Séance du 29 juin 1999







M. le président. La parole est à M. César, auteur de la question n° 556, adressée à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. M. Gérard César. Ma question s'adressait à Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, qui m'a fait savoir par téléphone qu'elle ne me répondrait pas personnellement ce matin. Je tiens à la remercier de cette marque de courtoisie à l'égard du Sénat.
En France, chaque année, les 11 000 stations d'épuration produisent 300 000 tonnes de matière sèche de boues -1,3 million de tonnes sont prévues en 2005 - qui sont épandues, pour 65 % d'entre elles, en agriculture, le reste allant en décharge - 20 à 25 % - et à l'incinération : 10 à 15 %.
L'épandage des boues est aujourd'hui le moyen d'élimination le plus écologique et le plus économique. Pourtant, il n'a fait l'objet d'aucune prise de position des pouvoirs publics pour permettre une meilleure compréhension de ce dossier par les consommateurs.
Nos concitoyens, les citadins en particulier, ont-ils conscience de la valorisation agricole des déchets produits par les villes ? Dans ce domaine, comme dans d'autres, le risque zéro n'existe pas. Après d'autres, quarante exploitations d'Ile-de-France viennent de voir leurs légumes interdits à la vente parce qu'ayant poussé sur des terres polluées par l'épandage des eaux usées de la Ville de Paris. Se pose dès lors le problème de la responsabilité : qui est responsable ? Qui doit payer ?
Les organisations agricoles demandent, depuis quelques années, la création d'un fonds d'indemnisation pour le risque imprévisible à long terme, pour le risque lié à l'épandage agricole des boues. Ce fonds présenterait les avantages de la rapidité des procédures d'indemnisation et de la transparence. Toutefois, son financement, qui reposerait sur une taxe à la tonne de boue brute épandue, aurait une incidence sur le prix de l'eau payée par le consommateur. On peut craindre, en effet, un renchérissement du prix de l'eau à un moment où bon nombre de nos concitoyens s'élèvent contre sa forte progression, laquelle est due, notamment, à la remise aux normes des stations d'épuration et à leur construction dans de nombreuses communes.
En moyenne, ces cinq dernières années, le prix de l'eau a augmenté de 9 % par an. Il convient de rappeler que les usagers apportent déjà leur contribution au programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole, le PMPOA, par le biais de la taxe sur l'eau qui alimente le fonds national de développement des adductions d'eau.
Par ailleurs, les assurances souscrites par les communes couvrent déjà les dommages « ordinaires ». Le risque imprévisible majeur à long terme, du type syndrome de la « vache folle » est, quant à lui, non chiffrable ; en conséquence, il n'est pas assurable et c'est à l'Etat de l'assumer.
Le Premier ministre a arbitré, en avril dernier, en faveur d'un système d'assurance négocié au cas par cas au niveau de chaque commune, couvrant la responsabilité civile, mais aussi les pertes de récoltes et de revenus liés à un incident, y compris le risque de développement - risque inconnu aujourd'hui, paraît-il - qui serait limité à dix ans après le dernier épandage.
Madame la secrétaire d'Etat, il convient de porter une grande attention à ce mode de recyclage car, en l'absence de dispositions suffisantes sur l'épandage agricole, on risque d'aboutir à un recours accru à l'incinération. Or, nous constatons aujourd'hui les conséquences de l'incinération de déchets réalisée dans de mauvaises conditions. Quel que soit le mode de recyclage retenu pour les déchets de la société, il importe que ces conséquences sur l'agriculture et sur le consommateur soient suffisamment prises en compte.
Je vous remercie, madame le secrétaire d'Etat, de me faire connaître l'état actuel de ce dossier, si important pour le monde rural.
M. le président. La parole est à Mme le secrétaire d'Etat.
Mme Michelle Demessine, secrétaire d'Etat au tourisme. Monsieur le sénateur, Mme Voynet, retenue, m'a demandé de répondre à sa place à votre question, ce que je fais bien volontiers.
