, laquelle empêchait toute communication de l'accusé avec son conseil. Et cela doit être vrai dans tous les tribunaux de France et de Navarre. L'avocat doit expliquer au gardien ce qu'il en est, ou bien faire appel au procureur ou au président du tribunal pour exiger de pouvoir s'entretenir avec son client. Inscrire cette obligation dans la loi couperait court à toute difficulté et permettrait d'ailleurs que ceux qui construisent les tribunaux en tiennent compte.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. J'attire l'attention du Sénat sur le fait que l'amendement présenté par M. Dreyfus-Schmidt est incomplet. Bien sûr, on ne peut que souscrire aux principes qui y sont rappelés, mais cela concerne l'exercice général des droits de la défense. Je ne vois pas ce que cet amendement apporterait de plus.
Par ailleurs, vous faites référence, monsieur Dreyfus-Schmidt, à une situation particulière, à savoir la cage de verre du box des accusés de la salle de la cour d'assises des Yvelines. Il appartient, je le répète, au président d'organiser le fonctionnement de l'audience. Ce n'est pas avec cet amendement que vous pourrez remédier à une situation que tout le monde déplore.
L'avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.
D'ailleurs, M. Dreyfus-Schmidt a fait la démonstration - et c'est le meilleur argument - que la règle existait et qu'elle était respectée, au besoin par une décision de justice.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 314.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 259, présenté par MM. Schosteck, Hyest et les membres du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
« Après l'article 5 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 5 de la loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure est complété par une phrase ainsi rédigée : "Dans ce même cadre, les officiers et agents de police judiciaire doivent communiquer aux agents des quatre directions précitées tous les éléments susceptibles de comporter une implication de nature financière, fiscale ou douanière, sans que puisse être opposée l'obligation au secret". »
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Cet amendement vise à apporter une précision en ce qui concerne la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure. En effet, les agents des douanes ou des services fiscaux ne sont pas tenus au secret professionnel à l'égard des officiers de police judiciaire.
On sait très bien qu'en matière de grande criminalité les infractions douanières ou fiscales sont extrêmement importantes. La mise en place d'un système autorisant la réciprocité entre ces divers services, qui font également partie des GIR, me paraît indispensable pour éviter tout vice de procédure ultérieur.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. La précision apportée par l'amendement de M. Hyest est tout à fait justifiée.
Par conséquent, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 259.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5 bis.
Chapitre II
Dispositions concernant la lutte contre
la délinquance et la criminalité internationales
M. le président. Art. 6. - I. - Le titre X du livre IV du code de procédure pénale est ainsi rédigé :
« TITRE X
« DE L'ENTRAIDE JUDICIAIRE INTERNATIONALE
« Chapitre Ier
« Dispositions générales
« Section 1
« Transmission et exécution des demandes d'entraide
« Art. 694. - En l'absence de convention internationale en stipulant autrement :
« 1° Les demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires françaises et destinées aux autorités judiciaires étrangères sont transmises par l'intermédiaire du ministère de la justice. Le retour des pièces d'exécution se fait par la même voie ;
« 2° Les demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères et destinées aux autorités judiciaires françaises sont transmises par la voie diplomatique. Le retour des pièces d'exécution se fait par la même voie.
« En cas d'urgence, les demandes d'entraide françaises et étrangères peuvent être transmises et les pièces d'exécution retournées directement entre les autorités judiciaires territorialement compétentes pour les délivrer et les exécuter. Toutefois, sauf convention internationale en stipulant autrement, les demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères et destinées aux autorités judiciaires françaises doivent faire l'objet d'un avis donné par la voie diplomatique par le gouvernement étranger intéressé.
« Art. 694-1. - Dans le cas d'urgence, les demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères sont transmises, selon les distinctions prévues à l'article 694-2, au procureur de la République ou au doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance territorialement compétent. Elles peuvent également être adressées à ces magistrats par l'intermédiaire du procureur général.
« Si le procureur de la République reçoit directement d'une autorité étrangère une demande d'entraide qui ne peut être exécutée que par le juge d'instruction, il la transmet pour exécution à ce dernier ou saisit le procureur général dans le cas prévu à l'article 694-4.
« Avant de procéder à l'exécution d'une demande d'entraide dont il a été directement saisi, le juge d'instruction la communique immédiatement pour avis au procureur de la République.
« Art. 694-2. - Les demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères sont exécutées par le procureur de la République ou par les officiers ou agents de police judiciaire requis à cette fin par ce magistrat.
« Elles sont exécutées par le juge d'instruction ou par des officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire de ce magistrat lorsqu'elles nécessitent certains actes de procédure qui ne peuvent être ordonnés ou exécutés qu'au cours d'une instruction préparatoire.
« Art. 694-3. - Les demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères sont exécutées selon les règles de procédure prévues par le présent code.
« Toutefois, si la demande d'entraide le précise, elle est exécutée selon les règles de procédure expressément indiquées par les autorités étrangères, à condition, sous peine de nullité, que ces règles ne réduisent pas les droits des parties ou les garanties procédurales prévus par le présent code.
« L'irrégularité de la transmission de la demande d'entraide ne peut constituer une cause de nullité des actes accomplis en exécution de cette demande.
« Art. 694-4. - Si l'exécution d'une demande d'entraide émanant d'une autorité judiciaire étrangère est de nature à porter atteinte à l'ordre public ou aux intérêts essentiels de la Nation, le procureur de la République saisi de cette demande ou avisé de cette demande en application du troisième alinéa de l'article 694-1 la transmet au procureur général qui détermine, s'il y a lieu, d'en saisir le ministre de la justice et donne, le cas échéant, avis de cette transmission au juge d'instruction.
« S'il est saisi, le ministre de la justice informe l'autorité requérante, le cas échéant, de ce qu'il ne peut être donné suite, totalement ou partiellement, à sa demande. Cette information est notifiée à l'autorité judiciaire concernée et fait obstacle à l'exécution de la demande d'entraide ou au retour des pièces d'exécution.
« Section 2
« Dispositions applicables à certains
types de demande d'entraide
« Art. 694-5. - Les dispositions de l'article 706-71 sont applicables pour l'exécution simultanée, sur le territoire de la République et à l'étranger, des demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires françaises ou étrangères.
« Lorsqu'il est fait application de ces dispositions pour l'exécution d'un interrogatoire, d'une audition ou d'une confrontation réalisés à l'étranger sur demande des autorités judiciaires françaises, cet acte est réalisé conformément aux règles prévues par le présent code, si une convention internationale n'y fait pas obstacle.
« Si la procédure concerne une personne poursuivie, l'interrogatoire ou la confrontation ne peuvent se faire qu'avec son accord.
« Les dispositions des articles 434-13 et 434-15-1 du code pénal sont applicables aux témoins entendus sur le territoire de la République à la demande d'une juridiction étrangère dans les conditions prévues par le présent article.
« Art. 694-6. - Lorsque la surveillance prévue à l'article 706-80 doit être poursuivie dans un Etat étranger, elle est autorisée, dans les conditions prévues par les conventions internationales, par le procureur de la République chargé de l'enquête.
« Les procès-verbaux d'exécution des opérations de surveillance ou rapports y afférents ainsi que l'autorisation d'en poursuivre l'exécution sur le territoire d'un Etat étranger sont versés au dossier de la procédure.
« Art. 694-7. - Avec l'accord préalable du ministre de la justice saisi d'une demande d'entraide judiciaire à cette fin, des agents de police étrangers peuvent poursuivre sur le territoire de la République, sous la direction d'officiers de police judiciaire français, des opérations d'infiltration conformément aux dispositions des articles 706-81 à 706-86. L'accord du ministre de la justice peut être assorti de conditions. L'opération doit ensuite être autorisée par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris ou le juge d'instruction du même ressort dans les conditions prévues par l'article 706-81.
« Le ministre de la justice ne peut donner son accord que si les agents étrangers sont affectés dans leur pays à un service spécialisé et exercent des missions de police similaires à celles des agents nationaux spécialement habilités mentionnés à l'article 706-81.
« Art. 694-8. - Avec l'accord des autorités judiciaires étrangères, les agents de police étrangers mentionnés au deuxième alinéa de l'article 694-7 peuvent également, dans les conditions fixées par les articles 706-81 à 706-86, participer sous la direction d'officiers de police judiciaire français à des opérations d'infiltration conduites sur le territoire de la République dans le cadre d'une procédure judiciaire nationale.
« Art. 694-9. - Lorsque, conformément aux stipulations prévues par les conventions internationales, le procureur de la République ou le juge d'instruction communique à des autorités judiciaires étrangères des informations issues d'une procédure pénale en cours, il peut soumettre l'utilisation de ces informations aux conditions qu'il détermine.
Chapitre II
Dispositions propres à l'entraide entre les Etats membres de l'Union européenne
« Art. 695. - Les dispositions du présent chapitre sont applicables aux demandes d'entraide entre la France et les autres Etats membres de l'Union européenne.
Section 1
Transmission et exécution des demandes d'entraide
« Art. 695-1. - Sauf si une convention internationale en dispose autrement et sous réserve des dispositions de l'article 694-4, les demandes d'entraide sont transmises et les pièces d'exécution retournées directement entre les autorités judiciaires territorialement compétentes pour les délivrer et les exécuter, conformément aux dispositions des articles 694-1 à 694-3.
Section 2
Des équipes communes d'enquête
« Art. 695-2. - Dans la limite des pouvoirs qui leur sont conférés par leur statut, les agents détachés auprès d'une équipe commune d'enquête, telle que définie par la décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002 relative aux équipes communes d'enquête, peuvent recevoir mission, le cas échéant sur toute l'étendue du territoire national :
« 1° De constater tous crimes, délits ou contraventions et d'en dresser procès-verbal, au besoin dans les formes prévues par le droit de leur Etat ;
« 2° De recevoir par procès-verbal les déclarations qui leur sont faites par toute personne susceptible de fournir des renseignements sur les faits en cause, au besoin dans les formes prévues par le droit de leur Etat ;
« 3° De seconder les officiers de police judiciaire français dans l'exercice de leurs fonctions ;
« 4° De procéder à des surveillances et, s'ils sont spécialement habilités à cette fin, à des infiltrations, dans les conditions prévues aux articles 706-81 et suivants et sans qu'il soit nécessaire de faire application des dispositions des articles 694-7 et 694-8.
« Cette mission leur est conférée, dans les conditions fixées par la décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002 précitée, par l'autorité judiciaire française territorialement compétente pour créer et diriger l'équipe commune d'enquête.
« Ces agents se limitent strictement aux opérations qui leur sont prescrites et aucun des pouvoirs propres de l'officier de police judiciaire français responsable de l'équipe commune d'enquête ne peut leur être délégué.
« Un original des procès-verbaux qu'ils ont établis et qui doit être rédigé ou traduit en langue française est versé à la procédure française.
« Art. 695-3. - Dans le cadre de l'équipe commune d'enquête, les officiers et agents de police judiciaire français détachés dans les conditions prévues par la décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002 précitée peuvent procéder aux opérations prescrites par le responsable d'équipe, sur toute l'étendue du territoire de l'Etat où ils interviennent, dans la limite des pouvoirs qui leur sont reconnus par le présent code.
« Leurs missions sont définies par l'autorité judiciaire territorialement compétente pour créer et diriger l'équipe commune d'enquête.
« Ils peuvent recevoir les déclarations et constater les infractions dans les formes prévues par le présent code, sous réserve de l'accord de l'Etat sur le territoire duquel ils interviennent.
Section 3
De l'unité Eurojust
« Art. 695-4. - Conformément à la décision du Conseil du 28 février 2002 instituant Eurojust afin de renforcer la lutte contre les formes graves de criminalité, l'unité Eurojust, organe de l'Union européenne doté de la personnalité juridique agissant en tant que collège ou par l'intermédiaire d'un représentant national, est chargée de promouvoir et d'améliorer la coordination et la coopération entre les autorités compétentes des Etats membres de l'Union européenne dans toutes les enquêtes et poursuites relevant de sa compétence.
« Art. 695-5. - L'unité Eurojust, agissant par l'intermédiaire de ses représentants nationaux ou en tant que collège, peut :
« 1° Informer le procureur général des infractions dont elle a connaissance et lui demander de faire procéder à une enquête ou de faire engager des poursuites ;
« 2° Demander au procureur général de dénoncer ou de faire dénoncer des infractions aux autorités compétentes d'un autre Etat membre de l'Union européenne ;
« 3° Demander au procureur général de faire mettre en place une équipe commune d'enquête ;
« 4° Demander au procureur général ou au juge d'instruction de lui communiquer les informations issues de procédures judiciaires qui sont nécessaires à l'accomplissement de ses tâches.
« Art. 695-6. - Lorsque le procureur général ou le juge d'instruction saisi ne donne pas suite à une demande de l'unité Eurojust agissant en tant que collège, il l'informe dans les meilleurs délais de la décision intervenue et de ses motifs.
« Toutefois, cette motivation n'est pas obligatoire pour les demandes mentionnées aux 1°, 2° et 4° de l'article 695-5, lorsqu'elle peut porter atteinte à la sécurité de la nation ou compromettre le bon déroulement d'une enquête en cours ou la sécurité d'une personne.
« Art. 695-7. - Lorsqu'une demande d'entraide nécessite, en vue d'une exécution coordonnée, l'intervention de l'unité Eurojust, celle-ci peut en assurer la transmission aux autorités requises par l'intermédiaire du représentant national intéressé.
Section 4
Du représentant national auprès d'Eurojust
« Art. 695-8. - Le représentant national est un magistrat hors hiérarchie mis à disposition de l'unité Eurojust pour une durée de trois ans par arrêté du ministre de la justice.
« Le ministre de la justice peut lui adresser des instructions dans les conditions fixées par l'article 36.
« Art. 695-9. - Dans le cadre de sa mission, le représentant national a accès aux informations du casier judiciaire national et des fichiers de police judiciaire.
« Il peut également demander aux magistrats du ministère public ainsi qu'aux juridictions d'instruction ou de jugement de lui communiquer les informations issues des procédures judiciaires qui sont nécessaires à l'accomplissement de sa mission. L'autorité judiciaire sollicitée peut toutefois refuser cette communication si celle-ci est de nature à porter atteinte à l'ordre public ou aux intérêts essentiels de la nation. Elle peut également différer cette communication pour des motifs tenant aux investigations en cours.
Chapitre III
Dispositions propres à l'entraide entre
la France et certains Etats
« Art. 695-10. - Les dispositions des sections 1 et 2 du chapitre II sont applicables aux demandes d'entraide entre la France et les autres Etats parties à toute convention comportant des stipulations similaires à celles de la Convention du 29 mai 2000 relative à l'entraide judiciaire en matière pénale entre les Etats membres de l'Union européenne. »
II. - L'avant-dernier alinéa de l'article 706-71 du même code est supprimé.
III. - L'article 30 de la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition des étrangers est abrogé.
La parole est à Mme Nicole Borvo, sur l'article.
Mme Nicole Borvo. Avec cet article, nous abordons le chapitre consacré à l'entraide judiciaire. Nous savons que cette question a émergé notamment après les attentats du 11 septembre 2001 dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.
Si l'objectif de lutte contre la criminalité organisée en particulier l'amélioration de la coopération judiciaire est un impératif dans un contexte d'internationalisation de la criminalité transfrontalière, et si des incohérences et des lacunes existent effectivement dans cette coopération, je regrette particulièrement que les quelques voix qui s'élèvent pour apporter un bémol dans le concert de satisfaction généralisée soient systématiquement ignorées. Je ne dis pas que je suis hostile à la coopération, mais celle-ci pose des problèmes qu'il faudrait prendre en considération.
Je souhaite, à cette occasion, me faire à nouveau l'écho des inquiétudes qui s'expriment depuis deux ans quant au risque de développement d'un espace plus policier que judiciaire et où la principale vocation des organes judiciaires, intégrés ou non, est de faciliter l'action policière plus que de la contrôler.
C'est ainsi que de nombreux juristes, avocats, organisations non gouvernementales, mais aussi des députés européens, interpellent les gouvernements sur la nécessité de veiller au respect des libertés essentielles et d'obtenir des garanties minimales de procédure. Ils demandent notamment que soient réaffirmés les principes de l'octroi d'une assistance juridique, le respect de la présomption d'innocence, le droit à un procès équitable, l'information du prévenu sur ses droits, l'aide gratuite d'un traducteur.
Or, alors que ces garanties n'apparaissent plus aussi impératives pour nombre de gouvernements européens à l'heure où ils ont singulièrement renforcé leur système répressif, le durcissement des législations fera très largement sentir ses effets sur la coopération judiciaire : si le gouvernement français semble fort heureusement attaché à défendre le principe de la double incrimination, à partir du moment où les législations des pays européens rivalisent les unes avec les autres dans le sens de l'aggravation pénale généralisée, les droits et libertés des individus risquent d'être écornés au nom de l'efficacité.
La décision-cadre relative à la définition du terrorisme, adoptée à l'échelon européen, en a été une illustration, alors que, déjà à propos de ce texte, nous avions souhaité interpeller le gouvernement précédent sur les risques que présentent des définitions particulièrement floues et fourre-tout par lesquelles certaines formes de lutte syndicale pourraient être assimilées au terrorisme ; des associations comme Amnesty international, vous vous en souvenez, avaient d'ailleurs fait part de leur inquiétude.
Lorsque, dans le présent texte, on constate cette même tentation de définitions très larges via la notion de la criminalité organisée, laquelle appelle l'application de règles où les droits de la défense sont minorés et ceux de la police accrus, vous comprendrez que nous ne soyons pas rassurés sur le devenir de la coopération judiciaire.
Telles sont les remarques que je souhaitais faire au nom des sénateurs de mon groupe sur le présent article.
M. le président. L'amendement n° 43, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« I. - Rédiger comme suit la seconde phrase du deuxième alinéa (1°) et la seconde phrase du troisième alinéa (2°) du texte proposé par le I de cet article pour l'article 694 du code de procédure pénale : "Les pièces d'exécution sont renvoyées aux autorités de l'Etat requérant par la même voie."
« II. - Remplacer la première phrase du dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 694 du code de procédure pénale par deux phrases ainsi rédigées : "En cas d'urgence, les demandes d'entraide sollicitées par les autorités françaises ou étrangères peuvent être transmises directement aux autorités de l'Etat requis compétentes pour les exécuter. Le renvoi des pièces d'exécution aux autorités compétentes de l'Etat requérant est effectué selon les mêmes modalités." »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai également les amendements n°s 44 à 61. En effet, les amendements n°s 44 à 59 sont des amendements rédactionnels, de précision ou de coordination.
M. le président. J'appelle donc également en discussion les amendements n°s 44 à 61.
L'amendement n° 44, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« I. - Rédiger comme suit le début du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 694-1 du code de procédure pénale : "En cas d'urgence, les demandes d'entraide..."
« II. - Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 694-1 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "doyen des juges d'instruction" par les mots : "juge d'instruction". »
L'amendement n° 46, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa du texte proposé par cet article pour l'article 694-3 du code de procédure pénale, après les mots : "indiquées par", remplacer les mots : "les autorités étrangères" par les mots : "les autorités compétentes de l'Etat requérant". »
L'amendement n° 45, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Compléter le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 694-3 du code de procédure pénale par deux phrases ainsi rédigées : "Lorsque la demande d'entraide ne peut être exécutée conformément aux exigences de l'Etat requérant, les autorités compétentes françaises en informent sans délai les autorités de l'Etat requérant et indiquent dans quelles conditions la demande pourrait être exécutée. Les autorités françaises compétentes et celles de l'Etat requérant peuvent ultérieurement s'accorder sur la suite à réserver à la demande, le cas échéant, en la subordonnant au respect desdites conditions." »
L'amendement n° 47, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Compléter le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 694-4 du code de procédure pénale par une phrase ainsi rédigée : "Le ministre de la justice apprécie les suites à donner à la demande d'entraide." »
L'amendement n° 48, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« I. - Après les mots : "à l'étranger," rédiger comme suit la fin du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 694-5 du code de procédure pénale : "de demandes d'entraide émanant des autorités judiciaires étrangères ou d'actes d'entraide réalisés à la demande des autorités judiciaires françaises".
« II. - Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 694-5 du code de procédure pénale :
« Les interrogatoires, les auditions ou les confrontations réalisés à l'étranger à la demande des autorités judiciaires françaises sont exécutés conformément aux dispositions du présent code, sauf si une convention internationale y fait obstacle. »
« III. - Rédiger comme suit le troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 694-5 du code de procédure pénale :
« L'interrogatoire ou la confrontation d'une personne poursuivie ne peut être effectué qu'avec son consentement. »
« IV. - Dans le dernier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 694-5 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "d'une juridiction étrangère" par les mots : "des autorités judiciaires de l'Etat requérant". »
L'amendement n° 49, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« A la fin de la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 694-7 du code de procédure pénale, remplacer la référence : "706-86" par la référence : "706-87". »
L'amendement n° 50, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 694-8 du code de procédure pénale, remplacer la référence : "706-86" par la référence : "706-87". »
L'amendement n° 51, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le I de cet article pour l'intitulé du chapitre II du titre X du livre IV du code de procédure pénale :
« Dispositions propres à l'entraide entre la France et les autres Etats membres de l'Union européenne. »
L'amendement n° 52, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le texte proposé par le I de cet article pour l'article 695-1 du code de procédure pénale, remplacer le mot : "dispose" par le mot : "stipule". »
L'amendement n° 53, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« I. _ Remplacer le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 695-2 du code de procédure pénale par deux alinéas ainsi rédigés :
« Avec l'accord préalable du ministre de la justice et le consentement du ou des autres Etats membres concernés, l'autorité judiciaire compétente peut créer une équipe commune d'enquête, soit lorsqu'il y a lieu d'effectuer, dans le cadre d'une procédure française, des enquêtes complexes impliquant la mobilisation d'importants moyens et qui concernent d'autres Etats membres, soit lorsque plusieurs Etats membres effectuent des enquêtes relatives à des infractions exigeant une action coordonnée et concertée entre les Etats membres concernés.
« Les agents étrangers détachés par un autre Etat membre auprès d'une équipe commune d'enquête, dans la limite des attributions attachées à leur statut, peuvent, sous la direction de l'autorité judiciaire compétente, avoir pour mission, le cas échéant, sur toute l'étendue du territoire national : ».
« II. _ Rédiger comme suit l'antépénultième et l'avant-dernier alinéa du même texte :
« Les agents étrangers détachés auprès d'une équipe commune d'enquête peuvent exercer ces missions, sous réserve du consentement de l'Etat membre ayant procédé à leur détachement.
« Ces agents n'interviennent que dans les opérations pour lesquelles ils ont été désignés. Aucun des pouvoirs propres de l'officier de police judiciaire français, responsable de l'équipe, ne peut leur être délégué. »
L'amendement n° 54, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 695-3 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "dans les conditions prévues par la décision-cadre du Conseil du 13 juin 2002 précitée" par les mots : "auprès d'une équipe commune d'enquête". »
L'amendement n° 55, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le deuxième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 695-3 du code de procédure pénale :
« Leurs missions sont définies par l'autorité de l'Etat membre compétente pour diriger l'équipe commune d'enquête sur le territoire duquel l'équipe intervient. »
L'amendement n° 56, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 695-6 du code de procédure pénale, supprimer les mots : "agissant en tant que collège". »
L'amendement n° 57, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après les mots : "dans les conditions fixées", rédiger comme suit la fin du second alinéa du texte proposé par le paragraphe I de cet article pour l'article 695-8 du code de procédure pénale : "par l'article 30". »
L'amendement n° 58, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du second alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 695-9 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "magistrats du ministère public ainsi qu'aux juridictions d'instruction ou de jugement" par les mots : "autorités judiciaires compétentes". »
L'amendement n° 59, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après les mots : "des motifs", rédiger comme suit la fin de la dernière phrase du second alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 695-9 du code de procédure pénale : "liés au bon déroulement d'une enquête en cours ou à la sécurité des personnes". »
L'amendement n° 60, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article 695-9 du code de procédure pénale par un alinéa ainsi rédigé :
« Le représentant national est informé par le procureur général des affaires susceptibles d'entrer dans le champ de compétence d'Eurojust et qui concernent au moins deux autres Etats membres de l'Union européenne. »
L'amendement n° 61, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Compléter le texte proposé par le I de cet article pour l'article 695-9 du code de procédure pénale par un alinéa ainsi rédigé :
« Il est également compétent pour recevoir et transmettre au procureur général des informations relatives aux enquêtes de l'Office européen de lutte anti-fraude. »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 43 est purement rédactionnel.
L'amendement n° 44 vise à harmoniser une terminologie.
L'amendement n° 46 est un amendement de précision, tout comme les amendements n°s 45 et 47.
L'amendement n° 48 est un amendement rédactionnel.
Les amendements n°s 50, 51 et 52 sont des amendements de coordination.
L'amendement n° 53 tend à apporter des clarifications et à compléter le dispositif relatif à la mise en place d'une équipe commune d'enquête, sans changer le système en lui-même.
L'amendement n° 54 est formel.
L'amendement n° 55 est rédactionnel. Il concerne également les équipes d'enquête.
L'amendement n° 56 est également rédactionnel. Il a trait à Eurojust : il a pour objet de généraliser à l'ensemble des demandes émanant d'Eurojust l'obligation de motivation de refus imposée aux autorités compétentes des Etats membres.
L'amendement n° 57 est un amendement de coordination.
L'amendement n° 58 est rédactionnel.
L'amendement n° 59 est un amendement de précision.
Je m'exprimerai un peu plus longuement sur les amendements n°s 60 et 61, par lesquels la commission propose au Sénat d'enrichir le champ des compétences dévolues au membre national détaché par la France auprès d'Eurojust afin de renforcer les compétences de ce magistrat français qui nous représente au sein d'Eurojust.
Tout d'abord, nous vous suggérons, par l'amendement n° 60, de créer une obligation nouvelle à la charge du procureur général lorsqu'une affaire est susceptible d'entrer dans le champ de compétence d'Eurojust et revêt une dimension européenne s'étendant sur deux autres Etats membres au moins.
L'amendement n° 61 tend à enrichir les pouvoirs judiciaires de notre représentant national d'Eurojust en vue de lui permettre de recevoir et de transmettre des informations relatives aux enquêtes de l'Office européen de lutte antifraude.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'ensemble de ces amendements ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 43.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 44.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 45.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 46.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 47.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 48.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 50.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 51.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 52.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 53.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 54.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 55.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 58.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 59.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 60.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 61.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 273, présenté par M. Fauchon, et ainsi libellé :
« Après le texte proposé par le I de cet article pour l'article 695-10 du code de procédure pénale, insérer les dispositions suivantes :
« Chapitre IV. « Du mandat d'arrêt européen et des procédures de remise entre Etats membres résultant de la décision-cadre du Conseil de l'Union européenne du 13 juin 2002.
« Section 1. « Dispositions générales.
« Art. 695-11. _ Le mandat d'arrêt européen est une décision judiciaire émise par un Etat membre de l'Union européenne, appelé Etat membre d'émission, en vue de l'arrestation et de la remise par un autre Etat membre, appelé Etat membre d'exécution, d'une personne recherchée pour l'exercice de poursuites pénales ou pour l'exécution d'une peine ou d'une mesure de sûreté privative de liberté.
« L'autorité judiciaire est compétente, selon les règles et sous les conditions déterminées par le présent chapitre, pour adresser aux autorités judiciaires des autres Etats membres de l'Union européenne ou pour exécuter sur leur demande un mandat d'arrêt européen.
« Art. 695-12. _ Les faits qui peuvent donner lieu à l'émission d'un mandat d'arrêt européen sont, aux termes de la loi de l'Etat membre d'émission, les suivants :
« 1° Les faits punis d'une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à un an ou, lorsqu'une condamnation à une peine est intervenue, quand la peine prononcée est égale ou supérieure à quatre mois d'emprisonnement ;
« 2° Les faits punis d'une mesure de sûreté privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à un an ou, lorsqu'une mesure de sûreté a été infligée, quand la durée à subir est égale ou supérieure à quatre mois d'emprisonnement.
« Art. 695-13. _ Tout mandat d'arrêt européen contient, dans les formes prévues par le formulaire figurant en annexe de la décision-cadre du 13 juin 2002 relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remise entre Etats membres, les renseignements suivants :
« - l'identité et la nationalité de la personne recherchée ;
« _ la désignation précise et les coordonnées complètes de l'autorité judiciaire dont il émane ;
« _ l'indication de l'existence d'un jugement exécutoire, d'un mandat d'arrêt ou de toute autre décision judiciaire ayant la même force selon la législation de l'Etat membre d'émission et entrant dans le champ d'application des articles 695-12 et 695-22 ;
« - la nature et la qualification légale de l'infraction, notamment au regard de l'article 695-22 ;
« _ la date, le lieu et les circonstances dans lesquels l'infraction a été commise ainsi que le degré de participation à celle-ci de la personne recherchée ;
« _ la peine prononcée, s'il s'agit d'un jugement définitif, ou l'échelle de peines prévue pour l'infraction par la loi de l'Etat membre d'émission ainsi que, dans la mesure du possible, les autres conséquences de l'infraction.
« Art. 695-14. _ Le mandat d'arrêt européen adressé à l'autorité compétente d'un autre Etat membre doit être traduit dans la langue officielle ou dans une des langues officielles de l'Etat membre d'exécution ou dans l'une des langues officielles des institutions des Communautés européennes acceptées par cet Etat.
« Section 2. « Dispositions relatives à l'émission d'un mandat d'arrêt européen par les juridictions françaises.
« Paragraphe 1er. « Conditions d'émission du mandat d'arrêt européen.
« Art. 695-15. _ Le ministère public près la juridiction qui a statué est compétent pour assurer, sous la forme d'un mandat d'arrêt européen, l'exécution des mandats d'arrêt décernés par les juridictions d'instruction, de jugement ou d'application des peines, selon les règles et sous les conditions déterminées par les articles 695-12 à 695-14.
« Le ministère public est également compétent pour poursuivre, sous la forme d'un mandat d'arrêt européen, l'exécution des peines privatives de liberté égales ou supérieures à quatre mois d'emprisonnement prononcées par les juridictions de jugement, selon les règles et sous les conditions déterminées par les articles 695-12 à 695-14.
« Art. 695-16. _ Lorsque la personne recherchée se trouve en un lieu connu sur le territoire d'un autre Etat membre, le mandat d'arrêt européen peut être adressé directement, par tout moyen laissant une trace écrite, dans des conditions permettant à l'autorité judiciaire d'exécution d'en vérifier l'authenticité, par le ministère public susvisé à ladite autorité.
« Dans les autres cas, la transmission d'un mandat d'arrêt européen peut s'effectuer soit par la voie du Système d'information Schengen (SIS), soit par le biais du système de télécommunication sécurisé du Réseau judiciaire européen, soit, s'il n'est pas possible de recourir au SIS, par la voie de l'Organisation internationale de police criminelle (Interpol) ou par tout autre moyen laissant une trace écrite et dans des conditions permettant à l'autorité judiciaire d'exécution d'en vérifier l'authenticité.
« Lorsque le ministère public a été informé de l'arrestation de la personne recherchée, il adresse, sans délai, au ministre de la justice une copie du mandat d'arrêt transmis à l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'exécution.
« Paragraphe 2.
« Effets du mandat d'arrêt européen.
« Art. 695-17. _ Lorsque le ministère public qui a émis le mandat d'arrêt européen a obtenu la remise de la personne recherchée, celle-ci ne peut être poursuivie, condamnée ou détenue en vue de l'exécution d'une peine ou d'une mesure de sûreté privative de liberté pour un fait quelconque antérieur à la remise et autre que celui qui a motivé cette mesure, sauf dans l'un des cas suivants :
« 1° Lorsque la personne a renoncé expressément, en même temps qu'elle a consenti à sa remise, au bénéfice de la règle de la spécialité dans les conditions prévues par la loi de l'Etat membre d'exécution ;
« 2° Lorsque la personne renonce expressément, après sa remise, au bénéfice de la règle de la spécialité dans les conditions prévues à l'article 695-18 ;
« 3° Lorsque l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'exécution, qui a remis la personne, y consent expressément ;
« 4° Lorsque, ayant eu la possibilité de le faire, la personne recherchée n'a pas quitté le territoire national dans les quarante-cinq jours suivant son élargissement définitif, ou si elle y est retournée volontairement après l'avoir quitté ;
« 5° Lorsque l'infraction n'est pas punie d'une peine d'emprisonnement.
« Art. 695-18. _ Pour le cas visé au 2° de l'article 695-17, la renonciation doit porter sur des faits antérieurs à la remise. Elle est donnée devant la juridiction d'instruction, de jugement ou d'application des peines dont la personne relève après sa remise et a un caractère irrévocable.
« Lors de la comparution de la personne remise, la juridiction compétente constate l'identité et recueille les déclarations de cette personne. Il en est dressé procès-verbal. L'intéressé, assisté le cas échéant de son avocat et, s'il y a lieu, d'un interprète, est informé des conséquences juridiques de sa renonciation à la règle de la spécialité sur sa situation pénale et du caractère irrévocable de la renonciation donnée.
« Si, lors de sa comparution, la personne remise déclare renoncer à la règle de la spécialité, la juridiction compétente, après avoir entendu le ministère public et l'avocat de la personne, en donne acte à celle-ci. La décision précise les faits pour lesquels la renonciation est intervenue.
« Art. 695-19. _ Pour les cas visés au 3° des articles 695-17 et 695-20, la demande de consentement est adressée par le ministère public à l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'exécution. Elle doit contenir, dans les conditions prévues à l'article 695-14, les renseignements énumérés à l'article 695-13.
« Pour le cas mentionné au 3° de l'article 695-17, elle est accompagnée d'un procès-verbal judiciaire consignant les déclarations faites par la personne remise concernant l'infraction pour laquelle le consentement de l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'exécution est demandé.
« Art. 695-20. - I. - Lorsque le ministère public qui a émis le mandat d'arrêt européen a obtenu la remise de la personne recherchée, celle-ci ne peut, sans le consentement de l'Etat membre d'exécution, être remise à un autre Etat membre en vue de l'exécution d'une peine ou d'une mesure de sûreté privatives de liberté pour un fait quelconque antérieur à la remise et différent de l'infraction qui a motivé cette mesure, sauf dans l'un des cas suivants :
« 1° Lorsque la personne ne bénéficie pas de la règle de la spécialité conformément aux 1° à 4° de l'article 695-17 ;
« 2° Lorsque la personne accepte expressément, après sa remise, d'être livrée à un autre Etat membre dans les conditions prévues à l'article 695-18 ;
« 3° Lorsque l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'exécution, qui a remis la personne, y consent expressément.
« II. - Lorsque le ministère public qui a délivré un mandat d'arrêt européen a obtenu la remise de la personne recherchée, celle-ci ne peut être extradée vers un Etat non membre de l'Union européenne sans le consentement de l'autorité compétente de l'Etat membre qui l'a remise.
« Section 3. « Dispositions relatives à l'exécution d'un mandat d'arrêt européen décerné par les juridictions étrangères.
« Paragraphe 1er. « Conditions d'exécution.
« Art. 695-21. _ Un signalement dans le Système d'information Schengen, accompagné des informations prévues à l'article 695-13, vaut mandat d'arrêt européen.
« Art. 695-22. _ L'exécution d'un mandat d'arrêt européen est refusée dans les cas suivants :
« 1° Si les faits pour lesquels il a été émis pouvaient être poursuivis et jugés par les juridictions françaises et que l'action publique est éteinte par l'amnistie ;
« 2° Si la personne recherchée a fait l'objet, par les autorités judiciaires françaises ou par celles d'un autre Etat membre que l'Etat d'émission ou par celles d'un Etat tiers, d'une décision définitive pour les mêmes faits que ceux faisant l'objet du mandat d'arrêt européen à condition, en cas de condamnation, que la peine ait été exécutée ou soit en cours d'exécution ou ne puisse plus être ramenée à exécution selon les lois de l'Etat de condamnation ;
« 3° Si la personne recherchée était âgée de moins de treize ans au moment des faits faisant l'objet du mandat d'arrêt européen ;
« 4° Si les faits pour lesquels il a été émis pouvaient être poursuivis et jugés par les juridictions françaises et que la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise ;
« 5° S'il est établi que ledit mandat d'arrêt a été émis dans le but de poursuivre ou de punir une personne en raison de son sexe, de sa race, de sa religion, de son origine ethnique, de sa nationalité, de sa langue, de ses opinions politiques ou de son orientation sexuelle, ou qu'il peut être porté atteinte à la situation de cette personne pour l'une de ces raisons.
« Art. 695-23. _ L'exécution d'un mandat d'arrêt européen est également refusée si le fait faisant l'objet dudit mandat d'arrêt ne constitue pas une infraction au regard de la loi française.
« Par dérogation au premier alinéa, un mandat d'arrêt européen est exécuté sans contrôle de la double incrimination des faits reprochés lorsque les agissements considérés sont, aux termes de la loi de l'Etat membre d'émission, punis d'une peine privative de liberté d'une durée égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement ou d'une mesure de sûreté privative de liberté d'une durée similaire et entrent dans l'une des catégories d'infractions suivantes :
« _ participation à une organisation criminelle ;
« _ terrorisme ;
« _ traite des êtres humains ;
« _ exploitation sexuelle des enfants et pornographie infantile ;
« _ trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes ;
« _ trafic illicite d'armes, de munitions et d'explosifs ;
« _ corruption ;
« _ fraude, y compris la fraude portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés européennes au sens de la convention du 26 juillet 1995 relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes ;
« _ blanchiment du produit du crime ;
« _ faux monnayage, y compris la contrefaçon de l'euro ;
« _ cybercriminalité ;
« _ crimes et délits contre l'environnement, y compris le trafic illicite d'espèces animales menacées, et le trafic illicite d'espèces et d'essences végétales menacées ;
« _ aide à l'entrée et au séjour irréguliers ;
« _ homicide volontaire, coups et blessures graves ;
« _ trafic illicite d'organes et de tissus humains ;
« _ enlèvement, séquestration et prise d'otage ;
« _ racisme et xénophobie ;
« _ vols organisés ou avec arme ;
« _ trafic illicite de biens culturels, y compris antiquités et oeuvres d'art ;
« _ escroquerie ;
« _ racket et extorsion de fonds ;
« _ contrefaçon et piratage de produits ;
« _ falsification de documents administratifs et trafic de faux ;
« _ falsification de moyens de paiement ;
« _ trafic illicite de substances hormonales et autres facteurs de croissance ;
« _ trafic illicite de matières nucléaires et radioactives ;
« _ trafic de véhicules volés ;
« _ viol ;
« _ incendie volontaire ;
« _ crimes et délits relevant de la compétence de la Cour pénale internationale ;
« _ détournement d'avion ou de navire ;
« _ sabotage.
« Lorsque les dispositions des deuxième à trente-quatrième alinéas sont applicables, la qualification juridique des faits et la détermination de la peine encourue relèvent de l'appréciation exclusive de l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission.
« En matière de taxes et d'impôts, de douane et de change, l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ne pourra être refusée au motif que la loi française n'impose pas le même type de taxes ou d'impôts ou ne contient pas le même type de réglementation en matière de taxes, d'impôts, de douane et de change que la loi de l'Etat membre d'émission.
« Art. 695-24. _ L'exécution d'un mandat d'arrêt européen peut être refusée :
« 1° Si, pour les faits faisant l'objet du mandat d'arrêt, la personne recherchée fait l'objet de poursuites devant les juridictions françaises ou si celles-ci ont décidé de ne pas engager les poursuites ou d'y mettre fin ;
« 2° Si la personne recherchée pour l'exécution d'une peine ou d'une mesure de sûreté privatives de liberté est de nationalité française et que les autorités françaises compétentes s'engagent à faire procéder à cette exécution ;
« 3° Si les faits pour lesquels il a été émis ont été commis, en tout ou en partie, sur le territoire français ;
« 4° Si l'infraction a été commise hors du territoire de l'Etat membre d'émission et que la loi française n'autorise pas la poursuite de l'infraction lorsqu'elle est commise hors du territoire national.
« Art. 695-25. _ Tout refus d'exécuter un mandat d'arrêt européen doit être motivé.
« Paragraphe 2. « Procédure d'exécution.
« Art. 695-26. _ Dans le cas où la personne recherchée se trouve en un lieu connu sur le territoire national, le mandat d'arrêt émanant d'un Etat membre de l'Union européenne est adressé directement, en original ou en copie certifiée conforme par tout moyen laissant une trace écrite, au procureur général territorialement compétent qui l'exécute après s'être assuré de la régularité de la requête. Dans les autres cas, le mandat d'arrêt européen est exécuté au vu de la transmission effectuée dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 695-16.
« Si le procureur général auquel un mandat d'arrêt européen a été adressé estime qu'il n'est pas territorialement compétent pour y donner suite, il le transmet au procureur général territorialement compétent et en informe l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission.
« A titre transitoire, jusqu'au moment où le Système d'information Schengen aura la capacité de transmettre toutes les informations visées à l'article 695-13, un signalement effectué conformément aux dispositions de l'article 95 de la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes du 19 juin 1990 vaut mandat d'arrêt européen en attendant la réception, par le procureur général près la cour d'appel dans le ressort de laquelle la personne recherchée a été arrêtée, de l'original en bonne et due forme ou d'une copie certifiée conforme. Cet original ou sa copie certifiée conforme doit parvenir, au plus tard, six jours ouvrables après la date de l'arrestation de la personne recherchée, faute de quoi l'intéressé est, à moins qu'il ne soit détenu pour une autre cause, remis d'office en liberté. La mise en liberté ne s'oppose pas à une nouvelle arrestation et à la remise si un mandat d'arrêt européen parvient ultérieurement.
« Dans le cas où la personne recherchée bénéficie d'un privilège ou d'une immunité en France, le procureur général territorialement compétent en demande sans délai la levée aux autorités françaises compétentes. Si les autorités françaises ne sont pas compétentes, la demande de levée est laissée aux soins de l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission.
« Dans le cas où la personne recherchée a déjà été remise à la France à titre extraditionnel par un autre Etat sous la protection conférée par le principe de spécialité, le procureur général territorialement compétent prend toutes les mesures nécessaires pour s'assurer du consentement de cet Etat.
« Art. 695-27. _ Toute personne appréhendée en exécution d'un mandat d'arrêt européen doit être conduite dans les quarante-huit heures devant le procureur général territorialement compétent. Dans ce délai, elle bénéficie des droits garantis par les articles 63-1 à 63-5.
« Après avoir vérifié l'identité de cette personne, le procureur général l'informe, dans une langue qu'elle comprend, de l'existence et du contenu du mandat d'arrêt européen dont elle fait l'objet. Il l'avise également qu'elle peut être assistée par un avocat de son choix ou, à défaut, par un avocat commis d'office par le bâtonnier de l'ordre des avocats, informé sans délai et par tout moyen. Il l'avise de même qu'elle peut s'entretenir immédiatement avec l'avocat désigné.
« Mention de ces informations est faite, à peine de nullité de la procédure, au procès-verbal.
« L'avocat peut consulter sur-le-champ le dossier et communiquer librement avec la personne recherchée.
« Art. 695-28. _ Le procureur général notifie ensuite à la personne recherchée, dans une langue qu'elle comprend, le mandat d'arrêt européen délivré à son encontre ou, s'il y a lieu, le signalement dans le Système d'information Schengen la concernant accompagné des informations prévues à l'article 95 de la convention visée au troisième alinéa de l'article 695-26, et l'informe de sa faculté de consentir ou de s'opposer à sa remise à l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission ainsi que des conséquences juridiques résultant de ce consentement. Il l'informe également qu'elle peut renoncer à la règle de la spécialité.
« Lorsque la personne réclamée a demandé l'assistance d'un avocat et que celui-ci a été dûment appelé, le procureur général reçoit les déclarations de celle-ci et de son conseil, dont il est dressé procès-verbal.
« Le procureur général ordonne l'incarcération de la personne recherchée, à moins qu'il n'estime que sa représentation à tous les actes de la procédure est suffisamment garantie.
« Il en avise sans délai le ministre de la justice et lui adresse une copie du mandat d'arrêt.
« Paragraphe 3. « Comparution devant la chambre de l'instruction.
« Art. 695-29. _ La chambre de l'instruction est immédiatement saisie de la procédure. La personne recherchée comparaît devant elle dans un délai de cinq jours ouvrables à compter de la date de sa présentation au procureur général.
« Art. 695-30. _ Lors de la comparution de la personne recherchée, la chambre de l'instruction constate son identité et recueille ses déclarations, dont il est dressé procès-verbal.
« L'audience est publique, sauf si la publicité est de nature à nuire au bon déroulement de la procédure en cours, aux intérêts d'un tiers ou à la dignité de la personne.
« Le ministère public et la personne recherchée sont entendus, cette dernière assistée, le cas échéant, de son avocat et, s'il y a lieu, en présence d'un interprète.
« La chambre de l'instruction peut, par une décision qui n'est susceptible d'aucun recours, autoriser l'Etat membre d'émission à intervenir à l'audience par l'intermédiaire d'une personne habilitée par ledit Etat à cet effet. Lorsque l'Etat membre d'émission est autorisé à intervenir, il ne devient pas partie à la procédure.
« Art. 695-31. _ Si, lors de sa comparution, la personne recherchée déclare consentir à sa remise, la chambre de l'instruction l'informe des conséquences juridiques de son consentement et de son caractère irrévocable.
« Lorsque la personne réclamée maintient son consentement à la remise, la chambre de l'instruction lui demande si elle entend renoncer à la règle de la spécialité, après l'avoir informée des conséquences juridiques d'une telle renonciation. Le consentement de la personne recherchée à être remise à l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission et, le cas échéant, sa renonciation à la règle de la spécialité sont recueillis lors de l'audience.
« Si la chambre de l'instruction constate que les conditions légales d'exécution du mandat d'arrêt européen sont remplies, elle rend un arrêt par lequel elle donne acte à la personne recherchée de son consentement à être remise ainsi que, le cas échéant, de sa renonciation à la règle de la spécialité et accorde la remise. La chambre de l'instruction statue, sauf si un complément d'information a été ordonné dans les conditions énoncées au premier alinéa de l'article 695-32, dans les dix jours de la comparution devant elle de la personne réclamée. Cette décision n'est pas susceptible de recours.
« Si la personne recherchée déclare ne pas consentir à sa remise, la chambre de l'instruction statue par une décision motivée dans le délai de vingt jours à compter de la date de sa comparution, sauf si un complément d'information a été ordonné dans les conditions énoncées au premier alinéa de l'article 659-33. Cette décision peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation, par le procureur général ou par la personne recherchée, dans les conditions énoncées aux articles 568-1 et 574-2.
« Lorsqu'elle revêt un caractère définitif, la décision de la chambre de l'instruction est notifiée par tout moyen et sans délai à l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission par les soins du procureur général.
« Art. 695-32. _ L'exécution d'un mandat d'arrêt européen peut être subordonnée à la vérification de la faculté pour la personne recherchée :
« 1° De former opposition dans l'Etat membre d'émission à la décision rendue en son absence ainsi que d'être jugée en sa présence, lorsqu'elle n'a pas été citée à personne ni autrement informée de la date et du lieu de l'audience sur le fondement de laquelle le mandat d'arrêt européen a été délivré ;
« 2° D'être renvoyée en France dont elle est ressortissante pour y subir la peine ou la mesure de sûreté qui sera éventuellement prononcée par l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission pour les faits faisant l'objet du mandat d'arrêt.
« Art. 695-33. _ Si la chambre de l'instruction estime que les informations communiquées par l'Etat membre d'émission dans le mandat d'arrêt européen sont insuffisantes pour lui permettre de statuer sur la remise, elle demande à l'autorité judiciaire dudit Etat la fourniture, dans le délai maximum de dix jours pour leur réception, des informations complémentaires nécessaires.
« Dans le cas où la personne recherchée bénéficie d'un privilège ou d'une immunité en France, les délais mentionnés aux troisième et quatrième alinéas de l'article 695-31 ne commencent à courir qu'à compter du jour où l'autorité judiciaire française a été informée de sa levée.
« Dans le cas où le consentement d'un autre Etat s'avère nécessaire dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article 695-26, les délais visés à l'article 695-31 ne commencent à courir qu'à compter du jour où l'autorité judiciaire française a été informée de la décision de cet Etat.
« Art. 695-34. _ La mise en liberté peut être demandée à tout moment à la chambre de l'instruction selon les formes prévues aux articles 148-6 et 148-7.
« Lors de toute demande de mise en liberté, la personne réclamée fait connaître à la chambre de l'instruction l'avocat qu'elle a choisi ou qui a été commis d'office par le bâtonnier de l'ordre des avocats, qui recevra les actes qui lui sont destinés.
