SEANCE DU 7 DECEMBRE 2001
M. le président.
Le Sénat va examiner les dispositions du projet de loi concernant l'emploi et
la solidarité : II. - Santé et solidarité.
J'indique au Sénat que, pour cette discussion, la conférence des présidents a
opté pour la formule expérimentée l'an dernier et fondée sur le principe d'une
réponse immédiate du Gouvernement aux différents intervenants, rapporteurs ou
orateurs des groupes.
Ainsi, M. le ministre répondra immédiatement et successivement au rapporteur
spécial, puis aux deux rapporteurs pour avis, et enfin à chaque orateur des
groupes.
Ces réponses successives se substitueront à la réponse unique en fin de
discussion.
Chacune des questions des orateurs des groupes ne devant pas dépasser cinq
minutes, le Gouvernement répondra en trois minutes à chaque orateur, ce dernier
disposant d'un droit de réplique de deux minutes maximum.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Alain Joyandet,
rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Monsieur le président, monsieur le
ministre, mes chers collègues, nous abordons aujourd'hui la discussion d'un
budget important tant par ses objectifs que par les sommes en jeu : 14,8
millions d'euros destinés à conduire en 2002 un certain nombre d'actions.
Depuis 1997, le budget de la santé et de la solidarité a augmenté d'un tiers.
Si nous ne contestons pas le bien-fondé de cette augmentation considérable,
nous pouvons cependant nous interroger quelques instants sur l'utilisation
passée de ces sommes.
Je n'accumulerai pas les chiffres, monsieur le ministre ; je souhaite
simplement examiner la situation et dresser quelques constats.
Premier constat : jamais autant d'argent n'aura été consacré aux minima
sociaux, alors que jamais depuis les Trente Glorieuses notre pays n'a connu une
telle prospérité !
Deuxième constat, qui, d'ailleurs, apporte peut-être un début d'explication au
premier : les charges de fonctionnement de votre ministère - ou, plus
exactement, du ministère de Mme Guigou, mais je considère qu'aujourd'hui vous
le représentez - ont considérablement augmenté.
Vous savez que, sur l'initiative du Sénat notamment, des agences pourvues de
moyens très importants, tant sur le plan budgétaire que sur le plan des
effectifs, ont été mises en place. On aurait pu penser que le ministère de la
solidarité et de la santé transférerait des moyens à ces agences. Or il s'avère
que les moyens se sont ajoutés.
Puisque je parle du fonctionnement, monsieur le ministre, je relève que les
moyens en personnel de l'administration centrale ont considérablement augmenté
depuis 1997 puisqu'ils ont connu une hausse de 16 %, alors que ceux des
services déconcentrés n'ont augmenté que de 5 %. Or ce sont les personnels des
services déconcentrés qui sont sur le terrain, dans les administrations, auprès
du public et de ceux de nos concitoyens qui ont besoin d'aide. Ce n'en sont pas
moins les effectifs de l'administration centrale qui ne cessent de gonfler !
Le budget de la santé et de la solidarité est un budget exceptionnel, en
constante augmentation : les minima sociaux augmentent, les frais de
fonctionnement de l'administration centrale augmentent... Bref, il vous faut
trouver des moyens financiers supplémentaires.
Vous n'avez que deux solutions : transférer certaines charges soit vers
d'autres administrations ou à l'intérieur de votre propre administration, soit
- et c'est, hélas ! la solution que vous avez choisie - vers la sécurité
sociale et les collectivités locales.
Ces transferts aux collectivités locales ont été évoqués dans le cadre
d'autres projets de budget. Dans votre domaine de compétence comme ailleurs,
monsieur le ministre, ils risquent de déclencher le fameux effet de ciseaux. Et
je ne parle pas des difficultés que vous avez rencontrées pour trouver les
financements des encore plus fameuses 35 heures, qui ont aussi beaucoup occupé
nos débats et qui contribueront à augmenter considérablement le déficit de la
sécurité sociale.
Votre politique, monsieur le ministre - celle de Mme Guigou - se caractérise
donc par de nombreux transferts, et par toutes sortes d'opérations de gestion
que la commission des finances a dénoncées.
Il y a aussi des dysfonctionnements, et je voudrais insister tout
particulièrement sur un dossier d'une grande importance pour nos hôpitaux,
notamment dans les départements et les régions, celui du fonds d'investissement
pour la modernisation des hôpitaux, le FIMHO.
Les subventions de ce fonds sont indispensables pour restructurer nos
hôpitaux. Hélas ! les démarches administratives freinent considérablement le
déblocage des crédits. Ainsi, vous proposez aujourd'hui d'augmenter les crédits
alors même que des crédits déjà inscrits au FIMHO ne sont pas encore consommés
!
Monsieur le ministre, je regrette d'avoir à vous adresser ces observations que
j'aurais souhaité faire à Mme Guigou - c'est cependant avec plaisir que nous
vous accueillons ! (
M. le ministre délégué sourit.)
Nous aurions de même
souhaité poser nos questions à Mme Guigou, d'autant que nous les lui avons déjà
posées à plusieurs reprises et qu'à ce jour elle ne nous a toujours pas répondu
!
Si elle avait été présente, je lui aurais dit que, lorsque nous l'interrogeons
c'est non pas pour la mettre en difficulté, mais pour essayer de comprendre,
car, quand on comprend, on est en général plus compréhensif. Hélas ! nous
n'avons toujours pas de réponse...
Je prendrai deux exemples tirés du questionnaire budgétaire.
A la suite du contrôle de la Cour des comptes, nous avons interrogé Mme Guigou
sur l'augmentation continue des crédits de la politique de communication du
ministère : pas de réponse !
Nous l'avons interrogée sur la mission interministérielle de lutte contre la
drogue, qui a fait l'objet d'un contrôle de M. du Luart : pas de réponse !
Cette situation est regrettable, car elle nous ôte toute possibilité de
connaître ses arguments et de les commenter.
Mais j'en reviens au projet de budget : les dépenses indispensables toujours
repoussées, les nouvelles demandes que générera certainement le retour du
chômage, la hausse continue des minima sociaux, le taux de croissance qu'il
faudra bien revoir à la baisse, tous ces éléments nous font craindre que
l'avenir ne soit difficile.
Et, monsieur le ministre, nous pensons que cet avenir n'a pas été suffisamment
préparé par votre gouvernement. En effet, quand tout va bien c'est qu'il faut
préparer l'avenir en prévision de périodes plus difficiles. Mais je n'ai pas
l'impression que le Gouvernement soit un adepte de La Fontaine...
On sait aussi - et ce n'est pas M. le président de la commission des finances
qui dira le contraire - que, compte tenu de la situation générale des finances
de la nation, il faut plus que jamais contrôler la dépense publique et veiller
à son utilité : chaque franc dépensé doit être un franc efficace.
Priorité doit donc être donnée aux dépenses en faveur de ceux de nos
compatriotes qui ont le plus besoin d'aide. Inutile de doter de moyens
supplémentaires des administrations centrales déjà bien pourvues !
Mais, d'après l'expertise que nous avons pu conduire, il semble bien, monsieur
le ministre, que le ministère de la santé et de la solidarité n'ait pas
d'outils de gestion modernes.
La loi organique relative aux lois de finances adoptée sous l'impulsion,
notamment, du président de notre commission des finances sera prochainement
mise en oeuvre, mais votre ministère n'a pas encore, si nos renseignements sont
exacts, commencé à étudier le sujet ! Vos services ne disposent pas des outils
de gestion et de prévision performants qui leur seront nécessaires pour se
préparer à cette nouvelle « constitution » financière, à laquelle vous devrez
pourtant, comme les autres, vous soumettre.
J'en viens, monsieur le ministre, à des aspects plus techniques, que je
souhaite aborder sous l'angle des objectifs recherchés, car la question est
bien de savoir à quoi l'argent ponctionné aux Français doit être utilisé en
matière de santé et de solidarité.
Vous le savez, monsieur le ministre, chaque jour dans notre pays, 1 000
personnes ou meurent du cancer ou apprennent qu'elles sont touchées par cette
maladie. Le Gouvernement a-t-il fait de celle-ci une priorité nationale ? Tous
les moyens que nous pourrions mettre en oeuvre sont-ils consacrés à la
recherche et au dépistage ? Je crains que non !
Personne en effet ne saurait prétendre que, dans nos départements, les
hôpitaux croulent sous les moyens en personnels ou les moyens financiers,
techniques, immobiliers... Il n'est que de voir les nombreuses manifestations -
et les rallonges budgétaires accordées en catastrophe qui leur font suite -
pour en prendre conscience.
Quant aux médecins, ils ne bénéficient pas de conditions de travail et de
rémunération en relation avec la difficulté de leurs études et le dévouement
dont ils font preuve chaque jour. Je pense là tout particulièrement aux
médecins généralistes, qu'ils exercent en ville ou en milieu rural.
Je veux insister tout particulièrement sur le thème de la solidarité, parce
que je crois que l'on se trompe dans notre pays.
La solidarité, monsieur le ministre, consiste-t-elle à favoriser
prioritairement certaines catégories sociales qui veulent prendre leur retraite
avant les autres, ou encore à mobiliser des moyens financiers colossaux pour la
réduction du temps de travail ? Ne devrait-elle pas plutôt être orientée vers
ceux qui en ont vraiment besoin, vers les exclus de la société qui n'en
bénéficient pas aujourd'hui ? Je pense évidemment aux handicapés qui attendent
une place en établissement, et tout particulièrement aux handicapés qui
vieillissent de plus en plus nombreux, et c'est heureux, mais dont les parents
s'inquiètent pour l'avenir.
J'ai cependant le sentiment, monsieur le ministre, que ces priorités n'en sont
pas pour les pouvoirs publics. Je constate sur le terrain, comme beaucoup
d'élus locaux, que, s'il arrive que la situation d'une personne en difficulté
s'améliore, c'est plus souvent grâce aux associations qui se dévouent mais qui,
pour financer leur action, sont obligés de quêter sur la voie publique !
Tous les moyens mis en oeuvre ont, finalement, très peu contribué à apaiser la
douleur, à renforcer la solidarité et la fraternité, et ils n'ont sûrement pas
permis de combattre suffisamment la maladie.
Monsieur le ministre, si l'on veut privilégier les solidarités essentielles,
il faudra changer complètement de politique. C'est pourquoi - et cela ne vous
étonnera pas - la commission des finances propose le rejet des crédits de la
santé et de la solidarité.
Puisque nous avons accepté de nous plier à la procédure expérimentale des
questions-réponses pour rendre nos débats un peu plus vivants, je vais,
monsieur le ministre, vous poser cinq questions qui se rattachent au corps de
mon propos.
Premièrement, comment expliquez-vous que, malgré le recul du chômage et la
croissance économique, les crédits finançant les minima sociaux ne cessent de
progresser ?
Deuxièmement, pouvez-vous nous expliquer pourquoi les crédits du FIMHO ne sont
pas employés en totalité et, dans le même temps, pourquoi il est aussi
difficile de faire aboutir les dossiers relevant de ce fonds ?
Troisièmement - et c'est une question que j'ai déjà posée à Mme Guigou, mais
qui est restée sans réponse - comment le protocole hospitalier de mars 2000
sera-t-il financé au cours de l'exercice 2002 ?
Quatrièmement, de la même façon, comment la prime de Noël, qui est une bonne
mesure, sera-t-elle financée ?
J'en viens à ma cinquième question, que je vous pose en fait à la demande de
notre collègue Michel Mercier.
Si le transfert d'une partie de la charge de l'APA aux départements a donné
lieu à débat, le financement des 35 heures dans le secteur hospitalier public
risque d'en faire autant, bien que les choses se passent de manière un peu plus
discrète. Il semble en effet que, parmi les 45 000 emplois dont vous avez
annoncé la création pour faire face à la réduction du temps de travail dans le
secteur hospitalier public, une bonne part - de mémoire, environ 8 000 -
devrait être prise indirectement en charge par les départements.
Pourriez-vous, monsieur le ministre, nous apporter des éclaircissements sur
cet autre transfert de charges ?
(Applaudissements sur les travées du RPR et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué à la santé.
Monsieur le rapporteur spécial, je vous
remercie de la clarté de vos questions... et de vos critiques !
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Cela permet un dialogue direct !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
En effet ! Je vais donc tenter de vous répondre
directement !
S'agissant tout d'abord de la concomitance de la hausse des dépenses liées aux
minima sociaux et de la réduction du chômage, je vous sais gré, monsieur le
rapporteur spécial, d'avoir reconnu que, malgré un infléchissement de la courbe
sur les six derniers mois, le nombre des demandeurs d'emploi était en recul
depuis quelques années. Si je déplore comme vous l'augmentation persistante des
dépenses consacrées aux minima sociaux, dont l'existence est nécessaire,
celle-ci ne sera pas, à la différence de ce qui avait été constaté pour les
précédents exercices, la cause principale de la progression des crédits du
ministère de l'emploi et de la solidarité.
Cela étant, l'écart se creuse-t-il, dans notre pays, entre ceux qui sont à
l'écart du progrès de la société et ceux qui bénéficient de cette évolution
générale et y contribuent ? Je le crois, monsieur le rapporteur spécial, et
cela peut donc expliquer la hausse des dépenses liées aux minima sociaux, qui
connaît d'ailleurs un ralentissement. Ce dernier a permis au Gouvernement de
dégager des marges de manoeuvre pour élaborer ou poursuivre l'application
d'autres politiques, en particulier les programmes de santé publique, dont la
dotation, vous l'avez souligné, progresse de près de 60 %.
En outre, le nombre des bénéficiaires du RMI a baissé en métropole depuis plus
d'un an, comme cela avait d'ailleurs été relevé, me semble-t-il, lors du
précédent débat budgétaire. La réduction de la dotation correspondante traduit
cette évolution, alors même que sont pris en compte la prévision de
revalorisation de l'allocation, la poursuite de l'alignement du montant du RMI
servi dans les départements d'outre-mer sur celui qui est en vigueur en
métropole et l'allongement de un à deux trimestres de la période de cumul
autorisé du minimum avec les revenus d'activité, dans l'optique du programme de
lutte contre les exclusions.
En ce qui concerne l'augmentation de l'allocation aux adultes handicapés, elle
reflète notre souci commun de ces personnes, dont vous avez d'ailleurs
abondamment parlé, monsieur le rapporteur spécial.
Des progrès sont certainement nécessaires dans la gestion et le contrôle des
mécanismes d'attribution au sein des commissions techniques d'orientation et de
reclassement professionnel, les COTOREP.
A cet égard, lors du débat à l'Assemblée nationale, nous avons annoncé un
important processus de rénovation de ces commissions, qui prendra en compte
plusieurs des recommandations figurant dans le rapport établi par la mission
d'évaluation.
S'agissant toujours des minima sociaux, le financement de la couverture
maladie universelle est-il une dépense excessive ou nécessaire ? A l'époque où
nous avons décidé de créer la CMU, il existait des aides médicales dont le
montant était variable et qui relevaient des collectivités locales, notamment
des villes.
M. Jean Chérioux.
Non, des départements !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Des départements, oui, mais des villes aussi.
Permettez-moi de vous rappeler, monsieur Chérioux, que la carte santé était un
dispositif mis en place par les villes.
M. Jean Chérioux.
Non, il relevait des départements !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Par conséquent, l'instauration de la couverture
maladie universelle, qui a bien entendu coûté très cher, au titre d'un autre
budget, était-elle une bonne initiative ?
Je pense pour ma part que cette mesure représente un progrès. Le seul fait
d'avoir été amené à la prendre démontre que certains de nos concitoyens
éprouvent de grandes difficultés à accéder aux services de santé, tout n'étant
d'ailleurs pas réglé à cet égard. Pourtant, nous disposions d'un système
d'assurance-maladie que beaucoup nous enviaient ; mais cela n'était pas
suffisant...
En effet, quand on commence, dans ce pays, à « dériver », à s'écarter du
mouvement général de la société qui, je le crois tout de même, nous procure à
tous davantage de bien-être, les conséquences sont très graves et le décalage
avec le reste de la population s'accroît très vite. Ce constat explique
l'effort que nous avons consenti.
M. Alain Joyandet,
rapporteur spécial.
Monsieur le ministre, me permettez-vous de vous
interrompre ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué
Je vous en prie, monsieur le rapporteur spécial.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur spécial, avec l'autorisation de M. le
ministre.
M. Alain Joyandet,
rapporteur spécial.
S'agissant de ce thème essentiel des minima sociaux,
monsieur le ministre, je ne remets pas en cause, pour ma part, le fait que nous
devions faire preuve de solidarité à l'égard de nos concitoyens les plus
démunis : là n'est pas la question.
La question est de savoir pourquoi, en période de croissance et d'amélioration
de la situation de l'emploi, les dépenses consacrées aux minima sociaux
continuent d'être aussi élevées. Ce paradoxe est au coeur du débat budgétaire
concernant le ministère de l'emploi et de la solidarité.
En effet, je crois que l'on ne s'attaque pas aux racines du mal. Que
constate-t-on ? Lorsque des emplois sont créés, les personnes immédiatement «
employables », comme on dit, sont embauchées...
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Oui !
M. Alain Joyandet,
rapporteur spécial.
... et celles qui se trouvent au bord de la route y
restent. C'est ainsi que l'on dénombre simultanément 2,3 millions de chômeurs
et 800 000 offres d'emploi non satisfaites.
Or il me semble qu'il serait préférable que les crédits très importants
alloués à la solidarité soient utilisés pour s'attaquer aux racines du mal,
c'est-à-dire redéployés en faveur de l'insertion par l'emploi et par la
formation. Cela nous ramène presque à la discussion du précédent budget, mais
ce point est à mon sens très important.
Cette question doit être posée, car dépenser autant d'argent sans réussir à
réinsérer nos concitoyens les plus éloignés de l'emploi est désolant.
Devons-nous nous contenter de leur distribuer des allocations, que ce soit au
titre du RMI ou de la CMU ? Je voulais, monsieur le ministre, attirer votre
attention sur le fait que nous devrions orienter notre action au profit de ceux
qui en ont le plus besoin, en l'occurrence, s'agissant du domaine de l'emploi,
ceux qui sont dépourvus de formation et complètement à l'écart de la
société.
Nous devons concentrer les moyens sur cet objectif, car sinon le chômage
cessera de régresser. Notre pays continuera de compter 2 millions de chômeurs «
structurels », même si je n'aime pas ce terme, et, parallèlement, 1 million
d'offres d'emploi non satisfaites. La tâche du ministère de la solidarité et de
l'emploi est de parer à cette menace.
M. le président.
Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je ne souhaite pas faire preuve d'esprit de
contradiction à votre encontre, monsieur le rapporteur spécial, mais tous les
gouvernements ont tenté d'appliquer la recette que vous préconisez, et aucun,
jusqu'à présent, n'y est vraiment parvenu. J'ai l'impression de participer à un
jeu de rôles, si vous me permettez cette image !
Il serait bien entendu préférable que nous puissions insérer tout le monde par
le biais de l'emploi, mais ce n'est pas si simple ! Si cela l'était, nous
l'aurions fait depuis longtemps !
En ce qui concerne les minima sociaux, j'ai évoqué la régression du nombre des
bénéficiaires du RMI, mais j'aurais pu citer d'autres exemples d'une telle
évolution. A cet égard, vous ne souhaitez pas, bien sûr, une diminution des
dépenses liées à l'allocation aux adultes handicapés, même si la meilleure
façon d'aider ces personnes serait, je suis bien d'accord avec vous sur ce
point, de les insérer dans le monde du travail.
Sur ce plan, nous avons accompli des efforts considérables. Ainsi, nous avons
assorti d'un suivi individuel le programme de recherche d'emploi de l'ANPE et
nous avons accompagné pendant plus d'une année les publics concernés, en
particulier les jeunes, dans cette recherche d'emploi personnalisée. Les
résultats ont d'ailleurs suivi - vous le reconnaissez vous-même - puisque le
nombre de chômeurs a baissé de manière très importante, mais, pour les cas les
plus difficiles, nous ne sommes pas au bout de nos peines et vous le savez très
bien, monsieur le rapporteur spécial !
