3. Des entreprises européennes encore dispersées
Le schéma ci-après rend compte quant à lui de la dispersion de l'industrie européenne.
Organigramme de l'industrie de défense
européenne
après les opérations Thomson CSF
et Aérospatiale Matra
Hautes Technologies mais avant la fusion BAe GEC Marconi
51 %
Source : CLSE
49 %
50 %
50 %
50 %
100 %
30 %
50 %
51 %
50 %
50 %
30 %
37,9 %
33 %
30 %
38 %
12 %
4,2 %
30 %
50 %
20 %
20 %
37,9 %
70 %
50 %
50 %
50,1 %
49,9 %
33 %
33 %
16 %
49 %
6 %
48 %
4 %
100 %
49,9 %
45,8 %
49 %
33 %
GIE
Société cotée
Mac
Alenia Marconi
Matra Marconi Space
Alenia
ATR
Finmeccanica
Daimler-Chrysler
Matra BAE
Dynamics
GEC Marconi
MMDD (Matra Marconi Dasa Dorner)
SAAB
DASA
LFK
BAE
CASA
Thomson Marconi Sonar
Gtdar (Radars)
Eurofighter
Alcatel
Thomson CSF
JV Satellites
Thomson SA
Dassault
Industrie
Dassault Aviation
Aérospatiale
Airbus (GIE)
Euromissile
Eurocopter
État Français
Lagardère SCA
Cette dispersion a pour conséquence la coexistence d'entreprises souvent sous-dimensionnées et en situation paradoxale de concurrence et d'alliances.
a) British Aerospace (BAe)
(1) Histoire récente
British
Aerospace, qui comptait 47.000 salariés en 1996 contre 102.500 en
1992, regroupe deux grandes divisions :
-
British Aerospace Defence
qui rassemble
British Aerospace
Systems
, maître-d'oeuvre des programmes militaires,
British
Aerospace Military Aircraft
, constructeur d'avions de combat (Tornado,
Harrier, Gripen, Hawks, Eurofighter),
Matra British Aerospace Dynamics
(missiles) et
Royal Ordnance
(armes et munitions) ;
-
British Aerospace Commercial Aerospace
chargée de la
fabrication des ailes des Airbus et de la commercialisation des avions
régionaux.
British Aerospace est privatisée depuis 1985, mais l'Etat
détient une « golden share » à laquelle sont
attachés les droits suivants :
- droit de limiter la participation étrangère dans le
capital ;
- droit de veto sur la modification de certains articles des statuts
(règle selon laquelle aucun actionnaire ou groupe d'actionnaires
agissant de concert ne peut détenir plus de 15 % des actions, par
exemple) ;
- droit de s'assurer que les directeurs du « Board » sont
bien de nationalité britannique ;
- droit d'assister et de participer, sans droit de vote, aux
délibérations du conseil d'administration.
Le plafond de la participation étrangère a été
relevé pour renforcer l'attraction, financière de l'entreprise.
Initialement fixé à 14,9 %, il a été
relevé à 29,5 % en 1989. Il dépasse désormais
40 %. British Aerospace et Rolls Royce sollicitent d'ailleurs
régulièrement le gouvernement afin qu'il lève cette
règle contraignante, tant d'un point de vue financier (moindre
liquidité du titre) que d'un point de vue stratégique (obstacle
aux indispensables alliances internationales). Toujours est-il que la
participation étrangère dans British Aerospace
s'élève déjà aujourd'hui à plus de 26 %
dont l'essentiel provient de fonds de pension américains.
BAe, dans le passé récent, a traversé de profondes
évolutions
La crise de 1992
De
1987 à 1992, British Aerospace s'est lancée dans une politique
ambitieuse de croissance externe. La stratégie suivie était
surtout d'inspiration financière : il s'agissait de réduire
l'exposition au risque des actionnaires en diversifiant le portefeuille
d'activités, pratique courante dans les années 1980.