« L'avocat de la personne recherchée est convoqué, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, quarante-huit heures au moins avant la date de l'audience. La chambre de l'instruction statue par décision motivée après avoir entendu le ministère public ainsi que la personne recherchée ou son avocat, dans les plus brefs délais et au plus tard dans les quinze jours de la réception de la demande, par un arrêt rendu en audience publique. Toutefois, lorsque la personne recherchée n'a pas encore comparu devant la chambre de l'instruction, les délais précités ne commencent à courir qu'à compter de la première comparution devant cette juridiction.
« La chambre de l'instruction peut également, lorsqu'elle ordonne la mise en liberté de la personne recherchée et à titre de mesure de sûreté, astreindre l'intéressé à se soumettre à une ou plusieurs des obligations énumérées à l'article 138.
« Quand la mise en liberté est prononcée, la personne recherchée est avisée que toute notification ou signification faite à son avocat sera réputée lui être délivrée. Mention de cet avis, ainsi que du nom et de l'adresse de l'avocat désigné, est portée sur l'arrêt rendu.
« Art. 695-35. _ La mainlevée ou la modification du contrôle judiciaire peut être ordonnée à tout moment par la chambre de l'instruction, soit d'office, soit sur les réquisitions du procureur général, soit à la demande de la personne recherchée après avis du procureur général.
« L'audience est publique, sauf si la publicité de l'audience est de nature à nuire au bon déroulement de la procédure en cours, aux intérêts d'un tiers ou à la dignité de la personne.
« Le ministère public et la personne réclamée sont entendus, cette dernière assistée, le cas échéant, de son avocat et, s'il y a lieu, en présence d'un interprète.
« La chambre de l'instruction statue, dans les quinze jours de sa saisine, par un arrêt motivé rendu en audience publique.
« Art. 695-36. _ Si la personne recherchée se soustrait volontairement aux obligations du contrôle judiciaire ou si, après avoir bénéficié d'une mise en liberté non assortie du contrôle judiciaire, il apparaît qu'elle entend manifestement se dérober à l'exécution d'un mandat d'arrêt européen, la chambre de l'instruction peut, sur les réquisitions du ministère public, décerner mandat d'arrêt à son encontre par décision motivée rendue en audience publique.
« Lorsque l'intéressé a été appréhendé, l'affaire doit venir à la première audience publique ou au plus tard dans les dix jours de sa mise sous écrou.
« La chambre de l'instruction confirme, s'il y a lieu, la révocation du contrôle judiciaire et ordonne l'incarcération de l'intéressé, par décision motivée rendue en audience publique.
« Le ministère public et la personne réclamée sont entendus, cette dernière assistée, le cas échéant, de son avocat et, s'il y a lieu, en présence d'un interprète.
« Le dépassement du délai mentionné au deuxième alinéa entraîne la mise en liberté d'office de l'intéressé.
« Paragraphe 4. « Remise de la personne recherchée.
« Art. 695-37. _ Le procureur général prend les mesures nécessaires afin que la personne recherchée soit remise à l'autorité judiciaire requérante au plus tard dans les dix jours suivant la date de la décision définitive de la chambre de l'instruction.
« Si la personne recherchée est en liberté lorsque la décision de la chambre de l'instruction autorisant la remise est prononcée, le procureur général peut ordonner l'arrestation de l'intéressé et son placement sous écrou. Lorsque celui-ci a été appréhendé, le procureur général donne avis de cette arrestation, sans délai, à l'autorité judiciaire de l'Etat d'émission.
« Si la personne recherchée ne peut être remise dans le délai de dix jours pour un cas de force majeure, le procureur général en informe immédiatement l'autorité judiciaire requérante et convient avec elle d'une nouvelle date de remise. La personne recherchée est alors remise au plus tard dans les dix jours suivant la nouvelle date ainsi convenue.
« A l'expiration des délais visés au premier alinéa ou dans la deuxième phrase du troisième alinéa, si la personne recherchée se trouve toujours en détention, elle est, sauf application du premier alinéa de l'article 695-39, remise d'office en liberté.
« Art. 695-38. _ Les dispositions de l'article 695-37 ne font pas obstacle à ce que la chambre de l'instruction puisse surseoir temporairement à la remise pour des raisons humanitaires sérieuses, en particulier si la remise de la personne recherchée est susceptible d'avoir pour elle des conséquences d'une gravité exceptionnelle en raison notamment de son âge ou de son état de santé.
« Le procureur général en informe alors immédiatement l'autorité judiciaire d'émission et convient avec elle d'une nouvelle date de remise. La personne recherchée est alors remise au plus tard dans les dix jours suivant la nouvelle date convenue.
« A l'expiration du délai visé dans la deuxième phrase du deuxième alinéa, si la personne recherchée se trouve toujours en détention, elle est, sauf application du premier alinéa de l'article 695-39, remise d'office en liberté.
« Art. 695-39. _ Lorsque la personne recherchée est poursuivie en France ou y a déjà été condamnée et doit y purger une peine en raison d'un fait autre que celui visé par le mandat d'arrêt européen, la chambre de l'instruction peut, après avoir statué sur l'exécution du mandat d'arrêt, différer la remise de l'intéressé. Si tel en est le cas, le procureur général en avise immédiatement l'autorité judiciaire d'émission.
« La chambre d'instruction peut également décider la remise temporaire de la personne recherchée. Le procureur général en informe immédiatement l'autorité judiciaire d'émission et convient avec elle, par écrit, des conditions et des délais de la remise.
« Art. 695-40. _ Lors de la remise, le procureur général mentionne la durée de la détention subie sur le territoire national du fait de l'exécution d'un mandat d'arrêt européen.
« Paragraphe 5. « Cas particuliers.
« Art. 695-41. _ Lors de l'arrestation de la personne recherchée, il est procédé, à la demande de l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission, à la saisie, dans les formes prévues par l'article 56, par le premier alinéa de l'article 56-1, par les articles 56-2, 56-3 et 57 et par le premier alinéa de l'article 59, des objets :
« 1° Qui peuvent servir de pièces à conviction, ou
« 2° Qui ont été acquis par la personne recherchée du fait de l'infraction.
« Lorsqu'elle statue sur la remise de la personne recherchée, la chambre de l'instruction ordonne la remise des objets saisis en application des 1° et 2°, le cas échéant, après avoir statué sur une contestation formulée en vertu des dispositions du deuxième alinéa de l'article 56-1 du code de procédure pénale.
« Cette remise peut avoir lieu même si le mandat d'arrêt européen ne peut être exécuté par suite de l'évasion ou du décès de la personne recherchée.
« La chambre de l'instruction peut, si elle le juge nécessaire pour une procédure pénale suivie sur le territoire national, retenir temporairement ces objets ou les remettre sous condition de restitution.
« Sont toutefois réservés les droits que l'Etat français ou des tiers auraient acquis sur ces objets. Si de tels droits existent, ces objets sont rendus le plus tôt possible et sans frais à l'Etat français à la fin des poursuites exercées sur le territoire de l'Etat d'émission.
« Art. 695-42. _ Lorsque plusieurs Etats membres ont émis un mandat d'arrêt européen à l'encontre de la même personne, que ce soit pour le même fait ou pour des faits différents, le choix du mandat d'arrêt européen à exécuter est opéré par la chambre de l'instruction, le cas échéant, après consultation de l'unité Eurojust, compte tenu de toutes les circonstances et notamment du degré de gravité et du lieu de commission des infractions, des dates respectives des mandats d'arrêt européens, ainsi que du fait que le mandat d'arrêt a été émis pour la poursuite ou pour l'exécution d'une peine ou d'une mesure de sûreté privative de liberté.
« En cas de conflit entre un mandat d'arrêt européen et une demande d'extradition présentée par un Etat tiers, la chambre de l'instruction décide de la priorité compte tenu de toutes les circonstances, notamment celles visées au premier alinéa et celles figurant dans la convention ou dans l'accord applicable.
« Art. 695-43. _ Lorsque, dans des cas spécifiques et en particulier si, consécutivement à un pourvoi en cassation, le mandat d'arrêt européen ne peut être exécuté dans le délai de soixante jours à compter de l'arrestation de la personne recherchée, le procureur général près la cour d'appel concernée en informe immédiatement l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission, en lui en indiquant les raisons.
« Lorsque, dans des circonstances exceptionnelles et en particulier si, consécutivement à une cassation avec renvoi, la décision définitive sur l'exécution du mandat d'arrêt européen n'a pas été prise dans le délai de quatre-vingt-dix jours à compter de la date de l'arrestation de la personne recherchée, le procureur général près la cour d'appel concernée en informe le ministre de la justice qui, à son tour, en avise Eurojust, en précisant les raisons du retard.
« Après un arrêt de cassation avec renvoi, la chambre de l'instruction à laquelle la cause est renvoyée statue dans les vingt jours à compter du prononcé de l'arrêt de la Cour de cassation. Cette chambre connaît des éventuelles demandes de mise en liberté formées par la personne réclamée.
« Art. 695-44. _ Lorsque le mandat d'arrêt européen a été émis pour l'exercice de poursuites pénales, la chambre de l'instruction accède à toute demande d'audition de la personne recherchée présentée par l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission.
« La personne recherchée ne peut être entendue ou interrogée, à moins qu'elle n'y renonce expressément, qu'en présence de son avocat ou ce dernier dûment appelé.
« L'avocat de la personne recherchée est convoqué au plus tard cinq jours ouvrables avant la date de l'audience, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, télécopie avec récépissé ou verbalement avec émargement au dossier de la procédure.
« L'audition de l'intéressé est conduite, en présence s'il y a lieu d'un interprète, par le président de la chambre de l'instruction, assisté d'une personne habilitée à cet effet par l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission.
« Mention de ces informations est faite au procès-verbal qui est aussitôt transmis à l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission.
« Art. 695-45. _ La chambre de l'instruction peut également, lorsque cela est possible et que la personne recherchée y consent, accepter le transfèrement temporaire de cette dernière selon les formes prévues aux articles 695-28 et 695-29, aux premier à troisième alinéas de l'article 695-30, et au dernier alinéa de l'article 695-31, à charge pour l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission de la renvoyer pour assister aux audiences la concernant.
« La décision est rendue à l'audience. Elle est immédiatement exécutoire.
« Art. 695-46. _ La chambre de l'instruction, devant laquelle la personne réclamée avait comparu, est saisie de toute demande émanant des autorités compétentes de l'Etat membre d'émission en vue de consentir à des poursuites pour d'autres infractions que celles ayant motivé la remise.
« La chambre de l'instruction est également compétente pour statuer, après la remise de la personne recherchée, sur toute demande des autorités compétentes de l'Etat membre d'émission en vue de consentir à la remise de la personne réclamée à un autre Etat membre en vue de l'exécution d'une peine ou d'une mesure de sûreté privatives de liberté pour un fait quelconque antérieur à la remise et différent de l'infraction qui a motivé cette mesure.
« Dans les deux cas, un procès-verbal judiciaire consignant les déclarations faites par la personne remise est également transmis par les autorités compétentes de l'Etat membre d'émission et soumis à la chambre de l'instruction. Ces déclarations peuvent, le cas échéant, être complétées par les observations faites par un avocat de son choix ou, à défaut, commis d'office par le bâtonnier de l'ordre des avocats.
« La chambre de l'instruction statue sans recours, par une décision motivée, après s'être assurée que la demande comporte aussi les renseignements prévus à l'article 695-13 et avoir, le cas échéant, obtenu des garanties au regard des dispositions de l'article 695-32, dans le délai de trente jours à compter de la réception de la demande.
« Le consentement est donné lorsque les agissements pour lesquels il est demandé constituent l'une des infractions visées à l'article 695-23, et entrent dans le champ d'application de l'article 695-12.
« Le consentement est refusé pour l'un des motifs visés aux articles 695-22 et 695-23 et peut l'être pour l'un de ceux mentionnés à l'article 695-24.
« Section 4. « Transit.
« Art. 695-47. _ Le ministre de la justice autorise le transit à travers le territoire français d'une personne recherchée en vertu d'un mandat d'arrêt européen.
« Lorsque la personne recherchée est de nationalité française, l'autorisation peut être subordonnée à la condition qu'elle soit, après avoir été entendue, renvoyée sur le territoire national pour y subir la peine ou la mesure de sûreté privatives de liberté qui sera éventuellement prononcée à son encontre par l'autorité judiciaire de l'Etat membre d'émission pour les faits faisant l'objet du mandat d'arrêt.
« Lorsque la personne recherchée est de nationalité française et que le mandat d'arrêt européen a été émis pour l'exécution d'une peine, le transit est refusé.
« Art. 695-48. _ La demande d'autorisation de transit est accompagnée des renseignements suivants :
« _ l'identité et la nationalité de la personne recherchée ;
« _ l'indication de l'existence d'un mandat d'arrêt européen ;
« _ la nature et la qualification légale de l'infraction ;
« _ la date, le lieu et les circonstances dans lesquels l'infraction a été commise ainsi que le degré de participation à celle-ci de la personne recherchée.
« Art. 695-49. _ La demande d'autorisation de transit ainsi que les renseignements prévus à l'article 645-48 sont transmis au ministre de la justice par tout moyen permettant d'en conserver une trace écrite. Celui-ci fait connaître sa décision par le même procédé.
« Art. 695-50. _ Il est fait application des dispositions des articles 695-47 à 695-49 en cas d'utilisation de la voie aérienne lorsqu'un atterrissage est prévu sur le territoire national ou en cas d'atterrissage fortuit.
« Art. 695-51. _ Les dispositions des articles 695-47 à 695-50 sont applicables aux demandes de transit présentées par un Etat membre de l'Union européenne pour l'extradition vers son territoire d'une personne en provenance d'un Etat non membre de l'Union européenne. »
La parole est à M. Pierre Fauchon.
M. Pierre Fauchon. Il s'agit du mandat d'arrêt européen. Les questions relatives au mandat d'arrêt international ne peuvent laisser indifférents un certain nombre d'entre nous qui se souviennent que le Tour du monde en quatre-vingts jours n'aurait pas existé si Phileas Fogg avait pu être arrêté par un mandat d'arrêt international dès son escale au Caire.
M. Jean Chérioux. Comme lecteur de Jules Verne, je suis d'accord ! (Sourires.)
M. Pierre Fauchon. Mais cela ne nous empêche pas de considérer comme un progrès décisif ce qui résulte de la décision-cadre sur l'Union européenne qui est intervenue voilà quelques mois et qui établit ce qu'il est convenu d'appeler un mandat d'arrêt européen.
Je ne suis pas l'auteur de ces dispositions, mais je les présente en coopération avec le ministère de la justice car, en vertu des conventions, le 1er janvier prochain, aucune procédure d'extradiction ne sera plus utilisable. Le dispositif du mandat d'arrêt européen doit donc absolument être transposé dans notre droit dans les mois à venir. Je rappelle que les dispositions constitutionnelles nécessaires ont été prises au mois de mars dernier, à Versailles, pour que cette transposition ne pose pas de problème par rapport à notre Constitution.
Cela dit, le texte est d'une complexité assez grande, car la décision-cadre est elle-même extrêmement compliquée ; c'est le résultat des négociations. On peut le déplorer, mais les choses sont ainsi, et il n'y a pas moyen de les faire progresser avec des textes simples et qui paraîtraient trop sommaires.
Je n'entrerai pas dans le détail de cette complexité, à moins que l'un ou l'autre d'entre vous ne m'interroge. Je me contenterai de mettre en évidence les points positifs et les réserves.
Ce qui est essentiellement positif, c'est que les procédures d'extradition comportent un double contrôle : un contrôle judiciaire et un contrôle gouvernemental. Évidemment, ces deux contrôles ne répondent pas toujours aux mêmes préoccupations ni aux mêmes priorités, et elles donnent lieu, parfois, à ces difficultés qui défraient régulièrement la chronique. Cette fois-ci, seule l'action de l'autorité judiciaire subsiste et c'est un progrès très important.
Mais il est un autre progrès. Traditionnellement, en effet, dans notre système français, on ne peut extrader que si le fait à l'origine des poursuites est réprimé en France comme il l'est dans le pays requérant. C'est ce que l'on appelle l'exigence de la double incrimination, parfaitement légitime au demeurant. Je cite, par exemple, l'avortement, qui est un délit dans certains pays, alors qu'il ne l'est pas dans notre droit.
Or cette double incrimination ne pourra être invoquée pour refuser l'application du mandat d'arrêt européen pour un certain nombre - la liste est assez longue - de crimes et de délits, liste qui couvre effectivement les cas les plus graves et ceux pour lesquels il est pleinement justifié de recourir à une procédure d'arrestation transfrontalière européenne.
Il est peut-être un peu regrettable que l'autorité judiciaire du pays requis conserve la capacité de mettre en liberté la personne une fois qu'il a été procédé à l'arrestation demandée. Il est encore plus choquant que l'Etat requis ne soit même pas obligé de consulter l'Etat requérant - il peut le faire s'il le veut, mais il n'y est pas obligé - pour décider, en vertu de critères qui lui sont propres, de mettre en liberté la personne qui a été arrêtée, cela lorsqu'il considère, selon une formule un peu trop générale pour être considérée comme tout à fait fiable, que cette personne « présente des garanties de représentation suffisantes ». Il est évident que c'est là étendre beaucoup la marge d'appréciation des juridictions de l'Etat requis.
La question se pose de savoir s'il sera fait un usage raisonnable, c'est-à-dire exceptionnel, de cette « échappatoire » ou si, au contraire, il en sera fait un usage fréquent ; seule la pratique nous le dira.
J'ai un autre regret. Normalement, dès lors que l'on s'est doté d'un système de mandat d'arrêt européen, c'est-à-dire d'un élément de l'espace judiciaire européen en tant que commun aux Etats membres, une priorité à l'exécution du mandat d'arrêt européen devrait être automatique. Ainsi, toute demande d'extradition émanant d'un Etat étranger à l'Union devrait être examinée subsidiairement, le mandat d'arrêt européen devant être exécuté d'abord, cela paraît évident.
En réalité, cette priorité n'a pu être obtenue, ce que nous regrettons, du fait, disons-le clairement, des événements du 11 septembre 2001 et de la pression exercée par les Etats-Unis sur les Etats européens pour obtenir des extraditions.
Malgré ces quelques réserves, il n'en demeure pas moins que l'existence même de cette décision-cadre, le fait qu'elle est en train d'être transposée en droit interne constituant une manifestation concrète, un signe tout à fait important et dont on peut espérer - parce que les magistrats, autant qu'on puisse le savoir, attendent cette mesure et sont prêts à la mettre en application - une avancée assez importante dans le domaine de la construction de l'espace judiciaire européen.
C'est dans cette perspective que je vous propose d'adopter ces dispositions.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. La commission considère que la démarche de notre excellent collègue Pierre Fauchon est tout à fait opportune, puisqu'elle s'inscrit parfaitement dans la philosophie du présent projet de loi, qui propose une refonte, une modernisation du régime de l'entraide judiciaire internationale.
Cette proposition a également le grand mérite d'éviter que la France ne se fasse remarquer en prenant du retard dans la transposition en droit interne de la décision-cadre ; il a été rappelé que nous devrions y procéder avant le 1er janvier 2004.
Je précise que la commission émettra le même avis favorable au sujet des amendements de coordination n°s 274, 280 et 281. Nous saluons encore cette excellente initiative.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement est très favorable à l'amendement n° 273. Je voudrais d'ailleurs remercier M. Pierre Fauchon du travail qu'il a effectué. Celui-ci nous permettra, après la réforme constitutionnelle que vous avez approuvée en Congrès il y a quelques mois, d'être au rendez-vous le 1er janvier 2004. C'est en effet, monsieur le sénateur, une étape significative dans la construction de l'espace judiciaire européen. Elle est très attendue par nos concitoyens, ainsi que par l'ensemble des citoyens des pays de l'Union européenne, qui désirent que la construction européenne se manifeste effectivement dans la vie quotidienne.
M. Jean-Claude Carle. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. Je salue également l'initiative, peut-être un peu provoquée, mais heureusement provoquée, de notre ami Pierre Fauchon s'agissant de l'inscription dans notre droit national de dispositions nécessaires à la mise en oeuvre du mandat d'arrêt européen. Nous avions eu, M. Fauchon et moi-même, l'occasion de longuement traiter de ce sujet dans le cadre des travaux de la délégation du Sénat pour l'Union européenne.
Je serai très clair et très ferme : c'est un grand progrès, un progrès tout à fait nécessaire.
On parle, à juste titre, de lutte contre la criminalité organisée internationale. En Europe, aujourd'hui, la grande criminalité, dans ses aspects les plus brutaux, qu'il s'agisse du trafic des stupéfiants, de la traite des êtres humains ou du trafic d'armes, revêt un caractère international. Il en va de même, d'ailleurs, en ce qui concerne les très grands délits financiers.
On ne peut donc que saluer la naissance du mandat d'arrêt européen dans la mesure où il aboutit à simplifier considérablement les étapes de la procédure et à unifier l'espace judiciaire européen autour de mêmes dispositions. C'est un pas en avant très important dans la constitution de l'espace judiciaire européen. Je rejoins sur ce point M. le garde des sceaux, car, pour les gouvernements français qui se sont succédé, cela a toujours constitué une priorité. Je rappelle que ce texte a été défendu tout à fait fermement et à plusieurs reprises par Mme Lebranchu dans le cadre des différents conseils des ministres européens. Il est vrai que, çà et là, quelques interrogations subsistent, mais, par rapport à l'enjeu, ces critiques de détail, quelquefois d'ordre purement stylistique, sont de peu d'importance.
Pour moi, ce pas en avant en appelle d'autres. On ne le répétera jamais assez, la création de l'espace judiciaire européen, l'harmonisation des procédures, la reconnaissance des décisions d'une nation par une autre, d'une autorité judiciaire par une autre, le plus rapidement et le plus simplement possible, tout cela donne à l'action judiciaire de l'Union européenne de la cohésion tout en faisant prendre conscience aux magistrats comme aux avocats et, au-delà, aux justiciables, que l'Union européenne est véritablement un espace de liberté, de sécurité et de justice, pour reprendre les termes mêmes du projet de Constitution.
C'est par des initiatives comme celle-là que nous ferons mieux prendre conscience de cette unité européenne. Qu'il me soit permis de terminer en soulignant que l'oeuvre, à cet égard, est loin d'être achevée.
Les Français qui ont participé aux travaux de la Convention pour l'élaboration du projet de Constitution européenne, tous unis, n'ont cessé de réclamer la création du parquet européen. Cette demande n'a pu aboutir en raison de certaines traditions nationales, notamment - pourquoi ne pas le dire ? - de la réaction de nos amis Britanniques qui considèrent, hélas ! que, de l'autre côté de la Manche, commence peut-être une forme de sous-civilisation judiciaire, préjugé dont je souhaite que nous arrivions à les libérer.
Disons-le : c'est dans cette direction qu'il faut aller. Pour notre part, nous ne cesserons jamais de le soutenir.
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote.
M. Robert Bret. Cet amendement a pour objet d'insérer dans le code de procédure pénale des dispositions permettant l'application par la France de la décision-cadre du 13 juin 2003 relative au mandat d'arrêt européen.
Lors de l'examen du projet de loi constitutionnelle au Sénat, puis lors de la réunion du Congrès à Versailles, en mars dernier, notre groupe avait pris fermement position contre le mandat d'arrêt européen.
En effet, ce dispositif n'est pas sans poser des problèmes. Il est, certes, nécessaire de lutter contre les réseaux transnationaux, en particulier terroristes, mais ce nouvel outil européen s'appliquera le plus souvent sans garanties procédurales claires en contrepartie.
Je ne sais pas s'il s'agit d'un détail, monsieur Badinter, car les risques de dérive ne sont pas négligeables, et il convient de les mesurer.
A une harmonisation des droits pénaux au plan européen, on a préféré des procédures répressives et expéditives au détriment des droits fondamentaux. Nous le regrettons sincèrement, et nous ne sommes pas les seuls, tant en France que dans le reste de l'Europe. Aussi, nous continuerons de défendre cette position et voterons contre cet amendement.
M. Emmanuel Hamel. Et vous aurez raison !
M. le président. La parole est à M. Pierre Fauchon, pour explication de vote.
M. Pierre Fauchon. Je suggère à notre collègue M. Bret de relire avec attention l'amendement en discussion : il verra ainsi que, contrairement à ce qu'il vient d'affirmer avec une assurance qui m'a surpris, des quantités de précautions procédurales figurent dans ce texte. On peut même se demander s'il n'y en a pas un peu trop !
J'ai rappelé, notamment, que l'autorité judiciaire requise peut décider toute seule de la mise en liberté si elle considère que, l'individu présentant des garanties de représentation, les voies de recours habituelles dans chaque pays sont utilisables. Dans de fort nombreux cas, bien entendu, il sera impossible d'extrader, notamment lorsqu'il y aura des raisons de penser que la poursuite est inspirée par des préoccupations à caractère raciste.
Mon cher collègue, je me permets donc de vous dire que votre critique n'est pas justifiée.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 273.
M. Emmanuel Hamel. Je vote contre !
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 62, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Compléter in fine le texte proposé par le paragraphe I de cet article pour le titre X du livre IV du code de procédure pénale par un chapitre additionnel ainsi rédigé :
« Chapitre IV. « De l'extradition.
« Art. 696. _ En l'absence de convention internationale en stipulant autrement, les conditions, la procédure et les effets de l'extradition sont déterminés par les dispositions du présent chapitre. Ces dispositions s'appliquent également aux points qui n'auraient pas été réglementés par les conventions internationales.
« Section 1. « Des conditions de l'extradition.
« Art. 696-1. _ Aucune remise ne pourra être faite à un gouvernement étranger de personnes n'ayant pas été l'objet de poursuites ou d'une condamnation pour une infraction prévue par la présente section.
« Art. 696-2. _ Le gouvernement français peut remettre, sur leur demande, aux gouvernements étrangers, toute personne n'ayant pas la nationalité française qui, étant l'objet d'une poursuite intentée au nom de l'Etat requérant ou d'une condamnation prononcée par ses tribunaux, est trouvée sur le territoire de la République.
« Néanmoins, l'extradition n'est accordée que si l'infraction cause de la demande, a été commise :
« _ soit sur le territoire de l'Etat requérant par un sujet de cet Etat ou par un étranger ;
« _ soit en dehors de son territoire par un sujet de cet Etat ;
« _ soit en dehors de son territoire par une personne étrangère à cet Etat, quand l'infraction est au nombre de celles dont la loi française autorise la poursuite en France, alors même qu'elles ont été commises par un étranger à l'étranger.
« Art. 696-3. _ Les faits qui peuvent donner lieu à l'extradition, qu'il s'agisse de la demander ou de l'accorder, sont les suivants :
« 1° Tous les faits punis de peines criminelles par la loi de l'Etat requérant ;
« 2° Les faits punis de peines correctionnelles par la loi de l'Etat requérant, quand le maximum de la peine d'emprisonnement encourue, aux termes de cette loi, est égal ou supérieure à deux ans, ou, s'il s'agit d'un condamné, quand la peine prononcée par la juridiction de l'Etat requérant est égale ou supérieure à deux mois d'emprisonnement.
« En aucun cas l'extradition n'est accordée par le gouvernement français si le fait n'est pas puni par la loi française d'une peine criminelle ou correctionnelle.
« Les faits constitutifs de tentative ou de complicité sont soumis aux règles précédentes, à condition qu'ils soient punissables d'après la loi de l'Etat requérant et d'après celle de l'Etat requis.
« Si la demande a pour objet plusieurs infractions commises par la personne réclamée et qui n'ont pas encore été jugées, l'extradition n'est accordée que si le maximum de la peine encourue, d'après la loi de l'Etat requérant, pour l'ensemble de ces infractions, est égal ou supérieur à deux ans d'emprisonnement.
« Si la personne réclamée a été antérieurement l'objet, en quelque pays que ce soit, d'une condamnation définitive à deux mois d'emprisonnement, ou plus, pour un délit de droit commun, l'extradition est accordée, suivant les règles précédentes, c'est-à-dire seulement pour les crimes ou délits, mais sans égard au taux de la peine encourue ou prononcée pour la dernière infraction.
« Les dispositions précédentes s'appliquent aux infractions de droit commun commises par des militaires.
« Art. 696-4. _ L'extradition n'est pas accordée :
« 1° Lorsque la personne réclamée a la nationalité française, cette dernière étant appréciée à l'époque de l'infraction pour laquelle l'extradition est requise ;
« 2° Lorsque le crime ou le délit a un caractère politique ou lorsqu'il résulte des circonstances que l'extradition est demandée dans un but politique ;
« 3° Lorsque les crimes ou délits ont été commis sur le territoire de la République ;
« 4° Lorsque les crimes ou délits, quoique commis hors du territoire de la République, y ont été poursuivis et jugés définitivement ;
« 5° Lorsque, d'après la loi de l'Etat requérant ou la loi française, la prescription de l'action s'est trouvée acquise antérieurement à la demande d'extradition, ou la prescription de la peine antérieurement à l'arrestation de la personne réclamée et d'une façon générale toutes les fois que l'action publique de l'Etat requérant est éteinte ;
« 6° Lorsque le fait à raison duquel l'extradition a été demandée est puni par la législation de l'Etat requérant d'une peine ou d'une mesure de sûreté contraire à l'ordre public français ;
« 7° Lorsque la personne réclamée serait jugée dans l'Etat requérant par un tribunal n'assurant pas les garanties fondamentales de procédure et de protection des droits de la défense.
« Art. 696-5. _ Si, pour une infraction unique, l'extradition est demandée concurremment par plusieurs Etats, elle est accordée de préférence à l'Etat contre les intérêts duquel l'infraction était dirigée, ou à celui sur le territoire duquel elle a été commise.
« Si les demandes concurrentes ont pour cause des infractions différentes, il est tenu compte, pour décider de la priorité, de toutes circonstances de fait, et, notamment de la gravité relative et du lieu des infractions, de la date respective des demandes, de l'engagement qui serait pris par l'un des Etats requérants de procéder à la réextradition.
« Art. 696-6. _ Sous réserve des exceptions prévues ci-après, l'extradition n'est accordée qu'à la condition que la personne extradée ne sera ni poursuivie, ni punie pour une infraction autre que celle ayant motivé l'extradition.
« Art. 696-7. _ Dans le cas où un étranger est poursuivi ou a été condamné en France, et où son extradition est demandée au gouvernement français à raison d'une infraction différente, la remise n'est effectuée qu'après que la poursuite est terminée, et, en cas de condamnation, après que la peine a été exécutée.
« Toutefois, cette disposition ne fait pas obstacle à ce que l'étranger puisse être envoyé temporairement pour comparaître devant les tribunaux de l'Etat requérant, sous la condition expresse qu'il sera renvoyé dès que la justice étrangère aura statué.
« Est régi par les dispositions du présent article le cas où l'étranger est soumis à la contrainte judiciaire par application des dispositions du titre VI du livre V du présent code.
« Section 2. « De la procédure d'extradition de droit commun.
« Art. 696-8. _ Sous réserve des dispositions du quatrième alinéa, toute demande d'extradition est adressée au gouvernement français par voie diplomatique et accompagnée, soit d'un jugement ou d'un arrêt de condamnation, même par défaut, soit d'un acte de procédure pénale décrétant formellement ou opérant de plein droit le renvoi de la personne poursuivie devant la juridiction répressive, soit d'un mandat d'arrêt ou de tout autre acte ayant la même force et décerné par l'autorité judiciaire, pourvu que ces derniers actes renferment l'indication précise du fait pour lequel ils sont délivrés et la date de ce fait.
« Les pièces ci-dessus mentionnées doivent être produites en original ou en expédition authentique. Le gouvernement requérant doit produire en même temps la copie des textes de loi applicables au fait incriminé. Il peut joindre un exposé des faits de la cause.
« Lorsque la demande d'extradition émane d'un Etat membre de l'Union européenne, la requête est adressée directement par les autorités compétentes de cet Etat au ministre de la justice, qui procède comme il est dit à l'article 696-9.
« Art. 696-9. _ La demande d'extradition est, après vérification des pièces, transmise, avec le dossier, par le ministre des affaires étrangères au ministre de la justice qui, après s'être assuré de la régularité de la requête, l'adresse au procureur général territorialement compétent. Celui-ci la transmet, pour exécution, au procureur de la République territorialement compétent.
« Art. 696-10. _ Toute personne appréhendée à la suite d'une demande d'extradition doit être déférée dans les vingt-quatre heures au procureur de la République. Dans ce délai, elle bénéficie des droits garantis par les articles 63-1 à 63-5.
« Après avoir vérifié l'identité de cette personne, ce magistrat l'informe, dans une langue qu'elle comprend, qu'elle fait l'objet d'une demande d'extradition et qu'elle comparaîtra, dans un délai de sept jours, devant le procureur général. Le procureur de la République l'avise également qu'elle pourra être assistée par un avocat de son choix ou, à défaut, par un avocat commis d'office par le bâtonnier de l'ordre des avocats, informé sans délai et par tout moyen. Il l'avise de même qu'elle pourra s'entretenir immédiatement avec l'avocat désigné.
« Mention de ces informations est faite, à peine de nullité de la procédure, au procès-verbal, qui est aussitôt transmis au procureur général.
« Le procureur de la République ordonne l'incarcération de la personne réclamée, à moins qu'il n'estime que sa représentation à tous les actes de la procédure est suffisamment garantie.
« Art. 696-11. _ Lorsque son incarcération a été ordonnée, la personne réclamée est transférée, s'il y a lieu, et placée sous écrou extraditionnel à la maison d'arrêt du siège de la cour d'appel dans le ressort de laquelle elle a été appréhendée.
« Le transfèrement doit avoir lieu dans un délai de quatre jours à compter de la présentation de la personne au procureur de la République.
« Art. 696-12. _ Les pièces produites à l'appui de la demande d'extradition sont transmises par le procureur de la République au procureur général. Dans le délai de sept jours mentionné au deuxième alinéa de l'article 696-10, le procureur général notifie à la personne réclamée, dans une langue qu'elle comprend, le titre en vertu duquel l'arrestation a eu lieu et l'informe de sa faculté de consentir ou de s'opposer à son extradition ainsi que des conséquences juridiques résultant d'un consentement à l'extradition.
« Lorsque la personne réclamée a déjà demandé l'assistance d'un avocat et que celui-ci a été dûment convoqué, le procureur général reçoit les déclarations de celle-ci et de son conseil, dont il est dressé procès-verbal.
« Dans les autres cas, ce magistrat rappelle à la personne réclamée son droit de choisir un avocat ou de demander qu'il lui en soit désigné un d'office. L'avocat choisi ou, dans le cas d'une demande de commission d'office, le bâtonnier de l'ordre des avocats est informé de ce choix par tout moyen et sans délai. L'avocat peut consulter sur-le-champ le dossier et communiquer librement avec la personne réclamée. Le procureur général reçoit les déclarations de l'intéressé et de son conseil, dont il est dressé procès-verbal.
« Art. 696-13. _ Lorsque la personne réclamée a déclaré au procureur général consentir à son extradition, la chambre de l'instruction est immédiatement saisie de la procédure. La personne réclamée comparaît devant elle dans un délai de cinq jours ouvrables à compter de la date de sa présentation au procureur général.
« Lors de la comparution de la personne réclamée, la chambre de l'instruction constate son identité et recueille ses déclarations. Il en est dressé procès-verbal.
« L'audience est publique, sauf si la publicité de l'audience est de nature à nuire au bon déroulement de la procédure en cours, aux intérêts d'un tiers ou à la dignité de la personne.
« Le ministère public et la personne réclamée sont entendus, cette dernière assistée, le cas échéant, de son avocat et, s'il y a lieu, en présence d'un interprète.
« Art. 696-14. _ Si, lors de sa comparution, la personne réclamée déclare consentir à être extradée et que les conditions légales de l'extradition sont remplies, la chambre de l'instruction, après avoir informé cette personne des conséquences juridiques de son consentement, lui en donne acte.
« La chambre de l'instruction donne acte de son consentement à la personne réclamée dans les sept jours ouvrables à compter de la date de sa comparution, sauf si un complément d'information a été ordonné. Elle statue sans recours.
« Art. 696-15. _ Lorsque la personne réclamée a déclaré au procureur général ne pas consentir à son extradition, la chambre de l'instruction est saisie, sans délai, de la procédure. La personne réclamée comparaît devant elle dans un délai de dix jours à compter de la date de sa présentation au procureur général.
« Les dispositions des deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article 696-13 sont applicables.
« Si, lors de sa comparution, la personne réclamée déclare ne pas consentir à être extradée, la chambre de l'instruction donne son avis motivé sur la demande d'extradition. Elle rend son avis, sauf si un complément d'information a été ordonné, dans le délai d'un mois à compter de la comparution devant elle de la personne réclamée.
« Cet avis est défavorable si la cour estime que les conditions légales ne sont pas remplies ou qu'il y a une erreur évidente.
« Le dossier est envoyé au ministre de la justice dans les meilleurs délais.
« Art. 696-16. _ La chambre de l'instruction peut, par une décision qui n'est susceptible d'aucun recours, autoriser l'Etat requérant à intervenir à l'audience au cours de laquelle la demande d'extradition est examinée, par l'intermédiaire d'une personne habilitée par ledit Etat à cet effet. Lorsque l'Etat requérant est autorisé à intervenir, il ne devient pas partie à la procédure.
« Art. 696-17. _ Si l'avis motivé de la chambre de l'instruction repousse la demande d'extradition et que cet avis est définitif, l'extradition ne peut être accordée.
« La personne réclamée, si elle n'est pas détenue pour une autre cause, est alors mise d'office en liberté.
« Art. 696-18. _ Dans les cas autres que celui prévu à l'article 696-17, l'extradition est autorisée par décret pris sur le rapport du ministre de la justice. Si, dans le délai d'un mois à compter de la notification de ce décret à l'Etat requérant, la personne réclamée n'a pas été reçue par les agents de cet Etat, l'intéressé est, sauf cas de force majeure, mis d'office en liberté et ne peut plus être réclamé pour la même cause.
« Le recours pour excès de pouvoir contre le décret mentionné à l'alinéa précédent doit, à peine de forclusion, être formé dans le délai d'un mois. L'exercice d'un recours gracieux contre ce décret n'interrompt pas le délai de recours contentieux.
« Art. 696-19. _ La mise en liberté peut être demandée à tout moment à la chambre de l'instruction selon les formes prévues aux articles 148-6 et 148-7.
« Lors de toute demande de mise en liberté, la personne réclamée fait connaître à la chambre de l'instruction l'avocat qu'elle a choisi ou qui a été commis d'office par le bâtonnier de l'ordre des avocats, qui recevra les actes qui lui sont destinés.
« L'avocat de la personne réclamée est convoqué, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, quarante-huit heures au moins avant la date de l'audience. La chambre de l'instruction statue par décision motivée après avoir entendu le ministère public ainsi que la personne réclamée ou son avocat, dans les plus brefs délais et au plus tard dans les vingt jours de la réception de la demande, par un arrêt rendu en audience publique. Si la demande de mise en liberté a été formée par la personne réclamée dans les quarante-huit heures de la mise sous écrou extraditionnel, le délai imparti à la chambre de l'instruction pour statuer est réduit à quinze jours.
« La chambre de l'instruction peut également, lorsqu'elle ordonne la mise en liberté de la personne réclamée et à titre de mesure de sûreté, astreindre l'intéressé à se soumettre à une ou plusieurs des obligations énumérées à l'article 138.
« Quand la mise en liberté est prononcée, la personne réclamée est avisée que toute notification ou signification faite à son avocat sera réputée lui être délivrée. Mention de cet avis, ainsi que du nom et de l'adresse de l'avocat désigné, est portée sur l'arrêt rendu.
« Art. 696-20. _ La mainlevée du contrôle judiciaire ou la modification de celui-ci peut être ordonnée à tout moment par la chambre de l'instruction, soit d'office, soit sur les réquisitions du procureur général, soit à la demande de la personne réclamée après avis du procureur général.
« L'audience est publique, sauf si la publicité de l'audience est de nature à nuire au bon déroulement de la procédure en cours, aux intérêts d'un tiers ou à la dignité de la personne.
« Le ministère public et la personne réclamée sont entendus, cette dernière assistée, le cas échéant, de son avocat et, s'il y a lieu, en présence d'un interprète.
« La chambre de l'instruction statue, dans les vingt jours de sa saisine, par un arrêt motivé rendu en audience publique.
« Art. 696-21. _ Si la personne réclamée se soustrait volontairement aux obligations du contrôle judiciaire ou si, après avoir bénéficié d'une mise en liberté non assortie du contrôle judiciaire, il apparaît qu'elle entend manifestement se dérober à la demande d'extradition, la chambre de l'instruction peut, sur les réquisitions du ministère public, décerner mandat d'arrêt à son encontre par décision motivée rendue en audience publique.
« Lorsque l'intéressé a été appréhendé, l'affaire doit venir à la première audience publique ou au plus tard dans les dix jours de sa mise sous écrou.
« La chambre de l'instruction confirme, s'il y a lieu, la révocation du contrôle judiciaire ou de la mise en liberté de l'intéressé, par décision motivée rendue en audience publique.
« Le ministère public et la personne réclamée sont entendus, cette dernière assistée, le cas échéant, de son avocat et, s'il y a lieu, en présence d'un interprète.
« Le dépassement du délai mentionné au deuxième alinéa entraîne la mise en liberté d'office de l'intéressé.
« Art. 696-22. _ Si la personne réclamée est en liberté lorsque la décision du gouvernement ayant autorisé l'extradition n'est plus susceptible de recours, le procureur général peut ordonner la recherche et l'arrestation de l'intéressé et son placement sous écrou extraditionnel. Lorsque celui-ci a été appréhendé, le procureur général donne avis de cette arrestation, sans délai, au ministre de la justice.
« La remise à l'Etat requérant de la personne réclamée s'effectue dans les sept jours suivant la date de l'arrestation, faute de quoi elle est mise d'office en liberté.
« Art. 696-23. _ En cas d'urgence et sur la demande directe des autorités compétentes de l'Etat requérant, le procureur de la République territorialement compétent peut ordonner l'arrestation provisoire d'une personne recherchée aux fins d'extradition par ledit Etat et son placement sous écrou extraditionnel.
« La demande d'arrestation provisoire, transmise par tout moyen permettant d'en conserver une trace écrite, indique l'existence d'une des pièces mentionnées à l'article 696-8 et fait part de l'intention de l'Etat requérant d'envoyer une demande d'extradition. Elle comporte un bref exposé des faits mis à la charge de la personne recherchée et mentionne, en outre, son identité et sa nationalité, l'infraction pour laquelle l'extradition sera demandée, le temps et le lieu où elle a été commise, ainsi que, selon le cas, le quantum de la peine encourue ou de la peine prononcée, et le cas échéant, celui de la peine restant à purger et, s'il y a lieu, la nature et la date des actes interruptifs de prescription. Une copie de cette demande est adressée par l'Etat requérant au ministre des affaires étrangères.
« Le procureur de la République donne avis de cette arrestation, sans délai, au ministre de la justice et au procureur général.
« Art. 696-24. _ La personne arrêtée provisoirement dans les conditions prévues à l'article 696-23 est mise en liberté si, dans un délai de trente jours à dater de son arrestation, lorsque celle-ci aura été opérée à la demande des autorités compétentes de l'Etat requérant, le gouvernement français ne reçoit pas l'un des documents mentionnés à l'article 696-8.
« Si, ultérieurement, les pièces susvisées parviennent au gouvernement français, la procédure est reprise, conformément aux articles 696-9 et suivants.
« Section 3. « De la procédure simplifiée d'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne.
« Art. 696-25. _ Hors les cas où s'appliquent les dispositions du présent titre relatives au mandat d'arrêt européen, lorsqu'une demande d'arrestation provisoire aux fins d'extradition émane d'un Etat partie à la convention du 10 mars 1995 relative à la procédure simplifiée d'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne, il est procédé conformément aux dispositions des articles 696-10 et 696-11.
« Toutefois, par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 696-10, le délai de comparution de la personne réclamée est fixé à trois jours ; celle-ci est, en outre, informée qu'elle peut consentir à son extradition selon la procédure simplifiée prévue à la présente section.
« Art. 696-26. _ Dans un délai de trois jours à compter de l'incarcération de la personne réclamée, le procureur général notifie à cette dernière, dans une langue qu'elle comprend, les pièces en vertu desquelles l'arrestation a eu lieu. Il l'avise qu'elle peut consentir à son extradition devant la chambre de l'instruction selon la procédure simplifiée. Il l'informe également qu'elle peut renoncer à la règle de la spécialité. Mention de ces informations est faite au procès-verbal, à peine de nullité de la procédure.
« L'intéressé a droit à l'assistance d'un avocat dans les conditions prévues aux deuxième et troisième alinéas de l'article 696-12.
« Art. 696-27. _ Lorsque la personne réclamée déclare au procureur général consentir à son extradition, elle comparaît devant la chambre de l'instruction dans un délai de cinq jours ouvrables à compter de la date à laquelle elle a été présentée au procureur général.
« Lorsque la personne réclamée déclare audit magistrat ne pas consentir à son extradition, il est procédé comme il est dit aux articles 696-15 et suivants si une demande d'extradition est parvenue aux autorités françaises.
« Art. 696-28. _ Lorsque la personne réclamée comparaît devant la chambre de l'instruction en application du premier alinéa de l'article 696-27, le président de la chambre constate son identité et recueille ses déclarations, dont il est dressé procès-verbal.
« Le président demande ensuite à la personne réclamée, après l'avoir informée des conséquences juridiques de son consentement, si elle entend toujours consentir à son extradition.
« Lorsque la personne réclamée déclare ne plus consentir à son extradition, la chambre de l'instruction renvoie le procureur général à appliquer les dispositions du deuxième alinéa de l'article 696-27.
« Lorsque la personne réclamée maintient son consentement à l'extradition, la chambre de l'instruction lui demande également si elle entend renoncer à la règle de la spécialité, après l'avoir informée des conséquences juridiques d'une telle renonciation.
« Le consentement de la personne réclamée à être extradée et, le cas échéant, sa renonciation à la règle de la spécialité sont recueillis par procès-verbal établi lors de l'audience. La personne réclamée y appose sa signature.
« L'audience est publique, sauf si la publicité est de nature à nuire au bon déroulement de la procédure en cours, aux intérêts d'un tiers ou à la dignité de la personne.
« Le ministère public et la personne réclamée sont entendus, cette dernière assistée, le cas échéant, de son avocat et, s'il y a lieu, en présence d'un interprète.
« Art. 696-29. _ Si la chambre de l'instruction constate que les conditions légales de l'extradition sont remplies, elle rend un arrêt par lequel elle donne acte à la personne réclamée de son consentement formel à être extradée ainsi que, le cas échéant, de sa renonciation à la règle de la spécialité et accorde l'extradition.
« La chambre de l'instruction statue en audience publique dans les sept jours à compter de la date de la comparution devant elle de la personne réclamée.
« Art. 696-30. _ Si la personne réclamée forme, dans le délai légal, un pourvoi en cassation contre l'arrêt de la chambre de l'instruction accordant son extradition, le président de la chambre criminelle de la Cour de cassation ou le conseiller délégué par lui rend, dans un délai de quinze jours à compter de l'introduction du pourvoi, une ordonnance par laquelle il constate que la personne réclamée a ainsi entendu retirer son consentement à l'extradition et, le cas échéant, qu'elle a renoncé à la règle de la spécialité. Cette ordonnance n'est pas susceptible de recours.
« Si la personne réclamée a fait l'objet d'une demande d'extradition, il est alors procédé ainsi qu'il est dit aux articles 696-15 et suivants.
« Art. 696-31. _ Lorsque l'arrêt de la chambre de l'instruction accorde l'extradition de la personne réclamée et que cet arrêt est définitif, le procureur général en avise le ministre de la justice, qui informe les autorités compétentes de l'Etat requérant de la décision intervenue.
« Le ministre de la justice prend les mesures nécessaires afin que l'intéressé soit remis aux autorités de l'Etat requérant au plus tard dans les vingt jours suivant la date à laquelle la décision d'extradition leur a été notifiée.
« Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables si la personne extradée est détenue en France pour une autre cause.
« Si la personne extradée ne peut être remise dans le délai de vingt jours pour un cas de force majeure, le ministre de la justice en informe immédiatement les autorités compétentes de l'Etat requérant et convient avec elles d'une nouvelle date de remise. La personne extradée est alors remise au plus tard dans les vingt jours suivant la date ainsi convenue.
