Séance du 1er décembre 1999







M. le président. Par amendement n° I-158, MM. Bécart, Bel, Mmes Bergé-Lavigne, Bidard-Reydet, Borvo, Boyer, MM. Bret, Carrère, Charzat, Collin, Debarge, Delfau, Mme Derycke, MM. Fischer, Haut, Lefebvre, André Lejeune, Loridant, Mme Luc, MM. Mélenchon, Miquel, Pastor, Piras, Plancade, Mmes Pourtaud, Printz, MM. Renar, Saunier, Mme Terrade, M. Verges, M. Auban, Mme Beaudeau, MM. Dreyfus-Schmidt, Duffour, Foucaud, Labeyrie, Lagauche, Le Cam, Moreigne et Ralite proposent d'insérer, avant l'article 24 quinquies , un article additionnel ainsi rédigé :
« Après l'article 985 du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art... - Il est institué une taxe spéciale sur les opérations, au comptant ou à terme, portant sur les devises, dont le taux est fixé à 0,05 %.
« Sont exonérées de cette taxe les opérations afférentes :
« - aux acquisitions ou livraisons intracommunautaires ;
« - aux exportations ou importations de biens et services ;
« - aux investissements directs au sens du décret n° 89-938 du 29 décembre 1989 modifié réglementant les relations financières avec l'étranger ;
« - aux opérations de change réalisées par les personnes physiques et dont le montant est inférieur à 500 000 francs.
« La taxe est due par les établissements de crédit, les institutions et les services mentionnés à l'article 8 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit, les entreprises d'investissement visées à l'article 7 de la loi n° 96-597 du 2 juillet 1996 de modernisation des activités financières et par les personnes physiques ou morales visées à l'article 25 de la loi n° 90-614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment de capitaux provenant du trafic de stupéfiants.
« La taxe spéciale est établie, liquidée et recouvrée sous les mêmes garanties et sanctions que le prélèvement mentionné à l'article 125 A du code général des impôts. Elle est due pour les opérations effectuées à compter du 1er juillet 2000.
« Un décret fixe les modalités d'application du présent article. »
La parole est à M. Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, vous l'avez sans doute appris, dix-sept sénateurs ont décidé de se regrouper pour se constituer en un comité ATTAC - association pour la taxation des transactions financières pour l'aide aux citoyens - lié à cette association nationale dont le président est M. Bernard Cassen, pour se faire l'écho auprès de vous des initiatives citoyennes qui sont prises en faveur notamment de la taxation des mouvements de capitaux qui déstabilisent l'économie mondiale.
Ces sénateurs ont pris l'initiative de proposer un amendement allant dans ce sens. Ils ont été rejoints par un certain nombre de leurs collègues. En sorte que, à cette heure, ce sont quarante-six sénateurs qui ont l'honneur de vous faire cette proposition et qui m'ont désigné pour vous la présenter.
Il s'agit de taxer les mouvements de capitaux qui, aujourd'hui, perturbent l'économie mondiale. J'ose le dire, lorsque ces quarante-six sénateurs s'expriment, en vérité, ils font état d'un sentiment bien plus largement répandu et, en tout cas, je le sais, unanime sur les travées de la gauche, même s'il arrive que, sur l'appréciation des moyens à mettre en oeuvre, les avis puissent diverger.
C'est un état d'esprit qui proteste contre un ordre du monde où la toute-puissance de l'argent peut jeter à bas des années d'efforts, d'économies, de travail, d'application et de peine de peuples entiers dès que, ici ou là, un profit semble à portée d'un mouvement d'ordinateurs ou d'une spéculation. Nous constatons ainsi que ce sont plus de 1 500 milliards de dollars qui s'échangent chaque jour, dont une proportion infime correspond à des transactions réelles et à des richesses réelles, et le reste est exclusivement à vocation spéculative.
On le sait, sur la masse de ce qui s'échange, 80 % des placements de cet ordre sont au maximum d'une durée de sept jours. En réalité, ces mouvements se déroulent pour l'essentiel en une seule journée. C'est assez dire leur vocation spéculative !
C'est pourquoi nous proposons que ces mouvements, que l'on dit erratiques et que je qualifierai moi, de hautement intéressés, soient taxés à proportion de 0,05 % de leur montant. Ainsi, ceux qui se placeraient avec une vocation productive et correspondraient à une transaction matérielle réelle se trouveraient fort légèrement taxés, tandis que ceux qui ont vocation à aller et venir d'une place à une autre, d'un jour sur l'autre, se trouveraient bien évidemment, du fait même de la répétition de ces mouvements, taxés jusqu'à 20 % au maximum pour des mouvements quotidiens.
Ce dispositif que je soumets au Sénat a déjà été présenté non seulement à l'Assemblée nationale mais aussi au Parlement européen.
En l'adoptant, le Sénat adresserait un message en étroite conjonction temporelle avec ce qui se déroule, ici et là, dans le monde entier, et tout spécialement à Seattle, autour du nouveau round , dit-on dans ce franglais maintenant devenu habituel, autour de cette nouvelle manche de négociations qui visent à transformer le monde entier en une marchandise négociable et à laquelle s'opposent des gouvernements, des formations politiques, des syndicats et une masse immense de citoyens.
En l'adoptant, le Sénat serait en phase avec ceux qui veulent un monde plus juste, où la peine, l'effort et le travail productif ne se trouveraient pas sans cesse sous la menace d'une décision individuelle à caractère purement spéculatif.
En l'adoptant, le Sénat s'inscrirait dans la démarche citoyenne qui anime le monde sur ces questions aujourd'hui.
Le vote qui va avoir lieu dans un instant, sur votre initiative, monsieur le président, sera entendu - et c'est bien le sens de ce que nous entreprenons - comme un appel à la lutte et, peut-être plus encore, comme un signal du refus de la résignation.
C'est le rôle des parlementaires que de se faire ici l'écho des préoccupations de nos concitoyens et de leur montrer en retour qu'il n'y a rien d'inéluctable ou de fatal à ce que les choses soient ainsi, et que l'action législative peut les corriger. (Applaudissements sur certaines travées socialistes ainsi que sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission est défavorable à cette proposition qu'elle considère comme mauvaise dans son principe et inopérante dans son dispositif.
Elle est mauvaise dans son principe, car on ne peut pas réguler l'économie d'aujourd'hui avec des effets de manches. On ne peut pas nier que nos économies, en particulier celles du monde développé, communiquent librement, sont interconnectées et que la prospérité de nos différents pays est proportionnelle à l'ouverture des frontières et à l'amplification des flux économiques et financiers.
Mes chers collègues, si vous examinez les cycles d'activité de notre pays, vous constatez que les périodes les plus prospères ont correspondu à des périodes d'ouverture et d'amplification des échanges internationaux et que les périodes de tristesse, de repli, ont souvent été les périodes de fermeture, d'autarcie, de protectionnisme.