Les principales acquisitions ont été les suivantes :
- 100 % de
Royal Ordnance Plc
(munitions) ;
- 100 % de
Ballast Nedam NV
, deuxième société
de construction néerlandaise, en raison de synergies au sein du groupe
dans le cadre du contrat Al Yamamah qui prévoyait la construction de
bases aériennes (1987) ;
- 80 %
d'Austin Rover
, racheté pour 150 millions de
livres seulement à l'Etat, en 1988. Les conditions de cession
étaient à ce point avantageuses qu'elles ont suscité une
enquête des autorités de Bruxelles ;
- 100 %
d'Arlington Securities
(promotion immobilière)
(1989) ;
- 100 % de
Heckler & Koch
(fabricant allemand d'armes de petit
calibre), afin de compléter la gamme de Royal Ordnance (1991) ;
- 30 % des parts de
Hutchinson Telecommunications UK Ltd,
par pure
logique de diversification financière (1991) ;
- 100 % de
BMARC (munitions)
qui viennent aussi renforcer Royal
Ordnance (1992) ;
- 100 % de
Dowty-SEMA
(systèmes navals) qui est
incorporé à British Aerospace SEMA.
Mais les résultats se sont fortement dégradés à
partir de 1990. La branche aviation civile était en situation de
quasi-faillite en 1992 (337 millions de livres de pertes pour un chiffre
d'affaires de 1.650 millions de livres).
A partir de 1992, British Aerospace a mis en oeuvre un programme drastique
de restructurations
dont les principes ont été :
- le recentrage des activités sur l'aéronautique et la
défense, les « core businesses » (métiers de
bases) ;
- la rationalisation des activités conservées afin de gagner en
productivité au niveau des gammes de produits et des effectifs ;
- la recherche de partenaires industriels.
Aussi British Aerospace a-t-il procédé à des cessions
importantes, dont celles :
- de British Aerospace Corporate Jet Inc. à Raytheon, qui fait pourtant
partie du métier de base de British Aerospace, pour 250 millions de
livres (1993), mais dont le marché était en crise ;
- de Ballast Nedam NV (octobre 1993), pour 175 millions de livres, suite
aux abandons de projets de bases aériennes saoudiennes ;
- de 80 % des parts dans Rover à BMW pour 800 millions de
livres (début 1994) ;
- des activités spatiales (British Aerospace Space Systems), pour
56,4 millions de livres, à Matra Marconi Space, filiale commune
à GEC Marconi (49 %) et Matra-Hachette (51 %).
La production des avions régionaux turbopropulseurs Jetstream 31,
41 et 61 (ATP) a été progressivement arrêtée entre
1995 et 1997.
Les suppressions d'emplois ont été massives (41.700 entre 1990 et
1993). Au total, compte tenu des cessions d'activités ou des
suppressions d'emplois, les effectifs ont connu l'évolution
suivante :
Evolution des effectifs de British Aerospace : nombre d'employés en fin d'année
|
1995 |
1996 |
Défense |
37.400 |
30.000 |
Aviation civile |
21.900 |
11.800 |
Rover |
33.500 |
- |
Immobilier et Construction |
5.600 |
100 |
Autres et siège |
4.100 |
500 |
Sous-total groupe |
102.500 |
42.400 |
Joint-ventures (au prorata) |
- |
4.600 |
Total |
102.500 |
47.000 |
Source : British Aerospace, rapport annuel 1996
Enfin,
des joint-ventures ont été établies qui permettent de
partager les risques :
- British Aerospace SEMA, en juillet 1991, à 50/50 entre British
Aerospace et SEMA Group (systèmes navals) ;
- Matra British Aerospace Dynamics, à 50/50 entre British Aerospace et
Matra Défense (missiles), en octobre 1996 ;
- Aero International (Régional)-AIR- avec ATR (GIE regroupant
Aerospatiale et Alenia), en 1995.
Avant la fusion avec GEC-Marconi, le groupe offrait le visage d'une
entreprise principalement tournée vers les « marchés
militaires », aux résultats financiers brillants mais soumise
à quelques fragilités.
(2) Un groupe de défense
Le groupe est structuré en deux grandes divisions opérationnelles à l'activité principalement orientée vers les produits de défense.
