SEANCE DU 3 DECEMBRE 2001
M. le président.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances
concernant l'aviation et l'aéronautique civiles et le budget annexe de
l'aviation civile.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Virapoullé.
M. Jean-Paul Virapoullé.
Monsieur le ministre, le groupe de l'Union centriste a estimé que la question
de la desserte aérienne des départements d'outre-mer était suffisamment
importante, vitale même, non seulement pour ses destinations, mais pour la
métropole en général, pour que je puisse y consacrer l'ensemble de mon
intervention.
Je commencerai par vous remercier, monsieur le ministre. En effet, en tant
qu'élu réunionnais, j'ai suivi les opérations de restructuration d'AOM, qui a
connu de graves difficultés voilà quelques mois. Vous vous êtes personnellement
engagé dans le combat. Permettez-moi de vous dire que, si vous avez gagné la
première manche, vous n'avez pas gagné, ou plutôt nous n'avons pas gagné le
match, car c'est bien un match commun qu'il s'agit de gagner. Pourquoi ? Les
enjeux sont multiples.
Nous avons connu, voilà vingt ans, les effets négatifs du monopole d'une seule
compagnie sur ces dessertes. Les conséquences étaient le manque de choix, des
tarifs excessifs, sans compter tous les effets sur l'économie locale, que vous
connaissez mieux que moi.
Puis, l'ensemble des élus des quatre départements d'outre-mer ont milité pour
ouvrir le ciel de l'outre-mer à d'autres compagnies. C'est ainsi que sont nées
Point Air, puis AOM et, aujourd'hui, Air Lib. Avec la restructuration d'AOM, à
laquelle, je l'ai dit, vous avez participé grandement, monsieur le ministre, et
de façon très positive, nous sommes parvenus aujourd'hui à un point crucial.
Si les départements d'outre-mer n'étaient desservis que par une seule
compagnie, ces « vols sur une aile », si vous me permettez cette image,
seraient déséquilibrés. Or les liaisons aériennes sont, avec les liaisons
maritimes et les liaisons par satellite, les seuls moyens pour rompre
l'isolement de nos départements ! Je n'en connais pas d'autre.
Aujourd'hui, je m'en tiendrai aux liaisons aériennes. Que représentent-elles
pour nous ? Grâce à ces liaisons, monsieur le ministre, 2 000 jeunes du
département de la Réunion sont venus travailler cette année en métropole, 15
000 personnes sont venues se former et 2 000 étudiants ont fréquenté les
facultés nationales. Pensons aussi à tous les jeunes qui viennent passer les
concours administratifs et dont vous avez besoin dans la fonction publique,
ainsi qu'à l'exportation de notre savoir-faire dans les cultures fruitières, en
l'occurrence les litchis et les ananas.
Ce matin précisément, cinquante tonnes d'ananas, bloquées à la Réunion, n'ont
pas pu être transportées par fret sur la métropole, alors que les ananas
produits à la Réunion sont très prisés sur le plan national et sont même
considérés comme les meilleurs du monde ! La puissance publique a d'ailleurs
consacré à cette production des dizaines de millions de francs, en termes
d'efforts, d'encadrement et de production. La compagnie Air Lib s'est donc
positionnée comme « la » compagnie de l'outre-mer. Elle est excellente et les
départements d'outre-mer y sont attachés pour des raisons sentimentales et
vitales. J'écarterai les raisons sentimentales pour n'évoquer que les raisons
vitales.
Au cours de l'année 2001, le secrétariat d'Etat à l'outre-mer nous a fait
parvenir un rapport selon lequel nous aurions perdu des dizaines de milliers de
sièges à cause de la restructuration. Cette perte porte atteinte au tourisme,
qui est une corde vitale de notre économie et, comme je l'ai indiqué, à notre
capacité d'exportation des marchandises par la voie du fret. Pour reprendre
l'image de tout à l'heure, si nous n'avons pas de « vols sur deux ailes », à
savoir deux compagnies pour assurer la desserte aérienne des départements
d'outre-mer, nous mettrons en péril l'économie de ces départements et les
dégâts collatéraux seront considérables.
Avec votre autorisation, monsieur le président, permettez-moi d'en évoquer
quelques-uns devant la représentation nationale.
Si Air Lib interrompt ses liaisons, dans quelques mois, ce sont 3 200 emplois
directs qui seront touchés ; le coût s'élèvera à plus de deux milliards de
francs pour la puissance publique. Autre conséquence : les départements
d'outre-mer seront encore plus isolés et incapables de mettre à profit
l'ensemble des politiques tendant à rompre l'isolement et à réduire la
distance, qui sont nos principaux handicaps. Air lib qui disparaît, c'est
encore le ciel du développement économique des DOM qui s'assombrit.
