D. LE BILAN DE L'INTÉGRATION DES CONTRATS DE VILLE DANS LES CONTRATS DE PLAN EST MITIGÉ
1. L'Etat a imposé l'intégration des contrats de ville dans les contrats de plan
En 1992,
l'Etat a
imposé
aux Régions l'inscription de la politique
de la ville dans les contrats de plan et a décidé que le contrat
de ville serait pour le XIème plan la procédure unique de mise en
oeuvre de cette politique, selon des modalités détaillées
dans l'encadré ci après.
En d'autres termes, la
politique de la ville
devait s'inscrire dans les
contrats de ville, eux mêmes intégrés dans les contrats de
plan, conformément à la décision du CIAT du 23 juillet
1992 de faire des contrats de plan Etat-Région
" le cadre de
mise en cohérence des politiques contractuelles
".
FONDEMENTS ET MODALITÉS DE L'INTÉGRATION
DES
CONTRATS DE VILLE
DANS LES TROISIÈMES CONTRATS DE PLAN SELON LE
MINISTÈRE DE LA VILLE
Tout au
long de la préparation du XIème plan, les gouvernements
successifs ont affirmé la volonté d'ancrer les démarches
liées à la politique de développement social urbain dans
la démarche de planification, " Le renforcement de la
cohésion sociale " est l'une des trois priorités
assignées à la planification stratégique par la circulaire
de mars 1992. Le courrier du Premier ministre daté du 20 juillet et
le CIAT du 23 juillet 1992 indiquaient que les contrats de Plan
Etat-Région étaient " le cadre de la mise en
cohérence des politiques contractuelles " y compris les
contrats de ville. Le mandat de négociation adressé aux
Préfets de région intègre la politique de la ville dans le
" noyau dur " des contrats de plan. Cette ténacité a
permis d'inscrire une des priorités fortes de l'Etat dans les contrats
de Plan malgré la grande réticence des conseils régionaux.
En effet, ceux-ci considérant la politique de la ville seulement comme
une politique sociale, estimaient qu'elle ne relevait pas de leur champ de
compétence.
Ces deux considérations ont généré les effets
suivants :
- 14 conseils régionaux sur 22 ont été signataires des
contrats de ville alors qu'il existe bien un volet " ville " dans
tous les contrats de Plan Etat-Région. 82 contrats de ville ont
été signés par les conseils régionaux.
- dans de nombreux contrats de Plan Etat-Région, les conseils
régionaux ont étendu les engagements pris pour la politique de la
ville à d'autres sites que ceux choisis par l'Etat.
Le 30 septembre 1993, les Préfets recevaient pour chacune des
régions un mandat de négociation signé du Premier
ministre. Il réitérait la volonté de mettre en
cohérence les priorités exprimées par l'Etat, la
région et les collectivités territoriales, la
nécessité de poursuivre la procédure de contractualisation
déconcentrée et de s'en tenir à un nombre réduit
d'objectifs. Il indiquait les priorités de l'Etat qui devaient
être honorées par le contrat de Plan et les scindait en deux
parties :
1) Le coeur du mandat - son " noyau dur " réunit les
priorités contribuant à renforcer la compétitivité
économique et la cohésion sociale, la modernisation des
entreprises, l'insertion économique et sociale des populations les plus
menacées notamment les plus jeunes, les zones industrielles et rurales
les plus en difficulté, l'articulation entre contrat de ville et de
plan, l'instruction spécifique des PACT urbains (75 % des
enveloppes étaient dévolus à ces priorités).
2) Les priorités générales de l'Etat définies selon
l'appréciation des particularités territoriales et sociales de
chaque région (25 % des enveloppes leur étant
réservées).
Le Conseil Interministériel des villes du 12 novembre 1992 a
fixé quatre objectifs aux futurs contrats de ville :
Sur le plan le plus global, ils avaient pour objet " d'une part, la lutte
contre les processus d'exclusion, et d'autre part la réinsertion dans la
ville des quartiers en voie de marginalisation ".
En terme de procédure, ils devaient constituer le cadre unique
établi entre l'Etat et les collectivités locales pour la
durée du XIème Plan. Le dispositif contractuel était
resserré sur les agglomérations les plus démunies en
prévoyant des types d'intervention à l'échelon de
l'agglomération (peuplement, désenclavement,
sécurité, formation, solidarité financière) et
à l'échelon du quartier (accompagnement social, revitalisation
économique, réhabilitation).
En terme de contenu, le contrat de ville devait traduire un programme local
quinquennal en faveur des quartiers dans le cadre d'un projet de ville
fondé sur une approche globale : habitat, aménagement
urbain, éducation, santé, prévention, développement
économique et culturel...
Ces grands objectifs ont été complétés par la
circulaire du 2 novembre 1993 qui fixait les priorités
thématiques et affirmait deux principes supplémentaires :
l'intercommunalité, la limitation de la géographie prioritaire et
rappelait la concentration des moyens sur les quartiers les plus en
difficulté.