Chiffres d'affaires consolidés passés et à venir (prévisions) de Bae
(en millions de livres)
|
1992 |
1994 |
1996 |
1997 (p) |
1998 |
Défense |
4.316 |
4.869 |
5.339 |
5.606 |
5.886 |
Aviation civile |
1.665 |
1.934 |
2.120 |
2.403 |
2.320 |
Immobilier |
88 |
84 |
76 |
78 |
81 |
Automobile |
3.427 |
807 |
- |
- |
- |
BTP |
792 |
- |
- |
- |
- |
Autres & siège |
332 |
299 |
34 |
32 |
32 |
Intra-groupe |
(407) |
(120) |
(128) |
(137) |
(145) |
Total |
10.213 |
7.873 |
7.441 |
7.983 |
8.174 |
Sources - Rapport annuel Bae 1996 et NatWest Securities
Juin
1997
Le groupe s'organise désormais autour de deux grandes activités
principales, une troisième venant faire l'appoint.
British Aerospace Defence Ltd
La division Défense est le noyau dur de l'activité de British
Aerospace
. D'abord parce qu'elle réalise 70,5 % des
7,44 millions de livres de chiffre d'affaires de British Aerospace, soit
5,339 millions de livres, ensuite parce qu'elle est la source des profits
de British Aerospace (553 millions de livres de résultat
opérationnel), la division aviation civile subissant toujours des pertes.
Au-delà des avions de combat qui demeurent le noyau dur de son
activité,
British Aerospace Defence a l'ambition d'embrasser
l'ensemble des métiers liés à la défense
pour
asseoir son leadership sur le marché de la maîtrise d'oeuvre.
Aviation civile (ou commercial aircraft)
La division aéronautique civile a longtemps pesé sur les
résultats du groupe. Elle a réalisé 28 % des ventes
de l'année 1996, soit 2.120 millions de livres, mais
enregistre encore des pertes (résultat opérationnel
négatif de 78 millions de livres en 1996).
Cette division s'organise autour de
deux pôles
:
-
le
pôle Airbus
: British Aerospace détient
20 % du GIE Airbus Industries, une part proportionnelle de la production
lui revient. Il s'agit pour l'essentiel de la fabrication des ailes et des
circuits d'alimentation en carburant (British Aerospace Airbus Ltd et Airbus
Industrie BIE). British Aerospace participe au développement de l'avion
de transport du futur (Euroflag SRL). Le pôle Airbus est plutôt
profitable et permet de compenser, mais juste partiellement, les pertes de
Regional Aircraft ;
-
le pôle régional Aircraft
: c'est la grande source
de pertes que British Aerospace cherche à éradiquer, soit en
arrêtant la production (Jetstream), soit en restructurant dans le cadre
de partenariats (Avro est incorporé dans AIR, consortium
anglo-franco-italien).
Théoriquement, il devrait exister des synergies avec l'aviation
militaire. A supposer que ce soit le cas, il ne semble pas qu'elles soient
exploitées à fond dans la mesure où, par exemple, les deux
divisions emploient des systèmes de conception assistée par
ordinateur (CAO) incompatibles.
Il faut noter cependant que la filiale Aerostructures travaille pour le compte
des deux divisions Military Aircraft et Commercial Aerospace.
La division immobilière (property development)
C'est la troisième division, relativement marginale, de British
Aerospace, mais qui peut être la source de profits significatifs.
(3) Un groupe financièrement puissant
L'analyse financière du groupe fait apparaître les données expoées ci-dessous:
Evolution passée et prévisible du résultat opérationnel de Bae
(en millions de livres)
|
1992 |
1994 |
1996 |
1997 |
1998 |
Défense |
352 |
412 |
553 |
600 |
647 |
Aviation civile |
(337) |
(156) |
(78) |
(13) |
64 |
Immobilier |
2 |
6 |
(1) |
0 |
0 |
Rover |
(80) |
- |
- |
- |
- |
BTP |
14 |
- |
- |
- |
- |
Autres & siège |
(38) |
6 |
(19) |
(10) |
(10) |
Total |
(87) |
268 |
455 |
577 |
701 |
Sources - BAe Rapport annuel 1996 et NatWest Securities Juin 1997
Evolution des taux de marge brute
|
1992 |
1994 |
1996 |
1997 |
1998 |
Défense |
8,1 |
8,5 |
10,4 |
10,7 |
11 |
Aviation civile |
(20,2) |
(8,1) |
(3,7) |
(0,5) |
2,8 |
Immobilier |
2,3 |
7,1 |
(1,3) |
0 |
0 |
Total |
(0,3) |
3,4 |
6,1 |
7,2 |
8,6 |
Sources - BAe Rapport annuel 1996 et NatWest Securities
Juin
1997
Les taux de marge se redressent au rythme des efforts de productivité
importants consentis par BAe. Ils atteignent 6,1 % en 1996, à
comparer avec les 8 % du grand rival, GEC.
