ANNEXES

- Annexe n° 1 : Lettre de saisine du président de la commission des affaires sociales.

- Annexe n° 2 : Compte rendu des auditions

ANNEXE N° 1

LETTRE DE SAISINE DU PRÉSIDENT
DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES


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COMMISSION
DES AFFAIRES SOCIALES

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Paris, le 15 mars 2000

LE PRÉSIDENT

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Madame Dinah DERYCKE

Présidente de la délégation parlementaire

aux droits des femmes et à l'égalité

des chances entre les hommes et les femmes

PALAIS DU LUXEMBOURG

Réf. : S/2000.194/1

Madame la Présidente,

Au cours de sa réunion du mercredi 15 mars 2000, la commission des Affaires sociales a décidé, sur ma proposition, de saisir la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes de la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale le 7 mars dernier, relative à l'égalité professionnelle des femmes et des hommes.

Conformément aux dispositions du paragraphe III de l'article 6 septies de l'ordonnance n° 58-11000 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, sans préjudice des compétences de la commission des Affaires sociales saisie au fond de cette proposition de loi, la commission souhaiterait recueillir votre avis sur les conséquences de cette proposition de loi sur les droits des femmes et sur l'égalité des chances entre les hommes et les femmes.

Je vous indique que cette proposition de loi devrait être inscrite par le Gouvernement à l'ordre du jour prioritaire des travaux du Sénat au cours de la dernière semaine de mai et examinée par la commission des Affaires sociales sur le rapport de Mme Annick Bocandé lors de la semaine précédente.

Je vous prie de croire, Madame la Présidente, à l'assurance de ma considération distinguée.

Jean DELANEAU

ANNEXE N° 2
COMPTE RENDU DES AUDITIONS

Mercredi 8 mars 2000 - Présidence de Mme Dinah Derycke, présidente.

La délégation a procédé à l'audition de Mme Anne-Marie Colmou, maître des requêtes au Conseil d'État , auteur d'un rapport au ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation, intitulé "L'encadrement supérieur de la fonction publique : vers l'égalité entre les hommes et les femmes".

Mme Dinah Derycke, présidente , a indiqué, en guise d'introduction, que cette audition, tenue à la date symbolique du 8 mars, Journée internationale des femmes, s'inscrivait dans le contexte de l'examen, par le Parlement, de la proposition de loi de Mme Catherine Génisson, députée, et plusieurs de ses collègues, relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Adopté par l'Assemblée nationale le 7 mars, ce texte comporte un volet consacré à la fonction publique.

Mme Anne-Marie Colmou a précisé, à titre liminaire, que cet aspect de la proposition de loi de Mme Catherine Génisson reprenait des recommandations qu'elle avait formulées dans son rapport au printemps 1999, et qui avaient figuré auparavant dans des projets de décret, dont le Conseil d'État avait estimé, à l'automne, les dispositions de nature législative.

Elle a ensuite présenté les aspects essentiels de son rapport.

S'agissant de l'état des lieux, Mme Anne-Marie Colmou a rappelé que si la fonction publique française se caractérisait par une très forte féminisation globale (plus de 56 % des effectifs), la situation apparaissait extrêmement hétérogène dès lors qu'on affinait l'analyse par corps, par ministères ou par emplois, avec, pour constantes, une très faible présence des femmes dans les corps dits techniques et, surtout, la rapide diminution de leur proportion à mesure qu'on s'élève dans la hiérarchie. Ce "plafond de verre", bien qu'aisément observable, n'a fait jusqu'ici l'objet d'aucune étude approfondie, a déploré Mme Anne-Marie Colmou , en indiquant qu'elle avait été conduite à asseoir son rapport essentiellement sur des témoignages de syndicalistes, de femmes hauts fonctionnaires et de gestionnaires du personnel. Elle a estimé qu'une analyse de la situation et surtout de son évolution nécessitait l'institution d'un véritable outil statistique sexué, lequel, en améliorant la transparence, offrirait aux décideurs les moyens d'adapter les mesures à prendre aux objectifs à atteindre. Cette exigence constitue la première proposition de son rapport.

La sous-féminisation, dans la haute fonction publique, a poursuivi Mme Anne-Marie Colmou , a d'abord les mêmes causes d'ordre général que dans le secteur privé, et notamment la double journée de travail des femmes et les problèmes de garde des enfants -mention doit être faite aussi du " sexisme des manuels scolaires ", l'image de femmes occupant des postes d'encadrement étant inexistante à l'école, mais, on doit se réjouir qu'une convention s'attaquant à ce problème vienne d'être tout récemment signée par le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie et les autres ministres intéressés.

Le phénomène a également des causes propres au système même de notre fonction publique. Il en est ainsi du mode de sélection des futurs hauts fonctionnaires, dont on peut se demander, a dit Mme Anne-Marie Colmou , " s'il n'est pas fait par et pour les hommes ", prenant insuffisamment en compte les qualités propres aux deux différents sexes. Une réflexion sur les conditions de recrutement est nécessaire, a-t-elle estimé. Dans cette perspective, elle a, dans son rapport, recommandé l'institution, au sein de la Direction générale de l'administration et de la fonction publique, d'un comité de pilotage chargé d'examiner le contenu et les modalités, tant des épreuves des concours d'entrée dans les écoles d'application administratives que des enseignements qu'elles dispensent. A sa connaissance, ce comité devrait être installé tout prochainement. Relevant plus largement que la mixité avait été introduite dans l'enseignement secondaire il y a trente ans sans que, pour autant, les méthodes d'enseignement aient été adaptées à cette nouvelle situation, elle a appelé de ses voeux une évolution.

Elle a ensuite insisté sur une troisième proposition de son rapport qui concerne la composition des jurys de concours, encore trop souvent, par habitude, très majoritairement masculins. La féminisation obligatoire des jurys, dans des conditions fixées par le Conseil d'État, est reprise dans la proposition de loi de Mme Catherine Génisson, a indiqué Mme Anne-Marie Colmou , mais le dispositif amendé par l'Assemblée nationale conduirait à modifier les quelque 1400 statuts particuliers de la fonction publique, risquant, ce faisant, de rendre la réforme inapplicable.

Critiquant ensuite la rédaction actuelle de l'article 6 du statut général des fonctionnaires qui traite pêle-mêle, pour les interdire, des discriminations à raison de la race, des opinions philosophiques ou religieuses, du sexe, etc..., ainsi que du harcèlement sexuel, Mme Anne-Marie Colmou a souhaité qu'une distinction rende plus claire la lecture de ces dispositions et s'est félicitée que la proposition de loi de Mme Génisson vise à instituer dans ce texte deux articles 6 bis et 6 ter qui interdiraient, respectivement, la discrimination sexuelle et le harcèlement sexuel.

S'agissant ensuite du déroulement des carrières, Mme Anne-Marie Colmou a indiqué qu'elle avait formulé, dans son rapport, de nombreuses propositions destinées à favoriser la promotion des femmes. Il est notamment souhaitable, a-t-elle dit, de mettre fin à la grande opacité qui entoure le système de nomination aux postes d'encadrement supérieur, qui fonctionne sans transparence sur les vacances et essentiellement par l'activation de réseaux dont sont exclues les femmes. Elle a également préconisé la constitution de viviers de femmes pour garantir leur promotion équilibrée. De même a-t-elle suggéré la définition, ministère par ministère, de plans pluriannuels d'objectifs destinés à renforcer progressivement la féminisation de chaque corps, pour parvenir à une homogénéité entre les différents niveaux hiérarchiques. Cette proposition vient d'être mise en oeuvre par une récente circulaire du Premier ministre.

Parallèlement, Mme Anne-Marie Colmou a appelé de ses voeux la féminisation des commissions administratives paritaires (CAP), qui examinent les questions individuelles d'avancement des fonctionnaires, et des comités techniques paritaires (CTP), qui débattent des conditions collectives de travail. Cette féminisation passe par une désignation équilibrée entre les deux sexes des représentants de l'administration à ces instances.

Enfin, Mme Anne-Marie Colmou a vivement souhaité que s'engage une réflexion sur l'organisation du travail dans la haute fonction publique, organisation qu'elle a qualifiée de " désastreuse ", avec une utilisation du temps peu rationnelle et préjudiciable aux femmes, beaucoup plus confrontées que leurs collègues masculins aux impératifs de la vie familiale et domestique.

Un débat s'est ensuite instauré.

Patrice Gélard a estimé que, bien qu'intéressant, le rapport de Mme Colmou analysait plus les effets que les causes de la sous-féminisation de la haute fonction publique, alors même que c'est sur les causes qu'il convient d'agir. Ainsi, considérant que les résultats du concours d'entrée à l'ENA ne procédaient pas d'un comportement " machiste " du jury, mais bien plutôt d'une différence de cursus antérieurs entre les candidats et les candidates, il a jugé nécessaire de procéder à des comparaisons de populations analogues pour tirer des enseignements utiles. S'agissant des filières scientifiques, il a considéré que le fond du problème était le faible nombre de candidates, qu'il a attribué à de multiples raisons, et notamment aux attitudes parentales, au comportement sédentaire des filles, à la mentalité des classes préparatoires aux grandes écoles qui leur est peu adaptée. Les jeunes filles qui ont un BAC S, a-t-il noté, délaissent les écoles d'ingénieurs au profit des études médicales ou paramédicales.

En ce qui concerne la sous-représentation féminine dans le haut encadrement des administrations centrales, M. Patrice Gélard a considéré qu'il convenait de s'interroger sur les motivations des élèves féminines, pour lesquelles l'organisation du temps de travail, la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale constituent des éléments déterminants de choix de carrière : ainsi, à la sortie de l'ENA, les jeunes femmes choisissent volontiers les tribunaux administratifs ou les chambres régionales des comptes, de même, les promotions à l'École nationale de la magistrature présentent une forte féminisation. Il a déclaré qu'il lui paraissait par ailleurs essentiel, d'une part, de revoir l'orientation souvent " décourageante " des jeunes filles au moment des études secondaires et, d'autre part, d'atténuer les pénalisations qu'entraîne souvent pour les carrières le congé parental d'éducation.

En réponse, Mme Anne-Marie Colmou a indiqué que les causes de sous-féminisation qui étaient étrangères à la fonction publique étaient abordées dans son rapport, mais que sa mission l'avait conduite à limiter ses propositions à celles qui s'adressaient au ministre de la fonction publique, de la réforme de l'État et de la décentralisation. Elle a par ailleurs estimé qu'il appartiendrait précisément au comité de pilotage d'analyser, dans les enseignements et dans les concours, les raisons de la sous-féminisation de certaines filières. Elle a enfin considéré que si les jurys n'avaient pas nécessairement des comportements à proprement parler " machistes ", leur composition équilibrée entre les deux sexes paraissait néanmoins normale et donc souhaitable.

Revenant sur le problème de la féminisation de la magistrature, M. Patrice Gélard a attiré l'attention sur le fait que le traitement de " l'un des problèmes de société les plus cruciaux ", celui des banlieues, revenait à des professions aujourd'hui largement féminisées (magistrats, enseignants, agents du secteur social en général) alors même qu'on assiste parallèlement à une " crise des pères ".

Mme Dinah Derycke , présidente , a déploré l'existence, dès la maternelle et tout au long de la scolarité, d'attitudes différentes, conscientes ou non -chez les parents, les enseignants, dans les manuels scolaires et les méthodes d'enseignement- entre les filles et les garçons avec une valorisation systématique des garçons. Elle s'est félicitée de la convention qui vient d'être signée par les différents ministres intéressés pour combattre le sexisme au sein de l'éducation, saluant en elle un premier pas pour modifier ces comportements inconscients.

