SEANCE DU 18 DECEMBRE 2001
M. le président.
L'amendement n° 72, présenté par M. Charasse et les membres du groupe
socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
« Avant l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« Le code des douanes est ainsi modifié :
« I. - Le paragraphe 4 de la section 2 du chapitre IV du titre XII du code des
douanes est ainsi intitulé : "- Aliénation et destruction des marchandises
saisies pour infraction aux lois de douane."
« II. - Le point B du paragraphe 4 de la section 2 du chapitre IV du titre XII
du code des douanes, intitulé : "Aliénation des marchandises confisquées ou
abandonnées par transaction" devient le point C du paragraphe IV de la section
II du chapitre IV du titre XII du code des douanes.
« III. - Il est inséré, au paragraphe 4 de la section 2 du chapitre IV du
titre XII du code des douanes, un point B ainsi rédigé : "B. Destruction avant
jugement de certaines catégories de marchandises".
« IV. - Il est inséré, sous le point B du paragraphe 4 de la section II du
chapitre IV du titre XII du code des douanes, un article 389
bis
ainsi
rédigé :
«
Art. 389
bis. - 1. En cas de saisie de marchandises :
« - qualifiées par la loi de dangereuses ou de nuisibles, ou dont la
fabrication, le commerce ou la détention est illicite ;
« - ainsi que de marchandises destinées à l'alimentation humaine ou animale
mais qui ne peuvent être vendues en application de l'article 389 ci-dessus
parce qu'elles sont impropres à la consommation, ou qui ne peuvent être
conservées sans risque de détérioration ;
« il est, à la diligence de l'administration des douanes, sous réserve d'un
prélèvement préalable d'échantillons selon des modalités fixées par décret en
Conseil d'Etat, et en vertu de l'autorisation du juge d'instance compétent en
application de l'article 375
bis
ci-dessus ou du juge d'instruction,
procédé à la destruction des objets saisis.
« 2. L'ordonnance portant autorisation de destruction est notifiée à l'autre
partie conformément aux dispositions de l'article 362-2 ci-dessus, avec
déclaration qu'il sera immédiatement procédé à la destruction, tant en son
absence qu'en sa présence.
« 3. L'ordonnance du juge d'instance ou du juge d'instruction est exécutée
nonobstant opposition ou appel. La destruction est constatée par procès-verbal
de constat. »
La parole est à M. Charasse.
M. Michel Charasse,
Monsieur le président, l'amendement n° 72 s'accompagne de l'amendement n° 73,
l'un et l'autre tendant à modifier le code des douanes ; si vous en étiez
d'accord, je pourrais les présenter ensemble.
M. le président.
J'appelle donc également en discussion l'amendement n° 73, présenté par M.
Charasse et les membres du groupe socialiste et apparentés, et qui est ainsi
libellé :
« Avant l'article 34 insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le 1 de l'article 459 du code des douanes sont insérés un 1
bis
et un 1
ter
ainsi rédigés :
« 1
bis. -
Est puni des mêmes peines le fait, pour toute personne, de
contrevenir ou de tenter de contrevenir aux mesures de restriction des
relations économiques et financières prévues par la loi, la réglementation
communautaire prise en application des articles 60 et 301 du traité instituant
la Communauté européenne ou par les traités et accords internationaux
régulièrement approuvés et ratifiés par la France.
« 1
ter. -
Les personnes morales peuvent être déclarées responsables
pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, des
infractions mentionnées au 1 et au 1
bis.
Les peines encourues par les
personnes morales sont l'amende, selon les modalités prévues par l'article
131-38 du code pénal, ainsi que les peines mentionnées par l'article 131-39 du
même code. »
« II. - Au chapitre I du titre XIV du code des douanes, il est inséré un
article ainsi rédigé :
«
Art. 451
bis. - Pour l'application du présent code, sont assimilées à
des relations financières avec l'étranger toutes les opérations financières
effectuées en France par ou pour le compte des personnes physiques et morales
visées par la loi, les règlements communautaires pris en application des
articles 60 et 301 du traité instituant la Communauté européenne ou par les
traités et accords internationaux régulièrement approuvés et ratifiés. »
Veuillez poursuivre, monsieur Charasse.
M. Michel Charasse.
Actuellement, les services des douanes peuvent, sur ordonnance du juge
d'instance ou d'instruction, faire vendre, avant le jugement de confiscation,
les marchandises périssables et les moyens pour les transporter.
Les marchandises illicites, dangereuses ou impropres à la consommation
doivent, en revanche, être conservées par les services des douanes puisqu'elles
ne peuvent pas être vendues.
