VIII. LES CONTRATS DE PLAN FAVORISENT LA PRÉVISIBILITÉ, MAIS AUSSI L'OPACITÉ DES DÉPENSES PUBLIQUES
A. UNE INFLUENCE LIMITÉE SUR LE " TEMPS " DE LA DÉCISION PUBLIQUE
Votre
rapporteur a demandé aux Régions, au ministère de
l'Intérieur, à la DATAR et au Commissariat général
du Plan "
dans quelle mesure la procédure de contrat de plan
Etat-Région peut-elle accélérer ou retarder la prise de
décision publique ? La durée et le calendrier des contrats
de plan sont-ils satisfaisants ? Serait-il opportun de prévoir des
contrats de plan Etat-Région glissants
? ".
• Il résulte en premier lieu de leurs réponses, quasi
unanimes sur ce point, que la procédure de contrat de plan n'a pas une
influence significative sur le
temps
de la décision publique.
Certes, comme l'indiquent des Régions,
" le fait d'inscrire une
opération dans le contrat de plan peut accélérer la
maturation
de certains projets, dans la mesure où les
crédits sont garantis sur le long terme
" et
" la
proximité de la conclusion des contrats est de nature à
accélérer le processus de décision
". En
particulier "
la procédure de contrat de plan peut
accélérer la décision publique en ce qui concerne les
grands équipements
".
Plus généralement, selon la DATAR "
la procédure
de contrat de plan peut
[accélérer ou retarder la
décision publique]
parce que le calendrier interministériel et
partenarial s'impose à tous et peut être
décalé
par rapport aux besoins projet par
projet
".
Néanmoins, comme le souligne une Région, "
la prise de
décision publique relève d'une alchimie propre qui ne peut avoir
pour horizon la conclusion d'un contrat de plan. Certaines opérations,
notamment dans le domaine des infrastructures de communication,
nécessitent un temps de maturation très long qui ne peut pas
être borné par le contrat de plan... [D'ailleurs], de nombreux
exemples relevant du contrat 1994-1998 démontrent que des projets
n'ayant pas suivi l'ensemble du processus de décision se
réalisent rarement
".
En d'autres termes, on ne peut pas " forcer " le mûrissement de
certains projets.
En outre, "
si la procédure de contrat de plan peut
accélérer la décision publique en matière de grands
équipements... la mise en place différée des
crédits peut ensuite
retarder
leur
concrétisation
".
Enfin, certaines Régions soulignent que le retard de la
signature
des contrats de plan, qui n'intervient que trois à six mois après
leur date de commencement théorique, peut
différer
des
projets, d'autant plus que la première année du contrat s'en
trouve de ce fait budgétairement " gelée ".
Au total, selon le Commissariat général du Plan, "
la
procédure de contrat de plan contribue davantage à
solenniser
qu'à accélérer la décision
publique
".
A la limite, selon une Région, dès lors que la planification des
projets et la programmation budgétaire sont très
poussées et mettent en place "
des procédures applicables
quelle que soit la durée de la procédure de contrat de
plan
", la contractualisation n'a pas d'influence sur le calendrier de
la décision publique.
• S'agissant par ailleurs du
calendrier
et de la
durée
des contrats de plan, de nombreuses Régions estiment
"
qu'il serait sans doute préférable d'avoir des contrats
de plan calés sur les
échéances
électorales
régionales, c'est à dire sur 6
ans
", comme ce fut
de facto
le cas des troisièmes
contrats de plan (1994-1998-1999), "
de manière à
asseoir les contrats de plan sur la durée des mandatures
régionales
".
Pour sa part, la DATAR indique que "
le Gouvernement s'est posé
la question à laquelle il n'y a pas de réponse sûre. Il
s'est efforcé de trouver un compromis entre la vision à long
terme et la rapidité d'évolution des besoins en décidant
de contractualiser sur
sept ans
avec un rendez-vous à mi-parcours
pour faire un premier bilan et réajuster les programmations
".
De même, le Commissariat général du Plan souligne que
"
le calendrier et la durée des contrats de plan sont toujours
source de
débats
:
Le calendrier apporte rarement satisfaction. La longueur de la
préparation de la procédure est telle qu'elle conduit à
engager leur élaboration en même temps que celle de la
démarche stratégique. Or le contrat de plan n'est pas une
stratégie, mais seulement un
outil
de sa mise en oeuvre.