Mme Dinah Derycke , présidente , a ensuite insisté sur la question de la mixité des jurys. Revenant sur le dispositif adopté par l'Assemblée nationale dans le cadre de la proposition de loi de Mme Catherine Génisson, elle a interrogé Mme Anne-Marie Colmou sur son applicabilité. Confirmant ses précédents propos, celle-ci a estimé que la position jurisprudentielle du Conseil d'État, reprise dans le texte initial de Mme Catherine Génisson et consistant à admettre, pour les statuts particuliers, la mixité d'un jury dès lors que l'un des sexes y était représenté par au moins un membre, était certes contestable comme l'estimait Mme Dinah Derycke, présidente , mais qu'elle constituait aussi une " soupape de sécurité " générale pour certains corps presqu'exclusivement masculins (corps où il est très difficile sinon impossible de trouver des femmes pour composer les jurys au titre des personnalités qualifiées) et que sa suppression par l'Assemblée nationale risquait de bloquer la réforme faute, pour le pouvoir exécutif, d'être en mesure de modifier rapidement les 1 400 statuts particuliers de la fonction publique. Elle a cependant reconnu qu'il conviendrait d'abord de connaître avec précision le nombre de ces " corps fermés ", soulignant qu'elle s'était heurtée sur ce point, dans la rédaction de son rapport, à " une poche d'opacité ".

M. Jean-François Picheral a rappelé que tous les concours de la fonction publique ne présentaient pas le même type de déséquilibre en matière de répartition sexuée des candidats ; il a relevé qu'un trop fort déséquilibre dans les effectifs entraînait généralement une réaction favorable à l'instauration de la parité (dans les deux sens comme on le constate pour la magistrature), et que les principaux obstacles à la promotion des femmes étant la maternité et les contraintes domestiques, il convenait d'agir à ces deux niveaux.

Revenant sur le problème de la mixité des jurys, Mme Dinah Derycke , présidente , a relevé que de manière générale, et jusqu'à présent, la participation aux jurys apparaissait comme une " affaire d'hommes ", selon une sorte d'attitude de principe qu'il convenait de modifier. Puis, précisant qu'il y avait précisément 48 % de magistrates, elle a estimé qu'on ne pouvait parler de déséquilibre, comme le faisait M. Patrice Gélard , d'autant que les femmes sont encore peu nombreuses dans la très haute magistrature.

Mme Anne-Marie Colmou a précisé que les gestionnaires de personnel qu'elle avait rencontrés dans le cadre de sa mission avaient tous affirmé être à la recherche de femmes pour constituer les jurys, dans la mesure où la féminisation avait pour effet positif une évolution des mentalités.

S'agissant des taux d'absentéisme hommes/femmes à âge égal, elle a estimé que la question était particulièrement complexe faute de disposer de statistiques sexuées fiables. Elle a par ailleurs déploré que des appréciations différentes soient souvent portées quant aux questions de compétence ou d'absence pour garde d'enfant selon le sexe de l'intéressé, les hommes bénéficiant généralement de jugements plus favorables.

Abordant le problème des concours internes, Mme Dinah Derycke , présidente , a estimé qu'ils n'étaient pas toujours de nature à permettre d'assurer la parité en raison de la mobilité qu'exige souvent la scolarité dans les écoles d'application et de la mutation géographique qui accompagne parfois la progression de carrière.

Bien qu'approuvant pleinement ce constat, Mme Anne-Marie Colmou a estimé que le développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTCI) devrait permettre de dépasser rapidement ou d'atténuer cette question de la mobilité. S'agissant par ailleurs des nouvelles modalités d'organisation du travail -congé parental, temps partiel, partage des postes, etc...- elle a estimé qu'elles recelaient, en éloignant de la carrière, un certain nombre de dangers qui nécessitaient des études préalables très approfondies.

Mme Odette Terrade a exprimé son accord sur ce dernier point, estimant en particulier indispensable que le temps partiel soit choisi et non contraint et qu'un certain nombre d'adaptations, notamment en ce qui concerne l'acquisition des droits à la retraite, accompagnent ce mouvement.

En réponse à Mme Dinah Derycke , présidente , sur les motivations qui avaient conduit le Conseil d'État à formuler à l'automne un avis défavorable sur les projets de décret relatifs à la féminisation des jurys de concours, des CAP et des CTP, Mme Anne-Marie Colmou a confirmé qu'il s'agissait exclusivement de respecter la hiérarchie des normes, et que le Conseil n'avait pas émis de réserves sur la constitutionnalité des mesures, dès lors qu'elles seraient prises par la voie législative.

Mme Dinah Derycke , présidente , l'interrogeant ensuite sur l'absence de parité au sein des représentations syndicales aux CAP et aux CTP, Mme Anne-Marie Colmou a précisé que, conformément au contenu de sa mission, ses propositions concernaient exclusivement la représentation de l'administration au sein de ces instances et qu'au demeurant, il lui semblait que des arguments constitutionnels relatifs à la liberté syndicale rendaient difficiles l'extension de l'obligation de parité aux organisations professionnelles.

Mme Odette Terrade a estimé qu'une réponse serait peut-être apportée si les amendements, présentés lors du débat sur le projet de loi tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, et qui étendaient aux élections professionnelles les obligations relatives à la parité des candidatures, étaient repris sous forme de proposition de loi, comme l'avaient annoncé certains représentants de la majorité sénatoriale.

A l'issue de l'audition de Mme Anne-Marie Colmou , un échange de vues sur le calendrier et les travaux de la délégation a eu lieu à l'initiative de Mme Dinah Derycke, présidente .

Mardi 21 mars 2000 - Présidence de Mme Dinah Derycke, présidente.

La délégation a tout d'abord procédé, à l'initiative de Mme Dinah Derycke, présidente , à un large échange de vues sur l'organisation et les thèmes de ses travaux auquel ont également participé Mmes Annick Bocandé, Anne Heinis, Maryse Bergé-Lavigne, Gisèle Printz, MM. Patrice Gélard et Lucien Neuwirth, Mme Odette Terrade et M. André Ferrand.

Puis, saisie le 15 mars 2000 par la commission des affaires sociales de la proposition de loi n° 258 (1999-2000), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes , elle a désigné M. Gérard Cornu en qualité de rapporteur .

La délégation a ensuite procédé à l'audition de M. Jean Delmas, président de l'Union professionnelle artisanale (UPA), et de Mme Dany Bourdeaux, présidente de la commission des conjoints au sein de l'UPA .

Mme Dinah Derycke, présidente, a rappelé que l'attention de la délégation sur la situation des conjoints d'artisans avait été notamment attirée par un amendement déposé par M. Lucien Neuwirth à l'occasion de l'examen par le Sénat du projet de loi tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives.

M. Jean Delmas a souhaité insister sur les difficultés que pouvaient rencontrer les conjoints d'artisans dans l'exercice de leur activité professionnelle.

Mme Dany Bourdeaux a observé que le secteur de l'artisanat ne connaissait pas de discrimination particulière liée au sexe. Elle a précisé que la proportion de femmes chefs d'entreprise y était passée de 11 % en 1977 à 17 % en 1998, celles-ci étant présentes dans tous les secteurs, même si ceux du textile et de l'habillement sont surreprésentés.

Elle a souligné que la représentation des femmes d'artisans dans les organismes professionnels s'était améliorée. Elle a ainsi indiqué que quatre femmes présidaient actuellement des chambres de métiers, que 126 femmes étaient administratrices de caisses de sécurité sociale (mais elles sont peu nombreuses, 54 sur 600, dans la gestion de l'assurance vieillesse) et que 44 femmes avaient été élues aux élections prud'homales.

Elle a cependant déploré que les conjoints collaborateurs ne puissent être ni électeurs, ni éligibles à ces dernières élections, à l'inverse des élections aux chambres de métiers et aux caisses de sécurité sociale.

Elle a rappelé que les conjoints d'artisans pouvaient être soumis à trois statuts : le conjoint salarié, le conjoint associé et le conjoint collaborateur.

Abordant les limites du statut de conjoint collaborateur introduit par la loi du 10 juillet 1982, elle a regretté que la loi de 1985 sur les régimes matrimoniaux ait réduit la protection du conjoint collaborateur en posant de nouvelles règles d'obligation au passif portant sur les biens communs du couple. Elle a alors exprimé le souhait d'un renforcement de ce statut dans le cadre de l'entreprise en bien commun.

Elle a également souligné les importantes difficultés nées du recours systématique des banques à la pratique du cautionnement solidaire pour garantir les dettes de l'entreprise artisanale.

S'agissant du conjoint salarié, elle a relevé l'existence d'une injustice fiscale : ses cotisations sociales sont entièrement déductibles lorsque le régime matrimonial est celui de la séparation de biens, elles le sont sous plafond dans le cas du régime de la communauté.

Mme Dinah Derycke, présidente, s'est interrogée sur les raisons pouvant expliquer que seuls 6 % des conjoints d'artisans aient choisi le statut de conjoint collaborateur.

Mme Dany Bourdeaux a évalué à 30 ou 40 % la proportion des femmes d'artisans placées en dehors de chacun des trois statuts. Elle a jugé que le choix d'un statut relevait plus d'une décision du couple au regard des intérêts et des possibilités de l'entreprise que d'une seule décision du conjoint. Elle a alors estimé que les campagnes de communication sur les différents statuts avaient sans doute trop visé le seul conjoint, ignorant cette dimension de couple.

Elle a aussi observé que le choix du statut dépendait du secteur et de la taille de l'entreprise. Prenant l'exemple du bâtiment, elle a déclaré que 48 % des conjoints étaient salariés dans les entreprises comptant 10 à 20 salariés, mais 12 % seulement dans les entreprises de moins de 10 salariés.

M. Patrice Gélard a demandé si l'on notait une évolution dans l'accès des femmes aux métiers de l'artisanat -notamment dans le bâtiment- et dans l'offre des formations proposées.

Mme Dany Bourdeaux a reconnu que les femmes s'orientaient aujourd'hui plus facilement vers les métiers du bâtiment, car la pénibilité du travail y était devenue moindre. Elle a également observé un plus fort accès des jeunes filles dans les centres de formation des apprentis et dans les lycées professionnels spécialisés dans le bâtiment.

Mme Dinah Derycke, présidente, s'est interrogée sur la capacité des conjoints d'artisans à accéder à une formation.

Mme Dany Bourdeaux a indiqué que les chambres de métiers et les organisations professionnelles avaient mis en place des formations qualifiantes de niveau IV spécifiques aux conjoints collaborateurs, notamment dans le secteur du bâtiment. Elle a ainsi cité la formation à la gestion de l'entreprise artisanale du bâtiment (GEAB) et le brevet de conjoint collaborateur d'entreprise artisanale (BCCEA). Elle a ajouté que les conjoints qui le souhaitaient pouvaient approfondir leur formation en préparant un diplôme universitaire de gestion.

Répondant à Mme Gisèle Printz qui s'interrogeait sur les contacts existant entre les artisans et l'éducation nationale, elle a annoncé la signature prochaine d'une convention avec l'éducation nationale destinée à favoriser l'orientation des jeunes vers l'artisanat.

M. Jean Delmas a regretté que les chefs d'entreprises artisanales rencontrent fréquemment des difficultés pour recruter des jeunes en contrat d'apprentissage. Il a estimé nécessaire de mieux convaincre les jeunes -et leurs parents- du caractère attrayant des métiers de l'artisanat, rappelant qu'un accord de partenariat avec le ministère de l'emploi et de la solidarité et avec l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) avait été signé sur ce sujet.

Mme Gisèle Printz a estimé, sur ce point, que de meilleures rémunérations renforceraient l'attractivité de l'artisanat.

M. Jean Delmas a rappelé que les conventions collectives prévoyaient une égalité des salaires entre l'industrie et l'artisanat, soulignant ainsi que le problème venait de l'insuffisante rémunération des métiers manuels en France.