Les perspectives d'avenir suivent celles du chiffre d'affaires, ce qui est
logique compte tenu du double mouvement d'abaissement du point mort et
d'augmentation des ventes.
Analyse de la performance financiere de BAe
-
Analyse de performance (1)
1995
1996
Ratios de profitabilité :
- retour sur actif total (%)
4,3
5,9
- retour sur capital immobilisé (%)
8,0
11,3
- marge de profitabilité (%)
5,3
6,1
- retour sur fonds propres (%)
35,5
26,9
Ratios de structure :
- fonds propres/total des dettes (%)
13,8
28,0
- fonds propres/actif total (%)
12,13
21,95
Productivité du travail
- salaire moyen
22.333,3
22.931,0
- profit par unité de salaire versé (£)
0,33
0,45
- profit par tête (£)
7.333,33
10.363,00
- CA par tête (£)
147.200
169.000
Ratio d'exportation (%)
81,0
87,0
1. dans toute cette analyse, le profit retenu est le bénéfice avant impôt.
La trésorerie du groupe s'est nettement redressée d'abord sous l'effet des produits des importantes cessions d'actifs réalisées par BAe puis grâce aux flux du cash flow courant . L'assainissement est bien réel et BAe peut désormais compter sur des flux de trésorerie réguliers.
Ce faisant, British Aerospace a reconstitué un « trésor de guerre » qui, estimé à 8 milliards de livres, lui donne des marges de manoeuvre impressionnantes même si certains traitements comptables 17( * ) peuvent faire illusion.
(4) Des facteurs de vulnérabilité
Malgré ces excellents résultats financiers, BAe
est
guettée par quelques sérieux éléments de
vulnérabilité.
Le premier d'entre eux tient aux ambiguïtés d'une activité
très -trop ?- majoritairement axée autour des productions de
défense. Si celles-ci apparaissent rémunératrices, il ne
faut pas négliger les risques d'une poursuite de la réduction de
la « demande militaire » non pus que quelques inconnues
importantes sur les perspectives de marges associées à des
programmes nouveaux comme l'Eurofighter.
Un deuxième facteur de vulnérabilité tient à la
place des exportations dans le chiffre d'affaires de BAe.
Répartition géographique du chiffre d'affaires consolidé de BAe
(en %)
|
1996 |
1995 |
Royaume-Uni |
13,6 |
17,2 |
Reste de l'Europe |
20,3 |
17,1 |
Moyen-Orient |
41,2 |
40,9 |
Etats-Unis et Canada |
9,6 |
10,8 |
Asie - Pacifique |
14,1 |
12,8 |
Amérique Latine |
0,7 |
0,8 |
Afrique |
0,5 |
0,5 |
Total |
100 |
100 |
Source : BAe Rapport annuel 1996.
La répartition géographique du chiffre d'affaires de BAe
révèle la grande dépendance de l'entreprise à
l'égard du Moyen-Orient, du fait en particulier du poids du contrat
« Al Yamamah » avec l'Arabie Saoudite (20 % du chiffre
d'affaires de l'entreprise). Or, les marchés à l'exportation sont
sans doute particulièrement rémunérateurs -les clients
payent en général d'avance- mais aussi fort concurrentiels. Leur
pérennité n'est pas garantie et la diminution des commandes du
royaume saoudien pourrait mettre en difficulté l'entreprise.
Enfin, BAe qui dispose d'une réelle expertise technique, la plupart du
temps insuffisante toutefois pour lui assurer la maîtrise entière
de ses produits, pousse sans doute trop loin sa logique financière en
réduisant excessivement son effort de recherche propre.