Cependant, au cours de ces six derniers mois où la courbe du chômage s'est
quelque peu redressée, les jeunes ont trouvé assez facilement des emplois, ce
qui signifie que l'impulsion que nous avons donnée continue de produire ses
effets. Je ne prétends pas que tout soit parfait, car il est certain qu'un
chômage important subsiste dans notre pays, en dépit de nos efforts. Si nous
établissons une comparaison avec d'autres pays à cet égard, nous pouvons
estimer que les progrès sont réels, même s'ils demeurent encore
insuffisants.
S'agissant maintenant du FIMHO, je rappelle, monsieur le rapporteur spécial,
qu'il a pour objet de financer des projets d'établissements publics et privés
sous dotation globale et de contribuer ainsi à l'adaptation de l'offre de soins
en soutenant les opérations d'investissement qui s'inscrivent dans des
objectifs régionaux d'amélioration, d'harmonisation et de modernisation de
l'offre : rapprochement entre plusieurs établissements de santé, modernisation
d'établissements qui s'engagent dans des activités diverses ou dans un
processus de modifications structurelles concernant notamment la psychiatrie ou
les urgences, y compris d'ailleurs dans le secteur privé.
Depuis trois ans, le FIMHO a ainsi permis d'engager 232 opérations de
recomposition de l'offre hospitalière, qui ne sont pas toutes achevées, car des
années de négociation sont parfois nécessaires pour trouver un accord entre les
diverses spécialités.
Quoi qu'il en soit, les différents acteurs du système de santé soulignaient la
nécessité d'une reprise de l'investissement en faveur du patrimoine
hospitalier. Sur quatre ans, le montant des autorisations de programme
affectées s'élèvera à 354 millions d'euros, soit 2 327 millions de francs,
permettant de financer 280 opérations, ce qui n'est pas rien ! La part des
crédits de paiement déjà délégués ne traduit aucunement la désuétude des
opérations envisagées, qui sont d'ailleurs pilotées par les agences régionales
de l'hospitalisation, les ARH. L'exécution des programmes est parfois un peu
lente : en 1998, elle a été tributaire, d'une part, des délais de mise en
oeuvre de la sélection des opérations, qui sont en voie de réduction pour 2002,
et, d'autre part, des délais de préparation puis d'instruction des dossiers
techniques.
Enfin, le champ d'intervention du FIMHO a été élargi, à la suite de la
conclusion du protocole du 14 mars 2000, au financement des opérations internes
d'investissement hospitalier, ce qui a empêché l'affectation des autorisations
de programme avant la fin de l'année. Dans ces conditions, le délai
d'affectation entraîne évidemment des répercussions sur le délai de délégation,
donc sur l'engagement et le déroulement des travaux.
S'agissant du FIMHO 2000, le Gouvernement a décidé d'accélérer les
notifications de programmes, qui seront connues des agences régionales avant la
fin du premier trimestre de 2002. Ainsi, en ajoutant près de 100 millions
d'euros à l'occasion du collectif de printemps de 2000 et en décidant, à la
suite de l'adoption d'un amendement à l'Assemblée nationale en première
lecture, d'augmenter encore de 152 millions d'euros les crédits, le
Gouvernement manifeste clairement sa volonté de poursuivre la mise en oeuvre de
cette politique en 2002.
A propos du protocole hospitalier et du FIMHO, je voudrais indiquer au passage
que seulement deux manifestations se sont déroulées aujourd'hui devant mon
ministère.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Seulement deux ? (
Sourires.)
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Vous me reprochez - en termes très mesurés, il est
vrai, monsieur le rapporteur spécial, et je vous en remercie - à la fois de
dépenser trop et de ne pas dépenser suffisamment. Il faudrait savoir !
M. Alain Joyandet,
rapporteur spécial.
Je n'ai pas dit que vous ne dépensez pas suffisamment
!
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour la
solidarité.
Il faut dépenser mieux !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Si je le pouvais, je dépenserais beaucoup plus encore
!
En ce qui concerne le plan cancer, j'y ai fait allusion hier à l'Institut
Gustave-Roussy, à l'occasion d'une visite assez agitée. En effet, on peut
proposer un plan cancer sans que cela satisfasse quiconque pour autant !
En outre, j'ai rencontré ce matin pour la première fois les spécialistes du
cancer de la prostate.
Mme Marie-Claude Beaudeau.
Tournez-vous vers ces messieurs, monsieur le ministre ! (
Rires.)
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je me suis également intéressé au cancer du sein et au
cancer du col de l'utérus, madame Beaudeau, et j'en suis assez fier. Cependant,
ce n'est bien sûr jamais assez.
S'agissant du cancer de la prostate, nous allons élaborer un plan, dont
l'exécution sera coûteuse. J'ai décidé de prendre quand même cette initiative -
j'ignore si ce sera en janvier ou en février - parce que c'est nécessaire. Mais
comment financera-t-on ce plan ? Les chiffres de la mortalité due au cancer que
vous avez avancés sont proches de la vérité, monsieur le rapporteur spécial. On
compte 750 000 cancéreux en France et nous devons bien entendu lutter contre
cette affection, c'est-à-dire mettre un plan en oeuvre, comme cela a été fait
pour le cancer du sein sur l'ensemble du territoire et comme cela le sera,
l'année prochaine, pour les cancers colorectaux, dans une dizaine de
départements.
M. le président.
Veuillez conclure, monsieur le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je ne serai plus très long, monsieur le président, mais
la question est d'importance. Dès que je commence à dire des choses
intéressantes, on veut m'interrompre !
(Rires.)
De tels plans coûtent horriblement cher, mais le ministre grec de la santé m'a
annoncé ce matin que le modèle français était adopté en Grèce, où seront mises
en place des agences de santé et des agences régionales de l'hospitalisation, à
l'imitation de la réforme que nous avons entreprise.
M. Alain Joyandet,
rapporteur spécial.
C'est l'organisation mise en place par M. Juppé, cela
!
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
C'est une organisation que nous avons bien améliorée,
sans l'avoir entièrement corrigée. Mais nous l'avons bien améliorée !
(Nouveaux rires.)
Ce matin, le ministre britannique Alan Milburn a demandé à la France
d'admettre les malades en provenance de son pays, dont le voyage aller et
retour sera désormais remboursé. Notre système de santé est formidable, même
s'il ne sera jamais suffisant. Voilà quelques années, nous étions limités par
la technique, en particulier dans le domaine du cancer. Si j'avais le temps, je
vous raconterais l'histoire du cancer de la prostate, pour lequel les choses
ont traîné pendant trois ou quatre années car on avait seulement une vision
chirurgicale, qui était fausse, je crois.
Aujourd'hui, nous sommes limités non par la technique mais par les finances.
Les dépenses de santé, qui ne se limitent pas seulement aux 722 millions de
francs de l'assurance-maladie, s'élèvent à 1 000 milliards de francs par an.
C'est beaucoup et ce n'est pas assez. Je veux bien que l'on harmonise.
Cependant, je voudrais que les Français sachent que, à chaque fois, entre
l'offre et la demande, il faut procéder à un ajustement. Il convient de pouvoir
le faire presque automatiquement dès lors que - et nous le ferons en juin au
cours d'un débat de santé publique - les lignes de santé publiques seront
adoptées. Trois mois après, on parlera des finances. Peut-être alors
pourrons-nous financer.
Pardonnez-moi de ne pas avoir répondu aux autres questions qui m'ont été
posées.
M. le président.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis dans l'obligation d'essayer
de faire respecter une règle du jeu qui avait été fixée pour assurer la
fluidité du débat budgétaire. J'en suis conscient, cela représente des
inconvénients et peut conduire notamment un ministre ou un rapporteur à
interrompre son propos alors qu'il livre un certain nombre d'informations à
notre assemblée.
Je m'efforce de faire la part des choses, sachant que, lors des treize
réponses que vous pourrez encore apporter, monsieur le ministre, vous aurez
l'occasion de fournir les compléments d'information que cet hémicycle
attend.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Alain Lambert,
président de la commission des finances.
Monsieur le président, vous
faites très bien la part des choses.
Je veux remercier M. le ministre d'avoir accepté de participer à la discussion
rénovée de ces fascicules budgétaires et je tiens à mon tour à le rassurer : le
nombre de questions est tel qu'il pourra apporter des précisions
supplémentaires sur les points qu'il a déjà évoqués.
Monsieur le ministre, vous vous prêtez de bonne grâce à ce débat et c'est donc
très bien parti. Je tenais à le préciser pour l'ensemble des intervenants.
M. le président.
Je note avec satisfaction les circonstances atténuantes que vous voulez bien
accorder aux uns et aux autres, monsieur le président Lambert !
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Paul Blanc, rapporteur pour
avis.
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales pour la
solidarité.
Monsieur le ministre, nous avons en effet engagé un dialogue
et nous souhaiterions tous, en particulier les membres de la commission des
affaires sociales, qu'il se poursuive. Pour ma part, j'ai envie de vous poser
des questions qui se rapportent directement à la santé mais que je n'avais pas
prévu d'aborder dans mon propos. Ainsi, monsieur le ministre, la situation dans
laquelle se trouve aujourd'hui l'imagerie médicale en France vous paraît-elle
satisfaisante ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Non !
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Dans ce domaine, notre pays se classe en effet
avant-dernier devant la Turquie. Je n'en dirai pas davantage car ce point sera
sans doute évoqué par un certain nombre d'orateurs d'ici à la fin de la
discussion.
Pour examiner les crédits relatifs à la solidarité pour 2002, la commission
des affaires sociales a adopté la grille d'analyse que notre collègue Jean
Chérioux avait utilisée depuis 1997. Je tiens d'ailleurs à le remercier très
chaleureusement de m'avoir fait confiance pour poursuivre le chemin qu'il a
tracé depuis cinq ans.
Face à l'immensité des besoins dans les domaines de la lutte contre les
exclusions et de la solidarité envers les personnes âgées ou handicapées, la
question est non pas de savoir si ce budget permet de dépenser plus, mais de
contrôler si le ministère se donne les moyens de dépenser mieux.
Une fois de plus, la commission des affaires sociales a constaté que ce budget
se caractérisait par un certain attentisme et ne répondait pas aux difficultés
à venir. C'est pourquoi, je le dis très clairement, elle a émis un avis
défavorable sur les crédits relatifs à la solidarité pour 2002.
Concernant le volet relatif à la lutte contre les exclusions, il est vrai que,
cette année, une économie nette de 470 millions de francs a pu être réalisée
sur le revenu minimum d'insertion - RMI - grâce à une conjoncture plus
favorable qui a permis une baisse du chômage de longue durée, vous l'avez dit,
monsieur le ministre. Toutefois, cette économie paraît encore fragile au regard
des sommes globalement en jeu car le RMI représente au total une dépense de
près de 46 milliards de francs. L'économie annoncée est d'autant plus
incertaine que nous savons déjà que la prime de fin d'année, qui n'est pas
inscrite dans ce budget, mais qui a pourtant été confirmée par le Premier
ministre avant-hier, représentera près de 2 milliards de francs de dépenses
nouvelles.
S'agissant de la couverture maladie universelle, on ne peut que s'étonner que
le Gouvernement table sur une économie de 450 millions de francs en 2002 sur ce
dispositif alors que, on le sait, la question de l'effet de seuil pour les
personnes titulaires d'un minimum social, tel que le minimum vieillesse ou
l'allocation aux adultes handicapés, qui dépasse d'à peine plus de cinquante
francs le seuil pour obtenir la couverture complémentaire, n'est toujours pas
résolue.
Enfin, les marges de manoeuvre qui sont apparues semblent minces au regard de
l'explosion des besoins constatée depuis deux ans en matière d'hébergement
d'urgence des personnes étrangères en situation précaire.
Nous avons pris acte que le Gouvernement tentait enfin de répondre à cette
question en prévoyant le financement de places nouvelles en centres d'accueil
et d'hébergement d'urgence pour demandeurs d'asile. Toutefois, on peut
s'étonner que les sommes consacrées à ce poste soient près de cinq fois plus
importantes que celles qui sont réservées aux centres d'hébergement et de
réinsertion d'urgence traditionnels, qui sont pourtant confrontés au même
problème, et donc à des risques de saturation depuis deux ans. Dernièrement,
des reportages télévisés ont montré combien ces centres rencontrent des
difficultés.
Ma première question est la suivante : dans la mesure où les personnes
étrangères en situation précaire actuellement hébergées en CHRS - centre
d'hébergement et de réinsertion sociale - n'iront pas, à l'évidence, rejoindre
massivement les centres d'accueil spécifiques pour demandeurs d'asile, et ce
pour des raisons pratiques ou juridiques, est-il envisagé en cours d'année de
permettre des virements internes de crédits permettant de répondre aux besoins
des CHRS à partir des sommes exclusivement réservées aux demandeurs d'asile
?
S'agissant de l'action relative aux personnes handicapées, nous avons pris
acte de la poursuite du plan triennal d'action décidé en janvier 2000, qui
vient conforter les crédits prévus au titre du plan précédent. Mais la mise en
place de crédits supplémentaires, permise par une conjoncture favorable, fait
l'impasse sur la question des dysfonctionnements des dispositifs actuels qui
semblent avoir atteint leurs limites. L'augmentation continue du nombre de
titulaires de l'allocation aux adultes handicapés est symptomatique des
dysfonctionnements des COTOREP qui ont largement ouvert le bénéfice de
l'allocation à des personnes considérées comme affectées d'un handicap social
ou encore à des victimes de troubles psychiques mal déterminés.
Vous avez fait allusion, monsieur le ministre, au fonctionnement des COTOREP.
Elles aggravent les incapacités individuelles en privilégiant l'assistance, au
lieu d'inciter à l'autonomie et à l'intégration. Elles ne peuvent prendre que
des décisions binaires sans pouvoir assurer des modulations entre les
différentes catégories de prises en charge ou permettre des aller et retour
entre les divers modes d'accueil en fonction des différents âges de la vie.
Enfin, leurs décisions ne sont nullement coordonnées et les COTOREP sont dans
l'incapacité d'intégrer les conséquences financières des décisions qu'elles
prennent.
Les COTOREP devraient être articulées dans le cadre d'un réseau homogène, sous
l'autorité d'une agence unique assurant un vrai rôle de coordination. Il
s'agirait notamment d'assurer une meilleure adéquation entre les besoins des
personnes handicapées à prendre en charge et les places disponibles dans les
institutions sociales et médico-sociales qui connaissent des phénomènes de
saturation. Ces phénomènes sont aggravés par des dysfonctionnements comme celui
que j'ai constaté et qui a conduit à créer un centre d'aide par le travail pour
adultes autistes dont toutes les places sont loin d'être occupées. Autorisation
: vingt places, occupation : cinq places !
Ma deuxième question est la suivante : dans le cadre de la réforme de la loi
d'orientation du 30 juin 1975 relative aux personnes handicapées, dont la
préparation est annoncée - c'est la deuxième loi -, quelles sont les
orientations du Gouvernement en matière de réforme des COTOREP ?
Monsieur le ministre, je pourrais vous citer bien d'autres exemples de
dysfonctionnements de la COTOREP. Tout récemment encore, j'ai eu à en connaître
un tout à fait gravissime que j'aurai peut-être l'occasion de vous exposer ici
même.
Concernant toujours les personnes handicapées, l'une des clés de la réussite
est de faciliter, pour ceux qui le peuvent, l'accès à la vie autonome. Pour
cela, il est important que les personnes handicapées puissent accéder à des
soins infirmiers à domicile. Outre le retard du projet de décret annoncé sur ce
dossier, on ne peut que regretter, comme le font les associations de personnes
handicapées, que les mesures envisagées ne prennent pas suffisamment en compte
le droit à compensation que réclament les personnes handicapées.
De toute façon, la pénurie des infirmières exerçant à titre libéral, qui sera
encore aggravée par les récentes mesures prises en matière de réduction du
temps de travail dans le secteur hospitalier, rend très difficile la vie des
personnes handicapées, en particulier en milieu rural. Au-delà de la mise en
place des sites pour la vie autonome, les personnes handicapées ont besoin d'un
accès plus facile à des soins infirmiers sur tout le territoire.
D'où ma troisième question : quelles mesures entendez-vous prendre pour
développer les soins infirmiers à domicile en faveur des personnes handicapées
et, surtout, quels moyens financiers et humains entendez-vous mettre en place
pour que le nouveau décret ne soit pas une simple coquille vide ?
Enfin, s'agissant du secteur social et médico-social pris en charge notamment
par les départements, tous les observateurs ont le sentiment que les années
2000 et 2001 vont marquer la fin d'un cycle de modération des dépenses, et
notre collègue M. Joyandet y a fait allusion tout à l'heure. A partir de 2002,
sous les effets conjugués de la mise en oeuvre de la réduction du temps de
travail et de la mise en place de l'allocation personnalisée d'autonomie, les
départements devront faire face à de fortes augmentations de dépenses. Ces
dépenses nouvelles ne sont pas contestables quand elles sont utiles. En
revanche, il est regrettable que, par imprévoyance, le Gouvernement prenne le
risque d'aggraver une situation déjà tendue. A cet égard, on ne peut que
regretter que ne soit toujours pas publié le décret relatif aux heures
d'équivalence dans les chambres de veille alors même que la jurisprudence de la
Cour de cassation tend à mettre à la charge des établissements des dépenses
lourdes sur une base rétroactive.
Les services extérieurs de la direction du travail ne font qu'aggraver les
choses lorsque des directeurs d'établissement se voient dresser des
procès-verbaux alors même qu'aucune mesure n'est prise sur le plan
réglementaire pour clarifier la situation.
Dans ce contexte, la décision prise dans le projet de loi de modernisation
sociale de majorer le taux de l'indemnité de précarité charge encore la barque,
si vous me permettez cette expression, des établissements qui ont
traditionnellement recours à de nombreux contrats à durée déterminée.
Enfin, les conditions dans lesquelles la réduction du temps de travail est
mise en oeuvre dans le secteur hospitalier remettent en cause la perspective de
la parité entre le médico-social et le secteur sanitaire, faisant courir le
risque d'une remise en cause globale des accords qui avaient été conclus dans
le secteur au cours de l'année 2000.
J'en viens à ma dernière question. Un amendement au projet de loi rénovant
l'action sociale et médico-sociale offre une chance au Gouvernement d'ouvrir la
voie d'un véritable dialogue sur les conditions dans lesquelles sont examinés
les accords collectifs devant la commission nationale d'agrément. Le
Gouvernement devrait désormais présenter des orientations sur les évolutions de
masse salariale pour l'année en cours. Pouvez-vous nous assurer, monsieur le
ministre, que vous donnerez des instructions pour que le rapport qui sera
présenté devant la commission nationale ne soit pas simplement un effet
d'affichage mais réponde aux souhaits de tous les intervenants du secteur de
disposer d'un état des lieux très précis sur l'ensemble des dépenses salariales
à venir dans le secteur social et médico-social ?
Je vous remercie des réponses que vous apporterez à ces différentes questions.
(Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des
Républicains et Indépendants.)
M. le président.
La parole est à M. Barbier, rapporteur pour avis.
M. Gilbert Barbier,
rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales, pour la
santé.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues,
la commission des affaires sociales a émis un avis défavorable sur les crédits
de la santé pour 2002.
Cette position se fonde principalement sur quatre griefs, qui me donneront
l'occasion de poser autant de questions.
Premier grief, le financement des formations médicales et paramédicales se
caractérise cette année par un désengagement financier de l'Etat. Les crédits
consacrés à cette formation diminuent ainsi de 40 millions d'euros, soit une
baisse de 30 %.
En réalité, cette diminution apparente cache deux opérations de
débudgétisation massive aux dépens, une nouvelle fois, de
l'assurance-maladie.
Ainsi, à compter de 2002, les dépenses des écoles de formation relevant d'un
établissement public de santé et les dépenses liées aux stages pratiques des
résidents seront supportées par l'assurance-maladie, via la dotation globale
hospitalière.
Ces deux transferts représentent, au total, 61 millions d'euros - soit 400
millions de francs - de dépenses nouvelles pour l'assurance-maladie.
Pratique, hélas !, récurrente, la débudgétisation atteint cette année un
niveau sans précédent, puisqu'elle concerne plus du quart - 27 % - du montant
de l'agrégat « offre de soins » en 2001.
