3. La question des soldes budgétaires
La question des soldes budgétaires nets des Etats membres a souvent pollué les négociations relatives au budget communautaire, tout particulièrement après l'entrée du Royaume-Uni dans le marché commun. Le problème, que le Conseil européen de Fontainebleau de 1984 avait permis d'atténuer, a resurgi à la fin de l'année 1997, à la suite de revendications de plusieurs Etats membres, dont l'Allemagne. Ce débat doit être replacé dans le contexte général de l'Agenda 2000, et notamment dans la perspective de l'élargissement. Celui-ci entraînera en effet une détérioration de la situation budgétaire des Quinze que la Commission évalue à 0,15 % de leur PNB.
a) Le précédent britannique
Dès son adhésion à la Communauté
économique européenne, en 1973, le Royaume-Uni a soulevé
la question du déséquilibre entre sa contribution au budget
communautaire et les dépenses communautaires dont il était
destinataire. Ce déséquilibre tenait essentiellement à la
spécificité du secteur agricole britannique, plus modeste et
structurellement différent de celui d'autres Etats membres, et à
une contribution relativement importante, liée à la part du
Royaume-Uni dans l'assiette de la TVA harmonisée (plus grande que sa
part dans le PNB total de la Communauté).
Le Conseil européen a adopté plusieurs dispositifs successifs de
correction de ce déséquilibre. Le système actuel de
correction remonte au Conseil de Fontainebleau de juin 1984, dont les
conclusions sur ce point ont été traduites dans une
décision du 7 mai 1985. Aux termes de celle-ci, la contribution du
Royaume-Uni au budget communautaire est réduite à hauteur de
66 % de son déséquilibre budgétaire. Le
déficit de financement qui résulte de cette correction est
financée par les
" autres Etats membres "
(ce qui
exclut le Royaume-Uni), étant précisé que l'Allemagne ne
participe qu'à hauteur de deux-tiers de sa part normale.
Comme le montre le graphique ci-après, le mécanisme ainsi
adopté a atteint son objectif en ce qu'il a conduit à une
substantielle réduction du solde négatif du Royaume-Uni, qui
s'élève aujourd'hui à environ 0,2 % de son PNB.
Solde
du Royaume-Uni
(
En pourcentage du PNB)
Source : Commission Européenne
Toutefois, près de quinze années après
le
Conseil de Fontainebleau, les données qui avaient pu justifier l'octroi
d'une compensation au Royaume-Uni sont profondément
transformées :
- l'écart de prospérité relative entre le Royaume-Uni
et les autres Etats contributeurs nets s'est resserré. Comme le fait
observer la Commission dans son rapport sur les ressources propres,
" le Royaume-Uni connaît une prospérité relative
(et donc une capacité relative de payer) qui se situe autour de la
moyenne de l'Union européenne et qui la dépassera certainement
après le prochain élargissement "
;
- la création de la ressource PNB en 1988 et
l'écrêtement de la base TVA ont réduit le poids relatif de
la ressource TVA et rapproché la part de la contribution britannique au
budget communautaire de la part du PNB britannique dans le PNB communautaire.
Cette évolution réduit sensiblement la portée de
l'assiette TVA harmonisée dont l'ampleur, rappelons-le, avait
été l'une des deux principales raisons avancées à
Fontainebleau pour justifier le " chèque britannique ". Au
surplus, ces modifications n'ont pas donné lieu à des
réelles adaptations du mode de calcul du montant dudit chèque qui
continue à être évalué comme si le budget
était encore pour l'essentiel financé par la TVA non
écrêtée, c'est-à-dire sur la base d'un
système abandonné depuis dix ans ;
- alors que les dépenses agricoles (dont l'ampleur constituait la
seconde justification d'une correction au profit des britanniques)
représentaient plus de 70 % des dépenses réparties
entre Etats en 1984, cette part est aujourd'hui inférieure à
50 % (et devrait se réduire encore si les perspectives
financières proposées par la Commission étaient
adoptées en l'état).
Il résulte de ces évolutions que la correction au
bénéfice du Royaume-Uni, déjà contraire au principe
de solidarité qui régit la construction européenne,
aboutit
, pour reprendre l'expression de la Commission,
à
" une distorsion dans le système des contributions "
puisque la contribution budgétaire de ce pays
" représente une proportion plus faible de ses revenus que celle
payée par les autres Etats membres "
.
Au surplus, et c'est l'une des principales difficultés à laquelle
se heurtent les Quinze pour définir le futur cadre financier de l'Union
européenne,
ce précédent suscite des revendications de
la part d'autres Etats contributeurs nets
.