Eléments sur le niveau des dépenses
autofinancées
de R et D de quelques entreprises
|
1995 |
% du CA |
1994 |
1993 |
1992 |
Boeing |
816.050 |
6,5 |
1.097.513 |
1.069.818 |
1.188.973 |
Aérospatiale |
511.800 |
8 |
562.243 |
683.805 |
322.42 |
Thomson |
493.230 |
5 |
514.698 |
546.204 |
570.672 |
GEC |
412.000 |
7,1 |
406.000 |
398.000 |
417.000 |
Snecma |
312.796 |
12,6 |
390.633 |
460.699 |
381.545 |
Rolls-Royce |
206.000 |
5,7 |
218.000 |
253.000 |
229.000 |
Raytheon |
203.259 |
2,7 |
173.652 |
179.987 |
186.699 |
Mc Donnell |
200.309 |
2,2 |
191.292 |
219.631 |
327.837 |
BAe |
119.000 |
2,1 |
99.000 |
168 |
151.000 |
Northrop Grumman |
105.629 |
2,4 |
77.933 |
62.475 |
59.899 |
Source : Départment of Trade & Industry, the UK R&D Scoreboard 1996.
b) Daimler-Benz Aerospace (DASA)
DASA
offre le visage d'une entreprise en voie de redressement financier, fortement
impliquée dans les activités civiles mais, qui, souvent, souffre
d'une position relativement seconde.
Le chiffre d'affaires de DASA s'est élevé à près de
15,3 milliards de DM en 1997, en hausse de 20 % par rapport à 1996. Son
résultat d'exploitation brut s'est redressé passant d'une perte
de 443 millions de DM en 1996 à un bénéfice de 222
millions de DM.
L'entreprise a ainsi confirmé son redressement la très profonde
crise qu'elle a traversé à partir de 1994.
Après 438 millions de marks de pertes en 1994, DASA avait vu en effet
celles-ci atteindre 4,18 milliards de marks en 1995.
Daimler Benz Aerospace Airbus a été la plus touchée des
divisions de DASA. En 1995, son chiffre d'affaires a chuté de 4,3
à 3,6 milliards de marks et les pertes ont atteint 371 millions de marks.
La chute des commandes consécutive à la guerre du Golfe, la
faiblesse du dollar américain
18(
*
)
ainsi que des choix
stratégiques malheureux
19(
*
)
ont été
préjudiciables à Daimler Benz Aerospace. Les activités
militaires ont aussi souffert des restrictions budgétaire et de la chute
des commandes gouvernementales.
Pour redresser la situation un plan de restructuration très strict a
été mis en place.
Baptisé
Dolorès (Dollar Low Rescue)
20(
*
)
et présenté en aout 1995,
il prévoyait la suppression d'environ 10 000 emplois d'ici la fin de
1998. Entre 1993 et 1997, les effectifs ont alors été
considérablement réduits passant de plus de 80 000 à
environ 43 000 personnes.
Ces restructurations visaient à maintenir la compétitivité
de l'entreprise dans l'hypothèse où le dollar resterait à
un niveau bas et à préparer la société dans la
perspective des négociations sur la consolidation de
l'aéronautique européenne.
Le redressement de l'entreprise est toutefois fragile. L'endettement du groupe
est important et pèse sur les résultats.
Indicateurs de performance de DASA
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Chiffre d'affaires |
15.286 |
13.053 |
Coûts de revient |
- 13.032 |
- 11.428 |
Marge d'exploitation |
2.254 |
1.625 |
Recherche et développement |
- 619 |
- 711 |
Résultat brut |
222 |
- 443 |
Résultat net |
7 |
1.202 |
Actifs |
21.855 |
21.465 |
Capitaux propres |
6.478 |
6.267 |
DASA
paraît se trouver à une sorte de carrefour stratégique. Les
exigences de ses actionnaires, désormais, très largement
américains après la fusion entre Daimler et Chrysler la poussent
à opter pour les activités et les modes de gestion plus
susceptibles de dégager des marges d'exploitation. Or, cette exigence
n'est pas aisée à satisfaire en raison de la structure de
l'activité de DASA.