J'aimerais, par conséquent, monsieur le ministre - et ce sera ma première
question - que vous nous expliquiez les raisons qui justifient, à vos yeux,
cette débudgétisation.
Le deuxième grief que je souhaite soulever a déjà été évoqué par M. le
rapporteur spécial. Or, monsieur le ministre, vous avez apporté à sa question
une réponse qui ne me paraît pas tout à fait claire. C'est pourquoi je reviens
sur ce point : l'aide aux investissements hospitaliers relève, en 2002, de la
gesticulation politique.
Les crédits de la santé ont aussi pour vocation de financer le fonds d'aide à
l'adaptation des établissements hospitaliers, créé en 1998 et plus communément
appelé fonds d'investissement pour la modernisation des hôpitaux, ou FIMHO.
Ce fonds se caractérise par une faible utilisation de ses crédits. Voilà
quelques minutes, vous nous avez expliqué qu'en 1998 il s'agissait d'obtenir
des délais pour opérer une sélection entre les opérations, qu'en 1999 des
raisons techniques d'affectation justifiaient la non-utilisation des fonds.
Pour 2000, quelles sont ces raisons ? En effet, sur les 2 milliards de francs
qui ont été ouverts sous forme d'autorisations de programme de 1998 à 2001,
seuls 282 millions de francs ont été effectivement dépensés sur la même
période, soit 14 % des crédits votés par le Parlement.
L'arrêté du 21 mai 2001 a annulé 50 millions de francs d'autorisation de
programme et 25 millions de francs de crédits de paiement sur les crédits du
FIMHO, témoignant, en quelque sorte, du « succès » rencontré par le fonds.
Il convient, dès lors, de ne pas se laisser abuser par l'affichage
d'autorisations de programme très importantes qui, comme toutes les «
autorisations de programme dormantes », risquent de devenir, à brève échéance,
des « autorisations de programme annulées ».
Le projet de loi de finances 2002 inscrivait, au titre du FIMHO, 300 millions
de francs, mais zéro franc pour les crédits de paiement. Confronté à la «
grogne » d'une partie de sa majorité plurielle, qui menaçait de ne pas voter le
projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Gouvernement a été
contraint de mobiliser en urgence des moyens supplémentaires pour les
établissements hospitaliers. Se refusant à augmenter la dotation hospitalière
incluse dans l'ONDAM 2002, il a été obligé de recourir à des expédients en
mobilisant les différents fonds hospitaliers existants.
Le Gouvernement avait, à ce titre, promis 1 milliard de francs supplémentaire
pour le FIMHO. En réalité, cette promesse s'est traduite par l'adoption, à
l'Assemblée nationale, d'un amendement du Gouvernement majorant les
autorisations de programme à ce titre de 1 milliard de francs et les crédits de
paiement de seulement 100 millions de francs, soit 10 % seulement.
A l'évidence, le Gouvernement n'a pas les moyens de sa politique : il
n'affiche que 198 millions d'euros, soit 1,3 milliard de francs - la somme
paraît plus importante en francs
(Sourires)
- pour l'hôpital. Pourtant,
chacun en convient, les besoins en investissements hospitaliers sont
considérables, comme en témoignent les retards que connaît notre pays en
matière d'imagerie médicale.
Ma deuxième question, monsieur le ministre, est donc simple : comment
pouvez-vous expliquer, plus précisément que vous ne l'avez fait tout à l'heure,
pourquoi le Gouvernement n'a inscrit, pour le FIMHO, que 100 millions de francs
en crédits de paiement, alors qu'il affiche, parallèlement, 1,3 milliard de
francs d'autorisations de programme ?
Troisième grief, les crédits nécessaires au remplacement des personnels
hospitaliers semblent avoir été une nouvelle fois oubliés. Vous n'avez pas eu
le temps de répondre à ce sujet à M. le rapporteur spécial. Peut-être le
trouverez-vous tout à l'heure !
Le protocole signé le 14 mars 2000 prévoyait, au titre des années 2000, 2001
et 2002, des crédits à hauteur de 2 milliards de francs chaque année pour
financer les remplacements de personnels hospitaliers. Si ces crédits ont bien
été inscrits dans le collectif de juin 2000, rien de tel n'avait été prévu dans
le projet de loi de finances pour 2001.
La somme nécessaire est donc finalement inscrite dans le projet de collectif
pour 2001, qui vient d'être déposé au Parlement. Mais il sera trop tard pour la
répartir en 2001. Or les personnels sont en place et les établissements doivent
les payer, ce qui pose de graves problèmes de trésorerie aux gestionnaires
hospitaliers.
En outre, persistant dans cette méthode, qui, du point de vue comptable,
présente une certaine particularité, le Gouvernement n'a pas davantage inscrit
dans ce projet de loi de finances les 2 milliards de francs dus au titre de
l'année 2002. Une nouvelle fois, il faudra, en cours d'année, procéder par
régularisation.
Donc, monsieur le ministre, ma troisième question est la suivante : pour
quelle raison le Gouvernement a-t-il choisi de ne pas inscrire ces crédits en
loi de finances initiale pour 2002 ?
Enfin, monsieur le ministre, dernier grief : le projet de budget consacré à la
santé ne fait nullement mention du financement en 2002 du plan gouvernemental
dit « Biotox ».
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Ah ! Il est arrivé !
M. Gilbert Barbier,
rapporteur pour avis.
Si 90 millions de francs sont bien inscrits dans le
projet de collectif de 2001, qui vient d'être déposé au Parlement, aucun crédit
n'était, jusqu'à ces dernières minutes, prévu dans le présent projet de loi de
finances.
Le Gouvernement a, en réalité, choisi de faire supporter à
l'assurance-maladie, qui sera déficitaire, rappelons-le, de près de 13
milliards de francs en 2002, l'essentiel de la charge financière liée au
financement de ce plan. Il a ainsi fait adopter par l'Assemblée nationale un
amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002
prévoyant, à hauteur de 1,3 milliard de francs en 2001, le versement d'une
contribution de la caisse nationale de l'assurance-maladie des travailleurs
salariés au budget de l'Etat.
La commission des affaires sociales, monsieur le ministre, a, à cette
occasion, dénoncé la confusion de l'action publique, qui fait peser le poids de
la lutte contre le bioterrorisme sur la sécurité sociale. Elle a considéré,
pour sa part, que cette lutte constituait pour le Gouvernement l'occasion
unique d'affirmer l'existence d'un véritable budget de la santé publique
correspondant aux missions régaliennes de l'Etat et distinct de celui de
l'assurance-maladie.
Je voudrais, par conséquent, que vous nous expliquiez, monsieur le ministre -
c'est ma quatrième question -, pour quelle raison l'Etat a été incapable
d'assurer la prise en charge de cette mission régalienne que constitue le
financement d'un plan de lutte contre le bioterrorisme. Quelques crédits
semblent devoir être inscrits en toute dernière minute, mais ils sont bien loin
du 1,3 milliard de francs qui est mis à la charge de la Caisse nationale de
l'assurance-maladie.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de bien vouloir répondre à ces quatre
questions.
(Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'Union centriste
et du RPR.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je répondrai d'abord à M. Blanc sur les questions
relatives aux minima sociaux et aux COTOREP.
La baisse du nombre des bénéficiaires du RMI a permis au Gouvernement non
seulement de financer sans surcoût majeur l'amélioration du pouvoir d'achat de
nos concitoyens les plus démunis en métropole, mais aussi d'aligner, comme je
l'ai dit tout à l'heure, le montant du RMI dans les départements d'outre-mer
sur les montants servis en métropole et de mettre enfin un terme à une
inégalité majeure.
Ces revalorisations successives ont ainsi permis d'améliorer la situation des
bénéficiaires du RMI sans toutefois créer de « désincitation » à la reprise
d'un emploi, puisque le Gouvernement a revalorisé plus fortement le SMIC que
les minima sociaux : 4,05 % en juillet 2001, contre 2,2 % pour le RMI.
Vous vous réjouissez d'avoir voté un revenu minimum d'activité, le RMA,
tendant à faciliter l'insertion professionnelle des titulaires des minima
sociaux au sein des entreprises. Tel n'est pas la position prise par le
Gouvernement, qui a exprimé son avis très défavorable lors de l'examen de cette
proposition de loi.
Enfin, concernant le financement de l'allocation de parent isolé, l'API, je
constate que, depuis que cette allocation est financée par l'Etat, le
Gouvernement a eu le souci constant de favoriser l'insertion des parents isolés
dans la vie économique du pays.
Les mesures de cumul entre le revenu d'activité et certaines allocations,
prises dès la fin de l'année 1998 en application de la loi d'orientation
relative à la lutte contre les exclusions, ont permis de lever les obstacles
financiers à la reprise d'un emploi et ont, en effet, couvert les parents
isolés au même titre que les bénéficiaires du RMI et de l'allocation de
solidarité spécifique.
Les efforts du Gouvernement se sont ensuite poursuivis avec, d'une part, la
création de l'aide à la reprise d'activité des femmes, annoncée lors d'une
conférence de la famille en juin 2002, et, d'autre part, l'allongement de la
période de cumul intégral d'un trimestre à deux trimestres entre l'allocation
et le revenu issu de la reprise d'une activité, conformément aux engagements
pris dans le programme de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale.
Concernant vos incertitudes sur les économies prévues au titre de la CMU,
j'aurais voulu vous rassurer, mais je m'aperçois que vous n'avez pas posé de
question précise sur ce sujet. Je passe donc aux COTOREP.
Plusieurs des recommandations contenues dans le rapport de la mission
d'évaluation ont déjà été prises en compte. Des mesures de rénovation ont ainsi
été annoncées, notamment le 25 janvier 2001 et lors du débat budgétaire à
l'Assemblée nationale.
La définition d'une nouvelle architecture passe par le principe, qui sera
prochainement soumis à la concertation des partenaires, de la fusion des deux
sections des COTOREP, ainsi que, sur le plan national, par la mise en place
d'un comité de pilotage des directeurs d'administration centrale et, sur le
plan local, par le renforcement des liens entre les directions départementales
des affaires sanitaires et sociales, les DDASS, et les équipes des directions
départements du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, les
DDTEFP - grâce à des équipes d'animation conjointes et à des conventions
portant sur les moyens - et par le développement de contrats d'objectifs entre
l'administration centrale et les services déconcentrés.
Pour faciliter le travail en réseau, plusieurs mesures sont prévues, notamment
la création de postes de médecins coordonnateurs, et une circulaire sera
publiée sur la fonction médicale précisant le rôle de chacun et la prise en
compte de ses besoins dans l'élaboration d'un nouveau système d'information.
Concernant les personnels, diverses mesures sont prises - je pense aux actions
de formation pour les personnels administratifs et médicaux - et les
rémunérations des médecins ont été revalorisées.
Sur le plan des moyens, les efforts poursuivis pour doter les COTOREP d'une
gestion électronique des documents devraient - et ne n'était pas un luxe ! -
améliorer les conditions d'archivage.
Le plan de relogement et de réhabilitation des COTOREP, l'entretien et
l'équipement des locaux seront poursuivis en 2002.
Ce processus de rénovation devrait également conduire à mieux articuler
l'action de ces commissions avec les autres dispositifs concernant les
personnes handicapées et les personnes âgées et avec les mesures pour
l'emploi.
Il est vrai que nous avions songé à ériger les COTOREP en agences. Nous avons
toutefois choisi, monsieur Blanc, d'explorer les possibilités d'une
optimisation des ressources et des volontés qui existent au sein des services.
Il nous paraissait préférable, en effet, de ne pas changer l'institution mais
de rendre plus efficace la politique qui y est menée.
S'agissant de la prime de Noël pour les bénéficiaires du RMI, dont le principe
a été décidé, le Gouvernement n'en a pas encore fixé les modalités ; nous
sommes en train de les préparer. Je précise que la baisse des crédits affectés
au RMI devrait permettre, une fois les comptes consolidés, de dégager des
excédents au titre de la gestion de 2001.
J'en viens aux centres d'hébergement et de réadaptation sociale, les CHRS.
Je crois, monsieur le rapporteur, que l'heure n'est plus à faire des virements
internes entre la commission d'accès aux documents administratifs, la CADA, et
les CHRS. Il s'agit maintenant d'accroître les moyens affectés à ces deux types
de centres. C'est ce que nous faisons avec la création de 2 000 places de CADA
et de 500 places de CHRS. Je pense que le fonctionnement du dispositif
d'accueil d'urgence en sera amélioré.
S'agissant du contentieux sur les équivalences d'heures effectuées en chambre
de veille, je vous répondrai que les conditions juridiques de mise en oeuvre de
ce dispositif ne sont pas encore réunies à ce jour.
Les dispositions conventionnelles comportent des dispositifs d'équivalence qui
ne correspondent plus à la loi et que des tribunaux ont sanctionné en appel.
Aucun contentieux n'a complètement abouti à ce jour.
Toutefois, plusieurs associations condamnées sont aujourd'hui mises en demeure
de payer au requérant les heures réalisées, les décisions de justice étant
exécutoires.
En ce qui concerne la mise en conformité juridique du dispositif, un décret en
cours de signature doit conforter les dispositions conventionnelles et tarir le
contentieux.
En ce qui concerne les incidences financières des contentieux en cours pour
les associations, nous ferons un examen au cas par cas. Cet examen est déjà
engagé dans les services afin de remédier aux situations qui entraîneraient une
mise en cause sérieuse du fonctionnement des organismes concernés.
Monsieur Blanc, le décret étendant le champ des compétences du service de
soins infirmiers à domicile aux handicapés et permettant de moderniser le mode
de fonctionnement par le passage à la dotation globale va sortir avant la fin
de l'année ou au début de l'année prochaine.
Je pense que vous n'aurez pas à craindre que ce soit une coquille vide en
raison de la pénurie d'infirmières.
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Ah ça !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je ne nie pas, bien entendu, qu'il existe une pénurie
d'infirmiers dans un certain nombre d'endroits, mais le Gouvernement essaie d'y
remédier. Cette année le nombre des infirmiers en formation atteint 26 436.
C'est beaucoup plus que jamais !
Je suis convaincu que la réforme de l'ensemble du service de soins infirmiers
à domicile en fera un instrument attractif, capable de mobiliser les
professionnels et de répondre aux besoins des personnes âgées, désormais des
personnes handicapées, dans de meilleures conditions.
Je vous rappelle qu'un plan de création de 4 000 places de service de soins
infirmiers à domicile sur cinq ans a été adopté en 2001. Au demeurant, je ne
peux tout de même pas inciter les infirmiers à choisir cette voie s'ils ne le
souhaitent pas ! Il en va de même d'ailleurs, pour de nombreuses spécialités
dans les professions médicales.
Vous m'avez interrogé sur le plan d'installation des IRM. Certes, notre pays
n'en est pas suffisamment doté. Mais que voulez-vous que j'y fasse ? Que
j'invente l'argent ? C'est ce que j'ai fait finalement, contraint et forcé, en
ayant recours aux indices. Cette pratique n'avait jamais été mise en oeuvre.
Comme vous le savez, en vertu d'une décision centralisée, je devais choisir,
moi, le ministre, de façon très arbitraire entre les exigences, en général
aussi importantes et aussi fondées les unes que les autres, de nos différents
services.
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
En général, il pleut là où c'est mouillé !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Oui, parfois, mais en fait c'est chacun son tour ; ce
qui gomme les différences !
J'ai en main le plan des installations dans les différentes régions.
Evidemment, je ne peux vous en donner connaissance dans le détail.
Certes, nous manquons de scanners, d'IRM et d'appareils de radiothérapie. J'ai
chargé une commission de travailler sur le sujet. Avec elle, nous avons ouvert
les indices. Les radiologues et échographistes que j'ai reçus hier, au sujet de
l'affaire Perruche, ont exprimé leur satisfaction à propos de la manière dont
nous travaillons.
Après avoir examiné les indices dont nous disposerons, nous déterminerons les
appareils nécessaires selon les régions. Nous veillerons alors, évidemment, à
ce qu'ils soient fournis.
Il ne faut pas oublier en outre que 141 appareils supplémentaires d'IRM ont
été fournis en 2001, soit 50 % de plus que prévu, et que la plupart des pays
européens ont moins d'un appareil pour 143 habitants, excepté l'Allemagne et la
Finlande.
Une réflexion est menée à cet effet. J'espère que nous nous en tirerons à
notre avantage.
Je ne nie pas une seconde que nous soyons sous-équipés. Cependant, j'ai
constaté hier à Gustave-Roussy qu'un certain nombre d'équipements de pointe, de
scanners couplés avec IRM, étaient en fonctionnement. Ce n'est pas mal, mais
leur nombre est évidemment insuffisant par rapport aux besoins.
S'agissant des 2 milliards de francs attribués par le protocole hospitalier,
vous avez raison de dire qu'ils ne figurent pas dans le projet de loi de
finances ; ils seront inscrits dans le projet de loi de finances rectificative.
Il est de bonne gestion, m'a-t-on dit, qu'une mesure temporaire étalée sur
trois ans figure les trois années, en l'occurrence, dans les budgets 2000, 2001
et 2002.
MM. Alain Joyandet,
rapporteur spécial,
et Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Il ne figurent pas dans le projet de loi de
finances pour 2002 !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Oui, mais ils figureront dans la loi de finances
rectificative.
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Pour 2001 !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Oui, c'est le budget 2001 qui sera appliqué en 2002.
(Sourires.)
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
C'est de l'argent perçu en 2001 qui sera versé en
2002 !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Sur le plan Biotox, je ne partage pas du tout votre
sentiment, monsieur le rapporteur. Vous dites que c'est du devoir régalien de
l'Etat de doter le pays de ce dont il a besoin en la matière. Nous avons, en
l'occurrence, besoin d'antibiotiques, comme nous avons besoin de vaccins,
d'appareils de réanimation personnelle, etc.
Comme j'en ai fait la démonstration plusieurs fois, et je ne comprends pas que
vous ne soyez pas d'accord, il s'agit de médicaments. S'ils ne sont pas
utilisés en urgence, ce que j'espère bien entendu, ils seront employés pour
leur usage habituel. Nous n'en avions pas suffisamment. C'est pourquoi nous
avons décidé d'en commander pour près de 1 milliard de francs à deux firmes :
Aventis-Pasteur et Bayer.
Nous avons fait en sorte que nos stocks soient à flux tendus, et que les
médicaments concernés ne soient pas en voie de péremption.
Par conséquent, les médicaments seront utilisés quoi qu'il arrive.
Ces médicaments sont remboursés par l'assurance-maladie. Personne n'a protesté
quand la plus importante a été soumise à l'assurance-maladie. S'agissant
d'autres commandes, nous avons effectivement décidé qu'elles seraient à la
charge de l'Etat.
La commande la plus importante concernait bien les fluoroquinolones, pour un
milliard de francs. Si, comme je l'espère, nous n'utilisons pas tous ces
médicaments à l'occasion d'une attaque bioterroriste, nous les utiliserons en
temps voulu, de manière étalée, au cours des années.
Nous essayons d'opérer une mutualisation au sein de l'Europe. Nous avons même
rencontré des Américains, des Canadiens, etc., pour discuter d'un projet de
mutualisation de nos ressources qui pourraient être affectées à la lutte contre
la menace terroriste.
Je ne vois donc pas ce que vous pouvez trouver à redire.
Quand, au début, on a fait des réserves, ce que nous avons d'ailleurs
condamnés, vous n'avez pas protesté, monsieur Barbier. Ensuite, les médicaments
ont été achetés en pharmacie et l'assurance-maladie a remboursé. Or, il
s'agissait des mêmes médicaments, les fluoroquinolones. Qu'y a-t-il donc de
nouveau ? Rien. Si nous n'en n'avons pas besoin, évidemment, j'en serai très
content.
M. Gilbert Barbier,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Barbier, rapporteur pour avis.
M. Gilbert Barbier,
rapporteur pour avis.
Monsieur le ministre, il ne faut pas confondre les
médicaments à caractère stratégique, qui seront éventuellement stockés dans les
hôpitaux militaires ou ailleurs, et les médicaments qui seront à la charge de
l'assurance-maladie.
En tout cas, il n'est pas raisonnable de laisser les assurés sociaux supporter
cette charge.