Mme Janine Bardou a, à ce propos, insisté sur la nécessité de valoriser l'image des métiers manuels non seulement auprès des jeunes, mais aussi auprès de leur famille.

Observant une évolution sensible des mentalités, favorable à l'accès des femmes à la formation et à l'emploi, M. Jean-Guy Branger s'est interrogé sur les facilités concrètes offertes aux femmes actives pour s'engager dans la vie publique.

M. Jean Delmas a indiqué que l'UPA était favorable à une meilleure représentation des femmes dans les organismes professionnels ou consulaires. S'agissant des élections aux chambres de métiers, il a estimé que la mise en oeuvre de la parité était difficile pour l'élection des membres du collège des professions, dans la mesure où la représentation des femmes était très variable selon la profession. Il s'est en revanche prononcé en faveur d'une plus grande mixité pour les élections des membres du collège des organisations syndicales, cette mixité devant cependant être le fruit d'une démarche collective.

Il a toutefois observé que, lors des dernières élections professionnelles, les femmes représentaient 20 % des élus, soit proportionnellement plus que leur présence effective dans l'artisanat.

Mme Annick Bocandé s'est interrogée sur l'état d'avancement des travaux du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle en matière d'amélioration de la représentation des femmes aux élections professionnelles.

Mme Dany Bourdeaux a reconnu que les travaux du conseil n'avaient pour l'instant débouché sur aucune proposition.

Puis, Mme Dinah Derycke, présidente, l'interrogeant sur la possibilité pour les conjoints d'être électeurs et éligibles aux chambres des métiers au regard de leur statut, elle a apporté les précisions suivantes : mentionné au répertoire des métiers, le conjoint collaborateur est électeur et éligible, le conjoint associé l'est à condition d'avoir lui-même le statut d'artisan, le conjoint salarié ne l'est pas.

Mme Dinah Derycke, présidente, a exprimé le souhait que chaque conjoint d'artisan puisse être couvert par un statut et s'est demandé si des considérations spécifiques pouvaient conduire à choisir tel ou tel statut.

Tout en se déclarant en accord avec les propos de la présidente -la nécessité d'un statut se révèle notamment dans les situations dramatiques, la femme devant pouvoir prouver, après le décès de son mari ou un divorce, qu'elle a travaillé dans l'entreprise- Mme Dany Bourdeaux a observé que l'acquisition d'un statut devait relever d'une démarche volontaire et ne pas être imposée. Elle a notamment souligné les difficultés liées à l'existence possible d'un double statut, les conjoints d'artisans pouvant exercer une activité professionnelle hors de l'entreprise artisanale. Une meilleure information des intéressés est nécessaire, a-t-elle déclaré.

Elle a estimé que le choix d'un statut pouvait être lié à des considérations financières, précisant que, si l'entreprise artisanale dégageait un revenu suffisant, le conjoint avait le plus souvent le statut de conjoint salarié. A cet égard, après avoir déploré que les ASSEDIC aient parfois refusé de considérer le conjoint comme un salarié en contestant le lien de subordination existant entre l'artisan et son conjoint, elle a indiqué qu'un récent arrêt de la cour de cassation avait levé cette ambiguïté.

En réponse à Mme Dinah Derycke , présidente , qui s'interrogeait sur l'opportunité de favoriser la reprise de l'entreprise par le conjoint survivant en cas de décès, Mme Dany Bourdeaux a rappelé que le statut de conjoint collaborateur ouvrait droit à une reprise préférentielle de l'entreprise et estimé que le problème qui se posait dans un tel cas était davantage celui de la formation du conjoint.

Revenant sur les principales attentes de l'UPA, M. Jean Delmas a, une nouvelle fois, jugé nécessaire qu'une intervention législative permette aux conjoints collaborateurs d'être électeurs et éligibles aux élections prud'homales.

Mme Dany Bourdeaux a, quant à elle, déploré à nouveau le recours systématique aux cautions solidaires, qui place les conjoints d'artisans dans des situations souvent très délicates, et ne se justifie pas, dans la mesure où il existe d'autres solutions : nantissement, hypothèque.

Enfin, répondant à une question de Mme Dinah Derycke, présidente , sur les prêts bancaires accordés aux femmes dans le secteur de l'artisanat, M. Jean Delmas a estimé qu'il n'y avait pas de discrimination et que le critère retenu était celui de la viabilité de l'entreprise, avant d'insister, à son tour, sur les problèmes de cautionnement rencontrés.

Mardi 28 mars 2000 - Présidence de Mme Dinah Derycke, présidente.

La délégation a tout d'abord procédé à l'audition de Mme Chantal Foulon , directeur adjoint des relations sociales du Mouvement des entreprises de France (MEDEF).

Mme Dinah Derycke , présidente , a rappelé que si cette audition se tenait dans le contexte de l'examen, par le Parlement, de la proposition de loi de Mme Catherine Génisson, députée, et plusieurs de ses collègues, relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, la délégation souhaitait examiner ce thème dans un cadre très large.

Mme Chantal Foulon a indiqué en introduction que, par un accord du 3 février 2000 entre les organisations syndicales et le MEDEF, la question de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes avait été retenue parmi les neuf thèmes devant être étudiés dans le cadre paritaire de la " refondation sociale " proposée par le MEDEF et qu'elle serait examinée au cours du second semestre 2000. Elle a fait part des craintes du MEDEF qu'une intervention précipitée du législateur ne vienne contrarier l'évolution du dossier.

Mme Chantal Foulon a estimé qu'au plan normatif, il " ne restait pas grand chose à faire " : les textes existent, a-t-elle souligné, sous réserve de la transposition d'ici janvier 2001 de quelques dispositions communautaires. Elle a déclaré qu'il existait en matière de lutte contre les discriminations un arsenal de textes déjà fort complet et qu'en faisant peser de nouvelles obligations et contraintes sur les entreprises privées, la proposition de loi de Mme Catherine Génisson ne semblait pas appropriée.

Prenant pour exemple le rapport de situation comparée entre les femmes et les hommes, l'un des instruments de la loi Roudy de 1983 que la proposition de loi de Mme Catherine Génisson vise à rénover, Mme Chantal Foulon a indiqué qu'il semblait préférable au MEDEF de s'interroger d'abord sur les raisons pour lesquelles ce rapport n'est établi par l'employeur que dans environ 50 % des entreprises, sans que les syndicats n'utilisent pour autant sur le terrain les moyens légaux qui leur sont reconnus pour en imposer la présentation. Evoquant un avant-projet de décret récemment présenté au Conseil supérieur de l'égalité professionnelle sur les indicateurs pertinents qui seraient imposés aux entreprises, elle a estimé que plus on compliquait les textes sur le rapport de situation comparée, moins il y aurait de chances de les voir appliqués.

Mme Chantal Foulon a ensuite indiqué que la principale réserve du MEDEF à l'égard de la proposition de loi de Mme Catherine Génisson portait sur la nouvelle obligation de négocier chaque année sur les objectifs d'amélioration de l'égalité professionnelle et les mesures permettant de les atteindre, obligation dont l'inobservation est assortie de sanctions pénales. L'hostilité du MEDEF résulte tant de considérations de principe -" ce n'est pas avec la création de nouveaux délits que l'égalité progressera "- que du flou de la formulation retenue pour cette nouvelle obligation, flou qui semble particulièrement dommageable, dès lors que sont prévues des sanctions pénales.

Après avoir indiqué que le MEDEF était en revanche favorable au principe " d'approche intégrée ", qui vise à examiner l'objectif d'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes dans tout le champ de la négociation collective, et qu'il n'était pas opposé non plus à l'extension de l'accès aux contrats d'égalité, Mme Chantal Foulon a souhaité que l'examen de la proposition de loi de Mme Catherine Génisson soit reporté à l'issue des discussions que les partenaires sociaux entameront prochainement en suggérant, en outre, d'introduire dans ce texte les mesures de transcription communautaire auxquelles la France sera en tout état de cause contrainte.

Un débat s'est ensuite instauré.

M. Gérard Cornu , rapporteur , a tout d'abord estimé que, s'il était concevable que le MEDEF demande que l'on fasse confiance à la négociation sociale avant de légiférer, il l'était tout autant de reconnaître la vocation du législateur à intervenir au préalable pour favoriser l'égalité de représentation dans les structures de concertation. A titre d'exemple, il a cité une loi allemande de 1972 qui assure aux femmes une représentation dans les comités d'entreprise proportionnelle à leur présence dans l'entreprise, permettant ainsi une meilleure prise en compte de leurs préoccupations. Il a fait état de sa proposition de loi relative à l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives dans les élections professionnelles et relevé que, pour favoriser l'égalité professionnelle et l'accession des femmes aux postes de responsabilité, il convenait de soulager leur double, voire triple vie familiale, professionnelle, politique ou syndicale.

Mme Chantal Foulon a estimé en réponse qu'une part significative du problème de l'égalité professionnelle relevait des mentalités, que le législateur pouvait agir sur d'autres leviers que le code du travail et qu'il pouvait aussi intervenir, en amont de l'entreprise, au niveau de la formation. Elle a par ailleurs considéré qu'à l'exception d'une position de principe défavorable à toute mesure coercitive en la matière, le MEDEF pouvait difficilement exprimer une opinion sur la parité dans les élections professionnelles, question qui intéresse les syndicats. Elle a ajouté qu'à sa connaissance, l'avis des syndicats était plutôt négatif pour ce qui concerne la parité pour les élections prud'homales. Enfin, si elle s'est déclarée favorable aux mesures matériellement concrètes pour aider les femmes à concilier vie professionnelle et vie familiale, telles que le développement des chèques emploi-service ou l'accroissement du nombre des crèches ou l'extension de leurs horaires d'ouverture, elle a attiré l'attention de la délégation sur les effets pervers que pouvaient éventuellement provoquer de telles dispositions sur le partage des tâches ménagères et familiales dans les couples.

Mme Annick Bocandé , rapporteur pour la commission des affaires sociales, s'est interrogée sur l'implication des entreprises, au-delà de l'intervention du législateur ou des collectivités locales, pour aider les femmes à mieux concilier vie professionnelle et vie familiale, sur la capacité de la seule négociation collective à parvenir à des résultats satisfaisants et sur l'état actuel des inégalités de carrière et de salaire entre les hommes et les femmes dans les entreprises.

Prenant appui sur le précédent de la loi " de Robien ", Mme Chantal Foulon a tout d'abord réaffirmé que l'intervention du législateur pouvait venir gêner la négociation paritaire. Elle a rappelé que, traditionnellement, les entreprises ont toujours souhaité se maintenir dans une stricte position de neutralité au regard de la conciliation des vies familiale et professionnelle, et observé que la situation ne devait pas être si défavorable en France puisque le taux d'activité des femmes ayant deux ou trois enfants y est l'un des plus élevés.

S'agissant des inégalités salariales ou de carrière entre les femmes et les hommes, Mme Chantal Foulon a estimé que si la situation était encore loin d'être satisfaisante, notamment en ce qui concerne les femmes cadres, les études démontraient que les écarts continuaient à se réduire. Elle a ajouté qu'il n'existait pas à proprement parler de discrimination, mais des distinctions de fait qui résultaient de facteurs nombreux et disparates : secteurs professionnels, catégories d'emplois, tailles des entreprises, filières de formation, etc.