Certes, vous nous parlez des transactions financières et vous utilisez le mot « spéculation », qui est facile à employer mais difficile à définir.
Naturellement, en y mettant un contenu moral, la spéculation est quelque chose d'horrible. Mais si l'on regarde les ressorts de l'activité économique, les ressorts de la prise de risque, les ressorts de l'esprit d'entreprise, ne faut-il pas toujours anticiper, c'est-à-dire prendre des paris, accepter de se situer dans un environnement dur, difficilement prévisible, pour aller de l'avant, pour créer, investir et développer.
Tout entrepreneur est quelque part et à un moment donné un spéculateur, dans le bon sens du terme. Où commence, où s'arrête, où devrait s'arrêter la spéculation frappée d'un opprobre moral ou politique ? Je pose la question. Il existe maints traités sur ce sujet, il y a des écrits extrêmement savants dans tous nos pays. Il va de soi que l'on ne peut pas trancher un tel débat en quelques mots.
Au nom de la commission, je considère que cette initiative est largement démagogique (Exclamations sur les travées socialistes) car elle vise à utiliser les insatisfactions et les frustrations pouvant exister dans une partie de l'opinion publique et à les retourner contre des boucs émissaires. (Protestations sur les mêmes travées.) La stratégie du bouc émissaire a toujours servi à tout moment de la vie politique, mais ce n'est certainement pas une bonne méthode ; en tout cas, elle n'est pas digne de l'action politique telle que, les uns ou les autres, nous pouvons souhaiter la mener. (Nouvelles protestations sur les mêmes travées.)
M. Jean-Luc Mélenchon. N'y allez-vous pas un peu fort ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non, je n'y vais pas un peu fort ! Utiliser l'ignorance pour braquer l'opinion publique contre des boucs émissaires quels qu'ils soient, mes chers collègues, porte en germe tous les totalitarismes. (Protestations sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.) Croyez-moi, c'est ainsi qu'ils procèdent et qu'ils commencent ! Utiliser l'ignorance pour chercher des boucs émissaires, je le répète, porte en germe tous les totalitarismes !
M. Marcel Charmant. C'est scandaleux !
M. Jean-Luc Mélenchon. Qu'avez-vous mangé, monsieur le rapporteur général ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est vous qui me donnez les ingrédients !
M. Jean-Luc Mélenchon. Moi, je n'ai pas utilisé ce vocabulaire, monsieur Marini !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement, en termes parlementaires, pardonnez-moi de vous le dire - ne le prenez pas mal - c'est de la « mal-bouffe ». (Protestations sur les travées socialistes.)
M. Michel Sergent. Il y a des limites !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Ça, ce n'est pas de la démagogie ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quant au dispositif lui-même, il est inopérant, c'est clair. Vous le savez bien, ce n'est pas un Etat qui va, à lui tout seul, changer les règles du jeu mondiales ni même européennes.
Puisque vous vous intéressez à ces sujets...
M. Marcel Charmant. Vous n'êtes pas les seuls à vous y intéresser !
M. Jean-Luc Mélenchon. Nous nous y intéressons mais nous ne sommes pas intéressés !
M. Philippe Marini, rapporteur général. ... je voudrais vous indiquer des pistes, peut-être un peu plus constructives. Au sein de la commission des finances, nous avons, depuis le début de cette année, un groupe de travail totalement pluraliste, qui s'est souvent réuni et qui se concentre sur les questions de régulation financière et monétaire internationale. Siègent dans ce groupe des représentants de tous les groupes politiques, en particulier des vôtres. M. Massion, pour le groupe socialiste, et M. Loridant, pour le groupe communiste républicain et citoyen, peuvent témoigner du caractère objectif et ouvert des travaux que nous conduisons.
Mme Danièle Pourtaud. Nous n'avons pas encore eu ses conclusions !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quelle piste pouvons-nous proposer à votre sagacité ? Cette piste est meilleure sans doute que celle qui est proposée dans votre amendement et que j'ai qualifiée, sans doute de manière un peu excessive (Exclamations sur les travées socialistes), ...
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous m'avez traité de démagogue, d'indigne et d'autoritariste !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais nous nous connaissons suffisamment pour qu'il y ait un peu de fantaisie dans nos discussions.
Mme Danièle Pourtaud. Vous êtes fidèle à votre réputation ! Ça c'est sûr !
M. Marcel Charmant. Vous appelez ça de la fantaisie !
M. Jean-Luc Mélenchon. Si c'est de la fantaisie, j'accepte !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie.
Monsieur le rapporteur général, aux termes du règlement du Sénat, votre temps de parole n'est pas mesuré. Mais, pour répondre au souhait exprimé par M. le président de la commission des finances, et que je partage, je vous demande d'être aussi concis que possible, afin que nous puissions achever nos travaux dans le délai prévu.
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Monsieur le président, moins je serai interrompu et plus je serai bref !
M. Marcel Charmant. Il ne faut pas provoquer !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ne me provoquez pas, sinon je continuerai à développer d'autres arguments.
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est vous qui provoquez !
M. Marcel Charmant. Chantage !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Parmi les pistes que vous seriez inspirés d'explorer et, peut-être, de suggérer au Gouvernement, je vous en propose une.
Un peu partout, notamment en Europe, il est des territoires un peu particuliers du point de vue de la réglementation, que l'on qualifie soit de paradis fiscaux, soit de places offshore. Il serait sans doute opportun qu'au sein de l'Union européenne une action s'exerce de manière volontariste sur ce qui est à nos portes et sur quoi nous pouvons peut-être avoir une certaine influence. En effet, il existe - je ne détaillerai pas - sur le continent européen ou en marge de celui-ci un certain nombre de territoires où ne s'applique certainement pas la transparence telle que nous pourrions la souhaiter.
Au lieu de lancer ainsi des slogans, de mobiliser et de manifester sur des choses illusoires, peut-être faudrait-il s'assigner des objectifs concrets dans ces domaines, ce que peut faire le Gouvernement dans le cadre de la nécessaire concertation au sein de l'Union européenne. Sans doute serait-ce plus utile, sans doute serait-ce plus opportun, plutôt que d'imaginer que seuls, nous pourrions nous entourer, comme un village gaulois, de palissades, qu'elles s'appellent « loi Tobin » ou autrement ?
Vous le savez bien, de telle propositions sont illusoires et inopérantes, mais vous les utilisez en exploitant l'ignorance de ceux qui ont le tort de vous soutenir. (Applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants. - Protestations sur les travées socialistes et sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen.)
Mme Hélène Luc. Vous n'avez pas le droit de dire cela !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° I-158 ?
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Le Gouvernement s'intéresse à ces sujets...
