C. REDÉPLOIEMENTS
La plupart des organismes de l'audiovisuel public ont, à l'occasion de changements de structures, décidé de regrouper leurs services. Ces déménagements se sont effectués le plus souvent dans le cadre d'opérations d'achat. Tel est le cas pour France Télévision, RFO, ainsi que TDF, bien que cette société appartienne désormais au groupe France Télécom.
1. Le nouveau siège de France Télévision (France 2 et France 3)
Le nouvel immeuble est situé dans le XVème arrondissement près du parc André Citroën. Cette opération, souhaitée par M. Hervé Bourges en décembre 1992, a été mise en oeuvre par M. Jean-Pierre Elkabbach.
- • Les points contestés
-
1? Aucune étude comparative des coûts n'aurait été
effectuée, en dépit de la conjoncture immobilière
favorable, dont France Télévision aurait dû profiter ;
2? Le choix du maître d'ouvrage délégué aurait été effectué en avril 1994 alors que les conseils d'administration n'ont donné l'accord sur le projet et le site qu'au mois de juillet ;
3? Des surcoûts n'auraient pas été pris en compte :
• On a dû isoler l'immeuble des vibrations provoquées par la ligne voisine du RER, pour un montant de 23,5 millions de francs 6( * ) ;
• Il a fallu acheter à la Ville de Paris une enclave non initialement prévue pour 9,45 millions de francs, soit 25 000 francs le m².
• Dans cette enclave on a découvert une plate-forme technique de la SNCF, dont l'enlèvement, à la charge de France Télévision, a coûté 3,5 millions de francs.
- • Les arguments de France Télévision
La délibération des conseils d'administration d'avril 1995 a été confirmée par une lettre signée par MM. les ministres du Budget, de l'Économie et des Finances et de la Communication, le 17 avril 1995, dans laquelle les cadres juridiques et financiers étaient décrits. L'appel à candidature a été lancé en mars 1995 pour 33 lots. Les résultats de l'appel d'offres restant supérieurs au coût d'objectif, une négociation a abouti à la désignation du contractant général s'engageant à réaliser avec les entreprises sélectionnées par France Télévision, le bâtiment pour un montant forfaitaire et non révisable avec remise au 31 janvier 1998. L'enveloppe allouée à cette opération s'élève à 1 738 millions de francs. Elle se décompose en 1 625 millions de francs de dépenses et en 113 millions de francs de frais financiers 8( * ) .
Aux questions posées par votre rapporteur, France Télévision a pu faire état du respect du budget prévisionnel d'avril 1995.
(en millions de francs)
Charges |
Budget
|
Situation
|
Écart |
Charges foncières |
562,6 |
528,6 |
- 34,0 |
Construction et aménagements |
615,0 |
735,5 |
+ 120,5 |
Honoraires |
48,7 |
38,5 |
- 10,2 |
Autres charges |
58,6 |
56,5 |
- 2,1 |
Frais de fonctionnement de la SCI |
26,6 |
35,1 |
+ 8,5 |
Mobilier |
35,5 |
26,7 |
- 8,8 |
Aménagements techniques |
218,8 |
194,9 |
- 23,9 |
Aléas |
59,0 |
|
- 59,0 |
Sous Total |
1 624,8 |
1 615,8 |
- 9,0 |
Frais financiers |
113,7 |
82,0 |
- 31,7 |
TOTAL |
1 738,5 |
1 697,8 |
- 40,7 |
Ce
tableau, qui constitue un bilan provisoire, actualise les données
relatives à l'exécution budgétaire de l'opération
" nouveau siège ".
La variation sur le poste " charges foncières " s'explique
principalement par la réduction du coût du terrain acquis
auprès de la SNCF. Cette baisse est, d'une part, liée aux
modalités de paiement échelonné. Elle correspond, d'autre
part, à la décote, obtenue pour tenir compte du transfert
à la SCI France Télévision de la responsabilité du
traitement du sous-sol, notamment pour supprimer les conséquences des
vibrations dues à la circulation ferroviaire.