Après que Mme Gisèle Printz eut exprimé sa préférence pour la modification législative par rapport à la négociation collective pour faire appliquer la loi Roudy, Mme Chantal Foulon a redit que, du point de vue du MEDEF, il convenait d'abord, avant de la modifier, de s'interroger sur la pertinence de cette loi. Elle a souligné encore une fois que rarement les salariés avaient demandé sur le terrain l'application de la législation sur le rapport de situation comparée de la situation des femmes et des femmes dans l'entreprise alors qu'ils en avaient les moyens. Observant par ailleurs que le code du travail prévoit déjà la mise à disposition des comités d'entreprise de nombreux outils et éléments d'information, elle a jugé inopportun d'imposer de nouvelles obligations aux entreprises sans coordination avec les dispositions existantes. Elle a réclamé une approche globale et, plus généralement, un " audit " du code du travail.

Mme Dinah Derycke , présidente , a estimé que la crise économique avait sans doute contrarié la mise en oeuvre de la loi Roudy, le chômage et les difficultés des salariés ayant relégué la question de l'égalité professionnelle au rang des problèmes moins importants, y compris pour les syndicats. Après avoir considéré que de nombreux rapports de situation comparée entre les femmes et les hommes ne méritaient pas ce qualificatif en raison de leur indigence, elle a rappelé que tous les indicateurs démontraient que la formation professionnelle des femmes à l'intérieur des entreprises posait, à tous les niveaux hiérarchiques, un véritable problème. Enfin, si elle a admis qu'il fallait parfois du temps pour qu'une législation produise ses effets, elle a estimé que près de vingt ans après l'adoption de la loi Roudy, la situation en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ne s'était pas substantiellement améliorée, ce qui justifiait une nouvelle intervention du législateur.

En réponse, Mme Chantal Foulon a estimé que la formation professionnelle s'était beaucoup développée depuis quinze ans et qu'on notait actuellement une montée en puissance de la formation professionnelle des femmes. Elle a toutefois reconnu que les congés individuels de formation, destinés à favoriser les reconversions ou la progression des carrières, étaient moins demandés par les femmes, sans doute parce que les efforts et les investissements professionnels qu'ils demandent sont difficilement conciliables avec la vie familiale. Elle a par ailleurs considéré que les dispositions de la " loi Roudy ", qui avaient échoué, s'appuyaient sur le concept anglo-saxon de l' " affirmative action ", profondément étranger à notre culture, en ce qu'il tend à imposer des discriminations positives.

Puis la délégation a entendu Mme Huguette Delavault, représentante de l'Association française des femmes diplômées d'université (AFFDU) au réseau " Demain la parité ".

Mme Huguette Delavault a tout d'abord souligné l'inégal accès des enseignants chercheurs de sexe féminin au grade de professeurs des universités : si les universités parisiennes enregistrent des chiffres satisfaisants en ce domaine, avec un taux de professeurs de sexe féminin souvent supérieur à la moyenne nationale, la situation est différente en province, notamment pour les sciences, où l'on constate que les femmes comptent parfois pour moins de 5 % des professeurs.

L'analyse des causes de cette situation insatisfaisante est complexe, mais l'orientation des jeunes filles après le baccalauréat est cruciale : la plupart rejoignent l'université plutôt que les grandes écoles, qui privilégient nettement le " profil masculin ". De façon générale, les jurys des concours se déterminent essentiellement sur le brio et la rapidité de décision, apanages des garçons a estimé Mme Huguette Delavault . Elle a rappelé, à cet égard, que le nombre des filles admises aux concours des écoles normales supérieures (ENS) se raréfiait depuis l'instauration de la mixité de leurs épreuves (1981 pour l'ENS de Fontenay-Saint-Cloud, 1986 pour celle d'Ulm-Sèvres).

Elle en a conclu que les critères retenus pour opérer la sélection à l'entrée des grandes écoles devraient être modifiés pour donner toutes leurs chances aux candidates féminines, et que les jurys des concours d'entrée devaient être totalement paritaires.

S'agissant des carrières universitaires, Mme Huguette Delavault a estimé que la composition du comité national des universités (CNU) correspondait bien, pour ceux de ses membres nommés, à la place relative des femmes dans les disciplines considérées ; il n'en est pas de même pour les membres désignés par les syndicats, qui sont majoritairement masculins.

Evoquant la composition des jurys mis en place pour les concours administratifs, Mme Huguette Delavault s'est fermement prononcée pour une composition réellement paritaire, et non pas simplement mixte, la mixité pouvant, suivant les critères retenus par le Conseil d'État, se résumer à la présence d'une seule femme dans un jury, ce qui la conduit alors à jouer un rôle " d'alibi ".

Mme Huguette Delavault a reconnu l'existence de difficultés d'application de cette inflexion vers une stricte parité, notamment pour certains corps techniques, mais a souligné qu'elles étaient loin d'être insurmontables : dans les catégories de niveau " A ", le vivier de recrutement des membres des jurys est certes limité, mais n'est pas nul. Quant aux catégories " C ", il serait possible de faire appel à des experts extérieurs à l'administration. Ces suggestions s'ajoutent à celles contenues dans le rapport récemment rédigé par Mme Anne-Marie Colmou sur la fonction publique, qui valorise les perspectives interministérielles.

A l'issue de cet exposé, un débat s'est engagé.

M. Gérard Cornu, rapporteur , a dit ne pas partager toutes les affirmations de Mme Huguette Delavault, notamment sur un supposé brio réservé aux garçons. Evoquant la place minoritaire des femmes dans les professions scientifiques, il a souhaité connaître le sentiment de Mme Huguette Delavault sur ses causes. Constatant que les jurys des concours universitaires et administratifs étaient, en effet, peu féminisés, il l'a interrogée sur les actions que pourrait entreprendre le législateur pour y remédier.

En réponse, Mme Huguette Delavault a précisé que, dès l'enseignement secondaire, on constatait l'émergence de deux filières distinctes dont l'une, scientifique, était plutôt masculine, et l'autre, littéraire, plutôt féminine.

Mme Huguette Delavault a souhaité que les personnels chargés de l'orientation des élèves soient mieux informés de la vie professionnelle actuelle, alors que leurs connaissances n'intègrent pas toujours la réalité de l'évolution des métiers.

Mme Hélène Luc a fait valoir son plein accord sur l'intérêt de la présence des femmes pour le développement de l'industrie et des services, mais a souligné le besoin qu'éprouvaient les jeunes filles d'être fortement encouragées dans cette voie. Elle a relevé l'absence des femmes de la plupart des jurys d'examen, et a considéré que les élèves de sexe féminin étaient souvent plus travailleuses que les garçons, mais moins sûres d'elles-mêmes. Elle a conclu en souhaitant qu'une mixité équilibrée soit instaurée dans tous les métiers, y compris ceux aujourd'hui majoritairement féminins, comme la magistrature et la profession d'instituteur.

Mme Annick Bocandé a interrogé Mme Huguette Delavault sur l'apport du législateur à la souhaitable féminisation des jurys. Elle a souhaité recueillir également son avis sur les causes de la faible présence de professeurs d'université de sexe féminin dans les disciplines scientifiques, notamment en pharmacie et biologie, et sur les inégalités de rémunération entre hommes et femmes.

M. Patrice Gélard s'est inscrit en faux contre les thèses développées par Mme Huguette Delavault qui relèvent, selon lui, d'une époque révolue. Il a cité l'exemple du concours sanctionnant la première année des études de médecine, dont la réussite est plus marquée chez les filles que chez les garçons.

Abordant le cas spécifique des professeurs d'université, M. Patrice Gélard a estimé qu'une des raisons majeures, et passagère, de la faible féminisation de ce corps est sa moyenne d'âge élevée. Il a rappelé son expérience de membre du CNU, qui le conduisait à affirmer avec force que la communauté universitaire n'était pas sexiste, et que les femmes réussissaient au moins aussi bien que les hommes en matière de recherche. Un des freins à la promotion des femmes réside cependant dans leur moindre acceptation de la mobilité géographique.

Il s'est élevé contre l'idée d'un " profil masculin " que privilégierait les concours, et a estimé que les propositions de Mme Huguette Delavault en matière de parité, et non de mixité, des jurys des ENS conduiraient, si elles étaient suivies, au rétablissement de concours spécifiques à chaque sexe.

En réponse, Mme Huguette Delavault a précisé que :

- le fonctionnement actuel des jurys d'université constitue un frein considérable à la présence des femmes. Elle a ainsi cité l'exemple d'un jury de sciences physiques qui avait choisi de siéger sept jours sur sept ;

- les promotions dans l'enseignement supérieur sont fondées sur les travaux de recherche, à l'exclusion de ceux d'enseignement et de gestion ;

- les inégalités de salaire entre hommes et femmes sont marquées dans le secteur industriel, à l'exception d'un petit nombre de femmes qui se sont distinguées par la qualité de leur réussite universitaire.

Puis la délégation a reçu Mme Marie-France Boutroue, représentante titulaire de la Confédération générale du travail (CGT) au Conseil supérieur de l'égalité professionnelle.

Dans un propos liminaire, Mme Marie-France Boutroue a rappelé que la loi " Roudy " de 1983 avait instauré des bilans d'égalité professionnelle qui, après une longue éclipse, avaient été récemment " redynamisés ". Elle a précisé qu'une centaine d'entreprises avaient été rappelées à leur obligation d'établir de tels bilans, ce qu'avait fait une soixantaine d'entre elles ; elle a estimé souhaitable de réaffirmer cette obligation légale, les bilans d'égalité professionnelle fournissant ainsi la base d'une négociation annuelle obligatoire.

Mme Marie-France Boutroue a rappelé que la priorité, selon la CGT, était d'utiliser les moyens légaux et réglementaires déjà existants, comme ces bilans, plutôt que de créer de nouveaux instruments. Evoquant les bilans récemment obtenus, elle en a précisé les limites, tenant au fait que les employeurs ne disposent pas toujours de chiffres récents pour les rédiger, et a rappelé que leur exploitation statistique se heurte au caractère hétérogène des données fournies par les chefs d'entreprise, car laissées à leur seule appréciation. La priorité en la matière, a estimé Mme Marie-France Boutroue , est donc d'instaurer l'obligation de bilans précis et concrets.

Puis Mme Marie-France Boutroue a retracé l'évolution de la place des femmes au sein du bureau confédéral de la CGT : de 27 % de l'effectif, elles sont passées, en six ans, à une quasi-égalité, cette instance comptant 43 femmes et 47 hommes. Cette situation, satisfaisante, est renforcée par le bon nombre de candidatures féminines enregistrées lors du dernier renouvellement : 83 femmes se sont alors présentées, sur 180 candidats ; la preuve est ainsi faite que la féminisation du bureau confédéral est fondée sur un mouvement durable, et ne constitue donc pas un pur effet de mode. Mme Marie-France Boutroue en a conclu que l'imposition de la parité entre hommes et femmes par des voies autoritaires n'était pas souhaitable, car cette démarche aboutirait à des résultats biaisés.

Puis une discussion s'est ouverte au terme de cet exposé.

M. Gérard Cornu, rapporteur, a constaté que les propos de Mme Marie-France Boutroue démontraient que l'instauration de la parité à marche forcée n'était pas souhaitable, mais a plaidé pour l'instauration progressive d'une égalité au sein des structures de représentation des salariés. Il a rappelé l'exemple allemand, qui prévoit le recours à la représentation proportionnelle par sexe, notamment au sein des comités d'entreprise. Il a souhaité savoir si Mme Marie-France Boutroue estimait que la réalisation des bilans d'égalité professionnelle avait été entravée par le caractère majoritairement masculin des syndicats.

En réponse, Mme Marie-France Boutroue a rappelé que le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle préconisait une parité généralisée dans toutes les instances représentatives du personnel, ce qui lui semblait peu réaliste.

S'agissant de la parité au sein des comités d'entreprise, Mme Marie-France Boutroue a rappelé la difficulté de l'imposer, notamment parce que les candidatures au deuxième tour des délégués du personnel à ces comités pouvaient émaner d'organisations non représentatives au plan national, auxquelles aucune contrainte légale ne pouvait être imposée.