« Art. 696-32. _ Lorsqu'il est fait application des dispositions des articles 696-28 à 696-31, la mise en liberté peut, à la demande de la personne réclamée ou de son avocat selon les formes prévues aux articles 148-6 et 148-7, être ordonnée à tout moment par la chambre de l'instruction. Celle-ci statue dans les conditions prévues à l'article 696-19. Toutefois les dispositions de l'article 696-20 sont susceptibles de recevoir application.
« La mise en liberté est ordonnée si, à l'expiration du délai de vingt jours prévu à l'article 696-31, la personne réclamée se trouve encore sur le territoire de la République.
« Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables en cas de force majeure ou si la personne réclamée est détenue en France pour une autre cause.
« Art. 696-33. _ Les dispositions des articles 696-26 à 696-32 sont applicables si la personne dont l'arrestation provisoire a été demandée fait l'objet d'une demande d'extradition et consent à être extradée plus de dix jours après son arrestation et au plus tard le jour de sa première comparution devant la chambre de l'instruction, saisie dans les conditions énoncées à la section II du présent chapitre, ou si la personne dont l'extradition est demandée consent à être extradée au plus tard le jour de sa première comparution devant la chambre de l'instruction, saisie dans les mêmes conditions.
« Section 4. « Des effets de l'extradition.
« Art. 696-34. _ L'extradé ne peut être poursuivi ou puni pour une infraction antérieure à la remise, autre que celle ayant motivé l'extradition.
« Il en est autrement, en cas d'un consentement spécial donné par la personne extradée dans les conditions prévues aux articles 696-28 et 696-40 ou par le gouvernement requis dans les conditions ci-après.
« Ce consentement peut être donné par le gouvernement français, même au cas où le fait, cause de la demande, ne serait pas l'une des infractions déterminées par l'article 696-3.
« Art. 696-35. _ Dans le cas où le gouvernement requérant demande, pour une infraction antérieure à l'extradition, l'autorisation de poursuivre l'individu déjà remis, l'avis de la chambre de l'instruction devant laquelle la personne réclamée avait comparu peut être formulé sur la seule production des pièces transmises à l'appui de la nouvelle demande.
« Sont également transmises par le gouvernement étranger et soumises à la chambre de l'instruction, les pièces contenant les observations de l'individu remis ou la déclaration qu'il entend n'en présenter aucune. Ces explications peuvent être complétées par un avocat choisi par lui, ou qui est désigné ou commis d'office.
« Art. 696-36. _ L'extradition obtenue par le gouvernement français est nulle, si elle est intervenue en dehors des cas prévus par le présent chapitre.
« Aussitôt après l'incarcération de la personne extradée, le procureur de la République l'avise qu'elle a le droit de demander que soit prononcée la nullité de l'extradition dans les conditions de forme et de délai prévues au présent article et qu'elle a le droit de choisir un avocat ou de demander qu'il lui en soit désigné un d'office.
« La nullité est prononcée, même d'office, par la juridiction de jugement dont la personne extradée relève après sa remise ou, si elle ne relève d'aucune juridiction de jugement, par la chambre de l'instruction. La chambre de l'instruction compétente est, lorsque l'extradition a été accordée pour l'exécution d'un mandat d'arrêt délivré dans une information en cours, celle dans le ressort de laquelle a eu lieu la remise.
« La requête en nullité présentée par la personne extradée doit, à peine d'irrecevabilité, être motivée et faire l'objet d'une déclaration au greffe de la juridiction compétente dans un délai de dix jours à compter de l'avis prévu au deuxième alinéa.
« La déclaration fait l'objet d'un procès-verbal signé par le greffier et par le demandeur ou son avocat. Si le demandeur ne peut signer, il en est fait mention par le greffier.
« Lorsque le demandeur ou son avocat ne réside pas dans le ressort de la juridiction compétente, la déclaration au greffe peut être faite au moyen d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception.
« Lorsque le demandeur est détenu, la requête peut également être faite au moyen d'une déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire. Cette déclaration fait l'objet d'un procès-verbal signé par le chef de l'établissement pénitentiaire et par le demandeur. Si celui-ci ne peut signer, il en est fait mention par le chef de l'établissement. Le procès-verbal est adressé sans délai, en original ou en copie et par tout moyen, au greffe de la juridiction saisie.
« Art. 696-37. _ Les mêmes juridictions sont juges de la qualification donnée aux faits qui ont motivé la demande d'extradition.
« Art. 696-38. _ Dans le cas où l'extradition est annulée, l'extradé s'il n'est pas réclamé par le gouvernement requis, est mis en liberté et ne peut être repris, soit à raison des faits qui ont motivé son extradition, soit à raison des faits antérieurs, que si, dans les trente jours qui suivent la mise en liberté, il est arrêté sur le territoire français.
« Art. 696-39. _ Est considérée comme soumise sans réserve à l'application des lois de l'Etat requérant, à raison d'un fait quelconque antérieur à l'extradition et différent de l'infraction qui a motivé cette mesure, la personne remise qui a eu pendant trente jours, à compter de son élargissement définitif, la possibilité de quitter le territoire de cet Etat.
« Art. 696-40. _ Lorsque le gouvernement français a obtenu l'extradition d'une personne en application de la convention du 27 septembre 1996 relative à l'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne, la personne ainsi extradée peut être poursuivie ou punie pour une infraction antérieure à la remise, autre que celle ayant motivé l'extradition, si elle renonce expressément, après sa remise, au bénéfice de la règle de la spécialité dans les conditions ci-après.
« La renonciation doit porter sur des faits précis antérieurs à la remise. Elle a un caractère irrévocable. Elle est donnée devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel dans le ressort de laquelle l'intéressé est incarcéré ou a sa résidence.
« Lors de la comparution de la personne extradée, qui donne lieu à une audience publique, la chambre de l'instruction constate l'identité et recueille les déclarations de cette personne. Il en est dressé procès-verbal. L'intéressé, assisté le cas échéant de son avocat et, s'il y a lieu, d'un interprète, est informé par la chambre de l'instruction des conséquences juridiques de sa renonciation à la règle de la spécialité sur sa situation pénale et du caractère irrévocable de la renonciation donnée.
« Si, lors de sa comparution, la personne extradée déclare renoncer à la règle de la spécialité, la chambre de l'instruction, après avoir entendu le ministère public et l'avocat de la personne, en donne acte à celle-ci. L'arrêt de la chambre de l'instruction précise les faits pour lesquels la renonciation est intervenue.
« Art. 696-41. _ Dans le cas où, l'extradition d'un étranger ayant été obtenue par le gouvernement français, le gouvernement d'un pays tiers sollicite à son tour du gouvernement français l'extradition du même individu à raison d'un fait antérieur à l'extradition, autre que celui jugé en France, et non connexe à ce fait, le Gouvernement ne défère, s'il y a lieu, à cette requête qu'après s'être assuré du consentement du pays par lequel l'extradition a été accordée.
« Toutefois, cette réserve n'a pas lieu d'être appliquée lorsque l'individu extradé a eu, pendant le délai fixé à l'article précédent, la faculté de quitter le territoire français.
« Section 5. « Dispositions diverses.
« Art. 696-42. _ L'extradition par voie de transit sur le territoire français ou par les bâtiments des services maritimes français, d'une personne n'ayant pas la nationalité française, remise par un autre gouvernement, est autorisée, sur simple demande par voie diplomatique, appuyée des pièces nécessaires pour établir qu'il ne s'agit pas d'un délit politique ou purement militaire.
« Cette autorisation ne peut être donnée qu'aux puissances qui accordent, sur leur territoire, la même faculté au Gouvernement français.
« Le transport s'effectue sous la conduite d'agents français et aux frais du gouvernement requérant.
« Art. 696-43. _ La chambre de l'instruction décide s'il y a lieu ou non de transmettre en tout ou en partie les titres, valeurs, argent ou autres objets saisis, au gouvernement requérant.
« Cette remise peut avoir lieu, même si l'extradition ne peut s'accomplir, par suite de l'évasion ou de la mort de l'individu réclamé.
« La chambre de l'instruction ordonne la restitution des papiers et autres objets énumérés ci-dessus qui ne se rapportent pas au fait imputé à l'étranger. Elle statue, le cas échéant, sur les réclamations des tiers détenteurs et autres ayants droit.
« Art. 694-44. _ Au cas de poursuites répressives exercées à l'étranger, lorsqu'un gouvernement étranger juge nécessaire la notification d'un acte de procédure ou d'un jugement à un individu résidant sur le territoire français, la pièce est transmise suivant les formes prévues aux articles 696-8 et 696-9, accompagnée, le cas échéant, d'une traduction française. La signification est faite à personne à la requête du ministère public, par les soins d'un officier compétent. L'original constatant la notification est renvoyé par la même voie au gouvernement requérant.
« Art. 696-45. _ Lorsque, dans une cause pénale instruite à l'étranger, le gouvernement étranger juge nécessaire la communication de pièces à conviction, ou de documents se trouvant entre les mains des autorités françaises, la demande est faite par la voie diplomatique. Il y est donné suite, à moins que des considérations particulières ne s'y opposent, et sous l'obligation de renvoyer les pièces et documents dans le plus bref délai.
« Art. 696-46. _ Si, dans une cause pénale, la comparution personnelle d'un témoin résidant en France est jugée nécessaire par un gouvernement étranger, le gouvernement français, saisi de la citation par la voie diplomatique, l'engage à se rendre à l'invitation qui lui est adressée.
« Néanmoins, la citation n'est reçue et signifiée qu'à la condition que le témoin ne pourra être poursuivi ou détenu pour des faits ou condamnations antérieurs à sa comparution.
« Art. 696-47. _ L'envoi des individus détenus, en vue d'une confrontation, doit être demandé par la voie diplomatique. Il est donné suite à la demande, à moins que des considérations particulières ne s'y opposent, et sous la condition de renvoyer lesdits détenus dans le plus bref délai.
« Art. 696-48. _ Lorsque l'extradition a été refusée par les autorités françaises pour l'un des motifs énoncés aux 6° et 7° de l'article 696-4, le ministre de la justice peut, sur dénonciation officielle de l'autorité du pays où le fait a été commis et qui avait requis l'extradition, adresser ladite dénonciation au procureur général près la cour d'appel qui avait été saisie de la demande d'extradition. Cette dénonciation ne peut viser que les seuls faits ayant fait l'objet de ladite demande.
« Le procureur de la République compétent est celui près le tribunal de grande instance du siège de ladite cour.
« Lorsqu'il est fait application des dispositions susvisées, l'action publique ne peut être mise en mouvement que par le ministère public. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 62 vise à moderniser la loi de 1927 sur l'extradition et à la codifier au sein du code de procédure pénale.
Il s'agit de mettre en place une procédure courte de l'extradition en cas de consentement de la personne réclamée.
Il s'agit également d'instaurer des délais de procédure devant les deux ordres de juridiction.
Enfin, il s'agit de transposer une convention européenne sur la procédure simplifiée d'extradition.
Depuis l'adoption de cette convention, l'Union européenne a adopté le mandat d'arrêt européen, dont nous venons de parler et qui constitue un progrès plus substantiel dans la construction de l'espace judiciaire européen. Cependant, la transposition de la convention demeure nécessaire pour les affaires auxquelles le mandat d'arrêt européen ne sera pas applicable compte tenu de sa date d'entrée en vigueur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à cet amendement qui reprend un projet de loi que j'avais déposé il y a quelques mois, mais qui, malheureusement, n'avait pas pu être inscrit à l'ordre du jour du Sénat par la suite. La commission des lois a bien voulu reprendre, pour l'essentiel, ce projet sous forme d'amendement. Grâce à cela, nous aurons, d'ici à la fin de l'année, une réforme du droit commun de l'extradition. Je veux remercier la commission des lois et son rapporteur de ce travail tout à fait utile.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. Je tiens simplement à souligner que cet amendement est lié au précédent, les deux allant dans le bon sens.
Encore une fois, il n'y a pas de lutte possible contre la criminalité organisée sans des procédures qui soient mieux inscrites à la fois dans le contexte européen et dans le contexte international, aujourd'hui fortement défini s'agissant des droits fondamentaux des citoyens. Rappelons-nous toujours que les barrières nationales, notamment judiciaires, sont utilisées au mieux par la criminalité organisée !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 62.
M. Emmanuel Hamel. Je vote contre !
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 63, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Supprimer le paragraphe III de cet article. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gourvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 63.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 6
M. le président. L'amendement n° 274, présenté par M. Fauchon, est ainsi libellé :
« Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 568 du code de procédure pénale, il est inséré un article 568-1 ainsi rédigé :
« Art. 568-1. - Lorsque la décision attaquée est un arrêt d'une chambre de l'instruction, statuant dans les conditions énoncées au quatrième alinéa de l'article 695-31, le délai de pourvoi mentionné au premier alinéa de à l'article 568, est ramené à trois jours francs.
« Le dossier est transmis, le cas échéant par télécopie, au greffe de la Cour de cassation dans les quarante-huit heures à compter du pourvoi. »
« II. - Après l'article 574-1 du même code, il est inséré un article 574-2 ainsi rédigé :
« Art. 574-2. - La chambre criminelle de la Cour de cassation saisie d'un pourvoi contre un arrêt visé à l'article 568-1 statue dans le délai de quarante jours à compter de la date du pourvoi.
« Le demandeur en cassation ou son avocat doit, à peine de déchéance, déposer son mémoire exposant les moyens de cassation dans le délai de cinq jours à compter de la réception du dossier à la Cour de cassation. La transmission du mémoire peut être effectuée par télécopie.
« Après l'expiration de ce délai, aucun moyen nouveau ne peut être soulevé par lui et il ne peut plus être déposé de mémoire.
« Dès la réception du mémoire, le président de la chambre criminelle fixe la date de l'audience. »
« III. - Au second alinéa de l'article 716-4 du même code, après les mots : "hors de France", sont insérés les mots : "en exécution d'un mandat d'arrêt européen ou". »
La parole est à M. Pierre Fauchon.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 274.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6.
L'amendement n° 65, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré dans le code pénal, après l'article 113-8, un article 113-8-1 ainsi rédigé :
« Art. 113-8-1. - Sans préjudice de l'application des articles 113-6 à 113-8, la loi pénale française est également applicable, dans les conditions fixées par l'article 696-48 du code de procédure pénale, à tout crime ou à tout délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement commis hors du territoire de la République par un étranger dont l'extradition a été refusée à l'Etat requérant par les autorités françaises aux motifs, soit que le fait à raison duquel l'extradition avait été demandée est puni d'une peine ou d'une mesure de sûreté contraire à l'ordre public français, soit que la personne réclamée aurait été jugée dans ledit Etat par un tribunal n'assurant pas les garanties fondamentales de procédure et de protection des droits de la défense. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit encore d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 65.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6.
L'amendement n° 64, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après l'article 6, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« La loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition des étrangers est abrogée. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit d'un autre amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 64.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 6.
Dispositions concernant la lutte
contre les infractions en matière économique,
financière et douanière
et en matière de santé publique
et de pollution maritime
M. le président. L'amendement n° 66, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans l'intitulé de ce chapitre, après les mots : "et en matière de", insérer les mots : "terrorisme, de". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit toujours de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 66.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'intitulé du chapitre III est ainsi modifié.
Section 1
Dispositions relatives aux infractions
en matière économique et financière
M. le président. Art. 7. - I A. - L'intitulé du titre XIII du livre IV du code de procédure pénale est ainsi rédigé : « De la procédure applicable aux infractions en matière économique et financière ».
I. - L'article 704 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « pour », sont insérés les mots : « l'enquête, » ;
2° Les 1°, 2° et 3° sont ainsi rédigés :
« 1° Délits prévus par les articles 222-38, 223-15-2, 313-1 et 313-2, 313-6, 314-1 et 314-2, 323-1 à 323-4, 324-1 et 324-2, 432-10 à 432-15, 433-1 et 433-2, 434-9, 435-1 et 435-2, 442-1 à 442-8 et 450-2-1 du code pénal ;
« 2° Délits prévus par le code de commerce ;
« 3° Délits prévus par le code monétaire et financier. » ;
3° Les 10°, 11°, 14° et 16° sont abrogés ;
4° Les deux derniers alinéas sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« La compétence territoriale d'un tribunal de grande instance peut également être étendue au ressort de plusieurs cours d'appel pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et, s'il s'agit de délits, le jugement de ces infractions, dans les affaires qui sont ou apparaîtraient d'une très grande complexité, en raison notamment du grand nombre d'auteurs, de complices ou de victimes ou du ressort géographique sur lequel elles s'étendent.
« La compétence des juridictions mentionnées au premier alinéa et à l'alinéa qui précède s'étend aux infractions connexes.
« Un décret fixe la liste et le ressort de ces juridictions, qui comprennent une section du parquet et des formations d'instruction et de jugement spécialisées pour connaître de ces infractions. »
II. - Sont insérés, après l'article 705 du même code, deux articles 705-1 et 705-2 ainsi rédigés :
« Art. 705-1. - Le procureur de la République près un tribunal de grande instance autre que ceux visés à l'article 704 peut, pour les infractions énumérées dans cet article, requérir le juge d'instruction de se dessaisir au profit de la ou de l'une des juridictions d'instruction compétentes en application de cet article. Les parties sont préalablement avisées et invitées à faire connaître leurs observations ; l'ordonnance est rendue huit jours au plus tôt après cet avis.
« Lorsque le juge d'instruction décide de se dessaisir, son ordonnance ne prend effet qu'à compter du délai de cinq jours prévu par l'article 705-2 ; lorsqu'un recours est exercé en application de cet article, le juge d'instruction demeure saisi jusqu'à ce que soit porté à sa connaissance l'arrêt de la chambre de l'instruction, passé en force de chose jugée ou celui de la chambre criminelle de la Cour de cassation.
« Dès que l'ordonnance est passée en force de chose jugée, le procureur de la République adresse le dossier de la procédure au procureur de la République du tribunal de grande instance désormais compétent.
« Les dispositions du présent article sont applicables devant la chambre de l'instruction.
« Art. 705-2. - L'ordonnance rendue en application de l'article 705-1 peut, à l'exclusion de toute autre voie de recours, être déférée dans les cinq jours de sa notification, à la requête du ministère public ou des parties, soit à la chambre de l'instruction si la juridiction spécialisée devant laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la même cour d'appel, soit, dans le cas contraire, à la chambre criminelle de la Cour de cassation. La chambre de l'instruction ou la chambre criminelle désigne, dans les huit jours suivant la date de réception du dossier, le juge d'instruction chargé de poursuivre l'information.
« L'arrêt de la chambre de l'instruction ou de la chambre criminelle est porté à la connaissance du juge d'instruction ainsi qu'au ministère public et notifié aux parties.
« Les dispositions du présent article sont applicables à l'arrêt de la chambre de l'instruction rendu sur le fondement du dernier alinéa de l'article 705-1, le recours étant alors porté devant la chambre criminelle. »
III. - Les deux premiers alinéas de l'article 706 du même code sont remplacés par huit alinéas ainsi rédigés :
« Peuvent exercer des fonctions d'assistant spécialisé auprès d'un tribunal de grande instance mentionné à l'article 704 les fonctionnaires de catégorie A ou B ainsi que les personnes titulaires, dans des matières définies par décret, d'un diplôme national sanctionnant une formation d'une durée au moins égale à quatre années d'études supérieures après le baccalauréat qui remplissent les conditions d'accès à la fonction publique et justifient d'une expérience professionnelle minimale de quatre années.
« Les assistants spécialisés participent aux procédures sous la responsabilité des magistrats, sans pouvoir toutefois recevoir délégation de signature, sauf pour les réquisitions prévues par les articles 60-1, 60-2, 77-1-1, 77-1-2, 99-3 et 151-1-1.
« Ils accomplissent toutes les tâches qui leur sont confiées par les magistrats et peuvent notamment :
« 1° Assister les juges d'instruction dans tous les actes d'information ;
« 2° Assister les magistrats du ministère public dans l'exercice de l'action publique ;
« 3° Assister les officiers de police judiciaire agissant sur délégation des magistrats ;
« 4° Remettre aux magistrats des documents de synthèse ou d'analyse qui peuvent être versés au dossier de la procédure.
« Le procureur général peut leur demander d'assister le ministère public devant la juridiction d'appel. »
IV. - L'article 706-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le procureur de la République près un tribunal de grande instance autre que celui de Paris peut, pour les infractions mentionnées à l'alinéa précédent, requérir le juge d'instruction de se dessaisir au profit de la juridiction d'instruction du tribunal de grande instance de Paris, dans les conditions et selon les modalités prévues par les articles 705-1 et 705-2. »
ARTICLE 705-1 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 67, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour insérer un article 705-1 dans le code de procédure pénale, après les mots : "leurs observations", insérer les mots : "par le juge d'instruction". »
L'amendement n° 68, également présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après les mots : "huit jours", rédiger comme suit la fin de la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 705-1 du code de procédure pénale : "au plus tôt et un mois au plus tard à compter de cet avis". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit de deux amendements de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 67.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 68.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 705-1 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 705-2 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 70, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour insérer un article 705-2 dans le code de procédure pénale, remplacer les mots : "devant laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la même cour d'appel" par les mots : "au profit de laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la même cour d'appel que la juridiction initialement saisie". »
L'amendement n° 69, également présenté parM. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Compléter le premier alinéa du texte proposé par le II de cet article pour l'article 705-2 du code de procédure pénale par la phrase suivante : "Le ministère public peut également saisir directement la chambre de l'instruction ou la chambre criminelle de la Cour de cassation lorsque le juge d'instruction n'a pas rendu son ordonnance dans le délai d'un mois prévu au premier alinéa de l'article 705-1". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit de deux amendements de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 70.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 69.
(L'amendement est adopté).
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 705-2 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 71, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour modifier l'article 706 du code de procédure pénale, insérer un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Les assistants spécialisés suivent une formation obligatoire préalable à leur entrée en fonction dans les conditions définies par décret. »
L'amendement n° 72, également présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après l'avant-dernier alinéa (4°) du texte proposé par le III de cet article pour modifier l'article 706 du code de procédure pénale, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 5° Mettre en oeuvre le droit de communication reconnu aux magistrats en application de l'article 132-22 du code pénal ; ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 71 a pour objet de prévoir une formation obligatoire avant l'entrée en fonction des assistants spécialisés.
Actuellement, les assistants spécialisés ne bénéficient pas d'une telle formation et arrivent au sein de l'institution judiciaire sans en connaître le fonctionnement et bien souvent dépourvus de toute connaissance en droit pénal.
L'amendement n° 72 a pour objet de donner aux assistants spécialisés la possibilité de mettre en oeuvre le droit de communication reconnu aux magistrats pour obtenir des renseignements utiles de nature fiscale ou financière.
Il s'agit non seulement de valoriser les tâches susceptibles d'être confiées aux assitants spécialisés, mais également de faciliter l'exercice de leurs missions. En effet, ces assistants sont souvent amenés à se déplacer seuls dans les administrations. Il apparaît donc plus logique de leur permettre d'exercer, sous le contrôle du magistrat, ce droit de communication en matière fiscale ou financière.
Cette modification ne bouleverse pas l'économie du dispositif initial mais ne fait que prolonger la démarche des députés, qui ont souhaité mettre le droit en conformité avec la pratique en permettant aux assistants spécialisés de signer certaines réquisitions tendant à recueillir des informations déjà disponibles.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Sur l'amendement n° 71, je suis favorable au principe, mais je ne suis pas certain qu'il soit nécessaire de renvoyer à un décret d'application. C'est la raison pour laquelle je suggère que l'amendement soit ainsi rédigé : « Les assistants spécialisés suivent une formation obligatoire préalable à leur entrée en fonction. »
Je suis en revanche tout à fait favorable à l'amendement n° 72. Il faut que nous mettions tout en oeuvre pour que les assistants spécialisés soient davantage motivés, que le contenu de leur travail soit le plus intéressant possible et qu'ils assument un vrai rôle auprès des magistrats. Cet amendement va dans ce sens.
M. le président. Monsieur le rapporteur, que pensez-vous de la suggestion de M. le ministre sur l'amendement n° 71 ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Je l'accepte et je rectifie mon amendement en ce sens, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 71 rectifié, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :
« Après le premier alinéa du texte proposé par le III de cet article pour modifier l'article 706 du code de procédure pénale, insérer un nouvel alinéa ainsi rédigé :
« Les assistants spécialisés suivent une formation obligatoire préalable à leur entrée en fonction. »
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 72.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
M. le président. Art. 7 bis. - I. - L'article 3 de la loi du 21 mai 1836 portant prohibition des loteries est ainsi rédigé :
« Art. 3. - La violation de ces interdictions est punie de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende.
« La confiscation des appareils de jeux ou de loterie est obligatoire ; leur destruction peut être ordonnée par le tribunal.
« Les personnes physiques coupables des infractions prévues par la présente loi encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° L'interdiction des droits civiques, civils et de famille dans les conditions prévues à l'article 131-26 du code pénal ;
« 2° La confiscation des biens mobiliers ayant servi directement ou indirectement à commettre l'infraction ou qui en sont le produit, y compris les fonds ou effets exposés au jeu ou mis en loterie ainsi que les meubles ou effets mobiliers dont les lieux sont garnis ou décorés, à l'exception des objectifs susceptibles de donner lieu à restitution.
« S'il s'agit de loteries d'immeubles, la confiscation prononcée à l'encontre du propriétaire de l'immeuble mis en loterie est remplacée par une amende pouvant s'élever jusqu'à la valeur estimative de cet immeuble ;
« 3° L'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues à l'article 131-35 du code pénal ;
« 4° La fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des établissements ou de l'un ou de plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés.
« Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, des infractions décrites par la présente loi. Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;
« 2° Les peines mentionnées aux 4°, 8° et 9° de l'article 131-39 du code pénal. »
II. - L'article 4 de la loi du 21 mai 1836 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 4. - Ces peines seront encourues par les auteurs, entrepreneurs ou agents des loteries françaises ou étrangères prohibées par la présente loi, ou des opérations qui leur sont assimilées.
« Ceux qui auront colporté ou distribué des billets, ceux qui, par des avis, annonces, affiches ou par tout autre moyen de publication, auront fait connaître l'existence des loteries prohibées par la présente loi ou facilité l'émission des billets, seront punis de 4 500 EUR d'amende. »
III. - A la fin de l'article 5 de la loi du 21 mai 1836 précitée, les mots : « dans des formes déterminées par décret en Conseil d'Etat » sont remplacés par les mots et un alinéa ainsi rédigé : « par le préfet du département où est situé le siège social de l'organisme bénéficiaire et, à Paris, par le préfet de police.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application de cette dérogation. »
IV. - L'article 6 de la loi du 21 mai 1836 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 6. - Les dispositions des articles 1er et 2 de la présente loi ne sont pas non plus applicables aux lotos traditionnels, également appelés "poules au gibier", "rifles" ou "quines", lorsqu'ils sont organisés dans un cercle restreint et uniquement dans un but social, culturel, scientifique, éducatif, sportif ou d'animation sociale et se caractérisent par des mises de faible valeur, inférieures à 20. Ces lots ne peuvent, en aucun cas, consister en sommes d'argent ni être remboursés. Ils peuvent néanmoins consister dans la remise de bons d'achat non remboursables. »
V. - Après l'article 7 de la loi du 21 mai 1836 précitée, il est inséré un article 7-1 ainsi rédigé :
« Art. 7-1. - Les infractions aux dispositions de la présente loi peuvent être constatées et poursuivies dans les conditions fixées par les articles L. 450-1, premier et troisième alinéas, L. 450-2, L. 450-3 et L. 450-8 du code de commerce reproduits ci-après :
« Art. L. 450-1, premier alinéa. - Des fonctionnaires habilités à cet effet par le ministre chargé de l'économie peuvent procéder aux enquêtes nécessaires à l'application des dispositions du présent livre.
« Art. L. 450-1, troisième alinéa. - Des fonctionnaires de catégorie A du ministère chargé de l'économie, spécialement habilités à cet effet par le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la proposition du ministre chargé de l'économie, peuvent recevoir des juges d'instruction des commissions rogatoires.
« Art. L. 450-2. - Les enquêtes donnent lieu à l'établissement de procès-verbaux et, le cas échéant, de rapports.
« Les procès-verbaux sont transmis à l'autorité compétente. Un double en est laissé aux parties intéressées. Ils font foi jusqu'à preuve contraire.
« Art. L. 450-3. - Les enquêteurs peuvent accéder à tous locaux, terrains ou moyens de transport à usage professionnel, demander la communication des livres, factures et tous autres documents professionnels et en obtenir ou prendre copie par tous moyens et sur tous supports, recueillir sur convocation ou sur place les renseignements et justifications.
« Ils peuvent demander à l'autorité dont ils dépendent de désigner un expert pour procéder à toute expertise contradictoire nécessaire.
« Art. L. 450-8. - Est puni d'un emprisonnement de six mois et d'une amende de 7 500 EUR le fait pour quiconque de s'opposer, de quelque façon que ce soit, à l'exercice des fonctions dont les agents désignés à l'article L. 450-1 et les rapporteurs du Conseil de la concurrence sont chargés en application du présent livre. »
L'amendement n° 73, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le texte proposé par le V de cet article pour insérer un article 7-1 dans la loi du 21 mai 1836 :
« Art. 7-1. _ Les infractions aux dispositions de la présente loi peuvent être constatées et poursuivies dans les conditions fixées par les premier et troisième alinéas de l'article L. 450-1, les articles L. 450-2, L. 450-3 et L. 450-8 du code de commerce. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Cet amendement a pour objet de supprimer des dispositions inutiles.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 73.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 7 bis, modifié.
(L'article 7 bis est adopté.)
Article additionnel après l'article 7 bis
M. le président. L'amendement n° 465, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après l'article 7 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré un titre V dans le livre VI du code de l'organisation judiciaire ainsi rédigé :
« Titre V.
« Les juridictions spécialisées prévues par l'article 706-75 du code de procédure pénale.
« Art. L. 650-1. _ Au sein de chaque tribunal de grande instance dont la compétence territoriale est étendue au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel en application des articles 704 et 706-75 du code de procédure pénale, un ou plusieurs juges d'instruction désignés par le premier président après avis du président du tribunal de grande instance sont chargés spécialement de l'enquête, de la poursuite et de l'instruction des crimes et délits entrant dans le champ d'application des articles 704 et 706-73, à l'exception du 9°, ou 706-74 du code de procédure pénale.
« Art. L. 650-2. _ Au sein de chaque tribunal de grande instance dont la compétence territoriale est étendue au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel en application des articles 704 et 706-75 du code de procédure pénale, des magistrats du siège désignés par le premier président après avis du président du tribunal de grande instance et un ou plusieurs magistrats du parquet désignés par le procureur général après avis du procureur de la République sont chargés spécialement du jugement des délits entrant dans le champ d'application des articles 704, 706-73, à l'exception du 9°, ou 706-74 du code de procédure pénale.
« Art. L. 650-3. _ Au sein de chaque cour d'assises dont la compétence territoriale est étendue au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel en application de l'article 706-75 du code de procédure pénale, des magistrats du siège désignés par le premier président conformément aux dispositions des articles 244 à 253 du code de procédure pénale et un ou plusieurs magistrats du parquet désignés par le procureur général après avis du procureur de la République sont chargés spécialement du jugement des crimes entrant dans le champ d'application des articles 706-73, à l'exception du 9°, ou 706-74 du code de procédure pénale, dans les affaires qui sont ou apparaîtraient d'une grande complexité. »
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Comme cela a été souligné depuis le début du débat, le caractère complexe des affaires qui seront traitées par les juridictions interrégionales nécessite que ces affaires soient confiées à des magistrats spécialisés ayant acquis une expérience réelle dans la lutte contre la criminalité organisée et la délinquance économique et financière.
Aussi, sans modifier le statut de la magistrature, il s'agit de créer un vivier de magistrats dotés d'une réelle expérience et pouvant valoriser celle-ci dans le cadre d'une véritable filière consacrée à la lutte contre cette criminalité très spécifique.
L'amendement n° 465 a donc pour objet d'instituer un mécanisme qui garantisse cette exigence. Pour pouvoir être affectés au traitement des affaires relevant de cette criminalité organisée ou de la grande délinquance économique et financière, ces magistrats, nommés par décret dans la juridiction, devront en outre être habilités par le Premier président pour les magistrats du siège ou par le procureur général pour les magistrats du parquet après avis, selon le cas, du président du tribunal ou du procureur de la République.
Cette habilitation par le chef de cour a, me semble-t-il, plusieurs avantages : elle est souple, elle permet de garantir des choix éclairés, elle est respectueuse des règles qui régissent le statut des magistrats et elle nous permettra en quelque sorte d'avoir une véritable filière assurant la réussite de ce que j'ai appelé des « plateaux techniques » lors de mon intervention dans la discussion générale.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Monsieur le ministre, à l'article L. 650-2 tel que vous nous le proposez, il est fait référence à « un ou plusieurs magistrats du parquet désignés par le procureur général après avis du procureur de la République ». Il est précisé que ces magistrats du parquet viendront s'ajouter aux magistrats du siège et seront chargés spécialement du jugement des délits.
Or il apparaît à la commission des lois que les magistrats du parquet ne sont pas concernés par ce dernier point.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Il faut effectivement supprimer la référence aux magistrats du parquet qui provient sans doute d'un bug informatique. Je rectifie donc mon amendement en ce sens, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 465 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :
« Après l'article 7 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré un titre V dans le livre VI du code de l'organisation judiciaire ainsi rédigé :
« Titre V.
« Les juridictions spécialisées prévues par l'article 706-75 du code de procédure pénale.
« Art. L. 650-1. _ Au sein de chaque tribunal de grande instance dont la compétence territoriale est étendue au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel en application des articles 704 et 706-75 du code de procédure pénale, un ou plusieurs juges d'instruction désignés par le premier président après avis du président du tribunal de grande instance et un ou plusieurs magistrats du parquet désignés par le procureur général après avis du procureur de la République, sont chargés spécialement de l'enquête, de la poursuite et de l'instruction des crimes et délits entrant dans le champ d'application des articles 704 et 706-73, à l'exception du 9°, ou 706-74 du code de procédure pénale.
« Art. L. 650-2. _ Au sein de chaque tribunal de grande instance dont la compétence territoriale est étendue au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel en application des articles 704 et 706-75 du code de procédure pénale, des magistrats du siège désignés par le premier président après avis du président du tribunal de grande instance sont chargés spécialement du jugement des délits entrant dans le champ d'application des articles 704, 706-73, à l'exception du 9°, ou 706-74 du code de procédure pénale.
« Art. L. 650-3. _ Au sein de chaque cour d'assises dont la compétence territoriale est étendue au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel en application de l'article 706-75 du code de procédure pénale, des magistrats du siège désignés par le premier président conformément aux dispositions des articles 244 à 253 du code de procédure pénale sont chargés spécialement du jugement des crimes entrant dans le champ d'application des articles 706-73, à l'exception du 9°, ou 706-74 du code de procédure pénale, dans les affaires qui sont ou apparaîtraient d'une grande complexité. »
La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. Monsieur le rapporteur, nous avions évoqué la nécessité de mentionner dans le texte la poursuite et le jugement des crimes. Or cette mention, me semble-t-il, a disparu.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Cette mention figure à l'article L. 650-1 qui définit précisément l'enquête, la poursuite et l'instruction.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 465 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7 bis.
Section 2
Dispositions relatives aux infractions
en matière de santé publique
M. le président. Art. 8. - I. - L'intitulé du titre XIII bis du livre IV du code de procédure pénale est ainsi rédigé : « De la procédure applicable aux infractions en matière sanitaire ».
II. - L'article 706-2 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa du I, après le mot : « pour », sont insérés les mots : « l'enquête, » ;
1° bis Après les mots : « code de la santé publique ou », la fin du premier alinéa du I est ainsi rédigée : « à un produit destiné à l'alimentation de l'homme ou de l'animal ou à un produit ou une substance auxquels l'homme est durablement exposé et qui sont réglementés en raison de leurs effets ou de leur dangerosité, qui sont ou apparaîtraient d'une grande complexité : » ;
1° ter Avant le dernier alinéa du I, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« - infractions prévues par le code de l'environnement et le code du travail. » ;
2° Le dernier alinéa du I est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Cette compétence s'étend aux infractions connexes.
« Un décret fixe la liste et le ressort de ces juridictions, qui comprennent une section du parquet et des formations d'instruction et de jugement spécialisées pour connaître de ces infractions.
« Le procureur de la République, le juge d'instruction et la formation correctionnelle spécialisée de ces tribunaux exercent, dans les conditions et selon les modalités prévues par l'article 705, une compétence concurrente à celle qui résulte de l'application des articles 43, 52, 382, 663 (deuxième alinéa) et 706-42.
« Le procureur de la République près un tribunal de grande instance autre que ceux visés au présent article peut, pour les infractions énumérées ci-dessus, requérir le juge d'instruction, dans les conditions et selon les modalités prévues par les articles 705-1 et 705-2, de se dessaisir au profit de la juridiction d'instruction du tribunal de grande instance à compétence territoriale étendue par application du présent article. » ;
3° Le II est ainsi rédigé :
« II. - Dans les conditions et selon les modalités prévues aux deuxième à neuvième alinéas de l'article 706, peuvent exercer des fonctions d'assistant spécialisé en matière sanitaire les fonctionnaires de catégorie A ou B relevant des ministres chargés de la santé, de la recherche et de l'agriculture ainsi que les personnes titulaires, dans des matières définies par décret, d'un diplôme national sanctionnant une formation d'une durée au moins égale à quatre années d'études supérieures après le baccalauréat qui remplissent les conditions d'accès à la fonction publique et justifient d'une expérience professionnelle minimale de quatre années. »
L'amendement n° 74, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa du 3° du II de cet article, remplacer le mot : "neuvième" par le mot : "dixième". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Cet amendement de coordination concerne la formation des assistants spécialisés qui exercent dans les pôles économiques et financiers.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 74.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article additionnel après l'article 8
M. le président. L'amendement n° 255 rectifié, présenté par M. About et les membres du groupe de l'Union Centriste, est ainsi libellé :
« Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. _ L'article L. 4122-1 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Il peut, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession de sage-femme, de médecin ou de chirurgien-dentiste, y compris en cas de menaces ou de violences commises en raison de l'appartenance à l'une de ces professions.
« II. _ Il est inséré, après le troisième alinéa de l'article L. 4123-1 du même code, un alinéa ainsi rédigé :
« Il peut, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession médicale, y compris en cas de menaces ou de violences commises en raison de l'appartenance à l'une de ces professions. »
« III. _ A l'article L. 4161-4 du même code, les mots : ", les conseils de l'ordre" sont supprimés. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. François Zocchetto, rapporteur. Je le reprends, au nom de la commission, monsieur le président.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 255 rectifié bis.
La parole est à M. le rapporteur, pour le défendre.
M. François Zocchetto, rapporteur. Cet amendement vise à permettre aux conseils de l'ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes d'exercer les droits reconnus à la partie civile pour tous les faits portant atteinte à l'intérêt collectif de ces professions. Actuellement, cette possibilité n'est prévue qu'en cas d'exercice illégal d'une de ces professions.
La mesure proposée par l'amendement est donc tout à fait justifiée. Le système est d'ailleurs déjà prévu pour les pharmaciens et l'on ne voit pas pourquoi les médecins ou les chirurgiens-dentistes auraient un régime différent.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement émet un avis favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 255 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 8.
Division et article additionnels après l'article 8
M. le président. L'amendement n° 75, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après l'article 8, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :
« Section 2 bis.
« Dispositions relatives aux actes de terrorisme ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 75.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, une division additionnelle ainsi rédigée est insérée dans le projet de loi, après l'article 8.
L'amendement n° 76, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après l'article 8, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans la seconde phrase du premier alinéa de l'article 706-18 du code de procédure pénale, après les mots : "leurs observations", sont insérés les mots : "par le juge d'instruction" et les mots : "huit jours au plus tôt après cet avis" sont remplacés par les mots : "huit jours au plus tôt et un mois au plus tard à compter de cet avis".
« II. - Le premier alinéa de l'article 706-22 du code de procédure pénale est complété par la phrase suivante :
« Le ministère public peut également saisir directement la chambre criminelle de la Cour de cassation lorsque le juge d'instruction n'a pas rendu son ordonnance dans le délai d'un mois prévu au premier alinéa de l'article 706-18. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 76.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 8.
Section 3
Dispositions relatives aux infractions en matière
de pollution des eaux maritimes par rejets des navires
M. le président. Art. 9. - I. - Après le titre XXIV du livre IV du code de procédure pénale, il est inséré un titre XXVI ainsi rédigé :
« TITRE XXVI
« DE LA PROCÉDURE APPLICABLE
EN CAS DE POLLUTION DES EAUX MARITIMES
PAR REJETS DES NAVIRES
« Art. 706-102. - Pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et, s'il s'agit de délits, le jugement des infractions en matière de pollution des eaux marines et des voies ouvertes à la navigation maritime prévues et réprimées par le chapitre VIII du titre Ier du livre II du code de l'environnement, qui sont commises dans les eaux territoriales, les eaux intérieures et les voies navigables, la compétence d'un tribunal de grande instance peut être étendue au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel.
« Les dispositions du premier alinéa s'appliquent également lorsque les infractions mentionnées dans cet alinéa, à l'exception de celle visée à l'article L. 218-22 du code de l'environnement, sont commises dans la zone économique exclusive ou dans la zone de protection écologique.
« Toutefois, dans les affaires qui sont ou apparaissent d'une grande complexité, le procureur de la République près le tribunal de grande instance mentionné au premier alinéa peut requérir le juge d'instruction, dans les conditions et selon les modalités prévues par les articles 706-105 et 706-106, de se dessaisir au profit du tribunal de grande instance de Paris.
« Cette compétence s'étend aux infractions connexes.
« Un décret fixe la liste et le ressort de ces juridictions du littoral maritime, qui comprennent une section du parquet et des formations d'instruction et de jugement spécialisées pour connaître de ces infractions.
« Art. 706-103. - Pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions visées à l'article 706-102 commises hors des espaces maritimes sous juridiction française à bord d'un navire français, le tribunal de grande instance compétent est le tribunal de grande instance de Paris.
« Le tribunal de grande instance de Paris est également compétent pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement de l'infraction visée à l'article L. 218-22 du code de l'environnement, ainsi que des infractions qui lui sont connexes, lorsque ces infractions sont commises dans la zone économique exclusive ou dans la zone de protection écologique.
« Art. 706-104. - Le procureur de la République, le juge d'instruction, la formation correctionnelle spécialisée du tribunal de grande instance mentionné à l'article 706-102 exercent, sur toute l'étendue du ressort fixé en application de cet article, une compétence concurrente à celle qui résulte de l'application des articles 43, 52, 382, 663 (deuxième alinéa) et 706-42.
« Ils exercent également, dans les mêmes conditions, une compétence concurrente à celle qui résulte des critères de compétence suivants :
« 1° Lieu d'immatriculation du navire, engin ou plate-forme ou de son attachement en douanes ;
« 2° Lieu où le navire, engin ou plate-forme est ou peut être trouvé.
« La juridiction spécialisée saisie demeure compétente, quelles que soient les incriminations retenues lors du règlement ou du jugement de l'affaire. Toutefois, si les faits constituent une contravention, le juge d'instruction prononce le renvoi de l'affaire devant le tribunal de police compétent en application de l'article 522.
« Art. 706-105. - Le procureur de la République près un tribunal de grande instance autre que celui mentionné à l'article 706-102 peut, pour les infractions entrant dans le champ d'application de cet article, requérir le juge d'instruction de se dessaisir au profit de la juridiction d'instruction compétente en application de cet article. Les parties sont préalablement avisées et invitées à faire connaître leurs observations ; l'ordonnance est rendue huit jours au plus tôt après cet avis.
« Lorsque le juge d'instruction décide de se dessaisir, son ordonnance ne prend effet qu'à compter du délai de cinq jours prévu par l'article 706-106 ; lorsqu'un recours est exercé en application de cet article, le juge d'instruction demeure saisi jusqu'à ce que soit porté à sa connaissance l'arrêt de la chambre de l'instruction, passé en force de chose jugée ou celui de la chambre criminelle de la Cour de cassation.
« Dès que l'ordonnance est passée en force de chose jugée, le procureur de la République adresse le dossier de la procédure au procureur de la République près le tribunal compétent en application de l'article 706-104.
« Les dispositions du présent article sont applicables devant la chambre de l'instruction.
« Art. 706-106. - L'ordonnance rendue en application de l'article 706-105 peut, à l'exclusion de toute autre voie de recours, être déférée dans les cinq jours de sa notification, à la requête du ministère public ou des parties, soit à la chambre de l'instruction si la juridiction spécialisée devant laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la même cour d'appel, soit, dans le cas contraire, à la chambre criminelle de la Cour de cassation. La chambre de l'instruction ou la chambre criminelle désigne, dans les huit jours suivant la date de réception du dossier, le juge d'instruction chargé de poursuivre l'information.
« L'arrêt de la chambre de l'instruction ou de la chambre criminelle est porté à la connaissance du juge d'instruction ainsi qu'au ministère public et notifié aux parties.
« Les dispositions du présent article sont applicables à l'arrêt de la chambre de l'instruction rendu sur le fondement du dernier alinéa de l'article 706-105, le recours étant alors porté devant la chambre criminelle.
II. - Les juridictions d'instruction et de jugement saisies avant la promulgation de la loi n° 2003-346 du 15 avril 2003 relative à la création d'une zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République demeurent compétentes jusqu'à l'issue de la procédure. »
La parole est à M. Robert Bret, sur l'article.
M. Robert Bret. Nous prenons note de la volonté du Gouvernement de s'attaquer aux pollutions maritimes que constituent les dégazages et déballastages illégaux.
En tant que parlementaire des Bouches-du-Rhône, et donc de la façade maritime méditerranéenne, je suis particulièrement sensible à ces questions, et je regrette que ces dispositions n'aient pas donné lieu à des débats plus approfondis à l'Assemblée nationale.
La France, avec ses multiples façades maritimes, est particulièrement exposée à ce type de risques.
Les rejets à la mer d'hydrocarbures ou de produits chimiques ont des effets désastreux non seulement sur l'environnement, mais aussi sur les activités économiques telles que la pêche, la culture marine, la production de sel ou encore le tourisme.
On sait que quotidiennement, au large des côtes, on dégaze, on vidange, on nettoie les machineries, on cure les cuves, on rince les ballasts, autant de pratiques qui contribuent au rejet à la mer de tonnes de fioul, huiles et autres déchets nocifs.
A titre d'exemple, en Méditerranée, mer fermée, ce sont 600 000 tonnes de déchets qui sont chaque année déversées frauduleusement.
Outre une clarification des compétences de juridiction, vous nous proposez, monsieur le ministre, de renforcer le dispositif répressif. Soit, et même : bien !
Mais nul n'ignore que, sans effort en matière de réglementation et surtout de contrôle, la seule répression - même accrue - ne parviendra pas à empêcher les pollutions maritimes.
Face à la diminution des effectifs d'inspecteurs des affaires maritimes, il convient effectivement d'aller vers un renforcement des moyens humains et matériels pour permettre aux services compétents d'effectuer pleinement leurs missions de contrôle en mer.
Comme le souligne M. Zocchetto dans son rapport, « moins de 10 % des rejets volontaires signalés aboutissent donc à des procédures judiciaires transmises au parquet ». Moins de 10 % !
Et que dire du projet de suppression de quatre-vingts, voire de cent postes des services douaniers de surveillance terrestre sur la façade méditerranéenne, particulièrement ouverte aux trafics en tous genres ? Or, ces trafics, par des phénomènes de vases communicants, risquent de connaître un nouvel essor avec les annonces gouvernementales en matière de hausse du prix du tabac, par exemple.
Par ailleurs, il est nécessaire de développer les infrastructures portuaires permettant d'effectuer les déballastages et les dégazages. En effet, seuls deux ports français - Le Havre et Marseille - disposent à ce jour d'infrastructures adaptées à ces opérations.
Il faudrait que tous les ports français et européens accueillant des navires potentiellement polluants soient équipés de la sorte.
Tout doit également être mis en oeuvre pour interdire la navigation des bateaux-poubelles battant pavillon de complaisance, des navires qui ne respectent pas les normes minimales de sécurité ou encore de ceux dont les équipages sont soumis à des conditions de travail déplorables.
Comment, par ailleurs, ne pas évoquer le principe pollueur-payeur ? Le coût global environnemental, économique et social doit-il être laissé à la seule charge de la collectivité ?
Certes, la répartition des responsabilités entre le propriétaire du navire, le capitaine de celui-ci, l'armateur et la compagnie d'affrètement demeure une question des plus litigieuses. Je le reconnais, mais, dans le même temps, on ne peut pas se contenter de sanctionner le seul capitaine du navire.