L'augmentation du coût de la construction et des aménagements est
expliquée, à due concurrence de l'économie sur le terrain,
par la réalisation d'une paroi moulée pour les studios. Elle
correspond aussi aux aléas dans la limite de l'enveloppe prévue.
Elle représente enfin des choix technologiques faits en cours de
réalisation (réseaux informatiques...) correspondant à une
modernisation inéluctable.
Dans la présentation du budget d'avril 1995, les frais de
fonctionnement de la SCI sont constitués de dépenses dont la
nature ne permet pas un financement par crédit-bail immobilier (salaire
du conservateur des hypothèques, taxe de publication de contrat de
crédit-bail immobilier). C'est dans ce cadre que l'on constate un
transfert du poste " honoraires " qui ne retrace que les
dépenses de cette nature rentrant dans le coût de la construction
(architecte, bureaux d'études et de contrôle) vers le poste
" fonctionnement " de la SCI.
A la base de la décision de la chaîne, se trouve l'argument, que,
selon une étude technique, les économies de loyers et de charges
réalisées financeraient le remboursement du crédit-bail
contracté.
L'implantation actuelle confirme, selon France Télévision, cette
hypothèse. Seule, la régie finale de France 3
9(
*
)
reste, pour l'instant,
implantée dans ces locaux actuels comme le prévoyait le plan de
déménagement de 1998 soumis aux conseils d'administration d'avril
1995.
Pour un capital emprunté de 1 345 millions de francs à
un taux de 7,2 % + 1,1 %, le montant de la première
annuité de remboursement est de 116 millions de francs 1998. Les
charges locatives du nouveau siège sont estimées à
100 millions de francs 1998, soit un total de 216 millions de francs
1998.
Hors filiales et hors locaux de la tête de réseau France 3,
les loyers et charges locatives des implantations parisiennes de France 2,
de France 3 et de France Espace s'élèvent en 1998 à
233 millions de francs (loyers : 106,6 millions de francs,
charges : 126,3 millions de francs).
Si toutes choses égales par ailleurs, le montant des loyers parisiens
évolue de façon équivalente aux taux monétaires
à moyen terme, le groupe France Télévision, en
dépensant chaque année des sommes comparables à celles de
ses loyers et charges actuelles, sera propriétaire dans 20 ans d'un
terrain et d'un bâtiment. Mais le coût exact reste difficile
à déterminer et ne peut être apprécié qu'en
faisant des hypothèses de taux d'intérêts.
L'étude de ce dossier permet les réflexions suivantes :
-
1? Évoquer, comme cela a été fait par certains, le
montant total des opérations à environ 3 milliards de
francs, n'est pas une présentation correcte. Il est plus normal de
chiffrer le montant de capital emprunté comprenant les frais de
construction et les frais financiers ;
2? La Cour des comptes pose le problème en termes de comparaison. Mais quelles autres implantations étaient possibles ?
3? Considérer que l'opération est positive parce que les frais de crédit-bail sont à peu près identiques aux coûts de location des immeubles actuels n'est pas parfaitement satisfaisant dans la mesure où il faut s'assurer que les frais immobiliers étaient normaux au regard du chiffre d'affaires de l'entreprise.
" Les 57000 m² de la maison de France Télévision s'élèvent le long des berges de la Seine, dans un quartier de Paris en plein essor économique et dont l'identité audiovisuelle est déjà bien assise. Les atriums, autour desquels les deux rédactions s'organiseront, les cinq studios et le hall conçus à la manière d'une galerie intérieure, sont les originalités architecturales de ce bâtiment composé de deux ensembles, le bâtiment Seine et le Triangle. La structure modulable qui en résulte permet à la fois une grande souplesse dans la modification des cloisons et des espaces de travail et une circulation aisée entre les deux bâtiments.
La conduite de l'opération immobilière, l'édification du bâtiment, le déménagement lui-même, marquent une étape importante dans la vie du groupe France Télévision. En permettant le rapprochement des personnels des trois sociétés, la maison de France Télévision sera le lieu où elles pourront véritablement travailler ensemble. Les rencontres quotidiennes, l'échange des expériences, la confrontation des points de vue, devraient faire germer un nouvel esprit d'entreprise. L'ancrage dans un lieu est essentiel à la vie d'une entreprise car il conditionne l'appartenance à un même groupe, il localise, matérialise le travail commun. La maison de France Télévision doit devenir l'expression de ce nouvel esprit.