Rappelant que la CGT rassemblait 700 000 salariés, Mme Marie-France Boutroue a évoqué une récente enquête statistique menée sur 230 000 d'entre eux, dont 30 % de femmes ; ses résultats démontrent qu'il existe, chez de nombreux salariés syndiqués, une réticence à se présenter aux élections dans l'entreprise, le syndicalisme y demeurant " mal vu ". Cette constatation, a-t-elle estimé, différencie le contexte des candidatures syndicales et politiques, et démontre l'extrême difficulté à appliquer un système paritaire propre aux élections syndicales.

Toujours en réponse à M. Gérard Cornu, Mme Marie-France Boutroue a confirmé que l'engagement syndical était plus difficile à réaliser pour les femmes que pour les hommes, ne serait-ce que parce que les femmes ont à assumer conjointement vie professionnelle et familiale. Selon elle, il conviendrait, à tout le moins, d'améliorer les capacités de garde des enfants pour égaliser les situations.

Mme Annick Bocandé a fait valoir que ce type de difficultés entravait également l'engagement des femmes en politique. Elle s'est également interrogée sur le caractère prématuré de la proposition de loi sur l'égalité professionnelle, qui précède la négociation prévue pour l'automne 2000 sur ce sujet entre syndicats et patronat.

En réponse, Mme Marie-France Boutroue a rappelé que des discussions s'étaient déjà ouvertes au sein des instances européennes sur ce problème, et que l'égalité professionnelle entre hommes et femmes constituait également un des éléments des négociations sur les 35 heures.

Elle a estimé que les bilans d'égalité professionnelle permettaient d'évoquer l'ensemble des questions intéressant les salariés, et pas seulement les femmes ; ils peuvent également permettre une dynamisation du dialogue social, grâce à leur démarche globale et transversale.

A M. Gérard Cornu , rapporteur , qui relevait que la proposition de loi pouvait être considérée comme prématurée au regard du calendrier de négociation des organisations professionnelles, Mme Marie-France Boutroue a rappelé que, si des discussions étaient bien prévues avec le patronat sur ce sujet pour le mois de septembre prochain, il était toujours bon d'anticiper.

A Mme Gisèle Printz , qui rappelait la revendication des syndicats belges en faveur de la possibilité pour les hommes de bénéficier, au même titre que les femmes, d'un congé parental, Mme Marie-France Boutroue a répondu que les conventions collectives françaises permettaient déjà cette possibilité. Mais l'on constate que sur 500 000 femmes ayant pris un congé parental, 120 000 d'entre elles ne reprennent pas leur travail à son terme, ce qui constitue un effet pervers de ce dispositif, qui ne doit pas non plus freiner la nécessaire extension des infrastructures de garde.

Mardi 4 avril 2000 - Présidence de Mme Dinah Derycke, présidente .

La délégation a procédé à l'audition de Mme Nicole Péry, secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle.

Mme Nicole Péry a souhaité indiquer pourquoi le Gouvernement apportait son soutien à la proposition de loi relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, adoptée par l'Assemblée nationale le 7 mars dernier, et comment cette proposition se situait dans les travaux généraux menés par le Gouvernement en matière d'égalité entre les femmes et les hommes.

Elle a déclaré que lorsqu'elle avait reçu les droits des femmes dans ses compétences, en décembre 1998, elle avait procédé à un examen complet des dossiers à suivre et l'égalité professionnelle lui était incontestablement apparue comme un dossier prioritaire. Elle a observé que les difficultés qui existaient en ce domaine il y a une quinzaine d'années subsistaient toujours et rendaient nécessaire une nouvelle action en faveur de l'égalité professionnelle. Elle a rappelé qu'aujourd'hui 80 % des femmes âgées de 25 à 50 ans exerçaient une activité professionnelle.

Abordant les principales inégalités professionnelles, elle a tout d'abord insisté sur le très faible accès des femmes aux postes de décision alors même que les jeunes filles ont désormais un niveau de formation initiale au moins égal à celui des jeunes hommes. Elle a ainsi indiqué que seuls 7 % des cadres dirigeants des 5.000 premières entreprises françaises étaient des femmes, cette faible représentation se vérifiant également au sein des postes de direction de la fonction publique.

Elle a ensuite indiqué qu'elle avait demandé une expertise sur les salaires. Les écarts entre hommes et femmes sont, dans ce domaine, pratiquement restés identiques depuis quinze ans, le salaire moyen d'une femme étant inférieur de 27 % à celui d'un homme, la différence se réduisant à 15 % lorsque les conditions (poste, qualification, entreprise, région...) sont strictement identiques.

Récapitulant l'action de son département ministériel, elle a déclaré que sa première préoccupation avait été de reprendre le dialogue avec l'éducation nationale de manière à améliorer, par l'information, l'orientation scolaire des jeunes filles pour leur permettre de s'insérer dans de meilleures conditions dans le monde du travail. Elle a souligné les faiblesses actuelles de cette orientation, 60 % des emplois féminins se concentrant dans six groupes socioprofessionnels ne représentant que 30 % de l'emploi total. Elle a indiqué qu'une convention avait été signée avec le ministère de l'Education nationale pour analyser l'orientation des jeunes filles, sept filières ayant été retenues comme témoins, quatre d'entre elles représentant des filières d'avenir, comme l'informatique ou l'électronique, où les jeunes filles sont peu présentes et les trois autres étant des filières traditionnellement fortement féminisées et aux emplois peu qualifiés (comme le textile). Elle a précisé que le centre d'études et de recherche sur l'emploi et les qualifications (CEREQ) était chargé de suivre l'évolution des jeunes filles dans ces filières sur les trois années à venir.

Mme Nicole Péry a ensuite dit que son deuxième objectif était de renforcer la présence des femmes aux postes de responsabilité. Elle a indiqué l'existence, dans les ministères, de plans triennaux visant à nommer des femmes aux postes de direction. Elle a déclaré ne pas en mésestimer les difficultés, lesquelles tiennent notamment à l'étroitesse du vivier féminin de recrutement.

Elle a également indiqué qu'elle avait favorisé l'établissement d'un dialogue entre les partenaires sociaux en saisissant le conseil supérieur de l'égalité professionnelle de cette question. Celui-ci a créé des groupes de travail et il pourrait être en mesure de présenter d'ici la fin de l'année des propositions constructives pour renforcer la place des femmes dans les organismes professionnels et les organisations syndicales.

Evoquant un troisième axe de travail, Mme Nicole Péry a estimé que le bilan décevant de la loi " Roudy " de 1983 incitait à réfléchir à l'introduction de nouvelles contraintes législatives pour favoriser l'égalité professionnelle. Elle a considéré que ce bilan décevant s'expliquait principalement de deux manières : le sujet de l'égalité professionnelle n'était pas apparu prioritaire aux partenaires sociaux dans un contexte de chômage élevé, la loi ne prévoyait aucune obligation.

Elle a alors jugé que la proposition de loi récemment adoptée par l'Assemblée nationale permettrait d'accroître significativement l'efficacité de la loi de 1983 en introduisant quelques contraintes supplémentaires.

S'agissant du rapport annuel de situation comparée des hommes et des femmes dans l'entreprise, elle a rappelé que les décrets d'application, qui devaient préciser les indicateurs permettant d'apprécier les inégalités professionnelles, n'avaient jamais été publiés. Elle a estimé que la proposition de loi permettrait d'améliorer l'utilité de ce rapport en prévoyant une liste d'indicateurs pertinents et en instituant une obligation d'affichage de ces indicateurs dans l'entreprise, ces deux dispositions correspondant à des demandes du conseil supérieur de l'égalité professionnelle.

S'agissant de l'introduction d'une obligation de négocier sur l'objectif de l'égalité professionnelle, Mme Nicole Péry a souligné que le conseil supérieur avait proposé d'aller plus loin que la proposition de loi initiale en incluant, au-delà de l'obligation de négocier tous les trois ans dans l'entreprise, une obligation de négocier dans chaque branche. Elle a également précisé que le conseil supérieur s'était prononcé en faveur de l'introduction d'une sanction pénale lorsque la négociation n'était pas ouverte.

Elle a également indiqué avoir proposé l'allégement des contrats d'égalité professionnelle, car 34 seulement ont été conclus depuis 1983 en raison de la lourdeur du dispositif.

Enfin, rappelant qu'à l'heure actuelle la majorité des pays réfléchissaient à des dispositions législatives en matière d'égalité professionnelle et jugeant les mesures prévues par la proposition de loi relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes à la fois réalistes et pragmatiques, Mme Nicole Péry a cependant souligné que ce texte ne pourrait être véritablement efficace que si les partenaires sociaux se saisissaient eux-mêmes du sujet. Puis elle a estimé que, si l'amélioration de la place des femmes dans la vie professionnelle nécessitait de multiples actions, la difficulté principale restait la gestion du temps et elle a invité tous les acteurs publics et privés à intervenir au niveau de leurs responsabilités.

M. Gérard Cornu, rapporteur, après avoir déclaré partager le constat qui venait d'être fait des inégalités persistantes entre les hommes et les femmes en matière professionnelle et souligné le bilan décevant de la loi de 1983, s'est interrogé sur la méthode retenue, estimant qu'il était préférable de laisser les partenaires sociaux négocier avant de légiférer. Il a fait également part de son interrogation quant à l'opportunité d'introduire une sanction pénale en cas de non-respect de l'obligation de négocier, considérant qu'une telle sanction était sans doute excessive. Il s'est enfin déclaré en faveur d'une meilleure représentation des femmes au comité d'entreprise, d'une amélioration de l'effort d'orientation des jeunes filles et de l'introduction d'une plus grande proportionnalité entre les sexes s'agissant de la composition des jurys de concours de la fonction publique.

Mme Nicole Péry, secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle, a rappelé que le thème de l'égalité professionnelle faisait l'objet de discussions dans le cadre de la " refondation sociale " initiée par le mouvement des entreprises de France (MEDEF). Elle a considéré que le choix de ce thème par les partenaires sociaux s'expliquait sans doute par l'action du conseil supérieur de l'égalité professionnelle qui avait permis de sensibiliser les partenaires sociaux.

S'agissant de la sanction pénale, elle a précisé qu'elle répondait à une demande des organisations syndicales.

Mme Nicole Péry a ensuite indiqué que les enquêtes montraient que les femmes de 25-40 ans ne demandaient pas de nouveaux droits pour mener parallèlement leur vie familiale et leur vie professionnelle mais seulement l'application effective des droits existants et une aide matérielle. A cet égard, elle a insisté sur l'expérience " temps de vie, temps de ville " tentée en Italie et quelques villes en France et qui vise, sur la base du dialogue social (pour établir les horaires des services, des commerces, des transports, etc...), à favoriser une meilleure conciliation des " vies multiples ".

Revenant sur l'orientation des jeunes femmes, elle a constaté que la pénibilité du travail ne pouvait plus expliquer, sauf exception, la sous-représentation des femmes dans certains secteurs. Elle a alors estimé que les difficultés étaient désormais principalement d'ordre culturel et qu'il fallait en conséquence permettre aux mentalités d'évoluer. A ce propos, elle a rappelé qu'elle menait une action avec l'éducation nationale pour en finir avec les stéréotypes sexuels dans les manuels scolaires.

S'agissant des jurys de concours, elle a jugé que la faible place des filles dans les grandes écoles tenait en partie à la faible féminisation des jurys. Elle a indiqué qu'elle avait publié une circulaire visant à féminiser les jurys, mais que celle-ci avait été annulée par le Conseil d'État, ce qui justifiait l'introduction des mesures législatives incluses dans la proposition de loi.