Il s'agit de faire face à un danger stratégique pour notre pays, ce qui,
effectivement, relève des obligations régaliennes de l'Etat. Autant il est
judicieux de prévoir une éventuelle fabrication et un éventuel stockage de ces
produits, autant il ne me semble pas normal d'obliger les assurés sociaux à les
payer.
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Paul Blanc, rapporteur pour avis.
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Je souhaiterais très brièvement, monsieur le
président, revenir sur deux points concernant les COTOREP.
Je pense que l'idée de l'agence serait une bonne solution. En tout cas, il ne
me semble pas possible de pouvoir continuer ainsi. Il faut dépasser le pilotage
à vue pour parvenir à une véritable coordination. Aujourd'hui, nous voyons trop
de COTOREP fonctionner alternativement avec une présidence « travail » et une
présidence « DASS ». Finalement, les uns et les autres se renvoient la
balle.
Mon second point concerne le service de soins infirmiers à domicile et la
pénurie d'infirmières. A ce propos, je m'attendais à ce que vous me répondiez
que, depuis le temps, on aurait pu ouvrir davantage les portes des écoles
d'infirmières.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
On les a ouvertes !
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Oui, mais depuis cette année seulement et,
entre-temps, on a augmenté la durée de formation d'un an !
Je vous rappelle que gouverner, c'est prévoir. Or vous êtes au gouvernement
depuis 1997. Il aurait fallu prévoir que l'on manquerait d'infirmières. Je
regrette que les portes n'aient pas été ouvertes plus tôt et que, avec
l'application des 35 heures chères à M. Chaboux, on aggrave encore la pénurie
d'infirmières.
La question qui se pose aujourd'hui est celle des infirmiers à domicile et des
infirmiers libéraux qui ne peuvent plus travailler parce qu'ils ont atteint
leur quota. Ils se trouvent devant le dilemme suivant : ou continuer à
prodiguer leurs soins gratuitement ou tout arrêter parce qu'ils ont atteint
leur quota.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
S'agissant des quotas, d'abord, il n'y a pas un
syndicat qui nous dise qu'il faut les relever.
Cela dit, je n'ignore pas que, dans certains endroits, parce qu'il faut bien
répondre à la demande de soins, des dépassements se produisent. Mais cela ne
concerne qu'une infime minorité : 5 %, 6 % ou 7 %. Evidemment, ceux-là sont
dans l'embarras !
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Surtout en milieu rural !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Absolument !
Quoi qu'il en soit, il nous faut remédier à cette situation. Mais ce n'est pas
simple ! Surtout quand les syndicats vous expliquent que 93 % des gens sont
contents, qu'il n'y a pas de dépassement, et qu'ils vous prouvent qu'il faut
faire je ne sais combien d'heures supplémentaires pour dépasser le quota
journalier. C'est donc très compliqué !
Il reste que, en milieu rural, c'est vrai, il peut y avoir des soins qui ne
sont pas assurés.
En revanche, monsieur Blanc, vous ne pouvez pas me dire que nous aurions pu
ouvrir plus largement l'accès aux écoles et former des infirmiers plus tôt.
Force m'est tout de même de vous rappeler que le gouvernement précédent a fermé
les écoles d'infirmières, et que non seulement il n'a pas créé de nouveaux
postes mais qu'il en a supprimé 200 !
Moi, en 1998, en arrivant au Gouvernement, j'ai obtenu 1 000 postes ; j'en
avais demandé beaucoup plus, mais c'était déjà ça ! En 1999, j'en ai obtenu 1
200, et plus de 8 000 en 2000. Alors ne dites pas que nous n'avons rien prévu !
Certes, ce n'est pas assez, mais à chaque fois on m'a répondu que cela
entraînait des dépenses supplémentaires.
Aujourd'hui, nous formons 26 436 infirmiers ! Les écoles sont pleines à 100 %
! On pourrait même en ouvrir d'autres !
Concernant les COTOREP, la fusion de deux secteurs, c'est-à-dire le
reclassement professionnel et l'évaluation médico-sociale, permettra de
commencer à opérer le début de coordination que, comme nous, vous appelez de
vos voeux.
Par ailleurs, je ne suis pas du tout d'accord avec votre analyse concernant
les fluoroquinolones. Si nous avions procédé autrement, les gens se seraient
précipités dans les pharmacies pour acheter des fluoroquinolones avec une
ordonnance délivrée par leur médecin habituel. Et qui aurait remboursé ?
L'assurance-maladie ! C'est précisément ce que nous avons voulu éviter.
Qu'aurait-il fallu faire ? Fallait-il mettre cela au compte des dépenses
militaires alors qu'on ne savait même pas s'il existait vraiment une menace
toxique ? Et même si la menace avait été avérée, les personnes atteintes
seraient allées à l'hôpital ! Est-ce qu'on aurait fait une comptabilité à part
sous prétexte que les personnes avaient été contaminées par une certaine
bactérie ? Allons donc ! On ne peut pas soutenir cette thèse ! Ce sont des
malades, et ils sont pris en charge par l'hôpital, un point c'est tout ! Les
autres dépenses sont prises en charge par le budget. Si nous n'avions pas prévu
les inscriptions nécessaires, vous n'auriez pas manqué de nous le reprocher
!
M. Gilbert Barbier,
rapporteur pour avis.
Nous sommes tous les deux médecins et nous savons
bien que les médecins ne prescrivent pas comme ça ! Ils sont raisonnables !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Eh bien, pas tant que cela, figurez-vous ! La
consommation des fluoroquinolones à l'automne 2000 était de 10 000 boîtes par
semaine. Dès que les premiers cas aux Etats-Unis ont été connus, pendant deux
semaines, on est passé brutalement à 100 000 boîtes par semaine ! Et il est
évident que les médecins, sans doute sous la pression des patients, ont
prescrit, ce que l'on ne peut d'ailleurs pas vraiment leur reprocher. En tout
cas, il fallait bien faire quelque chose !
M. le président.
Mes chers collègues, nous passons maintenant aux questions.
La parole est à M. Godefroy.
M. Jean-Pierre Godefroy.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, alors que
l'Organisation mondiale de la santé classe le système de santé français au
premier rang, le Gouvernement réaffirme dans le budget pour 2002 la place
majeure qu'il accorde à la politique de santé.
Les moyens des agences régionales de l'hospitalisation, les ARH, qui
continuent d'être renforcés, illustrent le rôle prépondérant qu'elles exercent,
au niveau régional, à la fois dans l'élaboration et dans la mise en oeuvre de
la politique de santé ; ce sont les ARH qui se verront confier la gestion du
programme de financement des équipements coûteux décidé par le Gouvernement
pour combler le retard de la France en matière, notamment, d'IRM et de
scanners.
L'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé, l'ANAES, qui est
engagée dans plus de 3 000 démarches d'accréditation voit son champ d'action
élargi en termes de recommandations de bonnes pratiques.
Témoigne aussi de cette volonté politique forte l'annonce faite par le
Gouvernement, lors du vote du projet de loi de financement de la sécurité
sociale, de moyens supplémentaires pour les hôpitaux et, en particulier, le
milliard destiné au FIMHO, le fonds d'investissement et de modernisation des
hôpitaux. Ce fonds permet, avec le fonds d'accompagnement social de
modernisation, ou FASMO, de financer des opérations de recomposition
hospitalière. Les critères d'atribution ont été élargis par la circulaire du 4
mai 2000, ce qui est effectivement nécessaire pour accélérer la modernisation
des établissements hospitaliers. D'ailleurs, ce fonds est de plus en plus
sollicité.
Toutes ces mesures et tous ces outils sont essentiels et efficaces, mais
peut-être prennent-ils mal en compte la dimension territoriale de l'offre de
soins. S'agissant du FIMHO, il peut paraître paradoxal qu'aucun texte ne semble
prévoir de critères d'équilibre géographique dans l'allocation des subventions,
alors que les inégalités territoriales sont importantes, en particulier en
termes de démographie médicale.
En effet, plus que le nombre global de médecins - même si c'est là un problème
réel -, c'est l'inégale répartition entre les territoires qui paraît le plus à
craindre. La poursuite du plan d'augmentation des différents quotas
d'étudiants, les subventions aux organismes de formation, les créations
d'emplois dans la fonction publique hospitalière témoignent de l'effort
entrepris par le Gouvernement en matière de renforcement des moyens.
Toutefois, ces mesures ne suffiront pas, je le crains, à résoudre les
problèmes de certains territoires. En effet, la majorité des étudiants sont
attirés par les mêmes spécialités et les mêmes territoires : l'héliotropisme et
l'attraction de la capitale jouent aussi sur la démographie médicale.
Aujourd'hui, certains territoires doivent déjà faire face à une véritable
crise sanitaire, crise qui risque de s'aggraver dans les années à venir. Le
constat est unanime ; les départements ruraux, pour de mulitples raisons,
n'attirent plus les jeunes médecins, aussi bien en cabinet qu'à l'hôpital,
rendant par là même les conditions de travail des médecins y exerçant plus
difficiles encore.
C'est le cas dans le département de la Manche, que je connais bien, ainsi que
dans de nombreux départements situés au nord de la Loire. Dans la Manche, le
nombre de médecins généralistes ne cesse de diminuer, et cette tendance
s'accentue depuis une dizaine d'années. De 633 médecins généralistes en 1995,
nous sommes passés à 425 en 2000, soit une densité en nette diminution, de 130
pour 100 000 habitants en 1995 à moins de 100 en 2000, alors que la moyenne
nationale est de 170. De même, le vieillissement de la population médicale est
plus important dans la Manche. Or la carence en médecins remplaçants et la
non-reprise de cabinets médicaux sont deux phénomènes déjà très inquiétants.
La situation de certaines spécialités est également critique, en particulier
en milieu hospitalier : la densité des médecins anesthésistes - réanimateurs
n'est que de 11,7 pour 100 000 habitants en Basse-Normandie, et seulement de
9,4 pour 200 000 habitants dans le Cotentin, pour une moyenne nationale de 14,3
pour 100 000 habitants, avec des pics de 18,8 dans certaines régions «
favorisées ».
Nous assistons, dans ce domaine si sensible pour le fonctionnement des
hôpitaux, à une véritable paupérisation. Les centres hospitaliers concernés
perdant toute attractivité du fait de conditions de travail dégradées et de
gardes répétitives, bien souvent à la limite de la réglementation, ils sont
contraints de faire appel à des vacataires, dont le coût, à certaines périodes
de l'année, est prohibitif et générateur de dépenses supplémentaires pour la
sécurité sociale. Sans parler du fonctionnement précaire et aléatoire que cela
peut engendrer pour les opérations chirurgicales programmées ni du traitement
inégalitaire entre vacataires et praticiens hospitaliers, les établissements
étant dépendants des négociations sur les vacations, parfois dans des
conditions qui pourraient leur attirer les foudres des chambres régionales des
comptes.
Ce dysfonctionnement est malheureusement tout aussi réel pour d'autres
spécialités telles que l'imagerie médicale et la gynécologie obstétrique.
Personne ici ne contestera que la politique de santé et l'aménagement du
territoire doivent être liés ; l'égal accès pour tous à des soins de qualité
est évidemment un aspect de l'égalité des territoires au sein de la
République.
Dans ces conditions, ne serait-il pas opportun, monsieur le ministre,
d'envisager la reconnaissance de zones prioritaires de santé ?
S'il n'est pas question de revenir sur le principe fondamental de la libre
installation des médecins, ne serait-il pas envisageable d'instituer un système
d'incitation forte, de discrimination positive en faveur de ces départements en
crise et d'instaurer, à titre temporaire, un plafonnement au niveau actuel pour
les régions sur-dotées ?
Les aides à l'installation en milieu rural ou en zone urbaine sensible pour
les médecins et infirmières libérales décidées par le Gouvernement dans la loi
de modernisation sociale sont des mesures qui vont dans le bon sens.
Mais il faut, je crois, créer des incitations permanentes, de manière à
pousser les jeunes médecins, infirmiers ou infirmières à s'installer dans ces
départements qui en ont cruellement besoin : avancement de carrière plus rapide
en milieu hospitalier, financement de l'équipement à l'installation en cabinet,
mesures fiscales permanentes. Je salue et je soutiens la politique dynamique et
ambitieuse menée par votre ministère, mais je n'oublie pas que la situation,
dans certains points de notre territoire, réclame des mesures plus fortes :
c'est la santé des populations concernées qui en dépend.
(Applaudissements
sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste
républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Votre analyse recueille toute mon approbation, monsieur
le sénateur.
Vous savez que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour
2002 a prévu une aide à l'installation pour les professionnels. Dès les
prochaines semaines, dans huit régions, dont la Basse-Normandie, avec les ARH,
les URCAM, les DRASS, les DDASS, etc., les professionnels de santé et les
collectivités territoriales - ce qui est fait en Haute-Normandie, et donc dans
la Manche, est un véritable modèle à cet égard - vont sélectionner les zones où
peuvent être identifiées de réelles difficultés quant à l'accès aux soins et où
le remplacement des professionnels s'avère difficile. C'est vrai, il y a des
médecins qui partent et qui ne sont pas remplacés, même dans des cabinets de
groupe.
Au ministère, pendant deux jours, nous allons conduire une réflexion sur la
démographie médicale.
Deux rapports, l'un qui émane de la direction générale de la santé, l'autre
qui a été établi par le professeur Nicolas, donnent à penser qu'il n'y a pas
péril en la demeure, sauf dans certains points du territoire, tels ceux que
vous avez évoqués, mais qu'à partir de 2015 ou 2002 la situation deviendra très
grave.
Peut-on envisager une installation autoritaire ? Ce n'est pas dans les
habitudes de notre pays, du moins en ce qui concerne les médecins, car, chez
les enseignants - profession noble s'il en est ! -, on va là où on vous demande
d'aller. Mais, c'est vrai, ce n'est pas le genre des médecins. Alors, que
peut-on faire ? Nous avons proposé 10 000 euros à l'installation pour un
praticien hospitalier dans une zone qui n'est pas réputée particulièrement
attractive ; mais tout est affaire de goût ! Evidemment, si tout le monde veut
s'installer à Nice... En plus de 10 000 euros, les praticiens gagneraient deux
ans de carrière sur cinq ans. Est-ce que ce sera suffisant ? Je n'en sais rien.
Si tel n'est pas le cas, nous irons plus loin.
Il faut bien reconnaître que, d'une manière générale, les professions pénibles
ne sont plus choisies. C'est un changement de mentalité que je constate tous
les jours, dans mon ministère, dans la rue, dans les hôpitaux partout !
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Les 35 heures !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Certes, de ce point de vue, cette mesure ne facilite
pas la tâche.
Vous savez que l'internat a été organisé différemment. Désormais, tous les
médecins généralistes seront internes pendant quatre ans.
Par ailleurs, nous avons mis en avant trois spécialités dans lesquelles nous
manquons de praticiens : en anesthésie - réanimation, en obstétrique, en
pédiatrie. Il a été question d'inclure les psychiatres. Or la France a deux
fois plus de psychiatres que les pays environnants. Mais peut-être sont-ils
particulièrement mal répartis, notamment au détriment du secteur public.
J'ai rencontré récemment des chirurgiens de Paris. La baisse des vocations est
très importante dans leur discipline. Peut-on imposer le choix d'une telle
spécialité ? Si une personne n'a pas la vocation, il est difficile... - voire
dangereux ! - de la forcer à embrasser une carrière de chirurgien... En tout
cas, c'est un problème que nous n'avons pas résolu. Mais nous avons le moyen
d'y remédier. On fera choisir arbitrairement sur des listes de spécialités
déficitaires. Encore faut-il le décider, ce qui n'est pas facile.
Concernant la médecine générale et les secteurs où manquent des praticiens, au
sein du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, nous
avons prévu une aide à l'installation ; il s'agit donc bien de discrimination
positive. Nous ne connaissons pas encore le montant de cette aide. Nous allons
en discuter. Nous nous inspirerons de l'exemple de la Manche.
M. le président.
La parole est à M. Fortassin.
M. François Fortassin.
Nous avons en France deux secteurs : d'une part, l'hospitalisation publique,
d'autre part, le système privé.
A priori
, ces deux systèmes sont
complémentaires. Mais, à y regarder de plus près, cette complémentarité n'est
souvent qu'apparente. Je vais m'en expliquer très simplement.
Si vous souffrez d'une affection cardiaque ou d'un cancer, vous pourrez être
soigné dans n'importe quelle région et dans n'importe quel établissement, qu'il
relève du secteur public ou du secteur privé. En revanche, si vous êtes atteint
d'une affection comme le sida, il faudra, comme on dit chez moi, vous « lever
de bonne heure » pour trouver un établissement privé qui veuille bien vous
soigner. Puisque les réactions sont très différentes, on ne peut pas tout
mettre sur le même plan.
Monsieur le ministre, vous avez posé, au travers du FIMHO, un certain nombre
de règles qui, globalement, vont dans le bon sens.
M. Gilbert Barbier,
rapporteur pour avis.
Des règles, mais pas d'argent !
M. François Fortassin.
Vous avez aussi, par la signature d'un protocole, fait en sorte que les
cliniques privées qui sont en difficulté ou qui ont de moins bonnes pratiques
médicales ne sombrent pas dans l'oubli. Mais nous vous appelons, vous et vos
services, à la vigilance. C'est quand même la première fois qu'en France, des
actionnaires, en l'occurrence des patrons, incitent leurs salariés à faire
grève !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Cela a surpris, en effet !
M. Guy Fischer.
C'est louche !
(Sourires.)
M. François Fortassin,
Je veux bien qu'on relève le niveau des rémunérations du secteur privé,
notamment des infirmières et du personnel soignant, puisqu'ils sont nettement
moins payés que dans le secteur public. Mais il faudrait quand même veiller
très scrupuleusement à ce que les fonds qui seront dispensés ne servent pas à
augmenter les salaires des médecins, tout au moins de ceux qui sont, à mes
yeux, surpayés ou, pis encore, à faire les choux gras des actionnaires. C'est
un élément d'une extrême importance.
Enfin, monsieur le ministre, s'il est normal que tous les élus et tous nos
concitoyens se soucient de ne pas aggraver le déficit de la sécurité sociale,
il est moins normal - pour moi, en tout cas - que les actes des médecins
généralistes ne soient pas payés au niveau convenable, notamment dans les zones
urbaines.
MM. Paul Blanc et Gilbert Barbier,
rapporteurs pour avis.
Très bien !
M. Guy Fischer.
Il a raison ! Cela va tout juste passer à 121 francs !
M. François Fortassin.
A l'évidence, il coûte plus cher à un médecin de s'installer dans des villes
comme Paris, Lyon, Marseille ou Toulouse, ne serait-ce que du fait des loyers.
De plus, en raison de la circulation, les visites leur prennent plus de temps
que dans les zones rurales.
Loin de moi l'idée, en augmentant les honoraires des médecins, de favoriser
ceux d'entre eux - ils sont très rares, mais il en existe encore - qui font de
la médecine « d'abattage ». Ce point précis mériterait sans doute un contrôle.
Car, à l'évidence, - du moins est-ce mon sentiment - si la médecine est
libérale dans ses pratiques, elle ne saurait être totalement libérale dès lors
que les honoraires dépendent des deniers publics.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Monsieur le sénateur, sur la première question, je
comprends le sens de vos critiques. Le secteur public et le secteur privé
complémentaires, différents, caractérisent le système de santé français que le
monde entier envie.
D'un secteur à l'autre, les malades, vous l'avez dit très justement, ne sont
pas les mêmes. Si certaines pathologies sont traitées de la même manière, on
demande à l'hôpital public un effort considérable. On lui demande, par exemple,
d'assurer les urgences en permanence. La tenue de ce service est bien difficile
puisque les urgences sont maintenant l'un des succès, certes, mais un succès
pervers de l'hôpital, qui répond en permanence, nuit et jour, à cette attente,
en offrant assistance, plateau technique et prise en charge. Cela n'existe pas
dans les cliniques.
Il y a bien d'autres exemples que vous auriez pu citer - que vous avez
d'ailleurs cités - qui concernent les pathologies. Elles ne sont pas les mêmes.
Pourtant, les cliniques assurent 60 % de l'activité chirurgicale de notre
pays.