M. Jean-Luc Mélenchon. Très bien !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. ... et il est préoccupé par les thèmes qui ont été évoqués tout à l'heure.
La situation monétaire et financière internationale et la spéculation internationale posent en effet de tels problèmes, qui dépassent d'ailleurs l'aspect économique car il s'agit d'un problème de civilisation, l'avenir de la société humaine étant en question, qu'il est normal que cette interrogation soit évoquée, même au détour d'un amendement déposé à l'occasion de l'examen d'un projet de loi de finances, par la Haute Assemblée.
S'agissant de la spéculation sur les marchés de capitaux, je dois ici rappeler les efforts que le Gouvernement de Lionel Jospin a engagé dès son accession aux responsabilités. En effet, dès 1997, mais plus encore en septembre 1998, nous avons pris un certain nombre d'initiatives tout à fait notables.
Permettez-moi de les résumer brièvement.
D'abord, l'imposition de contraintes de transparence aux entités non régulées, telles que les hedges funds ; le forum de stabilité financière créé par le G 7 doit faire ses premières propositions, monsieur Mélenchon, au cours du printemps 2000. C'est la première disposition obtenue par le Gouvernement de M. Jospin.
La mise en place de normes internationales de régulation prudentielles et de lutte contre le blanchiment de l'argent sale : groupe d'action financière internationale et le forum de stabilité financière travaillent actuellement pour faire des propositions l'année prochaine sur cette question. C'est la deuxième mesure que le Gouvernement de Lionel Jospin a obtenu de ses partenaires internationaux et des six autres membres du G7.
La troisième mesure, c'est le soutien aux pays émergents dans leur choix du régime de change. Il s'agit d'une action de coopération et de longue haleine, à laquelle jamais la France n'a failli.
La quatrième mesure, c'est la création de dispositions de régulation prudentielles des mouvements de capitaux, telle celle qui a été utilisée par le Chili.
Ces mesures pour lesquelles la France a milité sont désormais acceptées par la communauté internationale et promues par le Fonds monétaire international, le FMI. Leur objectif rejoint celui de la taxe que vous préconisez.
Enfin, faut-il mentionner la réorientation du rôle du FMI - ce point a récemment été évoqué à l'occasion du départ de son directeur général - vers la prévention des crises spéculatives et vers une action de régulation pour réduire le dommage, en particulier le dommage au milliard d'habitants de la planète les plus pauvres, les plus modestes, qui subissent de plein fouet les conséquences de la spéculation financière internationale ?
Mme Hélène Luc. Eh oui !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Toutes ces mesures auxquelles la France a pris une large part sont efficaces, plus efficaces que la création éventuelle d'une taxe qui, même si votre projet dépasse la seule interpellation des autorités monétaires, financières et politiques internationales, ne paraît pas réaliste aujourd'hui.
Votre idée, issue d'un véritable souffle d'analyse et de générosité, ne vaudrait, tout le monde le comprendra, que si elle était appliquée à l'échelon mondial. La France ne peut pas la mettre en oeuvre seule, dans l'isolement. Or, en ce domaine, le consensus international étant, force est de le reconnaître, inaccessible à court terme, elle ne serait pas vraiment immédiatement efficace, elle détournerait de la France non seulement des flux de capitaux, avec des conséquences non maîtrisées, mais aussi des flux économiques réels, que vous entendez, bien sûr, préserver, mais qui sont intimement liés au niveau des taux de change.
Je le répète, la France veut agir, et elle agit efficacement au niveau des instances mondiales adéquates. S'agissant, par exemple, de la lutte contre les paradis fiscaux, la France a lancé et soutenu des initiatives multilatérales en la matière. Elle a donc été certainement parmi les pays développés celui qui a le plus clairement dénoncé ces travers de la société financière internationale.
Ainsi, dans le cadre des travaux de l'OCDE, la France a eu un rôle déterminant dans la préparation et l'élaboration du rapport adopté le 9 avril 1998 sur ce que l'on appelle « la compétition fiscale dommageable »
M. Jacques-Richard Delong. Elle est contre !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. Ce rapport prévoit que les Etats membres s'engagent à élaborer une liste de paradis fiscaux commune à l'OCDE - c'est un progrès considérable par rapport à une situation que nous critiquions depuis des années - à adopter ou à renforcer dès maintenant des mesures de rétorsion à l'égard des paradis fiscaux et à appliquer les principes du rapport.
Cela dit, la réflexion n'est pas close sur le sujet. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a soutenu un amendement du président de la commission des finances et du rapporteur général, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, aux termes duquel le Gouvernement déposera sur le bureau de chaque assemblée parlementaire, avant le 15 juin 2000, un rapport qui comprendra trois éléments déterminants allant parfaitement dans le sens préconisé voilà un instant par les auteurs du présent l'amendement.
La première partie du rapport comportera un élément de diagnostic. Ce dernier complétera le travail d'évaluation des pertes de recettes publiques résultant de la concurrence fiscale internationale, travail qui a été entamé par les parlementaires et par le Gouvernement.
La deuxième partie du rapport établira une liaison entre le diagnostic et l'action par une évaluation précise de l'incidence que pourrait avoir sur les finances publiques l'instauration de prélèvements assis sur les mouvements de capitaux, car, au fond, c'est la question qui est posée.
On ne peut pas trancher dans un sens ou dans un autre sans avoir préalablement simulé ou évalué les conséquences concrètes d'une telle taxe sur les transferts de capitaux à l'échelle mondiale. J'ai bien relevé qu'ils étaient à la hauteur de 1 500 milliards de dollars par jour. Il faut connaître et évaluer les détournements et changements que la création d'une taxe peut entraîner dans les circuits financiers internationaux.
La troisième partie du rapport que le Gouvernement vous fournira avant le 15 juin 2000 comprendra la présentation d'un programme d'actions de la présidence française de l'Union européenne dans des domaines précisément énumérés : la régulation internationale des mouvements de capitaux, la lutte contre la spéculation financière, la définition de nouvelles modalités de lutte contre la concurrence fiscale dommageable et contre les paradis fiscaux, enfin la nouvelle définition et les moyens de la lutte contre les pratiques fiscales dommageables entre les différents Etats qui encouragent des situations inacceptables économiquement et moralement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement n'est donc pas inactif. Il a engagé dès juin 1997, avec résolution, détermination et dans la clarté politique, une action contre la spéculation internationale.
Il l'a fait à la mesure des moyens dont dispose un Etat comme la France au sein du concert des nations. Or, malgré toute l'importance que lui confère sa place de quatrième puissance économique mondiale, notre pays ne dispose pas à lui seul des moyens de mettre fin aux travers et aux graves dommages pour l'humanité que dénonce votre amendement.