Mme Annick Bocandé s'est interrogée sur les mesures annoncées le 8 mars dernier par le comité interministériel des droits des femmes et de l'égalité. Elle s'est également demandé si l'intervention législative en matière d'égalité professionnelle n'était pas trop précoce, les partenaires sociaux étant en négociation sur le sujet.

Mme Nicole Péry, secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle, a rappelé que la plate-forme gouvernementale présentée le 8 mars était le résultat d'un travail d'un an, le Gouvernement ayant choisi de faire progresser l'égalité entre les hommes et les femmes par une approche globale abordant tous les domaines de la vie politique, économique et sociale.

Elle a précisé que cette plate-forme se fondait principalement sur des actions en partenariat entre les différents ministères, autour de huit axes différents, citant notamment le soutien à la création culturelle, la place des femmes dans le sport et l'accès à la formation professionnelle. Elle a souligné à ce propos qu'une femme de 35 ans avait aujourd'hui deux fois moins de chance qu'un homme d'accéder à la formation tout au long de sa vie.

S'agissant du calendrier, elle a indiqué que le Gouvernement faisait des propositions parallèlement aux discussions engagées par les partenaires sociaux dans le cadre de la refondation sociale. Elle a précisé que, si le futur projet de loi de modernisation sociale n'abordait pas directement la question de l'égalité professionnelle, il prévoyait certaines mesures en faveur de celle-ci, qu'il s'agisse du dispositif de lutte contre les discriminations ou des nouvelles possibilités de validation des acquis professionnels.

Mme Janine Bardou a insisté sur la nécessité de sensibiliser les familles à l'orientation professionnelle des jeunes filles et de mieux prendre en compte la situation des femmes en milieu rural.

Mme Nicole Péry, secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle, s'est alors déclarée ouverte à une contractualisation avec les collectivités rurales, notamment les conseils généraux, reconnaissant que les expériences actuelles de contractualisation ne concernaient pour l'instant que les villes.

M. Alex Türk est revenu sur la proposition de loi, s'interrogeant sur l'opportunité d'introduire des sanctions pénales et sur son application aux petites entreprises. Il s'est également interrogé sur les moyens utilisés pour aboutir à l'objectif d'égalité des chances, précisant qu'il était préférable de retenir une obligation de moyens et non une obligation de résultat. A cet égard, il s'est interrogé sur l'utilité de campagnes d'information visant à favoriser l'orientation des jeunes filles vers des filières où elles sont sous-représentées.

Rappelant que 80 % des ouvriers et des employés sont des femmes, Mme Nicole Péry a estimé que cette sous-qualification manifeste résultait en grande partie d'une mauvaise orientation des jeunes filles. Elle a alors jugé nécessaire de mener une action volontariste en matière d'orientation afin de prendre en compte les réalités économiques, considérant qu'il n'était pas possible de laisser les jeunes filles s'orienter vers des secteurs aux faibles débouchés. Elle s'est par ailleurs déclarée en faveur d'une certaine mixité professionnelle, estimant par exemple qu'il n'était pas forcément souhaitable pour l'épanouissement de l'enfant que 80 % des enseignants soient des femmes.

Mme Dynah Derycke, présidente, a précisé que le marché du travail n'était pas en mesure d'accueillir toutes les femmes qui ont suivi certaines orientations, notamment des études littéraires. Regrettant cette inadéquation entre la formation initiale des jeunes femmes et les besoins du marché du travail, elle a estimé qu'elle débouchait sur une sous-qualification préjudiciable des femmes, celles-ci étant contraintes à des " reconversions " vers des postes moins qualifiés. Elle a conclu à l'importance de l'information en matière d'orientation.

Mme Janine Bardou a, à son tour, déploré la trop faible présence des femmes dans les secteurs techniques créant beaucoup d'emplois, et appelé de ses voeux une meilleure action d'orientation.

Mme Dinah Derycke, présidente, a rappelé qu'il y a une vingtaine d'années, on avait pu penser que l'informatique était un secteur qui allait s'ouvrir très fortement aux femmes, n'exigeant pas des travaux pénibles. Elle a constaté qu'il n'en avait rien été et s'est alors interrogée sur la faible attractivité de ce secteur pour les jeunes femmes.

Déclarant partager l'analyse de M. Alex Türk, M. Jean-Guy Branger a estimé que la féminité devait pouvoir s'exprimer dans la vie professionnelle. Puis s'interrogeant sur la place de la femme en milieu rural, il a jugé que les contrats de plans État-régions ou les contrats de territorialité devaient mieux prendre en compte la place de la femme dans la ruralité.

Mme Nicole Péry, secrétaire d'État aux droits des femmes et à la formation professionnelle, précisant que le taux de chômage des femmes était de 12,5 % contre 9 % pour les hommes, a déclaré que cette inégalité face à l'emploi justifiait une politique volontariste permettant d'assurer la qualification des femmes pour les nouveaux métiers. Elle a rappelé qu'elle avait signé une convention avec l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) visant à doubler la proportion de filles dans les filières d'avenir et que les programmes nationaux d'action pour l'emploi (PNAE) pour 1999 et pour 2000 fixaient comme objectif de réserver 35 % des contrats d'apprentissage à des jeunes filles.

S'agissant de la place de la femme dans la ruralité, elle a estimé qu'il y avait effectivement matière à contractualiser, en particulier dans le cadre des contrats de plan État-région avec les Pays.

M. Gérard Cornu a constaté que la progression du nombre de familles monoparentales tendait bien souvent à maintenir l'enfant dans un univers exclusivement féminin. Il a jugé nécessaire d'étudier les conséquences d'un tel phénomène.

Mercredi 26 avril 2000 - Présidence de Mme Dinah Derycke, présidente .

Mme Dinah Derycke , présidente , a tout d'abord indiqué que la commission des lois avait décidé, le mardi 25 avril 2000, de saisir la délégation de la proposition de loi n° 266 (1998-1999) de M. Nicolas About visant à remplacer la procédure de divorce pour faute par une procédure de divorce pour cause objective .

Puis à la suite des récents échanges de vues de la délégation sur le contenu de ses travaux, il a été décidé de retenir , à l'initiative de Mme Dinah Derycke, présidente , la prostitution comme premier sujet annuel d'étude .

La délégation a ensuite procédé à l'audition de Mme Marie-Lou Robert, chargée de mission à la Délégation des femmes de la Confédération Française Démocratique du Travail (CFDT) , sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, de Mme Catherine Génisson et plusieurs de ses collègues, relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

En introduction, Mme Marie-Lou Robert a considéré que la loi Roudy de 1983 était une bonne loi qui avait cependant souffert, quant à sa mise en oeuvre, d'un intérêt insuffisant de la part des organisations syndicales. Elle a ainsi estimé que si les inégalités entre les femmes et les hommes n'avaient pas substantiellement reculé dans les entreprises depuis près de vingt ans, la faute en incombait en partie aux militants syndicaux qui ne s'étaient jamais réellement saisis du problème. Puis elle a jugé intéressantes et utiles les améliorations apportées par la proposition de loi Génisson à la loi Roudy.

Elle s'est ainsi félicitée de l'obligation de négocier chaque année, dans les entreprises de plus de cinquante salariés, sur le rapport de situation comparée entre les hommes et les femmes en regrettant cependant qu'elle ne pèse pas sur les chefs des entreprises de moins de cinquante salariés, où les femmes sont pourtant majoritaires. De même s'est-elle déclarée très favorable à l'obligation de négocier au niveau de la branche, en estimant qu'il s'agissait d'un bon échelon pour procéder à d'utiles comparaisons des situations respectives des hommes et des femmes, plus pertinent que celui des entreprises, assez peu mixtes et où le travail d'analyse comparative est parfois délicat. Elle a enfin approuvé la démarche intégrée instituée par la proposition de loi qui, en imposant de prendre en compte la problématique de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans toutes les négociations transversales, devrait à la fois permettre de faire régresser les inégalités actuelles et empêcher l'établissement de nouvelles inégalités dans les métiers qui se créent actuellement dans les domaines des nouvelles technologies de l'information et de la communication ou de l'aide aux personnes.

Abordant ensuite le volet de la proposition de loi consacré à la fonction publique, Mme Marie-Lou Robert a rappelé qu'en dépit du principe d'égalité figurant dans le statut général des fonctionnaires et des dispositions statutaires relatives aux cadres et aux emplois, les différences de salaires entre les femmes et les hommes, à grades et échelons identiques, pouvaient encore atteindre 16 % par le jeu combiné des primes, des filières, des emplois, etc. Elle a approuvé la mise en oeuvre législative des propositions du rapport de Mme Anne-Marie Colmou relatives à la mixité des jurys, à la représentation équilibrée des hommes et des femmes parmi les délégués de l'administration siégeant dans les organismes paritaires de négociation et de concertation, ou encore au problème du harcèlement sexuel. Elle a toutefois regretté qu'il ne soit pas envisagé d'imposer par la loi les plans d'objectifs de promotion des femmes sur trois ou cinq ans, en estimant que les circulaires ou décrets dont ils font l'objet seraient insuffisants. En conclusion de son propos, Mme Marie-Lou Robert a indiqué qu'à l'occasion de son prochain congrès, la CFDT déciderait d'assurer une juste représentativité des femmes dans toutes les délégations qu'elle était amenée à constituer pour siéger dans des organismes paritaires, à tous les niveaux.

Un débat s'est ensuite instauré.

Gérard Cornu , rapporteur , a demandé à Mme Marie-Lou Robert d'une part si l'intervention préalable du législateur n'était pas de nature à gêner la négociation des partenaires sociaux sur l'égalité professionnelle dans le cadre de la refondation sociale, et, d'autre part, s'il lui semblait que le principe de la représentation proportionnelle des femmes dans les comités d'entreprise, tel qu'il est appliqué en Allemagne en vertu d'une loi de 1972, pourrait être applicable en France et rencontrerait l'accord des syndicats.

En réponse, Mme Marie-Lou Robert a considéré que l'adoption de dispositions législatives préalablement au dialogue social ne serait pas gênante, celui-ci devant permettre la bonne application de celles-là et d'aller au-delà de la loi. S'agissant de la représentation des femmes au comité d'entreprise en fonction de leur effectif dans l'entreprise, elle a indiqué que la CFDT y était favorable et redit que la confédération prendrait prochainement les dispositions nécessaires pour parvenir à cette " juste représentativité " au sein de ses délégations. Elle a ensuite souligné qu'une loi luxembourgeoise imposait la désignation, dans les entreprises, d'un délégué à l'égalité entre les femmes et les hommes, avec des heures de délégation pour exercer son mandat, en précisant que la CFDT proposerait au Conseil supérieur de l'égalité professionnelle son adaptation en France. Poursuivant les comparaisons internationales, Mme Marie-Lou Robert a estimé que, par sa globalité, la loi Roudy était une des meilleures lois en matière d'égalité entre les hommes et les femmes, mais aussi, par sa complexité, une des plus mal appliquées. C'est pourquoi, a-t-elle déclaré, la mise en oeuvre des dispositions de la proposition de loi Génisson qui viendront la préciser demande que les représentants du personnel reçoivent une formation spécifique. Elle a indiqué que la CFDT souhaitait que l'État aide les entreprises à financer une telle formation et à rémunérer des heures de délégation spécifiques.

S'agissant de la juste représentation des femmes au sein des délégations syndicales dans les organismes paritaires, Mme Dinah Derycke , présidente , a demandé s'il fallait en inscrire le principe dans la loi ou en laisser la responsabilité à chaque organisation syndicale. Si Mme Marie-Lou Robert s'est déclarée favorable à une obligation législative -à titre personnel, notamment pour la fonction publique, et au nom de la CFDT- elle a toutefois reconnu qu'elle serait probablement mal perçue par d'autres organisations syndicales et estimé qu'il était en conséquence " trop tôt " pour la faire figurer dans la proposition de loi de Mme Génisson. Elle a ajouté que le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle apparaissait comme une enceinte appropriée pour débattre de cette question, laquelle pourrait être aussi abordée au cours du processus de rénovation du dialogue social.