Le redressement de l'entreprise a certes été favorisé par
l'amélioration de son volume d'activité qui a concerné ses
différentes branches d'activité.
Mais, DASA apparaît surtout orientée vers les marchés
commerciaux, Airbus, la production de sous-systèmes et une contribution
à l'Europe de l'espace.
Evolution du chiffre d'affaires de DASA
(en milliers de DM)
|
1996 |
1997 |
Avions civils et hélicoptères |
5.970 |
4.603 |
Avions militaires |
1.654 |
1.589 |
Systèmes |
1.105 |
1.012 |
Satellites |
1.450 |
1.183 |
Systèmes civils et de défense |
2.841 |
2.747 |
Moteurs |
2.963 |
2.311 |
Total |
15.296 |
12.699 |
Près de 40 % de l'activité de DASA sont réalisés dans le domaine des appareils commerciaux (31,1 % du total) et des hélicoptères (8,9 % du total) dont les chiffres d'affaires ont augmenté de 35,9% et 9,8 % respectivement entre 1996 et 1997.
Division Avions commerciaux - Hélicoptères
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Chiffre d'affaires |
5.970 |
4.603 |
Effectifs |
19.250 |
19.306 |
R & D |
550 |
712 |
Avions commerciaux |
|
|
Chiffre d'affaires |
4.758 |
3.501 |
Effectifs |
15.403 |
15.319 |
R & D |
306 |
483 |
Hélicoptères |
|
|
Chiffre d'affaires |
1.212 |
1.102 |
Effectifs |
3.847 |
3.987 |
R & D |
244 |
229 |
L'activité de cette division résulte de
participations
dans les groupements européens Airbus, dont DASA détient comme
Aérospatiale 37,9 % des droits, et Eurocopter, à hauteur de
40 % des droits.
Les
divisions « systèmes »
et
« moteurs »
suivent à peu près
à égalité avec, l'une, 18,6 %, et l'autre, 19,4 % du
chiffre d'affaires.
L'importance relative de ces deux activités doit être
soulignée dans la mesure où leur entière
intégration
21(
*
)
dans un
groupe aéronautique européen n'est pas envisagée au stade
actuel des projets. Elle fait de DASA une entreprise partiellement
intégrée verticalement.
Systèmes
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Chiffre d'affaires |
2.841 |
2.747 |
Effectifs |
8.742 |
9.254 |
R & D |
861 |
631 |
L'activité de DASA dans le domaine spatial est très significative.
Espace (infrastructures)
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Chiffre d'affaires |
1.105 |
1.012 |
Effectifs |
1.946 |
1.919 |
R & D |
720 |
708 |
Satellites
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Chiffre d'affaires |
1.450 |
1.183 |
Effectifs |
1.623 |
1.648 |
R & D |
1.503 |
851 |
Les
infrastructures (7,2 % du chiffre d'affaires) et les satellites (9,5 % du
chiffre d'affaires) font de DASA une entreprise spatiale sans doute
relativement relativement modeste en termes absolus mais à l'importance
significative. Dans ce secteur, DASA intervient aux côtés de
partenaires européens dont Matra Marconi Space.
Enfin, les
avions militaires
génèrent un peu moins de 11 %
de l'activité globale.
Avions militaires
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Chiffre d'affaires |
1.654 |
1.589 |
Effectifs |
5.640 |
5.567 |
R & D |
407 |
403 |
Cette
division repose principalement sur deux programmes le Tornado et l'Eurofighter
qui représentent 50 % du chiffre d'affaires. Ces deux programmes sont
conduits en coopération, le premier avec BAe, le second avec le
partenaire britannique mais aussi Alenia et CASA.
Le reste de l'activité de la division consiste, d'une part dans une
contribution à l'assemblage des Airbus (20 % du total), plan de charge
bienvenu pour soutenir l'activité de la division, et dans des
participations à différents programmes étrangers,
américains principalement.
En dépit des perspectives de l'Eurofighter, la production d'appareils
militaires par DASA n'a pas atteint un niveau tel qu'elle puisse entrer
naturellement dans la stratégie de l'entreprise.
C'est pourquoi l'avenir de l'entreprise semble tout particulièrement
lié à sa place dans Airbus et à l'évolution du
consortium.
