AUDITIONS
Auditions du 28 mai 1998
1. M. CHRISTIAN BYK, MAGISTRAT, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE L'ASSOCIATION INTERNATIONALE DROIT, ETHIQUE ET SCIENCE
M. BYK distingue trois grandes périodes dans l'évolution de la bioéthique.
De 1965 à 1975, apparaissent les premiers appareils de dialyse rénale. La question qui se pose est alors de déterminer qui peut, en priorité, bénéficier de ces nouveaux traitements, compte tenu de l'écart entre l'offre et la demande.
Entre 1975 et 1988, les autorités publiques mettent en oeuvre une politique d'évaluation, aux Etats-Unis d'abord, puis en Europe (Danemark, France). Des commissions parlementaires se saisissent du sujet en Grande-Bretagne et en Espagne.
Depuis 1988, des normes législatives sont établies en Espagne (1988), en Grande-Bretagne (1990) puis en France.
L'ordre juridique n'offre pas tous les repères de clarté souhaitables en ce domaine. Un phénomène de désétatisation se manifeste dans les états fédéraux mais aussi dans des états unitaires où sont mises en oeuvre des politiques régionales (cas de l'Italie).
La bioéthique est marquée aujourd'hui par trois tendances :
o l'institutionnalisation avec le développement des comités d'éthique chargés de fixer les protocoles de recherche. On compte aujourd'hui une cinquantaine de comités consultatifs nationaux à travers le monde ;
o l'internationalisation avec l'élaboration de la Convention de biomédecine élaborée par le Conseil de l'Europe, puis de la Déclaration sur le génome humain adoptée par l'UNESCO. L'Union européenne développe, de son côté, sa propre logique ;
o la juridicisation avec la multiplication des textes à l'échelon national et international, ce qui pose le problème de la spécificité et de la cohérence du droit ainsi développé.
Il convient de souligner la part que les ordres professionnels ont prise dans l'élaboration des règles, tant dans le domaine du don d'organes que dans celui de la procréation assistée.
Les divergences existant d'un état à l'autre encouragent le " tourisme médical ", d'autant plus que la circulation intra-européenne est légale en ces domaines.
2. PROFESSEURS JEAN LANGLOIS ET MARC LERAT, MEMBRES DU CONSEIL NATIONAL DE L'ORDRE DES MÉDECINS
Le CNO a constitué un groupe de travail commun avec l'Académie nationale de médecine. Sur les grands principes (gratuité, consentement, anonymat), aucune modification ne paraît souhaitable. Le principe d'une révision périodique devrait être reconduit.
Le problème du clonage n'a pas été traité par la loi : cette omission devra être réparée en prenant en compte tous les aspects du problème (clonage reproductif et clonage thérapeutique).
- Don et transplantation d'organes, tissus et cellules :
o la loi n'a pas distingué assez clairement les transplantations et les autopsies quant au régime de consentement qui leur est applicable ;
o la loi considère la moelle osseuse comme un organe mais ne tient pas compte des nouveaux modes de prélèvement des cellules hématopoïétiques dans le sang placentaire et le sang périphérique ;
o pour les donneurs vivants, les possibilités de prélèvement devraient être élargies aux ascendants et collatéraux. La notion d'urgence appliquée au don du conjoint n'a pas d'utilité pratique et devrait être supprimée ;
o le dépistage des maladies transmissibles devrait faire l'objet d'une coordination à l'échelon européen ;
o la loi devrait réglementer la pratique, récemment développée, de la greffe cardiaque " en domino ".
- Assistance médicale à la procréation :
o un statut de l'embryon humain, dont l'absence actuelle favorise les abus, devrait être établi ;
o la loi ne définit pas l'état de mort de l'embryon, ni les conditions dans lesquelles sa destruction peut être autorisée ;
o une position devrait être prise sur la possibilité d'utiliser les embryons surnuméraires à des fins de recherche ;
o le contrôle des centres d'AMP devrait être renforcé et les sanctions pénales appliquées en cas d'infraction aux dispositions de la loi.
Audition du 4 juin 1998