Toutefois, étant donné les avancées politiques qui ont été obtenues par la France grâce à son attitude résolue au sein des différentes instances internationales auxquelles elle participe, étant donné l'attachement du Gouvernement à la philosophie qui sous-tend votre amendement, je souhaiterais, monsieur Mélenchon, que vous acceptiez de retirer celui-ci.
Nous allons dans le bon sens et vous nous aidez par vos prises de position : continuons à défendre notre point de vue devant toutes les instances internationales, notamment l'OCDE, l'Organisation de coopération et de développement économique, où la France est partie prenante et exerce une influence de plus en plus grande sur ces sujets qui concernent en effet l'avenir de l'humanité. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
Mme Hélène Luc. C'est bien, mais cela ne suffit pas !
M. le président. Monsieur Mélenchon, l'amendement est-il maintenu ?
M. Jacques-Richard Delong. Allez jusqu'au bout ! Il ne faut pas « se dégonfler » !
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur le président, je ne me prononcerai pas avant que ma collègue Mme Bidard-Reydet ait pu s'exprimer. Donc, pour l'instant, je le maintiens.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° I-158.
M. Jacques Oudin. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Oudin.
M. Jacques Oudin. J'ai écouté avec intérêt le plaidoyer vibrant et chaleureux de M. le secrétaire d'Etat mais je n'ai toujours pas compris s'il était pour ou contre cet amendement !
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat. J'ai demandé son retrait !
M. Jacques Oudin. Vous avez fait état de toutes les actions menées par le Gouvernement.
Si vous nous autorisez une suggestion à propos d'un amendement dont chacun comprend le caractère totalement irréaliste et inopérant dans les circonstances actuelles - compte tenu de l'existence de 64 à 70 pays dits paradis fiscaux sur les 182 pays au monde, chacun imagine l'efficacité de la mise en oeuvre de ce dispositif dans un Etat, voire dans les quinze Etats européens... - je me permets de vous donner un conseil : pourquoi la France, qui semble avoir entamé cette démarche, ne proposerait-elle pas aux instances internationales de faire éventuellement financer l'ONU par l'impôt ? Cela nous soulagerait d'un certain nombre de fardeaux fiscaux ou financiers.
Créer un impôt mondial, pourquoi pas ? Mais là, la tâche est rude, monsieur le secrétaire d'Etat, et je vous souhaite bonne chance !
Mme Danielle Bidard-Reydet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Bidard-Reydet.
Mme Danielle Bidard-Reydet. Cet amendement n° I-158, aujourd'hui soumis à notre vote, est original quant à son objet et quant à ce qu'il représente, comme le démontre la discussion qui vient de s'ouvrir dans cette enceinte.
La passion de M. le rapporteur général du budget en souligne à la fois l'importance et l'opportunité. La longue réponse de M. le secrétaire d'Etat confirme ce que pensent tous les signataires de cet amendement. En effet, cet amendement a été cosigné - chose rarissime au Sénat - par un nombre important de sénateurs de sensibilités politiques différentes.
Il illustre donc à sa manière une forme de prise de conscience collective des dangers de la spéculation financière effrénée, dénoncés par l'Association pour la taxation des transactions financières pour l'aide aux citoyens dont chacun sait qu'elle a une audience grandissante.
L'étonnement de M. Marini quant à la définition de la spéculation est tout à fait surprenant.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Et la définition du totalitarisme, cela vous intéresse aussi ?
Mme Hélène Luc. Qu'est-ce que cela à voir ?
Mme Danielle Bidard-Reydet. Oui, monsieur, cela m'intéresse, car je suis de celles et de ceux qui ont toujours combattu le totalitarisme !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Elle est bien bonne ! C'est vrai que la chute du mur de Berlin date de dix ans !
Mme Danielle Bidard-Reydet. Je ne pense pas, monsieur, que ce genre de réflexions soit de nature à vous grandir dans le débat important qui nous occupe.
Je suis étonnée de la rédaction de M. le rapporteur général du budget au mot « spéculation » alors que, chacun le sait, la spéculation financière n'a aucun lien avec la production ni avec le travail des hommes. Et c'est bien cela que nous combattons !
Les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen se sont donc associés à cette démarche. Ils ont d'ailleurs déposé, à l'automne 1997, sur le bureau du Sénat, une proposition de loi tendant à instituer une taxation des mouvements spéculatifs menés sur les marchés financiers et dont le montant, cela a été rappelé, est de l'ordre de 1 500 milliards de dollars par jour.
Bien entendu, cet amendement rejoint pleinement nos préoccupation antérieures. Il trouve de surcroît, dans la période récente, une acuité toute particulière.
L'ouverture du cycle de négociations de Seattle sur les conditions de fonctionnement de l'Organisation mondiale du commerce est en effet marquée par une forte prise de conscience face au développement de la mondialisation et à la globalisation des échanges.
Ce développement, qui tend à faire de tout une marchandise, porte donc en germe une aggravation des inégalités économiques entre les diverses parties de la planète. Or, chacun de nous sait que ces inégalités sont porteuses de frustrations et d'explosions de violences.
La taxation des mouvements spéculatifs menés sur les marchés monétaires est une revendication portée par un mouvement grandissant de l'opinion publique. Il nous importe de prendre en compte clairement ces aspirations nouvelles et déterminées.
Ce que vous appelez, monsieur Marini, un slogan, la taxe Tobin, comme on a coutume de la désigner, du nom de cet Américain Prix Nobel en 1972...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Il y en a bien d'autres !
Mme Danielle Bidard-Reydet. ... est donc pour nous un des moyens d'atteindre un but clairement défini : la recherche d'un nouvel équilibre du développement de l'ensemble de l'humanité, pour que soient plus justement partagés les fruits de la croissance économique et que ceux qui en sont exclus, êtres humains ou nations, en deviennent bénéficiaires.
Dans notre proposition de loi déposée en 1997, nous avions souhaité que le produit de cette taxation des mouvements monétaires soit affecté au financement de la politique française de développement et de coopération.
La taxation des mouvements spéculatifs, qui engage ces sommes tout à fait importantes, n'est certes pas une panacée.
Cependant, on notera à ce propos que le Président de la République du Brésil, M. Cardoso, s'est fait l'écho de la mise en place de cette taxe lors de la rencontre de Florence des chefs d'Etat et de gouvernement, marqué par la présence du Premier ministre français.
La taxe Tobin n'est ni le seul outil de financement de notre politique de coopération, ni le seul moyen pour obtenir des échanges commerciaux et économiques équilibrés, soucieux de développement durable de l'ensemble de l'humanité, mais elle en constitue l'un des maillons essentiels.
Il serait donc, selon nous, tout à fait significatif que notre pays décide de la mettre en place pour impulser clairement sur cette question un mouvement à l'échelon international.
