CHAPITRE III - LE CADRE REGLEMENTAIRE DE LA POLITIQUE DES PECHES
1. La politique commune de la pêche
Depuis 1970, la politique du Gouvernement français s'inscrit dans le cadre de la Politique Commune de la Pêche (PCP) adoptée par la Communauté puis l'Union européenne. Il y a donc eu transfert de compétences des États membres, en matière de pêche. Désormais, toutes les mesures prises par les États membres pour compléter ou dépasser la PCP doivent être conformes au droit européen et obtenir l'approbation de la Commission.
1-1 La protection des ressources
Cette politique comprend quatre volets : une politique commune de protection et de conservation des ressources, une politique structurelle, une organisation commune des marchés et un volet sur les accords avec les pays tiers qui ne sera pas traité dans le rapport.
La politique commune de protection et de conservation des ressources repose sur le principe d'égalité des conditions d'accès à la ressource pour tous les ressortissants de l'Union. Elle comprend des règles d'utilisation et de répartition des ressources, des mesures techniques de conservation et des dispositions particulières pour la pêche côtière. Ces règles concernent pour l'essentiel :
- l'établissement de TAC (totaux admissibles de captures) et leur répartition en quotas nationaux. Les TAC reposent en partie sur des avis scientifiques et sont renégociés chaque année. La répartition sous forme de quotas entre États membres se fait conformément au principe de stabilité relative 18 ( * ) ;
- des mesures techniques de conservation (réglementation des engins de pêche pour en augmenter la sélectivité, fixation de périodes de pêche, de tailles minimales de capture pour certaines espèces, etc.) Il s'agit de protéger les juvéniles 19 ( * ) et d'assurer le renouvellement des stocks ;
- depuis juin 1995, des niveaux d'effort de pêche sont fixés pour certaines espèces sensibles pour chaque État membre en fonction du type d'engin utilisé et de la zone de pêche ;
- la commission a également instauré, en juin 1995, un système de permis de pêche spéciaux pour certaines espèces, comme les coquilles Saint-Jacques ou pour certains crustacés, afin de limiter l'effort de pêche sur ces espèces.
1.2 La politique structurelle
Elle a pour objectif de restructurer, moderniser et développer le secteur de la pêche et de l'aquaculture. Elle vient aussi compléter la politique de gestion de la ressource, en cherchant à adapter les capacités de capture à la disponibilité en ressource. Cette politique s'appuie essentiellement sur les Programmes d'orientation pluriannuels (POP), qui prévoient des réductions de flottilles. En contrepartie, l'Union européenne verse des compensations financières aux marins qui décident de quitter l'activité. En avril 1997, le quatrième POP, couvrant la période 1997-2002, a été adopté.
Parallèlement, l'Union accorde aussi des aides à la construction et à la modernisation des navires de pêche. Les projets doivent aller dans le sens d'un accroissement de la sélectivité des engins, l'utilisation de meilleures techniques de pêche et l'amélioration des conditions de conservation des produits à bord.
Les aides à la modernisation peuvent aussi concerner les infrastructures portuaires, afin d'améliorer les conditions de débarquement et de première vente, ainsi que les secteurs de la transformation et de la commercialisation des produits de la mer.
Enfin, la commission aide les actions qui cherchent à promouvoir de nouveaux débouchés (certification de la qualité et labellisation des produits, campagnes de promotion, études de marché, etc.).
Les aides structurelles représentent 52 % des crédits communautaires « pêche », soit 451 millions d'écus en 1996 pour tous les pays membres. La France a reçu 228,1 millions d'écus, pour la période 1994-1999, par l'intermédiaire de l'IFOP (Instrument financier d'orientation pour la pêche) et 33 millions d'écus dans le cadre du programme PESCA 20 ( * ) . L'IFOP est une enveloppe financière permettant d'apporter un soutien à tous les acteurs de la filière. L'administration du pays concerné et le pêcheur ou l'entreprise de mareyage ou de transformation doivent toujours participer au financement du projet, en fonction de leur capacité. L'IFOP est doté, pour la période 1994-1999, d'un budget de 2,7 milliards d'écus.
Le programme PESCA favorise les projets qui visent à la rationalisation des circuits de commercialisation, au perfectionnement professionnel ou au recyclage des marins pêcheurs, à l'amélioration des services aux entreprises, à l'étude et à la recherche de marchés et de nouveaux débouchés. Les aides peuvent aller à des collectivités locales, des chambres de commerce, des acteurs économiques individuels ou entreprises ou des marins pêcheurs. Pour 1994-1999, le programme PESCA est doté d'un budget de 250 millions d'écus pour l'ensemble des pays membres.
La France est le troisième pays, derrière l'Espagne et l'Italie, pour le montant des aides structurelles reçues de l'Union européenne.
Ce volet de la PCP cherche aussi à orienter l'activité vers de nouvelles espèces en développant les pêches expérimentales, les opérations de redéploiement, l'association temporaire d'entreprises et les sociétés mixtes.
1.3 L'organisation commune des marchés (OCM)
Les principaux objectifs de l'OCM sont de stabiliser les marchés des produits de la mer, garantir la sécurité des approvisionnements, assurer des prix raisonnables aux consommateurs et améliorer les revenus des producteurs. Elle doit assurer la transparence des échanges, renforcer la solidarité des producteurs, garantir la libre circulation des produits et organiser la compétition internationale dans le secteur des pêches.
L'OCM repose sur :
- l'instauration de normes communes de commercialisation (catégories de qualité, de taille ou de poids, emballage, etc.) ;
- les organisations de producteurs depuis 1971, pour intervenir sur le marché à la première vente ;
- la mise en place d'un régime commun des prix (prix d'orientation pour les principales espèces, prix de retrait communautaires, indemnités compensatoires pour certaines espèces (sardine, thon, ...), primes de stockage). Ces prix sont renégociés chaque année ;
- un régime d'échange avec les pays tiers.
L'OCM a été confortée en novembre 1994, à la demande de la France, avec la reconduction du régime des prix minima pour six espèces d'importation (lieu noir, lieu d'Alaska, merlu, cabillaud, églefin, lotte), afin d'éviter l'effondrement des cours de ces espèces, en raison de l'entrée massive sur le territoire français de produits à bas prix. L'Union européenne a aussi adopté un règlement sur les débarquements directs des navires battant pavillon d'un pays tiers dans un des ports communautaires. Ce règlement vise à renforcer la préférence communautaire et prévoit l'application des mêmes mesures sanitaires et de contrôles aux produits communautaires et aux produits tiers. Cependant, les États membres ont pour seule obligation de respecter les normes communes de commercialisation.
* 18 Le principe de la stabilité relative se traduit par l'attribution à chaque État membre d'un pourcentage fixe du TAC de chaque stock auquel cet État membre a accès
* 19 2 Jeunes poissons, dont l'exploitation intensive diminue la biomasse des reproducteurs.
* 20 PESCA est une initiative communautaire de la commission européenne (DG XIV) spécialement consacrée aux zones dépendantes de la pêche.