L'amendement n° 72 vise à modifier le code des douanes pour permettre aux
services des douanes de détruire avant le jugement de confiscation, mais sur
autorisation du juge d'instruction ou du juge d'instance, les marchandises
qualifiées par la loi de dangereuses ou de nuisibles, ou dont la détention est
illicite, et, plus généralement, toute marchandise impropre à la
consommation.
Il prévoit, en outre, qu'un prélèvement d'échantillons sera effectué, selon
des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat, afin de permettre la
conservation des preuves.
Si je propose d'adopter cette disposition, c'est tout simplement pour
dispenser l'administration de conserver à grands frais des marchandises saisies
en grandes quantités, comme les tabacs et les contrefaçons.
Cela permettrait de faire de substantielles économies budgétaires et de
fonctionnement. Ainsi, la destruction des stupéfiants rendrait inutiles les
dispositifs de surveillance très sophistiqués des entrepôts dans lesquels les
stupéfiants sont stockés, en quantités souvent impressionnantes.
Enfin, les problèmes d'hygiène et de salubrité publiques engendrés par la
conservation de marchandises impropres à la consommation et périssables - on
pense, par exemple, à certaines viandes - seraient ainsi résolus.
C'est donc une mesure de simplification administrative et d'économie
budgétaire qui est présentée au travers de l'amendement n° 72.
L'amendement n° 73 prévoit, quant à lui, un dispositif un peu plus compliqué,
issu directement de l'expérience qu'ont vécue les services des douanes au cours
des dernières semaines, lorsque, sur le plan international, a été prise la
décision de bloquer les avoirs financiers liés au terrorisme.
Il s'agit de permettre à la direction générale des douanes de faire
sanctionner le non-respect des mesures communautaires qui interdisent les
relations économiques et financières avec l'étranger.
En effet, l'Union européenne peut aujourd'hui interdire d'effectuer des
opérations à caractère économique et financier avec l'étranger, notamment dans
le cadre de la répression du crime international et du terrorisme, mais le
service des douanes ne peut pas faire sanctionner le non-respect de ces
interdictions : on s'en est aperçu récemment à l'occasion des affaires Ben
Laden et autres.
L'amendement n° 73 vise donc à introduire dans le code des douanes une
disposition permettant de punir de la même façon les infractions aux
interdictions de relations économiques et financières avec l'étranger
lorsqu'elles ont été édictées par la loi ou par la réglementation européenne.
Les personnes morales pourraient, en outre, être sanctionnées pénalement.
Il prévoit aussi de retenir une définition unique de la notion de relations
économiques et financières avec l'étranger pour l'ensemble du titre XIV du code
des douanes intitulé : « Contentieux des relations financières avec l'étranger
». La définition actuelle serait par ailleurs étendue aux embargos économiques
et financiers prévus par la réglementation européenne.
Mes chers collègues, au moment où la réglementation européenne se fait de plus
en plus complète, il faut faire évoluer, pour des raisons d'efficacité, notre
droit interne. Les sanctions des infractions aux dispositions européennes qui
interdisent les relations économiques et financières avec l'étranger n'auraient
pas de portée concrète si nos services des douanes ne pouvaient pas rechercher
et constater ces infractions.
Il y va aussi de la bonne application de nos engagements internationaux et de
la réputation des services français en ce qui concerne la lutte contre un
aspect non négligeable du terrorisme.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 72 et 73 ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
La commission partage les préoccupations de notre
collègue ; cependant, avant d'exposer de façon plus complète son analyse, elle
souhaiterait connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président.
Quel est donc l'avis du Gouvernement sur les deux amendements ?
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
Je voudrais dire à M. Charasse que je suis tout à fait
favorable à l'amendement n° 72, qui répond de manière très adaptée aux
contraintes modernes de la lutte contre les trafics de marchandises illicites,
et ce dans des conditions de sécurité juridique très satisfaisantes.
S'agissant de l'amendement n° 73, j'y suis également tout à fait favorable,
car il permet de combler un vide législatif existant actuellement dans le code
des douanes, d'étendre la recherche, la constatation et la sanction des
infractions au régime des sanctions financières et de sanctionner les
manquements à des règlements communautaires, ce qui n'est pas possible
aujourd'hui.
Le Gouvernement est donc très favorable à une mesure qui va dans le sens du
renforcement des moyens nationaux de lutte contre ces grandes infractions, à un
moment où cela est particulièrement nécessaire.
M. Michel Charasse.
Merci beaucoup !
M. le président.
Quel est maintenant l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Je confirme l'avis tout à fait favorable de la
commission sur les deux amendements.
M. le président.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 72.
M. Hilaire Flandre.
Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président.
La parole est à M. Flandre.
M. Hilaire Flandre.
Je veux simplement dire à notre collègue Michel Charasse que, si
l'administration des douanes est sans doute vénérable, il n'est pas nécessaire
pour autant de la dénommer « administration des doyennes » dans l'objet de
l'amendement !