Comme vous le savez, la question de l'épandage agricole des boues de stations d'épuration fait l'objet de nombreux débats.
L'épandage de boues de stations d'épuration urbaines en agriculture est une voie de valorisation de ces sous-produits de l'assainissement qui est pratiquée depuis de nombreuses décennies.
Aujourd'hui, 65 % des boues urbaines sont valorisées par cette filière, qui constitue, si les épandages sont réalisés dans de bonnes conditions, le débouché le plus intéressant d'un point de vue à la fois environnemental et économique.
Afin de conforter cette filière, en apportant les garanties nécessaires d'innocuité et de bonnes pratiques, mon ministère, en liaison avec l'ensemble des ministères concernés, a souhaité définir avec précision les règles applicables à ces épandages par une nouvelle réglementation très rigoureuse ; le décret du 8 décembre 1997 et l'arrêté du 8 janvier 1998 répondent à cet objectif.
Toutefois, cet important renforcement de l'encadrement réglementaire des épandages de boues n'a pas suffi à apaiser l'ensemble des critiques et à répondre à toutes les interrogations. Aussi, il m'a paru indispensable de mettre en place un lieu d'échanges et de débat sur cette question, associant l'ensemble des acteurs de la filière, des producteurs de boues aux consommateurs : le comité national sur les épandages de boues de stations d'épuration urbaines en agriculture, qui regroupe, notamment, des représentants des collectivités locales, des professionnels de l'assainissement, des professionnels agricoles, des industries agro-alimentaires, de la grande distribution, des consommateurs, des associations de protection de l'environnement et des experts.
Ce comité a notamment pour objectif de définir les termes d'un accord national sur l'épandage accepté par l'ensemble des acteurs précités. Les débats au sein de cette instance ont été très constructifs et ont permis de converger vers les termes d'un accord avec l'ensemble des partenaires, notamment de l'aval de l'agriculture.
Toutefois, dans ce cadre, la profession agricole a manifesté son souci de pouvoir bénéficier d'un système rapide d'indemnisation en cas de dommage que subirait l'exploitant agricole du fait de l'épandage des boues en l'absence de faute de cet exploitant, en justifiant cette demande par le fait que les agriculteurs n'avaient que peu d'intérêt à épandre des boues, et qu'ils le faisaient avant tout pour rendre service à la société.
Les agriculteurs ont donc demandé la création d'un fonds national de garantie et ont fait savoir qu'ils soumettaient à cette création leur participation à un accord national.
L'opportunité et la faisabilité de ce fonds ont en conséquence été étudiées. Au cours des discussions qui ont eu lieu sur ce sujet, les compagnies d'assurance ont proposé une solution alternative qui consiste à renforcer substantiellement le dispositif d'assurances à la disposition des collectivités productrices de boue. C'est cette solution qui a la préférence du Gouvernement, ainsi que celle des membres non agricoles du comité national. La concertation se poursuit.
En tout état de cause, quel que soit le système retenu, fonds ou assurances, l'impact sur le prix de l'eau sera de l'ordre d'un centime par mètre cube, à comparer aux dizaines de centimes, voire aux francs, par mètre cube que coûterait l'abandon de la valorisation agricole des boues et le passage à l'incinération.
M. Gérard César. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. César.
M. Gérard César. Madame le secrétaire d'Etat, il s'agit d'un réel problème, qui touche la société française. Mais ce sont les agriculteurs qui sont le plus concernés par ce problème, dans la mesure où ils se trouvent en aval de l'épandage des boues. Compte tenu de la composition de ces boues, en particulier en métaux lourds, il est fondamental qu'ils soient associés de très près à la réflexion qui est menée à cet égard.
Madame le secrétaire d'Etat, pourriez-vous insister auprès de Mme Voynet pour que les agriculteurs soient vraiment invités à participer à cette discussion et que les consommateurs ne soient pas seuls consultés ? Il y va de l'avenir de notre territoire.

retrait du permis de conduire
aux cyclistes ayant commis
des infractions au code de la route