Après avoir estimé que Mme Marie-Lou Robert venait d'apporter la preuve sur ce point particulier que la proposition de loi de Mme Génisson intervenait trop tôt, Mme Annick Bocandé l'a interrogée sur les raisons qui pouvaient expliquer que ni les organisations syndicales, ni le patronat ne se soient saisis de la loi Roudy. Mme Marie-Lou Robert a fait valoir en réponse que la composition majoritairement masculine des équipes syndicales n'avait pas joué en faveur de la lutte contre les inégalités entre hommes et femmes dans l'entreprise, alors même que celle-ci permet aussi de faire évoluer d'autres dossiers, comme ceux des salaires ou de la formation.

Puis, Mme Annick Bocandé la questionnant sur les mesures à prendre pour favoriser une meilleure conciliation des vie professionnelle et familiale, Mme Marie-Lou Robert a estimé que la problématique relevait à la fois de la société, les pouvoirs publics et les entreprises devant répondre aux besoins des parents si l'on veut assurer le renouvellement des générations, et de la vie privée. Elle a souligné que, seul, le congé de maternité distinguait juridiquement les femmes des hommes, toutes les autres formules de congé ou d'organisation du travail étant indifférentes au sexe du salarié. Elle a estimé que la mixité des représentations syndicales était la seule formule permettant de faire émerger des solutions consensuelles en matière d'organisation du travail.

Après que Mme Gisèle Printz eut fait part de son expérience personnelle de femme engagée dans le mouvement syndical, Mme Marie-Lou Robert a indiqué que 43 % des adhérents de la CFDT étaient aujourd'hui des femmes, ce qui traduisait leur intérêt pour le militantisme syndical. En réponse à une question de Mme Annick Bocandé, elle a précisé que, grâce à des mesures volontaristes prises par la CFDT depuis 1982, environ 25 % des responsables syndicaux dans les branches professionnelles étaient des femmes, que le nombre des femmes avait quasiment doublé entre 1991 et 1997 au bureau régional interprofessionnel et que leur proportion au Conseil national confédéral était passée de 17 % à 28 % au cours de la même période. Si le pouvoir syndical est encore largement masculin, a-t-elle souligné, l'engagement croissant des femmes, qui s'impliquent davantage dans la résolution des difficultés concrètes, permet d'obtenir d'importantes avancées collectives, en particulier en matière de conditions de travail.

Mme Dinah Derycke , présidente , lui ayant demandé si la CFDT avait mené des études, à l'échelon de la branche, sur l'impact des salaires féminins sur le niveau général de l'ensemble des salaires afin d'activer la solidarité en faveur des femmes, Mme Marie-Lou Robert a déclaré qu'il était incontestable, bien qu'on ne dispose pas d'études précises, qu'une amélioration globale de la situation de tous les salariés résultait de la prise en compte de problèmes en apparence spécifiquement féminins.

M. Gérard Cornu , rapporteur , ayant abordé la question particulière du congé pour la garde d'un enfant malade, Mme Dinah Derycke , présidente , a relevé que si, juridiquement, ce congé était ouvert de manière identique aux femmes et aux hommes, des considérations relatives à la place différente des hommes et des femmes au sein de l'entreprise, à leurs tâches et responsabilités, et, par conséquent, niveaux de salaires respectifs s'ajoutaient aux obstacles culturels conduisant à ce qu'il soit presque exclusivement demandé par les mères de famille, tout comme d'ailleurs le congé parental d'éducation. Mme Marie-Lou Robert a ajouté qu'il en était de même pour le recours au travail à temps partiel, relativement négligé par les hommes pour des raisons qui tiennent à son impact sur le niveau de la retraite, la protection sociale et la carrière, précisant que 70 % des hommes qui en bénéficient utilisent le temps dégagé non pour se consacrer à la vie familiale, mais pour suivre une action de formation.

Mardi 9 mai 2000 - Présidence de Mme Dinah Derycke, présidente.

La délégation a procédé à l'audition de Mme Claudette Brunet-Lechenault, présidente de la Délégation des femmes du Conseil économique et social , accompagnée de Mme Lydia Brovelli, secrétaire confédérale, administrateur à la Confédération générale du travail (CGT ), présidente de la section du travail, et de Mme Marie-Odile Paulet, membre du groupe de la Confédération française démocratique du travail (CFDT) , sur la proposition de loi n° 258 (99-00) relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

En introduction, Mme Claudette Brunet-Lechenault a présenté la délégation des femmes du Conseil économique et social : installée le 8 mars dernier, cette délégation compte 18 membres (15 femmes et 3 hommes) qui ne sont pas désignés, contrairement aux autres instances du Conseil, à la représentation proportionnelle des groupes, cinq groupes du Conseil ne comptant aucune femme. Si 19 % des membres du Conseil économique et social sont des femmes -pourcentage que Mme Claudette Brunet-Lechenault considère honorable si on le compare à ceux d'autres assemblées locales ou nationales -, une femme seulement siège à son bureau.

Au-delà de sa mission générale de veille et de suivi des travaux du Conseil économique et social, la délégation, a poursuivi Mme Claudette Brunet-Lechenault , mènera ses propres réflexions, qui pourront se matérialiser par des contributions ou des rapports d'information. Elle a ainsi choisi cette année d'établir un " Bilan de la mixité : éducation, orientation des filles ". Par ailleurs, la section du travail du Conseil a été chargée le 8 mars 2000, par le Premier ministre, de rendre un avis sur la présence et la place des femmes dans les instances économiques et sociales et dans le dialogue social, Mme Michèle Cotta ayant été nommée rapporteur.

Tout comme Mme Dinah Derycke , présidente , Mme Claudette Brunet-Lechenault s'est félicitée de la récente rencontre entre les présidentes des trois délégations (Assemblée nationale, Sénat, Conseil économique et social) et de leur souci de travailler en concertation.

Enfin, s'agissant de la proposition de loi de Mme Catherine Génisson sur l'égalité professionnelle (Ppl n° 258), elle a estimé que la loi Roudy qu'elle vise à compléter était une bonne loi, qu'il suffirait de la faire appliquer et que, de son point de vue, " tout le reste était de la décoration ".

Mme Lydia Brovelli , présidente de la section du travail , a ensuite précisé que l'avis demandé par le Premier ministre concernait la place des femmes non seulement dans les institutions telles que le Conseil économique et social, les conseils économiques et sociaux régionaux, les organismes consulaires etc..., mais aussi dans les conseils d'administration ou de surveillance des organismes et entreprises publiques ou privées, et les syndicats. Elle a souligné qu'on manquait dans tous les cas de statistiques sexuées. Si le sujet de l'étude n'est donc pas celui de l'égalité professionnelle, elle a toutefois estimé que la question des " viviers " lui était étroitement liée.

Mme Lydia Brovelli a ensuite insisté sur les différentes discriminations auxquelles les femmes sont confrontées sur le marché du travail : discrimination à l'embauche, où leurs diplômes sont moins valorisés que ceux des hommes, concentration dans certains métiers et filières, inégalités salariales avec un salaire inférieur en moyenne de 27 % (12 à 13 % étant sans explication), exclusion des hauts postes d'encadrement en raison de leur moindre disponibilité due aux charges familiales, moindre accès à la formation professionnelle.

Puis elle s'est déclarée frappée par la teneur des premiers débats qui ont eu lieu au sein de la section du travail du Conseil économique et social : l'argumentation développée est souvent la même que celle utilisée lors de l'examen au Parlement du projet de loi relatif à l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives, argumentation qui suggère de laisser le temps agir seul sur l'évolution des situations. Soulignant, pour le déplorer, que dans l'opinion on mettait aussi parfois en garde les femmes contre les craintes que pourraient susciter leurs revendications, Mme Lydia Brovelli a estimé au contraire que l'amélioration de la place des femmes dans le domaine économique et social et dans le dialogue social ne pourrait résulter que de mesures volontaristes.

Axant son propos sur l'égalité professionnelle, Mme Marie-Odile Paulet a tout d'abord souhaité compléter la liste des discriminations dont sont victimes les femmes par le travail à temps partiel imposé, qu'elles sont les premières à subir, et par l'inégal accès aux postes de responsabilité, une seule femme figurant parmi les 200 chefs des plus grandes entreprises françaises, et à peine 10 % des cadres supérieurs de la fonction publique exerçant des fonctions de direction étant des femmes.

Après avoir estimé que l'insuffisante prise en charge de la loi Roudy par les syndicats expliquait en partie sa mauvaise application (seuls 31 plans d'égalité professionnelle ont été réalisés), elle a considéré que le principal intérêt de la proposition de loi de Mme Génisson résidait dans l'obligation de négociation qu'elle instituait au niveau de l'entreprise comme à celui de la branche. Expliquant la faible représentation des femmes parmi les responsables syndicaux par le frein que constituent les charges familiales pour l'engagement syndical, elle a toutefois observé qu'on avait partout noté une participation très active des femmes dans les négociations sur la réduction du temps de travail menées au niveau des entreprises, sans doute en raison des conséquences concrètes pour la vie professionnelle et familiale.

Revenant sur la question des discriminations, Mme Marie-Odile Paulet a noté qu'aujourd'hui, on ne constatait plus de discriminations à l'embauche entre filles et garçons possédant les mêmes diplômes, mais que les discriminations subsistaient avant et après : avant, en matière de formation et de qualification (les filles, par exemple, ne représentant que 20 % des élèves des écoles d'ingénieurs alors qu'elles sont majoritaires dans les filières où les débouchés sont moins favorables), après, dans le déroulement de la carrière, le décalage entre hommes et femmes apparaissant dès que ces dernières ont des contraintes familiales à assumer.

Estimant que l'amélioration " naturelle " de la situation était très lente, Mme Marie-Odile Paulet a enfin considéré qu'une nouvelle loi était nécessaire en matière d'égalité professionnelle, en jugeant indispensable, cette fois-ci, que les syndicats s'en saisissent pour la " faire vivre ".

Un débat s'est ensuite instauré.

M. Gérard Cornu, rapporteur, a posé plusieurs questions. Il a ainsi demandé :

- si, du point de vue méthodologique, il n'aurait pas été plus efficace de légiférer après que les partenaires sociaux se seront exprimés sur l'égalité professionnelle dans le cadre de la " refondation sociale " ;

- si l'application d'une sanction pénale pour défaut de négociation annuelle n'était pas excessive ;

- si le principe de la représentation proportionnelle des femmes dans les comités d'entreprise, tel qu'il est appliqué en Allemagne en vertu d'une loi de 1972, ne devrait pas être envisagé en France ;

- si la féminisation des jurys de concours était réellement une solution aux problèmes posés par certains recrutements dans la fonction publique, le jugement porté sur une candidate par un jury en majorité masculin n'étant pas, de son point de vue, forcément pénalisant ;

- quelles réponses pouvaient être apportées aux problèmes d'ordre " culturel " face auxquels le législateur semble particulièrement démuni.

Après avoir suggéré que les membres des délégations de l'Assemblée nationale, du Sénat et du Conseil économique et social tiennent prochainement une réunion de dialogue, Mme Hélène Luc a souhaité savoir si la proposition de loi de Mme Génisson faisait double emploi avec la loi Roudy.