Vous me demanderez sans doute quelle solution j'ai à vous proposer après ce
beau discours ! Rappelez-vous, monsieur le ministre. Au mois de septembre, vous
avez réuni à votre ministère, en présence du secrétaire d'Etat à l'outre-mer,
l'ensemble des présidents des collectivités locales, à qui vous avez exposé la
première partie du plan de restructuration d'Air Lib. Vous étiez convenus de
les réunir à nouveau pour leur faire connaître la finalité de l'ensemble du
dispositif. Au moment où je vous parle, Swissair qui devait verser à Air Lib
1,3 milliard de francs - c'est d'ailleurs la raison de ma présence à cette
tribune - n'a tenu parole que pour 1,05 milliard de francs, si mes chiffres
sont exacts ; mais il vous appartiendra de les corriger, puisque vous êtes le
ministre en charge de ce dossier. Il manque donc à Air Lib 300 millions, voire
400 millions de francs, pour faire la soudure entre aujourd'hui et l'atteinte
du point d'équilibre, qui est fixée à 2003.
Si la compagnie ne récupère pas ces fonds pour sa trésorerie, elle ne pourra
faire la soudure, monsieur le ministre ; Air Lib sera donc en situation de
dépôt de bilan dans les mois qui viennent. Conséquences : 3 000 emplois
disparaîtront, 2 milliards de francs seront nécessaires pour payer les frais,
Air France aura le monopole des liaisons sur l'ensemble de l'outre-mer, sans
compter les dégâts sur le plan économique qui se chiffreront à plusieurs
milliards de francs !
Monsieur le ministre, le malade n'étant pas loin du coma financier, le
Gouvernement ne devrait-il pas, très rapidement, répondre au voeu des élus de
l'outre-mer qui souhaitent sauver Air Lib ? En effet, ce matin, un collègue qui
siège sur une autre travée, et qui est par ailleurs président du conseil
régional de La Réunion, a évoqué le même problème. Il y a donc unanimité,
aujourd'hui, dans les départements d'outre-mer, particulièrement à la Réunion
pour sauver Air Lib.
Monsieur le ministre, qu'envisagez-vous concrètement pour trouver les 400
millions de francs qui manquent, afin qu'Air Lib atteigne son point d'équilibre
et que la desserte aérienne des départements d'outre-mer fasse l'objet non pas
d'une concurrence, mais d'une complémentarité entre la compagnie nationale et
Air Lib ?
Je vais vous raconter une petite anecdote, et je le ferai avec le sourire,
pour montrer que cette complémentarité est nécessaire.
Si j'ai pu m'exprimer ce soir à cette tribune, c'est grâce à Air Lib. En
effet, hier soir, quand je suis arrivé trois quarts d'heure avant le départ du
vol d'Air France, on m'a dit que je ne pouvais pas embarquer en raison du fret
trop important. Alors, j'ai fait du stop, en quelque sorte, et c'est grâce à
Air Lib que j'ai le plaisir de m'adresser à vous ce soir. Et je ne suis pas le
seul ! Il est arrivé la même chose à Jean-Luc Poudroux, président du conseil
général, qui m'accompagnait et qui a été également débarqué par Air France !
J'ai qualifié cette mésaventure d'anecdote, car pour nous ce n'est pas grave.
En revanche, pareille situation est dramatique pour un jeune qui joue son
emploi à la suite de sa réussite à un concours administratif, ou qui joue son
avenir car il va passer un oral, etc. C'est grave aussi pour un jeune qui a son
contrat de travail en poche et qui se fait « jeter » à son arrivée à Gillot, ou
encore pour des planteurs qui, comme c'est le cas actuellement, voient leur
production refusée !
Ne rien faire, ce serait commettre un crime contre l'unité de la République et
contre nos capacités de développement ! Mais je sais, monsieur le ministre, que
vous ne laisserez pas faire cela !
(Très bien ! et applaudissements sur les
travées de l'Union centriste, du RPR et des Républicains et Indépendants, ainsi
que sur certaines travées du groupe du Rassemblement démocratique et social
européen.)
M. le président.
La parole est à Mme Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les
événements tragiques du 11 septembre dernier nous amènent à débattre du budget
des transports aériens dans un contexte particulièrement déprimé pour
l'ensemble de la filière aéronautique mondiale. Certes, le ralentissement dans
ce secteur d'activité s'était déjà amorcé dès le début de 2001. La
multiplication des plans sociaux établis quelques jours après les attentats est
révélatrice du rôle d'amplificateur qu'ils ont pu jouer en générant un climat
de méfiance.