Cette démarche n'est d'ailleurs pas contradictoire avec celle de l'article 24 quinquies du projet de loi de finances.
M. le président. Madame Bidard-Reydet, veuillez conclure s'il vous plaît !
Mme Danielle Bidard-Reydet. Nous voterons donc cet amendement sur lequel nous demandons un scrutin public. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen ainsi que sur certaines travées socialistes.)
M. Jacques-Richard Delong. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Delong.
M. Jacques-Richard Delong. Monsieur le président, mes chers collègues, je ne vous cache pas que les exposés successifs de M. Mélenchon, de M. le rapporteur général et de M. le secrétaire d'Etat ont quelque peu troublé bon nombre d'entre nous.
Monsieur Mélenchon, vous avez qualifié « d'attaque » cette taxe de 0,05 % sur des mouvements de capitaux internationaux. J'ai peur que ce soit non pas une attaque, mais une simple piqûre de moustique !
Selon M. le rapporteur général, dont l'argumentation semble assez fondée, cette mesure ou une mesure de cet ordre ne saurait être purement nationale et ne pourrait être valable qu'à la condition d'être étendue à l'échelon international.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez longuement répondu à la fois à M. Mélenchon et à M. le rapporteur général. Vous avez dit être en parfait accord avec l'initiative de M. Mélenchon... Moyennant quoi, vous lui avez demandé de retirer son amendement...
C'est un système tout à fait politique, je le conçois. Sachez simplement qu'un certain nombre d'entre nous ont éprouvé quelque trouble en entendant l'expression de ces opinions variées dont nous imaginons tous qu'elles sont, bien entendu, sincères...
Personnellement, j'étais plutôt tenté de sous-amender l'amendement de M. Mélenchon et de porter le système qu'il préconisait de 0,05 % à 10 %, à condition qu'il soit étendu au monde entier. Mais cela semblerait mettre le Gouvernement dans une position difficile, ce dont je me garderai bien.
Dans ces conditions, et compte tenu de la diversité des opinions, je m'abstiendrai courageusement !
M. Bernard Angels. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Angels.
M. Bernard Angels. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, je ne m'exprimerai pas sur le même ton que M. le rapporteur général. J'ai d'ailleurs été très étonné par certains de ses propos.
Le sujet abordé par cet amendement est important et mérite un débat serein. En effet, l'idée de la taxe Tobin est intéressante car elle se situe dans le combat nécessaire pour que la mise en place de mécanismes de régulation des capitaux spéculatifs.
Le groupe socialiste ne peut donc qu'être d'accord sur la philosophie de cet amendement. Mais cette taxe est inapplicable dans la situation actuelle.
M. Jean Chérioux. C'est vrai !
M. Bernard Angels. En effet, l'instauration de cette taxe dans un pays ou dans une zone monétaire entraînerait une simple délocalisation des transactions.
De plus, les seuls qui pourraient respecter le jeu ainsi défini par cette taxe Tobin seraient les investisseurs institutionnels. Les autres pourraient contourner la taxe par des délocalisations, des opérations de change ou par des innovations financières permettant de dissimuler certaines opérations.
En fait, pour que cette idée soit réalisable, il faudrait qu'elle soit adoptée sur tous les marchés internationaux en même temps, autrement dit qu'il y ait accord de tous les pays. Il faudrait, comme l'a dit M. Tobin lui-même, faire de l'application de cette taxe l'une des conditions de l'adhésion au FMI et interdire les centres offshore. Inapplicable dans le monde sans une profonde modification du système financier international, cette taxe l'est, par conséquent, en Europe et encore plus en France.
Bien que nous acceptions l'idée de lutter contre la spéculation, nous ne pourrons donc pas adopter cet amendement, la vraie question étant, pour nous, d'avancer dans la lutte contre la déstabilisation issue des mouvements des capitaux spéculatifs.
En conséquence, tout comme M. le secrétaire d'Etat, nous souhaitons que les auteurs de l'amendement veuillent bien le retirer, faute de quoi le groupe socialiste, dans sa grande majorité, s'abstiendra. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Joël Bourdin. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Bourdin.
M. Joël Bourdin. On peut effectivement vouloir lutter contre la spéculation, en tout cas une certaine forme de spéculation, ce qui demande un effort de définition, et, de ce point de vue, je serais plutôt d'accord pour que l'on prenne des mesures.
Seulement voilà : ce qui nous est proposé n'est pas approprié ! Que ferait-on, en effet, si l'on imposait les mouvements de capitaux, même simplement ceux qui ne sont pas engendrés par les transactions sur les biens et les services ? On gênerait la plupart de nos entreprises et de nos banques, qui, chaque jour, sur le terrain, se trouvent engagées par des emprunts, par des achats, en dollars, en yens, etc., qui induisent des mouvements de capitaux.
L'opération la plus classique du banquier qui est engagé en quelque domaine que ce soit - biens, services ou capitaux - c'est le swap, c'est-à-dire un crédit croisé qui se traduit par des entrées et des sorties. La plupart de nos grandes entreprises, de nos banques, sont obligées chaque jour, pour des raisons techniques, de déplacer des capitaux, parfois même plusieurs fois par jour, précisément pour se protéger de la spéculation. Proposer une taxe visant à pénaliser ceux qui cherchent à se couvrir contre la spéculation, ce serait le monde à l'envers !
Il est de bon ton, en France, de toujours critiquer les marchés à terme. On me permettra de rappeler que ces marchés, même s'ils ont attiré, même s'ils attirent encore des spéculateurs, ont d'abord été créés pour protéger un certain nombre d'entreprises, étant entendu que, lorsqu'elles sont engagées en devises, engagées sur des marchandises, la meilleure façon, pour elles, de stabiliser leur prix, c'est d'intervenir sur un marché à terme. Là encore, il y a une logique inéluctable tenant à des raisons techniques et, là encore, je ne vois pas pourquoi on pénaliserait ceux qui veulent se couvrir.
Dès l'instant où l'on ne peut pas faire le tri, dans les mouvements de capitaux, entre ceux qui sont bons, induits qu'ils sont par la volonté de se protéger contre la spéculation, et les autres, il faut se garder de mettre le doigt dans l'engrenage.
Je me souviens d'une époque où l'on pensait que la France pourrait être une grande place financière, ce que - on peut le déplorer - elle n'est pas. On a essayé de monter un marché à terme du café, du cacao, de différents produits, on a monté le MATIF, le marché à terme d'instruments financiers, toutes choses qui engendrent des mouvements capitaux. Si l'on retire, dans le fonctionnement du MATIF, dont on peut se réjouir, les mouvements de capitaux qui viennent de l'étranger, on n'a plus grand-chose !