La clarification de la stratégie de DASA apparaît d'autant plus
urgente que l'entreprise n'occupe pas une place majeure au sein d'un groupe
considérable depuis la fusion avec Chrysler mais à vocation
automobile.
|
Chiffre d'affaires 1996 en milliards de marks |
Salariés fin 1996 |
Daimler-Benz |
106,3 |
290.029 |
Daimler-Benz Aerospace |
13 |
44.936 |
Division aéronautique |
6 |
25.483 |
Airbus |
3,4 |
13.241 |
Source : Daimler-Benz Aerospace
Dans ces conditions, DASA donne l'impression d'être placée sous
une contrainte de résultats par les dirigeants de sa maison-mère
pressés de satisfaire leur actionnariat.
En bref, l'heure n'est plus à la diversification mais à des
recentrages sur les points forts et, pour le reste, à des apports
à des tiers les mieux valorisés qu'il est possible.
c) Des entreprises dispersées
Les
entreprises aéronautiques restent en Europe dispersées. Elles
entretiennent ensemble des relations ambigües d'alliances mais aussi de
concurrence qui nuisent à leur cohérence.
Les relations entre les entreprises aéronautiques en Europe sont certes
nombreuses.
Elles prennent la forme de groupements d'intérêt économique
comme pour Airbus ou de sociétés conjointes comme c'est le cas
pour les hélicoptères, les missiles ou l'espace.
Ces alliances sont cependant triplement limitées.
Le plus souvent, elles ne regroupent pas l'ensemble des actifs
consacrés en Europe à une activité donnée. Elles
sont donc inachevées ce qui s'accompagne d'un certain
sous-dimensionnement d'entités qui, de plus, se livrent à une
concurrence entre elles.
Elles sont en outre inégalement efficaces sous l'angle de leur
potentiel d'intégration et d'unification de la gestion des actifs sur
lesquels elles portent.
Elles unissent enfin des entreprises dont les intérêts restent
divergents voire concurrents hors le domaine des activités
exercées en commun.
La situation des avions de combat est illustrative de chacune de ces trois
limites. Le consortium Eurofighter apparaît en effet comme :
une entité dont le périmètre n'épuise pas les
actifs consacrés en Europe aux avions de combat puisque, en particulier,
Dassault n'en fait pas partie ;
une structure qui n'a pas su conduire efficacement un programme dont les
coûts ont été gonflés par des règles
byzantines de répartition du plan de charge si bien qu'ils
s'élèveraient à plus de trois fois ceux du
Rafale
22(
*
)
dans un contexte de
fiabilité technique douteuse la multiplicité des entreprises
intervenant en matière de commandes de vol d'un (268, semble-t-il) ayant
abouti à des impasses techniques ;
une organisation réunissant des entreprises concurrentes dans
d'autres volets de leur activité (activités Airbus BAe et DASA
contre activités Boeing d'Alénia) même si d'autres
regroupements apparaissent de ce point de vue encore plus illustratifs.
En bref, les entreprises aéronautiques restent en Europe
éparpillées malgré des intérêts parfois
communs souvent mal gérés par des structures insuffisamment
fédératrices.
Il en résulte un sous-dimensionnement qui touche d'abord les
entreprises, la plus grande entreprise européenne n'atteignant pas le
tiers de la taille de Boeing, mais aussi et davantage encore chacun des
compartiments de leur activité.
L'on sait tous les inconvénients de cette situation dans une industrie
où l'effet de taille importe tant.
Cette dispersion des forces qui a aussi des effets sur l'ensemble de la
filière aéronautique, est également à l'origine de
gaspillages des deniers publics. La superposition des systèmes d'aide
à la recherche, l'empilement de programmes concurrents en Europe, des
coopérations mal conduites dont chacun sait qu'elles
génèrent des surcoûts par rapport aux projets conduits sur
une base unifiée constituent autant de sources de déperdition
d'énergie.
Cette situation est inacceptable quand l'industrie aéronautique
européenne est confrontée au défi d'une concurrence face
à laquelle elle ne dispose d'aucune des marges de manoeuvre de ses
compétiteurs.