Telle est la situation. Il faut en tenir compte. D'ailleurs, entre nous - je
le dis parce que nous sommes entre nous ! - lorsque les uns et les autres,
quelle que soit la travée sur laquelle vous siégez, vous venez nous encourager
à aider une clinique de votre circonscription, vous ne faites pas la différence
! C'est ainsi, c'est aussi un avantage de notre système.
Je reconnais qu'il est difficile de faire comprendre à l'étranger que le privé
soit payé par le public. On me perçoit mal quand je dis que, en effet, le
secteur est payé par les mêmes enveloppes, moins d'ailleurs en fonction des
missions spécifiques de l'hôpital public qui fait notamment de l'enseignement
et de la recherche. Nous nous dirigeons vers une tarification à la pathologie
qui, je l'espère, remettra les choses un peu plus en équation.
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Justement, où en est-on ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Franchement, ce n'est pas facile, c'est même très
difficile, mais, enfin, nous y parviendrons.
Les critiques entendues sont, à mon avis, à la fois fondées et infondées. Que
60 % ou presque - en tout cas, 40 à 50 % de l'obstétrique par exemple - soient
pris en charge par les cliniques privées, nous ne pouvons pas ne pas en tenir
compte et laisser aller à vau-l'eau l'ensemble des cliniques qui nous rendent
un service considérable et qui versent des salaires moindres que l'hôpital.
Votre remarque, monsieur le sénateur, est très juste.
Le dispositif d'aide que nous avons mis en place récemment attribue 3,9
milliards de francs aux hôpitaux et 1,7 milliard de francs aux cliniques
privées.
Mais rassurez-vous, cette aide aux cliniques est suivie par un observatoire
tripartite - Etat, syndicats et patronat - notamment en ce qui concerne les
salaires des infirmières et du personnel. La différence sur le salaire mensuel
d'une infirmière était, en gros, de 3 000 francs. Le service public peut
s'enorgueillir d'avoir réussi à payer ses infirmières à ce tarif, car elles
font du travail. Mais il faut reconnaître que, dans le secteur privé, elles en
font parfois plus encore.
M. Gilbert Barbier,
rapporteur pour avis.
Très bien !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Ce n'est pas le discours habituel, mais, moi, je
connais la réalité. Donc, nous avons - et je crois que c'était sage - permis ce
rattrapage.
Evidemment, c'est l'assurance-maladie qui finance. Pour 2002, elle finance
l'hôpital public à hauteur de 284 milliards de francs et les cliniques privées
- qui sont, je vous le signale, tout de même importantes dans notre pays - à
hauteur de 46 milliards de francs. Mais il n'empêche que c'est elle qui
finance, il n'y a aucun doute.
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Tout le monde paye !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Il y a des dépassements, mais ce n'est pas l'assurance
- maladie qui les prend en charge.
Nous avons veillé - vous vous en êtes inquiété - à ce que ce soit non pas les
propriétaires des cliniques qui soient avantagés, mais le personnel.
Pour ce qui est des rémunérations des médecins généralistes, voulez-vous mon
sentiment ? Vous avez raison...
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Ah !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je l'ai dit très clairement à plusieurs reprises. Mme
la ministre de l'emploi et de la solidarité et moi-même avons saisi la
commission de la nomenclature de l'assurance - maladie pour étudier comment - à
quel niveau et dans quels délais - nous pourrions améliorer la tarification
tant des visites que des consultations. Les tarifs n'ont pas été augmentés
depuis quatre ans.
Je comprends leur demande, elle est légitime. Sans quoi, ils seront obligés de
multiplier les actes au détriment de la santé publique et du portefeuille de
cette dernière ! S'ils en arrivaient là, cela reviendrait pratiquement au même
sur le plan financier, mais la qualité des soins dispensés risquerait de
baisser.
Ce matin a eu lieu la dernière manifestation en date des médecins vacataires.
Savez-vous combien touche un médecin vacataire ? Une « vacation » est devenue
pratiquement un mot péjoratif ! Je tiens pourtant beaucoup à ce pont entre
l'hôpital et la ville. Le médecin vacataire touche 130 francs ! Quand il
consacre la matinée, ce n'est pas sérieux !
M. Gilbert Barbier,
rapporteur pour avis.
Trois heures et demie !
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Il touche quatre fois moins qu'un plombier !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Oui, ce n'est pas sérieux ! Je le sais à la fois comme
médecin et comme ministre de la santé.
Mais savez-vous combien il en coûterait de les augmenter ? Quatre cents à cinq
cents millions ! Pourtant, il va bien falloir le faire un jour, et au plus vite
! Ce sont les contradictions auxquelles nous sommes confrontés, sans parler de
celles qui sont contenues dans le dossier des internes, lesquels n'ont pas très
bien compris mes dernières propositions.
Il paraît qu'hier ils étaient 5 000 dans la rue. Je ne les ai pas comptés,
mais ils étaient nombreux.
Alors que l'application de la directive européenne est prévue pour 2009, nous
allons instaurer pour la première fois le repos de sécurité en faveur des
anesthésistes - c'est moi qui l'ai créé, je ne suis pas suspect.
Et voilà que les internes demandent à en bénéficier. Il existe a une directive
européenne - c'est parfait, me direz-vous. Le repos de sécurité, c'est soit
onze heures après une garde, soit le jour suivant. Savez-vous combien cela
représente en moyenne pour les internes ? Je dis « en moyenne », parce qu'il
faut distinguer selon les spécialités, certains prennent beaucoup de gardes et
d'autres moins. En moyenne, cinquante-cinq jours par an seront donc dégagés au
titre du repos de sécurité, ce n'est quand même pas mal ! Evidemment, cela aura
un coût parce qu'il faudra multiplier les postes d'internes. Je le conçois,
c'est normal.
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Et s'il n'y en a plus ?
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Aucun risque ! Je vous signale que le
numerus
clausus,
que d'aucuns - pas vous - avaient baissé, est maintenant à 4 700
et j'espère le faire passer à 5 700 l'an prochain : nous en avons bien besoin.
Cela signifie un petit effort financier.
Il faut distinguer selon les spécialités. Je comprends bien les internes qui
prennent neuf gardes - je dis bien neuf, pas cinq, ni trois, ni même deux !
Dans des spécialités comme la réanimation, la chirurgie, l'obstétrique, c'est
indispensable, sauf à compromettre la continuité des soins. Il faudra
distinguer entre ceux-là et les autres, comme nous l'avons fait pour les
personnels hospitaliers. C'est un effort considérable, nous le consentons
progressivement.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Comme n'aurait pas manqué de le dire notre excellent collègue Alain Gournac,
le projet de budget relatif aux personnes handicapées est décevant, surtout en
raison des enjeux considérables que représente ce secteur. En effet, ce ne sont
pas moins de 3 millions de personnes handicapées qui ont des besoins immenses
en termes d'accueil, de prise en charge à domicile et d'aide pour la vie
quotidienne. Je reconnais volontiers, monsieur le ministre, que l'enjeu est
énorme.
Le Gouvernement a présenté cet été un plan d'action en faveur des personnes
handicapées. C'est bien, mais cela demeure insuffisant si le budget ne se donne
pas les moyens de mener une politique volontariste pour permettre une meilleure
intégration. C'est surtout cet aspect - qualitatif et non plus quantitatif -
qui est important.
Il importe aussi, parallèlement, de mener les réformes nécessaires pour
remédier aux dysfonctionnements des dispositifs existants. Bien des dossiers
demeurent en suspens. J'en exposerai quelques-uns brièvement.
Tout d'abord, en ce qui concerne les maisons d'accueil spécialisées, les MAS,
il manque encore de nombreuses places, en particulier des places adaptées aux
personnes atteintes de traumatismes crâniens ou de syndromes autistiques.
Autre sujet qui revient souvent : le problème posé par l'amendement Creton
n'est toujours pas résolu. L'encombrement des établissements d'éducation
spécialisée perdure toujours - et cela depuis des années -, au détriment des
enfants handicapés qui ne peuvent accéder aux structures qui leur sont
destinées.
Autre dossier en suspens, le traitement fiscal de l'épargne des parents
d'enfants handicapés qui veulent anticiper les difficultés financières que
risquent de connaître leurs enfants après leur disparition. Ainsi, la
fiscalisation des produits d'assurance de rente de survie et d'épargne de
survie apparaît tout à fait anormale. En dépit de la loi de financement de la
sécurité sociale votée en 1998, qui a exonéré ces produits de toute
fiscalisation, l'administration fiscale persiste à leur appliquer les
prélèvements sociaux. Monsieur le ministre, intervenez auprès de votre collègue
de Bercy !
Concernant une aide de vie autonome, là encore, des efforts doivent être
accomplis, en particulier pour que les personnes handicapées ne rencontrent
plus autant de difficultés pour trouver des infirmières.
Le décret pour l'extension du service des soins infirmiers à domicile aux
personnes handicapées est toujours en attente. Pourriez-vous nous préciser
quand il paraîtra, monsieur le secrétaire d'Etat ?
Telles sont les quelques questions, peu nombreuses, que je souhaitais vous
poser, monsieur le secrétaire d'Etat. Ces questions portent surtout sur des
dysfonctionnements. J'attends de vous que vous précisiez les mesures que vous
entendez prendre pour y remédier.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.
Monsieur Chérioux, à la fin de
l'année 1998, le nombre de jeunes adultes handicapés maintenus, en application
de l'amendement Creton, dans les établissements d'éducation spécialisée, faute
de places disponibles dans un établissement pour adultes, demeurait élevé
malgré une légère décrue des effectifs enregistrée entre 1997 et 1998.
Au 31 décembre 1998, 3 920 jeunes adultes relevaient encore du dispositif, ce
qui représentait une baisse de 2 % par rapport à 1997. Les dernières données
recueillies auprès des DDASS, les directions départementales des affaires
sanitaires et sociales, au mois de novembre 2002, font apparaître que 3 201
jeunes adultes bénéficient encore de ce dispositif. Sachez que ces données sont
encore incomplètes et qu'elles mériteront d'être précisées par la suite.
Pour ce qui est de la rente-survie, je précise qu'il s'agit d'un contrat
d'assurance permettant de verser une rente viagère à l'enfant handicapé de
l'assuré après le décès de ce dernier. Ce dispositif avait connu des
incertitudes voilà quelques années. Une table ronde, organisée sur l'initiative
des pouvoirs publics entre les assureurs et les associations de personnes
handicapées, avait permis d'aboutir à un moratoire satisfaisant.
Il n'y a donc plus lieu, comme le reconnaissent les associations, de nourrir
des inquiétudes quant aux droits acquis par les bénéficiaires des rentes
viagères.
Les parents d'enfants handicapés souscripteurs d'un contrat de rente-survie
bénéficient d'avantages fiscaux et les bénéficiaires de la rente viagère n'ont
pas à inclure cette rente dans les revenus pris en compte pour l'attribution
d'allocations telles que l'AAH ou l'allocation logement.
Ces avantages accordés aux bénéficiaires de la rente-survie sont parfaitement
logiques. Ils visent à ce que les efforts consentis par les parents pour, après
leur décès, mettre leurs enfants à l'abri de difficultés matérielles et
soudaines, ne soient pas annihilés par une réduction, à même hauteur, de
l'effort de solidarité.
Il nous apparaît cependant difficile d'aller au-delà, au risque de créer des
inégalités.
S'agissant des sites pour la vie autonome, autre sujet que vous avez évoqué,
je vous indique, monsieur Chérioux, que le développement des moyens de
compensation fonctionnelle du handicap est indispensable pour offrir aux
personnes handicapées qui le souhaitent la possibilité de demeurer dans leur
milieu de vie ordinaire, grâce à des aides techniques adaptées, des aides
humaines, des aides animalières et des aménagements de logements.
Les pouvoirs publics ont soutenu le développement d'expérimentations en
matière d'aide technique sur quatre sites dénommés « sites pour la vie autonome
», dans l'Isère, dans le Morbihan, dans la Loire et dans la Saône-et-Loire.
Ces expérimentations ont montré la nécessité de disposer d'un lieu unique de
traitement administratif et financier des demandes, d'une évaluation
médico-sociale par une équipe pluridisciplinaire composée de médecins,
d'ergothérapeutes, d'assistantes sociales et d'une coordination des
interventions des multiples partenaires financiers.
Dans le cadre du plan triennal annoncé par le Premier ministre au conseil
national consultatif des personnes handicapées, le 25 janvier 2000, il est
prévu la généralisation progressive de ce dispositif à l'ensemble des
départements d'ici à 2003. A cet effet, 200 millions de francs de mesures sont
prévues. Quinze sites ont été créés en 2000, 28 sites ont été financés en 2001,
et 27 nouveaux sites seront financés en 2002, ce qui couvre 70 départements.
Une circulaire du 19 juin 2001 a été adressée aux préfets afin de préciser le
rôle de pilotage et d'animation du nouveau dispositif incombant aux DDASS et
leur indiquant les principaux instruments de ce dispositif. Il est souhaitable
que celui-ci s'incrive à terme dans un cadre réglementaire stabilisé, ce qui
devrait permettre, d'une part, la réforme de la loi de 1975 relative aux
institutions médico-sociales dont les travaux sont largement avancés
aujourd'hui, notamment pour les équipes techniques d'évaluation, et, d'autre
part, la réforme envisagée de la loi d'orientation en faveur des personnes
handicapées, s'agissant par exemple des mécanismes de financement des solutions
de compensation des incapacités.
Pour ce qui est de la question des infirmières, je dirai, et ce n'est pas une
boutade, que Bernard Kouchner a largement développé le sujet de manière
comparative et décrit à la fois la situation antérieure ainsi que les
différents progrès qui ont été annoncés pour prendre en compte une évolution
légitime dans le secteur public et dans le secteur privé.
M. Jean Chérioux.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux.
Je voudrais intervenir très brièvement sur deux points.
D'abord, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'en est-il de l'insuffisance du
nombre de places adaptées aux personnes atteintes de traumatismes crâniens ou
du syndrome autistique ?
Ensuite, en ce qui concerne les rentes-survie, je n'ai pas très bien compris
votre réponse.
Pour ma part, je considère qu'il est anormal que des prélèvements sociaux
portent sur ces rentes ; or il apparaît que Bercy n'est pas de cet avis. J'ai
par ailleurs cru comprendre que c'était pour éviter d'éventuelles inégalités
que les prélèvements continuaient. Je me permets donc d'insister : ce n'est pas
normal !
Il s'agirait en effet d'une inégalité, certes, mais en faveur de personnes
souffrant d'un handicap très grave dans leur propre vie par rapport à leurs
concitoyens. Le moins qu'on puisse dire, c'est que vous n'employez pas un bon
argument.
M. le président.
La parole est à M. Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
chaque année, la présentation du budget des affaires sociales me donne
l'occasion de parler de la couverture sociale des 1 900 000 Français qui vivent
à l'étranger.
Compte tenu de la nouvelle procédure, mon propos se limitera à la Caisse
autonome de sécurité sociale des Français de l'étranger, que je préside. Mais
je regrette de ne pas pouvoir vous entretenir des retraites, du chômage et des
difficultés d'application des conventions entre la France et certains pays,
notamment africains.
Depuis trente ans, la Caisse autonome de sécurité sociale des Français de
l'étranger fonctionne d'une façon satisfaisante, puisqu'elle présente, une fois
de plus cette année, un bilan positif.
Son originalité, vous la connaissez : il s'agit d'un système d'assurance
volontaire destiné aux Français de l'étranger expatriés, et ce quel que soit
leur statut, qu'ils soient salariés, non-salariés, retraités, mères de famille.
Lorsqu'ils sont à l'étranger, tous les Français peuvent bénéficier d'une
couverture de sécurité sociale de source française.
Au cours de l'année écoulée, à plusieurs reprises, j'ai eu l'occasion de vous
entretenir de l'évolution de la Caisse des Français de l'étranger et des
mesures qui sont applicables à cette dernière.
Il est clair que la loi de modernisation sociale, qui est en cours d'examen
par le Parlement est, dans son article 8, entièrement consacrée à cette caisse
de sécurité sociale. Je me réjouis, bien entendu, que le Parlement - Assemblée
nationale et Sénat - ait voté conformes ces propositions consensuelles.
Je ne reviendrai pas sur les mesures nouvelles induites par cet article. Je me
bornerai à citer la création d'une troisième catégorie
bis
de cotisants
qui seront aidés par l'Etat pour le paiement de leurs cotisations maladie et
l'allégement des cotisations maladie pour tous les jeunes Français de moins de
trente-cinq ans ainsi que la suppression de toute rétroactivité pour ces mêmes
personnes.
Cette diminution des cotisations permet à nombre de jeunes qui partent à
l'étranger et qui n'ont aucune couverture sociale de source française d'adhérer
à notre caisse.
Nous sommes aujourd'hui dans l'attente du vote définitif de ce texte. Nos
compatriotes expatriés attendent avec impatience la mise en vigueur des
nouvelles dispositions de cet article 8. Nous serons vigilants, vous
l'imaginez, sur la date de parution des décrets d'application, d'autant plus
que nous espérions que cette loi entrerait en vigueur plus tôt.
Un second sujet mérite également de retenir notre attention : la Caisse de
sécurité sociale des Français de l'étranger est une caisse d'assurance
volontaire, non obligatoire, et, de ce fait, soumise à la concurrence. Son
pilier, ce sont les grandes entreprises françaises qui envoient leurs salariés
à l'étranger, qui adhèrent à la caisse et qui paient leurs cotisations en
première catégorie. Or ce sont elles qui sont les plus soumises à la
concurrence des assureurs privés, qui leur proposent des assurances au premier
franc.
Nous voulons que ces entreprises continuent de cotiser à cette caisse de
sécurité sociale, qu'a voulu le législateur, par la loi Bettencourt du 31
décembre 1976, d'abord, mais aussi par la loi Bérégovoy de 1984, donc toutes
sensibilités politiques confondues. La Caisse de sécurité sociale des Français
de l'étranger doit pouvoir leur proposer un certain nombre d'aménagements.
C'est le seul moyen pour elle de faire face aux assureurs privés.
J'insiste sur ce point, monsieur le secrétaire d'Etat : il faut que vous
donniez des instructions à vos représentants au sein du conseil
d'administration pour qu'ils réservent un accueil favorable à nos
propositions.
Si nous n'obtenons pas ces assouplissements, si nos délais d'intervention sont
trop longs, si nous ne sommes pas en mesure de faire face à la concurrence très
vive des assurances privées, la Caisse de sécurité sociale des Français de
l'étranger n'aura plus le même niveau d'efficacité, le même impact vis-à-vis de
nos concitoyens.
Soyons clairs, la Caisse des Français de l'étranger ne pourra survivre que si
elle est en mesure de concurrencer de façon efficace ces assureurs privés dont
je viens de vous entretenir et qui, eux, n'ont pas à convaincre une tutelle qui
ne fait toujours pas la différence entre les caisses d'assurances obligatoires
et les caisses d'assurances volontaires. C'est un régime extrêmement original,
je l'avoue, mais les Français qui vivent à l'étranger l'apprécient.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le sénateur, permettez-moi, avant de répondre
à votre question, d'apporter une précision à M. Chérioux.
Monsieur Chérioux, une enveloppe supplémentaire de 20 millions d'euros
affectée notamment aux autistes et aux traumatisés crâniens a été inscrite
récemment dans la loi de financement de la sécurité sociale. Elle vient
s'ajouter à la poursuite du plan quinquennal lancé en 1999 en matière de
création de places et à l'enveloppe de 50 millions de francs déjà dévolue à
l'autisme qui a été mise en oeuvre dans le cadre du plan triennal concernant ce
secteur.
Cette précision étant apportée, j'en viens à la question qui était la vôtre à
l'instant, monsieur Cantegrit, et qui concerne les dispositions de la loi de
modernisation sociale en cours de discussion.
Je tiens à souligner l'intérêt que porte le Gouvernement aux Français de
l'étranger, en particulier à leur protection sociale. L'article 8 de la loi de
modernisation sociale, actuellement en troisième lecture, vise à permettre ou à
faciliter l'accès à l'assurance maladie volontaire de la Caisse des Français de
l'étranger à un nombre significatif de nos compatriotes qui ne disposent pas de
revenus suffisants pour souscrire une assurance volontaire.