En conséquence, je le répète, au regard de la nécessité de la couverture ou de la défense des marchés à terme, qui servent précisément à assurer cette couverture, on n'a pas le droit de pénaliser les mouvements de capitaux, qui sont techniquement nécessaires, sauf à s'enfermer chez soi, à se cadenasser, à se placer en dehors des mouvements internationaux.
Soucieux de voir la France se développer dans une mouvance internationale, de la voir développer ses échanges, le groupe des Républicains et Indépendants votera résolument contre l'amendement.
Mme Gisèle Printz. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à Mme Printz.
Mme Gisèle Printz. Au-delà des dispositions techniques, qui peuvent se discuter, l'idée d'une taxe sur les mouvements de capitaux a cristallisé de manière tout à fait étonnante les mécontentements, les révoltes même, des citoyens, écoeurés par la brutalité de cette nouvelle économie néo-libérale, par les mouvements des grands groupes transnationaux échappant à tout contrôle, pour qui le capital n'a plus de capitale ; on ouvre ici l'usine qu'on a fermé là-bas, on fusionne, on s'entre-dévore sans autre logique que celle des coûts et des profits, laissant aux Etats, c'est-à-dire au contribuable, le loisir de régler l'addition sociale. Les démocraties devraient être consternées ; les électeurs ne contrôlent plus rien.
Mais, à Seattle, quelque chose se passe. Alors que, jusqu'ici, les économistes, les experts, négociaient en catimini les règles qui touchaient à la vie quotidienne de millions de personnes, à Seattle, les opinions publiques, les citoyens se sont invités.
Le monde n'est pas qu'une marchandise, les citoyens ne sont pas que des consommateurs. Les mots d'ordre, les propos des manifestants expriment parfaitement le déficit de démocratie ressenti, le besoin pour eux d'intervenir, d'être considérés comme des êtres humains, comme des citoyens et non pas seulement comme des consommateurs.
Les négociateurs de Seattle devront être attentifs à la demande de cette internationale des citoyens balbutiante : réguler à l'échelon mondial ce qui a été dérégulé au niveau local, avec, au coeur des débats, non pas l'idée du profit à tout prix mais le besoin partagé de justice sociale.
Pour conclure, je citerai cette parole d'un mineur d'Afrique du Sud manifestant à Seattle : « Nous avons besoin du commerce international, mais celui-ci doit être juste ! » (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Yves Fréville. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Fréville.
M. Yves Fréville. J'ai écouté, avec beaucoup d'intérêt, notre collègue Joël Bourdin, dont je partage tout à fait l'analyse.
Je suis personnellement tout à fait hostile aux taxes sur les transactions. Une taxe sur les transactions, le Gouvernement, à juste titre, en a supprimé ou réduit une en abaissant les droits de mutation sur les immeubles.
Pour les mouvement de capitaux, c'est le même principe qui joue. En effet, comme l'a très bien dit Joël Bourdin, on ne peut faire le tri entre les bons mouvements de capitaux, ceux qui rééquilibrent, et les mauvais. Et des mouvements de capitaux, il y en a sans arrêt, parce qu'il y a des échanges, parce qu'il faut se placer sur les marchés à terme, parce qu'il faut égaliser les taux d'intérêt, d'autant que, très souvent, les marchés de capitaux rééquilibrent !
Quant aux mauvais mouvements de capitaux, comme disent certains, les mouvements de capitaux spéculatifs, la taxe Tobin peut-elle les enrayer ? A cet égard, on me permettra de faire deux remarques.
D'abord, si l'on fixe le taux de la taxe à 0,5 % ou quelque chose de similaire, ce sera un cautère sur une jambe de bois. Rappelons-nous que certains mouvements spéculatifs, comme nous en avons connu dans notre pays avant l'euro, lorsque le franc était attaqué, ont provoqué des dévaluations pouvant atteindre 10 %. Face à un gain possible de 10 %, une taxe de 0,5 sera un rempart de papier qui sera emporté du premier coup.
Faut-il, pour autant, mes chers collègues, ne rien faire ? Pas du tout ! C'est là que le Gouvernement, la Banque de France et, maintenant, la Banque européenne devraient intervenir, en fixant des règles prudentielles d'obtention du crédit.
Pourquoi un mouvement spéculatif se développe-t-il ? Parce que, avec un franc, on peut en emprunter dix et qu'avec les dix francs empruntés on peut en emprunter 100. Il y a un mouvement multiplicateur. C'est à ce niveau que les gouvernements et les banques centrales doivent intervenir, en bloquant la croissance des crédits qui sont illégitimes parce que non fondés sur la propriété réelle des capitaux de ceux qui interviennent.
Si les propositions de M. Tobin, qui datent des années soixante-dix, étaient peut-être adaptées aux mouvements de capitaux très faibles que l'on connaissait à l'époque, elles seraient tout à fait inefficaces à l'heure actuelle. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste et du RPR.)
M. Paul Loridant. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant. Il est des sujets qui dérangent, et l'instauration de la taxe Tobin est de ceux-là. En effet, il vient bousculer le monde de la pensée unique, où il y a une seule façon de produire, une seule façon de diriger les entreprises, une seule façon d'avoir des références, les actionnaires étant les seuls à même de diriger, de dicter leur conduite aux chefs d'entreprise.
Eh bien, il faut parfois que des parlementaires, des militants associatifs ou des personnalités du monde civil prennent des initiatives pour bousculer les idées et amener les responsables politiques et économiques à réagir, à réfléchir, à donner du sens, de la durée, à ce que nous faisons dans ce monde !
Si, aujourd'hui, le monde de l'économie a pour seul objectif la rentabilité financière, la satisfaction des actionnaires, si l'emploi devient une variable d'ajustement, alors, effectivement, tout ce qui viendra perturber cette façon unique de penser et de diriger le monde, tout ce qui ne sera pas conforme au modèle devra être rejeté.
L'instauration de la taxe Tobin sur les mouvements financiers vient déranger le modèle économique bien-pensant.
On me rétorquera que c'est utopique. C'est vrai, M. Bourdin a raison, l'instaurer tout seul serait utopique ; cela mettrait la France au ban du monde économique, au ban du monde financier.
Mais, en l'occurrence, vous aurez noté, mes chers collègues, que nous excluons toutes les opérations intracommunautaires. Je ne sais pas si vous mesurez l'effort conceptuel que cela a nécessité, puisque nous ne sommes pas tous d'accord sur la façon d'aborder la construction européenne !
La taxe se situe donc aux frontières de l'Europe, telle qu'elle est présentée dans notre amendement.
M. Charles Descours. Alors, qui contrôle ?
M. Paul Loridant. En toute logique, cela ne remet pas en cause la conception que peuvent avoir les uns ou les autres de la construction de l'Europe.
C'est un travail de longue haleine. Mais, mes chers collègues, nous qui sommes au Sénat, rappelons-nous combien de batailles ont été gagnées qui étaient perdues d'avance, qui paraissaient utopiques !