Le rapprochement actuel se traduit déjà par un certain nombre de concrétisations. Le Groupement d'intérêt économique France Télévision Services, mis en place tout récemment, emploiera une centaine de collaborateurs en provenance des chaînes pour assurer l'exploitation du bâtiment ainsi que la gestion des services généraux. Des personnels de France 2 et de France 3 actuellement séparés seront amenés à se rapprocher au sein d'une direction juridique commune et d'une direction internationale commune, toutes deux récemment créées. Ces actions respectent, bien entendu, l'identité propre à chacune des deux chaînes, et leur indépendance éditoriale.
L'utilisation des nouvelles technologies s'inscrit dans la même ambition. Il s'agissait pour France Télévision de se doter d'un réseau informatique local permettant à l'ensemble des collaborateurs de communiquer entre eux. La technologie ATM (Asynchronous Transter Mode) a été choisie pour sa modernité et sa capacité à transporter aussi bien des données informatiques traditionnelles que des images et des sons.
Plus généralement, le recours au numérique est une des pièces essentielles de la politique de développement de France Télévision, et les équipements de production des deux chaînes feront usage de cette technologie. La maison de France Télévision abritera le coeur du réseau numérique d'échange de France 3 qui reliera toutes les implantations de la chaîne entre elles. France 2 aura recours aux techniques numériques à la fois pour produire et pour diffuser. Dernière particularité technique de l'édifice, la présence de cinq studios qui se caractérisent, au niveau O du bâtiment Seine, par leur indépendance à l'égard du reste de l'édifice et par leurs qualités acoustiques.
L'édification d'un bâtiment dont les caractéristiques principales sont la souplesse d'utilisation, la capacité d'accueil pour l'installation des outils de communication les plus modernes et la primauté accordée à la circulation des données et aux synergies entre les personnels, atteste la volonté qu'a France Télévision d'entrer de plain-pied dans le XXIème siècle, et, dans un environnement international et concurrentiel, de se doter des moyens de communication les plus efficaces, au service de la création audiovisuelle s'adressant à tous les publics. "
Cette rationalisation très bénéfique des conditions de travail se double d'une augmentation des moyens mis à la disposition de l'entreprise, même si l'accroissement des surfaces ne peut être chiffré de façon simple. Voici la réponse faite par France Télévision à ce sujet :
" La surface utile de plancher portée au permis de construire est de 53 474 m².
Cette surface peut être découpée selon la nature, à savoir : 21 299 m² de bureaux et 32 175 m² d'activité.
Elle peut également être répartie selon le mode d'occupation, les parties " privatives " (France 2 : 55,5 %, France 3 : 37 %, France Espace: 7,5 %) représentant 34 260 m², le solde, soit 19 214 m², correspondant à des parties communes (circulations, implantation des services généraux, restaurant interentreprises ...).
La nouvelle implantation commune se substitue à un ensemble de locaux disparates et à des situations hétérogènes (gestion autonome de l'avenue Montaigne pour France 2; imbrication des services de France 3 avec ceux du bailleur dans la maison de Radio France; occupation d'étages complets ou partagés dans un immeuble collectif pour France Espace). ....
Il est possible d'estimer à environ 5 000 m² l'accroissement des surfaces utiles aux activités audiovisuelles. Cet agrandissement n'est pas le témoin d'une extension des moyens de production. Il traduit simplement les adaptations rendues possibles dans un immeuble dédié à la production audiovisuelle et qui étaient contraintes dans d'anciens immeubles de bureaux transformés à cette fin.
Le programme total du projet représente environ 20 000 m² de plus que les surfaces décomptées dans les anciens baux. Cette différence s'explique, notamment, par l'intégration de fonction et d'espaces (accueil, sécurité, restauration, salles de réunion) correspondant à des services dont les sociétés bénéficiaient dans leurs anciennes implantations sans que les surfaces nécessaires soient rapportées au contrat de location ".