Audition de Laurent MAURIAC
LIBERATION
Résumé : Le retard français dans l'utilisation d'Internet est d'abord un problème d'attitude : on a tendance à le considérer comme une mode, on en parle - notamment dans les medias - sans le connaître, et tout cela aboutit à dire des choses fausses. Le retard français est aussi lié à l'existence du Minitel : non pas l'existence de l'objet lui-même, mais les dérives commerciales qui sont dues au système de tarification en vigueur.
1. Le retard français
dans l'utilisation des
nouvelles technologies de l'information et de la communication est surtout
dommageable pour les
entreprises
: dans la concurrence
mondiale, l'usage d'Internet est capital : on peut très bien
imaginer qu'une entreprise américaine cherchant un fournisseur
européen le fasse par le réseau, via les sites
Web
existants ; celles qui n'en n'ont pas se placent dans une situation de
handicap ; de même, il est clair que
le courrier
électronique
facilite grandement les relations
commerciales ; bref, les entreprises françaises doivent absolument
adopter l'Internet. Le principal
rôle que l'Etat
doit avoir
est de retirer toutes les
barrières
qui freinent le
développement d'Internet ; ainsi, pour les entreprises, il faut
créer des incitations à l'utilisation d'Internet : permettre
au chef d'entreprise d'effectuer des démarches de toutes sortes lui
facilitant sa vie quotidienne par exemple ;
2. Le Minitel
est pénalisant du point de vue du
développement de l'utilisation d'Internet : en fait, ce n'est pas
l'objet lui-même qui l'est mais ce sont les
dérives
commerciales
qui sont dues au système de tarification qu'on a
liés au Minitel ; ainsi, cela aboutit au fait qu'à la SNCF
par exemple, on fait payer un service qui devrait être gratuit ; on
devrait transférer des contenus du type de celui de la SNCF sur la
Web
, avec un accès gratuit.
3. Il ne s'agit non plus de supprimer le Minitel
; il s'agit
simplement de proposer d'autres possibilités ; à mon avis,
Internet n'a pas vocation à remplacer le Minitel car ce dernier a
énormément d'usages propres, tel que le 36.11 ; parfois
même, pour tel type d'information, le Minitel sera plus rapide
d'utilisation qu'Internet ; cependant, il
faudrait trouver le moyen
d'accélérer le processus de migration
des services
présents sur le Minitel vers l'Internet : on pourrait pratiquement
aller jusqu'à imaginer une
taxation du Minitel
, car on est
dans un système économique qui est anormal ; ce ne serait
pas illégitime ; ce serait une taxation sur les serveurs et non une
taxation sur les utilisateurs ;
4. Aux USA
, le
commerce électronique
se
développe très vite ; il y a récemment une entreprise
qui a vendu 200.000 voitures en ligne ; on est donc dans une logique
mondiale et non nationale et ce genre d'entreprise peut très bien
s'implanter en France ; à cet égard, le retard de nos
entreprises dans l'utilisation d'Internet est pénalisant. Le
problème de la sécurité des transaction sur Internet n'en
est plus un : les dernières techniques de paiement sont totalement
sécurisées
;
5. Quand on parle
du retard français, c'est un problème
d'attitude
: c'est là que le Minitel est vraiment
néfaste ; c'est une mauvaise appréhension du
réseau ; or Internet aujourd'hui c'est comme le
téléphone, c'est un support de communication, ce n'est pas une
mode ; si l'on prend une comparaison avec un livre,
ce n'est pas
l'encre sur le livre mais c'est la page du livre
; il faut donc
considérer Internet comme un état de fait. Il y a un
énorme problème de sensibilisation, il y a un énorme
travail à faire dans les universités, dans les medias en
général, surtout les medias audiovisuels; le problème -
dans les medias - est le même que dans les entreprises : les gens ne
connaissent pas, ils parlent de quelque chose qu'ils ne connaissent pas ;
je le constate à
Libération
. Dès qu'il y a une
affaire de pédophilie, on tient l'Internet pour responsable alors que ce
n'est là qu'un outil, au même titre que le courrier postal ou le
téléphone. On a parlé de " cybersecte "
simplement parce que le groupe en question disposait d'un site Web. Toutes ces
attitudes sont la preuve de la
méconnaissance du
réseau
;