Avant 1940, quelle était l'institution qui freinait le vote des femmes au suffrage universel ? Le Sénat.
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Paul Loridant. Avant 1967, la bataille pour la contraception aurait-elle été gagnée s'il n'y avait pas eu quelques courageux, dont le sénateur Lucien Neuwirth d'ailleurs,...
Mme Hélène Luc. Absolument !
M. Paul Loridant. ... aidé par les parlementaires de gauche ? Il a bien fallu à un moment qu'un certain nombre de parlementaires progressistes siégeant sur les différentes travées se mobilisent pour faire avancer une idée. Le problème a été semblable pour l'interruption volontaire de grossesse. De même, avant guerre, l'adoption de la législation sur le divorce n'allait pas de soi. (M. Descours s'exclame.) Des personnes absolument opposées à l'institution du divorce siégeaient en effet sur les bancs conservateurs !
Il y a donc des batailles qu'il faut mener, et, au moment où elles s'engagent, cela dérange ! Eh bien oui, mes chers collègues ! Les signataires de cet amendement veulent déranger le monde de la pensée unique, et c'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées socialistes.)
M. Charles Descours. Je pense qu'après cela M. Soros ne dormira pas cette nuit !
Mme Hélène Luc. Un amendement, c'est important !
M. Charles Descours. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Descours.
M. Charles Descours. Nous sommes face à une situation extraordinaire : en effet, si la majorité sénatoriale voulait pratiquer la politique du pire, elle s'abstiendrait, et l'amendement serait voté par les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen.
Mme Hélène Luc. Chiche !
M. Charles Descours. Certains collègues de mon groupe vont d'ailleurs s'abstenir ! Et qui serait gêné ? Le Gouvernement, évidemment ! En effet, ce qu'ont dit nos collègues Loridant et Bourdin montre bien que, dans un monde où la France n'est pas un îlot isolé, dans un monde qui serait vertueux, ce type de disposition pourrait être néfaste si elle entrait en vigueur.
Mais je sais bien que le processus n'ira pas jusqu'à son terme et que, même si l'amendement est adopté, le Gouvernement demandera à sa majorité, à l'Assemblée nationale, de repousser la mesure !
Je crois donc qu'il faut raison garder. Croyez-vous que, parce que l'on adopte un amendement relatif à la taxation des capitaux à dix-sept heures quinze, au détour de l'examen du projet de budget, les grands spéculateurs internationaux ne dormiront pas cette nuit ?
Mme Marie-Claude Beaudeau. Et si l'Assemblée nationale faisait pareil ?
M. Charles Descours. Soyons sérieux !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Donnons ce signal !
M. Charles Descours. Cela ne signale rien du tout !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Alors, 250 millions d'enfants qui travaillent dans le monde, cela ne vaut pas la peine ?
M. Charles Descours. M. Loridant lui-même, y compris au travers de son amendement, dit que cette taxe devra être perçue en dehors de la communauté. Qui va contrôler la perception de cette taxe ?
Mme Hélène Luc. On mettra en place un mécanisme !
M. Charles Descours. A l'instar de la police de l'immigration ? Il faudrait alors instituer une police pour les transferts de capitaux !
Mme Marie-Claude Beaudeau. La technique, on la trouvera !
M. Charles Descours. Je ne suis pas spéculateur, mais je crois très sincèrement que cette proposition sympathique est irréaliste, romantique et - excusez-moi de vous le dire - profondément démagogique !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Totalement !
Mme Hélène Luc. Heureusement qu'il y a du romantisme !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Les grandes idées apparaissent d'abord comme des utopies !
M. Jacques-Richard Delong. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. Je suis désolé, monsieur Delong, mais le règlement m'interdit de vous redonner la parole pour explication de vote. (M. Delong s'exclame.)
Mme Hélène Luc. Que tout le monde veuille parler témoigne de l'importance de cet amendement !
M. Jean-Luc Mélenchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Bien des choses ont déjà été dites, et j'aurais mauvaise grâce à allonger un débat. Je ferai toutefois quelques remarques.
Tout d'abord, je tiens à remercier ceux de nos collègues qui, sur l'ensemble des travées, ont bien voulu opposer d'autres arguments aux nôtres. Le déroulement du débat ne permet pas que les réponses techniques aux questions et aux problèmes soulevés soient apportées avec le détail qu'elles appelleraient à cet instant. Je leur suis cependant reconnaissant de bien avoir voulu opposer des arguments plutôt que des invectives, comme cela a été malheureusement le cas de la part à M. le rapporteur général au début de cette discussion. Mais, étant donné qu'il a indiqué lui-même qu'il considérait son propos comme de la fantaisie, je ne veux pas en rajouter ! Je constate simplement qu'à nos divergences d'opinions il faut ajouter à présent des divergences de goût concernant la plaisanterie !
En effet, je ne pense pas que nous méritions, face aux problèmes que nous avons soulevés, d'être traités de démagogues, de personnes utilisant l'ignorance de leurs compatriotes et présentant, devant le Sénat, des propositions indignes du travail parlementaire. Non, je ne le pense pas ! J'ai plutôt le sentiment que l'ordre des préoccupations que nous exprimons ici rejoint le sentiment de beaucoup de collègues siégeant sur de nombreuses travées. Ce qui me frappe, en effet, c'est que de plus en plus nombreux dans cette enceinte sont ceux qui pensent qu'un tel ordre de choses n'est pas acceptable et qu'à tous ces désordres il faut opposer de la règle.
Il y a deux discussions différentes : certains nous disent que nos propositions sont mauvaises par principe, et d'autres considèrent qu'elles ne seraient pas efficaces.
A ceux qui nous disent qu'elles sont mauvaises par principe, nous n'objecterons qu'un argument : ce qui est mauvais par principe, c'est l'ordre du monde dans lequel nous nous trouvons et auquel nous ne nous résignons pas.
Ensuite commence la discussion à propos de l'efficacité des mesures qui doivent être prises. Monsieur le rapporteur général, nous n'avons jamais nié que ce monde fût interconnecté. C'est au contraire parce que nous partons du constat de cette interconnexion et de cette ouverture que nous essayons d'y apporter de la règle. Rien d'autre ! En cela, nous rejoignons d'ailleurs les préoccupations de nombre d'entre vous, et notamment de M. le secrétaire d'Etat que je tiens à remercier pour son ouverture d'esprit et pour la compréhension dont il a témoigné. Si j'ai bien compris, il nous annonce que, d'ici peu, notre pays, exerçant la présidence de l'Union européenne, sera conduit à prendre des initiatives. (M. Descours s'exclame.)