S'agissant de la durée... la durée de cinq ans [prévue
pour les précédentes générations de contrats]
permettait de tenir compte de la période de mise au point
opérationnelle des projets (souvent complexes) avec les
différents partenaires et de disposer du temps nécessaire pour
les réaliser. Pour ce qui est de la quatrième
génération de contrats de plan Etat-Région (2000-2006),
couvrant donc une période de sept ans, elle présente le double
avantage d'harmoniser les exercices communautaires et national et
d'entreprendre leur
évaluation
à mi-parcours permettant de
réorienter, en tant que de besoin, les politiques initialement
définies ".
Certaines Régions estiment d'ailleurs que cette "
clause de
rendez-vous en 2003 répond à certaines attentes
"
ou
" permettra d'explorer de nouvelles voies
".
Cependant, pour la plupart des Régions, l'enjeu principal est de trouver
une durée favorisant le bon
achèvement
des contrats, d'une
part, le renforcement de sa dimension qualitative par rapport à la
logique de programmation financière, d'autre part.
• L'idée parfois avancée consistant à
prévoir des contrats de plan " glissants " soulève des
réactions plus vives.
La plupart des Régions qui ont pris position sur ce point se sont
déclarées
opposées
au principe de contrats de plan
glissants, en raison de la lourdeur de la procédure, de
l'intérêt d'une démarche globale et unitaire s'appuyant sur
une stratégie et des études prospectives préalables, enfin
du risque que la portée des contrats soit affaiblie et que les
délais de réalisation de certaines opérations soient
rallongés.
Ainsi, selon une Région, "
les contrats glissants pourraient
entraîner à plus ou moins long terme la perte de la dimension
globale de la politique d'aménagement du territoire et s'orienter vers
des contrats d'objectifs
".
Certaines Régions s'interrogent toutefois sur l'opportunité d'un
"
éclatement de la procédure
" en autant
d'instruments plus simples et plus adaptés à la
temporalité des projets concernés.
Quoi qu'il en soit, certaines Régions observent que
" faute de
tranches annuelles, on assiste à d'importants reports d'un contrat de
plan sur l'autre, ce qui conduit à une programmation glissante, pour les
opérations routières notamment
".
La DATAR reconnaît d'ailleurs que "
cela [les contrats de plan
glissants]
est déjà
d'une certaine manière
le
cas
, [même s'il] paraît préférable de se fixer
des délais à tenir
".
En outre, le Commissariat général du Plan indique que
"
le concept de contrat de plan Etat-Région
" glissant ", sous réserve d'en préciser la
définition, trouve déjà dans le dispositif mis en place
pour la quatrième génération [de contrat de plan] un
début de
mise en oeuvre
. En effet, les règlements
communautaires, comme la circulaire du Premier ministre du 31 juillet
1998 rendent obligatoire la démarche d'évaluation et notamment
celle prévue à mi-parcours. Le contrat de plan
" glissant " ou " adapté " pourrait ainsi trouver
une forme de concrétisation, sous réserve de faire effectivement
prendre en compte les recommandations et les réorientations
formulées dans les travaux d'évaluation
".
• Enfin, votre rapporteur avait demandé aux Régions et aux
administrations centrales dans quelle mesure la procédure de contrat de
plan était compatible avec des
projets
pour lesquels de longues
études préalables sont nécessaires ou dont la
réalisation est étalée sur une
longue
période
.
Leurs réponses sont
divergentes
.
Selon la DATAR, "
les études doivent être
réalisées avant l'inscription des projets. Lorsque la
durée de réalisation dépasse trop sensiblement celle d'un
contrat de plan, elle n'est généralement pas retenue et conduite
en dehors du cadre du contrat de plan. C'est le cas de la plupart des grands
travaux
" ; de même, selon certaines Régions,
"
la procédure de contrat de plan n'est pas compatible avec des
projets qui nécessitent des financements très
importants
".
En revanche, d'autres Régions soulignent que certains projets sont
déjà
de facto
étalés sur plusieurs contrats,
et que "
cet étalement ne pose pas de problèmes
particuliers sous réserve de le prévoir dès la
première inscription
".