En effet, les propriétaires et les affréteurs, qui ne peuvent pas ignorer l'état du bateau qu'ils font naviguer ni le danger potentiel qu'il représente, devraient être reconnus comme les responsables au premier chef lorsque de tels accidents se produisent. Cela suppose, bien évidemment, que ces responsables puissent être clairement identifiés.
Plus fondamentalement sans doute, la dissuasion et la prévention des comportements qui mettent en danger l'environnement maritime et marin exigent une coopération européenne et internationale plus étroite.
Au-delà, prenons garde à ne pas pénaliser notre pavillon national par rapport aux autres.
Telles sont, monsieur le ministre, mes chers collègues, les observations que je tenais à formuler sur cet article.
ARTICLE 706-102 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 466, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Dans le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour insérer un article 706-102 dans le code de procédure pénale, substituer aux mots : "le chapitre VIII du titre Ier du livre II du code de l'environnement" les mots : "la sous-section 2 de la section première du chapitre VIII du titre Ier du livre II du code de l'environnement". »
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Cet amendement a pour objet de bien définir les compétences matérielles des tribunaux du littoral maritime de Brest, du Havre et de Marseille, et de trouver un équilibre avec la compétence spécialisée du tribunal de grande instance de Paris.
Je m'étais rendu voilà quelques mois à Brest pour examiner la situation de manière précise avec les magistrats, avec les avocats et avec l'ensemble des professionnels concernés.
Il nous est apparu assez clairement que, s'il était bon que la plupart des affaires relèvent de la compétence du tribunal du littoral, en revanche, un certain nombre de cas particulièrement complexes - tout spécialement lorsque ceux-ci revêtent une dimension internationale nécessitant une certaine pratique de la part du magistrat, que ce soit un magistrat du parquet ou un juge d'instruction - devaient relever du tribunal de grande instance de Paris.
Fondé sur l'observation et élaboré après un dialogue avec les professionnels sur le terrain, cet amendement équilibré traduit une volonté de faire fonctionner le système de la meilleure manière possible, compte tenu de la nature très complexe des dossiers et de la nécessité d'une expérience plus ou moins grande selon la nature des cas particuliers.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Nous avons entendu avec un grand intérêt les explications de M. le ministre. La commission avait émis un avis de sagesse sur ce point.
Elle est prête à tenir compte de la complexité de certains dossiers et à faire en sorte que les moyens attribués au traitement de ces dossiers ne soient pas insuffisants, ce qui peut parfois être le cas dans les juridictions de Brest, du Havre ou de Marseille, en raison, non pas, bien sûr, de la compétence des magistrats, mais du volume d'affaires et de l'ampleur des investigations à conduire.
La commission souhaite aussi que ces dossiers ne soient pas trop « déterritorialisés », et donc éloignés du lieu de commission des infractions. Il est important de conserver un système souple. Le dossier doit pouvoir être traité localement, mais lorsqu'il y a manifestement besoin d'un dessaisissement, il faut que ce soit possible - je pense aux cas les plus graves de marée noire ou de pollution du sous-sol marin.
Les explications de M. le garde des sceaux nous ont rassurés. A titre personnel, je voterai l'amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 466.
M. Robert Bret. Le groupe CRC s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 455, présenté par MM. de Rohan, Gérard et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
« Supprimer le troisième alinéa du texte proposé par le I de cet article pour insérer un article 706-102 dans le code de procédure pénale. »
La parole est à M. Jean-Claude Carle.
M. Jean-Claude Carle. Cet amendement vise à lutter avec la plus grande efficacité contre les pollutions maritimes et contre ceux que le chef de l'Etat qualifiait de « voyous des mers ».
L'objet de cet amendement est donc de maintenir la compétence des tribunaux de grande instance du littoral, car il nous semble préférable de renforcer l'efficacité de ces tribunaux plutôt que de recentraliser sur Paris le traitement des affaires les plus complexes, qui sont par ailleurs, comme vous le savez, monsieur le ministre, celles qui intéressent les élus, notamment les élus locaux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Pour les mêmes raisons que celles que j'ai exposées lors de la discussion de l'amendement précédent, la commission a émis un avis de sagesse.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Les amendements n°s 466 et 455 sont contradictoires.
M. Jean-Jacques Hyest. C'est évident !
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Les choses doivent être claires et je voudrais bien me faire comprendre. Il ne s'agit absolument pas de vouloir traiter systématiquement les affaires importantes au TGI de Paris.
A la suite de l'affaire du Prestige, je me suis rendu à Brest au cours du printemps pour y rencontrer l'ensemble des professionnels concernés, notamment les armateurs, dont nous reparlerons sans doute tout à l'heure. J'ai personnellement examiné, et de très près, les conditions dans lesquelles les tribunaux du littoral étaient ou non en capacité de traiter les dossiers, en particulier lorsque ces derniers prenaient une dimension internationale particulière.
En réalité, lorsqu'un tribunal n'a pas, au cours d'une année, l'occasion de traiter à plusieurs reprises un dossier ayant une dimension internationale, il arrive que le juge d'instruction ne sache pas comment s'y prendre.
Sans entrer dans des cas particuliers que je n'ai pas à évoquer ici, je puis vous dire qu'il m'est arrivé de constater que des actes n'étaient pas accomplis ou que des contacts n'étaient pas pris, bref, que des affaires ne se déroulaient pas de façon normale à cause du manque d'expérience. Avec qui faut-il prendre contact en Espagne ? Comment traite-t-on ce type de dossier ? Quelle est la procédure à mettre en oeuvre ? Ce sont à des questions aussi simples que sont confrontés les tribunaux qui n'ont pas l'occasion de traiter assez souvent ces cas pour « se faire la main ».
C'est la raison pour laquelle une attitude souple et pragmatique me paraît nécessaire : lorsqu'il s'agit de questions habituelles, traitons-les au plus près, mais, lorsque la complexité est réelle et qu'elle est constatée par les professionnels eux-mêmes, prévoyons la possibilité de confier le dossier à un tribunal qui a l'habitude de traiter ce type d'affaire et, en particulier, de gérer leur dimension internationale.
Voilà l'esprit de l'amendement du Gouvernement, et l'amendement déposé par M. de Rohan est en contradiction avec cet esprit.
M. le président. L'amendement n° 455 est-il maintenu, monsieur Carle ?
M. Jean-Claude Carle. Compte tenu des explications que vient de nous donner M. le ministre, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 455 est retiré.
M. Robret Bret. Je le reprends !
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 455 rectifié.
La parole est à M. Robert Bret, pour le défendre.
M. Robert Bret. Bien que je me sois abstenu sur l'amendement n° 466 du Gouvernement, je fais miens les propos de notre collègue Jean-Claude Carle.
Dès lors qu'à travers ce projet de loi on envisage des juridictions spécialisées et décentralisées, la question principale est celle des moyens, en l'occurrence celle des moyens nécessaires aux TGI du littoral pour être pleinement efficaces.
Je vois donc une contradiction, une incohérence dans la position du Gouvernement. En effet, alors même que l'on mesure l'importance des moyens nouveaux qu'il faut se donner pour lutter contre ce type de criminalité, la centralisation sur le TGI de Paris contredit toute la démarche du Gouvernement.
La question de l'efficacité contre ce type de criminalité se pose bien avant tout en termes de moyens financiers et de moyens humains.
M. le président. La parole est à M. Henri de Richemont, pour explication de vote.
M. Henri de Richemont. En réponse à mon excellent collègue, je dirai que, pour traiter ces affaires de pollution, qui sont souvent des affaires difficiles, les tribunaux du littoral sont souvent insuffisamment équipés, en hommes comme en moyens. Dans une très grosse affaire dont j'ai eu personnellement à connaître, j'ai ainsi vu un TGI du littoral devoir faire appel à des magistrats de Paris pour se faire seconder, ce qui n'est pas forcément une bonne chose.
Il me paraît donc préférable, pour garantir tant l'unicité de la jurisprudence que l'efficacité de la justice, de centraliser les affaires importantes au TGI de Paris.
M. Emmanuel Hamel. C'est un grand avocat qui a parlé !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 455 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 706-102 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLES 706-103 ET 706-104
M. le président. Je mets aux voix les textes proposés pour les articles 706-103 et 706-104 du code de procédure pénale.
(Ces textes sont adoptés.)
ARTICLE 706-105 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 78, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du premier alinéa du I du texte proposé par cet article pour insérer un article 706-105 dans le code de procédure pénale, remplacer les mots : "celui mentionné" par les mots : "ceux visés". »
L'amendement n° 77, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour insérer un article 706-105 dans le code de procédure pénale, après les mots : "leurs observations", insérer les mots : "par le juge d'instruction". »
L'amendement n° 79, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après les mots : "huit jours" rédiger comme suit la fin de la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-105 du code de procédure pénale : "au plus tôt et un mois au plus tard à compter de cet avis". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 78 est un amendement de cohérence rédactionnelle ; les amendements n°s 77 et 79 sont des amendements de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable aux trois amendements.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 78.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 77.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 79.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 706-105 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
ARTICLE 706-106 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE
M. le président. L'amendement n° 81, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour insérer un article 706-106 dans le code de procédure pénale, remplacer les mots : "devant laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la même cour d'appel" par les mots : "au profit de laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la cour d'appel dans lequel est située la juridiction initialement saisie". »
L'amendement n° 80, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Compléter le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article 706-106 du code de procédure pénale par la phrase suivante : "le ministère public peut également saisir directement la chambre de l'instruction ou la chambre criminelle de la Cour de cassation lorsque le juge d'instruction n'a pas rendu son ordonnance dans le délai d'un mois prévu au premier alinéa de l'article 706-105". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit d'amendements de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable aux deux amendements.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 81.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 80.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix, modifié, le texte proposé pour l'article 706-106 du code de procédure pénale.
(Ce texte est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 467, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Supprimer le II de cet article. »
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. L'article 4 de la loi du 15 avril 2003 relative à la création d'une zone de protection écologique au large des côtes du territoire de la République a procédé à une extension de compétence des tribunaux du littoral maritime spécialisés aux infractions de pollution des eaux marines commises en zone économique exclusive et en zone de protection écologique.
Le II du présent article prévoit une disposition permettant aux juridictions d'instruction et de jugement saisies des chefs de rejets volontaires ou involontaires de polluants par les navires avant la promulgation de cette loi de demeurer compétentes jusqu'à l'issue de la procédure.
Cette disposition transitoire a déjà été adoptée à l'identique par le Parlement lors de l'examen de la loi du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages. Elle est donc devenue sans objet.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 467.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de l'article 9, modifié.
(L'article 9 est adopté.)
M. le président. Art. 10. - Le code de l'environnement est ainsi modifié :
1° Dans la sous-section 2 de la section 1 du chapitre VIII du titre Ier du livre II, sont insérés, avant l'article L. 218-10, un paragraphe 1 intitulé « Incriminations et peines » et, avant l'article L. 218-26, un paragraphe 2 intitulé « Procédure » ;
2° L'article L. 218-10 est ainsi modifié :
a) Au I, les mots : « de quatre ans d'emprisonnement et de 600 000 EUR d'amende » sont remplacés par les mots : « de dix ans d'emprisonnement et de 1 000 000 EUR d'amende » ;
b) Il est complété par un III ainsi rédigé :
« III. - La peine d'amende prévue au I peut être remplacée par une amende équivalente aux deux tiers de la valeur de la cargaison transportée ou du fret. »
3° Au premier alinéa de l'article L. 218-11, les mots : « de deux ans d'emprisonnement et de 180 000 EUR d'amende » sont remplacés par les mots : « de cinq ans d'emprisonnement et de 500 000 EUR d'amende » ;
4° L'article L. 218-22 est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, les mots : « de peines égales à la moitié de celles prévues audit article » sont remplacés par les mots : « de cinq ans d'emprisonnement et de 500 000 EUR d'amende » ;
b) Au troisième alinéa, les références : « L. 218-12 et L. 218-13 » sont remplacées par la référence : « et L. 218-12 » et les mots : « de peines égales à la moitié de celles prévues auxdits articles » sont remplacés par les mots : « de trois ans d'emprisonnement et de 200 000 EUR d'amende » ;
c) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l'infraction est commise au moyen d'un navire ou engin entrant dans les catégories visées à l'article L. 218-13, elle est punie de 4 000 EUR d'amende. » ;
d) Dans le quatrième alinéa, les mots : « deux alinéas précédents » sont remplacés par les mots : « deuxième, troisième et quatrième alinéas » ;
5° L'article L. 218-24 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, avant les mots : « Le tribunal », il est inséré la mention « I. - » ;
b) Le troisième alinéa est remplacé par un II ainsi rédigé :
« II. - Les personnes physiques coupables des infractions prévues par la présente sous-section encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° L'interdiction, à titre définitif ou pour cinq ans au plus, d'exercer l'activité professionnelle à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ;
« 2° La fermeture, définitive ou pour une durée de cinq ans au plus, des établissements ou de l'un ou plusieurs établissements ayant servi à commettre l'infraction ;
« 3° L'exclusion des marchés publics, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus ;
« 4° La confiscation du navire ou de l'engin ayant servi à commettre l'infraction ;
« 5° L'affichage ou la publication de la décision, dans les conditions de l'article 131-35 du code pénal ;
« 6° La confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. » ;
6° L'article L. 218-25 est ainsi modifié :
a) Le 2° du II est ainsi rédigé :
« 2° Les peines mentionnées aux 1° , 2° , 4° , 5° , 6° , 8° et 9° de l'article 131-39 du code pénal ; »
b) Le II est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° La confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis. » ;
7° L'article L. 218-29 est ainsi rédigé :
« Art. L. 218-29. - Les règles relatives à la compétence des juridictions pénales spécialisées pour connaître des infractions prévues par la présente sous-section sont fixées par les articles 706-102 à 706-106 du code de procédure pénale ci-après reproduits :
« Art. 706-102. - Pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et, s'il s'agit de délits, le jugement des infractions en matière de pollution des eaux marines et des voies ouvertes à la navigation maritime prévues et réprimées par le chapitre VIII du titre Ier du livre II du code de l'environnement, qui sont commises dans les eaux territoriales, les eaux intérieures et les voies navigables, la compétence d'un tribunal de grande instance peut être étendue au ressort d'une ou plusieurs cours d'appel.
« Les dispositions du premier alinéa s'appliquent également lorsque les infractions mentionnées dans cet alinéa, à l'exception de celle visée à l'article L. 218-22 du code de l'environnement, sont commises dans la zone économique exclusive ou dans la zone de protection écologique.
« Toutefois, dans les affaires qui sont ou apparaissent d'une grande complexité, le procureur de la République près le tribunal de grande instance mentionné au premier alinéa peut requérir le juge d'instruction, dans les conditions et selon les modalités prévues par les articles 706-105 et 706-106, de se dessaisir au profit du tribunal de grande instance de Paris.
« Cette compétence s'étend aux infractions connexes.
« Un décret fixe la liste et le ressort de ces juridictions du littoral maritime, qui comprennent une section du parquet et des formations d'instruction et de jugement spécialisées pour connaître de ces infractions.
« Art. 706-103. - Pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions visées à l'article 706-102 commises hors des espaces maritimes sous juridiction française à bord d'un navire français, le tribunal de grande instance compétent est le tribunal de grande instance de Paris.
« Le tribunal de grande instance de Paris est également compétent pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement de l'infraction visée à l'article L. 218-22 du code de l'environnement, ainsi que des infractions qui lui sont connexes, lorsque ces infractions sont commises dans la zone économique exclusive ou dans la zone de protection écologique.
« Art. 706-104. - Le procureur de la République, le juge d'instruction, la formation correctionnelle spécialisée du tribunal de grande instance mentionné à l'article 706-102 exercent, sur toute l'étendue du ressort fixé en application de cet article, une compétence concurrente à celle qui résulte de l'application des articles 43, 52, 382, 663 (deuxième alinéa) et 706-42.
« Ils exercent également, dans les mêmes conditions, une compétence concurrente à celle qui résulte des critères de compétence suivants :
« 1° Lieu d'immatriculation du navire, engin ou plate-forme ou de son attachement en douanes ;
« 2° Lieu où le navire, engin ou plate-forme est ou peut être trouvé.
« La juridiction spécialisée saisie demeure compétente, quelles que soient les incriminations retenues lors du règlement ou du jugement de l'affaire. Toutefois, si les faits constituent une contravention, le juge d'instruction prononce le renvoi de l'affaire devant le tribunal de police compétent en application de l'article 522.
« Art. 706-105. - Le procureur de la République près un tribunal de grande instance autre que celui mentionné à l'article 706-102 peut, pour les infractions entrant dans le champ d'application de cet article, requérir le juge d'instruction de se dessaisir au profit de la juridiction d'instruction compétente en application de cet article. Les parties sont préalablement avisées et invitées à faire connaître leurs observations ; l'ordonnance est rendue huit jours au plus tôt après cet avis.
« Lorsque le juge d'instruction décide de se dessaisir, son ordonnance ne prend effet qu'à compter du délai de cinq jours prévu par l'article 706-106 ; lorsqu'un recours est exercé en application de cet article, le juge d'instruction demeure saisi jusqu'à ce que soit porté à sa connaissance l'arrêt de la chambre de l'instruction, passé en force de chose jugée ou celui de la chambre criminelle de la Cour de cassation.
« Dès que l'ordonnance est passée en force de chose jugée, le procureur de la République adresse le dossier de la procédure au procureur de la République près le tribunal compétent en application de l'article 706-104.
« Les dispositions du présent article sont applicables devant la chambre de l'instruction.
« Art. 706-106. - L'ordonnance rendue en application de l'article 706-105 peut, à l'exclusion de toute autre voie de recours, être déférée dans les cinq jours de sa notification, à la requête du ministère public ou des parties, soit à la chambre de l'instruction si la juridiction spécialisée devant laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la même cour d'appel, soit, dans le cas contraire, à la chambre criminelle de la Cour de cassation. La chambre de l'instruction ou la chambre criminelle désigne, dans les huit jours suivant la date de réception du dossier, le juge d'instruction chargé de poursuivre l'information.
« L'arrêt de la chambre de l'instruction ou de la chambre criminelle est porté à la connaissance du juge d'instruction ainsi qu'au ministère public et notifié aux parties.
« Les dispositions du présent article sont applicables à l'arrêt de la chambre de l'instruction rendu sur le fondement du dernier alinéa de l'article 706-105, le recours étant alors porté devant la chambre criminelle. »
L'amendement n° 271 rectifié, présenté par M. de Richemont, est ainsi libellé :
« I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par le b du 5° de cet article pour remplacer le troisième alinéa de l'article L. 218-24 du code de l'environnement, remplacer les mots : "la présente sous-section" par les mots : "les articles L. 218-10 à L. 218-21".
« II. - Compléter, in fine, le même texte par un alinéa ainsi rédigé :
« III. - Les personnes physiques coupables des infractions prévues par l'article L. 218-22 encourent à titre de peine complémentaire, la peine d'affichage de la décision prononcée ou de diffusion de celle-ci dans les conditions de l'article 131-35 du code pénal. »
La parole est à M. Henri de Richemont.
M. Henri de Richemont. Cet amendement, qui me paraît très important, tend à opérer pour l'application des peines complémentaires pouvant être prononcées à l'encontre des armateurs et des commandants une distinction entre les faits de pollution volontaires et involontaires.
Le texte actuel du code de l'environnement prévoit des peines de prison et d'amende, mais l'article L. 218-21 de ce code en exonère les armateurs et les navires étrangers en application de l'article 230 de la convention de Montego Bay, article selon lequel les seules peines pouvant être infligées à des armateurs étrangers en dehors des eaux territoriales sont des peines d'amende.
L'article L. 218-21 du code de l'environnement restant inchangé et la convention de Montego Bay continuant à s'appliquer, les peines complémentaires, qui vont de la confiscation du navire à la dissolution de la compagnie d'armement, ne pourront s'appliquer qu'aux armateurs et commandants français, alors que la jurisprudence fait apparaître qu'ils ne sont pas les vrais pollueurs de nos mers.
Monsieur le garde des sceaux, le Gouvernement, très légitimement, veut développer le pavillon français. Aujourd'hui au vingt-huitième rang mondial,...
M. Emmanuel Hamel. Hélas !
M. Henri de Richemont. ... notre flotte ne représente que 0,5 % de la flotte mondiale. Nous ne pesons donc rien au sein de l'organisation maritime internationale, l'OMI. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement prend des dispositions pour tenter de rapatrier des navires sous pavillon français, mais il est bien évident qu'un tel texte, loin d'encourager des armateurs à revenir sous pavillon français, poussera ceux qui le sont à « dépavilloner » leurs navires !
De surcroît, monsieur le ministre, plus aucune banque n'acceptera de financer des navires sous pavillon français, puisque ce seront les seuls sur lesquels pèsera un risque de confiscation.
La situation serait absolument kafkaïenne ! Il est bon que nous légiférions contre les pollueurs des mers, mais, si cette législation ne se retourne que contre nos armateurs, contre nos commandants, contre nos navires, contre notre pavillon, nous empêcherons notre nation de redevenir une grande puissance maritime.
Si nous voulons que notre pays puisse oeuvrer en faveur de la sécurité des mers, il faut lui permettre de développer son pavillon, faute de quoi il continuera à ne rien peser au sein de l'OMI, où le Liberia, les Bahamas, tous les autres pays ont plus de poids que la France !
La volonté du Gouvernement n'est sûrement pas de sanctionner les seuls armateurs sous pavillon français et d'exonérer de leur responsabilité les navires étrangers.
L'amendement que j'ai déposé vise à corriger ce qui semble donc être une erreur. Je ne crois pas qu'il existe au monde un seul Etat qui légiférerait ainsi contre ses seuls ressortissants !
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. La commission, qui a entendu avec un vif intérêt les arguments avancés par l'un de ses membres, particulièrement qualifié pour aborder le sujet, a, dans un premier temps, été un peu troublée, car elle était déchirée entre protection de l'environnement et protection de nos intérêts nationaux.
Elle avait décidé de s'en remettre à la sagesse du Sénat, mais l'amendement que nous présente maintenant M. de Richemont, amendement qui est rectifié par rapport à celui qu'a étudié la commission, recueille mon avis favorable à titre personnel, car il parvient à concilier protection du milieu marin et protection du pavillon français en distinguant pollutions volontaires et pollutions involontaires.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. La préoccupation de M. de Richemont de ne pas pénaliser les navires français par rapport aux navires étrangers me paraît tout à fait fondée, et, dans la mesure où son amendement distingue entre pollutions volontaires et pollutions involontaires, je m'en remets à la sagesse du Sénat.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote.
M. Robert Bret. Nous sommes confrontés à un vrai problème : notre collègue Henri de Richemont avance des arguments forts, à commencer par la nécessité de ne pas pénaliser notre flotte, mais, dans le même temps, on ne peut pas faire passer un signal qui revient à donner un droit à polluer !
J'ai déjà dit que la question posée était celle de l'harmonisation européenne. Pour faire avancer le droit à l'échelon européen sur ces question, allons-nous attendre que tout soit réglé à l'échelon européen ou au contraire donner l'exemple à l'échelon de notre pays ?
Pour ma part, je préfère la seconde solution, même si les peines complémentaires ne s'appliqueraient d'abord qu'aux armateurs et commandants de navires battant pavillon français, car je ne vois pas comment faire avancer la question autrement et je vous mets en garde, mes chers collègues, contre le risque d'afficher avec un tel signal un droit à la pollution. Je l'ai dit, l'essentiel de la pollution en Méditerranée a pour cause les dégazages en mer des bateaux - sans autorisation bien entendu - alors qu'il y a dans le port de Marseille-Fos, toutes les installations pour dégazer. Que notre collègue Henri de Richemont nous explique comment nous allons faire respecter le droit à ne pas polluer en Méditerranée !
M. le président. La parole est à M. Henri de Richemont, pour explication de vote.
M. Henri de Richemont. Je crois que tous ici nous sommes opposés aux pollutions maritimes, qu'elles viennent de la mer comme de la terre d'ailleurs ! Pour répondre à notre collègue Robert Bret, je tiens à dire qu'à Bruxelles l'on discute en ce moment même les termes d'une directive qui traite exactement de notre sujet et qui prévoit des peines bien inférieures à celles dont nous discutons aujourd'hui ici. Cela signifie que, dans quelque temps, nous allons devoir transposer dans notre propre droit une directive qui nous obligera à revenir sur ce que nous sommes en train de faire. Ma première réaction aurait été de dire : attendons la directive ! Je comprends toutefois parfaitement que nous voulions envoyer un signal, mais à quoi sert en définitive ce signal ?
Je le redis, aucune des décisions rendues à ce jour ne condamne un commandant français pour pollution maritime. Alors que les dispositions de l'article 230 de la convention de Montego Bay et de l'article 218-21 du code de l'environnement exonèrent les armateurs et les commandants étrangers qui polluent en haute mer, c'est pourtant contre ces seuls commandants français que nous instituons des peines complémentaires.
M. Robert Bret. Pas contre ceux qui respectent la loi !
M. Henri de Richemont. Demain, les banques, pour financer un navire, demanderont aux armateurs de quitter le pavillon français. Aujourd'hui, on peut « dépavillonner » comme on l'entend, et il n'y aura bientôt plus de pavillon français : notre poids tant à Bruxelles qu'au sein de l'OMI sera réduit à néant.
M. Robert Bret. Que les armateurs respectent la loi, monsieur de Richemont !
Mme Nicole Borvo. S'ils respectent la loi, ils ne risquent rien !
M. Henri de Richemont. Donnons des signaux, mais faisons attention à ne pas être contreproductifs. Or sanctionner uniquement des commandants français ne sert à rien. Je ne connais en effet pas un commandant français qui dégazerait volontairement en mer. Si seuls les armateurs et les marins français sont sanctionnables, les banques, compte tenu du risque, vont refuser de financer des bateaux sous pavillon français, tandis que les armateurs ou les marins étrangers qui polluent seront exonérés de toute sanction, ce qui paraît tout de même assez extravagant.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Les sanctions ne concernent que ceux qui enfreignent la loi. On nous explique que pas un seul commandant français ne risque de tomber sous le coup de ces sanctions, mais on n'en revendique pas moins pour eux une sorte de droit à polluer. Il y a tout de même là quelque chose d'étrange.
J'estime pour ma part qu'une législation répressive en la matière donnera à notre pays un très bon argument dans les négociations européennes.
M. Henri de Richemont. Pas du tout !
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je pense que les choses sont claires pour M. de Richemont et pour moi-même, mais je voudrais qu'elles le soient pour tous.
L'amendement n° 271 rectifié prévoit à titre de peines complémentaires l'ensemble des peines prévues dans le projet de loi, mais il en réduit l'application aux seuls cas où l'infraction aura été commise volontairement.
Les pollutions résultant d'un accident de mer sont donc seules visées, madame Borvo et monsieur Bret : lorsqu'il y a infraction volontaire, c'est-à-dire lorsque la pollution n'est pas le résultat d'un accident de mer, l'ensemble des peines complémentaires prévues s'appliquent.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 271 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 272 rectifié, présenté par M. de Richemont, est ainsi libellé :
« I. - Avant le a du 6° de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...) Au I, les mots : "à la présente sous-section" sont remplacés par les mots : "aux articles L. 218-10 à L. 218-21".
« II. - Compléter le 6° de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« ...) Cet article est complété in fine par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - Les personnes morales peuvent également être déclarées pénalement responsables dans les mêmes conditions des infractions définies par l'article L. 218-22. Elles encourent les peines prévues au II à l'exception des peines mentionnées aux 1°, 2°, 4° et 8° de l'article 131-39 du code pénal prévues au 2° du II ainsi que de la peine prévue au 3° du II. »
La parole est à M. Henri de Richemont.
M. Henri de Richemont. Dans une optique consensuelle, j'ai déposé un amendement tendant à soustraire aux foudres de la loi les auteurs d'accidents involontaires, des peines complémentaires demeurant prévues pour les actes volontaires.
Je redis à la Haute Assemblée que, compte tenu de l'article 230 de la convention de Montego Bay, ces peines complémentaires ne s'appliqueront qu'aux marins français et non aux marins étrangers, qui ne peuvent être passibles que d'une peine d'amende. Je ne reviendrai pas sur l'argumentation que j'ai développée, mais c'est là une situation que, pour ma part, je ne trouve pas forcément satisfaisante à l'heure où l'on veut redévelopper le pavillon français.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. A partir du moment où l'amendement n° 271 rectifié a déjà été voté en l'état, il est évident que l'amendement n° 272 rectifié connaîtra le même sort. Toutefois, je souhaite que, au cours de la navette, cette question soit examinée de très près. Pour ma part, je n'ai pas l'expertise de M. de Richemont, s'agissant notamment de ce que dispose l'article 230 de la convention de Montego Bay, mais c'est là un problème très difficile.
Vous avez développé avec beaucoup de talent et de conviction, monsieur de Richemont, un argument auquel on ne peut rester insensible, relatif à la nécessité de ne pas pénaliser l'armement français, qui ne se porte pas bien.
Cependant, vous savez à quel point il est essentiel, à l'heure actuelle, que nos concitoyens aient le sentiment que nous faisons absolument tout ce qu'il est possible de faire s'agissant de la protection des côtes françaises, y compris pour réprimer les agissements éventuels des trop rares - je suis le premier à le dire - capitaines et armateurs français.
En effet, les catastrophes qui sont survenues ont été profondément ressenties par les populations du littoral et, au-delà, par toute la nation. Par conséquent, si l'argument selon lequel il convient de retenir les sanctions les plus mesurées pour ne pas pénaliser l'armement français sur le plan international a certes sa valeur, il doit faire l'objet d'une réflexion plus approfondie au cours de la navette.
A cet égard, je regrette, monsieur de Richemont, que vous n'ayez pu assister à la réunion de la commission des lois, parce que nous étions dans un état de profonde perplexité.
M. le président. La parole est à M. Henri de Richemont, pour explication de vote.
M. Henri de Richemont. Monsieur Badinter, je suis le premier à regretter de n'avoir pu assister à la réunion de la commission ; je me trouvais alors à Osaka, au chantier naval de Kawasaki, où des armateurs étrangers immatriculaient deux navires gaziers sous pavillon français. J'en étais très fier, et je ne voudrais vraiment pas qu'ils passent sous un autre pavillon.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. En réponse à M. Badinter, je prends l'engagement devant le Sénat de refaire le point sur la question soulevée avec l'ensemble des professionnels, quel que soit leur rôle sur le plan économique, afin que l'on puisse bien clarifier les choses au cours de la navette. Il faut moraliser la situation et lutter contre les voyous des mers. L'affaire du Prestige est invraisemblable.
M. Robert Bret. Tout à fait !
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Il ne s'agit nullement là d'opérateurs sérieux qui travaillent à défendre les intérêts économiques français.
Je m'engage donc très volontiers, je le répète, à ce que des discussions très franches soient menées avec les professionnels, afin que des éléments complémentaires puissent éventuellement être versés au débat. Je suis d'ailleurs prêt à associer un certain nombre de parlementaires à ces échanges.
Le dispositif inscrit à l'amendement qui a été adopté me paraît équilibré, mais je suis tout à fait disposé à aller plus loin dans la transparence et dans la recherche de la meilleure solution possible, en vue de défendre à la fois l'environnement et les intérêts du pavillon français.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 272 rectifié.
M. Robert Bret. Le groupe CRC s'abstient.
M. Jean-Pierre Sueur. Le groupe socialiste également.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 456, présenté par MM. de Rohan, Gérard et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
« Supprimer le quatrième alinéa du texte proposé par le 7° de cet article pour l'article L. 218-29 du code de l'environnement. »
Cet amendement n'a plus d'objet.
L'amendement n° 82, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« I. _ Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le 7° de cet article pour reproduire l'article 706-105 du code de procédure pénale à l'article L. 218-29 du code de l'environnement, remplacer les mots : "celui mentionné" par les mots : "ceux visés".
« II. _ Dans la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le 7° de cet article pour reproduire l'article 706-105 du code de procédure pénale à l'article L. 218-29 du code de l'environnement, après les mots : "leurs observations", insérer les mots : "par le juge d'instruction".
« III. _ Après les mots : "huit jours", rédiger comme suit la fin de la seconde phrase du premier alinéa du texte proposé par le 7° de cet article pour reproduire l'article 706-105 du code de procédure pénale à l'article L. 218-29 du code de l'environnement : "au plus tôt et un mois au plus tard à compter de cet avis."
« IV. _ Compléter le premier alinéa du texte proposé par le 7° de cet article pour reproduire l'article 706-106 du code de procédure pénale à l'article L. 218-29 du code de l'environnement par la phrase suivante :
« Le ministère public peut également saisir directement la chambre de l'instruction ou la chambre criminelle de la Cour de cassation lorsque le juge d'instruction n'a pas rendu son ordonnance dans le délai d'un mois prévu au premier alinéa de l'article 706-105.
« V. _ Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé par le 7° de cet article pour reproduire l'article 706-106 du code de procédure pénale à l'article L. 218-29 du code de l'environnement, remplacer les mots : "devant laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la même cour d'appel" par les mots : "au profit de laquelle le dessaisissement a été ordonné ou refusé se trouve dans le ressort de la cour d'appel dans lequel est située la juridiction initialement saisie". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix d'amendement n° 82.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Division et articles additionnels après l'article 10
M. le président. L'amendement n° 256, présenté par MM. Carle, Balarello, Geoffroy, Ginésy, Natali, Peyrat, Trucy et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
« Après l'article 10, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :
« Section...
« Dispositions relatives aux infractions en matière d'incendie de forêts ».
L'amendement n° 257, présenté par MM. Carle, Balarello, Geoffroy, Ginésy, Natali, Peyrat, Trucy et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
« Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 322-5 du code pénal est complété in fine par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu'il s'agit de l'incendie de bois, forêts, landes, maquis, plantations ou reboisements d'autrui, les peines sont portées à deux ans d'emprisonnement et à 30 000 euros d'amende dans le cas prévu par le premier alinéa, et à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende dans le cas prévu par le deuxième alinéa.
« Si cet incendie est intervenu dans des conditions de nature à exposer les personnes à un dommage corporel ou à créer un dommage irréversible à l'environnement, les peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende dans le cas prévu par le premier alinéa, et à cinq ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende dans le cas prévu par le deuxième alinéa.
« Si l'incendie a provoqué pour autrui une incapacité totale de travail pendant huit jours au plus, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende dans le cas prévu par le premier alinéa, et à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende dans le cas prévu par le deuxième alinéa.
« S'il a provoqué la mort d'une ou plusieurs personnes, les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende dans le cas prévu par le premier alinéa, et à dix ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende dans le cas prévu par le deuxième alinéa. »
L'amendement n° 258, présenté par MM. Carle, Balarello, Peyrat, Geoffroy, Trucy, Natali et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
« Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. _ L'article 322-6 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il s'agit de l'incendie de bois, forêts, landes, maquis, plantations ou reboisements d'autrui intervenu dans des conditions de nature à exposer les personnes à un dommage corporel ou à créer un dommage irréversible à l'environnement, les peines sont portées à quinze ans d'emprisonnement et à 150 000 euros d'amende. »
« II. _ L'article 322-7 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il s'agit de l'incendie de bois, forêts, landes, maquis, plantations ou reboisements d'autrui, les peines sont portées à vingt ans de réclusion et à 200 000 euros d'amende. »
« III. _ Après le quatrième alinéa (3°) de l'article 322-8 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il s'agit de l'incendie de bois, forêts, landes, maquis, plantations ou reboisements d'autrui, les peines sont portées à trente ans de réclusion et à 200 000 euros d'amende. »
« IV. _ Après le premier alinéa de l'article 322-9 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu'il s'agit de l'incendie de bois, forêts, landes, maquis, plantations ou reboisements d'autrui, les peines sont portées à la réclusion criminelle à perpétuité et à 200 000 euros d'amende. »
La parole est à M. Jean-Claude Carle.
M. Jean-Claude Carle. Ces trois amendements ont trait aux dégradations et aux destructions consécutives aux incendies.
En effet, l'ensemble de nos compatriotes ont été consternés par la gravité des incendies qui ont ravagé le pays cet été : plus de 63 000 hectares de forêts ont été détruits, dont 10 000 hectares par le seul incendie du massif des Maures. Mes collègues du sud de la France en parleraient beaucoup mieux que moi.
Ces incendies sont souvent la conséquence de comportements insouciants, inconscients ou malveillants, voire d'actes criminels. Ils portent atteinte à la sécurité des biens et des personnes, qu'il s'agisse des résidants, des vacanciers ou des sauveteurs au sens large du terme.
Mais ils ont aussi des conséquences graves, voire irréversibles pour notre patrimoine naturel, économique et culturel.
Ainsi, comme l'a rappelé à plusieurs reprises le Président de la République, notamment lors de sa visite à l'unité de sécurité civile de Brignoles ou lors du conseil des ministres du 21 juillet dernier, « les pyromanes comptent parmi les délinquants les plus dangereux parce que leurs actes criminels mettent en péril l'avenir de notre environnement et la richesse de notre patrimoine, détruisent en quelques heures ce que des hommes et des femmes ont mis toute une vie à construire, une vie qu'ils perdent parfois au plus fort des incendies. Contre ces destructeurs de vie qui ne sont pas aujourd'hui sanctionnés, la justice doit s'exercer sans faiblesse. La sanction est le corollaire indispensable de la prévention ».
Devant un phénomène qui prend chaque année plus d'ampleur, le législateur doit adapter le quantum des peines encourues. Les dispositions actuelles du code forestier prévoient des sanctions graduées en fonction de la gravité de l'acte, de son caractère volontaire ou involontaire et du fait qu'il porte ou non atteinte aux personnes et qu'il mette ou non en danger la vie d'autrui.
Il convient désormais, devant ce véritable fléau, de prendre en compte ce que j'appellerai un délit d'atteinte au patrimoine de l'humanité, tant les conséquences en sont graves, voire irréversibles, et privent parfois plusieurs générations de la jouissance de fabuleux acquis naturels, culturels ou économiques, préservés et développés par nos pères.
Saint-Exupéry a écrit : « Nous n'héritons pas de la terre de nos aïeux, nous l'empruntons à nos enfants. » Il est donc de notre responsabilité de ne pas laisser un tel passif aux générations futures et de condamner avec toute la sévérité nécessaire ceux qui portent atteinte à ce patrimoine, car ils portent atteinte à la vie au sens large, notamment à celle des sauveteurs.
Que l'on me permette, à cet égard, de rendre hommage aux sapeurs-pompiers, aux pilotes de bombardier d'eau, aux forces de police et de gendarmerie, qui ont fait preuve d'un courage exemplaire pour protéger cette vie, quelquefois, malheureusement, au péril de la leur.
C'est aussi pour eux que nous devons adapter notre législation. Tel est l'objet de ces trois amendements.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. La commission est favorable à ces trois amendements. Il s'agit de prévoir des peines aggravées pour les auteurs d'incendies volontaires allumés en forêt. Une telle évolution serait tout à fait justifiée : M. Carle a rappelé, avec beaucoup de pertinence, à quel point les forêts constituent un patrimoine qui mérite d'être protégé. Dois-je rappeler à mon tour que, depuis le début de l'année, 63 000 hectares de forêts ont été détruits en France, les départements du Var et de la Haute-Corse ayant été les plus touchés ?
Je soulignerai que le code pénal a notamment pour objet de marquer l'attachement de la société à certaines valeurs. La protection de l'environnement, en particulier des forêts, doit aujourd'hui faire partie de ces valeurs affirmées par le code pénal.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je suis favorable à ces trois amendements. Je voudrais rappeler que, dès le début de l'été, lorsque l'on a eu constaté l'ampleur des incendies, j'ai envoyé successivement deux circulaires aux procureurs de la République pour leur demander d'être extrêmement vigilants s'agissant de ces affaires. Je les ai invités, d'une part, à prescrire des fouilles de véhicules dans les zones à risque et, d'autre part, à requérir en utilisant au maximum les possibilités offertes par le code pénal.
Leur travail, coordonné avec celui des services d'enquête, a donné de très notables résultats, puisque plus d'une vingtaine de personnes se trouvent aujourd'hui sous les verrous. Un certain nombre de condamnations sont devenues définitives, et je crois que l'action des services d'enquête de la police et de la gendarmerie et celle des magistrats ont eu un réel effet dissuasif.
Toutefois, au regard de ce qui s'est passé au cours de ces trois derniers mois, il me paraît opportun d'émettre un signal supplémentaire en matière de vigilance et de dissuasion, pour éviter que, dans les années à venir, ne se renouvelle la catastrophe écologique que nous avons connue cet été et qui a provoqué des dégâts considérables et trop de pertes en vies humaines.
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote.
M. Robert Bret. Les violents incendies de l'été dernier, qui ont vu la disparition de plus de 70 000 hectares de forêts et de garrigues, ont mis en évidence de façon dramatique les limites des politiques mises en oeuvre en matière de prévention et de lutte. Comme cela a encore été rappelé tout à l'heure lors des questions d'actualité au Gouvernement, huit victimes sont à déplorer, et le feu est arrivé aux portes des communes, y compris des plus grandes villes, non seulement dans le Var, mais aussi dans le département des Bouches-du-Rhône. Des campings ont été détruits, des milliers de personnes ont dû être évacuées...
Voilà des années que les régions méditerranéennes brûlent. Par rapport aux autres massifs forestiers français, les forêts du bassin méditerranéen présentent de nombreuses particularités liées aux conditions climatiques - sécheresse, vents -, à la nature des essences d'arbres, lesquels sont essentiellement des résineux, à la composition et à la profondeur des sols, au relief tourmenté, à l'accès difficile, à l'urbanisation imbriquée - je pense particulièrement ici au mitage.
Se borner à invoquer le soleil, la sécheresse, le vent, l'imprudence, voire la responsabilité, des pyromanes ne peut suffire à expliquer ces sinistres. Cela ne permettra pas d'apporter des réponses.
Bien sûr, il faut trouver les auteurs de ces feux et les condamner. Toutefois, les réponses qu'il convient d'apporter aujourd'hui ne peuvent se limiter à la recherche et à la sanction des pyromanes, comme l'a proposé dès cet été le Gouvernement et comme le proposent aujourd'hui nos collègues par le biais de leurs amendements. Il faut aussi agir en amont, en matière de prévention.
Or, au-delà des moyens matériels et humains dont disposent la protection civile, les services départementaux d'incendie et de secours ou encore le bataillon des marins-pompiers de Marseille, nous nous interrogeons, comme M. le ministre de l'intérieur, sur le nombre et la vétusté des avions Canadair et Tracker. Nous savons que, depuis trois saisons, les pilotes de la sécurité civile plaident pour l'achat d'un ou de deux gros porteurs, afin de restaurer la puissance de frappe de la flotte à son meilleur niveau. Le ministre de l'intérieur s'est engagé à ce que deux avions soient achetés, de même, probablement, que des hélicoptères. C'est très bien, mais il faudra veiller à ce que les crédits correspondants soient inscrits au budget pour 2004 !
Surtout, nous pensons qu'il faut poser le problème de la gestion de l'espace forestier et rural méditerranéen dans une perspective de massif et dans le cadre d'une responsabilité nationale, que prévoit d'ailleurs la loi du 9 juillet 2001 lorsqu'elle dispose que « la politique forestière relève de la compétence de l'Etat, qui en assure la cohérence nationale ». Une approche spécifique à la forêt méditerranéenne devra être définie.
Les forêts méditerranéennes sont d'autant plus combustibles qu'elles sont broussailleuses. Or les broussailles, on le sait, se sont développées en raison de l'exode rural et du recul de l'agriculture dans nos départements. Il est donc nécessaire de faire appliquer rigoureusement les dispositions législatives portant obligation de débroussailler les terrains jusqu'à cinquante mètres au moins des habitations, le maire de la commune pouvant allonger cette distance.
Cependant, ne faut-il pas prendre d'autres mesures pour maintenir les exploitations agricoles et forestières existantes, voire pour en réimplanter de nouvelles par le biais des contrats territoriaux d'exploitation prévus par la loi d'orientation agricole du 9 octobre 1999, dispositif que le gouvernement de M. Raffarin souhaite abandonner ?
Le plus souvent, la notion de rentabilité des forêts est appréciée par les propriétaires privés en fonction des perspectives de constructibilité. Elles jouent alors le rôle de placement spéculatif. Cela contribue à faire disparaître les exploitations agricoles, et les jeunes agriculteurs rencontrent des difficultés pour trouver des terres où s'installer.
Il est donc nécessaire et urgent de mettre en place un vaste programme de reboisement et de restructuration tenant compte des particularités de chaque massif, avec des peuplements forestiers composés de nouvelles essences d'arbres, moins vulnérables aux incendies.
Toujours en termes de prévention, il conviendra, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2004 et dans le cadre du débat sur la décentralisation, de mener une réflexion sur les moyens alloués à l'Office national des forêts, lesquels sont vraiment insuffisants. Dans le Var, par exemple, on compte un patrouilleur pour vingt communes, soit huit patrouilles pour 180 000 hectares ! Est-ce suffisant ? Et encore, on annonce des réductions d'effectifs au sein de l'ONF !
Nous proposons donc que l'Etat et les collectivités territoriales s'engagent dans le cadre d'un plan pluriannuel destiné à définir les objectifs à atteindre et les moyens correspondants, l'Etat organisant chaque année, pour permettre le suivi de l'application de ce plan, une conférence réunissant l'ensemble des acteurs concernés.
Si la politique de lutte contre les incendies forestiers est nationale, il est aussi possible de tirer parti de l'action de l'Union européenne. A cet égard, cette dernière a adopté un règlement qui prescrit le classement de certaines régions à risques, dont la nôtre. La nouvelle loi forestière du 9 juillet 2001 nous a permis de nous mettre en conformité, aussi pouvons-nous demander à l'Union européenne les subventions nécessaires.
Chers collègues, il s'agit de traiter le problème dans sa globalité, et non de l'envisager sous un aspect particulier. Sinon, nous serons amenés chaque année à nous interroger sur le degré des sanctions pénales à appliquer aux pyromanes, sans empêcher pour autant la survenue de nouveaux incendies.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 256.
M. Robert Bret. Le groupe CRC s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, une division additionnelle ainsi rédigée est insérée dans le projet de loi, après l'article 10.
Je mets aux voix l'amendement n° 257.
M. Robert Bret. Le groupe CRC s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 10.
Je mets aux voix l'amendement n° 258.
M. Robert Bret. Le groupe CRC s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 10.
L'amendement n° 417, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Après l'article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le livre V du code pénal est complété par un titre ainsi rédigé :
« Titre...
« Des atteintes à l'environnement
« Art... _ Sont punis de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende, lorsqu'ils sont commis intentionnellement :
« 1° Le fait de rejeter, émettre ou introduire des substances ou des radiations ionisantes dans l'atmosphère, le sol, les eaux qui causent la mort ou de graves lésions à des personnes, ou créant un risque significatif de causer la mort ou de graves lésions à des personnes ;
« 2° Le fait de rejeter, d'émettre ou d'introduire de manière illicite des substances ou des radiations ionisantes dans l'atmosphère, le sol ou les eaux, qui causent ou sont susceptibles de causer leur détérioration durable ou la mort ou de graves lésions à des personnes, ou des dommages substantiels à des monuments protégés, à d'autres objets protégés, à des biens, à des animaux ou à des végétaux ;
« 3° Le fait d'éliminer, de traiter, de stocker, de transporter, d'exporter ou d'importer des déchets dangereux qui causent ou sont susceptibles de causer la mort ou de graves lésions à des personnes, ou de causer des dommages substantiels à la qualité de l'air, du sol, des eaux, à des animaux ou à des végétaux ;
« 4° Le fait d'exploiter de manière illicite une installation dans laquelle une activité dangereuse est exercée et qui cause ou est susceptible de causer la mort ou de graves lésions à des personnes, ou des dommages substantiels à la qualité de l'air, du sol, des eaux, à des animaux ou à des végétaux ;
« 5° Le fait de fabriquer, de traiter, de stocker, d'utiliser, de transporter, d'exporter ou d'importer de manière illicite des matières nucléaires ou autres substances radioactives dangereuses qui causent ou sont susceptibles de causer la mort ou de graves lésions à des personnes, ou des dommages substantiels à la qualité de l'air, du sol, des eaux, à des animaux ou à des végétaux ;
« Art... _ Les personnes physiques coupables des infractions prévues au présent chapitre encourent également la peine complémentaire d'interdiction pour une durée de dix ans au plus, d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice de laquelle ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise.
« Art... _ Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2, des infractions définies au présent chapitre. Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 ;
« 2° Les peines mentionnées à l'article 131-39. L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. »
La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. Cette incrimination constitue la transposition en droit français de l'article 2 de la convention européenne sur la protection de l'environnement, signée par la France le 4 novembre 1998 et qui est toujours en instance de ratification. Elle recouvre un certain nombre de faits incriminés dans le code de l'environnement.