Par ailleurs, le projet de loi prévoit des mesures qui encourageront les
jeunes expatriés à s'affilier à l'assurance volontaire maladie de la CFE dès le
début de leur carrière.
Les dispositions de la loi de modernisation sociale s'appliqueront dès le 1er
janvier 2002. Les textes réglementaires d'application ont d'ores et déjà été
préparés mais, compte tenu des délais, le Conseil d'Etat ne pourra les examiner
qu'à la mi-janvier. Le ministère des affaires étrangères prépare actuellement
une circulaire qu'il adressera à tous les postes consulaires qui seront chargés
d'examiner les demandes d'aide des Français expatriés.
S'agissant de l'assujettissement des pensions aux cotisations d'assurance
maladie, l'assujettissement des pensions françaises perçues par les Français de
l'étranger à la cotisation d'assurance maladie est légitime dans la mesure où
cette cotisation revêt un caractère de solidarité.
Par ailleurs, je rappelle que le bénéfice d'une pension française ouvre droit
pour ces compatriotes à la prise en charge, s'ils le souhaitent, de leurs soins
en France selon les règles de droit commun. Tels sont les deux éléments dont je
souhaitais vous faire part pour répondre à votre question.
M. Jean-Pierre Cantegrit.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. Cantegrit.
M. Jean-Pierre Cantegrit.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous ne m'avez pas répondu sur le point précis
que j'ai évoqué, à savoir la concurrence de la part d'assureurs privés à
laquelle est soumise la Caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger,
qui est une caisse d'assurance volontaire.
Monsieur le secrétaire d'Etat - j'attire aussi l'attention de M. Kouchner sur
cette question -, j'aimerais que vous soyez mon interprète auprès de vos
collaborateurs qui assistent - ce que nous apprécions - au conseil
d'administration de la Caisse des Français de l'étranger que je préside. Le
prochain aura lieu dans dix jours. La CFE est une caisse d'assurance
volontaire, et non obligatoire, c'est-à-dire que les Français expatriés ont le
choix d'y adhérer ou non pour conserver une couverture de la sécurité sociale
française. Cette caisse étant soumise à la concurrence d'assureurs privés, à
laquelle il nous faut faire face, nous devons obtenir un minimum de souplesse,
monsieur le secrétaire d'Etat, monsieur le ministre, afin d'avoir la même
pugnacité et la même rapidité d'intervention que nos concurrents.
Monsieur le ministre, notre principal client, TotalFinaElf, vient de nous
quitter, car un assureur privé a fait à ce groupe une proposition supérieure à
celle de la Caisse de sécurité sociale des Français de l'étranger. C'est ainsi
que nous avons perdu plus de mille de nos compatriotes, qui ont quitté la CFE,
et donc la sécurité sociale française.
Voilà pourquoi j'insistais sur la nécessité d'être en mesure de proposer
certains aménagements, portant, par exemple, sur la modulation de cotisations,
cela, bien sûr, avec prudence et sous votre contrôle, je le conçois.
M. le président.
La parole est à Mme Demessine.
Mme Michelle Demessine.
Ma question concerne la couverture maladie universelle.
Permettez-moi, monsieur le secrétaire d'Etat, de faire un bref rappel.
La loi du 27 juillet 1999, créant la couverture maladie universelle, compte
parmi les réformes sociales majeures de cette législature.
Indiscutablement, l'accès aux soins d'environ cinq millions de personnes,
jusque-là exclues du système de santé, a effectivement été rendu possible par
l'affiliation immédiate et automatique à un régime de base de sécurité sociale
et par la couverture complémentaire gratuite pour les plus démunis,
garantissant la prise en charge à 100 % des dépenses de santé, ticket
modérateur et forfait hospitalier compris, sans avoir à faire l'avance des
frais.
De plus - il convient de le noter ici, tant les craintes de la majorité
sénatoriale étaient grandes concernant l'accélération des « dérapages » des
dépenses de santé - la CMU n'a pas eu d'impact démesuré sur les dépenses
remboursées par le régime général.
Toutes les différentes études en témoignent, les associations humanitaires le
soulignent, le bilan de la CMU est globalement positif. Pour autant, le
dispositif n'est pas exempt de limites, voire de défauts, qu'il nous appartient
de gommer pour donner tout son sens et toute sa portée au principe
d'universalité.
Lors de l'examen de ce texte, dès juin 1999, un grand nombre de parlementaires
de la majorité plurielle, et les parlementaires communistes en particulier,
avaient déploré le caractère particulièrement injuste et pénalisant du plafond
de ressources retenu initialement, à savoir 3 500 francs. Nous avions alors
proposé de porter ce dernier au niveau du seuil de pauvreté tel qu'il est
défini par les organismes internationaux - 3 800 francs - afin notamment
d'intégrer dans le champ de la CMU les bénéficiaires de minima sociaux.
A défaut de voir cette demande entendue, nous avions alors argumenté en faveur
de l'accès de plein droit à la CMU, c'est-à-dire sans condition de ressources
pour les titulaires de l'allocation aux adultes handicapés et ceux du minimum
vieillesse, à l'instar de ce qui était prévu pour les titulaires du RMI. Il
nous avait alors été objecté l'argument de l'enveloppe budgétaire.
Dans le même temps, notre groupe avait proposé un dispositif de nature à
lisser les effets de seuil et permettant à toutes les personnes dépassant cette
barre fatidique d'accéder, à des tarifs préférentiels, à une couverture
complémentaire.
Il est vrai que, depuis janvier 2001, le seuil a été porté à 3 600 francs.
Toutefois, comme, dans le même temps, les minima sociaux ont été revalorisés,
le problème des bénéficiaires de l'AAH, du minimum vieillesse, au regard de la
CMU n'a pas pour autant été résolu.
De plus, la sortie du dispositif du million d'allocataires de l'ancienne aide
médicale a été reportée au 31 décembre 2001. Dans le PLFSS de cette année, il a
été acquis que les sortants du dispositif continueront durant un an à
bénéficier de la dispense d'avance de frais.
Vous conviendrez, monsieur le secrétaire d'Etat, qu'aujourd'hui la question de
la « révision indispensable des conditions d'attribution de la CMU » demeure
posée. J'emprunte là, d'ailleurs, l'intitulé d'une partie du rapport d'Odette
Grzegrzulka, députée chargée du suivi de l'application de la loi, rapport qui
est riche d'enseignement et dont je partage totalement les conclusions.
Monsieur le ministre, l'examen des crédits de votre ministère nous amène à
nouveau à vous demander de rehausser le niveau du seuil de ressources de la
CMU, afin de mettre définitivement un terme à l'exclusion de ce droit de
certaines catégories de personnes, les personnes handicapées, notamment, et
cela quelquefois pour une cinquantaine de francs. Nous renouvelons notre
demande, car nous pensons que les marges de manoeuvre financières existent.
Je vous rappelle qu'initialement le nombre de bénéficiaires potentiels a été
évalué à 6 millions de personnes, avec un financement assuré pour 9 milliards
de francs. Or, en raison principalement des effets de la reprise économique, on
recense actuellement 4,4 millions de bénéficiaires. Toutes les ressources du
fonds de financement de la CMU pour l'année 2000 n'ont pas été consommées : 5,7
milliards de francs ont été dépensés sur les 8,3 milliards de francs qui
étaient prévus.
Pour la deuxième année consécutive, la dotation de ce fonds enregistre une
économie de l'ordre de 500 millions de francs. De plus, par arrêté du 14
novembre 2001, 521 millions de francs de crédits du chapitre 46-82 relatif à la
CMU et à l'aide médicale ont été annulés.
Comment, dans ces conditions, comprendre que l'on ne puisse satisfaire
aujourd'hui cette demande, qui n'a rien perdu de sa légitimité ?
Pourquoi proposer des demi-solutions aux 600 000 titulaires de l'AAH, qui
n'ont droit à l'exonération du forfait hospitalier qu'à partir du deuxième mois
d'hospitalisation ?
Outre l'ouverture du dispositif de la CMU aux bénéficiaires de minima sociaux,
des solutions de nature à permettre à toutes les personnes dont les revenus
dépassent le seuil d'accéder à une mutuelle sont, elles aussi, très
attendues.
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité a annoncé que la concertation
avec les organismes complémentaires en vue de mettre en place une aide à la
mutualisation était bouclée. Pouvez-vous nous apporter des précisions quant au
champ des personnes concernées, aux modalités de la délivrance de cette aide et
à son montant ?
Il a été fait référence à la mobilisation pour 2002 de 700 millions de francs
sur les crédits d'action sanitaire et sociale des caisses primaires d'assurance
pour aider à l'acquisition des contrats de couverture complémentaire.
Afin que, sur l'ensemble du territoire, le droit ouvert soit le même pour
tous, comment comptez-vous faire pour éviter toute disparité de traitement dans
la gestion des enveloppes par chaque caisse ?
Enfin, vous avez, à juste titre, monsieur le ministre, mis l'accent sur le
rôle des opérateurs de la couverture maladie complémentaire, les mutuelles
notamment, dans le fonctionnement de la CMU. Un certain nombre d'entre elles
nous ont fait part de résolutions adoptées par leurs assemblées générales,
actant de leur volonté de se retirer du dispositif faute, pour les pouvoirs
publics, de prendre en compte le coût réel moyen par « CMUiste ».
En conséquence, le Gouvernement est-il prêt à revoir très rapidement le
montant de sa contribution au financement de la CMU pour le bon fonctionnement
du dispositif ?
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen
ainsi que sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Madame la sénatrice, je vous remercie d'avoir rappelé,
au début de votre intervention, que la CMU n'avait engendré aucun dérapage des
dépenses, comme le craignait la majorité de votre assemblée.
Ce budget est fondé sur l'hypothèse d'une stabilisation du nombre de
bénéficiaires de la CMU au cours de l'année 2002 à environ 4,8 millions de
personnes.
Il est vrai que le problème principal, parfois vécu douloureusement, auquel
nous confronte le fonctionnement de la CMU, est celui de l'effet de seuil
entraîné par le plafond de ressources.
Deux solutions sont possibles.
La première consisterait à relever ce plafond, mais elle aurait pour effet de
déplacer ce problème et ne le ferait nullement disparaître.
Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité a engagé une concertation avec
la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés et les
organismes dispensateurs de couvertures maladie complémentaires afin d'élaborer
un nouveau dispositif permettant de réduire le coût d'acquisition d'un contrat
de couverture maladie complémentaire par les personnes dont les ressources sont
à peine supérieures au plafond de la CMU.
Le dispositif proposé présente les caractéristiques suivantes.
Il profitera à titre pérenne à toutes les personnes, relevant du régime
général de la sécurité sociale, dont les ressources n'excèdent pas de plus de
10 % le plafond de ressources de la CMU. Pour les personnes isolées, cela
correspondra à des ressources comprises entre 3 600 et 3 960 francs par mois.
Il sera financé au moyen des crédits d'action sanitaire et sociale des caisses
primaires d'assurance maladie.
L'aide versée par les caisses primaires d'assurance maladie sera utilisée par
les bénéficiaires pour acquérir un contrat assurant une couverture maladie
complémentaire équivalente à celle qui est procurée par la CMU. Les
bénéficiaires de ces contrats seront dispensés de l'avance des frais. Le
montant de l'aide s'établira, en moyenne, à 750 francs par an pour une personne
seule, soit la moitié environ du coût d'un contrat « équivalent-CMU ».
Des négociations à l'échelon local entre les caisses primaires et les
organismes complémentaires détermineront les tarifs auxquels ces contrats
devront être offerts.
Ce nouveau dispositif ne fera pas obstacle au développement de partenariats
locaux en matière d'accès aux soins des personnes démunies, élargis notamment
aux conseils généraux.
Ces dispositions seront prochainement mises en oeuvre par voie d'avenant à la
convention d'objectifs et de gestion de la caisse nationale d'assurance maladie
des travailleurs salariés.
Je considère donc que les conditions sont à présent réunies pour que les
personnes dont les ressources sont à peine supérieures au plafond de la CMU, et
parmi elles celles dont le droit à la CMU s'éteindra au début 2002, puissent
conserver une couverture maladie de bonne qualité. Ce nouveau dispositif
constituera un complément très utile à cette grande réforme sociale qu'est la
CMU.
S'agissant de la situation des bénéficiaires de l'AAH au regard du droit à la
CMU, il faut se replacer dans le contexte.
Les titulaires de l'AAH n'ont pas vocation à bénéficier de la CMU et le mode
d'attribution directe de cette allocation au regard d'un handicap ne doit pas
télescoper le mode d'attribution de la CMU sous condition de ressources. Le
code de la sécurité sociale prévoit leur affiliation au régime général sans
participation contributive.
Pour bénéficier de la CMU complémentaire, une personne seule doit disposer de
ressources inférieures au montant mensuel nécessaire pour bénéficier de la CMU.
Or le montant de l'AAH est légèrement supérieur. Mais une partie des titulaires
isolés de l'allocation était précédemment bénéficiaire de l'aide médicale. Ils
ont vu, à ce titre, leurs droits prolongés jusqu'au 31 décembre 2001 si leurs
ressources annuelles sont inférieures à 7 317 EUR, soit environ 48 000 F.
Par ailleurs, le ministère a veillé à ce que les ressources des personnes
hospitalisées ou placées dans une maison d'accueil spécialisée soient désormais
appréciées selon des conditions plus favorables. Ainsi, certaines personnes qui
effectuent un long séjour en établissement hospitalier pourront remplir la
condition de ressources pour l'accès à la CMU. Ce sont les termes de la lettre
qui a été adressée en juillet 2001 à l'ensemble des partenaires de la CNAMTS et
à la CNAF. Une décision générale tendant à ouvrir l'accès à la CMU à tous les
titulaires de l'AAH du seul fait qu'ils en sont titulaires ne va pas de soi,
parce qu'elle créerait des disparités par rapport à d'autres types
d'allocataires et par rapport aux références de ressources qui ont une vocation
générale ou universelle, et non pas liée spécifiquement à l'AAH.
M. le président.
La parole est à Mme San Vicente.
Mme Michèle San Vicente.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la
qualité et la constance de la politique conduite par le Gouvernement en faveur
des personnes handicapées méritent d'être soulignées à bien des égards.
En premier lieu, cette politique s'accompagne des moyens à la hauteur de ses
ambitions. Il suffit d'ailleurs, pour s'en convaincre, de citer quelques
chiffres : le montant des crédits consacrés aux personnes souffrant d'un
handicap par le budget de la solidarité s'élève, pour 2002, à 38 milliards de
francs, soit une progression de 5,8 %. Si l'on y ajoute les autres crédits
budgétaires et ceux de l'assurance-maladie, au total, toutes institutions
publiques confondues, la solidarité nationale y consacre environ 90 milliards
de francs, sous diverses formes.
En deuxième lieu, il s'agit d'une politique s'inscrivant sur la durée et qui
n'a eu de cesse d'être amplifiée et améliorée en fonction des besoins et des
enjeux. La mise en oeuvre des deux plans pluriannuels en est, à cet égard, une
parfaite illustration.
Enfin, et peut-être surtout, il s'agit d'une politique cohérente et novatrice.
Elle est novatrice car elle est pensée non plus seulement en termes de
protection d'une minorité, mais en termes d'intégration des personnes
handicapées dans une société qui doit être destinée à tout le monde et
planifiée pour tous.
Afin de favoriser l'autonomie et les perspectives d'insertion des personnes
handicapées dans la vie ordinaire, plusieurs mesures de fond ont été mises en
place et des moyens nouveaux ont été développés, conformément au plan triennal
de janvier 2000.
Sans être exhaustif, on pourrait citer le plan « handiscol » en faveur de
l'intégration scolaire des enfants et adolescents handicapés ; l'extension
progressive des « sites pour la vie autonome », en vue de la compensation
fonctionnelle du handicap ; le développement des services auxiliaires de vie
qui jouent un rôle primordial dans le maintien à domicile.
Je souhaite insister sur les mesures en faveur de l'insertion professionnelle
et du maintien de l'emploi.
Le 9 octobre dernier a été signé un protocole sur l'emploi des travailleurs
handicapés dans la fonction publique de l'Etat, qui prévoit notamment des
sanctions financières et en termes de postes en cas de non-respect d'un taux
d'emploi de 6 % de travailleurs handicapés d'ici à trois ans. C'est une très
bonne chose.
En outre, le budget « solidarité » prévoit pour les personnes handicapées
bénéficiant de l'allocation aux adultes handicapés, l'AAH, une attribution plus
juste de cette allocation par la suppression de l'évaluation forfaitaire des
ressources afin de ne plus pénaliser les salariés qui exercent une activité
professionnelle réduite. Il prévoit aussi le renforcement des commissions
techniques d'orientation et de reclassement professionnel et la création de
places supplémentaires dans les centres d'aides par le travail.
Nous ne pouvons que nous en réjouir. Mais vous savez bien, monsieur le
secrétaire d'Etat, que le handicap a de multiples facettes et que les délais
d'attente sont très longs dans ces centres.
Pourquoi une collectivité locale ne peut-elle recruter en contrat
emploi-solidarité des personnels de catégorie B dont le handicap peut être
réversible ?
Pourtant, monsieur le secrétaire d'Etat, le cumul des revenus serait
appréciable pour les bénéficiaires, quand on sait que le montant maximum de
l'AAH est de 557,12 euros, soit 3 654,50 francs.
Le fait d'occuper un emploi salarié relevant du milieu ordinaire du travail ne
peut que contribuer à la réinsertion professionnelle. C'est le principe même du
droit des personnes handicapées de bénéficier d'une citoyenneté réelle qui est
ainsi posé !
(Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur
celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Je serai bref, mais il s'agit d'un sujet important.
Des progrès ont été enregistrés dans ce domaine. Il est vrai que la société
française a du mal à se mobiliser. On le constate quelques années après la
création de l'Association pour la gestion du fonds pour l'insertion
professionnelle des handicapés, l'AGEFIPH et on peut le déplorer. Il faut
effectivement remédier à cette situation.
S'agissant de la création des places, la semaine dernière encore, j'ai
moi-même été saluer la transformation d'un atelier protégé en SCOP, société
coopérative ouvrière de production. Comme vous pouvez le constater, les deux
sujets se rejoignent.
La question que vous posez mérite effectivement une étude. Je n'ai pas de
réponse complète à vous apporter ! Vous aurez compris que, parfois, la
conjugaison du statut d'insertion et de l'allocation entraîne le dépassement du
plafond fixé. A ce moment-là, on retombe dans une espèce de situation
complètement kafkaïenne. De ce point de vue, il nous faut sans doute faire
évoluer les choses. Je transmettrai le message de manière que puissent être
évités les désagréments causés par certains dispositifs cumulatifs.
M. le président.
La parole est à M. Leclerc.
M. Dominique Leclerc.
Dans un élan de galanterie tout naturel, j'ai laissé notre collègue Mme
Demessine évoquer certains problèmes liés à des distorsions dans le dispositif
de la CMU eu égard à l'effet de seuil et à la CMU complémentaire. Je serai donc
assez bref.
Ma question porte également sur la CMU et sur le bilan qui pourrait être
dressé trois ans après son adoption.
Récemment, Mme Guigou a demandé, me semble-t-il, une étude sur le coût réel de
la CMU. N'aurait-il pas été plus utile d'engager une réflexion complète sur ce
dispositif, notamment pour mettre fin à certains aspects inégalitaires, en
particulier l'effet de seuil - M. Paul Blanc l'a également souligné - tout à
fait pervers.
Nous étions hostiles à l'instauration d'un plafond de ressources non dégressif
et nous avions raison puisque, mardi dernier, à l'Assemblée nationale, Mme
Guigou a annoncé que vous envisagiez, dès l'année prochaine, de mettre en place
un nouveau dispositif autorisant le relèvement de 10 % du seuil des ressources
mensuelles ouvrant droit à l'équivalent de la CMU complémentaire. On ne peut
que s'en réjouir, tout en constatant que vous avez attendu bien longtemps pour
réagir.
Malgré cela, vous n'avez pas réglé le problème essentiel du coût de la CMU. En
effet, nombreuses sont les mutuelles qui, à l'heure actuelle, ne veulent plus
ou plutôt ne peuvent plus assurer la CMU pour 1 500 francs.