M. Philippe Marini, rapporteur général. Quelle hypocrisie !
M. Jean-Luc Mélenchon. Vous allez souffrir, monsieur Marini, car la mauvaise graine aura germé de tous les côtés ! (Rires sur les travées socialistes, ainsi que celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
Ce qu'annonce M. le secrétaire d'Etat n'est certainement pas le laisser-faire auquel vous vous référez au point de faire des déclarations qui, à la vérité, ne vous grandissent pas. En effet, le fait que le rapporteur général du budget de cette assemblée dise qu'il ne sait pas ce qu'est une spéculation est assez affligeant pour la qualité du regard qu'il porte sur les finances de l'Etat et sur l'intervention de ce dernier dans l'économie.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est une caricature ridicule !
M. Jean-Luc Mélenchon. Je le prends sur le registre sur lequel vous avez situé la discussion ! Me traiter à présent de ridicule est aussi une fantaisie !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Lisez les rapports de la commission !
M. Jean-Luc Mélenchon. Monsieur, tout à l'heure, vous m'avez traité de totalitaire. Et vous avez vu que, contrairement à ce que m'inspire en général mon sang très chaud, je suis resté calme et ne vous ai pas renvoyé la balle. Je pense que maintenant cela suffit. Est-ce bien d'accord ?
Vous allez donc avoir la patience de m'écouter, moi qui ne vous insulte pas !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je ne serai jamais du même côté que vous sur aucun sujet !
M. Jean-Luc Mélenchon. Que vous ne soyez jamais du même côté que moi, sachez que c'est réciproque ! Nous sommes en démocratie, et il est bien normal que les choses soient ainsi. Mais cela ne vous donne pas le droit de nous insulter !
M. Gérard Braun. Il ne vous insulte pas !
M. Jean-Luc Mélenchon. J'achèverai mon propos en présentant quelques petites remarques.
M. Fréville a considéré qu'une taxe de 0,05 % serait une piqûre de moustique. Je n'irai pas lui dire que nous prétendons porter l'estocade ! M. Tobin lui-même, à l'époque, proposait un taux de 1 %.
Ce sur quoi il faut bien nous comprendre, comme l'a dit exactement l'un de nos collègues tout à l'heure, c'est que la taxe Tobin ne prétend pas enrayer les mouvements spéculatifs qui effondrent le cours des monnaies et ruinent les économies. Il s'agit de mettre, selon l'expression consacrée, un grain de sable dans les rouages pour ralentir un mécanisme général et ne pas laisser impuni, comme allant de soi, le fait que l'on fasse transiter de l'argent en une journée,...
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mais même en un instant !
M. Jean-Luc Mélenchon. ... ce qui n'a aucune valeur, aucune signification économique, quel que soit le cas que vous preniez. Voilà de quoi il s'agit. Pour le reste, bien sûr, vous avez raison, il faudra d'autres règles.
Notre collègue M. Fréville a dit tout à l'heure qu'un taux de 0,05 % n'était rien par rapport à un profit de 10 % ou de 15 %. C'est l'un de mes objecteurs qui aura fourni le bon argument. Effectivement, 0,05 %, ce n'est rien, y compris pour ceux qui réaliseront un investissement dans la sphère productive, quand on sait que ces investissements sont engagés non par grandeur d'âme, mais pour recueillir un profit, lequel, s'agissant des exigences de rentabilité financière attendue des différentes entreprises par les fonds de pension, est aujourd'hui situé à 10 % ou à 15 %.
Notre débat aura donc montré que l'on peut faire avancer l'esprit public vers l'idée qu'il est possible de faire quelque chose. Nous maintenons donc bien sûr cet amendement pour que ce débat n'ait pas eu lieu en vain ! (Applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Hilaire Flandre. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Flandre.
M. Hilaire Flandre. Personne sur les travées de cette assemblée n'est à mon avis insensible aux effets pervers que peuvent avoir les mouvements spéculatifs, et on ne peut tous les soirs se réjouir d'entendre que le CAC 40 a encore battu un record ! Depuis le début de l'année, c'est le trentième ou le quarantième, la progression étant de 30 % !
M. Jean Chérioux. Attendons la fin !
M. Hilaire Flandre. Je crois effectivement que l'on ne peut se réjouir de ces phénomènes quand on sait les conséquences qu'ils peuvent avoir sur la survie d'entreprises et sur l'emploi.
Si l'amendement n° I-158 est inspiré d'une idée généreuse, il prend le problème par un mauvais angle. En effet, s'attaquer aux mouvements de capitaux et au taux proposé est sans aucune influence. En outre, cela peut mettre dans la même situation des capitaux circulant très naturellement selon les règles de l'économie et des capitaux spéculatifs.
Il conviendrait, pour qu'une telle disposition ait quelques chances d'être efficace, de taxer non pas le mouvement de capital, mais seulement les plus-values à l'instant où elles sont réalisées, et ce à un taux dissuasif.
M. Jean-Luc Mélenchon. Volontiers ! Déposez un sous-amendement, et nous vous suivrons ! (Sourires.)
M. Hilaire Flandre. Non, je ne présenterai pas de sous-amendement, je voterai contre l'amendement n° I-158 ! (M. Mélenchon rit.)
M. Philippe Arnaud. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Arnaud.
M. Philippe Arnaud. Notre collègue Yves Fréville a parfaitement analysé le problème et a esquissé des pistes concernant les moyens qui pourraient être mis en oeuvre pour y remédier. Il y a bien en effet - nous en sommes tous convaincus, je crois - un problème.
Les propos tenus avec une certaine agressivité par notre collègue Paul Loridant - il a rappelé des histoires anciennes, nous appelant à voter l'amendement n° I-158 pour ne pas faire du Sénat une assemblée pratiquant en permanence l'obstruction - ainsi que l'intervention de M. Descours me conduisent à m'abstenir. En effet, je ne voudrais précisément pas faire de l'obstruction.
M. Descours a parfaitement bien dit que la pire des choses pour la gauche plurielle serait l'adoption de cet amendement. En effet, le gouvernement de gauche plurielle, dans sa grande sagesse et dans sa grande responsabilité, serait alors obligé de le faire disparaître à l'Assemblée nationale.
M. Jacques-Richard Delong. Tout à fait !
M. Philippe Arnaud. Par voie de conséquence, en nouvelle lecture, M. Loridant saurait qu'il doit s'en prendre au Gouvernement et non plus à une droite réactionnaire siégeant au Sénat !
Je m'abstiendrai donc, espérant quand même l'adoption de cet amendement et souhaitant bon courage à M. le secrétaire d'Etat ! (MM. Flandre et Delong applaudissent.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° I-158, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 19:

Nombre de votants 268
Nombre de suffrages exprimés 260
Majorité absolue des suffrages 131
Pour l'adoption 53
Contre 207

Mme Hélène Luc. Dommage ! Ça viendra un jour !

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