(Rires.)
M. Michel Charasse.
C'est une faute de frappe !
M. Jean Bizet.
Non intentionnelle !
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 72, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je constate que cet amendement a été adopté à l'unanimité.
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
C'est Noël !
M. le président.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances rectificative, avant l'article 34.
Je mets aux voix l'amendement n° 73, accepté par la commission et par le
Gouvernement.
(L'amendement est adopté.)
M. le président.
Je constate que cet amendement a également été adopté à l'unanimité.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet
de loi de finances rectificative, avant l'article 34.
L'amendement n° 90, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
« Avant l'article 34, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
« La redevance instituée par l'article L. 951-1 du code de la sécurité sociale
est affectée au budget général à compter du 1er janvier 2002. »
La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Florence Parly,
secrétaire d'Etat.
L'ordonnance du 19 avril 2001 relative au code de la
mutualité a instauré, au profit de la commission de contrôle des mutuelles et
des institutions de prévoyance, une redevance à la charge des institutions de
prévoyance, des mutuelles et des institutions de retraite complémentaire. Cette
ordonnance a confié à la loi de finances la définition des conditions
d'affectation de cette ressource.
L'amendement n° 90 a pour objet d'affecter le produit de la contribution,
estimé à 900 000 euros par an, aux recettes du budget général, en vertu des
principes d'universalité et d'unité budgétaires. En effet, les moyens de la
commission de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance figurent
en dépenses au budget du ministère de l'emploi et de la solidarité.
M. le président.
Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini,
rapporteur général.
Cet amendement a été déposé assez tardivement, madame
le secrétaire d'Etat, et la commission n'a donc pu l'examiner. Je vais
cependant improviser un commentaire, en espérant que mes collègues de la
commission ne le désapprouveront pas !
Selon les informations que nous avons obtenues, le ministère de l'emploi et de
la solidarité a décidé de créer une structure auprès de l'inspection générale
des affaires sociales, l'IGAS, qui devra assurer les missions de la commission
de contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance. Pour 2002, le
budget de l'IGAS aurait même été accru afin de tenir compte de cette nouvelle
mission. Les moyens accordés à cette structure provenant du ministère de
l'emploi et de la solidarité, ce dernier souhaite donc que les ressources que
l'article L. 951-1 du code de la sécurité sociale prévoit d'allouer à ladite
commission soient en réalité reversées au budget général.
Si cette solution présente l'avantage de la simplicité, elle est en
contradiction, je le souligne, avec l'esprit de l'article L. 951-1 du code de
la sécurité sociale, qui a bel et bien créé la commission des mutuelles et des
institutions de prévoyance en la dotant d'un statut spécifique, garantissant en
quelque sorte son autonomie par rapport au pouvoir exécutif.
En effet, ce texte dispose, je le rappelle, que la commission bénéficie de
l'autonomie financière et que « ses ressources sont notamment constituées, dans
les conditions fixées par la loi de finances, du produit d'une redevance à la
charge des institutions régies par les titres III et IV du livre IX du présent
code des mutuelles, unions et fédérations régies par le code de la mutualité
des institutions de retraite complémentaire autres que celles mentionnées au
deuxième alinéa du présent article ».
Il apparaît donc que le Gouvernement - la disposition que j'ai citée a été
prise autrefois par ordonnance - souhaitait plutôt créer un établissement
public, ou en tout cas une instance disposant de l'autonomie financière. Or,
aujourd'hui, au détour de ce collectif budgétaire, on nous demande de valider
un changement complet de position, visant à l'intégration de la commission de
contrôle des mutuelles et des institutions de prévoyance au sein d'un service
du ministère de l'emploi et de la solidarité.
Il me semble que nous devrions procéder par ordre et modifier d'abord
l'article L. 951-1 du code de la sécurité sociale. Etant moi-même très
sourcilleux s'agissant du respect du champ des compétences de la commission des
finances, je comprendrais que nos collègues de la commission des affaires
sociales le soient tout autant et qu'ils soient choqués d'une modification par
ricochet qui aurait normalement dû relever d'une réécriture dudit article du
code de la sécurité sociale.
C'est la raison pour laquelle je ne peux donner un avis favorable sur cet
amendement, déposé assez tardivement. Il ne s'agit d'ailleurs probablement pas
d'une question présentant un caractère d'extrême urgence et imposant de
bousculer à ce point les délais. Je crois donc qu'il convient, mes chers
collègues, de rejeter l'amendement du Gouvernement : j'exprime cet avis en mon
nom, en espérant que la commission n'en aurait pas décidé différemment.
M. le président.
Je mets aux voix l'amendement n° 90, repoussé par la commission.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Articles 34, 34 bis , 35 et 35 bis