En réponse à cette dernière question, et après avoir volontiers souscrit à la proposition de rencontre des trois délégations, Mme Claudette Brunet-Lechenault a relevé que, si ses propos liminaires sur l'inutilité de la proposition de loi de Mme Génisson étaient en partie provocateurs, le problème essentiel était de se donner les moyens d'appliquer la loi, quelle qu'elle soit, et que c'est ce qui avait fait défaut à la loi Roudy. Elle a ajouté qu'il lui paraissait indispensable que l'État ne se contente pas d'imposer le dialogue entre les partenaires sociaux dans les entreprises et dans les branches, mais qu'il donne lui-même l'exemple en développant le dialogue social dans la fonction publique.

Après avoir fait observer que la " refondation sociale " devait aborder huit thèmes de négociation, quatre étant en cours de discussion et quatre autres devant être examinés à l'automne, Mme Marie-Odile Paulet a estimé que l'intérêt de la proposition de loi de Mme Génisson résidait dans le fait qu'elle précisait la loi Roudy, en particulier sur le point essentiel de la sanction en cas d'inobservation de l'obligation de négocier sur l'égalité professionnelle, sanction qui ne figurait pas dans la loi de 1983. Rappelant à cet égard, que lorsque les sanctions ne sont que financières, les chefs d'entreprise préfèrent payer plutôt que de se conformer à leurs obligations (comme dans le cas de l'emploi des travailleurs handicapés), elle a jugé nécessaire la sanction pénale prévue par la proposition de loi. S'agissant des jurys de concours, si elle a reconnu qu'il n'était pas nécessairement désavantageux pour une femme d'être jugée par des hommes, elle a fait observer que la mixité des jurys permettait de varier tant l'appréciation portée sur les qualités des différents candidats que les critères d'évaluation de leurs compétences, ce qui lui semblait constituer une première réponse aux problèmes d'ordre culturel soulevés par M. Gérard Cornu , rapporteur .

A M. Michel Dreyfus-Schmidt qui estimait que ces questions d'appréciation dépendent essentiellement des individus, indépendamment de leur sexe, et qui rappelait que le dernier major du concours de l'Ecole navale était une jeune femme, Mme Marie-Odile Paulet a répondu que c'était le contenu même de l'évaluation que permettait d'élargir une composition mixte des jurys.

Après avoir précisé qu'elle appartenait à une organisation syndicale qui ne privilégiait aucune des deux voies, législative ou contractuelle, pour promouvoir le progrès social, Mme Lydia Brovelli a estimé que le début des négociations menées dans le cadre de la refondation du dialogue social ne lui permettait guère d'espérer de grandes avancées en matière d'égalité professionnelle et, qu'à ce titre, l'examen préalable de la proposition de loi de Mme Génisson par le Parlement était bienvenu. Elle a ajouté qu'à son sens, l'application de la loi Roudy avait souffert de deux écueils. Le premier a été le renvoi de sa mise en oeuvre à la responsabilité des partenaires sociaux. Or, ni les chefs d'entreprise, ni les syndicats qui, malgré des efforts récents, demeurent des structures essentiellement masculines, ne se sont investis pour faire appliquer les dispositions de la loi Roudy. Le second est l'absence de sanctions. Mme Lydia Brovelli a cependant estimé qu'il fallait faire preuve d'imagination et qu'au côté des sanctions, il devait être possible d'instituer des incitations au profit tant des chefs d'entreprises que des syndicats : à ce titre, elle a évoqué l'idée d'accorder des bonifications de subventions aux organisations syndicales qui oeuvreraient en faveur d'une meilleure représentation des femmes dans leurs organes dirigeants ou dans leurs délégations aux structures paritaires. Elle a souligné que ce type d'incitations pourrait être d'autant plus efficace qu'on se heurtait, s'agissant de la parité syndicale, à des réticences identiques à celles qui ont été exprimées à propos de la parité en politique.

Mme Lydia Brovelli s'est par ailleurs déclarée favorable à la mixité des jurys de concours, relevant au passage que la féminisation excessive de certains métiers n'était pas plus satisfaisante que l'absence de femmes dans d'autres.

S'agissant enfin des aspects culturels, Mme Lydia Brovelli a estimé que la question fondamentale était celle des rapports des hommes et des femmes aux enfants. Elle a ainsi fait observer que, pour le déroulement de carrière, l'attache d'une famille constituait un facteur positif pour les hommes en apparaissant comme un gage de stabilité, tandis qu'au contraire, elle faisait figure de handicap pour les femmes compte tenu de la moindre disponibilité dont elle risquait de s'accompagner. A cet égard, elle a rappelé le caractère extrêmement pénalisant pour les femmes cadres des réunions tardives, dans le secteur privé comme dans le secteur public. Faisant état d'un sondage relatif à l'utilisation du temps dégagé par la mise en oeuvre des 35 heures, elle a relevé que, de façon tendancielle, les femmes prenaient le mercredi pour s'occuper de leurs enfants tandis que les hommes libéraient le vendredi pour faire du sport. Elle a également évoqué la législation de certains pays nordiques, où le congé parental n'est accordé aux femmes qu'à la condition que leur conjoint en prenne une partie. Mme Lydia Brovelli a conclu ces observations en estimant que l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ne pourrait être atteinte tant que ne serait pas réglée cette question essentielle du partage équitable des tâches familiales.

A M. Serge Lepeltier qui évoquait l'éventuelle application de " quotas invisibles " par les jurys de concours d'entrée à certaines grandes écoles pour en limiter l'accès aux filles, dont la trop grande proportion risquerait de " peser " sur la réputation de l'école et sur le montant moyen des salaires de première embauche, Mme Claudette Brunet-Lechenault a indiqué qu'une telle rumeur ayant été portée à sa connaissance, elle avait demandé et attendait de plus amples informations. A ce sujet, Mme Dinah Derycke , présidente , a fait observer qu'au-delà de ces pratiques inavouées, car inavouables, il était ouvertement envisagé d'instaurer des quotas dès que les femmes commençaient à investir massivement des emplois (par exemple, dans la magistrature), mais que cette éventualité n'était jamais évoquée dans les professions monopolisées par les hommes.

Revenant sur le problème du partage des tâches familiales entre les femmes et les hommes, Mme Marie-Odile Paulet a signalé deux autres facteurs discriminants qui tendaient à fortement obérer les chances de promotion professionnelle des femmes : l'accès à la formation continue, auquel les femmes prétendent très peu compte tenu des obligations qui découlent d'une " triple " journée, et la mobilité professionnelle du couple, qui, lorsqu'elle s'accompagne d'une mobilité géographique, sacrifie presque systématiquement l'emploi de la femme au profit de celui de l'homme.

Mme Maryse Bergé-Lavigne a considéré que si la réduction du temps de travail était certes susceptible d'améliorer la situation des femmes cadres en mettant fin à certaines mauvaises habitudes françaises d'organisation du travail, elle présentait aussi le risque de favoriser le maintien d'une répartition inégale des charges familiales entre les femmes et les hommes. Elle a par ailleurs fait observer que le développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication était un domaine investi par les garçons et exprimé sa crainte qu'un avenir de mixité soit également obéré dans les nouveaux métiers qui leur sont liés. Renchérissant sur ce propos, Mme Marie-Odile Paulet a souligné que s'il apparaissait très difficile d'avancer rapidement en matière d'égalité professionnelle dans les anciens métiers, de grands espoirs avaient été placés dans les nouvelles professions où l'absence d'habitudes et de traditions semblait rendre aisée la mixité. Or, " la nouvelle économie " dément aujourd'hui cette vision optimiste avec, notamment, ses horaires " démentiels ". Mme Dinah Derycke , présidente , a considéré qu'il était indispensable d'attirer l'attention des décideurs économiques et des pouvoirs publics sur cette question essentielle.

Après avoir estimé qu'il fallait en effet prendre dès à présent ce problème à bras le corps, M. Gérard Cornu , rapporteur , est revenu sur les aspects " culturels " de la problématique, en observant qu'il était actuellement presque impossible à un homme de démissionner pour suivre sa femme dans une mobilité, tant était hypothétique pour lui, en raison de préjugés contestables sur sa stabilité et son capital de confiance, de retrouver un emploi sur son nouveau lieu de résidence. Il a souligné que l'évolution du regard des parents sur le caractère prétendument masculin ou féminin de certains métiers relevait aussi d'une entreprise culturelle qui dépasse la compétence du législateur, tout comme la nécessité de modifier les rapports des hommes et des femmes à l'enfant.

Après que Mme Marie-Odile Paulet eut estimé qu'en matière d'obstacles à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, les facteurs étaient cumulatifs, et qu'aux considérations culturelles s'ajoutaient des raisons économiques et matérielles, Mme Dinah Derycke , présidente , a considéré qu'il était nécessaire d'être volontariste sur les questions d'éducation ou d'organisation de la famille et d'intervenir, notamment par la loi. Une telle méthode, a-t-elle précisé, a d'ailleurs pour effet de bousculer les réticences d'ordre culturel ; ainsi, par exemple, le développement des structures d'accueil à la petite enfance, beaucoup plus avancé en France - même s'il est encore imparfait - qu'en Allemagne, permet des comparaisons avantageuses pour notre pays en matière de taux d'activité des mères de famille.

Abondant en ce sens, Mme Marie-Odile Paulet a souligné l'importance que revêtait la relecture des manuels scolaires pour qu'ils cessent de privilégier une vision conformiste de la société, avant de préconiser une amélioration des aides matérielles apportées aux mères de famille qui poursuivent leur activité professionnelle.

M. Gérard Cornu , rapporteur , ayant fait remarqué que, dans les jeunes couples tout du moins, les hommes participaient davantage que par le passé aux tâches ménagères, Mme Dinah Derycke , présidente , a indiqué que des enquêtes de l'INSEE montraient que si un rééquilibrage avait effectivement eu lieu, la tendance était aujourd'hui au ralentissement, voire à la stagnation, et que, surtout, à mesure que s'élargissait la cellule familiale à partir du deuxième enfant, la participation des pères allait en s'atténuant.

Mme Lydia Brovelli a relevé que lorsque le passage aux 35 heures s'accompagne de modifications de l'organisation du travail dans l'entreprise, on pouvait assister à une évolution " culturelle " conduisant les cadres masculins à se consacrer davantage à leurs enfants, dès lors que leur carrière n'en était pas pénalisée. Elle a ainsi fait valoir que l'organisation du travail était une des clés pour parvenir à l'égalité professionnelle, et que les problèmes d'ordre culturel étaient souvent avancés comme un alibi pour refuser d'imaginer des solutions novatrices.

Pour conclure, Mme Marie-Odile Paulet a considéré que si, grâce à la réduction du temps de travail, on pouvait parvenir à modifier le regard qui était porté sur la disponibilité des cadres vis-à-vis de l'entreprise, à supprimer ce qu'elle a appelé " le syndrome de la lampe allumée " chez les cadres masculins français, et à parvenir ainsi à plus d'égalité entre hommes et femmes sur cette question de la disponibilité, l'égalité professionnelle y gagnerait beaucoup.

A l'issue de cette audition et à l'initiative de Mme Dinah Derycke, présidente, la délégation a décidé de demander à être associée à la délégation gouvernementale qui doit représenter la France à la session extraordinaire que l'Assemblée générale des Nations-unies doit tenir à New-York au début du mois de juin 2000 sur le bilan du programme d'action de la quatrième conférence mondiale de Pékin sur les femmes (" Pékin plus cinq ").

FAVORISER L'ÉGALITÉ PROFESSIONNELLE

ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES

La délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes a été saisie par la commission des affaires sociales, pour donner un avis sur la proposition de loi n° 258 (1999-2000), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

Conformément à la saisine de la commission des affaires sociales, la délégation a examiné le dispositif législatif soumis au Sénat au regard de ses conséquences sur les droits des femmes et sur l'égalité des chances entre les hommes et les femmes.

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