Enfin la note technique du 4 février 1993, prolongée
par le dossier ressources élaboré par la DIV et diffusé en
décembre 1994, a servi de cadre de référence pour la
rédaction concrète des contrats de ville en précisant les
différentes thématiques dans un cadre cohérent.
L'inclusion de la politique de la ville dans les contrats de Plan
Etat-Régions, avec les financements afférents, laissait
espérer une mobilisation importante des conseils régionaux sur
cette politique. Le bilan est contrasté.
Au plan financier, s'agissant des régions de métropole, l'effort
global des vingt-deux régions s'élève à
4,3 milliards de francs, soit un quadruplement de ce même effort par
rapport au Xème Plan, et un doublement si on ne prend pas en compte,
dans ce calcul, la région Ile-de-France.
Les régions se sont engagées sur leurs compétences. Cette
option participe certes du souci de simplification et de cohérence des
actions publiques en évitant le croisement complexe de crédits
sur le même objet, mais elle révèle aussi l'intention de ne
pas entrer systématiquement dans une intervention conjointe
Etat-Région.
Certains conseils régionaux ont donc développé,
simultanément à leur implication dans les contrats de ville, des
politiques contractuelles avec les communes sur des territoires d'intervention
plus larges que ceux retenus par l'Etat.
Il est intéressant de noter que des conseils régionaux et non des
moindres (Ile-de-France, PACA par exemple) se sont dotés d'une
organisation interne proche de celle de l'Etat, favorisant alors le travail
technique entre les échelons régionaux (Etat et Région) et
permettant une présence réelle et active des chargés de
mission du conseil régional aux instances départementales
(comité départemental Ville) et locales (comité de
pilotage des contrats de ville).
Cependant, ces dispositifs communs de travail sont rares et seuls les
comité inter-services régionaux (lorsqu'ils fonctionnent)
permettent, en associant les conseils régionaux, d'orienter la politique
de la ville : objectifs, animation, programmation financière,
formation, évaluation...
Les conseils généraux
: Il est évident que les
conseils généraux se sont plus impliqués dans le cadre du
XIème Plan que dans le Plan précédent. Leur engagement
s'établit certes sur la base de leurs attributions, notamment l'action
sociale et la prévention spécialisée, mais pour certains
d'entre eux, leur intérêt s'est réellement élargi
aux questions d'exclusion urbaine et de projet urbain.
Quelques conseils généraux ont créé, en leur sein,
une instance de type " mission Ville ". Cet outil a facilité
leur partenariat avec l'Etat et les collectivités locales, soit dans le
cadre des contrats de ville, soit au travers d'une convention spécifique
de " développement urbain " d'une durée de 3 ans,
complémentaire aux contrats de ville ou sur des sites non
concernés par la politique de la ville.
Source : Ministère de la Ville.
Selon la DATAR, "
l'intégration dans les contrats de plan
[des contrats de ville et des actions conventionnelles de
développement local]
est
naturelle
dès lors que les
contrats sont un instrument de développement régional et que le
développement d'une région passe aussi par ce type de
politique
". L'intégration des contrats de ville dans les
contrats de plan est également
a priori
source de
cohérence
pour l'action publique locale.
Par ailleurs, l'inscription de la politique de la ville dans les contrats de
plan pouvait se justifier selon le ministère de la Ville "
par
son caractère
interministériel
et par son mode d'action
déconcentré
, [qui en faisaient] un laboratoire et un enjeu
pour la modernisation de l'Etat
".
Plus précisément, le ministère de l'Intérieur
estime que "
la possibilité d'intégrer les contrats de
ville dans les contrats de plan permet à certains ministères qui
participaient peu à l'élaboration des contrats de plan d'apporter
un soutien plus actif à la réalisation d'un certain nombre de
projets. Il s'agit également de permettre à des associations,
à des syndicats et plus généralement à la
société civile d'être partie prenante aux contrats de plan.
Enfin, cette possibilité permet aux acteurs locaux sur la période
du contrat de plan de financer des projets d'initiative locale sur lesquels se
sera dégagé un large consensus
".
On peut néanmoins relever que ces avantages provenaient a priori
beaucoup plus de la
démarche
conventionnelle elle même que
de son intégration dans le cadre des contrats de plan.
La plupart des Régions étaient d'ailleurs
"
réticentes
" à cette intégration
selon le ministère de la Ville.
Cette réticence s'explique aisément : les Régions
soulignent que "
l'essentiel des questions traitées dans les
contrats de ville n'est pas de la
compétence
des
Régions
". En outre "
les villes elles mêmes
n'étaient pas signataires des contrats de plan
". En d'autres
termes, les Régions craignaient de s'engager pour des montants
élevés en dehors de leurs compétences juridiques, comme de
leur savoir faire administratif, dans des domaines où leur intervention
risquait de créer des tensions avec les Villes.