Cet amendement vise d'abord à inscrire dans le code pénal les infractions relatives à l'environnement, ce qui a une portée non seulement symbolique - les auteurs d'atteintes à l'environnement sont des délinquants comme les autres -, mais aussi pratique, du fait qu'il est plus facile d'accéder à un texte unique qu'à des articles dispersés.
Par ailleurs, on ne saurait envisager une réforme constitutionnelle, comme celle que le Gouvernement envisage de mettre en place avec la charte sur l'environnement pour inscrire les principes fondamentaux du droit de l'environnement au sommet de la hiérarchie des normes, tout en conservant au droit pénal de l'environnement un caractère essentiellement technique. Les infractions les plus graves en matière de santé publique figurent au code pénal ; il doit en être de même en matière d'environnement.
Notre amendement vise également, en reprenant les dispositions d'une convention du Conseil de l'Europe, à faciliter la répression des comportements dans l'espace européen le plus étendu. Les cas récents de pollution des mers, par exemple, suffisent à démontrer que les sanctions ne peuvent avoir une portée exclusivement hexagonale.
L'adoption de cet amendement permettrait enfin à notre pays de montrer l'exemple en anticipant la ratification et l'entrée en vigueur de cette convention européenne.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Mme Borvo propose une transposition en droit français de l'article 2 de la convention européenne sur la protection de l'environnement. Je lui ferai observer que cette convention n'a pas encore été ratifiée.
Mme Nicole Borvo. Absolument !
M. François Zocchetto, rapporteur. Il paraît donc peu judicieux d'aborder cette transposition par le biais d'un « cavalier », le thème de l'environnement me semblant mériter un projet de loi spécifique.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement, comme la commission, est défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 417.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Section 4
Dispositions relatives aux infractions
en matière douanière
M. le président. Art. 11. - I. - L'article 28-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° La dernière phrase du deuxième alinéa du I est remplacée par sept alinéas ainsi rédigés :
« Ils sont compétents pour rechercher et constater :
« 1° Les infractions prévues par le code des douanes ;
« 2° Les infractions en matière de contributions indirectes, d'escroquerie sur la taxe à la valeur ajoutée et de vols de biens culturels ;
« 3° Les infractions prévues par le décret du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions ;
« 4° Les infractions prévues à l'article 324-1 du code pénal ;
« 5° Les infractions prévues aux articles L. 716-9 à L. 716-11 du code de la propriété intellectuelle ;
« 6° Les infractions connexes aux infractions visées aux 1° à 5°. » ;
« 1° bis Après le mot : « stupéfiants », la fin du dernier alinéa du I est ainsi rédigée : "et de blanchiment du produit de cette catégorie d'infraction." » ;
« 1° ter Dans la première phrase du premier alinéa du II, les mots : "et par le décret-loi du 18 avril 1939 fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions,"» sont supprimés ;
« 2° Le III est abrogé ;
« 2° bis A la fin du premier alinéa du VI, la référence : "706-32" est remplacée par les références : "706-80 à 706-86" » ;
3° Le VI est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Au cours des procédures confiées à ces agents, il peut être fait application des dispositions des articles 100 à 100-7, 694 à 695-3 et 706-73 à 706-101. Ces agents peuvent être assistés par les personnes mentionnées aux articles 706 et 706-2.
« Par dérogation à la règle fixée au 2 de l'article 343 du code des douanes, l'action pour l'application des sanctions fiscales peut être exercée par le ministère public, en vue de l'application des dispositions du présent article. »
« II. - L'article 67 bis du code des douanes est ainsi rédigé :
« Art. 67 bis. - I. - Sans préjudice de l'application des dispositions des articles 60, 61, 62, 63, 63 bis, 63 ter et 64, afin de constater les délits douaniers, si la peine encourue est égale ou supérieure à deux ans d'emprisonnement, les agents des douanes habilités par le ministre chargé des douanes dans des conditions fixées par décret procèdent sur l'ensemble du territoire national, après en avoir informé le procureur de la République et sauf opposition de ce magistrat, à la surveillance de personnes contre lesquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de les soupçonner d'être les auteurs d'un délit douanier ou d'y avoir participé comme complices ou intéressés à la fraude au sens de l'article 399.
« Les mêmes dispositions sont applicables pour la surveillance de l'acheminement ou du transport des objets, biens ou produits tirés de la commission de ces infractions ou servant à les commettre.
« L'information préalable prévue par le premier alinéa doit être donnée, par tout moyen, selon le cas, au procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel les opérations de surveillance sont susceptibles de débuter ou au procureur de la République saisi en application des dispositions de l'article 706-76 du code de procédure pénale.
« II. - Lorsque les investigations le justifient et afin de constater les infractions douanières d'importation, d'exportation ou de détention de substances ou plantes classées comme stupéfiants, de contrebande de tabacs manufacturés, d'alcool et spiritueux, et de contrefaçon de marque, ainsi que celles prévues à l'article 415 du présent code et aux articles L. 716-9 à L. 716-11 du code de la propriété intellectuelle, d'identifier les auteurs et complices de ces infractions ainsi que ceux qui y ont participé comme intéressés au sens de l'article 399 du présent code et d'effectuer les saisies prévues par le présent code, le procureur de la République peut autoriser qu'il soit procédé, sous son contrôle, à une opération d'infiltration dans les conditions prévues par le présent article.
« L'infiltration consiste, pour un agent des douanes spécialement habilité dans des conditions fixées par décret, agissant sous la responsabilité d'un agent de catégorie A chargé de coordonner l'opération, à surveiller des personnes suspectées de commettre un délit douanier en se faisant passer, auprès de ces personnes, comme un de leurs coauteurs, complices ou intéressés à la fraude. L'agent des douanes est à cette fin autorisé à faire usage d'une identité d'emprunt et à commettre si nécessaire les actes mentionnés ci-après. A peine de nullité, ces actes ne peuvent constituer une incitation à commettre des infractions.
« L'infiltration fait l'objet d'un rapport rédigé par l'agent de catégorie A ayant coordonné l'opération qui comprend les éléments strictement nécessaires à la constatation des infractions et ne mettant pas en danger la sécurité de l'agent infiltré et des personnes requises au sens du III.
« III. - Les agents des douanes autorisés à procéder à une opération d'infiltration peuvent, sans être pénalement responsables de ces actes et sur l'ensemble du territoire national :
« a) Acquérir, détenir, transporter, livrer ou délivrer des substances, biens, produits, documents ou informations tirés de la commission des infractions ;
« b) Utiliser ou mettre à disposition des personnes se livrant à ces infractions des moyens de caractère juridique ainsi que des moyens de transport, de dépôt, d'hébergement, de conservation et de télécommunication.
« L'exonération de responsabilité prévue au premier alinéa est également applicable aux personnes requises par les agents des douanes pour permettre de procéder à l'opération d'infiltration.
« IV. - A peine de nullité, l'autorisation donnée en application du II est délivrée par écrit et doit être spécialement motivée.
« Elle mentionne la ou les infractions qui justifient le recours à cette procédure et l'identité de l'agent des douanes sous la responsabilité duquel se déroule l'opération.
« Cette autorisation fixe la durée de l'opération d'infiltration, qui ne peut excéder quatre mois. L'opération peut être renouvelée dans les mêmes conditions de forme et de durée. Le magistrat qui a autorisé l'opération peut, à tout moment, ordonner son interruption avant l'expiration de la durée fixée.
« L'autorisation est versée au dossier de la procédure après achèvement de l'opération d'infiltration.
« V. - L'identité réelle des agents des douanes ayant effectué l'infiltration sous une identité d'emprunt ne doit apparaître à aucun stade de la procédure.
« La révélation de l'identité de ces agents est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 EUR d'amende.
« Lorsque cette révélation a causé même indirectement, des violences, coups et blessures à l'encontre de ces personnes ou de leurs conjoints, enfants et ascendants directs, les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 EUR d'amende.
« Lorsque cette révélation a causé, même indirectement, la mort de ces personnes ou de leurs conjoints, enfants et ascendants directs, les peines sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 150 000 EUR d'amende, sans préjudice, le cas échéant, de l'application des dispositions du chapitre Ier du titre II du livre II du code pénal.
« VI. - En cas de décision d'interruption de l'opération ou à l'issue du délai fixé par la décision autorisant l'infiltration et en l'absence de prolongation, l'agent infiltré peut poursuivre les activités mentionnées au III, sans en être pénalement responsable, le temps strictement nécessaire pour lui permettre de cesser sa surveillance dans des conditions assurant sa sécurité. Le magistrat ayant délivré l'autorisation prévue au II en est informé dans les meilleurs délais. Il est également informé de l'achèvement de l'opération d'infiltration.
« VII. - L'agent des douanes sous la responsabilité duquel se déroule l'opération d'infiltration peut seul être entendu en qualité de témoin sur l'opération.
« Toutefois, s'il ressort du rapport mentionné au II que la personne mise en examen ou comparaissant devant la juridiction de jugement est directement mise en cause par des constatations effectuées par un agent ayant personnellement réalisé les opérations d'infiltration, cette personne peut demander à être confrontée avec cet agent dans les conditions prévues par l'article 706-61 du code de procédure pénale.
« Les questions posées à l'agent infiltré à l'occasion de cette confrontation ne doivent pas avoir pour objet ni pour effet de révéler, directement ou indirectement, sa véritable identité.
« VIII. - Lorsque la surveillance prévue au I doit être poursuivie dans un Etat étranger, elle est autorisée par le procureur de la République. Les procès-verbaux d'exécution de l'observation ou rapports y afférents ainsi que l'autorisation d'en poursuivre l'exécution sur le territoire d'un Etat étranger sont versés au dossier de la procédure.
« Avec l'accord préalable du ministre de la justice saisi d'une demande d'entraide judiciaire à cette fin, les agents des douanes étrangers peuvent poursuivre sur le territoire de la République, sous la direction d'agents des douanes français, des opérations d'infiltration conformément aux dispositions du présent article. L'accord du ministre de la justice peut être assorti de conditions. L'opération doit ensuite être autorisée, par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris, dans les conditions prévues au II.
« Le ministre de la justice ne peut donner son accord que si les agents étrangers sont affectés dans leur pays à un service spécialisé et exercent des missions similaires à celles des agents nationaux spécialement habilités mentionnés au II.
« Avec l'accord des autorités judiciaires étrangères, les agents des douanes étrangers mentionnés au deuxième alinéa du présent VIII peuvent également, conformément aux dispositions du présent article, participer sous la direction d'agents des douanes français à des opérations d'infiltration conduites sur le territoire de la République dans le cadre d'une procédure douanière nationale.
« IX. - Supprimé. »
« III. - Le 3 de l'article 343 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans ces mêmes procédures, l'administration des douanes exerce l'action en paiement des droits et taxes compromis ou éludés, prévue à l'article 377 bis. A cette fin, elle est informée de la date de l'audience par l'autorité judiciaire compétente. »
« IV. - L'article L. 235 du livre des procédures fiscales est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les affaires dans lesquelles des agents de l'administration des douanes ont été requis en application des I et II de l'article 28-1 du code de procédure pénale, le ministère public exerce l'action publique et l'action pour l'application des sanctions fiscales. Dans ce cas, les dispositions de l'article L. 248 relatives au droit de transaction ne sont pas applicables.
« Dans ces mêmes procédures, l'administration des douanes exerce l'action en paiement des droits et taxes compromis ou éludés, prévue par l'article 1804 B du code général des impôts. »
« V. - L'article L. 152-4 du code monétaire et financier est ainsi rédigé :
« Art. L. 152-4. - I. - La méconnaissance des obligations déclaratives énoncées à l'article L. 152-1 est punie d'une amende égale au quart de la somme sur laquelle a porté l'infraction ou la tentative d'infraction.
« II. - En cas de constatation de l'infraction mentionnée au I par les agents des douanes, ceux-ci consignent la totalité de la somme sur laquelle a porté l'infraction ou la tentative d'infraction, pendant une durée de trois mois, renouvelable sur autorisation du procureur de la République du lieu de la direction des douanes dont dépend le service chargé de la procédure, dans la limite de six mois au total.
« La somme consignée est saisie et sa confiscation peut être prononcée par la juridiction compétente si, pendant la durée de la consignation, il est établi que l'auteur de l'infraction mentionnée au I est ou a été en possession d'objets laissant présumer qu'il est ou a été l'auteur d'une ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes ou qu'il participe ou a participé à la commission de telles infractions ou s'il y a des raisons plausibles de penser que l'auteur de l'infraction visée au I a commis une infraction ou plusieurs infractions prévues et réprimées par le code des douanes ou qu'il a participé à la commission de telles infractions.
« La décision de non-lieu ou de relaxe emporte de plein droit, aux frais du Trésor, mainlevée des mesures de consignation et saisie ordonnées. Il en est de même en cas d'extinction de l'action pour l'application des sanctions fiscales.
« III. - La recherche, la constatation et la poursuite des infractions mentionnées au I sont effectuées dans les conditions fixées par le code des douanes.
« Dans le cas où l'amende prévue au I est infligée, la majoration de 40 % mentionnée au premier alinéa de l'article 1759 du code général des impôts n'est pas appliquée. »
« VI. - Le même code est ainsi modifié :
« 1° Le 8 de l'article L. 562-1 est complété par les mots : "et aux groupements, cercles et sociétés organisant des jeux de hasard, des loteries, des paris, des pronostics sportifs ou hippiques" » ;
« 2° L'article L. 564-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les groupements, cercles et sociétés organisant des jeux de hasard, des loteries, des paris, des pronostics sportifs ou hippiques sont tenus de s'assurer, par la présentation de tout document écrit probant, de l'identité des joueurs gagnant des sommes supérieures à un montant fixé par décret, et d'enregistrer les noms et adresses de ces joueurs, ainsi que le montant des sommes qu'ils ont gagnées.Ces données doivent être conservées pendant cinq ans. »
« VII. - Le même code est ainsi modifié :
« 1° Les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 562-2 sont complétés par les mots : "ou qui pourraient participer au financement du terrorisme" » ;
« 2° Dans la dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 562-4 et dans la deuxième phrase du troisième alinéa de l'article L. 562-5, après le mot : "organisées", sont insérés les mots : "ou du financement du terrorisme" ».
« VIII. - A la fin de l'avant-dernière phrase du premier alinéa de l'article L. 562-4 du même code, les mots : "faisant l'objet de la déclaration" sont remplacés par les mots : "ayant fait l'objet d'une déclaration mentionnée à l'article L. 562-2, de l'examen particulier prévu à l'article L. 563-3 ou d'une information mentionnée à l'article L. 563-5" ».
« IX. - Le dernier alinéa de l'article L. 562-6 du même code est ainsi rédigé :
« Lorsque, sur le fondement d'une déclaration faite conformément aux articles L. 562-2, L. 563-1, L. 563-1-1 et L. 563-3 à L. 563-5, le service institué à l'article L. 562-4 a saisi le procureur de la République, il en informe, selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, l'organisme financier ou la personne qui a effectué la déclaration. »
« X. - Dans la dernière phrase du dernier alinéa de l'article L. 563-5 du même code, les mots : "et de leurs établissements publics" sont remplacés par les mots : ", des établissements publics et des organismes visés à l'article L. 134-1 du code des juridictions financières".
L'amendement n° 83, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« A la fin du 2° bis du I de cet article, remplacer la référence : "706-86" par la référence : "706-87". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 83.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 84, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Compléter le deuxième alinéa du 3° du I de cet article par les mots : "agissant sur délégation des magistrats.". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Les assistants spécialisés ne peuvent assister les officiers de police judiciaire ou de douane judiciaire de leur propre initiative. Ils ne peuvent en effet agir que sous la responsabilité de magistrats. Il paraît utile de le préciser.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 84.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 85, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le dernier alinéa du III du texte proposé par le II de cet article pour l'article 67 bis du code des douanes :
« L'exonération de responsabilité prévue au premier alinéa est également applicable, pour les actes commis à la seule fin de procéder à l'opération d'infiltration, aux personnes requises par les agents des douanes pour permettre la réalisation de cette opération. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit d'un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. A l'occasion de l'examen de cet article, je voudrais me faire l'avocate des agents des douanes, leurs syndicats m'ayant adressé, comme à d'autres sénateurs sans doute, leurs doléances.
Les agents des douanes se félicitent de la reconnaissance de leurs compétences et de leur action par leur participation à l'activité judiciaire, pour lutter contre la criminalité organisée. En revanche, ils s'insurgent contre la politique de destruction du dispositif douanier actuel : fermetures de bureaux, suppressions de brigades, abandons de missions. Ils signalent que le projet de loi de finances pour 2004 prévoit la suppression de 166 emplois. Alors que l'on reconnaît leur qualité et leur utilité, ils ne peuvent assumer leurs tâches compte tenu de moyens insuffisants qui vident de sens l'objectif affiché de renforcer les coopérations, notamment avec eux. Ils considèrent que la criminalité organisée n'est qu'une composante de la fraude et des trafics illicites. Selon eux, les attributions judiciaires doivent être intégrées à la politique douanière, et non s'y substituer.
En résumé, s'ils sont satisfaits du rôle qu'on veut leur faire jouer, ils regrettent de ne pas avoir les moyens de le remplir. C'est pourquoi ils souhaitent que les moyens dont ils disposent soient renforcés.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 85.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 86, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit le VI du texte proposé par le II de cet article pour l'article 67 bis du code des douanes :
« VI. - En cas de décision d'interruption de l'opération ou à l'issue du délai fixé par la décision autorisant l'opération et en l'absence de prolongation, le magistrat ayant délivré l'autorisation prévue au premier alinéa du II fixe, par une décision renouvelable, un délai pendant lequel l'agent infiltré peut poursuivre les activités mentionnées au III sans en être pénalement responsable, afin de lui permettre de cesser sa surveillance dans des conditions assurant sa sécurité. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. C'est un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 86.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 87, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Rétablir dans la rédaction suivante le IX du texte proposé par le dernier alinéa du II de cet article pour l'article 67 bis du code des douanes :
« IX. - Aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement de déclarations faites par des agents des douanes ayant procédé à une infiltration.
« Les dispositions du présent paragraphe ne sont cependant pas applicables lorsque les agents des douanes déposent sous leur véritable identité. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. C'est encore un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 87.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 246, présenté par M. Haenel, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Dans la première phrase du texte proposé par le 2° du VI de cet article pour compléter l'article L. 564-1 du code monétaire et financier :
« I. - Après les mots : "sont tenus", insérer les mots : ", selon des modalités et conditions fixées par décret en Conseil d'Etat adaptées aux spécificités de leur activité,".
« II. - Remplacer les mots : "par décret" par les mots : "par le décret précité". »
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Joël Bourdin, en remplacement de M. Hubert Haenel, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation. De nouveaux organismes spécialisés dans les pronostics sportifs et hippiques seront désormais astreints à l'obligation de déclaration de soupçon auprès du service Tracfin en charge de la lutte anti-blanchiment à Bercy.
Cette disposition, pour utile qu'elle soit, ne va pas sans susciter des difficultés pratiques d'application dans des structures qui ne sont pas aussi équipées et organisées que les banques pour apporter leur concours à la lutte anti-blanchiment. C'est la raison pour laquelle cet amendement, proposé par M. Haenel, précise que le décret d'application, un décret en Conseil d'Etat, devra prendre en compte la spécificité de l'activité des organismes concernés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le recours à un décret en Conseil d'Etat serait de nature à alourdir inutilement la procédure. Par ailleurs, cet amendement est d'une certaine façon superfétatoire car le décret visé tiendra naturellement compte des spécificités de l'activité des professionnels concernés, puisque tel est l'objet du décret. C'est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, l'amendement n° 246 est-il maintenu ?
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis. Compte tenu des explications de M. le garde des sceaux, je retire cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 246 est retiré.
Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Section 5
Dispositions relatives à la contrefaçon
M. le président. Art. 11 bis. - Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
I. - L'article L. 335-2 est ainsi modifié :
1° A la fin du deuxième alinéa, les mots : « deux ans d'emprisonnement et de 150 000 EUR d'amende » sont remplacés par les mots : « trois ans d'emprisonnement et de 300 000 EUR d'amende » ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les délits prévus par le présent article ont été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende. »
II. - L'article L. 335-4 est ainsi modifié :
1° Dans le premier alinéa, les mots : « deux ans d'emprisonnement et de 150 000 EUR d'amende » sont remplacés par les mots : « trois ans d'emprisonnement et de 300 000 EUR d'amende » ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les délits prévus au présent article ont été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende. »
III. - L'article L. 343-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 343-1. - Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 EUR d'amende le fait de porter atteinte aux droits du producteur d'une base de données tels que définis à l'article L. 342-1. Lorsque le délit a été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende. »
IV. - Le premier alinéa de l'article L. 521-4 est ainsi rédigé :
« Toute atteinte portée sciemment aux droits garantis par le présent livre est punie de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 EUR d'amende.Lorsque le délit a été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende. »
V. - Le 1 de l'article L. 615-14 est ainsi rédigé :
« 1. Sont punies de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 EUR d'amende les atteintes portées sciemment aux droits du propriétaire d'un brevet, tels que définis aux articles L. 613-3 à L. 613-6. Lorsque le délit a été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende. »
VI. - L'article L. 623-32 est ainsi rédigé :
« Art. L. 623-32. - Toute atteinte portée sciemment aux droits du titulaire d'un certificat d'obtention végétale, tels qu'ils sont définis à l'article L. 623-4, constitue un délit puni d'une amende de 10 000 EUR . Lorsqu'il a été rendu contre le prévenu dans les cinq années antérieures une condamnation pour le même délit ou en cas de commission du délit en bande organisée, un emprisonnement de six mois peut, en outre, être prononcé. »
VII. - L'article L. 716-9 est ainsi rédigé :
« Art. L. 716-9. - Est puni de quatre ans d'emprisonnement et de 400 000 EUR d'amende le fait pour toute personne, en vue de vendre, fournir, offrir à la vente ou louer des marchandises présentées sous une marque contrefaite :
« a) De se livrer à des actes de commerce d'importation sous tout régime douanier, d'exportation, de réexportation, de transit ou de transbordement de marchandises présentées sous une marque contrefaite ;
« b) De produire industriellement des marchandises présentées sous une marque contrefaite ;
« c) De donner des instructions ou des ordres pour la commission des actes visés aux a et b.
« Lorsque les délits prévus au présent article ont été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende. »
VIII. - L'article L. 716-10 est ainsi rédigé :
« Art. L. 716-10. - Est puni de trois ans d'emprisonnement et de 300 000 EUR d'amende le fait pour toute personne de :
« a) Détenir sans motif légitime des marchandises présentées sous une marque contrefaite ;
« b) D'offrir à la vente ou de vendre des marchandises présentées sous une marque contrefaite ;
« c) De reproduire, d'imiter, d'utiliser, d'apposer, de supprimer, de modifier une marque, une marque collective ou une marque collective de certification en violation des droits conférés par son enregistrement et des interdictions qui découlent de celui-ci ;
« d) De sciemment livrer un produit ou fournir un service autre que celui qui lui est demandé sous une marque enregistrée.
« L'infraction, dans les conditions prévues au d, n'est pas constituée en cas d'exercice par un pharmacien de la faculté de substitution prévue à l'article L. 5125-23 du code de la santé publique.
« Lorsque les délits prévus aux a à d ont été commis en bande organisée, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 500 000 EUR d'amende. »
L'amendement n° 247, présenté par M. Haenel, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le deuxième alinéa (a) du texte proposé par le VII de cet article pour l'article L. 716-9 du code de la propriété intellectuelle :
« a) D'importer sous tout régime douanier, d'exporter, de réexporter ou de transborder des marchandises présentées sous une marque contrefaite ; ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis. Il s'agit d'un amendement d'amélioration rédactionnelle.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 247.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 248, présenté par M. Haenel, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
« Rédiger ainsi le deuxième alinéa (a) du texte proposé par le VIII de cet article pour l'article L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle :
« a) Détenir sans motif légitime, d'importer sous tous régimes douaniers ou d'exporter des marchandises présentées sous une marque contrefaite ; ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Joël Bourdin, rapporteur pour avis. C'est un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 248.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 11 bis, modifié.
(L'article 11 bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 11 bis
M. le président. L'amendement n° 260, présenté par MM. Schosteck, Hyest et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
« Après l'article 11 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« A l'article 225-25 du code pénal, après les mots : "du présent chapitre", sont insérés les mots : ", à l'exception de celle prévue par l'article 225-10-1,". »
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Cet amendement prouverait presque que, pour examiner des textes, il faut quand même prendre un certain temps,...
MM. Michel Dreyfus-Schmidt et Maurice Ulrich. Bravo !
M. Jean-Jacques Hyest. ... sauf à devoir corriger quelques erreurs par la suite.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Très bien !
M. Jean-Jacques Hyest. Pour le racolage public, que l'on a évoqué et dont on parlera encore beaucoup, a été prévue la peine complémentaire de confiscation de l'ensemble du patrimoine, peine qui, en fait, a été instaurée pour réprimer les crimes et délits de traite des êtres humains et de proxénétisme. Il conviendrait donc de corriger cette erreur, qui a échappé aux plus grands juristes des deux chambres du Parlement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Lorsque le garde des sceaux suit des débats dans le domaine pénal, cela va tout de même mieux que quand c'est le ministre de l'intérieur !
M. Maurice Ulrich. Qu'est-ce que cela veut dire ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 260.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 11bis.
L'amendement n° 261, présenté par MM. Schosteck, Hyest et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
« Après l'article 11 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 23 de la loi du 15 juillet 1845 sur la police des chemins de fer, les mots "3 000 EUR d'amende" sont remplacés par les mots : "3 750 EUR d'amende". »
La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Cet amendement, qui n'est pas de même nature que le précédent, vise à rendre cohérentes les peines. L'amende de 3 000 euros n'étant ni une peine contraventionnelle ni une peine délictuelle, il n'est pas possible de qualifier avec certitude l'infraction sans savoir de quel tribunal elle relève. Il convient de remplacer cette amende par une amende de 3 750 euros afin de pouvoir punir l'infraction de fausse déclaration auprès des agents assermentés de la police des chemins de fer.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 261.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 11 bis.
Division et article additionnels après l'article 11 bis
M. le président. L'amendement n° 462, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après l'article 11 bis, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :
« Section ...
« Dispositions relatives à la lutte contre le travail dissimulé »
L'amendement n° 463, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Après l'article 11 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après l'article 2 bis de la loi n° 95-66 du 20 janvier 1995 relative à l'accès à l'activité de conducteur et à la profession d'exploitant de taxi, il est inséré un article 2 ter ainsi rédigé :
« Art. 2 ter. _ Le fait d'effectuer à la demande et à titre onéreux le transport particulier de personnes et de bagages sans être titulaire d'une autorisation de stationnement sur la voie publique en attente de clientèle, ou d'exercer l'activité de conducteur de taxi sans être titulaire du certificat de capacité professionnelle, est puni d'un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende.
« Les personnes physiques coupables de l'infraction prévue au présent article encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° La suspension, pour une durée de cinq ans au plus, du permis de conduire ;
« 2° L'immobilisation, pour une durée d'un an au plus, du véhicule qui a servi à commettre l'infraction ;
« 3° La confiscation du véhicule qui a servi à commettre l'infraction ;
« 4° L'interdiction d'entrer et de séjourner dans l'enceinte d'une ou plusieurs infrastructures aéroportuaires, d'une gare ferroviaire ou routière, ou de leurs dépendances, sans y avoir été préalablement autorisé par les autorités de police territorialement compétentes.
« Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, de l'infraction définie au présent article.
« Les peines encourues par les personnes morales sont :
« 1° L'amende, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du code pénal ;
« 2° Les peines mentionnées aux 8° et 9° de l'article 131-39 du même code. »
« II. - Le I de l'article 23 de la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure est complété par un 13° ainsi rédigé :
« 13° La peine d'interdiction d'entrer et de séjourner dans l'enceinte d'une ou plusieurs infrastructures aéroportuaires, d'une gare ferroviaire ou routière, ou de leurs dépendances, sans y avoir été préalablement autorisé par les autorités de police territorialement compétentes, prévue par le 4° de l'article 2 ter de la loi n° 95-66 du 20 janvier 1995. »
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Il s'agit de créer une incrimination autonome qui réprime l'exercice illégal de l'activité de taxi, comme c'est déjà le cas pour la profession de transporteurs routiers de marchandises ou de voyageurs. Il s'agit également de diversifier les peines complémentaires susceptibles d'être prononcées par la juridiction de jugement et de pouvoir mettre en cause la responsabilité pénale des personnes morales.
Compte tenu de l'ampleur prise par l'activité clandestine de taxi sur certains sites et des pratiques qui s'y développent, notamment sur les emprises des aéroports parisiens, il convient d'adapter la répression à cette forme nouvelle de délinquance dans des zones sensibles, en la rendant ainsi plus dissuasive.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. La commission soutient, sans hésiter, cette proposition du Gouvernement. Néanmoins, lors de l'examen de cet amendement, elle s'est interrogée sur le sort qui serait réservé aux voitures de petite remise,...
M. Jean-Jacques Hyest. Cela n'a rien à voir !
M. François Zocchetto, rapporteur. ... c'est-à-dire aux personnes qui travaillent à forfait. C'était notamment une préoccupation de M. Gélard. Monsieur le garde des sceaux, pouvez-vous nous rassurer sur ce point en confirmant qu'elles ne seront pas concernées par ces nouvelles incriminations sur les taxis clandestins ?
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Bien sûr, il ne s'agit pas de s'attaquer aux voitures de petite remise, qui ne sont pas des clandestins. Ce sont des personnes qui font un commerce et ont une activité parfaitement légale. Monsieur le rapporteur, je m'engage à vérifier qu'il n'y a pas d'ambiguïté en termes de mise en application du texte qui vous est aujourd'hui proposé. Il est bien évident qu'il ne s'agit absolument pas, pour le Gouvernement, de mettre en cause cette activité tout à fait honorable.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Je souhaite simplement poser une question : le taxi clandestin est-il une activité délictueuse en bande organisée ?
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Madame Borvo, il ne s'agit pas de dire que le taxi clandestin fait partie de la criminalité organisée. C'est un élément tout à fait disjoint.
M. Robert Bret. C'est un cavalier !
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je ne pense pas que cela en soit un !
Les taxis sont immatriculés, il existe une commission des taxis - vous connaissez tout cela, madame le sénateur -, et on peut donc très bien savoir si quelqu'un est clandestin ou non.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je comprends parfaitement la logique qui prévaut en l'occurrence. Il faudrait peut-être tout de même songer à modifier l'intitulé du projet de loi et parler non seulement des évolutions de la criminalité, mais aussi des évolutions de la délinquance, et même de la petite délinquance. Préciser « de la criminalité et de la délinquance » permettrait de mieux recouvrir l'inventaire à la Prévert contenu dans le texte tel qu'il résultera de nos travaux.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 462.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, une division additionnelle ainsi rédigée est insérée dans le projet de loi, après l'article 11 bis.
Je mets aux voix l'amendement n° 463.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 11 bis.
Chapitre IV
Dispositions concernant la lutte
contre les discriminations
Section 1
Dispositions relatives à la répression des discriminations
et des atteintes aux personnes ou aux biens présentant
un caractère raciste
M. le président. Art. 12 A. - Le début du premier alinéa de l'article 132-76 du code pénal est ainsi rédigé :
« Dans les cas prévus par la loi, les peines encourues pour un crime ou un délit... (Le reste sans changement.) »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, sur l'article.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Sur l'article 12 A, un débat très intéressant a eu lieu à l'Assemblée nationale. De nombreux députés ont dit qu'il ne fallait pas parler dans la loi de race, car les races n'existent pas. Tout le monde était d'accord sur ce point.
Considérant que le sujet était très complexe, M. le garde des sceaux a déclaré : « La question qui se pose à nous n'est pas de savoir si la notion de "race" a un fondement scientifique : nous sommes tous convaincus que c'est inexact. Mais, comme vous le savez, ce terme figure dans la Constitution et dans notre système juridique. Nous en avons donc besoin si nous voulons incriminer les actes racistes. C'est le seul motif pour lequel il ne faut pas le supprimer. »
La discussion s'est poursuivie. M. le garde des sceaux a fait la proposition suivante : « Je suis prêt à demander à mes services de voir comment nous pourrions procéder au nettoyage de l'ensemble de nos textes juridiques, afin que n'y figure plus le concept de race. Mais comme cela mérite un examen attentif, je pense que quelques mois seront nécessaires pour le faire. » Il ajouta un peu plus tard : « Le résultat de ce travail devrait sans doute être connu pour la deuxième lecture du texte par l'Assemblée, qui devrait intervenir cet automne, dans le courant du mois d'octobre. »
Peut-être l'ambiance n'était-elle pas à penser que le Sénat interviendrait entre-temps. Mais comme le texte est devant le Sénat en ce début du mois d'octobre, je suppose, monsieur le garde des sceaux, que vous pourriez nous rendre compte de l'étude que vous aviez demandée et qui est, en effet, fort intéressante.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. J'apprécie beaucoup les questions de M. Dreyfus-Schmidt, puisqu'il me donne aussi les réponses : en l'occurrence, deuxième lecture à l'Assemblée nationale, monsieur le sénateur !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Le Sénat appréciera !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, sur l'article.
M. Jean-Jacques Hyest. Il s'agit d'une question très délicate. On parle de racisme. Dès lors, il faudrait aussi supprimer le terme « racisme » parce qu'il évoque la race. De nombreux textes comportent la notion de discrimination en fonction de la race. On ne peut donc pas se priver de cette notion. Dire qu'il y a des races, ce n'est pas faire du racisme.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Scientifiquement, si !
M. Jean-Jacques Hyest. C'est pourquoi une étude extrêmement approfondie, notamment anthropologique et ethnographique, est nécessaire. Monsieur Dreyfus-Schmidt, à propos de nombreux textes, on s'est posé la question et on ne l'a jamais résolue. On a considéré qu'il était préférable, dans un certain nombre de textes, d'indiquer le terme de race, qui est bien connu, pour lutter effectivement contre le racisme.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il y avait eu un accord général à l'Assemblée nationale !
M. le président. Je mets aux voix l'article 12 A.
(L'article 12 A est adopté.)
M. le président. Art. 12. - I. - L'article 222-18-1 du code pénal devient l'article 222-18-2.
Au 3° du même article, les références : « et 222-18 » sont remplacées par les références : « , 222-18 et 222-18-1 ».
II. - Il est rétabli, après l'article 222-18 du même code, un article 222-18-1 ainsi rédigé :
« Art. 222-18-1. - Lorsqu'elles sont commises à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, de la victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, les menaces prévues au premier alinéa de l'article 222-17 sont punies de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende, celles prévues au second alinéa de cet article et au premier alinéa de l'article 222-18 sont punies de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 EUR d'amende, et celles prévues au second alinéa de l'article 222-18 sont punies de sept ans d'emprisonnement et de 100 000 EUR d'amende. Les mêmes peines sont encourues lorsque ces menaces sont proférées à raison de l'orientation sexuelle vraie ou supposée de la victime. » - (Adopté.)
Article 13
M. le président. Art. 13. - I. - Il est inséré, après le 8° de l'article 311-4 du code pénal, un 9° ainsi rédigé :
« 9° Lorsqu'il est commis à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, de la victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, ou de son orientation sexuelle, vraie ou supposée. »
II. - L'article 312-2 du même code est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° Lorsqu'elle est commise à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, de la victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, ou de son orientation sexuelle, vraie ou supposée ». - (Adopté.)
M. le président. Art. 14. - I. - L'article 225-2 du code pénal est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « deux ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende » sont remplacés par les mots : « trois ans d'emprisonnement et de 45 000 EUR d'amende » ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le refus discriminatoire prévu au 1° est commis dans un lieu accueillant du public ou aux fins d'en interdire l'accès, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 EUR d'amende.
II. - A l'article 432-7 du même code, les mots : « trois ans d'emprisonnement et de 45 000 EUR d'amende » sont remplacés par les mots : « cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 EUR d'amende ».
L'amendement n° 418, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« A la fin du 1° du I de cet article, remplacer les mots : "trois ans d'emprisonnement et de 45 000 EUR d'amende", par les mots : "cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 EUR d'amende". »
La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. Je défendrai en même temps l'amendement n° 419. Ces deux amendements ont le même objet : faire reconnaître que les discriminations à l'embauche doivent être condamnées aussi sévèrement que lorsqu'elles consistent à refuser l'entrée dans une discothèque.
Ces amendements qui ont donné lieu à un débat n'ont pas été retenus par la commission. Mais il est apparu - c'est la raison pour laquelle je les propose ici même et M. le garde des sceaux pourra peut-être donner son avis - qu'il n'était pas grave de faire une discrimination à l'embauche en fonction des...
M. Jean-Jacques Hyest. Attention ! Surtout ne pas prononcer le mot « race » !
Mme Nicole Borvo. ... origines, du faciès, etc.
M. Jean-Jacques Hyest. La couleur de la peau !
Mme Nicole Borvo. Je comprends peut-être mal les débats qui ont lieu en commission des lois, mais c'est tout de même ce qui en est ressorti.
Je persiste à penser que la discrimination à l'embauche peut être caractérisée. Elle l'a d'ailleurs souvent été. Pour ma part, des salariés m'ont alertée sur les discriminations dont ils avaient fait l'objet au motif qu'ils étaient « de couleur », qu'ils étaient originaires du Maghreb ou nés à tel ou tel endroit. Donc, c'est très facile à savoir. Les discriminations à l'embauche doivent être punies tout autant que les discriminations conduisant à refuser l'entrée dans une discothèque.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement présenté par Mme Borvo et nos collègues communistes vise à aligner les peines prévues en matière de refus de fourniture d'un bien ou d'un service, d'entrave à l'exercice normal d'une activité économique, de subordination de la fourniture d'un bien ou d'un service, d'un emploi - c'est le seul point que vous avez développé -, d'un stage ou d'une formation, à une condition fondée sur la race, la religion, l'orientation sexuelle, le sexe ou l'âge. Il vise donc à orienter les peines prévues sur celles qui sont prévues en matière de refus discriminatoire commis dans un lieu accueillant du public, les discothèques en particulier.
Tout d'abord, il ne faut pas faire croire que de telles discriminations ne seraient pas punies. Elles sont actuellement punies de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende.
Pour la discrimination à l'entrée dans les discothèques, il est vrai qu'une peine aggravée a été instaurée, probablement parce que cela visait un public de jeunes, mais aussi parce que la discrimination à l'entrée dans les discothèques était susceptible de créer un trouble, ce qui n'est pas forcément le cas pour les autres infractions que vous avez citées.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Elles seraient moins graves !
M. François Zocchetto, rapporteur. Ces infractions sont punies. Il n'y a pas lieu de les aligner sur le régime spécifique qui a été prévu pour l'entrée dans les discothèques, c'est-à-dire dans des lieux publics.
La commission a donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Même avis défavorable que la commission.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. M. le rapporteur a cherché avec gentillesse à expliquer pourquoi le projet de loi s'était limité, en matière de sanction de la discrimination, à l'entrée dans les discothèques.
Franchement, cette position n'est pas acceptable : la discrimination en vertu de la race est inadmissible où qu'elle s'exerce. C'est évident ! Vous dites que cette discrimination à l'entrée des discothèques s'exerce en direction des jeunes.
Mme Nicole Borvo. A l'embauche aussi !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. A l'embauche, elle concerne aussi les jeunes.
Si vous estimez - et nous sommes d'accord avec vous - qu'il faut renforcer la peine, il n'y a absolument aucune raison de faire une différence.
Je demande donc un scrutin public sur l'amendement n° 418 de Mme Nicole Borvo.
M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Il ne faut pas comparer ce qui n'est pas comparable, vous le savez tous très bien. On tourne autour du pot, on ne veut pas dire la vérité.
Mme Nicole Borvo. Oh !
M. Christian Cointat. Dans les discothèques, le seul élément de discrimination, c'est le délit de faciès. Il faut donc rehausser les peines à titre d'exemple. En revanche, quand il s'agit de l'embauche, on peut très bien dire que les refus se fondent sur d'autres raisons. Il ne faudrait pas que l'on puisse se servir de ce prétexte, car n'oubliez pas que, sur le marché du travail, d'autres critères que celui du faciès doivent être pris en compte. Ce n'est absolument par la même chose que dans les discothèques.
Voilà pourquoi le texte est tout à fait équilibré et justifié. Il permet de sanctionner tous les abus, tous les comportements racistes mais, pour les discothèques, où c'est le seul cas qui peut être pris en compte, il y a, à titre d'exemple, aggravation de la peine. Mais il ne faut pas pousser jusqu'à l'absurde le raisonnement, car on irait finalement à l'encontre du but visé. (M. Joël Bourdin applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Nous parlons de peines. Pour qu'elles soient prononcées, il faut que les faits soient caractérisés. Or, avec cet article, on est en deçà de la justice.
Vous avez le sentiment qu'en matière d'embauche d'autres raisons peuvent motiver un refus. Il est certain que toutes sortes de raisons peuvent justifier que des personnes ne soient pas embauchées.
Là, il est question de jugement. Le juge va chercher à savoir quelle est la nature de l'infraction et, une fois qu'elle sera caractérisée, il va punir.
En la matière, nous, nous disons : comment se fait-il que la sanction soit plus faible quand il s'agit d'embauche au travail que lorsqu'il s'agit d'entrer dans un lieu public d'amusement ?
M. Pierre Fauchon, vice-président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Parce que c'est un lieu public !
Mme Nicole Borvo. Le travail, c'est un lieu public, mon cher collègue !
M. Pierre Fauchon, vice-président de la commission des lois. Non, c'est un contrat !
Mme Nicole Borvo. C'est incompréhensible !
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je voudrais convaincre M. Cointat. En l'état actuel des textes, les discriminations à l'entrée des discothèques ou à l'embauche sont punies de la même manière.
Vous nous dites que, à l'entrée d'une discothèque, il ne peut s'agir que de discrimination raciste. Pas du tout ! Il est d'ailleurs souvent très difficile d'obtenir des condamnations parce qu'il est dit que la personne n'avait pas de cravate, qu'elle risquait de faire du bruit, qu'elle était accompagnée de celui-ci ou de celui-là, etc. Ce n'est pas évident et il est nécessaire d'apporter des preuves pour que le tribunal prononce une condamnation.
En matière d'embauche, il est bien évident que ce n'est pas seulement parce que la personne est blanche ou noire que l'on doit l'embaucher. De plus, c'est la même chose, pour que le tribunal puisse condamner, il doit être prouvé que la seule raison de la non-embauche est le fait que la personne est blanche ou noire ou entre les deux. Je voudrais vous en convaincre, monsieur Cointat.
Mon cher collègue, ce que nous avons dit vous a paru absurde, mais il me paraît absurde de dire que ce que l'on a dit était absurde. (Sourires.)
Evitons les grands mots. Si nous avons - et j'en suis sûr - les mêmes sentiments à l'égard du racisme, pour en venir à bout, vous devriez approuver cet amendement. Je demande à chacun d'y réfléchir.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 418.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 2 :
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
:
Nombre de votants | 313 |
Nombre de suffrages exprimés | 311 |
Majorité absolue des suffrages | 156 |
Pour | 111 |
Contre | 200 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 419, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Supprimer le 2° du I de cet article. »
Cet amendement a déjà été défendu.
Je le mets aux voix.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 14.
(L'article 14 est adopté.)
M. le président. Art. 15. - L'article 2-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Les mots : « et les destructions, dégradations et détériorations réprimées par les articles 221-1 à 221-4, 222-1 à 222-18 et 322-1 à 322-13 du code pénal qui ont été commises »sont remplacés par les mots : « , les vols, les extorsions et les destructions, dégradations et détériorations qui ont été commis » ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, lorsque l'infraction aura été commise envers une personne considérée individuellement, l'association ne sera recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l'accord de la personne intéressée ou, si celle-ci est mineure, l'accord du titulaire de l'autorité parentale ou du représentant légal, lorsque cet accord peut être recueilli. »
L'amendement n° 88, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Dans le deuxième alinéa (1°) de cet article, avant les mots : ", les vols", insérer les mots : « , les menaces". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Cet amendement vise à permettre aux associations de lutte contre le racisme d'exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les menaces dont sont victimes les personnes en raison de leur origine nationale, de leur appartenance ou non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une race ou une religion déterminée.
La commission propose donc de compléter la liste des infractions pour lesquelles le droit de constitution de partie civile par les associations peut s'exercer en y ajoutant les menaces.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 88.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 15, modifié.
(L'article 15 est adopté.)
Division et articles additionnels après l'article 15
M. le président. L'amendement n° 457, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Après l'article 15, insérer une division additionnelle ainsi rédigée :
« Chapitre...
« Dispositions relatives à la lutte contre la corruption »
L'amendement n° 420, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A l'article 1er de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, les mots : "placé auprès du ministre de la justice" sont supprimés.
« II. - Le quatrième alinéa du même article est remplacé par cinq alinéas ainsi rédigés :
« Le service est une autorité administrative indépendante. Elle est composée de cinq membres nommés pour cinq ans ou pour la durée de leur mandat :
« - un député et un sénateur élus respectivement par l'Assemblée Nationale et par le Sénat ;
« - un membre du Conseil d'Etat ;
« - un membre de la Cour de cassation ;
« - un membre de la Cour des comptes.
« III. - Le cinquième alinéa du même article est ainsi rédigé :
« Il peut procéder à des enquêtes préliminaires dans les conditions prévues par le code de procédure pénale. Des officiers de police judiciaire sont détachés à cette fin auprès du service. »
L'amendement n° 421, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Après l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le deuxième alinéa de l'article 1er de la loi n° 91-3 du 3 janvier 1991 relative à la transparence des procédures de marchés et soumettant la passation de certains contrats à des règles de publicité et de mise en concurrence est remplacé par les dispositions suivantes :
« La mission est une autorité administrative indépendante. Elle est composée de cinq membres nommés pour cinq ans ou pour la durée de leur mandat :
« - un député et un sénateur élus respectivement par l'Assemblée Nationale et par le Sénat ;
« - un membre du Conseil d'Etat ;
« - un membre de la Cour de cassation ;
« - un membre de la Cour des comptes.
« II. - Dans le premier alinéa de l'article 2 de la même loi, après les mots "à la demande" sont insérés les mots "du collège directeur de la mission,"
« III. - Dans tous les textes, les mots "mission interministérielle d'enquête sur les marchés" sont remplacés par les mots "mission indépendante d'enquête sur les marchés". »
La parole est à Mme Nicole Borvo.
Mme Nicole Borvo. Avec ces amendements, nous vous proposons d'inscrire dans le présent projet de loi une volonté renouvelée de lutte contre la corruption.
Je souhaite dire à cette occasion combien nous avons été surpris par la réponse qui nous a été faite par le rapporteur pour justifier le rejet de notre proposition tendant à introduire le délit de corruption dans les crimes et délits constitutifs de criminalité organisée : si je me réfère au compte rendu analytique, la réponse de notre rapporteur a été de dire que le délit de corruption était « par nature rarement le fait de bandes organisées ».
J'en suis particulièrement étonnée puisque toutes les études internationales, notamment celles qui émanent de Transparency International, comme celles émanant du ministère de la justice lui-même, notent un développement de ce phénomène et que les juges chargés d'instruire ces affaires mettent en lumière les ramifications internationales via des sociétés écrans ou des intermédiaires.
Dans ce contexte où la délinquance en col blanc est volontairement exclue du champ d'application de la loi, j'imagine n'avoir que peu de succès avec cet amendement.
Certes, monsieur le ministre, vous vous appuyez sur le développement des pôles financiers et sur la loi de sécurité financière pour justifier votre position. Mais cela n'épuise en rien le débat.
Je crains seulement qu'à force de réticences on alimente un peu plus le sentiment dans l'opinion publique du « tous pourris » alors qu'on en connaît parfaitement les dégâts.
Dans le dernier rapport de Transparency International, on peut lire que « malgré l'indépendance du judiciaire promise par les ministres français de la justice au cours des enquêtes portant sur les activités des hommes politiques, nombreux sont les juges chargés de grands dossiers qui ont dû quitter pour diverses raisons la magistrature ou qui ont été appelés à d'autres fonctions... Ces départs ont fait beaucoup de bruit d'autant plus que les protagonistes ont publié des livres dans lesquels ils ont exprimé des réserves sur la lutte contre la corruption en France en particulier, et en Europe de l'Ouest en général ».
J'espère pouvoir entendre une argumentation plus convaincante du ministre et du rapporteur concernant les raisons de la demande de rejet qui a été opposée au présent amendement.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Zocchetto, rapporteur. J'envisagerai les trois amendements l'un après l'autre puisqu'ils appellent des réponses précises.
