B. ETAT DES RELATIONS ENTRE ASSURANCE SANTÉ PRIVÉE ET PUBLIQUE DANS PLUSIEURS PAYS D'EUROPE
Les pays retenus sont ceux qui permettent de dresser la typologie la plus complète des relations existantes entre assurance publique et privée dans le domaine de la couverture du risque maladie en Europe : comme le dit le CEA (dans la troisième version depuis 1983 de son étude sur l'assurance santé en Europe, qui s'attache plus particulièrement au glissement des frontières entre l'assurance sociale et l'assurance privée) à l'avenir, " au niveau national, les Etats vont expérimenter différents compromis se situant à la frontière du secteur public et du secteur privé " 153( * ) . A vrai dire, plusieurs le font déjà. Seront ici retenus les cas de l'Allemagne, des Pays-Bas, du Royaume-Uni, de l'Espagne et de la France.
1. L'assurance santé en Allemagne : système public subsidiaire et assurance privée substitutive 154( * )
Les
dépenses de santé représentaient en 1993 10,6 % du
PIB allemand.
L'assurance sociale allemande remonte à l'année 1881
où, suite à un message impérial, le Reichstag vote la
création d'un triple régime d'assurances pour les ouvriers contre
la maladie, les accidents et l'invalidité ou la misère dues
à la vieillesse.
Elle est dans son principe " subsidiaire ", s'appliquant à
ceux qui en ont véritablement besoin. Le reste est laissé
à l'initiative privée, mais était principalement
assuré hier, et l'est encore aujourd'hui, par des mutuelles où
les assurés supportaient le risque économique global ".
L'ensemble de la population allemande, 99,9 %, est couverte contre le
risque de maladie. Sur les 88,5 % assurés par le système
d'assurance sociale, 85 % le sont à titre obligatoire, 15 %
volontairement. " Ces derniers peuvent donc choisir entre
l'assurance-maladie sociale (publique) et l'assurance-maladie privée.
Environ 9 % de la population disposent exclusivement d'une couverture
d'assurance-maladie privée, sous forme d'une " assurance frais de
maladie " au premier franc ; 2,4 % de la population sont,
à divers titres, couverts sous d'autres formes. Le reste de la
population n'est pas couvert contre la maladie ".
L'assurance-maladie et accidents privée propose trois grands types
de contrats :
- les assurances " frais de maladie " (couvrant les frais
médicaux et de maternité) ;
- les assurances " allocation forfaitaire en cas
d'hospitalisation ", qui garantissent le versement d'un montant journalier
si l'assuré est hospitalisé ;
- les assurances indemnités journalières, qui assurent le
versement d'indemnités en cas de perte de revenu résultant d'une
incapacité de travail du fait d'une maladie ou d'un accident.
Le système privé est proche de celui de l'assurance-maladie
sociale publique. Par ailleurs, le 1er janvier 1995, a
été instauré un système général
obligatoire d'assurance dépendance permanente, de nature privée.
Les principaux acteurs de l'assurance privée substitutive sont les
Betriebskrankenkassen (BKK), institutions paritaires d'entreprises voisines de
nos institutions de prévoyance (et membres à ce titre de la
même association européenne : l'Association européenne
des institutions paritaires.
Le fondement du dualisme est lié à la disparition de l'obligation
d'être assuré contre la maladie au-delà d'un certain seuil
de revenu considéré comme le plafond d'assujettissement. Le
dualisme repose aussi sur les exemptions possibles au système
d'assurance sociale pour les étudiants, les stagiaires et les
salariés à temps partiel.
Les 7 millions de personnes assurées exclusivement auprès
d'une institution d'assurance privée le sont en fait auprès de
54 entreprises d'assurance spécialisées en assurance
santé regroupées au sein de l'Association de l'assurance-maladie
privée.
L'assurance-maladie privée allemande présente
trois caractéristiques :
- les primes n'évoluent pas avec l'âge (même si le
niveau de la prime est fonction de l'âge d'entrée) le sexe et
l'état de santé ;
- les sociétés doivent constituer des provisions de
vieillissement ;
- les polices d'assurance ne sont pas résiliables par l'assureur.
Les cotisations sont prises en charge à moitié-moitié par
les employeurs et les salariés. Les primes d'assurance-maladie sont, au
même titre que d'autres dépenses de prévoyance,
déductibles du revenu imposable.
La montée en puissance de l'assurance-maladie privée est la
conséquence directe de " la crise de l'assurance sociale "
allemande.