Le gouvernement américain a dû apporter des aides publiques à de nombreuses
compagnies américaines compte tenu de l'ampleur de leurs difficultés. En
Europe, les sociétés aériennes vivent des situations extrêmement précaires.
Alors que Sabena vient d'annoncer un plan de suppression de 6 000 emplois,
Swissair est dans une situation très précaire qui appelle aussi l'aide de
l'Etat. Dans notre pays, si Air France a su résister, cela n'a pas été le cas
pour les compagnies AOM, Air Liberté et Air Littoral. Nous connaissons la
responsabilité des actionnaires dans la situation de ces sociétés. Il n'en
demeure pas moins que ce sont les salariés qui, en perdant leur emploi, sont
les premières victimes. Vous avez proposé qu'Air France, particulièrement,
participe à la réinsertion de ces personnels. Compte tenu de la nouvelle
situation, quelle espérance les licenciés de ces sociétés ont-ils de retrouver
un emploi dans l'aéronautique ? Dans quelques instants, Mme Luc aura l'occasion
de vous interroger sur ce sujet. Je ne m'y arrêterai donc pas plus
longuement.
Le secteur de la construction aéronautique a également été fortement touché.
Si Airbus semble être dans une situation moins précaire, son concurrent Boeing
a annoncé qu'il envisageait le licenciement de plus de 30 000 personnes d'ici à
2002.
Ce contexte est particulièrement inquiétant et il faut veiller à ce qu'il ne
dégénère pas avec une guerre tarifaire entre les compagnies aériennes à l'affût
de gains de parts de marché. La captation de certains créneaux par des
compagnies tirant vers le bas prix doit être évitée afin qu'elle ne débouche
pas sur des formes de concurrence déloyale.
Sur un plan plus général, il devient urgent, monsieur le ministre, qu'une
gestion transparente et efficace de l'espace aérien européen soit mise en
place. La multiplication de compagnies pratiquant des bas prix est-elle
compatible avec l'exigence de sécurité que nous nous devons d'assurer ? Le
développement de ce type de sociétés contribue-t-il à la qualité du transport
aérien des usagers ? N'est-il pas particulièrement fragile ?
On nous rétorque toujours que les prix bas sont dus à des services comme la
restauration, non inclus dans le prix du billet, mais le fait que les
collectivités locales soient régulièrement sollicitées pour équilibrer les
comptes de telles compagnies n'est pas fait pour me convaincre de leur
solidité.
Dans ce domaine comme dans d'autres, la question de l'harmonisation des
législations européennes se pose avec acuité, alors que, parmi nos partenaires
européens, nombreux sont ceux qui se prononcent en faveur d'une large
libéralisation de l'espace aérien.
Qu'en est-il exactement de la position de l'Union européenne sur cette
question ? Pouvez-vous nous apporter des précisions sur l'éventualité d'un gel
des tarifs sur certains créneaux aériens décidé par la Commission ?
Il faut aussi réexaminer dans quelles conditions un second pôle aérien
français pourrait être développé à côté d'Air France qui, avec votre soutien, a
pu devenir une grande compagnie, réputée mondialement pour la qualité de ses
services.
De même, des efforts doivent être entrepris pour le développement des lignes
régionales, qui participent à l'aménagement du territoire, et en faveur de la
complémentarité intermodale entre le transport aérien et le transport par
rail.
Il est certain que l'interconnexion TGV au sud de Paris serait un nouvel atout
si, en même temps, elle permettait une desserte d'Orly par le rail.
Dans un tel contexte, votre budget, monsieur le ministre, ne verse pas pour
autant dans le pessismisme.
(Sourires.)
Nous apprécions particulièrement
la création des 476 emplois supplémentaires, dont 336 postes techniques, pour
renforcer la sécurité de la navigation aérienne.
De même, nous nous félicitons de l'augmentation de 10 % des crédits destinés à
la construction aéronautique civile. C'est une mesure significative pour
soutenir le développement de l'Airbus A 380.
Il n'en demeure pas moins que le secteur de l'aéronautique exige de plus
larges soutiens à l'échelle européenne pour rivaliser avec les Etats-Unis à
armes égales.
Telles sont, monsieur le ministre, les quelques observations que je pouvais
faire dans le temps qui m'était imparti, au nom du groupe communiste
républicain et citoyen, sur votre budget, que nous approuverons, bien entendu.
(Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et
citoyen.)
M. le président.
La parole est à M. Karoutchi.