Tout d'abord, madame Borvo, loin de moi l'idée de dire que la corruption ne doit pas être combattue, comme vous le laissez entendre.
En matière financière, les incriminations prévues par l'article 706-73 du code de procédure pénale retiennent le blanchiment aggravé. La commission a proposé d'y ajouter le blanchiment simple. Il en a été de même pour le recel aggravé auquel la commission a ajouté le recel simple.
Lorsque nous avons à traiter des aspects financiers de la grande criminalité, nous le faisons dans le cadre de ce texte.
La commission émet un avis défavorable sur l'amendement n° 457.
Avec l'amendement n° 420, Mme Borvo propose de transformer le service central de prévention de la corruption qui, pour le moment, est rattaché au ministère de la justice, en une autorité administrative indépendante. Une telle évolution ne peut être décidée de cette manière.
En outre, à ma connaissance, le fonctionnement de ce service n'a jamais fait l'objet de critiques justifiant qu'il soit détaché du ministère de la justice. Au contraire, je suis tout à fait convaincu qu'il est souhaitable que le ministère de la justice soit doté d'un tel service, que je préfère lui voir rattaché.
La commission émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 420.
Sur l'amendement n° 421, par lequel vous voulez, chère collègue, transformer la mission interministérielle d'enquête sur les marchés, votre intention est peut-être digne d'attention, mais permettez-moi de vous dire qu'une telle évolution mérite un examen approfondi et trouverait mieux sa place dans le projet de loi sur les simplifications administratives que dans celui-ci.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement est défavorable à l'amendement n° 457.
J'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer sur ce sujet au cours de la discussion générale : les éléments de procédure nouveaux introduits dans le texte qui vous est soumis sont réservés à un certain nombre de cas excessivement graves qui nécessitent effectivement des procédures particulières. Il n'a semblé indispensable à aucun spécialiste d'utiliser ces éléments de procédure nouveaux pour lutter contre la corruption.
La garde à vue de quatre-vingt-seize heures, par exemple, madame le sénateur, n'est pas apparue comme quelque chose de fondamental dans ce type de délinquance, pour reprendre cet exemple, pas plus que les possibilités de sonorisation de domiciles, pour parler de choses précises.
On peut effectivement se gargariser de discours généraux, mais il faut savoir de quoi l'on parle et de quoi traite la partie du projet de loi qui concerne les types de criminalité définis par le début du texte.
Je suis également défavorable à l'amendement n° 420 parce que son adoption conduirait à un mélange des genres assez étonnant. En effet, on créerait une autorité indépendante à qui l'on donnerait des pouvoirs à caractère juridictionnel, dont je ne sais d'ailleurs pas très bien ce que penserait le Conseil constitutionnel.
Enfin, je suis également défavorable à l'amendement n° 421, puisqu'il a pour objet de prévoir pour la mission interministérielle d'enquête sur les marchés un statut un peu comparable à celui que vous proposez pour le service anticorruption.
Par ailleurs, en tant que ministre responsable, j'indiquerai que ce service central de prévention de la corruption et son travail mériteraient d'être davantage connus. Après en avoir longuement discuté avec l'actuel responsable de ce service, nous sommes en train de réfléchir au moyen de faire en sorte que, en particulier, les ordonnateurs des différentes administrations et des collectivités locales puissent, comme c'est prévu, solliciter l'avis de ce service, possibilité qui est très mal connue.
Je ne sais pas si les sénateurs ici présents, qui, par ailleurs, peuvent être responsables d'un exécutif local le savent, mais ils peuvent consulter le service central de prévention de la corruption lorsque se pose à eux une question d'ordre déontologique, une question d'ordre juridique.
Personnellement, je dois dire qu'il m'a fallu devenir ministre de la justice pour le découvrir concrètement, alors que cette consultation peut être extrêmement utile pour éviter des écarts juridiques totalement involontaires aux ordonnateurs des finances publiques. Telles sont les quelques indications que je voulais apporter, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 457.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 420.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 421.
(L'amendement n'est pas adopté.)
DÉPÔT D'UN RAPPORT DU GOUVERNEMENT
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport sur les prélèvements obligatoires et leur évolution établi en application de l'article 52 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances.
Ce rapport fera l'objet d'un débat dans notre assemblée, à une date qui sera fixée par la conférence des présidents.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Adrien Gouteyron.)
PRÉSIDENCE DE M. ADRIEN GOUTEYRON
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
ÉVOLUTIONS DE LA CRIMINALITÉ
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à la section 2 du chapitre IV du titre Ier.
Section 2
Dispositions relatives à la répression
des messages racistes ou xénophobes
M. le président. Je suis saisi d'un amendement portant sur l'intitulé de cette section, ainsi que d'un certain nombre d'amendements visant à insérer des articles additionnels avant l'article 16.
Intitulé de la section 2
et articles additionnels avant l'article 16
M. le président. L'amendement n° 422, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« A la fin de l'intitulé de cette section, remplacer les mots : "ou xénophobes" par les mots : ", xénophobes ou homophobes". »
L'amendement n° 423, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le premier alinéa de l'article 13-1 de la loi du 29 juillet 1881, après les mots : "leur origine", sont insérés les mots : "ou de leur orientation sexuelle vraie ou supposée". »
Les deux amendements suivants peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 317, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le huitième alinéa de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est rédigé comme suit :
« Ceux qui, par l'un des moyens énoncés à l'article 23, auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de l'un des éléments visés à l'article 225-1 du code pénal seront punis d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. »
L'amendement n° 424, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Au huitième alinéa de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, après les mots : "à raison de leur origine", sont insérés les mots : ", de leur orientation sexuelle vraie ou supposée". »
Je suis encore saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 318, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Avant l'article 16 insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa de l'article 32 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi rédigé :
« La diffamation commise par les mêmes moyens envers une personne ou un groupe de personnes à raison de l'un des éléments visés à l'article 225-1 du code pénal est puni d'un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende. »
L'amendement n° 425, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Au deuxième alinéa de l'article 32 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, après les mots : "à raison de leur origine", sont insérés les mots : "ou de leur orientation sexuelle vraie ou supposée". »
Les deux amendements suivants peuvent aussi faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 319, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le troisième alinéa de l'article 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi rédigé :
« La peine est portée à 6 mois d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende si l'injure a été commise, dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, envers une personne ou un groupe de personnes à raison de l'un des éléments visés à l'article 225-1 du code pénal. »
L'amendement n° 426, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Au troisième alinéa de l'article 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, après les mots : "à raison de leur origine", sont insérés les mots : "de leur orientation sexuelle vraie ou supposée". »
L'amendement n° 320, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le dernier alinéa de l'article 48 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi rédigé :
« Toutefois, la poursuite pourra être exercée d'office par le ministère public lorsque la diffamation ou l'injure a été commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de l'un des éléments visés à l'article 225-1 du code pénal. »
L'amendement n° 427, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Dans le 6° de l'article 48 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, après les mots : "à raison de leur origine", sont insérés les mots : "ou de leur orientation sexuelle vraie ou supposée". »
Enfin, les deux derniers amendements peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 321, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le premier alinéa de l'article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi rédigé :
« Toute association, régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant par ses statuts de combattre toute discrimination visée à l'article 225-1 du code pénal ou d'assister les victimes de discriminations à raison de l'un des éléments prévus au même article, peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions prévues par l'article 24, dernier alinéa, 32, alinéa 2, et 33, alinéa 3, de la présente loi. »
L'amendement n° 428, présenté par Mme Borvo, M. Bret, Mmes Mathon, Beaudeau, Beaufils et Bidard-Reydet, M. Coquelle, Mmes David, Demessine et Didier, MM. Fischer, Foucaud et Le Cam, Mme Luc, MM. Muzeau, Ralite et Renar, Mme Terrade et M. Vergès, est ainsi libellé :
« Avant l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le premier alinéa de l'article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, après les mots : "combattre le racisme", sont insérés les mots : "ou l'homophobie".
« II. - Dans ce même texte, après les mots : "raciale ou religieuse", sont insérés les mots : "ou leur orientation sexuelle vraie ou supposée". »
La parole est à M. Robert Bret.
M. Robert Bret. La lutte contre l'homophobie est un combat qui nous tient, à ma collègue Nicole Borvo et moi, particulièrement à coeur.
Je rappelle que l'adoption en 1999 du PACS devait permettre, en reconnaissant le fait homosexuel, de combattre toute forme de discrimination envers un homme ou une femme du fait de ses choix sexuels.
Si, récemment, notre législation s'est dotée de nouveaux outils en ce domaine - je pense notamment à la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 et à son volet relatif à la lutte contre les discriminations, à la loi du 4 mars 2002 et à la loi de sécurité intérieure - d'autres avancées sont encore nécessaires.
En effet, nous savons que, malgré tout, les homosexuels demeurent exposés à des discriminations, à des violences ou à des discours de haine, fondés sur les moeurs, que ce soit au travail, dans leur famille ou tout simplement à travers le regard qu'une grande partie de la société porte sur eux.
Les manifestations d'intolérance à l'égard tant des homosexuels que des transsexuels sont nombreuses. Les parents d'homosexuels sont inquiets pour leurs enfants, chez lesquels on note une proportion importante de suicides. Leurs préoccupations sont légitimes : ils s'interrogent sur la place de leurs enfants dans la société et sur leur avenir.
Certes, nos propositions ne vont pas tout régler, mais, si elles étaient votées, elles constituraient toutefois un signal fort de nature à faire reculer cette forme de discrimination.
En effet, notre législation ne permet toujours pas de sanctionner ni les injures homophobes, ni les provocations à la discrimination, à la haine ou à la violence homophobes, ni la diffamation commise en raison de l'orientation sexuelle de la victime.
En outre, les associations dont l'objet est de lutter contre l'homophobie ne peuvent toujours pas exercer les droits reconnus à la partie civile, contrairement à d'autres associations qui luttent contre les discriminations liées à l'origine nationale, ethnique, raciale ou religieuse.
C'est ce vide que nous proposons de combler en modifiant le loi sur la liberté de la presse de 1881.
La France doit, en effet, se conformer à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme et aux principes rappelés entre autre dans le protocole 12 du 4 novembre 2000 de la Convention européenne des droits de l'homme, ainsi qu'au droit positif européen.
En conséquence, nous proposons, par nos amendements, de modifier les articles 13-1, 24, 32, 33, 48 et 48-1 de la loi de 1881 en y insérant l'expression « ou à raison de l'orientation sexuelle vraie ou supposée » de la victime.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 423 à 428 ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Ces divers amendements tendent à réprimer les injures, diffamations, provocations à commettre certaines infractions par voie de presse, toutes fondées sur l'homophobie.
Il ne paraît pas justifié d'étendre les incriminations concernant les infractions à caractère raciste aux seules infractions à caractère homophobe. Pour cette raison, la commission des lois a donné un avis défavorable sur les amendements n°s 423, 424, 425, 426, 427 et 428 présentés par le groupe communiste, ainsi qu'à l'amendement n° 422 visant à modifier l'intitulé de cette section.
En revanche, la commission a considéré que l'extension de ces incriminations à toutes les discriminations prévues par le code pénal, qu'il s'agisse de l'âge, de l'apparence physique, du patronyme, de la situation de famille, du sexe, de l'état de santé, de l'orientation sexuelle, du handicap, des caractéristiques génétiques, des moeurs, des opinions politiques ou des activités syndicales pourrait être opportune.
Néanmoins, nous savons que le Gouvernement mène actuellement une réflexion globale sur ces questions, et M. le Premier ministre a annoncé, le 18 juillet dernier, le dépôt d'un prochain projet de loi de modification.
Avant de se prononcer, la commission souhaite donc connaître l'avis du Gouvernement sur les amendements n°s 317 à 321 présentés par le groupe socialiste, qui proposent une extension générale.
M. le président. Monsieur le rapporteur, le groupe socialiste n'a pas encore présenté ses amendements. Je vais maintenant lui donner la parole pour ce faire.
La parole est donc à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Il nous paraissait tout à fait normal que, parmi les nombreuses causes de discrimination pouvant entraîner des poursuites pour diffamation, figurât l'orientation sexuelle, vraie ou supposée. Dans cette optique, nous avons récemment déposé une proposition de loi visant à ajouter ces mots dans les différents articles de la loi de 1881 relatifs aux diverses discriminations ou diffamations.
En même temps, nous avons déposé des amendements reprenant une proposition de loi antérieurement élaborée par notre collègue M. Badinter et notre regrettée collègue Mme Derycke et qui consistent à se référer, dans la loi de 1881, à l'article 225-1 du code pénal.
Ce dernier dispose : « Constitue une discrimination - d'ores et déjà - toute distinction opérée entre les personnes physiques à raison de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur apparence physique, de leur patronyme, de leur état de santé, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs moeurs, de leur orientation sexuelle, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée. »
La même chose est prévue dans l'alinéa suivant pour les personnes morales. Cela nous paraît en effet la meilleure solution.
Sans doute le Gouvernement a-t-il beaucoup d'autres projets, mais vous avez, monsieur le rapporteur, comme beaucoup de nos collègues, profité de l'occasion pour modifier un certain nombre de dispositions en vue de tenir compte de l'évolution de la criminalité et de la délinquance. Aussi, pourquoi laisser passer l'occasion ? Déjà, l'Assemblée nationale a voté un texte contenant les mots : « de leur orientation sexuelle », mots qui figurent, je le rappelle, dans de très nombreux textes, y compris les textes européens.
La formule n'étant plus discutée, je me permets d'insister pour que vous reteniez les amendements qui déclinent ces mots, et au moins ceux qui font référence à l'article 225-1 du code pénal.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 317 à 321, qui ont été présentés par M. Dreyfus-Schmidt ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Je rappelle d'abord que la commission est défavorable aux amendements présentés par le groupe CRC. Par ailleurs, pour les raisons que j'ai exposées tout à l'heure, elle s'en remet à la sagesse du Sénat sur les amendements qui émanent du groupe socialiste.
Cela étant, la commission sera heureuse d'entendre l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Les différents amendements qui viennent de nous être présentés, qu'ils émanent du groupe CRC ou du groupe socialiste, ont tous pour objet d'étendre les dispositions de la loi de 1881 sur la liberté de la presse réprimant les délits de provocation, de diffamation ou d'injure raciale aux hypothèses dans lesquelles ces propos ou écrits sont inspirés soit par des considérations discriminatoires telles que définies par l'article 225-1 du code pénal soit par des considérations homophobes.
Il doit être parfaitement clair que le Gouvernement n'est pas, par principe, opposé à une telle extension. Le Premier ministre a d'ailleurs clairement indiqué au cours de l'été qu'il souhaitait que ces dispositions soient modifiées pour permettre la répression des messages homophobes.
Autrement dit, la réflexion sur ce sujet est en cours au sein du Gouvernement, comme dans d'autres cercles, et cette réforme se fera. Elle sera proposée prochainement par le Gouvernement. Pour l'heure, cette réflexion n'a pas pleinement mûri. D'ailleurs, la multiplicité des amendements déposés sur ce sujet à l'occasion de l'examen de ce texte me conforte dans l'idée que le travail mérite d'être encore approfondi.
Doit-on en effet viser tous les critères de discrimination figurant dans l'article 225-1 du code pénal ? Je rappelle qu'y figurent non seulement le racisme, le sexisme, l'homophobie ou les discriminations en raison du handicap, mais également les discriminations syndicales ou politiques. Cet article couvre en effet, à juste titre, un champ très large, car il tend à réprimer des comportements discriminatoires, et non des propos ou des écrits.
Doit-on pour autant aggraver une injure ou une diffamation proférée pour des motifs politiques ? Je ne le crois pas, mais la question se pose de savoir jusqu'où doit aller la liberté dans l'expression de la pensée. Doit-on au contraire ne viser que les cas d'homophobie ? Mais alors les provocations, les injures ou les diffamations sexistes ne seraient pas réprimées de la même façon que celles liées à l'orientation sexuelle, ce qui paraît assez peu cohérent !
Voilà toute une série de questions auxquelles il nous faudra apporter des réponses pour que le droit soit clair et applicable.
C'est la raison pour laquelle je souhaiterais non pas refermer ce débat aujourd'hui, mais vous dire très sincèrement qu'il me paraît prématuré de le trancher ce soir. Une certaine décantation est encore nécéssaire avant d'inscrire dans notre législation un certain nombre de dispositions à cet égard.
Je suis donc défavorable à ces amendements, tout en réaffirmant la volonté du Gouvernement d'inviter le Parlement à légiférer sur cette question dans les tout prochains mois.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 422.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote sur l'amendement n° 423.
M. Robert Badinter. La finalité de cet amendement, comme de l'ensemble des autres amendements tendant à insérer des articles additionnels avant l'article 16, est celle qui avait déjà inspiré la proposition de loi que nous avions déposée avec notre regrettée collègue Dinah Derycke. C'est dire que la réflexion n'est pas neuve en ce domaine.
Selon M. le garde des sceaux, le problème existe, mais il est complexe, et il est donc urgent d'attendre. Non ! Il est urgent d'introduire dans le cours de la discussion de ce texte - puisque nous avons le privilège d'avoir une navette - la référence à ce qui constitue une discrimination aujourd'hui insupportable.
L'étude des conventions internationales ou de l'évolution du droit dans toute l'Europe, et même au-delà, montre que sont partout condamnées les discriminations à raison de l'orientation sexuelle, et pas seulement l'homophobie. L'inscrire dans notre loi n'appelle donc pas, chacun en conviendra, un grand débat juridique !
Peut-être, sur ce point, le Gouvernement souhaite-t-il, en cours de navette, améliorer nos propositions, les élargir, les équilibrer. Pourquoi pas ? Après tout, c'est à cela que sert le travail législatif ! Mais avancer que le problème ne peut pas être soulevé au cours de ce débat revient à dire : « La question nous intéresse tant que nous préférons, pour l'instant, en différer le règlement. »
Je ne crois pas que la discrimination à raison de l'orientation sexuelle, qui est une forme de discrimination non moins odieuse que toutes les autres, puisse attendre plus longtemps d'être condamnée et que les outrages proférés à cet égard par voie de presse puissent être admis dans notre société. Ce n'est nullement là un problème d'une complexité juridique redoutable. Prenons-le en compte dès à présent et attendons la deuxième lecture de l'Assemblée nationale ! Le Gouvernement aura ainsi largement le temps d'étudier ce problème en vérité fort simple et nous conclurons sans difficulté dans cette affaire, où le consensus général me semble conforme au courant qui entraîne heureusement nos sociétés.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 423.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 317.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Franchement, je ne vois pas quelle réflexion peut encore être menée, car il est d'ores et déjà admis qu'il y a diffamation au regard de nombreuses discriminations. Or cela n'est pas admis au regard de l'orientation sexuelle, non plus d'ailleurs que d'un certain nombre d'autres discriminations pourtant punies en tant que telles par le code pénal.
Même sans aggravation, n'est-il pas normal d'introduire la possibilité de poursuivre des diffamations et de l'insérer dans la loi sur la presse en se référant à l'article du code pénal 225-1, qui vise d'ores et déjà toutes les discriminations possibles ?
Notre ami Robert Badinter vous disait, à propos d'un amendement de nos collègues du groupe CRC, qu'il fallait l'insérer tout de suite. Son argumentation trouve sa pleine portée s'agissant de nos amendements, qui, encore une fois, consistent simplement à prévoir que chaque fois qu'il y a une discrimination d'ores et déjà prévue par le code pénal, si elle est exercée par voie de presse, il y a diffamation.
Je ne vois pas pourquoi il faudrait réfléchir plus longtemps, monsieur le garde des sceaux. Si c'est le cas, vous nous le démontrerez éventuellement au cours des lectures à venir, à l'Assemblée nationale ou ici. Mais, aujourd'hui, vous ne pouvez pas nous dire ce qu'apporterait au débat un délai de réflexion supplémentaire, tout simplement parce qu'il n'apporterait rien !
La commission a souhaité vous entendre sur ce point. Le moins que l'on puisse dire, c'est que vos arguments ne résistent pas à l'examen !
Je me permets d'insister : quel inconvénient voyez-vous, monsieur le garde des sceaux, à ce que ce débat soit ouvert ? L'évolution de la délinquance en la matière montre à l'évidence qu'il mérite de l'être. C'est d'ailleurs si vrai que vous avez accepté, à l'Assemblée nationale, un amendement, sur le délai de prescription - nous en reparlerons tout à l'heure - qui permettrait, en matière de racisme, au sens large du terme, de porter la prescription à un an sous prétexte que l'on rencontre des problèmes avec Internet. Je ne comprends d'ailleurs pas pourquoi vous n'en avez pas limité la portée à Internet. En tout cas, vous l'avez accepté : c'est donc bien que vous n'ignorez pas qu'il existe des problèmes à cet égard.
Je demande instamment à nos collègues ici présents de suivre le mouvement premier de la commission des lois en adoptant nos amendements, qui constituent un ensemble, étant entendu que ce que je viens de dire pour l'amendement n° 317 vaut également pour les autres.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 317.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote sur l'amendement n° 424.
M. Robert Badinter. Je me permets de rappeler le libellé de cet amendement : « Au huitième alinéa de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, après les mots "à raison de leur origine", sont insérés les mots "de leur orientation sexuelle vraie ou supposée". »
Qui, aujourd'hui, pourrait nier qu'il y a là un complément vraiment nécessaire à notre dispositif législatif concernant les diffamations, lequel vise déjà la race, la religion, le sexe, les opinions, etc. ? Y ajouter l'orientation sexuelle ne constitue tout de même pas une révolution !
Instruit par une très longue expérience, je sais que, quand on s'aventure sur ce terrain-là, bizarrement, on suscite, dans cette maison, une réaction négative. J'ai encore le souvenir des sept lectures qui ont été nécessaires - trois au Sénat et quatre à l'Assemblée nationale - parce que, à l'époque, le Sénat n'a jamais accepté de supprimer la discrimination pénale qui existait dans notre droit contre les homosexuels. De même, à propos du PACS, le Sénat ne s'est « rendu » qu'avec les plus grandes difficultés. Et voilà que cela recommence à propos de la diffamation en matière d'orientation sexuelle ! Je ne comprends pas !
Dieu merci, l'état d'esprit dans la société est maintenant radicalement différent, et il faut en tenir compte. On ne peut pas accepter, non plus, ce type de discrimination.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Monsieur Badinter, vous ne pouvez pas dire qu'il y a rejet a priori sur ce thème.
M. Robert Bret. Nous n'allons pas tarder à voir ce qu'il en est !
M. François Zocchetto, rapporteur. J'ai indiqué tout à l'heure quelle était la position de la commission. Mme Borvo et M. Bret proposent de viser spécialement l'orientation sexuelle. Nous, nous avions pensé que ce que vous aviez suggéré - c'est-à-dire l'extension à l'ensemble des diffamations motivées par l'origine, le sexe, la situation de famille, l'apparence physique, le patronyme, l'état de santé, le handicap, les caractéristiques génétiques, les moeurs, l'orientation sexuelle, l'âge, les opinions politiques, les activités syndicales - constituait une piste intéressante.
Le garde des sceaux vous a confirmé qu'une réflexion était en cours. Et ce n'est pas une réflexion vouée à se clore aux calendes grecques ! Ainsi que l'a indiqué, en juillet dernier, le Premier ministre, le souci du Gouvernement est d'intégrer toutes ces discriminations dans une réflexion approfondie, qui ne traiterait pas seulement des problèmes qui nous intéressent aujourd'hui.
Monsieur Badinter, vous pouvez donc être rassuré. Cette préoccupation ne nous est pas complètement étrangère bien au contraire, nous la partageons. Dans les mois à venir, si j'ai bien compris les propos tenus par le ministre de la justice, nous pourrons envisager des modifications législatives sur ce point, non seulement sur le critère de l'orientation sexuelle, mais aussi en prenant en considération beaucoup d'autres éléments.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 424.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 318.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?..
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 3
:
Nombre de votants | 313 |
Nombre de suffrages exprimés | 309 |
Majorité absolue des suffrages | 155 |
Pour | 111 |
Contre | 198 |
Je mets aux voix l'amendement n° 425.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 319.
M. Jean-Pierre Sueur. Je veux intervenir à propos de cet amendement parce que je ne peux pas dissimuler le malaise profond que je ressens à la suite du débat qui vient d'avoir lieu.
La question qui est posée est simple : qui fait la loi ? Le Sénat est parfaitement dans son rôle lorsque, après une longue délibération de la commission des lois, il propose d'introduire dans le texte les amendements dont nous avons débattu et celui que nous examinons en ce moment pour mettre fin à une discrimination insupportable.
J'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos tenus par M. le rapporteur et par M. le ministre. M. le rapporteur a indiqué que la commission s'en remettait finalement à la sagesse du Sénat tout en souhaitant que cette sagesse soit éclairée par l'avis du Gouvernement. Ensuite, M. le ministre s'est déclaré favorable à l'amendement en ajoutant cependant qu'il ne fallait pas se prononcer maintenant.
Or l'affaire est simple, mais elle est tout à fait essentielle. Comme l'ont exposé MM. Badinter et Dreyfus-Schmidt, il s'agit de se référer à une liste qui existe déjà et qui figure dans le code pénal.
Dès l'instant où nous sommes tous d'accord, j'avoue ne pas comprendre pourquoi le vote de l'amendement soulèverait des difficultés, alors même que nous n'en sommes pas au stade de la lecture définitive du texte, lequel peut encore être amélioré puisqu'il y a unaminité sur le fond. Ce débat est incompréhensible. Peut-être existe-t-il des choses non dites, indicibles, impossibles à comprendre ? En tout cas, monsieur Hyest, je ne comprends vraiment pas pour quelle raison il serait impossible ce soir d'inscrire dans la loi la pénalisation de cette insupportable discrimination.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Hyest. Tous nos collègues qui ont déposé des amendements sur ce point connaissent parfaitement la loi sur la presse. Je suis incapable, pour ma part, d'apprécier si le dispositif proposé est complet ou non parce que les amendements sont très nombreux et visent des articles différents de la loi sur la presse. Voici un exemple de la qualité de vos amendements : vous considérez qu'il est question d'orientation sexuelle. Néanmoins, dans l'un de vos amendements figure aussi l'homophobie.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Non !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous l'avons retirée pour nous référer à « l'orientation sexuelle » !
M. Jean-Jacques Hyest. Il faut tout de même un peu de réflexion ! D'ailleurs, je suis convaincu que, sur nombre de sujets, si on légifère trop vite, on légifère souvent mal, ce qui oblige ensuite à revoir les textes.
MM. Michel Dreyfus-Schmidt et Jean-Pierre Sueur. C'est vrai !
M. Jean-Jacques Hyest. Pour l'instant, je ne suis pas capable de trancher, et c'est pour cela que je n'ai pas voté vos amendements, même si je partage totalement leur objet. (M. Jean-Pierre Sueur lève les bras au ciel.)
Attendez, mes chers collègues ! Cela peut bien attendre cinq minutes !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Cinq minutes, oui !
M. Jean-Jacques Hyest. Il vaut mieux élaborer un bon texte plutôt que de faire du bricolage et vous entendre ensuite nous dire que vous le rejetez pour telle ou telle raison ! Je ne peux pas accepter de tels propos.
Je suis tout à fait d'accord avec la suppression de ces discriminations, à condition de le faire bien et d'aboutir à une bonne législation.
M. Robert Badinter. Votez, et on continuera à travailler pendant la navette !
M. Jean-Jacques Hyest. Ah non ! Moi, je préfère ne pas voter !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 319.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 426.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 320.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication sur l'amendement n° 427.
Mme Nicole Borvo. M. le Premier ministre a cru bon de rendre publique sa rencontre avec des associations représentatives de la communauté gay et lesbienne. C'était sans doute la première fois qu'il les recevait. Il a affirmé qu'il répondrait à leurs demandes, en particulier pour inclure ce type de discrimination dans le code.
Je constate aujourd'hui, avec le présent débat, que, malheureusement, la majorité sénatoriale rend public son refus de légiférer (M. Jean-Jacques Hyest proteste) en arguant qu'il faut réfléchir et aller plus avant.
Je rappelle qu'en 1999, des membres du groupe communiste de l'Assemblée nationale avaient déposé sur le sujet une proposition de loi qui n'a pas été examinée. La question est pendante depuis maintenant de nombreuses années. Nous avons donc eu beaucoup de temps pour réfléchir à la façon d'inclure dans la loi la discrimination relative à l'orientation sexuelle, expression qui vient de l'anglais, mais que tout le monde comprend maintenant.
Le débat de ce soir aura encore une fois montré que, en ces domaines, vous ne voulez pas légiférer et que vous vous faites les gardiens des idées les plus réactionnaires.
M. Jean-Jacques Hyest. Pourquoi ne l'avez-vous pas fait voter en 1999 quand vous aviez la majorité à l'Assemblée nationale ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Vous ne pouvez tenir ces propos, madame Borvo ! Vous laissez entendre que nous ne souhaitons pas lutter contre les discriminations, notamment en matière d'orientation sexuelle. Vous ne pouvez pas faire croire cela.
En l'occurrence, vous souhaitez modifier la loi sur la liberté de la presse de 1881. C'est complètement différent. Sur le fond, nous vous l'avons déjà dit à de nombreuses reprises, nous partageons l'essentiel de vos préoccupations. C'est normal et je dirais que quasiment tout le monde les partage. Mais se lancer dans un mécanisme très technique qui consiste à modifier la loi de 1881 sur la presse nécessite, comme l'a très bien souligné M. Jean-Jacques Hyest tout à l'heure, un peu de concertation, de réflexion et certainement du temps.
M. le garde des sceaux a dit tout à l'heure que le chantier était ouvert et que des propositions vous seront présentées dans les mois à venir.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. En matière de diffamation, c'est difficile de ne pas toucher à la loi sur la presse !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 427.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur l'amendement n° 321.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je rappelle les termes de l'amendement afin que nos collègues sachent précisément sur quelle disposition ils sont appelés à voter : l'amendement n° 321 tend à insérer un article additionnel avant l'article 16. Le premier alinéa de l'article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est ainsi rédigé : « Toute association, régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant par ses statuts de combattre toute discrimination visée à l'article 225-1 du code pénal ou d'assister les victimes de discriminations à raison de l'un des éléments prévus au même article, peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions prévues par l'article 24, dernier alinéa, 32, alinéa 2, et 33, alinéa 3, de la présente loi. »
La rédaction est claire et simple. Si tous les membres de la commission n'ont pas été convaincus en réunion de travail, peut-être ont-ils eu le temps depuis de l'examiner de plus près.
Je dois dire que je ne vois pas comment on pourrait définir une diffamation à l'égard des uns ou des autres sans modifier la loi sur la presse. Qui dit diffamation, dit loi sur la presse. On ne peut placer cette disposition ailleurs.
Nous avons déposé deux propositions de loi. L'une, inspirée par un collectif, prévoyait d'ajouter l'orientation sexuelle dans les différents articles de la loi de 1881 mentionnant les discriminations, en gros le racisme. L'autre texte était la proposition de loi Badinter-Derycke. Nous avions nous-mêmes un choix à faire. La première proposition de loi me paraissait parfaite. J'ai eu l'impression que les membres de la commission qui l'avaient étudiée l'avaient également trouvée parfaite.
Vous connaissez l'ordre du jour de cette session.
A quand voulez-vous renvoyer l'examen d'une telle mesure si vous refusez de l'inclure dans le présent texte ? Je vous indique tout de suite que, les choses étant ce qu'elles sont, le groupe socialiste demandera que cette proposition de loi soit inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance réservée. D'ici là, vous aurez peut-être le temps de réfléchir et de vous rendre compte qu'elle ne comporte aucune chausse-trape, qu'elle est très claire, très simple et qu'on ne peut pas rêver mieux.
A quoi voulez-vous réfléchir, monsieur le garde des sceaux ? Pensez-vous que vous puissiez déboucher sur autre chose qu'une modification de la loi de 1881 sur ce point ? Oui ou non, voulons-nous qu'il puisse y avoir diffamation s'il y a discrimination, notamment celle qui est fondée sur l'orientation sexuelle ? Telle est la question. Certes, on peut réfléchir, mais pour nous, la réflexion est faite depuis longtemps.
Vous nous objectez qu'il fallait le faire avant. Je rappelle que cette proposition de loi a été déposée lorsque nous étions déjà, me semble-t-il, dans l'opposition. Nous avions aussi des ordres du jour très chargés. Mais, en tout état de cause, je tiens à dire que vous n'avez pas fini de nous entendre sur ce problème.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. À force d'entendre que tout est simple, je veux rappeler à un homme d'expérience comme vous, monsieur Dreyfus-Schmidt, que la jurisprudence pour la presse est l'une des plus difficile qui soit. La loi de 1881 étant très complexe dans son application, l'équilibre qui a été trouvé dans la durée est extrêmement délicat et fragile. La prolongation de trois mois à un an du délai de prescription dans un certain nombre de cas n'a pas été proposée par l'Assemblée nationale. Elle figurait dans mon propre projet. J'y ai réfléchi très longuement, comme je l'ai rappelé hier à l'occasion de la présentation de mon texte. Je l'ai proposée après avoir beaucoup hésité et consulté nombre d'avocats et de magistrats, en ayant bien conscience que nous avions affaire à deux libertés fondamentales opposées. Modifier cet équilibre exigeait beaucoup de doigté.
C'est la raison pour laquelle il faut être prudent dans la manière de rédiger la loi, car ensuite il faudra l'appliquer. Je souhaite en particulier que la réflexion que j'ai évoquée tout à l'heure nous permette d'en discuter avec les responsables de la presse et des médias, qui auront à l'appliquer.
Votre majorité, voilà quelques années, a réalisé une innovation législative en matière de droit à l'image. Mais, vous le savez - et je prends M. Badinter à témoin -, la loi Guigou pose des problèmes d'application, alors que, pourtant, nous étions tous d'accord sur les propositions avancées. Aujourd'hui, tous les professionnels s'en plaignent.
En matière de droit de la presse, faisons très attention. C'est vraiment ma seule préoccupation. Je souhaite que nous nous mettions bien d'accord avant de définir un texte précis, afin d'être bien sûrs qu'il sera applicable dans des conditions satisfaisantes.
Voilà quel est mon souci : trouver un bon équilibre entre deux libertés qui en apparence s'opposent.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. J'illustrerai les difficultés qui peuvent se présenter lorsqu'on se lance dans des modifications en prenant pour exemple l'amendement n° 321, que vient d'exposer M. Dreyfus-Schmidt.
En vous référant aux discriminations visées à l'article 225-1 du code pénal, vous supprimez toute référence à la défense de la mémoire des esclaves et de l'honneur de leurs descendants, qui avait été introduite par la loi Taubira-Delannon. (Murmures sur les travées du groupe socialiste.)
Franchement, sur ces sujets-là, il faut y aller doucement ! Sur les grands principes, tout le monde est d'accord mais, si vous voulez modifier la loi de 1881 sur la liberté de la presse, entrons dans les détails et donnons-nous le temps de travailler !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 321.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 428.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Art. 16. - Il est inséré, après l'article 65-2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, un article 65-3 ainsi rédigé :
« Art. 65-3. - Pour les délits prévus par le huitième alinéa de l'article 24, l'article 24 bis, le deuxième alinéa de l'article 32 et le troisième alinéa de l'article 33, le délai de prescription prévu par l'article 65 est porté à un an. »
Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 328 rectifié, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« Rédiger comme suit cet article :
« I. - Après les mots : "où ils auront été commis", la fin de la première phrase du premier alinéa de l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse est supprimée.
« II. - Le dernier alinéa de l'article 65 de la même loi est ainsi rédigé :
« S'il a été effectué dans cet intervalle des actes d'instruction ou des poursuites, elles ne se prescrivent qu'après un an révolu à compter du dernier acte. Il en est ainsi même à l'égard des personnes qui ne seraient pas impliquées dans cet acte de l'instruction ou de poursuite. »
L'amendement n° 89, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« I. - Remplacer le premier alinéa de cet article par deux alinéas ainsi rédigés :
« I. - L'article 65-2 devient l'article 65-3.
« II. - Il est inséré, après l'article 65-1 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, un article 65-2 rédigé comme suit :
« II. - En conséquence, rédiger comme suit le début du dernier alinéa de cet article :
« Art. 65-2. -. »
La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour présenter l'amendement n° 328 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. M. le garde des sceaux a bien voulu se référer à l'expérience que je pouvais avoir en la matière. Oh oui j'en ai une ! Je l'ai eue en tant que praticien pendant quelque quarante-trois ans et je l'ai comme parlementaire depuis longtemps déjà.
J'ai toujours été de ceux qui ont dénoncé les très nombreuses chausse-trappes dont est parsemée la loi sur la presse et qui font que beaucoup de gens de bonne foi diffamés voient leur procès échouer pour une raison de forme.
Il y a ceux qui ont l'habitude de défendre les organes de presse et qui trouvent ça très bien. Et il y a ceux qui défendent les particuliers et qui trouvent ça choquant.
Nous avons rencontré des représentants de la presse qui conviennent qu'en effet ces chausse-trappes sauvegardent la liberté de la presse. Nous connaissons la puissance du quatrième pouvoir, mais nous savons aussi que la liberté des uns doit tout de même s'arrêter là où commence celle des autres. On n'a pas le droit de tout dire ni de tout écrire. On n'a pas le droit, par exemple, de porter atteinte à la présomption d'innocence. On n'a pas davantage le droit de prétendre telle ou telle chose au sujet de telle personne sans preuve ou sans pouvoir prouver sa bonne foi.
Il arrive, simplement parce que le procès a été lancé immédiatement, que l'audience a été renvoyée et qu'on a oublié ensuite de demander au tribunal de se prononcer par un jugement. Il arrive donc, lorsque l'affaire revient, qu'un avocat se trouve là pour dire qu'il y a prescription. Et le tribunal confirme ses dires parce qu'il s'est écoulé plus de trois mois sans qu'un acte interruptif soit intervenu. C'est une chausse-trappe qui est inadmissible !
Nous avions proposé en commission qu'en matière de diffamation la prescription soit portée à un an. Tel était l'objet de notre amendement n° 328 avant qu'il soit rectifié.
Puis un certain nombre de nos collègues - MM. Béteille, Balarello et Peyrat - ont proposé de conserver les trois mois car, en matière de presse, il est normal d'aller vite pour éviter de devoir garder les preuves très longtemps.
Nous acceptons le délai de trois mois pour engager l'action, mais nous souhaitons qu'ensuite la prescription soit portée à un an pour se donner le temps de faire un procès convenable, un procès correct, un procès équilibré.
Les collègues précités voulaient présenter un sous-amendement à notre amendement. Mais ils se sont aperçus que, pour des questions de forme, c'était impossible. La seule solution était que nous rectifions nous-mêmes notre amendement en reprenant la formule qu'ils avaient proposée. C'est donc l'amendement n° 328 rectifié.
Par conséquent, on conserverait le délai de trois mois au départ pour ensuite le faire passer à un an.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 89 et pour donner l'avis de la commission sur l'amendement n° 328 rectifié.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 89 est rédactionnel.
L'amendement n° 328 rectifié procède, c'est exact, d'un travail collectif de la commission des lois, puisqu'il intègre des propositions faites par nos collègues Béteille, Balarello et Peyrat. En conséquence, la commission y est favorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à l'amendement n° 89.
En ce qui concerne l'amendement n° 328 rectifié, je voudrais vous faire part à la fois de mes réserves sur la démarche et de ma perplexité quant au fond.
S'agissant de la démarche, je l'ai dit lors de la discussion générale et je viens de le répéter, je ne souhaite pas que l'on intervienne de manière précipitée sur la loi relative à la liberté de la presse. C'est un équilibre subtil que vous proposez de modifier là, ce qui ne sera donc pas sans conséquence. Pour cette raison, je suis très réservé quant au fond.
Cela étant, je prends acte du fait qu'il s'agit d'un travail collectif de la commission des lois et je m'en remettrai à la sagesse du Sénat, sachant que nous aurons l'occasion de revenir sur ce point à l'occasion de la navette parlementaire.
J'attire vraiment l'attention du Sénat sur l'extrême fragilité de l'équilibre de la loi sur la liberté de la presse et je vous mets en garde à la fois sur le fond en termes juridiques, et sur l'extrême sensibilité des différents acteurs qui participent au droit d'expression dans notre pays.
J'avais introduit, dès avant dans le texte, la prolongation de trois mois à un an en cas de racisme et de xénophobie. J'espère qu'en le faisant je n'ai pas ouvert la boîte de Pandore - je vous le dis avec beaucoup de franchise -, car je finirais par le regretter. Mais peut-être auriez-vous imaginé vous-mêmes un certain nombre d'autres propositions ?
N'improvisons pas des modifications de la loi sur la liberté de la presse. Il s'agit d'un sujet extrêmement délicat.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 328 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'article 16 est ainsi rédigé et l'amendement n° 89 n'a plus d'objet.
Division et articles additionnels
M. le président. L'amendement n° 90, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Chapitre V.
« Dispositions concernant la prévention et la répression des infractions sexuelles. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Il s'agit d'insérer dans le projet de loi un nouveau chapitre consacré à la prévention et à la répression des infractions sexuelles.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 90.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, une division additionnelle ainsi rédigée est insérée dans le projet de loi, après l'article 16.
L'amendement n° 91, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Le deuxième alinéa de l'article 131-36-1 du code pénal est complété par une phrase ainsi rédigée : Toutefois, en matière correctionnelle, cette durée peut être portée à vingt ans par décision spécialement motivée de la juridiction de jugement ; lorsqu'il s'agit d'un crime puni de trente ans de réclusion criminelle, cette durée est de trente ans ; lorsqu'il s'agit d'un crime puni de la réclusion criminelle à perpétuité, la cour d'assises peut décider que le suivi socio-judiciaire s'appliquera sans limitation de durée, sous réserve de la possibilité pour le tribunal de l'application des peines de mettre fin à la mesure à l'issue d'un délai de trente ans, selon les modalités prévues par l'article 712-7 du code de procédure pénale.
« II. - Dans la deuxième phrase du troisième alinéa du même article, les mots : "deux ans" sont remplacés par les mots : "trois ans" et les mots : "cinq ans" sont remplacés par les mots : "sept ans". »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Cet amendement précise les premières mesures que la commission des lois souhaite proposer au Sénat en matière de répression des infractions sexuelles.
Nous voulons, tout d'abord, améliorer les dispositions du code pénal relatives au suivi socio-judiciaire. Cet amendement tend à augmenter les durées prévues pour ce suivi et à aggraver les peines encourues en cas de non-respect de la mesure.
Aujourd'hui, le suivi socio-judiciaire, qui - dois-je le rappeler ? - inclut principalement un suivi médical, est, au maximum, d'une durée de vingt ans, ce qui est insuffisant dans un certain nombre de cas. Il paraît raisonnable de prévoir une durée de trente ans pour les personnes condamnées à trente ans de réclusion et de permettre à la cour d'assises de ne pas fixer de délai s'agissant des condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité.
Ainsi, une personne qui aurait été condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité et qui aurait été libérée par anticipation - cela se produit de temps en temps - pourrait bénéficier d'un suivi socio-judiciaire, et donc médical, à perpétuité, alors qu'aujourd'hui ce n'est pas possible.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le Gouvernement est favorable à cette proposition qui va dans le sens d'un suivi meilleur, plus continu, des délinquants malades et dangereux.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. Monsieur le président, c'est le premier tableau d'un ensemble. Nous aurons l'occasion de développer les choses plus avant lors de la discussion des prochains amendements.
Je ne suis pas opposé à cet amendement n° 91, mais j'ai une préoccupation que je vais vous livrer directement parce qu'elle vise une matière très importante.
Le suivi socio-judiciaire, c'est certain, a une dimension thérapeutique qui est tout à fait essentielle dans des cas aussi graves que ceux qui sont mentionnés, notamment les crimes punis de la réclusion criminelle à perpétuité. Or, d'après ce que nous avons entendu, il apparaît que nous ne disposons pas d'équipes médicales capables d'assumer cette tâche.
Encore une fois, je suis tout à fait favorable à l'existence de ce suivi socio-judiciaire, mais je vous pose la question - c'est une question essentielle - : des efforts nécessaires vont-ils être faits pour que cette procédure souhaitable, introduite, sauf erreur de ma part, en 1998 après l'affaire Guy George, soit mise en place et que des moyens soient mis à disposition ? Un suivi socio-judiciaire qui se traduirait simplement par des obligations classiques de rendre compte, notamment de son adresse en cas de contrôle, et qui reviendrait, d'une certaine manière, à être placé dans une condition assez proche de la libération conditionnelle serait insatisfaisant.
Monsieur le garde des sceaux, la dimension thérapeutique, à l'heure actuelle, est-elle satisfaisante ? Si elle ne l'est pas, comme nous le redoutons, pourquoi ? Qu'envisagez-vous de faire à ce propos ? On ne peut pas s'engager sur des périodes aussi longues sans avoir les moyens de le faire. Il s'agit là de questions fondamentales !
J'ajoute - ce sera ma dernière observation - que la difficulté, dans ce domaine, réside dans le fait qu'un traitement thérapeutique de cette nature demande l'assentiment et la volonté de coopération de celui qui le suit. Je sais que c'est une des grandes difficultés quand on parle aux professionnels de cette mesure qui est d'ordre judiciaire.
Malgré cette difficulté, qu'on ne peut pas négliger, j'aimerais savoir, monsieur le garde des sceaux, comment vous envisagez, très concrètement, le développement d'une mesure que, pour ma part, je considère comme tout à fait souhaitable.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. J'émettrai également des réserves, qui vont dans le même sens que celles de M. Badinter. Evidemment, quoi de plus intolérable que de constater que la société s'avère incapable de protéger les citoyens contre les atteintes les plus graves à leur intégrité physique ? Et lorsqu'il s'agit d'enfants, on atteint le comble de l'horreur, c'est certain.
Mais, en l'occurrence, est-on en train de faire de l'affichage ou est-on vraiment en capacité de faire ce que l'on dit ? En 1998, justement, quelques années après l'institution de la peine incompressible pour les auteurs de crimes sexuels, le législateur décidait d'introduire dans le code pénal la peine complémentaire de suivi socio-judiciaire et de porter ce suivi de cinq à dix ans pour les délits et de dix à vingt ans pour les crimes.
La mesure que l'on nous propose aujourd'hui, là encore avec précipitation, nous parvient sous forme d'un amendement que nous n'avons guère eu le temps d'étudier, alors qu'il aurait fallu auditionner des personnes compétentes, notamment des médecins, sur ce sujet. Il nous est proposé d'allonger considérablement le suivi socio-judiciaire, qui serait porté de vingt à trente ans, sans même de limitation de durée en cas de réclusion criminelle à perpétuité, laquelle, comme on le sait, ne va pas jusqu'à perpétuité, heureusement !
Or, déjà en 1998 - j'ai relu le débat de l'époque -, mon collègue Robert Pagès, aujourd'hui en retraite, mettait en garde contre le suivi à vie et abordait la question des moyens dans des termes que je rappelle car, cinq ans après, on en est toujours au même point : « Les moyens prévus pour mettre en oeuvre l'application de la présente loi seront-ils suffisants pour couvrir un tel allongement de la durée du suivi ? ».
Alors qu'aucune évolution de la loi de 1998 n'est proposée et que la situation de la psychiatrie dans notre pays est très préoccupante - encore plus qu'en 1998 -, je crois que cette question mérite d'être posée à nouveau.
Cette réforme n'épuise pas non plus la question du suivi médical en prison dont les commissions d'enquête parlementaire sur les prisons avaient pointé les graves, très graves insuffisances. C'est pourquoi, en l'état actuel du texte, nous sommes assez réservés sur l'introduction de ce cavalier.
On peut toujours voter ce genre de disposition, bien entendu, mais, ce faisant, on laisse croire que l'on répond à une demande pressante, en l'occurrence trouver des solutions au problème de la délinquance sexuelle, et on trompe nos concitoyens.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. La question qui se pose n'est pas celle de la prolongation du délai, mais celle que vous avez posée, monsieur Badinter : comment mieux nous organiser pour améliorer l'articulation entre le judiciaire et le médical dans ce pays ?
D'une manière plus générale, on l'a vu avec les rapports consacrés aux prisons, il est inacceptable que ce soit l'administration pénitentiaire qui, finalement, s'occupe de ceux qui ont le plus de difficultés psychiatriques. Or nous sommes exactement dans cette situation.
