CHAPITRE V - LA COHÉRENCE DES POLITIQUES PUBLIQUES
Outre les faiblesses des politiques mises en oeuvre par l'État, les principaux dysfonctionnements observés au sein de l'interprofession relèvent plus ou moins directement d'un manque d'entente des opérateurs entre eux pour la prise de décision et l'application des mesures. Les désaccords structuraux, les rivalités portuaires et les oppositions stratégiques marquent les contextes de gestion. Outre les divergences de vues politiques, la superposition du cadre réglementaire européen avec la législation française n'est pas étrangère au manque d'harmonisation des interventions.
1. La superposition de la législation européenne et du cadre français
Indépendamment des considérations particulières et des différentes conceptions d'intervention, certains contentieux et lacunes sont nés d'un manque de clarification et de partage des compétences. Celui-ci est lié à la superposition du cadre d'action institué par l'Union européenne avec celle des institutions issues de la législation antérieure de gestion des pêches maritimes françaises d'après l'Ordonnance de 1945, révisée par la Loi de 1991.
À titre d'exemple, le cas des Comités locaux anciennement dotés d'une compétence économique et de gestion de la ressource est significatif. Ainsi, depuis la création des trois Fonds régionaux d'organisation des marchés (FROM) au début des années 1960, relayés par les Organisations de producteurs communautaires en 1971, aucune politique tranchée n'a été établie pour redéfinir leur cadre d'intervention.
Le problème de la coordination et de la répartition des attributions réglementaires se pose également pour la gestion de la ressource. Dans de nombreux cas, les Comités locaux gèrent les licences et autres droits de pêche et font appliquer les dispositions réglementaires techniques de limitation de l'effort de pêche, alors que les OP sont en principe chargées de la mise en oeuvre des plans de capture et du respect des quotas 33 ( * ) . Cette réalité instaure une mauvaise répartition des rôles, ainsi qu'une cohabitation surtout marquée par une ignorance réciproque, et trop rarement par des interventions concertées.
Enfin, la traduction en droit français de la réglementation européenne ne tient pas toujours suffisamment compte des spécificités de la pêche française. La superposition des deux cadres conduit à une multitude de règlements, de lois, de décrets, auxquels viennent s'ajouter les arrêtés préfectoraux des régions. Les professionnels évoluent donc dans un contexte réglementaire particulièrement obscur.
* 33 Ce rôle n'a jamais été institutionnalisé en France. Il fait l'objet d'un article dans la Loi d'orientation en discussion au Parlement.