M. Roger Karoutchi.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est
convenu, depuis le début de ce débat, de dire que l'aviation civile est
aujourd'hui à un tournant de son histoire, après deux décennies de croissance
ininterrompue du trafic aérien à un rythme annuel de l'ordre de 5 %. Comment
donc survivre en étant confronté à la fois à une chute de la demande, à une
hausse du coût d'exploitation induit par les mesures de sûreté et à un
renchérissement considérable des primes d'assurance ?
La solution passe, malheureusement, nous le voyons bien, par des
restructurations et par la réduction drastique des charges d'exploitation et
des investissements. Air France a ainsi dû stopper, dès le 18 septembre, les
affrètements ponctuels, suspendre les embauches prévues et réduire toutes les
dépenses non liées à la sûreté et à la qualité du produit fourni aux clients.
Qu'en sera-t-il pour les compagnies qui ne bénéficient pas de la même assise
financière, comme ce peut être le cas d'Air Lib, qui vient d'être évoqué ?
Face aux incertitudes et à la paralysie du secteur, les annonces de
suppressions d'emplois se succèdent. Au total, ce sont ainsi 100 000 emplois
qui ont été supprimés aux Etats-Unis et près de 40 000 qui sont menacés en
Europe.
Monsieur le ministre, le contexte particulier que nous connaissons depuis près
de trois mois nous invite, au-delà des chiffres, à nous interroger sur notre
politique aéroportuaire.
Si la question, préoccupante, de l'accroissement des capacités se pose avec
moins d'insistance aujourd'hui, au moins en apparence et au moins
provisoirement, le problème n'est pas pour autant réglé, et il est de notre
devoir, compte tenu de l'évolution cyclique constatée du trafic aérien,
d'anticiper les besoins.
Je crois qu'en la matière il n'y a malheureusement pas de solution miracle.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
C'est vrai !
M. Roger Karoutchi.
Ce week-end, sur un problème d'extension d'aéroport - non pas en
Ile-de-France, monsieur le ministre, mais à Marseille-Provence -, des communes
riveraines ont organisé un référendum. A une très large majorité, elles se sont
prononcées contre l'extension projetée, contre la création de nouvelles pistes
sur Marseille-Provence, qui n'est pourtant pas dans la situation de
l'Ile-de-France.
Quant à la gestion de l'espace aérien francilien, qu'on me permette simplement
quelques rappels.
Roissy et Orly accueillent près des trois quarts du trafic aérien national,
soit 73 millions de passagers. Malgré le retournement de conjoncture, les
estimations pour 2020 sont de l'ordre de 140 millions de passagers. Roissy, qui
a vu son nombre de passagers croître de près de 70 % de 1994 à 2000, reçoit
aujourd'hui près de 50 millions de passagers chaque année. Je vous rappelle,
monsieur le ministre, l'engagement que vous avez pris en 1997 de limiter le
trafic de cette plate-forme à 55 millions de passagers et le volume de bruit
autorisé, à celui de 1997.
M. Jean-Claude Gayssot,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.
Et on le tient
!
M. Roger Karoutchi.
A Orly, un arrêté ministériel de 1994 limite à 250 000 le nombre des créneaux
horaires utilisables, ce qui équivaut, quand même, à 25 millions de passagers
par an !
Le trafic aérien dans le Bassin parisien est actuellement en état de
quasi-saturation. Pourtant, en termes d'utilisation des capacités, les deux
plates-formes ne sont pas dans la même situation.
Roissy a « bénéficié » des contraintes réglementaires imposées à Orly et se
trouve actuellement, au regard de ses infrastructures, en état d'utilisation
limite de ses capacités, ce qui provoque des difficultés significatives en
termes de sécurité et de protection de l'environnement.
Orly souffre, sur le plan économique, des contraintes réglementaires qui
limitent l'utilisation de ses capacités, venant fournir ainsi de nouveaux
arguments à ceux qui souhaitent une extension de son trafic avec le projet de
troisième aérogare.
Pour faire face à ces problèmes, vous avez opté, le 26 octobre 2000, pour la
construction « d'une nouvelle plate-forme à vocation internationale dans le
Bassin parisien », contredisant par là même la décision prise en 1997 de geler
le projet lancé par Alain Juppé. Mais, après tout, on peut évoluer...
Vous avez fait état, le 15 novembre dernier, de votre décision de retenir,
parmi les huit sites envisagés, celui de Chaulnes, dans la Somme, malgré, là
aussi, si je comprends bien, l'opposition des riverains, des élus locaux et, si
j'en crois la presse, de vos amis Verts, Noël Mamère en tête.