M. Jean-Jacques Hyest. Tout à fait ! C'est effrayant !
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Pour répondre plus directement à M. Badinter, oui, nous devons faire des efforts supplémentaires pour que le dispositif proposé par la commission, et que j'approuve, ait un sens concret. Car, ne nous voilons pas la face, madame Borvo : il y a aujourd'hui en liberté des gens dangereux, et nous faisons tous semblant de ne pas le savoir. (Mme Nicole Borvo fait des signes de dénégation.) Il est donc indispensable que ces personnes soient soumises à un contrôle socio-judiciaire, c'est-à-dire à un certain nombre d'obligations doublées d'un suivi thérapeutique. Si, sur un sujet qui est, certes, l'affaire du Gouvernement et du Parlement, mais aussi celle des acteurs de la vie médicale, on ne s'efforce pas de sortir de l'hypocrisie, on laisse ainsi libres des personnes potentiellement dangereuses pour les autres et, d'une certaine façon, pour elles-mêmes.
Personnellement, je suis tout à fait déterminé à me battre, en particulier aux côtés de M. Mattei, pour que nous arrivions à mieux organiser le maillage des médecins coordinateurs sur le territoire, en améliorant l'articulation avec les autorités judiciaires. Il nous faut à l'évidence renforcer ce maillage, accroître les moyens et former plus de médecins.
De même, il nous incombe d'ouvrir le débat de fond, de nous interroger sur l'efficacité des soins, de nous demander si l'obligation de soins doit perdurer en l'absence de toute possibilité de guérison.
A défaut de nous poser ces questions de société, nous ne ferons que neutraliser des personnes en les incarcérant pendant dix, quinze ou vingt ans sans que le problème soit réglé pour autant à leur libération, mais en faisant semblant de croire le contraire.
Pour que le suivi socio-judiciaire ait un sens, nous devons lui consacrer des moyens supplémentaires. Je suis, pour ma part, tout à fait déterminé, et je travaillerai sur ce dossier en particulier avec M. le ministre chargé de la santé.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 91.
M. Robert Bret. Le groupe CRC s'abstient.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16.
L'amendement n° 92, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 706-47-1 devient l'article 706-47-2.
« L'article 706-47 devient l'article 706-47-1 et la première phrase de son premier alinéa est ainsi rédigée :
« Les personnes poursuivies pour l'une des infractions mentionnées à l'article 706-47 doivent être soumises, avant tout jugement au fond, à une expertise médicale. »
« II. - L'article 706-47 du code de procédure pénale est ainsi rétabli :
« Art. 706-47. - Les dispositions du présent titre sont applicables aux procédures concernant les infractions de meurtre ou d'assassinat d'un mineur précédé ou accompagné d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie ou pour les infractions d'agression ou d'atteintes sexuelles ou de recours à la prostitution d'un mineur prévues par les articles 222-23 à 222-33, 225-12-1 et 227-22 à 227-27 du code pénal. »
« III. - Il est inséré après l'article 706-47 du même code une division ainsi rédigée :
« Chapitre Ier.
« Dispositions générales. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Cet amendement vise à étendre la liste des infractions qui figurent à l'article 706-47 du code de procédure pénale pour y ajouter le harcèlement sexuel et le recours à la prostitution d'un mineur.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. J'ai été amené à rappeler, hier, dans la discussion générale, que les agressions sexuelles autres que le viol peuvent relever et de la composition pénale et de l'ordonnance pénale telle que vous nous l'avez proposé, monsieur le garde des sceaux, et de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. Ainsi, en l'état actuel du texte, cela peut très bien entraîner un retrait du permis de conduire pendant quatre mois, comme cela peut très bien faire l'objet d'un accord validé par le juge - ce dernier ne peut pas faire autrement que de le valider ou de le refuser - sans même qu'il y ait d'audience publique.
Cela ne vous paraît-il pas en contradiction avec l'inscription de ce délit dans la liste des infractions dont les auteurs relèveraient du fichier en question ? Si l'infraction est très grave, l'auteur mérite un suivi sérieux, mais alors on ne peut pas traiter la procédure à la légère.
Je pose la question. J'aimerais bien obtenir aujourd'hui la réponse que je n'ai pas eue hier.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je n'ai sans doute pas tout compris, mais je ne vois pas la contradiction que relève M. Dreyfus-Schmidt. Il appartiendra bien sûr au procureur de la République de faire ou non la proposition, et au délinquant et à son avocat de décider ou non de l'accepter. Je ne vois pas en quoi cela représente un changement par rapport aux propositions dont nous discutons.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Ah ?
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. Je voudrais demander des explications à M. le rapporteur concernant la portée de cet amendement.
Le texte proposé pour l'article 706-47 rend les dispositions du titre XIX du livre IV applicable à une longue liste d'infractions. Je comprends très bien que l'on prenne des dispositions fermes pour réprimer efficacement les viols et les agressions sexuelles avec violences, c'est-à-dire ce qui constitue la criminalité sexuelle grave. Mais, à y regarder de près, dans cette énumération, ce n'est pas le cas de toutes les infractions visées. Il en est ainsi de l'exhibition sexuelle, qui, d'ailleurs, n'est punie que d'une peine d'un an de prison, ou du harcèlement sexuel, du recours à la prostitution d'un mineur, de la diffusion d'images pédophiles qui, à ma connaissance, ne se traitent pas de la même façon, par un fichier. Il faut que ce soit clair entre nous, monsieur le rapporteur, car les conséquences qui s'attachent à l'inscription dans la loi de cette longue énumération sont graves.
M. le président. La parole et à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. A la lumière des observations formulées par M. Badinter, je rectifie, au nom de la commission, l'amendement n° 92 : je maintiens dans la liste le recours à la prostitution d'un mineur, mais j'en exclus le harcèlement sexuel, visé à l'article 222-33 du code pénal.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 92 rectifié, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :
« Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 706-47-1 devient l'article 706-47-2.
« L'article 706-47 devient l'article 706-47-1 et la première phrase de son premier alinéa est ainsi rédigée :
« Les personnes poursuivies pour l'une des infractions mentionnées à l'article 706-47 doivent être soumises, avant tout jugement au fond, à une expertise médicale. »
« II. - L'article 706-47 du code de procédure pénale est ainsi rétabli :
« Art. 706-47. - Les dispositions du présent titre sont applicables aux procédures concernant les infractions de meurtre ou d'assassinat d'un mineur précédé ou accompagné d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie ou pour les infractions d'agression ou d'atteintes sexuelles ou de recours à la prostitution d'un mineur prévues par les articles 222-23 à 222-32, 225-12-1 et 227-22 à 227-27 du code pénal. »
« III. - Il est inséré après l'article 706-47 du même code une division ainsi rédigée :
« Chapitre Ier.
« Dispositions générales. »
Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je suis favorable à l'amendement n° 92 ainsi rectifié.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Monsieur le président, nous souhaitons une brève suspension de séance.
M. le président. Nous allons donc interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures cinquante, est reprise à vingt-deux heures cinquante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote sur l'amendement n° 92 rectifié.
M. Robert Badinter. Dans l'énumération qui figure à l'article 706-47, l'article 222-33 - c'est-à-dire le harcèlement sexuel - a disparu, mais demeure l'article 222-32, qui a trait à l'exhibition. Or, sauf erreur de ma part, telle qu'elle est interprétée par la jurisprudence, l'exhibition peut viser le cas d'un jeune homme et d'une jeune femme qui profitent d'une belle soirée d'été pour faire l'amour sous les étoiles ! Est-ce vraiment ceux-là que vous voulez ficher ?
Les articles 222-23 à 222-31 concernent les violences sexuelles. Quand vous en arrivez à l'exhibition sexuelle avec l'article 222-32, vous pensez à l'exhibitionnisme classique, à l'homme à l'imperméable, enfin à ce que tout le monde sait sur le sujet. Mais, quand on se penche sur la jurisprudence, on s'aperçoit qu'il n'y a pas que cela, j'aurais l'occasion d'y revenir. Ce n'est d'ailleurs pas non plus le même niveau de sanction pénale, puisqu'il s'agit d'un an d'emprisonnement.
Mes chers collègues, attention : un texte, c'est un texte, et il a vocation à s'appliquer dans toute sa rigueur.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Si la jurisprudence sur l'exhibitionnisme est bien celle-là, je pense qu'il faut ôter la référence à l'article 222-32 de l'énumération. Nous réservons donc le fichier aux actes de violence. Ce sera plus cohérent.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Je rectifie de nouveau l'amendement de la commission des lois en précisant que l'on visera les articles 222-23 à 222-31 et non plus 222-23 à 222-32.
M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 92 rectifié bis présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, et ainsi libellé :
« Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - L'article 706-47-1 devient l'article 706-47-2.
« L'article 706-47 devient l'article 706-47-1 et la première phrase de son premier alinéa est ainsi rédigée :
« Les personnes poursuivies pour l'une des infractions mentionnées à l'article 706-47 doivent être soumises, avant tout jugement au fond, à une expertise médicale. »
« II. - L'article 706-47 du code de procédure pénale est ainsi rétabli :
« Art. 706-47. - Les dispositions du présent titre sont applicables aux procédures concernant les infractions de meurtre ou d'assassinat d'un mineur précédé ou accompagné d'un viol, de tortures ou d'actes de barbarie ou pour les infractions d'agression ou d'atteintes sexuelles ou de recours à la prostitution d'un mineur prévues par les articles 222-23 à 222-31, 225-12-1 et 227-22 à 227-27 du code pénal.
« III. - Il est inséré après l'article 706-47 du même code une division ainsi rédigée :
« Chapitre Ier.
« Dispositions générales. »
La parole est à Mme Nicole Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Je vais m'abstenir sur cet amendement.
On nous a dit tout à l'heure qu'il n'était pas possible de modifier la loi de 1881 sur la presse sans prendre le temps de réfléchir plus avant.
Et il faudrait tout à coup renoncer à cette belle prudence ? L'exhibition, c'est quoi ? Et quelle est la jurisprudence applicable ? Donc, réfléchissons avant de prendre ce genre de texte, s'il vous plaît !
M. Robert Badinter. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Sueur. C'est très judicieux !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 92 rectifié bis.
Mme Nicole Borvo. Le groupe CRC s'abstient.
M. Jean-Pierre Sueur. Le groupe socialiste également.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16.
L'amendement n° 93, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article 706-53 du code de procédure pénale, une division additionnelle ainsi rédigée :
« Chapitre II.
« Dispositions relatives au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles (FIJAIS). »
« Art. 706-53-1. - Le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles constitue un traitement automatisé d'informations nominatives tenu par les services du casier judiciaire national automatisé, sous l'autorité du ministre de la justice et le contrôle d'un magistrat. Afin de prévenir le renouvellement des infractions mentionnées à l'article 706-47 et de faciliter l'identification de leurs auteurs, ce fichier reçoit les informations mentionnées à l'article 706-53-2.
« Art. 706-53-2. - Sont inscrites dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles les informations concernant l'identité et l'adresse, ou la dernière adresse connue, des personnes ayant fait l'objet, pour une ou plusieurs des infractions mentionnées à l'article 706-47 :
« 1° D'une condamnation, y compris d'une condamnation par défaut non frappée d'opposition ou d'une déclaration de culpabilité assortie d'une dispense ou d'un ajournement de la peine ;
« 2° D'une décision prononcée en application des articles 8, 15, 15-1, 16, 16 bis et 28 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante ;
« 3° D'une composition pénale prévue par l'article 41-2 dont l'exécution a été constatée par le procureur de la République ;
« 4° D'une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement fondée sur les dispositions du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal ;
« 5° D'une décision de même nature que celles visées ci-dessus prononcée par une juridiction étrangère, qui en application d'une convention ou d'un accord international a fait l'objet d'un avis aux autorités françaises ou a été exécutée en France à la suite du transfèrement de la personne condamnée ;
« Ce fichier comprend aussi les informations relatives à la décision judiciaire ayant justifié l'inscription et à la nature de l'infraction.
« Art. 706-53-3. - Les informations figurant dans le fichier sont conservées pendant une durée de quarante ans à compter de la date à laquelle a été prise la décision judiciaire, y compris en cas d'amnistie ou de réhabilitation.
« Ces informations ne peuvent, à elles seules, servir de preuve à la constatation de l'état de récidive.
« Art. 706-53-4. - Les informations contenues dans le fichier sont directement accessibles, par l'intermédiaire de systèmes de télécommunication sécurisés :
« - aux procureurs de la République, aux juges d'instruction, aux juges des enfants et aux juges de l'application des peines ;
« - aux officiers de police judiciaire, dans le cadre de procédures concernant une infraction mentionnée à l'article 706-47 ;
« - aux préfets, pour l'examen des demandes d'agrément concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs.
« Les dirigeants de personnes morales de droit public ou privé exerçant auprès des mineurs une activité culturelle, éducative ou sociale au sens de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles peuvent obtenir, pour les seules nécessités liées au recrutement d'une personne, la délivrance d'une attestation du gestionnaire du fichier indiquant que cette personne ne fait l'objet d'aucune information dans le fichier. Cette personne peut également obtenir elle-même une attestation en ce sens.
« Art. 706-53-5. - Les modalités et conditions d'application des dispositions du présent chapitre sont déterminées par décret en Conseil d'Etat pris après avis de la commission nationale consultative de l'informatique et des libertés. »
Le sous-amendement n° 474, présenté par MM. Badinter, Dreyfus-Schmidt, C. Gautier, Sueur et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, est ainsi libellé :
« I. - Dans le premier alinéa du texte proposé par l'amendement n° 93 pour l'article 706-53-2 du code de procédure pénale, remplacer les mots : "à l'article 706-47" par les mots : "aux articles 222-23, 222-24, 222-25, 222-26, 222-27, 222-28, 222-29, 222-30, 222-31, 227-22, 227-23, 227-24, 227-25, 227-26 du code pénal".
« II. - Rédiger comme suit le deuxième alinéa (1°) du même texte :
« 1° D'une condamnation contradictoire ;
« III. - Compléter in fine le troisième alinéa (2°) du même texte par les mots : "pour des infractions prévues aux articles 222-23, 222-24, 222-25, 222-26, 222-27, 222-28 et 222-29 du code pénal."
« IV. - Supprimer les quatrième et cinquième alinéas (3° et 4°) du même texte. »
Le sous-amendement n° 460, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Remplacer le texte proposé par l'amendement n° 93 pour les articles 706-53-3 à 706-53-5 du code de procédure pénale par les dispositions suivantes :
« Art. 706-53-3. _ Les informations figurant dans le fichier y sont directement inscrites, par l'intermédiaire d'un moyen de télécommunication sécurisé, par le procureur de la République compétent.
« Les informations relatives à la dernière adresse de la personne peuvent être directement inscrites dans le fichier, par l'intermédiaire d'un moyen de télécommunication sécurisé, par les personnels de la police judiciaire habilités à cette fin.
« Art. 706-53-4. _ Les informations mentionnées à l'article 706-53-1 concernant une même personne sont retirées du fichier au décès de l'intéressé ou à l'expiration d'un délai de quarante ans à compter du jour où l'ensemble des décisions enregistrées ont cessé de produire tout effet.
« L'amnistie ou la réhabilitation n'entraîne pas l'effacement de ces informations.
« Ces informations ne peuvent, à elles seules, servir de preuve à la constatation de l'état de récidive.
« Art. 706-53-5. _ Toute personne dont l'identité est inscrite dans le fichier en est informée par l'autorité judiciaire, soit par notification à personne, soit par lettre recommandée adressée à la dernière adresse déclarée.
« La personne est alors informée qu'elle est tenue de déclarer ses changements d'adresse, dans un délai de deux mois, auprès du commissariat de police ou de la gendarmerie de son domicile ; elle est également informée des peines encourues en cas de non déclaration.
« Lorsque la personne est détenue, cette information lui est donnée au moment de sa libération définitive ou préalablement à la première mesure d'aménagement de sa peine.
« Le fait, pour une personne inscrite dans le fichier, de ne pas déclarer aux services du casier judiciaire sa nouvelle adresse dans les deux mois qui suivent son changement de domicile est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
« Art. 706-53-6. - Les informations contenues dans le fichier sont directement accessibles, par l'intermédiaire d'un système de télécommunication sécurisé :
« _ aux procureurs de la République, aux juges d'instruction, aux juges des enfants et aux juges de l'application des peines ;
« _ aux officiers de police judiciaire, dans le cadre de procédures concernant une infraction mentionnée à l'article 706-47 ;
« _ aux préfets, pour l'examen des demandes d'agrément concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs.
« Art. 706-53-7. _ Toute personne justifiant de son identité obtient, sur demande adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel elle réside, communication de l'intégralité des informations la concernant figurant au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles.
« Les dispositions des alinéas trois, quatre et cinq de l'article 777-2 sont alors applicables.
« Toute personne qui veut faire rectifier ou supprimer une mention la concernant peut agir selon la procédure prévue à l'article 778.
« Art. 706-53-8. _ Les modalités et conditions d'application des dispositions du présent chapitre sont déterminées par décret en Conseil d'Etat pris après avis de la Commission nationale consultative de l'informatique et des libertés. »
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l'amendement n° 93.
M. François Zocchetto, rapporteur. L'amendement n° 93 tend à créer un fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles. De récentes affaires ont montré que notre légisation était insuffisante en matière de suivi des condamnés pour infractions sexuelles, je n'y reviens pas.
Le présent projet de loi, qui tend à adapter la justice aux évolutions de la criminalité, nous semble particulièrement adapté pour accueillir des dispositions relatives à la prévention et à la répression des infractions sexuelles. Plutôt que de créer un fichier entièrement nouveau, la commission des lois vous propose de créer un nouveau relevé au sein du casier judiciaire, relevé qui serait spécifiquement consacré aux auteurs d'infractions sexuelles.
Ce fichier des auteurs d'infractions sexuelles mentionnerait l'adresse, ou la dernière adresse connue, des personnes ayant été condamnées pour ces infractions.
Les informations seraient conservées quarante ans, même en cas d'amnistie ou de réhabilitation.
L'accès aux informations serait strictement limité aux magistrats, aux officiers de police judiciaire pour les enquêtes portant sur des infractions sexuelles, enfin aux préfets pour les demandes d'agrément concernant des activités impliquant un contact avec des mineurs.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour présenter le sous-amendement n° 474.
M. Robert Badinter. A ce stade de la discussion, déplorant en effet la façon dont des questions aussi graves et aussi complexes - il suffit d'ailleurs, pour se convaincre de leur complexité, de comparer la première et la seconde version du texte de la commission -, je souhaite reprendre le problème en son entier.
Chacun comprend qu'il s'agit d'éviter la récidive des auteurs d'infractions sexuelles graves, et chacun a présent à l'esprit des cas absolument tragiques qui soulèvent, à juste titre, l'indignation, la réprobation et l'inquiétude, pour ne pas dire l'angoisse.
Cela étant acquis, de quels instruments disposons-nous ?
D'abord, s'agissant de l'efficacité de la recherche quand il faut retrouver le passé d'un suspect, il y a eu des progrès sensibles.
Il faut tout de même rappeler qu'au bulletin B1 - celui qui n'est pas communiqué au public - du casier judiciaire classique figurent pendant quarante ans toutes, absolument toutes, les condamnations. Le B1 est, bien entendu, accessible aux magistrats, notamment aux procureurs de la République, et aux officiers de police judiciaire agissant dans le cadre d'enquêtes ou de commissions rogatoires.
La police judiciaire et plus encore le parquet ont donc d'ores et déjà à leur disposition tous les éléments nécessaires pour connaître le passé d'un suspect et vérifier s'il est ou non l'auteur d'infractions antérieures.
Ensuite, s'agissant du problème de l'identification, nous avons changé de monde, l'identification par les empreintes génétiques et l'ADN ayant complètement modifié la donne.
Nous disposons à cet égard d'un fichier, créé du temps du gouvernement Jospin. Si, comme on le dit, il ne donne pas entière satisfaction, nous serons les premiers à demander qu'il soit porté remède à cette situation. Mais il n'en reste pas moins que ce fichier existe, et c'est là que se trouve la source d'une identification indiscutable.
Enfin, reste la question de savoir où se trouve l'ancien condamné devenu suspect.
En la matière, nous disposons d'un troisième instrument législatif : le suivi socio-judiciaire, qui - cela va de soi - implique que le domicile des personnes concernées est connu en même temps que l'obligation pour elles de ne pas changer de résidence sans en avertir l'autorité judiciaire.
Je veux bien que l'on examine comment fonctionnent ces instruments pour les améliorer. Ainsi vont les choses : on fait un texte, on voit comment il s'applique - ou ne s'applique pas - et on remédie à ses imperfections.
Mais le fichier que l'on nous propose d'instituer dépasse considérablement ces exigences. Tout à l'heure, on a vu qu'il était question d'y inscrire les auteurs d'infractions mineures qui ne sauraient en aucune manière s'y trouver. En ce qui concerne les condamnations visées, comment ne pas sursauter à la lecture du texte proposé pour l'article 756-53-2 ?
Seraient inscrites dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles des informations concernant des personnes ayant fait l'objet « y compris d'une condamnation par défaut non frappée d'opposition », - est-il concevable d'être fiché pendant quarante ans pour une condamnation par défaut non frappé d'opposition ? - « ou d'une déclaration de culpabilité assortie d'une dispense ou d'un ajournement de la peine ». On imagine la légèreté des faits s'il y a eu dispense de peine... La personne qui a bénéficié de cette dispense n'en est pas moins fichée pour quarante ans ! Le même argument vaut pour l'ajournement de la peine, mesure de bienveillance judiciaire absolue, et le signe même de la non-dangerosité. L'enfance délinquante ? Elle aussi est fichée, et fichée pour quarante ans ! On retrouvera donc dans le fichier, trente ans et plus après les faits, des mineurs devenus des adultes, peut-être des pères de famille.
Sont citées ensuite la composition pénale, dont on aura l'occasion de parler, et la décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement fondée sur les dispositions du premier alinéa de l'article 122-1 du code pénal. Or chacun sait que la référence à cet article signifie qu'on vise ici celui qui a agi dans un moment d'absence complète de maîtrise de lui-même.
M. Jean-Jacques Hyest. Il est peut-être nécessaire que celui-là soit fiché...
M. Robert Badinter. Vous entrez-là dans un domaine qui n'est plus judiciaire puisqu'il s'agit du domaine des mesures de sûreté, et c'est tout le débat qu'il faudrait reprendre, car on ne saurait greffer des mesures de sûreté dans une réforme du code de procédure pénale ! Vous mélangez dans un même élan Lombroso et Orwell : l'individu dangereux parce qu'il est né tel, que l'on place sous haute surveillance pendant quarante ans, c'est-à-dire en pratique jusqu'à la fin de ses jours.
Tout cela n'est pas pensable ! Sauf à bouleverser radicalement le droit, il n'est pas concevable d'inscrire, au-delà du bulletin B1, dans un fichier spécial et pour quarante ans, des gens qui ont été dispensés de peine, des gens qui ont été condamnés par défaut, des gens qui étaient mineurs au moment des faits - il serait d'ailleurs intéressant de savoir pour quel type de comportement et à quel âge ils ont été condamnés -, des gens qui ont fait l'objet d'une composition pénale - laquelle ne devrait intervenir, nous dit-on, que pour des infractions légères -, enfin des gens qui ont bénéficié d'un non-lieu.
Ce n'est plus Guy George, ce n'est plus le criminel récidiviste, ce n'est plus le violeur multiple que nous visons. Imagine-t-on le procureur de la République proposant une composition pénale, un ajournement, une dispense de peine pour un de ces crimes affreux qui nous révoltent et dont nous voulons prévenir la récidive ? Vous êtes emportés par la passion du fichage !
Je le rappelle, le bulletin B1 contient déjà tous les renseignements que vous souhaitez collecter. Vous proposez la création d'un fichier autonome. Je vous le dis tout de suite : nous ne pourrons pas vous suivre. Nous verrons tout à l'heure quelles seraient les conséquences d'un tel fichier.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, pour présenter le sous-amendement n° 460.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Le principal ajout proposé par le sous-amendement du Gouvernement réside dans l'introduction d'un certain nombre de règles d'effacement, ce qui devrait d'ailleurs répondre en partie à M. Badinter.
Outre, bien sûr, l'effacement résultant du décès de la personne, le point de départ du délai de quarante ans doit être fixé au jour où les décisions judiciaires enregistrées ont cessé tout effet.
Le sous-amendement précise par ailleurs les conditions d'alimentation du fichier, directement par les procureurs de la République ou, s'agissant des informations relatives à l'adresse, par les services de police judiciaire.
Enfin, la possibilité pour toute personne de consulter l'intégralité des mentions la concernant doit être prévue, afin de permettre le cas échéant de demander la rectification ou l'effacement de mentions erronées, par exemple en cas d'usurpation d'identité, comme c'est le cas pour le casier judiciaire.
Par ailleurs, le présent sous-amendement ne reprend pas la disposition, prévue par le texte de l'amendement de la commission des lois, donnant à des personnes morales de droit privé ou à toute personne la possibilité d'obtenir une attestation d'absence de mention dans le fichier. Compte tenu de l'opérationnalité des mécanismes mis en place - notamment du fait que les préfets auront directement accès au fichier -, une telle possibilité n'est pas nécessaire, et elle induirait de graves effets pervers.
Tels sont les principaux éléments contenus dans ce sous-amendement, mais notre débat montre qu'à l'occasion de la navette parlementaire il nous faudra sans doute encore compléter le dispositif.
L'amendement de la commission des lois permet, je le souligne, d'aborder dans un délai relativement rapide cette question, sur laquelle tant le ministre de l'intérieur que moi-même nous nous étions prononcés il y a quelques semaines, et donc de doter les services d'enquête et l'institution judiciaire d'un mécanisme supplémentaire pour éviter la récidive et assurer ainsi la protection d'éventuelles victimes.
Une question, en particulier, méritera d'être examinée : je pense à l'utilisation du fichier et à l'obligation imposée à une personne mentionnée sur le fichier de déclarer son adresse pour le suivi par les services d'enquête. C'est un sujet extrêmement important sur lequel il est encore nécessaire de travailler si nous voulons donner une réelle efficacité au fichier.
Je suis donc défavorable au sous-amendement n° 474.
Je suis conscient de la nouveauté du sujet et je comprends les préoccupations de M. Badinter, mais les violeurs en fuite condamnés par défaut ou encore les violeurs déclarés fous - franchement les plus dangereux - ne figureraient dans le fichier, semble-t-il, plus si le sous-amendement n° 474 était adopté...
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements n°s 474 et 460 ?
M. François Zocchetto, rapporteur. Au stade où nous en sommes de l'examen du texte et de la discussion des amendements, je ferai deux remarques sur le sous-amendement n° 474.
Premièrement, je rappelle que le fichier ne sera accessible que de façon très limitée. Seuls les magistrats, les officiers de police judiciaire menant des enquêtes portant sur des infractions sexuelles et les préfets ayant à se prononcer sur des demandes d'agrément y auront accès.
Deuxièmement, écarter les personnes irresponsables pénalement lorsque l'instruction a montré qu'elles avaient commis une infraction sexuelle ne se justifie pas. Les deux exemples cités par M. le garde des sceaux montrent que l'on ne peut retenir votre sous-amendement, monsieur Badinter.
Je tiens à préciser que ce sous-amendement n'a pas pu être examiné par la commission. En revanche, le sous-amendement n° 460 l'a été et a fait l'objet d'un avis favorable.
Le sous-amendement du Gouvernement tend notamment à prévoir une sanction à l'égard des personnes qui figureraient dans le fichier et qui ne déclareraient pas leur changement d'adresse ainsi qu'un droit d'accès des personnes figurant dans le fichier aux informations les concernant, deux dispositions qui me paraissent utilement compléter l'amendement n° 93.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 474.
M. Robert Badinter. On nous a opposé tout à l'heure, à propos de la loi sur la presse, l'impossibilité de légiférer, même à ce stade de la navette, sur une question simplissime concernant ceux qui sont visés par la loi sur la diffamation, mais il semble que rien ici ne s'oppose à ce que nous traitions de questions clés !
Il y a notamment une question déterminante sur laquelle, monsieur le garde des sceaux, je n'ai pas exactement perçu la position du Gouvernement : le sous-amendement n° 460 maintient-il la disposition de l'article 706-53-5 du code de procédure pénale selon laquelle la personne informée par l'autorité judiciaire de son inscription au fichier est ensuite tenue, et cela pendant quarante ans, de déclarer ses changements d'adresse dans un délai de deux mois auprès du commissariat de police ou de la gendarmerie de son domicile ? J'indique que, si elle ne le fait pas, elle est passible de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende ! Est-ce, monsieur le garde de sceaux, une version antérieure ou est-ce bien le texte de votre sous-amendement ?
Si c'est le texte de votre sous-amendement, permettez-moi de vous dire que c'est l'une des innovations les plus fondamentalement critiquables que j'aurai rencontrées dans le cours d'une discussion parlementaire sur un projet de loi !
N'oublions jamais en effet que la peine a une double raison d'être : la sanction et la réinsertion. Quand nous aurons à discuter - avec vous, je l'espère - de la loi pénitentiaire, nous ne manquerons jamais de le rappeller. Je vais être très concret, je vais quitter le domaine des textes et vous ramener sur terre : il n'y aura pas d'amnistie, pas de réhabilitation possible ; sur ce fichier, on sera inscrit pendant quarante ans, c'est-à-dire quasiment à vie.
Un garçon de vingt ans s'est laissé aller à commettre une agression sexuelle. C'est grave, et il a été condamné à trois ans. Il a purgé sa peine : très bien ! Il a changé, et la condamnation a donc eu un sens ; il s'est marié, il a fondé une famille.
Quarante ans se sont maintenant écoulés et, à chaque fois que cet homme aura changé de domicile, il aura dû reprendre la plume et écrire au commissariat du quartier : « Je suis un homme fiché » - on comprendra tout de suite qu'il est fiché pour infraction sexuelle - « et je vous donne mon adresse. »
Imaginez ce que cela représente, alors que l'on a purgé sa peine, que l'on a changé sa vie et que l'objectif de toute peine, à savoir la réinsertion, est donc atteint, alors que l'on est marié - on n'a peut-être pas avoué sa faute à sa femme... - et que l'on a des enfants, de devoir revivre son passé à chaque changement d'adresse en signalant au commissariat que l'on a commis, il y a dix ans, quinze ans, vingt ans, une infraction sexuelle !
Chaque fois qu'une agression sexuelle se produira dans le quartier, on viendra, sur la foi du fichier, vérifier si la personne fichée était chez elle au moment où cette agression, qui ne la concerne en rien, se déroulait. Vingt ans après, un homme, dans la maturité, avec des enfants, une famille, verra ainsi la police « débarquer » chez lui à chaque occasion.
Ce n'est pas les Guy George que vous contrôlerez ainsi, car les criminels dont les actes relatés dans les faits divers nous font tant horreur ne se dénonceront pas, eux, au commissariat. Ce sont les autres que vous retrouverez, et inutile de dire ce que deviendra leur vie !
Je vais plus loin. J'ai une petite propriété dans un bourg de 3 500 habitants. Croyez-vous que lorsqu'un changement d'adresse sera ainsi signalé à la gendarmerie cela ne se saura pas dans tout le bourg ? Le gendarme mettra en garde sa femme contre le nouveau venu, ce « criminel sexuel », il préviendra sa fille. Tout le monde finira par savoir...A ce moment-là que reste-il de l'espérance de réinsertion ? Que sommes-nous en train de fabriquer ? Pour quoi faire ? En effet, toutes les indications nécessaires figurent au bulletin B1 du casier judiciaire.
Nous sommes d'accord pour que le suivi socio-judiciaire soit plus important. Mais pourquoi faut-il ficher dorénavant pendant quarante ans, à la discrétion des officiers de police judiciaire, des gens qui ont purgé leur peine et qui n'ont pas, à cet égard, à être soumis pendant cette durée, sans amnistie ni réhabilitation ?
Je le dis nettement : j'ai entendu avec stupéfaction les propos tenus par le ministre de l'intérieur annonçant devant des millions de Français la fin des criminels sexuels. Moi, je vous parle de délinquants sexuels, car ils représenteront l'immense majorité des 10 000 personnes qui seront fichées. Ces 10 000 personnes - et dans sept ou huit ans elles seront 50 000 - iront pointer au commissariat. Dans quel monde vivons-nous ?
Pointer au commissariat, aller au bourg à la gendarmerie pour faire savoir qu'on est là, avec en arrière-plan sa fiche de criminel sexuel, alors que les faits ont été commis vingt ans plus tôt, est-ce cela le progrès du droit ? Et on demanderait au Sénat de voter ça ? Jamais, vous m'entendez, jamais les législateurs que nous sommes et qui veulent que la peine soit à la fois sanction et réinsertion ne pourraient voter un texte comme celui-là ! On parle de la double peine, eh bien en voilà une : une double peine perpétuelle ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - M. Robert Bret applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Je partage l'objectif de lutte contre les délinquants sexuels - et je crois que tout le monde est d'accord -, mais je m'interroge. M. Badinter a beaucoup de talent, peut-être même trop...
M. Robert Badinter. Jamais trop ! (Sourires.)
M. Christian Cointat. Aussi, je me tourne vers M. le rapporteur et M. le garde des sceaux : ces dispositions sont-elles compatibles avec les obligations de la France au regard de la Convention européenne des droits de l'homme ?
Nous avons discuté de ce point en commission, mais trop vite. Sans le temps suffisant pour une réflexion approfondie. La façon dont nous travaillons en commission n'est d'ailleurs pas normale : on nous « presse » trop sur ces sujets extrêmement importants, sensibles et délicats, qui nécessitent le temps de la réflexion.
J'ai voté en commission l'amendement, car j'ai fait confiance à notre excellent rapporteur, que je remercie pour son travail. Or quand je lis dans le texte de l'amendement que l'on ne tiendra pas compte d'une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement, même si elle est fondée sur l'article 122-1 du code pénal, j'ai un problème de conscience : un acquittement, c'est un acquittement, pas autre chose !
Le sous-amendement n° 460 du Gouvernement prévoit que l'amnistie n'entraîne pas l'effacement des informations. Je partage ce point de vue. Mais il dispose également que la réhabilitation n'entraîne pas l'effacement des informations, ce qui me pose un problème de conscience. Si vous me garantissez que cette disposition est compatible avec la Convention européenne des droits de l'homme, je la voterai. En revanche, s'il tel n'est pas le cas, je m'abstiendrai.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Nous avons écouté avec beaucoup d'intérêt le plaidoyer de M. Badinter et les arguments de M. Cointat. Je voudrais vous rassurer, Monsieur Cointat : l'article 122-1 du code pénal concerne les personnes déclarées irresponsables pénalement. Je me suis exprimé tout à l'heure sur ce point : le fait qu'une personne ait été déclarée irresponsable pénalement ne justifie pas qu'on ne la mentionne pas dans le fichier.
En vous écoutant, monsieur Badinter, j'ai cru comprendre que, sur le principe, vous n'étiez pas opposé à la création du fichier. Vous reconnaissez que ce fichier est nécessaire aujourd'hui. Vous attirez simplement notre attention sur les modalités d'application, sur les modalités de constitution de ce fichier. Nous en sommes conscients, le dispositif peut être amélioré.
Ce que nous vous demandons ce soir, mes chers collègues - et je rappelle que la commission des lois s'est prononcée en faveur de la création de ce fichier, et à une très large majorité -, c'est d'entériner la création de ce fichier dans les termes retenus par la commission des lois. Au cours de la navette, un certain nombre de dispositions pourront être améliorées. Les contributions des uns et des autres sur le sujet seront bienvenues.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. La question la plus importante qui vient d'être évoquée au cours du débat est celle de la sortie du fichier. Il y a quelques éléments dans le sous-amendement que j'ai déposé tout à l'heure. Pour autant, il est nécessaire que nous imaginions un mécanisme permettant de supprimer quelqu'un du fichier, à sa demande ou sur l'initiative de l'institution judiciaire.
Aussi, je m'engage très clairement, dans l'esprit de ce que vient de dire M. le rapporteur, à compléter le dispositif, notamment en prévoyant un tel syspème. Cela me paraît effectivement indispensable, en particulier compte tenu du fait que quelqu'un a pu commettre un délit à un âge relativement jeune. Cet élément nécessaire de complément ne remettrait pas en cause l'intérêt global de la démarche qui est proposée aujourd'hui tant par le Gouvernement que par la commission des lois.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. La preuve est faite qu'il ne faut pas voter l'amendement n° 93 ni le sous-amendement n° 460. Tout ce qui a été dit et qui est important, et qui a ébranlé chacun d'entre nous, figurera au Journal officiel. Chacun pourra donc en prendre connaissance. Cela vous permettra, monsieur le garde des sceaux, si vous voulez reprendre le sujet, de le faire après avoir réfléchi, amendé, devant l'Assemblée nationale.
Si cette disposition est en navette - on sait comment souvent les choses se passent, malheureusement trop vite, comme les débats se déroulent, surtout devant l'autre assemblée : « l'amendement est défendu », ou quelque chose comme cela - c'est extrêmement dangereux. Le débat risquerait d'aller moins au fond que s'il n'y a rien d'autre que ce qu'éventuellement vous introduiriez à ce moment-là.
Aussi, je me permets d'insister vivement. M. Robert Badinter nous a montré que si l'idée, évidemment, se concevait, dans la pratique, cela pose des problèmes qui, en effet, méritent une réflexion beaucoup plus approfondie, permettez-moi de vous le dire, que nos amendements de tout à l'heure sur la loi de 1881. Evidemment, on peut prendre contact avec la presse. En l'occurrence, ce n'est pas nécessaire. L'opinion publique attend. Eh bien ! l'opinion publique attendra encore un peu afin qu'un certain nombre de débats aient lieu, y compris dans les médias, pour montrer que les choses ne sont pas aussi simples qu'elles pouvaient paraître.
Monsieur le rapporteur, monsieur le garde des sceaux, il serait plus raisonnable de s'en tenir là aujourd'hui, de retirer ces amendements et de bien vouloir, avec nous, si vous le souhaitez - nous sommes à votre disposition - réfléchir car, vous le constatez, les principes qui sont les nôtres risquent d'être mis à mal par un dispositif comme celui que vous avez proposé un peu rapidement - M. Cointat le disait - y compris devant la commission, qui a tout juste eu le temps de le lire.
En ce qui concerne la Convention européenne des droits de l'homme, M. le garde des sceaux est bien évidemment incapable de nous dire si, en l'état actuel des choses, cette disposition passerait la rampe. Cela est si vrai qu'il invite à réfléchir, à prendre des précautions, à prévoir la sortie du fichier. Mais avec le texte actuel, vous l'avez reconnu, même la réhabilitation n'empêche pas de rester inscrit, ce qui est tout de même aberrant.
C'est pourquoi j'insiste : retirez ces amendements. A défaut, nous devrons, pour notre part, voter contre.
M. le président. Je rappelle que nous discutons du sous-amendement n° 474 ; or le débat le dépasse largement...
La parole est à Mme Borvo, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo. Hier, au cours de la discussion générale, j'ai donné mon point de vue sur la création de ce fichier. Je vais réitérer mes propos. Je partage la position défendue avec talent par M. Badinter.
Comme cela a été dit tout à l'heure, ils convient de faire preuve de prudence quand on aborde des domaines aussi complexes, qu'il s'agisse de la presse ou du fichage, quel qu'il soit. S'agissant des fichiers, je m'efforce d'être toujours très prudente. En général, je suis plutôt opposé à la création de fichiers, d'autant qu'il en existe déjà beaucoup.
S'agissant du fichier des personnes qui ont été condamnées, je tiens à souligner qu'il existe déjà le casier judiciaire. On nous rétorque que cela ne permet pas de connaître l'adresse du délinquant alors qu'il faut pouvoir suivre à vie une personne ayant été condamnée en matière de délinquance sexuelle.
Je note qu'il y a tout de même de nombreuses contradictions. Nous avons évoqué le suivi socio-judiciaire et le fait que, à l'heure actuelle, nous ne sommes pas vraiment capables de le mettre en oeuvre. Avec l'article que vous venez de voter, la durée de ce suivi est considérablement allongée.
Il est prévu de créer un fichier afin de toujours connaître l'adresse d'un individu qui est soumis au suivi socio-judiciaire pendant quarante ans.
Vous en conviendrez, c'est curieux. En effet, si la personne fait l'objet d'un suivi socio-judiciaire, on connaît son adresse.
Les fichiers actuels n'ayant pas suffisamment d'efficacité, on décide de créer un autre fichier. Il faudrait se demander pour quelle raison l'inscription au casier judiciaire est souvent différée et pourquoi on ne peut donc pas utiliser le casier judiciaire.
Comme cela a été très bien dit, ce fichier est en totale contradiction avec l'objectif de réinsertion, elle-même contenue dans l'obligation de suivi socio-judiciaire. Donc, on dénie la réinsertion puisque la personne est fichée à vie. Or le suivi socio-judiciaire est quand même prévu pour permettre la réinsertion. En tout cas, il vise à empêcher la récidive.
Nous voulons enpêcher la récidive. Mais en matière de récidive, le fichier est pur affichage. Des associations pour lesquelles j'ai le plus grand respect, parce que je les connais, et qui consacrent beaucoup d'énergie à la protection des enfants - ce que je partage avec elles - estiment que la création de ce fichier est une mesure positive. Sans doute est-ce parce que l'on ne sait plus à quel saint se vouer ! Mais attention à l'affichage, en matière de récidive.
Voilà quelques jours, à la télévision, M. le ministre de l'intérieur a adopté un ton musclé donnant l'impression que tous les délinquants sexuels étaient des récidivistes, alors que la proportion est de 17 %. C'est évidemment beaucoup trop, mais tous les délinquants sexuels ne sont pas des récidivistes !
Ensuite, il a donné à penser que le fichier allait empêcher les récidives. Hélas ! il y a aujourd'hui nombre de fichiers concernant les personnes condamnées. Quelle est leur efficacité en matière de récidive ? Surtout, le fichier empêche-t-il le passage à l'acte ? Une personne qui a purgé une peine de prison, qui est susceptible de récidiver, va-t-elle ne pas le faire du fait de l'existence du fichier ?
Mais je ne m'étendrais pas sur ce qu'est la délinquance sexuelle, car je ne suis pas mieux placée que vous pour en parler, encore que je me sois intéressée à la question.
Le fait de figurer sur un fichier, nous dit-on, empêcherait la personne concernée de récidiver. Mais qui peut le croire ? En réalité, le fichier ne sert qu'à suspecter des personnes dans un périmètre donné, une fois l'acte commis. Donner à nos concitoyens l'impression qu'un fichier empêchera la récidive, c'est pur mensonge ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Hyest. Je suis respectueux du règlement et du président de séance et, pensant que nous parlions des autres sous-amendements et non de sous-amendement n° 474 de M. Badinter, je m'étais retiré du débat.
Il est évident que la création d'un fichier est une nécessité, sinon pour empêcher la récidive, du moins pour éviter que certaines personnes ne se trouvent dans des situations de récidive. C'est d'ailleurs pourquoi, monsieur le garde des sceaux, je ne comprends pas que vous ayez retiré les dispositions contenues dans l'amendement de la commission qui concernaient les personnes en relation avec des enfants mineurs. Vous avez parlé d'agrément : certains sont agréés, d'autres ne le sont pas. Il suffit d'avoir un diplôme d'éducateur !
Je suis président d'un institut médico-éducatif dont, hélas ! le directeur a recruté un éducateur ayant eu, voilà quelques années, des problèmes avec la justice dans des affaires de mineurs or, nous ne le savions pas. C'est quand même dommage, car cet éducateur a récidivé, et d'une manière beaucoup plus grave.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Avait-il un casier judiciaire ?
M. Jean-Jacques Hyest. Cela avait été effacé de son casier judiciaire parce qu'il s'agissait à l'époque d'agressions moins graves. Mais on a découvert par la suite qu'il avait un passé assez lourd. Il faut faire attention à ce que l'on fait. C'est le cas même où un fichier serait extrêmement utile.
En revanche, la disposition qui oblige à fournir son adresse me paraît devoir être examinée de très près. La liste des actes impliquant une inscription de son auteur dans le fichier est quand même longue : des gamins condamnés pour avoir participé à une « tournante » deviendront-ils tous récidivistes ? Et pourtant ils sont inscrits dans le fichier et le seront à vie. Alors, à l'instar de M. Badinter, je pense qu'il faut faire attention à ce que l'on fait quand cela touche aux libertés. A la campagne, tout le canton saura que, dans telle maison, habite une personne qui a été condamnée vingt ans auparavant, puisqu'il aura changé d'adresse. Il faut faire attention.
Pour ma part, je souhaiterais vivement que l'obligation de donner son adresse - ce qui est normal puisqu'il faut savoir où est la personne, il ne suffit pas d'avoir un fichier - soit sous l'autorité de la justice et liée au suivi sociojudiciaire qui est maintenant très long. Cela me semblerait tout de même plus normal ! Les protecteurs des libertés publiques sont non pas les services de police, qui doivent les faire respecter, mais le procureur de la République ou les services judiciaires.
Cette condition serait indispensable. Il est vrai que nous avons voté un certain nombre de sous-amendements. Monsieur le président, compte tenu de l'importance du sujet, peut-être faudrait-il prendre quelques minutes pour essayer de trouver un dispositif acceptable qui ne crée pas ensuite plus de difficultés que de solutions, même si nous reconnaissons, moi au premier chef, la nécessité d'un tel fichier, à la création duquel j'étais favorable.
M. le président. Ces questions sont si graves que l'on pouvait penser qu'elles avaient été abordées en commission.
M. Pierre Fauchon, vice-président de la commission des lois. Je me permets de dire que, si la commission des lois n'a pas eu plus de temps, ce n'est pas sa faute !
M. Christian Cointat. Très bien !
M. le président. Je n'ai jamais pensé que c'était sa faute !
M. Pierre Fauchon, vice-président de la commission des lois. Ce n'est certainement pas sa faute !
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Monsieur le président, je voudrais que cesse une sorte d'hypocrisie. Tout à l'heure, nous avons constaté que la nécessité d'instaurer enfin dans ce pays un suivi socio-judiciaire des auteurs d'infractions sexuelles faisant l'objet d'un large accord dans cette assemblée. Comment fera-t-on si on n'a pas l'adresse des gens ? Il s'agira d'une fumisterie, excusez-moi de le dire.
Si nous voulons enfin avoir une politique de suivi des délinquants sexuels, dont la situation médicale est un élément significatif, car elle est souvent à l'origine de leur acte criminel, il est indispensable de disposer enfin dans ce pays de la capacité matérielle de suivre les auteurs de ces actes ; sinon cette politique n'aura aucun sens.
On peut être d'accord sur ce point ou pas. En écoutant Mme Borvo tout à l'heure, j'ai cru comprendre que les deux éléments étaient disjoints. Or ils ne peuvent pas l'être. L'une des raisons pour lesquelles il n'y a pas de suivi socio-judiciaire est en effet que les délinquants sexuels se perdent dans la nature, qu'ils ne peuvent être suivis et que les médecins coordinateurs ne savent pas qui ils doivent suivre ! C'est cela la vérité !
M. Jean-Jacques Hyest. Tout à fait !
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Soit on sort de cette logique, soit on n'en sort pas. En tant que garde des sceaux, je considère qu'il est indispensable d'en sortir. Cela dit, le fichier ne règlera pas tous les problèmes. J'en suis tout à fait d'accord.
Par ailleurs, j'ai tout à l'heure clairement indiqué qu'il fallait que soit mis au point un dispositif de sortie du fichier afin que toutes les inscriptions n'aient pas un caractère indéfini, en particulier pour tenir compte de la gravité du crime ou du délit commis.
Enfin, monsieur Hyest, vous avez évoqué la question de savoir qui doit gérer le fichier des adresses. Ce point est relativement secondaire, dès lors qu'il y a une véritable obligation et une vérification des adresses. Tels sont les éléments, monsieur le président, que je voulais verser au débat, afin, peut-être, de le faire avancer.
M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission.
M. Pierre Fauchon, vice-président de la commission des lois. Monsieur le président, je demande une suspension de séance de quelques minutes.
M. le président. Le Sénat va bien sûr accéder à votre demande, monsieur le vice-président.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à ving-trois heures quarante-cinq, est reprise à vingt-trois heures cinquante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Je reviens sur le sous-amendement n° 460, présenté par le Gouvernement, qui vise à modifier l'amendement n° 93 de la commission. A cet égard, je voudrais, à la suite de notre collègue M. Hyest, attirer l'attention du Gouvernement sur les conditions dans lesquelles la personne figurant dans le fichier est tenue de déclarer ses changements d'adresse.
Chacun est sensible aux arguments selon lesquels des informations de proximité peuvent nuire au bon fonctionnement du fichier et, surtout, à la réinsertion des personnes dont les noms figurent dans le fichier.
