G) QUE PEUT-ON DEDUIRE DE CES DIVERSES OBSERVATIONS :
À titre de conclusion provisoire, on soulignera donc
avec Chalus le fait que
" si le succès de l'imprimerie fut en fin de
compte, un aspect de celui de l'humanisme, à son tour, le livre a agi
sur les conditions morales et sociales
". Car l'imprimeur était
souvent aussi un humaniste et le libraire, un philosophe.
De sorte que les activités liées à l'esprit et celles
liées à l'économie, loin de s'opposer, s'articulaient au
contraire.
"
La philosophie [en 1492] naît du marchand. La science naît du
commerce
" (J. Attali).
Autre manière de dire, cette fois avec Breton et Proulx, que la
naissance de l'imprimerie s'explique essentiellement par
" la
convergence du
mouvement de Renaissance et de l'esprit mercantile
". Car "
l'innovation
que fut le livre imprimé a elle-même été soutenue et
rendue possible, par les multiples bouleversements sociaux et intellectuels que
l'Europe a connus à partir du XV
e
siècle
".
En définitive, le prodigieux succès de l'imprimerie
résulte donc d'une série d'interactions conjuguant des effets :
-
n d'évolutions techniques, économiques, intellectuelles et
religieuses ;
n d'initiatives humaines émanant aussi bien de techniciens que de marchands, d'auteurs que de lecteurs ;
n d'un concours de circonstances particulièrement propices, combinant une extraordinaire soif de connaissances et de renouveau spirituel, et un contexte social rendu favorable par le repeuplement urbain, par le développement commercial de l'Europe ainsi que par la relative unité culturelle d'un continent dont les élites communiquent entre elles par le latin.
Dans ces conditions, rien d'étonnant que les effets d'un instrument aussi polyvalent aient si profondément marqué la civilisation qui s'élaborait -- et qu'il contribuait à élaborer.