Pour calmer les riverains d'Orly et de Roissy, vous avez assorti votre
décision de création d'un nouvel aéroport de mesures d'accompagnement à court
terme, annonçant un plan de soutien aux aéroports régionaux, un projet de loi
au début de 2002 pour protéger les populations riveraines, le développement de
l'aéroport de fret de Vatry et un projet d'indemnisation des victimes des
déplacements.
Mais laissons de côté le choix de Chaulnes. Reste que, à ma connaissance, mes
chers collègues, aujourd'hui, il n'y a pas une commune pour souhaiter
accueillir un aéroport sur son territoire ; des communes un peu éloignées, des
départements un peu périphériques, voire des régions limitrophes, peut-être,
mais, et chacun le comprend bien, personne ne souhaite avoir les nuisances d'un
aéroport à sa porte !
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Très juste !
M. Roger Karoutchi.
D'ailleurs, personne n'a demandé leur accord aux élus du Val-d'Oise pour créer
Roissy, j'en prends ici à témoin notre collègue Jean-Philippe Lachenaud.
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Absolument !
M. Roger Karoutchi.
Et, malgré tout, aujourd'hui, 73 millions de passagers décollent de
l'Ile-de-France ou transitent par cette région.
Je le dis très franchement : actuellement, pour toutes les populations, aussi
bien les populations rivevaines des deux grands aéroports que l'ensemble des
populations qui subissent les nuisances dues aux couloirs aériens qui partent
de ces deux aéroports,...
M. Jean-Philippe Lachenaud.
Très bien !
M. Roger Karoutchi.
... le seuil de saturation est en passe d'étre dépassé.
Je me permets un petit commentaire à l'intention de ceux qui, tout à l'heure,
ont envisagé l'éventualité...
M. Jean-Philippe Lachenaud.
D'un déménagement !
M. Roger Karoutchi.
... d'une expropriation ou d'un déménagement : cela concernerait, mes chers
collègues, et pour le seul secteur de Roissy représenté par les associations de
défense, de 300 000 à 320 000 personnes ! Je parle toujours sous le contrôle de
mon collègue Jean-Philippe Lachenaud.
Que tous les gouvernements successifs aient eu tort de ne pas bloquer les
constructions tout autour de Roissy, c'est une certitude. Mais de là à
envisager purement et simplement le déplacement de 300 000 personnes... La
chose serait tout de même un peu compliquée !
Vos mesures, monsieur le ministre, sont toutes purement incitatives et ne sont
pas de nature à mettre un frein de manière immédiate et efficace aux
insupportables pollutions sonores subies par les riverains d'Orly et de Roissy
et par toutes celles et tous ceux qui se voient imposer la nouvelle donne des
couloirs aériens ; je pense ici notamment aux zones très urbanisées du
Val-d'Oise, de la Seine-Saint-Denis, du nord des Hauts-de-Seine et de l'Essonne
où vient d'avoir lieu, comme pour l'aéroport de Marseille-Provence, un
référendum local contre les nouveaux couloirs aériens.
J'ajoute, monsieur le ministre, que vous ne nous avez donné aucune indication
sur le trafic aérien autorisé ou les couloirs aériens.
Va-t-on mettre en place à Roissy, comme c'est déjà le cas à Orly, une
interdiction de vol la nuit ? Quand la décision de l'association pour la
coordination des horaires, la COHOR, tendant à réduire de moitié les vols de
nuit sera-t-elle effective ? Quels vols seraient concernés ? Quel sort
envisagez-vous pour le projet de troisième aérogare à Orly ? Quelles décisions
allez-vous prendre en ce qui concerne les tracés des couloirs aériens ou les
mesures contraignantes, comme la hauteur des survols, qui les accompagnent ?
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, durement
touchée par les attentats du 11 septembre, l'aviation civile se trouve,
aujourd'hui, à un moment crucial de son histoire. Des circonstances économiques
extrêmement difficiles contraignent ce secteur à une douloureuse, mais vitale
restructuration. S'il importe de réagir efficacement et promptement au
changement de la donne dans le secteur pour aider les industries, assurer la
sécurité des vols et rassurer les voyageurs, nous ne devons pas pour autant
négliger les mesures urgentes et indispensables pour juguler les nuisances
environnementales, sonores et atmosphériques.
(Applaudissement sur les
travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union
centriste.)
M. le président.
Mes chers collègues, avant de suspendre la séance à la demande du
Gouvernement, je réitère mon appel à la rigueur et à la concision pour que nous
respections ce soir l'horaire qui a été fixé d'un commun accord en conférence
des présidents : l'objectif est d'avoir achevé nos travaux à zéro heure trente
pour que la séance de demain soit ouverte à neuf heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-deux heures dix, est reprise à vingt-deux heures
vingt.)