II. LES RAISONS DE L'ÉVOLUTION DE LA STRUCTURE DE DISTRIBUTION DES PRODUITS D'ASSURANCE EN FRANCE
A
nouveau, les raisons de cette évolution, étudiées dans le
cas français, sont assez représentatives des raisons de
l'évolution parallèle de la distribution de l'assurance en
Europe, avec des spécificités nationales marquées (comme
l'assurance directe dans le risque automobile en Grande-Bretagne).
Comme on le voit de manière très claire dans les tableaux et
schémas qui suivent, la dynamique d'évolution des canaux de
distribution est en rapport avec le niveau relatif du coût de
distribution, même si l'assurance directe est bloquée dans son
développement pour d'autres raisons. La structure des coûts est la
clé de la compétitivité comparative des réseaux de
distribution physiques, même si les modes de distribution à forte
composante électronique sont mieux adaptés à des
clientèles jeunes ou haute gamme.
Graphique
26
Coûts de distribution par type de réseau en
assurance-vie-épargne
188(
*
)
(en pourcentage des primes émises)
Source : Solving International.
Graphique
27
Positionnement prix des réseaux de distribution
en assurance automobile
189(
*
)
(sans tenir compte des éventuels budgets de dérogation)
Source : Enquête annuelle Solving International sur
la distribution en assurance des particuliers.
C'est la maîtrise des coûts, notamment de gestion et
d'acquisition, et la volonté de traduire cette maîtrise en prix
compétitifs, qui expliquent le succès des mutuelles sans
intermédiaires en France. Le taux de frais généraux
(charges d'acquisition et de gestion calculées en pourcentage des
primes) des MSI était par exemple de 25,5 % en 1994, tandis que
celui des sociétés " rémunérantes " (les
sociétés à forme mutuelle, selon le décret de 1938,
ayant recours à des intermédiaires et donc très proches
des compagnies classiques) s'élevait à 31,4 %, soit un taux
de 25 % inférieur pour les MSI
190(
*
)
.
Quant aux banques, au-delà du différentiel positif d'image dont
la banque bénéficie par rapport à l'assurance, elles
doivent le succès de leur percée sur le marché de
l'assurance-vie à :
-
- la facilité d'assimilation par les réseaux bancaires de la
culture du produit d'assurance-vie, produit d'épargne longue venant
à point nommé compléter une gamme de produits
d'épargne plutôt " courts " ;
- la capacité à offrir des produits simples dans des conditions de transparence sur les frais et la rémunération perçue par l'institution vendeuse ;
- un niveau de productivité commerciale allant de 1 à 5, voire de 1 à 10 entre intermédiaires traditionnels et réseaux bancaires (là où un agent général vend 1 ou 2 contrats vie par semaine, un chargé de clientèle Pacifica en vendra 3 ou 4 par jour) ;
- avoir, à partir de là, et certainement aussi grâce au soutien direct et indirect que la présence de réseaux existants a pu apporter à une comptabilité analytique arrangeante, des taux de chargement bas, voisins de 5 %, guère inférieurs à ceux des MSI, mais très inférieurs à leur principal canal concurrent sur ce type de produits que sont les réseaux salariés.
-
- la séparation des processus opérationnels de gestion des
ventes et de gestion des sinistres, avec centralisation au niveau
régional du traitement des sinistres et gains de productivité
associés ;
- une gestion rapide et humanisée des sinistres, c'est-à-dire grâce à la qualité du " back office " géré dans une perspective d'honorer les engagements et non pas de les discuter ;
- à la prestation de services et à la fidélisation de la clientèle (qui est également un des grands facteurs de succès des MSI).
Tableau
56
Armes des différents types de réseaux de distribution
d'assurance
en France
191(
*
)
Armes
Types de
réseau
|
Prix |
Trafic et fréquence de contact |
Conseil à valeur ajoutée |
Processus clients |
Force et sens de la marque |
Agents généraux |
* |
* |
*** |
** |
(au cas
|
Courtiers |
** |
* |
*** |
** |
(au cas
|
Salariés |
* |
(au cas
|
(au cas
|
** |
(au cas
|
Mutuelles sans intermédiaires |
*** |
* |
** |
*** |
**** |
Bancassurance |
** |
**** |
** |
**** |
*** |
Direct |
**** |
* |
* |
**** |
* |
Grande distribution |
** |
**** |
** |
(au cas
|
*** |
Groupes d'affinités |
** |
*** |
*** |
(au cas
|
**** |
Source : Enquête annuelle Solving International sur la
distribution en assurance des particuliers.
C'est sur des bases voisines de contrôle des coûts, de
maîtrise des risques par la bonne connaissance de la sinistralité,
de savoir-faire en matière de communication et de promotion, de
prestations de services et de fidélisation de la clientèle, que
l'assurance directe a pu conquérir une part de marché
en France. Dans la mesure où les avantages étaient moins
visibles que sur d'autres marchés par rapport à la concurrence,
elle s'est moins développée ici et plus ailleurs, comme en
Grande-Bretagne
192(
*
)
.
A partir des raisons, rapidement analysées, du succès des
nouveaux modes de distribution, on peut voir comment la diversification de la
distribution, avant même l'ouverture des marchés nationaux
européens, contribue à créer un climat de
compétitivité très favorable au " consommateur "
d'assurances en matière d'étendue des garanties et de tarifs.