Pour étayer mon propos, permettez-moi de prendre comme exemple la situation de
la mutuelle nationale des personnes handicapées, Intégrance. Cette dernière
nous a fait savoir qu'elle était contrainte de suspendre sa participation au
dispositif CMU, ce pour des raisons bien simples.
Son équilibre financier est, à l'heure actuelle, compromis par le déficit
qu'elle doit supporter face à l'insuffisance de l'aide de l'Etat pour couvrir
le coût réel de la consommation moyenne des bénéficiaires de la CMU. Il s'agit
d'un problème que ne connaissent pas, je le rappelle au passage, les caisses
primaires d'assurance maladie qui sont remboursées au franc le franc et ne
contribuent pas à l'abondement du fonds réservé à la CMU.
Or, cette mutuelle refuse, par souci de justice, de faire supporter plus
longtemps ce déficit par ses adhérents, composés à 74 % de personnes
handicapées et de familles aux revenus parfois modestes, qui, en contrepartie
de leur cotisation à la mutuelle, ont droit, pour un grand nombre d'entre
elles, à un panier de soins inférieur à celui des bénéficiaires de la CMU.
Malheureusement, cet exemple n'est pas un cas isolé.
En réalité, l'ensemble des mutuelles souhaitent non seulement que ce forfait
soit réévalué, mais également qu'il soit mis un terme à cette distorsion de
concurrence entre organismes complémentaires, distorsion qui résulte, je le
rappelle, de la coexistence de deux systèmes : l'un contenu dans une enveloppe
fermée, l'autre figurent dans une enveloppe non limitée.
Je souhaite profiter de la présence de M. Kouchner dans l'hémicycle pour
évoquer la situation des internes en pharmacie et en médecine.
Monsieur le ministre, vous avez reçu, ces derniers jours, des internes en
médecine. Je ne voudrais pas que l'on caricature leur démarche. Je fais
allusion non pas à vous, monsieur le ministre, mais à la presse, qui a écrit :
« Les 35 heures : les internes veulent leur part du gâteau. » Sincèrement, ce
n'est pas possible !
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué à la santé.
Je n'écris pas les articles !
M. Dominique Leclerc.
Ce que veulent les internes, vous le savez, c'est le respect du décret de
janvier 2000, qui découle d'une directive européenne de 1993. Or vous leur
proposez d'instaurer le repos de sécurité en le finançant aux dépens de leurs
jours de congés.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Pas du tout !
M. Dominique Leclerc.
Mais si ! Ce qu'ils veulent, c'est la comptabilisation des gardes dans leur
temps de travail.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
C'est fait !
M. Dominique Leclerc.
Non, vous l'avez avoué vous-même ! Chacun sait quelle place essentielle
tiennent aujourd'hui les internes dans le dispositif hospitalier.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Arrêtez !
M. Dominique Leclerc,
leur statut n'est pas celui d'étudiants en formation ! Monsieur le ministre,
compte tenu des propos qui sont tenus dans cet hémicycle par nos collègues qui
soutiennent l'action de votre gouvernement s'agissant des 35 heures, vous ne
pouvez pas continuer à cautionner de telles injustices et de telles tensions !
En outre, vous les accentuez.
On connaît tous les difficultés que vous rencontrez avec vos fonctionnaires
pour amener les uns et les autres à approcher les 1 600 heures. Vous savez
quelle est la vie quotidienne des internes. La distorsion est tellement grande
! Ils vivent au sein de la société : ils ne sont ni sourds ni aveugles ! Ce
sont les disparités dans la société qui sont créatrices de bien des conflits
actuels.
C'est la raison pour laquelle nous ne devons pas caricaturer la démarche des
internes. Eux aussi ont droit à une vie familiale ! Ils ne peuvent plus assurer
autant de gardes si les repos compensateurs sont pris sur les congés auxquels
ils ont droit.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Ils ne sont pas pris sur les congés !
M. Dominique Leclerc.
Telle est leur demande ! En outre, ils veulent aussi pouvoir se former et
assurer des soins sécurisés.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Ma réponse sera brève en ce qui concerne la CMU.
S'agissant tout d'abord de l'effet de seuil, l'aménagement concerne toutes les
personnes qui dépassent le seuil de 10 %, de manière qu'elles puissent accéder
à la couverture complémentaire. L'aide s'élèvera à 750 francs en moyenne pour
une personne seule et elle sera modulée selon l'âge et la composition de la
famille.
Par ailleurs, une étude demandée au directeur du fonds de la CMU et relative à
l'évaluation du forfait de 1 500 francs que les organismes complémentaires
déduisent de leurs contributions est en cours. Elle devrait permettre
éventuellement d'ajuster ce forfait aux dépenses maladie engagées par les
bénéficiaires. Nous en tiendrons compte dès que nous aurons les résultats
définitifs.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Monsieur Leclerc, pas vous ! Vous avez lu la presse,
vous en avez le droit ! Moi aussi, je l'ai lue : elle caricature la position du
Gouvernement. Jamais, vous pouvez me croire, je n'ai proposé que les internes,
dont je connais la vie et l'importance à l'hôpital, et qui ont à assurer plus
de gardes encore, voient réduits leurs jours de congés. Jamais, je dis bien «
jamais », je ne le ferai ! Je préfèrerais m'en aller !
Au début, on a également caricaturé ma position sur les praticiens
hospitaliers, les PH, et, dans les rues, on a dit : « c'est un scandale, le
peuple aura ta peau ! ». Par la suite, toutes les organisations intersyndicales
de PH ont signé un accord parce que ce qui était dit n'était pas vrai.
Aujourd'hui, caricaturer la position du Gouvernement est une manière de
négocier. Monsieur Leclerc, je vous invite à faire la différence - je la fais !
- entre ceux qui n'assurent pas de garde ou très peu et ceux qui en assurent
beaucoup parce qu'ils y sont obligés. Sachez aussi que c'est moi qui, en
France, ait introduit le repos de sécurité. On ne va tout de même pas m'accuser
aujourd'hui de ne pas l'avoir fait ! D'ailleurs, personne n'a eu l'occasion de
le prendre, sauf les internes, qui seront les premiers à le faire.
Statutairement, les internes doivent assurer cinq gardes : quatre gardes de
nuit - une par semaine éventuellement - et une garde le week-end. Ceux-là -
c'est-à-dire ceux qui, théoriquement, seraient dans la moyenne - se sont vu
proposer cinquante-cinq jours de repos. Ce n'est tout de même pas rien !
Auparavant, ils ne bénéficiaient de rien du tout et, d'ailleurs, ils s'en
contentaient. C'était l'honneur des internes et de tous les médecins, dont je
suis, qui prenaient les gardes ! Nous étions heureux non seulement d'apprendre
notre métier, mais aussi d'être responsable de l'hôpital. Cette culture évolue.
Il n'empêche que les internes travaillent énormément. Du jour au lendemain,
donc, les internes qui assuraient les cinq gardes statutaires se sont vu
proposer cinquante-cinq jours de repos pris non pas sur leurs vacances, mais
sur leur temps de travail.
Il est cependant vrai, monsieur Leclerc, que certains internes assurent
beaucoup plus de gardes, et je souhaite que l'on procède à une réorganisation
complète de celles-ci. Sans citer de nom, je prends l'exemple d'un CHU où il y
a 126 internes ; savez-vous combien de ces internes prennent des gardes ?
Vingt-cinq !
Evidemment, ces vingt-cinq internes sont très défavorisés par rapport aux
autres, mais je ne veux pas qu'un glissement se produise qui conduirait tout le
monde à prendre de fausses gardes.
Ceux qui, pour des raisons de service et de santé publique - c'est d'ailleurs
précisé dans l'arrêté que je leur ai proposé, excusez-moi si je n'ai pas été
assez clair -, ne prendront de garde ni pendant les vacances, ni pendant leurs
formations ne seront jamais pénalisés de ce fait.
Ceux-là, mais ceux-là seuls, qui, du fait de la réorganisation des gardes,
devront en prendre six, sept, huit ou neuf, le feront sur le temps de travail,
mais pas les autres, sinon je provoquerais un mouvement : les autres internes
viendraient faire des gardes qui ne seraient pas nécessairement utiles. Il
faut, savoir, en effet, que durant les gardes, - j'en ai assuré suffisamment
pour le savoir - on ne travaille pas tous : selon les spécialités, c'est très
variable, mais il est évident qu'au grand jamais je n'aurais empiété sur le
temps de vacances des intéressés.
M. le président.
La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer.
Monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai noté avec intérêt la création de 2 000
places en centre d'accueil de demandeurs d'asile et de 500 places en centre
d'hébergement et de réinsertion sociale, ou CHRS.
Ma question porte précisément sur la situation financière préoccupante des
centres d'hébergement et de réinsertion sociale, et, plus largement, sur la
nécessité de mieux prendre en compte leur rôle irremplaçable au sein des
dispositifs de lutte contre l'exclusion.
Je prendrai l'exemple des CHRS du Rhône. Entre 1997 et 2000, la hausse de 9,75
% de leur budget a uniquement permis de couvrir l'augmentation des charges de
personnel, conformément à la convention collective du secteur. Quant aux
dépenses de fonctionnement directement liées au projet d'insertion des
personnes accueillies, elles n'ont pas été réévaluées durant quatre ans. De ce
fait, ces établissements se trouvent constamment dans une logique de gestion de
la précarité et estiment qu'ils ne sont entendus ni par le Gouvernement ni par
la DGAS.
Depuis trop longtemps déjà, la fédération nationale des associations d'accueil
et de réinsertion sociale tire la sonnette d'alarme. L'été dernier, j'ai
moi-même provoqué une réunion à la préfecture du Rhône pour mettre autour d'une
même table toutes les parties prenantes à l'occasion de l'élaboration du schéma
départemental de l'accueil, de l'hébergement et de l'insertion. Rien n'en est
résulté et les CRHS du Rhône sont aujourd'hui dans une situation hautement
paradoxale : ce schéma, conformément à la loi contre les exclusions, devait
être un outil pour améliorer les conditions d'accueil, d'hébergement et
d'insertion des personnes en difficulté, mais, dans le même temps, les moyens
financiers alloués sont en régression.
L'inquiétude des directeurs de CHRS est amplifiée par les transferts de
crédits de la rubrique « crédits pérennes » à la rubrique « crédits ponctuels
», lesquels ne sont pas forcément reconductibles l'année suivante.
De plus, je crois savoir qu'une circulaire sera prochainement signée en
application du décret CHRS du 3 juillet 2001, circulaire demandant aux DDASS de
circonscrire le plus possible l'activité des équipements à l'hébergement
d'urgence, selon les préconisations de la DGAS. Ainsi, seraient abandonnées,
tout ou en partie, des missions fondamentales d'accompagnement des plus démunis
pour cantonner les CHRS dans la mission d'accueil de nuit qui était la leur
lors de leur création.
Ma question est double. D'une part, est-il exact que la DGAS entend réduire la
mission des CHRS à un rôle d'hébergement-repas ? D'autre part, avez-vous la
volonté de créer une instance de concertation qui ait enfin pour mission de
démarrer une réflexion sur les missions fondamentales des CRHS - en adéquation
avec la loi contre les exclusions - et sur leur financement ?
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le sénateur, apporter un soutien plus affirmé
à ces structures dont le rôle est essentiel est une préoccupation tout à fait
légitime.
Vous le savez, année après année, leurs moyens ont connu une progression
supérieure à la progression d'ensemble, puisqu'elle a été de plus de 3 %
l'année dernière, et que la progression prévisionnelle pour 2002 est de 3,5 %.
Dans la région Rhône-Alpes, que vous connaissez bien, la progression a été de
plus de 10 % sur trois ans.
J'en viens à vos questions, auxquelles je tiens à apporter des réponses
claires et sans ambiguïté.
Non seulement, il n'a jamais été question de réduire les missions des CHRS,
qui sont définies par la loi du 29 juillet 1998 : bien au contraire, les
nouvelles dispositions reconnaissent la diversité de ces missions et donnent
les moyens de les exercer dans un cadre rénové et transparent.
Les instances de concertation ayant pour mission de réfléchir aux missions
fondamentales des CHRS que vous appelez de vos voeux existent.
Le projet de circulaire est actuellement soumis - comme l'avait été
précédemment le projet de décret - à la concertation entre, d'une part, le
Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion
sociale, d'autre part, le Conseil national de l'insertion par l'activité
économique. Ces instances feront remonter leurs observations dans les prochains
jours et, bien évidemment, elles savent qu'elles ont une écoute.
M. le président.
La parole est à M. Vantomme.
M. André Vantomme.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'Etat,
mes chers collègues, je ne voudrais pas débuter ma première intervention
publique au Sénat sans saluer l'effort sans précédent consenti par le
Gouvernement dans le cadre de sa politique de santé publique en faveur des
grands programmes prioritaires, qu'il s'agisse de la lutte contre le cancer,
des actions contre le suicide, du renforcement de la contraception ou des plans
nutrition et santé mentale.
Je crois essentiel de se donner les moyens de répondre aux enjeux fondamentaux
de la santé publique aujourd'hui, en termes de prévention, de dépistage,
d'information, mais aussi de recherche et de formation. Le projet de budget de
la santé pour 2002, avec une progression de près de 7 % des crédits par rapport
aux dotations inscrites pour 2001, participe pleinement à ces objectifs.
Je crois également nécessaire d'anticiper sur les besoins et les enjeux de
demain, en termes d'accélération de la recherche, de prévention, de soins ou de
démographie médicale.
A cet égard, j'ai accueilli favorablement l'annonce, au mois d'octobre, d'un
dispositif spécifique pour la prise en charge de la maladie d'Alzheimer, mais
je me demande s'il ne serait pas possible, dans le cadre d'une approche globale
et peut-être plus efficace, d'étendre ce plan à l'ensemble des maladies «
dégénératives », telles que la maladie de Parkinson ou la sclérose en plaques ?
Une telle approche ne permettrait-elle pas de favoriser la recherche dans ce
domaine et de traiter plus tôt et plus largement l'ensemble de ces maladies
?
Je voudrais en venir maintenant à la seconde partie de ma question, qui
concerne plus généralement les problèmes de santé mentale.
L'Organisation mondiale de la santé, dans son rapport consacré à l'année 2001,
rappelle qu'une personne sur quatre présente un ou plusieurs troubles mentaux
ou de comportement au cours de sa vie, et ce quel que soit le pays.
Le 14 novembre dernier, M. le ministre délégué à la santé a présenté au
conseil des ministres une communication sur la santé mentale et a proposé un
plan global d'actions destiné à placer l'usager au centre d'un dispositif à
rénover.
La réorganisation de l'offre de soins, proposée par le Gouvernement, prévoit
trois déclinaisons : l'adaptation de l'hospitalisation complète, le
renforcement des alternatives à l'hospitalisation complète et l'organisation de
centres d'accueil intersectoriels de soixante-douze heures.
La mise en oeuvre de cette politique de santé mentale volontariste n'en
soulève pas moins des questions auxquelles il me serait agréable que vous
puissiez apporter des réponses.
La pénurie de personnel infirmier se constate à l'échelle nationale.
Cependant, certaines régions seront plus que d'autres confrontées à ce
problème, et cela pour les raisons suivantes : le départ à la retraite de bon
nombre d'agents hospitaliers dans les cinq prochaines années et la création de
postes hospitaliers dans l'ensemble des régions au titre des 35 heures, ce qui
favorise les mutations en nombre vers les régions au climat plus propice. Des
transferts sont actuellement en cours et devraient s'accentuer dans les trois
mois qui viennent.
Ne faudrait-il pas par conséquent engager une politique spécifique afin
d'essayer de maintenir sur place des personnels compétents et indispensables
?
A ce titre, une prime d'installation avait été mise en place par l'arrêté du
19 juillet 1971 pour certaines communes des départements des Hauts-de-Seine, de
la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne, ainsi que de l'agglomération lilloise,
en faveur d'agents prenant leur premier poste. L'extension de ce texte à
d'autres départements sinistrés serait une mesure incitative. Y seriez-vous
favorable, monsieur le ministre, ou envisagez-vous d'autres réponses ?
Autre sujet, le nombre actuel de psychiatres - plus de 13 000 - peut sembler
suffisant si l'on ne prend pas en compte les disparités géographiques. En
outre, parmi les médecins, les psychiatres sont ceux dont la moyenne d'âge est
la plus élevée : 48 ans.
La spécialité sera parmi les premières touchées par les effets du
numerus
clausus.
Dès 2012, une diminution de 12 % du nombre de psychiatres est
quasi inéluctable compte tenu des choix déjà opérés et d'un délai minimum de
onze ans avant que ces choix ne se matérialisent. En conservant un nombre de
176 DES en psychiatrie à l'avenir, la diminution du nombre de psychiatres
serait de 40 %. Ainsi, à l'horizon 2020, il ne resterait que 7 800 psychiatres,
soit environ 5 400 spécialistes de moins pour des missions qui ne cessent
d'augmenter, avec des charges croissantes. L'équation ne pourra être résolue
par de simples transferts vers les généralistes ou des paramédicaux.
Envisagez-vous, monsieur le ministre, l'augmentation du nombre d'étudiants en
DES de psychiatrie ?
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Monsieur le sénateur, à question précise, réponse
précise !
Je suis très fier que ce gouvernement ait présenté un « plan Alzheimer », qui,
je le précise, a été très bien accueilli par les professionnels et, sourtout,
par les familles de malades. J'ajoute qu'il concerne d'ores et déjà les
maladies apparentées. Si la maladie d'Alzheimer touche, hélas ! de nombreuses
personnes dans notre pays - mais cela tient au fait que l'on vit plus longtemps
- et est de ce fait au centre du plan, il est clair dans notre esprit qu'elle
n'est pas la seule maladie qui doive être prise en compte.
Par ailleurs, vous m'avez posé des questions précises sur le plan de santé
mentale. La France compte aujourd'hui 13 300 psychiatres contre 8 400 en 1984,
soit une hausse de 57 %. Est-ce trop ou pas assez ? En réalité, de nombreux
psychiatres ont quitté l'hôpital public pour le secteur privé. Peut-être ne les
payait-on pas suffisamment ? Mais il est difficile de concilier réductions
budgétaires et augmentations de salaire ! Sans doute les économistes y
parviennent-ils, mais moi, je ne sais pas faire !
Les choses, vous le savez, ont évolué, et je ne vous ferai pas l'injure de
rappeler les grandes lignes du plan de santé mentale, si ce n'est pour dire
qu'il s'est, en particulier, traduit par l'ouverture des gros hôpitaux
périphériques vers les hôpitaux généraux, parallèlement au renforcement du
secteur et à la prise en charge communautaire.
Ce plan est-il facile à mettre en oeuvre ? Non !
Peut-il l'être immédiatement ? Non !
A cet égard, j'ai bien conscience d'avoir déçu quelques psychiatres aux idées
avancées mais je pense avoir eu raison de dire qu'une mise en oeuvre immédiate
n'était pas possible parce qu'il y a des besoins en lits et parce qu'il s'agit
de pathologies mentales - les maires le savent - qu'il est difficile de
traiter. Il est facile de parler d'appartements thérapeutiques et plus
difficile de les réaliser. Je veux y parvenir, mais il faut nous laisser le
temps nécessaire.
S'agissant du personnel infirmier, 26 000 sont en formation. J'ai proposé - à
la demande d'ailleurs de la profession - qu'il y ait une année de spécialité
d'infirmier psychiatrique parce que je crois, et je pense que vous en serez
d'accord avec moi. Même si trois années sont nécessaires pour former un
infirmier général, on n'apprend pas en médecine générale la prise en charge des
patients psychiatriques.
S'agissant de la prime d'installation, elle a été mise en place pour les
médecins exerçant à l'hôpital public. Pourquoi ne pas l'accorder aux infirmiers
pour combler le déficit démographique ? Il faudra sans doute le faire. Je n'ai
pas réfléchi plus avant, mais votre question est pertinente, car nous avons en
effet besoin d'infirmiers psychiatriques. Je visite parfois, notamment la nuit,
les hôpitaux psychiatriques périphériques, et il m'arrive encore d'assister à
des scènes dont je rougis.