Je vous propose donc, à titre personnel, de sous-amender le sous-amendement du Gouvernement en indiquant, à l'article 706-53-5 du code de procédure pénale, que la personne est tenue de déclarer ses changements d'adresse, non pas auprès du commissariat de police ou de la gendarmerie de son domicile, mais auprès du service du casier judiciaire. Je crois cependant que la seule possibilité est que M. le garde des sceaux rectifie son sous-amendement.
Je voudrais également revenir sur les conditions dans lesquelles une personne pourra sortir de ce fichier. Nous sommes en effet particulièrement sensibles au cas des mineurs qui pourraient être inscrits dans le fichier à raison d'agissements certes condamnables, mais pour lesquels on a du mal à imaginer qu'ils soient poursuivis toute leur vie.
Je souhaiterais, au nom d'un certain nombre de mes collègues, que M. le garde des sceaux s'exprime sur cette question de la sortie du fichier et donne devant le Sénat quelques garanties sur le traitement qui sera réservé aux mineurs. Il ne faudrait pas qu'une personne qui a commis certains actes à l'âge de treize, quatorze voire quinze ans figure dans ce fichier tout au long de sa vie.
M. le président. Monsieur le garde des sceaux, que pensez-vous de la suggestion de M. le rapporteur ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. J'ai cru comprendre que M. le rapporteur souhaitait rectifier le sous-amendement n° 460, mais que ce n'était pas possible pour des raisons réglementaires. C'est de bonne grâce que je me livrerai à cette opération et je propose, dans ce sous-amendement n° 460 de remplacer les mots « du commissariat de police et de la gendarmerie de son domicile » par les mots « du gestionnaire du fichier ».
Par ailleurs, je répète que l'établissement d'un dispositif de sortie du fichier me paraît nécessaire. Pourquoi ne pas réfléchir à un système mixte, prévoyant des rendez-vous obligatoires, par exemple tous les dix ans, que l'initiative soit de l'institution judiciaire, soit des délinquants, soit des deux.
Il faut toutefois réfléchir quelque peu avant de présenter des propositions précises et ne prévoir de sortie du fichier que lorsque les infractions initiales sont les moins graves. Cela dit, il convient de mettre en oeuvre l'idée de réinsertion.
M. le président. Je suis donc saisi d'un sous-amendement n° 460 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :
« Remplacer le texte proposé par l'amendement n° 93 pour les articles 706-53-3 à 706-53-5 du code de procédure pénale par les dispositions suivantes :
« Art. 706-53-3. _ Les informations figurant dans le fichier y sont directement inscrites, par l'intermédiaire d'un moyen de télécommunication sécurisé, par le procureur de la République compétent.
« Les informations relatives à la dernière adresse de la personne peuvent être directement inscrites dans le fichier, par l'intermédiaire d'un moyen de télécommunication sécurisé, par les personnels de la police judiciaire habilités à cette fin.
« Art. 706-53-4. _ Les informations mentionnées à l'article 706-53-1 concernant une même personne sont retirées du fichier au décès de l'intéressé ou à l'expiration d'un délai de quarante ans à compter du jour où l'ensemble des décisions enregistrées ont cessé de produire tout effet.
« L'amnistie ou la réhabilitation n'entraîne pas l'effacement de ces informations.
« Ces informations ne peuvent, à elles seules, servir de preuve à la constatation de l'état de récidive.
« Art. 706-53-5. _ Toute personne dont l'identité est inscrite dans le fichier en est informée par l'autorité judiciaire, soit par notification à personne, soit par lettre recommandée adressée à la dernière adresse déclarée.
« La personne est alors informée qu'elle est tenue de déclarer ses changements d'adresse, dans un délai de deux mois, auprès du gestionnaire du fichier ; elle est également informée des peines encourues en cas de non-déclaration.
« Lorsque la personne est détenue, cette information lui est donnée au moment de sa libération définitive ou préalablement à la première mesure d'aménagement de sa peine.
« Le fait, pour une personne inscrite dans le fichier, de ne pas déclarer aux services du casier judiciaire sa nouvelle adresse dans les deux mois qui suivent son changement de domicile est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 EUR d'amende.
« Art. 706-53-6. - Les informations contenues dans le fichier sont directement accessibles, par l'intermédiaire d'un système de télécommunication sécurisé :
« - aux procureurs de la République, aux juges d'instruction, aux juges des enfants et aux juges de l'application des peines ;
« - aux officiers de police judiciaire, dans le cadre de procédures concernant une infraction mentionnée à l'article 706-47 ;
« - aux préfets, pour l'examen des demandes d'agrément concernant des activités ou professions impliquant un contact avec des mineurs.
« Art. 706-53-7. _ Toute personne justifiant de son identité obtient, sur demande adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance dans le ressort duquel elle réside, communication de l'intégralité des informations la concernant figurant au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles.
« Les dispositions des alinéas trois, quatre et cinq de l'article 777-2 sont alors applicables.
« Toute personne qui veut faire rectifier ou supprimer une mention la concernant peut agir selon la procédure prévue à l'article 778.
« Art. 706-53-8. _ Les modalités et conditions d'application des dispositions du présent chapitre sont déterminées par décret en Conseil d'Etat pris après avis de la Commission nationale consultative de l'informatique et des libertés. »
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Tout à l'heure, M. Fauchon a demandé une suspension de séance et un certain nombre de nos collègues - je ne sais pas exactement lesquels - se sont réunis.
A la reprise de la séance, M. le garde des sceaux s'est interrogé sur la procédure. Or il est évident que la commission peut elle-même modifier ses amendements. Mais pour cela, la bonne solution, c'est de la réunir.
Nous avons été saisis, en commission, d'un texte que nous n'avions pas lu auparavant. Ce n'est certainement pas le cas de M. le ministre de l'intérieur qui avait sans doute été prévenu assez rapidement du dépôt de cet amendement et du fait qu'on allait instaurer par cette loi un fichier pour les auteurs de délits et de crimes sexuels, puisqu'il en a parlé lui-même très vite.
Pour notre part, nous n'avons pas fait un véritable travail de commission.
M. Laurent Béteille. On le fait ici !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Alors, ou bien on remet cette question à plus tard, ou bien on règle le problème tout de suite.
Vous proposez quelques solutions, mais il y en a bien d'autres. On pourrait par exemple imaginer que la juridiction ordonne elle-même l'inscription au fichier. M. Hyest a cité tout à l'heure le cas des « tournantes ». Il s'agit bien entendu d'un viol, mais il est évident qu'il n'y a pas d'inscription au fichier. La cour d'assises pourrait peut-être le préciser en statuant. En l'espèce, je n'en sais rien, j'émets une hypothèse.
On pourrait également prévoir qu'il ne doit pas y avoir de réhabilitation en matière sexuelle si, dans le même temps, on n'ordonne pas la suppression du nom au fichier. Cela permettrait aux personnes concernées de demander rapidement leur réhabilitation afin, précisément, de ne plus figurer au fichier, et la question se plaiderait devant une juridiction ad hoc.
Beaucoup d'autres solutions sont possibles, mais, encore une fois, nous n'allons pas faire du travail de commission ici, à cette heure avancée, et sans que tous les membres de la commission soient présents. De quoi aurions-nous l'air ?
Messieurs, vous voulez bien être ébranlés par les arguments que nous développons, mais vous tenez à vous réunir entre vous pour réfléchir. Nous pourrions peut-être réfléchir avec vous, monsieur le rapporteur ; c'est pourquoi je demande une réunion de la commission des lois.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Je tiens à apporter une précision sur le travail de la commission des lois.
Le sous-amendement n° 460 du Gouvernement a été étudié par la commission des lois et a recueilli un avis favorable. Vous étiez présent, monsieur le sénateur. Puis, le Gouvernement a modifié ce sous-amendement, ce qu'il a parfaitement le droit de faire.
En revanche, mon cher collègue, votre sous-amendement n° 474 n'a pas été étudié par la commission, puisque vous l'avez déposé tout à l'heure.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Justement !
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 474.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 460 rectifié.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. J'aimerais bien savoir qui est le gestionnaire du fichier. On ne nous l'a pas expliqué. On pouvait imaginer que l'autorité judiciaire - comme cela a été proposé tout à l'heure - serait le gestionnaire de ce fichier. Pourquoi pas ?
En tout cas, ce n'est plus le commissariat de police ni la gendarmerie du domicile, qui sont concernés, c'est le gestionnaire du fichier. En effet, il fallait bien une suspension de séance pour opérer cette modification ! Maintenant, qu'on nous explique qui est le gestionnaire du fichier et en quoi cette formule répond à la préoccupation que nous avons exposée !
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Je confirmerai simplement ce qui figure dans l'amendement n° 93 de la commission : c'est le service du casier judiciaire.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. En fait, M. le garde des sceaux a simplement accepté, pour éviter ce que j'ai mis en lumière tout à l'heure, à savoir d'infliger un fichage à vie dans le milieu dans lequel vit l'intéressé, que la déclaration ait lieu non au commissariat de police ou à la gendarmerie, mais auprès du casier judiciaire.
C'est un progrès, mais ça ne change pas l'essentiel. Il demeure que vous condamnez quelqu'un qui a purgé sa peine, sans qu'il y ait eu une décision judiciaire spéciale, à se dénoncer lui-même, pendant quarante années, chaque fois qu'il changera d'adresse !
Ce procédé n'est pas concevable. Ce que vous demandez ainsi à une personne qui a purgé sa peine et qui s'est réinsérée non seulement est contraire à l'esprit de la Convention européenne des droits de l'homme, comme l'a très bien souligné M. Cointat, mais constitue pour celui qui aura à s'y plier la dernière des humiliations. En changeant d'adresse, il transportera avec lui son crime, puisqu'il sera forcé chaque fois de faire savoir qui il a été. Si vous croyez que cela facilitera sa réinsertion, que cela l'aidera à remiser son acte, qu'il tient en horreur, dans un lointain souvenir, si vous croyez que cela lui permettra de construire aisément une famille, eh bien permettez-moi de vous dire que vous êtes loin, bien loin de la réalité humaine !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et la sortie du fichier ?
M. Robert Badinter. En effet, rien n'est proposé sur la sortie du fichier. Nous avons enregistré une déclaration d'intention, mais rien de précis.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Monsieur le président, je ne peux laisser passer ce que vient de dire M. Badinter.
En effet, si je comprends bien, monsieur le sénateur, vous êtes hostile au principe du fichier avec adresse. (M. Robert Badinter fait un signe de dénégation.)
Mais si, c'est ce que l'on peut déduire de ce que vous venez de nous dire !
J'ai accepté que le sous-amendement n° 460 soit rectifié pour que le service du casier judiciaire reçoive les changements d'adresse. Si vous refusez l'idée de la notification du changement d'adresse, il n'y a plus de fichier avec adresse, c'est une évidence !
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Et la sortie du fichier ?...
Je demande un scrutin public sur le sous-amendement n° 460 rectifié !
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 460 rectifié.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.)
M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin
n° 4
:
Nombre de votants | 310 |
Nombre de suffrages exprimés | 308 |
Majorité absolue des suffrages | 155 |
Pour | 199 |
Contre | 109 |
La parole est à M. Robert Badinter, contre l'amendement n° 93.
M. Robert Badinter. Dans l'amendement présenté par la commission des lois figure la définition d'un certain nombre de condamnations qui devront être inscrites pour quarante ans - puisque jusqu'à présent nous ne savons rien de la sortie - dans le fichier que l'on veut créer. Or, parmi ces condamnations, il en est dont la nature, la bénignité prouvent qu'elles ne méritent en rien d'être mentionnées dans un fichier judiciaire alors qu'elles le seront déjà au casier judiciaire.
Ainsi, rien n'est plus bénin que la déclaration de culpabilité assortie d'une dispense de peine. C'est vraiment la condamnation symbolique ! Quasiment rien n'est aussi bénin qu'un ajournement de peine, qui signifie que l'on attend de savoir si la personne va bien se conduire pendant un certain nombre d'années. Si oui, la peine disparaît.
Il s'agit donc d'une condamnation sans peine dans les deux cas. Et cette condamnation sans peine va figurer dans un fichier judiciaire ! Dès qu'une infraction sexuelle aura été commise, on ira chercher la personne concernée, qui devra ensuite s'expliquer avec sa femme, ses enfants, le voisinage ! Voilà ce que contient cette disposition !
Je n'ai pas besoin de revenir sur ce que j'ai dit à propos de l'enfance délinquante ; je pense que chacun y a pensé. On nous a expliqué que la composition pénale était faite pour des infractions de peu d'importance, à caractère de masse, qu'il suffisait qu'il y ait le procureur, l'avocat et que le président se contentait d'homologuer. Il s'agit donc d'affaires bénignes elles aussi.
Enfin, comme cela a été justement relevé, comment, à partir d'un non-lieu, d'une relaxe ou d'un acquittement, peut-on ficher quelqu'un pour quarante ans au service du casier judiciaire parce qu'il aura eu, un instant, une crise de démence ? N'y a-t-il pas là un problème de constitutionnalité ? En tout cas, on ne peut pas régler ce problème aujourd'hui entre minuit vingt et minuit vingt-cinq !
Je regrette donc profondément que la commission des lois n'ait pas été réunie, voire, puisque de toute façon nous ne finirons pas l'examen de ce texte cette semaine, que l'étude de ce point n'ait pas été renvoyée à la semaine prochaine. Je suis convaincu qu'en deux heures de travail en commission nous aurions pu arriver à un résultat satisfaisant. Ce soir, vous n'arrivez à rien.
Compte tenu du résultat navrant auquel nous avons abouti, vous comprendrez, mes chers collègues, que je ne puisse voter ce sous-amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Hyest. Sans doute a-t-on fait preuve de perfectionnisme. Il est évident qu'il faut raccrocher ce fichier à l'amendement n° 92 que nous avons voté précédemment. Et il s'agit, je le rappelle, de dispositions applicables aux procédures concernant les infractions très graves que nous avons évoquées tout à l'heure. Il me paraît improbable que soient prononcées des condamnations aussi faibles pour des faits aussi graves. Il est clair que, la plupart du temps, les condamnations seront extrêmement lourdes. Selon moi, il n'y a donc aucun risque.
Il reste que M. Badinter a soulevé un vrai problème. Cela étant, c'est un fichier spécial : les personnes qui bénéficient, en vertu de l'article 122-1 du code pénal, de l'état de démence partiel ou total me paraissent devoir figurer au fichier parce qu'il s'agit souvent de gens extrêmement dangereux.
Je crois aussi que nous manquons de places dans les établissements pour malades mentaux. Aux Pays-Bas ou en Grande-Bretagne, par exemple, il existe des établissements susceptibles d'accueillir des personnes internées à vie parce qu'elles restent dangereuses pour elles-mêmes et pour les autres.
Nous avons une réflexion à mener en matière psychiatrique. Si, aujourd'hui, les juridictions ne prononcent plus qu'exceptionnellement l'irresponsabilité pénale des malades mentaux - les dernières statistiques connues font ressortir des proportions infimes de cas -, c'est tout simplement parce que l'on sait que, après quelque temps, ces personnes qui sont très dangereuses seront considérées comme guéries, qu'elles partiront dans la nature et qu'elles recommenceront.
C'est là une vraie question, sur laquelle la commission d'enquête sur les prisons avait beaucoup insisté.
D'autres pays aussi démocratiques que le nôtre ont des établissements psychiatriques fermés où ces personnes dangereuses restent éventuellement à vie parce qu'elles sont dangereuses toute leur vie. Je crois donc que ces personnes doivent figurer sur ce fichier.
M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Dominique Perben, garde des sceaux. M. Hyest se souvient certainement que, dans la loi d'orientation pour la justice, nous avons créé de tels établissements.
M. Jean-Jacques Hyest. Tout à fait !
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Il nous faut maintenant les mettre en place, car il est indispensable que ces délinquants déments ou psychiatriquement très perturbés soient pris en charge médicalement et, bien entendu, maintenus dans un système carcéral.
Je voudrais également rappeler l'esprit de la démarche qui nous réunit ce soir. Nous parlons beaucoup des délinquants, mais, si cette démarche est entreprise, c'est parce qu'il y a des victimes, nous le savons bien les uns et les autres, et donc aussi des victimes potentielles.
Me plaçant sur un plan personnel, je dirai que l'une des choses qui m'ont le plus choqué, le plus ému depuis que j'occupe les fonctions qui furent jadis les vôtres, monsieur Badinter, c'est justement la violence - sexuelle ou non - que l'on observe en milieu familial et qui s'exerce sur les jeunes. Cette violence est parfois si intolérable qu'il m'est arrivé d'avoir du mal à achever la lecture de certains des dossiers que je suis amené à connaître. Nous devons aussi agir par rapport à cette réalité-là. Nous n'avons pas le droit de laisser sans réponse une situation qui, à l'évidence, se dégrade au fil des années.
Bien sûr, ce fichier ne permettra pas de résoudre le problème en totalité. Bien sûr, nous devons développer le suivi socio-judiciaire. Mais nous devons avant tout penser aux victimes potentielles de ces violences. Nous sommes responsables vis-à-vis d'elles, et c'est pourquoi nous avons le devoir de mettre en place des dispositifs efficaces. Il me semble que, au terme de ces deux heures de débat, il était nécessaire de le rappeler.
M. Jean-Claude Carle. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, pour explication de vote.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. La tendance de l'école moderne de psychiatrie est de penser qu'il faut mettre les malades mentaux en prison, et non pas dans des asiles, comme on disait jadis. C'est là une profonde erreur.
Je commence à comprendre pourquoi M. le garde des sceaux a, paraît-il, évoqué l'idée de faire juger les irresponsables complets. C'est sans doute lié au fichier ! Il me l'expliquera peut-être...
Je rappelle que nous avons pris des dispositions pour que les personnes internées dans les centres psychiatriques ne soient pas libérées facilement : il faut notamment que différents experts, choisis sur une liste arrêtée par le procureur de la République, aient rendu des rapports concordants.
Cependant, dans les centres psychiatriques modernes, on n'enferme plus personne. On ne soigne plus non plus les malades qui sont profondément atteints. Qu'ils soient en prison ou dans les centres psychiatriques, ils ne sont pas suivis ! Le moins que l'on puisse dire est qu'il y a encore beaucoup à faire, et à faire rapidement !
Mais je voudrais aussi poser une question à M. le rapporteur ou à M. le garde des sceaux.
Comme l'a rappelé M. Badinter, les tribunaux peuvent dispenser une personne de peine. Ils peuvent même dispenser d'inscription au casier judiciaire. Pourront-ils ou non dispenser d'inscription au fichier ? Le texte ne le permet pas.
On pourrait tout de même, me semble-t-il, donner cette possibilité aux tribunaux. Ainsi, ce serait l'autorité judiciaire, gardienne des libertés de tous, y compris des victimes, qui déciderait en connaissance de cause. Or, dans le texte actuel, même en cas de réhabilitation, on l'a dit tout à l'heure, l'inscription demeure pendant quarante ans.
Vous nous dites que cette question sera examinée au cours de la navette. Franchement, ce n'est pas sérieux ! Il aurait mieux valu ne rien écrire aujourd'hui, de manière que votre réflexion soit alimentée par le débat que nous avons eu ce soir et que vous nous proposiez autre chose. Parce que le malheureux qui devra s'adresser au gestionnaire du fichier ne comprendra pas plus que je ne l'ai compris tout à l'heure ce que cela veut dire.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. Je tiens d'abord à vous dire, monsieur le garde des sceaux, que, à ma connaissance, il n'y a pas, dans cette assemblée ni, plus généralement, dans notre communauté nationale, des femmes et des hommes indifférents au malheur des victimes de ces très graves infractions que j'ai évoquées.
Pour ce qui me concerne - ai-je besoin de le rappeler dans cet hémicycle -, j'ai été le premier d'une très longue série de gardes des sceaux à prendre l'initiative d'une loi complète en faveur des droits des victimes. J'ai été le premier à promouvoir les associations d'aide aux victimes, ayant toujours considéré que celles-ci n'avaient pas, dans notre droit et dans notre société, la place qu'elles méritaient d'avoir.
Cette précision étant apportée, j'en viens au lien que vous avez établi entre le fichier et la protection des victimes potentielles.
Qu'est-ce qui est susceptible de protéger ceux que vous appelez des victimes potentielles ? Bien entendu, le suivi socio-judiciaire pourrait remplir ce rôle, mais à la condition qu'il s'exerce réellement. Je retrouve là ce qui a toujours constitué notre préoccupation au cours de cette terrible enquête que nous avons conduite sur les prisons. Pour cela, il faut que les textes soient véritablement mis en pratique, ce qu'on oublie malheureusement trop souvent de faire chez nous. On pourrait alors espérer la fin de cette pulsion, la guérison, pour employer un langage médical.
Mais quels seront les effets du fichier sur les victimes potentielles ? Est-ce le fichier qui va libérer de son passé celui qui y figure ? Croyez-vous que ce soit une forme de traitement, de suivi socio-judiciaire que d'écrire régulièrement au casier judiciaire ?
Alors, que reste-t-il ? Rien d'autre qu'une commodité pour une enquête de police.
Cela signifie que, lorsque surviendra une agression qui n'aura rien à voir avec celui qui figure au fichier, les enquêteurs privilégieront le voisinage. A ce moment-là, on ne pourra plus parler de prévention : il s'agira de la recherche de l'identification d'un auteur éventuel. Si l'auteur de l'agression est récidiviste - puisqu'il ne peut s'agir que de récidivistes -, il figure déjà au casier judiciaire. Il est donc déjà accessible. Il suffirait simplement de modifier le traitement des informations dans le cadre du bulletin B 1 du casier judiciaire et de créer à l'intérieur du casier judiciaire existant une nouvelle branche, tenue bien sûr sous le contrôle de l'autorité judiciaire, pour qu'on ait pleinement satisfaction.
Le fichier n'ajoute donc rien sur ce point.
Quant à la protection des victimes, à laquelle nous sommes extrêmement attachés, le fichier ne la garantit en rien. Pour cela, il vaut bien mieux donner au corps judiciaire les moyens d'assurer un réel suivi socio-judiciaire.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Je vous ai écouté avec beaucoup de respect, monsieur Badinter, mais, à l'issue de cette discussion, je crois enfin avoir compris le fond de votre pensée : en fait, sans le dire, vous êtes contre ce fichier. En effet, à force de le dépecer, d'en critiquer toutes les dispositions ligne après ligne, je ne vois pas ce que vous voudriez y laisser ! En vérité, votre approche repose sur un seul thème, celui de la protection et de la défense de l'auteur de l'infraction. Or, comme l'a fort justement rappelé le garde des sceaux tout à l'heure, en tant que législateur, nous devons avoir aussi d'autres préoccupations.
Bien sûr, le Sénat s'honore d'être le protecteur des libertés individuelles ; bien sûr, il s'honore - et je crois avoir apporté à cet égard ma modeste contribution - d'être le protecteur des droits de la défense. Mais nous devons également prendre en compte les victimes, prendre en compte les troubles multiples que causent à l'ordre public les récidives et que nous observons jour après jour.
Je suis donc désolé de la position que vous adoptez finalement et qui consiste en fait à vous opposer à la création d'un fichier des délinquants en matière d'infractions sexuelles que propose la commission.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter.
M. Robert Badinter. Avec votre permission, monsieur le président, je ne peux laisser passer le propos que vient de tenir M. le rapporteur à mon égard.
Vous n'étiez pas ici, monsieur Zocchetto, lorsque, avec de grands législateurs - je pense en particulier à Marcel Rudloff, mais aussi à bien d'autres -, nous avons élaboré cette première loi sur les droits des victimes. J'ai déjà rappelé ce que j'avais fait personnellement pour que, à l'intérieur du corps social, on comprenne ce qu'était la condition des victimes. Alors, je crois ne pas avoir de leçons à recevoir sur ce point !
J'ajoute que, comme législateur, nous avons aussi à prendre en compte les intérêts de ceux qui sont condamnés et dont nous espérons la réinsertion.
M. le président. Monsieur Badinter, s'agissant d'un fait personnel, c'est normalement à la fin de la séance que vous auriez dû faire cette intervention.
Je mets aux voix l'amendement n° 93, modifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16.
L'amendement n° 94, présenté par M. Zocchetto, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
« Après l'article 16, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« L'article 706-56 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
« 1° Le I est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu'il n'est pas possible de procéder à un prélèvement biologique sur une personne mentionnée au premier alinéa, l'identification de son empreinte génétique peut être réalisée à partir de matériel biologique qui se serait naturellement détaché du corps de l'intéressé.
« Lorsqu'il s'agit d'une personne condamnée pour crime, le prélèvement peut être effectué sans l'accord de l'intéressé sur réquisitions écrites du procureur de la République. »
« 2° Le II est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le fait, pour une personne faisant l'objet d'un prélèvement, de commettre ou de tenter de commettre des manoeuvres destinées à substituer à son propre matériel biologique le matériel biologique d'une tierce personne, avec ou sans son accord, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 EUR d'amende. »
« 3° Cet article est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les infractions prévues par le présent article sont commises par une personne condamnée, elles entraînent de plein droit le retrait de toutes les réductions de peine dont cette personne a pu bénéficier et interdisent l'octroi de nouvelles réductions de peine. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. Toujours en matière de répression des infractions sexuelles, la commission des lois propose quelques améliorations concernant le fichier des empreintes génétiques.
L'amendement n° 94 améliore les dispositions de l'article 706-56 du code de procédure pénale, relatif aux prélèvements destinés à permettre la prise d'empreintes génétiques.
Tout d'abord, cet amendement permet la prise d'empreintes à partir de matériels biologiques naturellement détachés de la personne comme, par exemple, ce qui se trouve sur un peigne, une brosse à dents ou un verre utilisés par la personne.
Par ailleurs, l'amendement permet, s'agissant des personnes condamnées pour crime, de passer outre le refus de prélèvement sur décision expresse du procureur de la République. Compte tenu de la gravité des faits, cette possibilité d'atteinte à l'intégrité de la personne paraît répondre aux exigences constitutionnelles telles que les a rappelées le Conseil constitutionnel dans sa décision du 13 mars 2003, en ce qui concerne l'article 706-47-1 du code de procédure pénale permettant un prélèvement de force en vue du dépistage du VIH.
L'amendement prévoit en outre de sanctionner ceux qui usent de manoeuvres pour éviter que ne soit prélevé du matériel génétique leur appartenant. Malheureusement, cette situation semble se développer dans les établissements pénitentiaires.
Enfin, l'amendement complète les sanctions encourues en cas de refus de prélèvement ou de fraude lors d'un prélèvement en prévoyant pour le condamné le retrait des réductions de peine.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Dominique Perben, garde des sceaux. Favorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Dreyfus-Schmidt, contre l'amendement.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. En fait, nous ne sommes que partiellement contre cet amendement.
Sur le 1° et le 2°, nous sommes d'accord.
En ce qui concerne le 3°, en revanche, nous ne comprenons pas le sens de la démarche.
Il n'est pas concevable de revenir sur des réductions qui ont été accordées. On ne peut pas, alors que de lourdes peines viennent éventuellement s'ajouter à celles qui ont déjà été prononcées, interdire l'octroi de nouvelles réductions de peine. On ne peut pas enlever l'espoir à qui que ce soit ! On sait à quoi cela aboutit !
Si la commission retire ce 3°, nous voterons l'amendement. Sinon, nous demandons un vote par division.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Zocchetto, rapporteur. La commission a voté l'amendement dans son entier, et je n'ai donc aucune raison de retirer ce 3°.
M. le président. La parole est à M. Robert Badinter, pour explication de vote.
M. Robert Badinter. Sur le 1° et le 2°, nous ne pouvons effectivement qu'être d'accord : tout ce qui permet de faire progresser l'identification des auteurs d'infractions sexuelles est souhaitable, et je suis convaincu que l'avenir est à la police scientifique.
Mais le 3° n'est pas admissible juridiquement. La réduction de peine qui est intervenue n'est pas une mesure administrative ! Comment allez-vous prévoir le retrait d'une réduction de peine ? Je laisse de côté ce que cela peut impliquer pour celui qui est concerné ; sur ce point, je ne peux qu'approuver ce qu'a dit notre ami Michel Dreyfus-Schmidt.
Encore une fois, je regrette que nous n'ayons pas plus de temps pour y réfléchir, mais je ne vois pas comment une pareille mécanique pourrait fonctionner. Ou alors il faudrait revoir toute la question des réductions de peine en prévoyant des retraits conditionnels. A ce stade, vous ne pouvez évidemment pas le faire.
Quant à interdire l'octroi de nouvelles réductions de peines au moment où l'on va entreprendre un long travail sur la question du pouvoir du juge de l'application des peines, dans le cadre des réductions de peines notamment, c'est véritablement - je suis navré de vous le dire, monsieur le rapporteur - du mauvais travail législatif ! (M. le rapporteur sourit.) Et pourtant, vous ne pouvez pas dire que j'ai ménagé mes compliments, lesquels étaient d'ailleurs justifiés pour tant d'autres heureux amendements. Mais le 3° de celui-là ne va pas, pardonnez-moi de vous le dire !
M. le président. Nous allons donc procéder à un vote par division.
Je mets aux voix le 1° et le 2° de l'amendement n° 94.
(Ce texte est adopté à l'unanimité.)
M. le président. Je mets aux voix le 3° de l'amendement n° 94.
(Ce texte est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'ensemble de l'amendement n° 94.
(L'amendement est adopté.).
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 16.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
TRANSMISSION D'UN PROJET DE LOI
M. le président. J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre un projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement définitif du budget de 2002.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 5, distribué et renvoyé à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI
M. le président. J'ai reçu de MM. Roland Courteau, Raymond Courrière, André Vezinhet, Alain Journet, Jean Besson, Bernard Piras, Philippe Madrelle, Bernard Dussaut, Marcel Vidal, Simon Sutour, René-Pierre Signé et Marcel Charmant une proposition de loi visant à autoriser les opérations de parrainage en faveur du vin.
La proposition de loi sera imprimée sous le n° 6, distribuée et renvoyée à la commission des affaires sociales, sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le règlement.
TEXTE SOUMIS AU SÉNAT EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION
M. le président. J'ai reçu de M. le Premier ministre le texte suivant, soumis au Sénat par le Gouvernement, en application de l'article 88-4 de la Constitution :
Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la réglementation de l'exploitation des avions relevant de l'annexe 16 de la convention relative à l'aviation civile internationale, volume 1, deuxième partie, chapitre 3, deuxième édition (1988) (version codifiée).
Ce texte sera imprimé sous le n° E-2385 et distribué.
RENVOI POUR AVIS
M. le président. J'informe le Sénat que le projet de loi relatif aux responsabilités locales (n° 4, 2003-2004), dont la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale est saisie au fond est renvoyé pour avis, à leur demande et sur décision de la conférence des présidents, à la commission des affaires culturelles, à la commission des affaires économiques et du Plan, à la commission des affaires sociales et à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
ORDRE DU JOUR
M. le président. Voici quel sera l'ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 7 octobre 2003 :
A neuf heures trente :
1. Quatorze questions orales.
Le texte des questions figure en annexe.
A seize heures et, éventuellement, le soir :
2. Suite de la discussion du projet de loi (n° 314, 2002-2003), adopté par l'Assemblée nationale, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.
Rapport (n° 441, 2002-2003) fait par M. François Zocchetto, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Avis (n° 445, 2002-2003) de M. Hubert Haenel, fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation.
Le délai limite pour le dépôt des amendements est expiré.
Personne ne demande la parole ?...
La séance est levée.
(La séance est levée le vendredi 3 octobre 2003, à zéro heure quarante.)
Le Directeur
du service du compte rendu intégral,
MONIQUE MUYARD
NOMINATION DE RAPPORTEURS
COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES
M. Philippe Richert a été nommé rapporteur pour avis du projet de loi n° 4 (2003-2004) relatif aux responsabilités locales, dont la commission des lois est saisie au fond.
COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES ET DU PLAN
M. Georges Gruillot a été nommé rapporteur pour avis sur le projet de loi n° 4 (2003-2004) relatif aux responsabilités locales, dont la commission des lois est saisie au fond.
COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES
M. Jean-Louis Lorrain a été nommé rapporteur du projet de loi n° 434 (2002-2003) relatif à l'accueil et à la protection de l'enfance.
Mme Annick Bocandé a été nommée rapporteur pour avis du projet de loi n° 4 (2003-2004) relatif aux responsabilités locales, dont la commission des lois est saisie au fond.
COMMISSION DES FINANCES
M. Michel Mercier a été nommé rapporteur pour avis du projet de loi n° 4 (2003-2004) relatif aux responsabilités locales, dont la commission des lois est saisie au fond.
COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LÉGISLATION, DU SUFFRAGE UNIVERSEL, DU RÈGLEMENT ET D'ADMINISTRATION GÉNÉRALE
M. Michel Dreyfus-Schmidt a été nommé rapporteur du projet de loi n° 437 (2002-2003) entre hommes et femmes sur les listes de candidats à l'élection des membres de l'Assemblée de Corse, dont la commission des lois est saisie au fond.
M. Jean-Pierre Schosteck a été nommé rapporteur du projet de loi n° 4 (2003-2004) relatif aux responsabilités locales, dont la commission des lois est saisie au fond.
Le Directeur du service du compte rendu intégral, DOMINIQUE PLANCHON
QUESTIONS ORALES
REMISES À LA PRÉSIDENCE DU SÉNAT
(Application des articles 76 à 78 du réglement)
Répartition de la dotation globale de fonctionnement
314. - 2 octobre 2003. - M. Claude Biwer attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur des chiffres significatifs contenus dans le récent rapport de l'Observatoire des finances locales portant sur les finances des collectivités territoriales en 2003. Il apparaît ainsi que le total DGF-FNP (dotation globale de fonctionnement - fonds national de péréquation) - communes et groupements - que perçoivent les 11 villes de plus de 200 000 habitants et qui s'élève en 2003 à 1,613 milliard d'euros pour 5 679 000 habitants est supérieur à celui perçu par les 27 371 communes de moins de 1 000 habitants qui représentent pourtant un total d'habitants de 9 746 000 habitants. Il le prie de bien vouloir préciser les mesures que le Gouvernement envisage de proposer visant à mettre fin à une répartition aussi inégalitaire de la DGF qui pénalise, depuis de trop longues années, les communes rurales.
Moyens d'intervention de l'ANAH
315. - 2 octobre 2003. - M. André Vantommme attire l'attention de M. le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer sur les problèmes de logement social et plus largement du parc locatif, qui souffre de l'insuffisance des constructions neuves mais aussi du vieillissement des constructions existantes. Des incitations fiscales ont été consenties en faveur des bailleurs privés et un effort financier de l'État semble promis en faveur du logement social. Cependant, il semble bien que cette volonté nouvelle affirmée par le ministère du logement et le secrétariat d'État à la ville intéresse essentiellement les zones urbaines et les grands quartiers d'habitat social. Dans les zones rurales, la question du logement revêt pourtant un caractère tout aussi aigu en raison de la pénurie de l'offre et de l'inconfort des logements disponibles. Cette situation n'est d'ailleurs pas étrangère à l'exode des populations les plus jeunes et à la désertification des zones rurales. À cet égard, le rôle joué par l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat (ANAH) est déterminant. Cette agence est le principal outil de mobilisation du parc privé, permettant l'adaptation des logements des propriétaires occupants âgés et la remise sur le marché locatif des logements vacants. Par son action, l'ANAH développe de très fortes valeurs ajoutées sociales et territoriales dans les secteurs ruraux qui concentrent 40 % des logements inconfortables et où 70 % des logements vacants datent d'avant 1949. Dans ce contexte, le gel des crédits affectés au budget de l'ANAH revêt une particulière gravité en sus du fait qu'il affecte les emplois qui auraient été générés (20 000 estimés) si une telle mesure de restriction n'avait pas été prise. En conséquence, il souhaiterait connaître son sentiment sur la nécessaire revalorisation des moyens d'intervention de l'ANAH et serait particulièrement satisfait d'obtenir d'ores et déjà l'assurance que, dans le cadre de la loi de finances 2004, il est déterminé à promouvoir un budget de l'ANAH à hauteur des besoins criants de nos concitoyens.
ANNEXES AU PROCÈS-VERBAL
de la séance
du jeudi 2 octobre 2003
SCRUTIN (n° 2)
sur l'amendement n° 418, présenté par Mme Nicole Borvo et plusieurs de ses collègues, à l'article 14 du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité (renforcement de la répression à l'encontre des infractions à caractère raciste ou discriminatoire).
Nombre de votants : 313
Nombre de suffrages
exprimés : 311
Pour : 111
Contre : 200
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour : 23.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (28) :
Contre : 28.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN :
Pour : 6. - MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, François Fortassin et Dominique Larifla.
Contre : 9.
Abstentions : 2. - MM. Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Pour : 82.
N'a pas pris part au vote : 1. - M. Bernard Angels, qui présidait la séance.
GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (165) :
Contre : 163.
N'ont pas pris part au vote : 2. - MM. Christian Poncelet, président du Sénat, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :
N'ont pas pris part au vote : 5.
Ont voté pour
Michèle André
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
MoniqueCerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Claude Domeizel
MichelDreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
Yves Krattinger
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Trémel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vézinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Ernest Cartigny
Auguste Cazalet
CharlesCeccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Robert Del Picchia
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Yves Détraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Adrien Gouteyron
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Christiande La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-FrançoisLe Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
LucetteMichaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeride Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Yannick Texier
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
Abstentions
Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
N'ont pas pris part au vote
Philippe Adnot, Philippe Darniche, Sylvie Desmarescaux, Emmanuel Hamel, Bernard Seillier et Alex Türk.
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat, et Bernard Angels, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 313
Nombre de suffrages
exprimés : 311
Majorité absolue des suffrages exprimés : 156
Pour :
112
Contre : 199
Mais, après vérification, ces nombres ont été
rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 3)
sur l'amendement n° 318, présenté par M. Robert Badinter et les membres du groupe socialiste, apparenté et rattachée, tendant à insérer un article additionnel avant l'article 16 du projet de loi adopté par l'Assemblée nationale, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité (répression des discriminations commises par voie de presse).
Nombre de votants : 313
Nombre de suffrages
exprimés : 309
Pour : 111
Contre : 198
Le Sénat n'a pas adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Pour : 23.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (28) :
Contre : 28.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN :
Pour : 5. - MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau et François Fortassin.
Contre : 8.
Abstentions : 4. - MM. Nicolas Alfonsi, Rodolphe Désiré, Dominique Larifla et Jacques Pelletier.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Pour : 83.
GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (165) :
Contre : 162.
N'ont pas pris part au vote : 3. - MM. Christian Poncelet, président du Sénat, Adrien Gouteyron, qui présidait la séance, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe (5) :
N'ont pas pris part au vote : 5.
Ont voté pour
Michèle André
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
François Autain
Jean-Yves Autexier
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-ChristineBlandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
MoniqueCerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Claude Domeizel
MichelDreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
Yves Krattinger
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Paul Loridant
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Trémel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vézinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Ont voté contre
Nicolas About
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Ernest Cartigny
Auguste Cazalet
CharlesCeccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Robert Del Picchia
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Yves Détraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Christiande La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-FrançoisLe Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
LucetteMichaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeride Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Yannick Texier
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
Abstentions
Nicolas Alfonsi, Rodolphe Désiré, Dominique Larifla et Jacques Pelletier.
N'ont pas pris part au vote
Philippe Adnot, Philippe Darniche, Sylvie Desmarescaux, Emmanuel Hamel, Bernard Seillier et Alex Türk.
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat, et Adrien Gouteyron, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 315
Nombre de suffrages
exprimés : 311
Majorité absolue des suffrages exprim : 156
Pour :
112
Contre : 199
Mais, après vérification, ces nombres ont été
rectifiés conformément à la liste ci-dessus.
SCRUTIN (n° 4)
sur le sous-amendement n° 460 rectifié, présenté par le Gouvernement, à l'amendement n° 93 de la commission des lois tendant à insérer un article additionnel après l'article 16 du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité (nouvelles dispositions relatives au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles).
Nombre de votants : 310
Nombre de suffrages
exprimés : 308
Pour : 199
Contre : 109
Le Sénat a adopté.
ANALYSE DU SCRUTIN
GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN ET CITOYEN (23) :
Contre : 20.
N'ont pas pris part au vote : 3. - MM. François Autain, Jean-Yves Autexier et Paul Loridant.
GROUPE DE L'UNION CENTRISTE (28) :
Pour : 28.
GROUPE DU RASSEMBLEMENT DÉMOCRATIQUE ET SOCIAL EUROPÉEN :
Pour : 9.
Contre : 6. - MM. Jean-Michel Baylet, André Boyer, Yvon Collin, Gérard Delfau, François Fortassin et Dominique Larifla.
Abstentions : 2. - MM. Nicolas Alfonsi et Rodolphe Désiré.
GROUPE SOCIALISTE (83) :
Contre : 83.
GROUPE DE L'UNION POUR UN MOUVEMENT POPULAIRE (165) :
Pour : 162.
N'ont pas pris part au vote : 3. - MM. Christian Poncelet, président du Sénat, Adrien Gouteyron, qui présidait la séance, et Emmanuel Hamel.
Sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe : (5).
N'ont pas pris part au vote : 5.
Ont voté pour
Nicolas About
Jean-Paul Alduy
Jean-Paul Amoudry
Pierre André
Philippe Arnaud
Jean Arthuis
Denis Badré
Gérard Bailly
José Balarello
Gilbert Barbier
Bernard Barraux
Jacques Baudot
Michel Bécot
Claude Belot
Daniel Bernardet
Roger Besse
Laurent Béteille
Joël Billard
Claude Biwer
Jean Bizet
Jacques Blanc
Paul Blanc
Maurice Blin
Annick Bocandé
Didier Borotra
Joël Bourdin
Brigitte Bout
Jean Boyer
Jean-Guy Branger
Gérard Braun
Dominique Braye
Paulette Brisepierre
Louis de Broissia
Jean-Pierre Cantegrit
Jean-Claude Carle
Ernest Cartigny
Auguste Cazalet
CharlesCeccaldi-Raynaud
Gérard César
Jacques Chaumont
Jean Chérioux
Marcel-Pierre Cléach
Jean Clouet
Christian Cointat
Gérard Cornu
Jean-Patrick Courtois
Robert Del Picchia
Fernand Demilly
Christian Demuynck
Marcel Deneux
Gérard Dériot
Yves Détraigne
Eric Doligé
Jacques Dominati
Michel Doublet
Paul Dubrule
Alain Dufaut
André Dulait
Ambroise Dupont
Jean-Léonce Dupont
Hubert Durand-Chastel
Louis Duvernois
Daniel Eckenspieller
Jean-Paul Emin
Jean-Paul Emorine
Michel Esneu
Jean-Claude Etienne
Pierre Fauchon
Jean Faure
Françoise Férat
André Ferrand
Hilaire Flandre
Gaston Flosse
Alain Fouché
Jean-Pierre Fourcade
Bernard Fournier
Serge Franchis
Philippe François
Jean François-Poncet
Yves Fréville
Yann Gaillard
René Garrec
Christian Gaudin
Jean-Claude Gaudin
Philippe de Gaulle
Gisèle Gautier
Patrice Gélard
André Geoffroy
Alain Gérard
François Gerbaud
Charles Ginésy
Francis Giraud
Paul Girod
Daniel Goulet
Jacqueline Gourault
Alain Gournac
Francis Grignon
Louis Grillot
Georges Gruillot
Charles Guené
Michel Guerry
Hubert Haenel
Françoise Henneron
Marcel Henry
Pierre Hérisson
Daniel Hoeffel
Jean-François Humbert
Jean-Jacques Hyest
Pierre Jarlier
Bernard Joly
Jean-Marc Juilhard
Roger Karoutchi
Joseph Kerguéris
Christiande La Malène
Jean-Philippe Lachenaud
Pierre Laffitte
Lucien Lanier
Jacques Larché
Gérard Larcher
André Lardeux
Robert Laufoaulu
René-Georges Laurin
Jean-René Lecerf
Dominique Leclerc
Jacques Legendre
Jean-FrançoisLe Grand
Serge Lepeltier
Philippe Leroy
Marcel Lesbros
Valérie Létard
Gérard Longuet
Jean-Louis Lorrain
Simon Loueckhote
Roland du Luart
Brigitte Luypaert
Max Marest
Philippe Marini
Pierre Martin
Jean Louis Masson
Serge Mathieu
Michel Mercier
LucetteMichaux-Chevry
Jean-Luc Miraux
Louis Moinard
René Monory
Aymeride Montesquiou
Dominique Mortemousque
Georges Mouly
Bernard Murat
Philippe Nachbar
Paul Natali
Philippe Nogrix
Nelly Olin
Joseph Ostermann
Georges Othily
Jacques Oudin
Monique Papon
Anne-Marie Payet
Michel Pelchat
Jacques Pelletier
Jean Pépin
Jacques Peyrat
Xavier Pintat
Bernard Plasait
Jean-Marie Poirier
Ladislas Poniatowski
André Pourny
Jean Puech
Henri de Raincourt
Victor Reux
Charles Revet
Henri Revol
Henri de Richemont
Philippe Richert
Yves Rispat
Josselin de Rohan
Roger Romani
Janine Rozier
Bernard Saugey
Jean-Pierre Schosteck
Bruno Sido
Daniel Soulage
Louis Souvet
Yannick Texier
Michel Thiollière
Henri Torre
René Trégouët
André Trillard
François Trucy
Maurice Ulrich
Jacques Valade
André Vallet
Jean-Marie Vanlerenberghe
Alain Vasselle
Jean-Pierre Vial
Xavier de Villepin
Serge Vinçon
Jean-Paul Virapoullé
François Zocchetto
Ont voté contre
Michèle André
Bernard Angels
Henri d'Attilio
Bertrand Auban
Robert Badinter
Jean-Michel Baylet
Marie-Claude Beaudeau
Marie-France Beaufils
Jean-Pierre Bel
Jacques Bellanger
Maryse Bergé-Lavigne
Jean Besson
Pierre Biarnès
Danielle Bidard-Reydet
Marie-Christine Blandin
Nicole Borvo
Didier Boulaud
André Boyer
Yolande Boyer
Robert Bret
Claire-Lise Campion
Jean-Louis Carrère
Bernard Cazeau
MoniqueCerisier-ben Guiga
Gilbert Chabroux
Michel Charasse
Yvon Collin
Gérard Collomb
Yves Coquelle
Raymond Courrière
Roland Courteau
Yves Dauge
Annie David
Marcel Debarge
Gérard Delfau
Jean-Pierre Demerliat
Michelle Demessine
Evelyne Didier
Claude Domeizel
MichelDreyfus-Schmidt
Josette Durrieu
Bernard Dussaut
Claude Estier
Guy Fischer
François Fortassin
Thierry Foucaud
Jean-Claude Frécon
Bernard Frimat
Charles Gautier
Jean-Pierre Godefroy
Jean-Noël Guérini
Claude Haut
Odette Herviaux
Alain Journet
Yves Krattinger
André Labarrère
Philippe Labeyrie
Serge Lagauche
Roger Lagorsse
Dominique Larifla
Gérard Le Cam
André Lejeune
Louis Le Pensec
Claude Lise
Hélène Luc
Philippe Madrelle
Jacques Mahéas
Jean-Yves Mano
François Marc
Jean-Pierre Masseret
Marc Massion
Josiane Mathon
Pierre Mauroy
Louis Mermaz
Gérard Miquel
Michel Moreigne
Roland Muzeau
Jean-Marc Pastor
Guy Penne
Daniel Percheron
Jean-Claude Peyronnet
Jean-François Picheral
Bernard Piras
Jean-Pierre Plancade
Danièle Pourtaud
Gisèle Printz
Jack Ralite
Daniel Raoul
Paul Raoult
Daniel Reiner
Ivan Renar
Roger Rinchet
Gérard Roujas
André Rouvière
Michèle San Vicente
Claude Saunier
Michel Sergent
René-Pierre Signé
Jean-Pierre Sueur
Simon Sutour
Odette Terrade
Michel Teston
Jean-Marc Todeschini
Pierre-Yvon Trémel
André Vantomme
Paul Vergès
André Vézinhet
Marcel Vidal
Henri Weber
Abstentions
Nicolas Alfonsi, Rodolphe Désiré.
N'ont pas pris part au vote
Philippe Adnot, François Autain, Jean-Yves Autexier, Philippe Darniche, Sylvie Desmarescaux, Emmanuel Hamel, Paul Loridant, Bernard Seillier et Alex Türk.
N'ont pas pris part au vote
Christian Poncelet, président du Sénat, et Adrien Gouteyron, qui présidait la séance.
Les nombres annoncés en séance avaient été de :
Nombre de votants : 312
Nombre de suffrages
exprimés : 309
Majorité absolue des suffrages exprimés : 155
Pour :
201
Contre : 108
Mais, après vérification, ces nombres ont été
rectifiés conformément à la liste ci-dessus.