Audition de Xavier GOUYOU-BEAUCHAMPS
Président de FRANCE TELEVISION
accompagné
de monsieur Pierre-Henri ARNSTAM
Résumé : Face à la révolution numérique d'une part et l'explosion du marché de la télévision d'autre part, France Télévision doit adapter son offre : télévision généraliste avant tout, au rôle social accentué par rapport à d'autres chaînes, elle est amenée à réfléchir à comment combiner ce rôle avec la nouvelle donne : mettre en place des offres spécifiques ; intéréssée par de vastes champs programmatiques, elle opérera des choix en fonction d'un critère premier, celui de l'utilité sociale ; partie prenante dans les expérimentations " autoroutes de l'information " et présente sur Internet, où ses sites rencontrent un vif succès, France Télévision gardera à l'avenir son réseau terrestre, indispensable aux décrochages locaux de France 3.
1.
Pour nous,
le plus visible dans
l'évolution des NTIC
, c'est le
numérique
sur le plan
technique et, sur le plan économique, la
formidable explosion du
marché de la télévision
; le premier
phénomène auquel nous assistons donc est la
transformation de
l'offre
: au-delà des programmes généralistes, se
profile un marché d'une multiplicité de services, payants et
à la carte ; les opérateurs privés ont d'ailleurs une
stratégie de transfert du marché de la télévision
gratuite au marché de la télévision payante ;
Le rôle de France Télévision dans cette évolution va
changer :
si notre rôle devient plus crucial dans la
télévision généraliste
, la conception que l'on
peut avoir de
notre rôle social
nous amène à
l'idée que nous aurions intérêt à pouvoir combiner
la télévision généraliste accessible à tous
et certains types de télévisions spécialisées
destinées à certains publics, tels que celui de certaines
populations récemment immigrées, ou bien les cinéphiles,
les amateurs d'Histoire, etc... Dans cette optique, France Television a
déjà lancé Festival, la chaîne fiction, France
Supervision, la chaîne de la musique, de l'opéra et de la danse,
Histoire, Euronews... on voit donc qu'il y a une combinaison intelligente
possible, grâce aux techniques nouvelles, entre un programme
généraliste s'adressant à tous et des
éléments de programmes spécialisés par
ailleurs ; c'est
un premier champ de transformation
pour nous,
c'est-à-dire
l'adaptation de notre offre au fait qu'il y aura quand
même deux grandes séries d'offres : l'offre
généraliste et l'offre spécifique
;
Au fond, France Télévision se pose comme éditeur de
programmes et pas comme opérateur : nous n'avons pas l'intention de
nous poser comme exploitant de plate-forme et comme distributeur de
programmes ; nous ne savons pas ce qu'est la gestion
d'abonnés ; nous n'avons pas de compétences en
matière de distribution d'une manière
générale ; la question pour nous est donc bien
tactique : avons-nous intérêt à nous allier à
un opérateur ? Nous avons répondu oui.
2. Les réseaux
: la question se pose de savoir s'il faut
raisonner en termes de réseaux complémentaires, réseau
hertzien + réseau satellitaire, ou est-ce que les satellites rendent
inutile le réseau terrestre ? Pour le moment, il nous manque
beaucoup d'éléments là-dessus :
on sait que le
numérique va engendrer des évolutions rapides
, que ses
progrès seront tels qu'on peut envisager des taux de compression
très élevés et qu'au fond on peut imaginer qu'on puisse
diffuser dans des conditions peu onéreuses une grande quantité de
programmes à la fois, mais que cette évolution durera quelques
années quand même ; on sait aussi que le réseau
satellitaire ne sera pas entièrement satisfaisant avant quelques
années et pour un certain nombre d'usages ; de tous ces
éléments d'information, il ressort
que le réseau
terrestre sera indispensable, en particulier à cause des
décrochages locaux
: il faudra avoir à l'avenir deux
réseaux complémentaires ; mais nous sommes entrés,
sur ces sujets, dans une zone d'incertitude qui ne nous permet pas d'être
catégorique ;
3.
Je ne range pas,
a priori
, et peut-être ai-je tort,
l'absorption ou la fusion de l'ordinateur et du
téléviseur
comme un phénomène ayant un
effet direct sur nous : ça nous est un peu égal que nos
programmes soient reçus sur un ordinateur, un téléviseur
ou tout autre vecteur, ça n'a pas grande importance pour nous.
Simplement, c'est comme pour la numérisation : plus le
système est informatique, plus les possibilités d'accès
diversifiés existeront de la part du consommateur, plus
cela implique
que nous nous adaptions
, que nous diversifions notre offre ; nous
n'avons pas du tout les mêmes considérations sur le rapprochement
Télécoms/informatique, que les industriels.
4. La diversification de l'offre
: nous avons naturellement des
incertitudes sur les types de programmes auxquels nous devons nous
intéresser : nous savons par exemple que nous n'avons aucune
légitimité pour le
télé-achat
, ni pour faire
des
films X
; nous allons donc tatonner pour trouver notre voie,
avec comme
critère premier l'utilité sociale
.
5. France Télévision et le multimedia en ligne :
La situation actuelle : nous avons développé une offre
globale sur Internet dès janvier 1996, celui-ci constituant un nouveau
mode de diffusion de nos programmes ; nos sites France 2 et France 3 vont
se concentrer sur les caractéristiques propres du media Internet :
ainsi, les techniques de consultation de vidéo à la demande
seront particulièrement mises en valeur ; d'autres projets sont en
cours, soit parce qu'ils constituent un angle éditorial
particulièrement stratégique, soit parce qu'ils s'adressent
à une cible spécifique. Dans cet esprit, nous allons
bientôt ouvrir des services éducatifs et ludiques à
destination des enfants et des adolescents ;
Depuis leur création, les sites de France 2 et de France 3 accroissent
régulièrement leur fréquentation. Le nombre de pages vues
sur ces sites a triplé pour atteindre aujourd'hui un chiffre mensuel
supérieur à 800.000 ;
6. France 3 et les expériences " autoroutes de
l'information "
: France 3 a répondu, en 1995, à
l'appel à propositions ; deux projets ont été
labellisés en 1996 : l'un à Poitiers, visant à
expérimenter un
service d'information locale en
continu
; l'autre à Nice, qui est
un service de
vidéo à la demande
du journal
télévisé de France 3 Côte d'Azur : dans ce
dernier cas, chacun des abonnés test du réseau câblé
peut voir, sur son micro-ordinateur, les différents sujets du journal
télévisé régional avec une qualité
remarquable d'images et de son ;
Nous nous efforçons d'imaginer de nouveaux services utilisant la
technologie, qu'il soient utilisables sur le câble, sur le satellite, sur
l'Internet, ou sur le réseau hertzien. Mais les difficultés
budgétaires ne nous permettent pas d'expérimenter en vraie
grandeur ces services futurs et de vérifier ainsi leur viabilité
économique ;