Cela étant, il ne suffit pas d'augmenter le
numerus clausus
pour la
psychiatrie, il faut aussi inciter les étudiants à choisir cette spécialité.
Peut-être devrons-nous imposer un quota aux concours de l'internat, même si la
psychiatrie ne figurait pas parmi les trois disciplines que nous avions mises
en avant au départ. En effet, à population égale, on compte, je le répète, deux
fois plus de psychiatres en France que dans les pays environnants, ces
derniers, en particulier l'Italie et la Grande-Bretagne, étant néanmoins plus
performants que nous.
Quoi qu'il en soit, une grande réunion se tiendra au ministère, un « Ségur »
de la démographie médicale sera organisé, à l'occasion duquel nous débattrons
des problèmes d'installation et de nombre de spécialistes avec toutes les
parties concernées.
M. le président.
La parole est à M. André.
M. Pierre André.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, frappé d'un
malaise cardiaque à la tribune de notre assemblée, j'étais, quelques mois plus
tard, victime d'une mort subite. J'ai pu toutefois ressusciter, grâce à Dieu,
grâce aussi à une parfaite organisation des soins d'urgence dans l'hôpital qui
m'a accueilli. Qu'il me soit permis de remercier à cet instant tous ceux à qui
je dois la vie, tout particulièrement la brillante équipe du service de
cardiologie du Val-de-Grâce.
Vous m'objecterez, monsieur le ministre, que si tous les sénateurs commencent
à évoquer leurs « bobos » en séance, le débat sur le projet de budget de la
santé risque d'être long !
(Sourires.)
Pourtant, voyez-vous, si je peux
prendre la parole aujourd'hui, si je peux assumer normalement mes mandats de
sénateur et de maire d'une ville moyenne dans de bonnes conditions de sécurité,
c'est parce que j'ai eu la chance de bénéficier de l'implantation d'un
défibrillateur cardiaque.
En France, chaque année, de 30 000 à 50 000 personnes sont victimes d'une mort
subite, ce chiffre étant de six à sept fois supérieur à celui des tués dans les
accidents de la route. Ces victimes sont très souvent des adultes dans la force
de l'âge. La mort subite est due à une fibrillation ventriculaire, et seul un
choc électrique délivré dans les trois minutes peut permettre de sauver la
personne.
Voilà une vingtaine d'années, ce constat a donné l'idée à un médecin français
de miniaturiser ces énormes défibrillateurs que l'on aperçoit dans certaines
séries télévisées, notamment dans
Urgences
, pour les rendre implantables
dans le corps.
Le défibrillateur permet de traiter efficacement les récidives de fibrillation
; c'est aussi un moyen de prévenir, chez les personnes à risques, un phénomène
dont elles ne réchappent pratiquement jamais.
Malheureusement, monsieur le ministre, la France prend du retard dans ce
domaine puisque seulement dix-huit défibrillateurs par million d'habitants y
sont implantés, contre vingt-six en Angleterre, trente-sept en Italie,
quatre-vingts en Allemagne et davantage encore aux Etats-Unis. Derrière la
sécheresse de ces statistiques, vous savez quelle détresse humaine peut
exister.
Hélas ! la sécurité sociale ne rembourse pas les défibrillateurs. Les hôpitaux
publics ou militaires doivent donc les financer sur leurs budgets propres et le
secteur privé, qui traite pourtant 50 % des malades cardiaques, ne peut
pratiquer cette technique. C'est là une discrimination grave dans l'accès aux
soins et une source d'inégalité des chances de survie pour nombre de
patients.
Certes, un défibrillateur coûte cher, entre 80 000 et 100 000 francs, ce qui
signifie que seules les personnes les plus favorisées peuvent s'en faire
implanter un. Je sais, monsieur le ministre, que ce n'est pas ce que vous
souhaitez, mais telle est la réalité. Devant celle-ci, je voudrais simplement
savoir quelles dispositions le Gouvernement pourrait prendre pour mettre fin à
une situation profondément injuste et dangereuse.
(Applaudissements.)
M. le président.
Mon cher collègue, nous sommes heureux que vous ayez pu, en pleine forme,
formuler votre question !
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Je suis moi aussi très heureux, monsieur André, que
vous puissiez intervenir ce soir.
Comme vous l'avez dit très justement, vous avez survécu, au contraire de
nombre de personnes frappées par cette pathologie, grâce à une intervention
pratiquée en urgence.
Que puis-je ajouter au constat que vous avez dressé ?
S'agissant des défibrillateurs non implantables, il existe en effet une
discrimination entre les professionnels qui sont habilités à l'utiliser en
urgence et les autres, en particulier les pompiers. Je me suis insurgé à
maintes reprises contre cet état de chose, et j'espère avoir obtenu gain de
cause, en tout cas pour l'urgence immédiate.
Une seconde discrimination, que vous avez également soulignée, existe par
ailleurs entre l'hôpital public, qui peut implanter des défibrillateurs
miniaturisés, et les cliniques privées, dans lesquelles pratiquer cet acte
chirurgical ne peut être envisagé, puisqu'il ne figure pas dans la nomenclature
des actes professionnels.
Cela étant, je ne suis pas la sécurité sociale ! Je formule des demandes, la
commission de nomenclature se réunit et prend des décisions, que je peux
ensuite accepter ou non. La navette peut durer longtemps...
Enfin, aucun défibrillateur implantable ne fait l'objet de l'inscription
nécessaire au tarif interministériel des prestations sanitaires. Je
m'efforcerai, plus encore que par le passé, d'agir dans le sens que vous
souhaitez, monsieur André, car c'est là un problème de santé publique qui
devrait être réglé très rapidement.
(M. Chérioux applaudit.)
M. Pierre André.
Je vous remercie, monsieur le ministre.
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Là où il y a une volonté, il y a une voie !
M. le président.
La parole est à M. Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur.
Je voudrais aborder la question de l'aide personnalisée à l'autonomie, l'APA.
C'est là une grande réforme, que l'on doit à l'actuel gouvernement. Elle
entrera en vigueur dans quelques jours, et il me semble important de l'évoquer
au cours de ce débat.
Récemment, j'ai entendu s'élever un certain nombre de critiques, émanant en
particulier de quelques présidents de conseil général. Selon ces derniers, la
mise en place de l'APA va coûter cher à leurs collectivités locales. Pourtant,
puisque l'ambition est de passer d'une prestation spécifique dépendance touchée
par 130 000 personnes aujourd'hui à une allocation qui, demain, sera perçue par
plus de 800 000 bénéficiaires, il est tout de même normal qu'une telle mesure
soit plus coûteuse. On ne comprendrait pas qu'il en aille autrement.
A cet égard, le dispositif financier mis en oeuvre prévoit toute une série de
compensations. Je pense ainsi au fonds de l'APA, qui représentera 5,7 milliards
de francs pour 2002, c'est-à-dire plus de la moitié de la dépense
supplémentaire engendrée par la réforme.
De plus, une péréquation entre les départements est désormais prévue, qui
n'existait pas dans l'ancien dispositif, et un certain nombre de départements
ont gagné de l'argent ou en ont dépensé moins qu'ils n'en versaient autrefois
au titre de l'allocation compensatrice pour tierce personne, qui était plus
coûteuse pour eux que la PSD.
Ces précisions étant apportées, j'aimerais savoir quelles dispositions seront
prises afin que la réforme puisse effectivement entrer en vigueur au 1er
janvier prochain, c'est-à-dire dans quelques jours.
Sur ce point, il est très important que tous les textes d'application soient
publiés et qu'un gros effort d'information soit accompli en direction des
personnes qui seront chargées d'appliquer la réforme. A ce titre, il est
essentiel de multiplier les centres locaux d'information et de coordination.
Il faudra aussi très vite former les personnels, car l'APA n'est pas
sous-tendue par la même philosophie que le PSD. Il s'agit en effet d'une
allocation à la fois universelle et personnalisée, et il conviendra donc de
faire du « sur mesure », de prendre en compte les aspirations de chaque
bénéficiaire, d'étudier quels aménagements doivent être effectués dans le
logement, bref d'envisager toutes les formes d'aide qui permettront de lutter
contre la dépendance et d'accroître la part d'autonomie. A cet égard, une large
formation devra être assurée.
Enfin, Mme Guinchard-Kunstler a récemment déclaré que cette réforme,
nécessaire et très ambitieuse, devrait entraîner la création de 40 000 emplois
dans les deux ou trois années à venir. Il est vrai que si le dispositif doit
profiter à 800 000 allocataires, les besoins en personnel seront importants, et
apparaît alors le problème du recrutement. Les conditions d'emploi seront-elles
suffisamment motivantes ? Quelle formation devront avoir ou recevoir les
personnes recrutées ?
Telles sont les questions que je souhaitais poser au Gouvernement, en
rappelant à quel point nous sommes, pour notre part, attachés à cette très
forte réforme.
(Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Guy Hascoët,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le sénateur, vous l'avez dit, mais cela
mérite d'être rappelé : la loi a été votée au mois de juillet dernier, les
décrets d'application sont parus le 20 novembre, le processus avance à grands
pas et l'APA entrera donc en vigueur, comme prévu, le 1er janvier 2002.
Actuellement, environ 250 000 personnes sont allocataires de la PSD, notre
ambition étant que 800 000 personnes bénéficient à terme de l'APA.
S'agissant des conditions de ressources pour prétendre à l'APA, un barème a
été établi. Le montant versé sera inversement proportionnel aux revenus quand
l'APA sera accordée à titre individuel ; si la personne concernée vit déjà de
façon continue dans un établissement, celui-ci recevra une dotation visant à
compenser les frais de séjour.
Je n'entrerai pas dans tous les détails, mais, au-delà des dispositifs de
financement, le montant de l'enveloppe affectée à l'accompagnement médical sur
la période 2000-2004 s'élève à 6 milliards de francs.
De ce point de vue, la loi a prévu un mécanisme transitoire permettant de
couvrir l'ensemble de la montée en charge du dispositif, afin notamment
d'éviter toute rupture de droits pour les personnes qui bénéficiaient
auparavant de la PSD et qui pourraient momentanément pâtir du basculement d'un
dispositif à l'autre : une allocation différentielle leur sera versée. Tout est
donc, vous le voyez, prêt à fonctionner.
En ce qui concerne enfin les besoins en personnel liés à l'instauration de
l'APA, le chiffre de 40 000 emplois que vous avez cité, monsieur le sénateur,
représente l'hypothèse basse ; l'hypothèse haute est de plus du double. Telle
est la théorie, mais il est vrai que nous devons tenir compte des réalités de
la formation, du recrutement, du degré de mobilité accepté par les personnes
pour occuper les emplois, des dispositions techniques et financières à prendre
pour que les services naissent et vivent sur tout le territoire.
A ce propos, je me suis rendu hier à Besançon avec ma collègue Paulette
Guinchard-Kunstler, secrétaire d'Etat aux personnes âgées, afin de visiter des
services. Tous les aspects que j'ai évoqués sont en train d'être étudiés ou
traités.
Un défi est devant nous, cela est vrai, et nous devons tous le relever.
M. Alain Joyandet,
rapporteur spécial.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Alain Joyandet,
rapporteur spécial.
Je voudrais intervenir très brièvement pour préciser
que personne ne conteste le principe de l'APA : c'est le financement qui est
discuté, car il reste en grande partie à la charge des départements.
A cet égard, le programme pluriannuel de dépenses publiques pour 2003-2005
fait apparaître une progression de 6,6 % des dépenses des administrations
publiques locales. On ne peut pas, d'un côté, regretter que les dépenses des
collectivités locales, notamment celles des départements, augmentent, et, de
l'autre, mettre à leur charge des dépenses nouvelles.
M. Philippe Adnot.
Très bien !
(M. Guy Fischer remplace M. Daniel Hoeffel au fauteuil de la
présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. GUY FISCHER
vice-président
M. le président.
La parole est à M. Goulet.
M. Daniel Goulet.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ferai, à
mon tour, un rapide constat de santé dans un registre tout à fait différent de
celui qui a été évoqué par notre sympathique collègue Pierre André. En effet,
j'évoquerai la santé d'un département rural...
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Ah !
M. Daniel Goulet.
... parmi d'autres, l'Orne : 6 123 kilomètres carrés et 290 000 habitants.
Je citerai simplement quelques chiffres issus d'une étude objective réalisée
par le quotidien
Ouest-France
, qui justifieront mes préoccupations.
S'agissant des médecins spécialistes, on en dénombre 51 pour 100 000
habitants, alors que la moyenne nationale est de 91 pour 100 000 habitants. Le
département compte six pédiatres, soit deux pour 100 000 habitants. Il y a un
dentiste pour 2 500 habitants, et il faut attendre six mois pour obtenir un
rendez-vous chez un ophtalmologiste.
En outre, les médecins généralistes qui cessent leur activité ne trouvent pas
de successeurs, ce qui est compréhensible compte tenu de la non-revalorisation
des honoraires et de l'augmentation croissante des tracasseries
administratives.
Je dirai un mot de la médecine scolaire. Pour 42 000 élèves dans
l'enseignement public, on compte seulement cinq médecins scolaires en
activité.
La médecine du travail n'échappe pas à la règle et nous faisons le même
constat d'incurie.
Je dirai un mot également sur l'hôpital.
En zone rurale, l'hôpital est plus particulièrement confronté à la spécificité
de ce milieu, et notamment à une population vieillissante qui est de plus en
plus dépendante.
Je prendrai deux exemples.
A Vimoutiers, une toute petite ville rurale de 4 600 habitants, 6 500 pour le
bassin de vie, l'hôpital doit faire face à un déficit en personnel de plus de
neuf personnes avant même la mise en place des 35 heures. Quel sera le déficit
lorsqu'il faudra appliquer la réduction du temps de travail ?
Cet hôpital a, par ailleurs, un besoin urgent de modernisation et
d'humanisation. A cet effet, un projet de 26 millions de francs doit être
réalisé en trois tranches. Vous voyez, monsieur le ministre, ce que cela
représente sur le plan financier. Je souhaite que votre ministère puisse faire
bénéficier cet hôpital de l'enveloppe supplémentaire annoncée par le
Gouvernement.
On peut dresser le même constat pour la commune de Ceton, un gros bourg
percheron. Là aussi, la maison de retraite a besoin de personnel et d'une
restructuration, la commune ne pouvant en assurer seule le coût.
Je pourrais très bien m'arrêter là et vous dire, monsieur le ministre : que
faites-vous, que pouvez-vous faire face à cette situation ?
En réalité, je vais vous parler d'avenir et d'espoir pour le monde rural, et
pas seulement d'argent et de moyens immédiats.
Pourquoi aider les jeunes agriculteurs à s'installer dans un secteur où ils
n'auront pas d'écoles pour leurs enfants, où ils auront peu de loisirs
accessibles, des services publics défaillants, où le commerce de proximité sera
inexistant et où ils n'auront pas de médecin pour les soigner ?
Comment, après le drame de Moulinex, réussir la réindustrialisation de la
région que je représente et, par conséquent, le retour à l'emploi, compte tenu
des conditions sanitaires que je viens de rappeler ?
C'est un véritable appel au secours que nous vous lançons. Nous espérons enfin
être entendus.
La France à deux vitesses, que j'ai dénoncée tant de fois dans cette enceinte,
n'est pas la France.
Ce constat est encore plus intolérable s'agissant du secteur de la santé.
Je tente de mettre en place, avec les services de la région et certaines
collectivités territoriales candidates, dans le cadre de contrats de pôle
intercommunaux existants, quelques « maisons de la santé ». Il s'agit
d'expériences, afin de mettre les médecins, en particulier les jeunes qui
sortent de la faculté, dans des conditions d'accueil favorables, en leur
fournissant des locaux et les moyens nécessaires pour l'exercice de leur
profession, comme nous l'avons d'ailleurs déjà fait pour d'autres secteurs de
l'économie et pour des services publics défaillants.
Monsieur le ministre, acceptez-vous de soutenir cette initiative en engageant
une sorte de table ronde avec vos collègues de Bercy - pour étudier bien sûr
des mesures d'incitation fiscales -, de l'éducation nationale et, surtout, de
l'enseignement supérieur, avec votre collègue de l'agriculture aussi, afin de
faire de l'Orne un département pilote sur la santé, comme il l'a été avec
succès en matière d'enseignement en milieu rural, par l'expérience réussie des
regroupements pédagogiques ?
(M. le rapporteur spécial applaudit.)
M. le président.
La parole est à M. le ministre.
M. Bernard Kouchner,
ministre délégué.
Monsieur le sénateur, il est une remarque générale à
laquelle je ne peux que souscrire : les départements ruraux se dévitalisent. Je
n'en suis pas satisfait, vous non plus. Vous le savez, 80 % de la population
française vit dans les villes. Est-ce bien ? Est-ce mal ? Ne me demandez pas de
porter un jugement moral.
Je vous répondrai précisément. J'ai sous les yeux l'article auquel vous avez
fait allusion. Je crois que sa teneur est d'ailleurs un peu exagérée.
S'agissant du manque de médecins, « il n'y a pas une seule cause », dit un
médecin. Il poursuit : « Tout d'abord, les médecins aspirent à une vie plus
régulière ; autrefois ils étaient des militants de la santé au détriment de la
vie privée. » Il est vrai qu'ils étaient cela. La culture dont je parlais tout
à l'heure est effectivement en train de se modifier. Je ne dis pas que c'est
bien ou que c'est mal ; je ne les accuse de rien ; c'est ainsi ! Ils pensent
aussi à leur famille, à leur vie privée. Nous l'avons bien sûr constaté lorsque
nous avons ouvert le dossier de la réduction du temps de travail.
Vous me demandez très précisément ce que je compte faire. Tout d'abord, je
suis d'accord pour rencontrer mes collègues, mais, vous le comprenez, si tous
les ministères doivent se réunir, la concertation sera très longue.
Les pédiatres et les ophtalmologistes ne manquent pas seulement dans l'Orne,
mais dans ce département ils font cruellement défaut. Quant à savoir si je
peux, grâce à une discrimination positive, les inciter à s'installer, la
réponse est : « oui ». Nous l'avons fait. Il faudra voir dans quelle mesure
cela fonctionne. A Essay, il existe un syndicat de communes. Sur l'initiative
d'un médecin, M. Heuzé, a été créée une structure qui comprend des
professionnels de santé, un cabinet de médecins, dentistes - il en manque
aussi, bien sûr -, infirmières et kinésithérapeutes. Peut-il y avoir des
regroupements sur l'initiative des collectivités locales ? J'encouragerai de
tels regroupements. C'est notre politique. Récemment, une émission de France 3
Normandie a alerté le public sur ce problème, et j'en suis heureux. Nous sommes
prêts à soutenir ces initiatives. Elles s'inscrivent dans la politique globale
de prise en charge des urgences.
Vous n'avez pas évoqué les urgences. Or, à cet égard, se pose un problème, qui
est général dans notre pays. En effet, les médecins généralistes, pour les
raisons que vous avez évoquées et qui sont mentionnées dans cet article,
assument de moins en moins d'urgences, ce qui surcharge l'hôpital.
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 comporte un
dispositif expérimental, qui sera étendu. Nous voulons savoir comment le faire.
Un financement a été prévu pour que l'aide à l'installation en zone rurale soit
effective. Ce sera une aide matérielle s'agissant de l'installation elle-même.
Comment inciter les médecins à remplacer ceux qui partent à la retraite, et
donc à reprendre leur clientèle et à prendre la suite ? Je ne vois pas comment
nous pourrions le faire autrement que par une incitation par la loi. Il y aura,
il le faut, des incitations matérielles. Nous sommes disposés à les prévoir.
S'agissant du problème général de la revalorisation des actes médicaux, j'ai
répondu tout à l'heure. Cependant, là, je ne suis pas seul à décider. Mme
Guigou et moi-même avons demandé à la commission concernée de la sécurité
sociale d'examiner ce problème, qu'il faudra trancher. Mais nous soutiendrons
les dispositifs précis dans l'Orne, que j'ai cités.
M. Paul Blanc,
rapporteur pour avis.
Très bien !
M. le président.
Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits figurant aux états B et
C concernant l'emploi et la solidarité : II. - Santé et solidarité.
ÉTAT B
M. le président. « Titre III : 29 604 337 euros. »