C) LE COMMERCE ÉLECTRONIQUE
Le commerce électronique sur Internet est encore
balbutiant quoique déjà non négligeable.
Selon Jupiter communication, près de 15 millions de foyers
américains, soit 63 % du total mondial, étaient
connectés à un service commercial en ligne en décembre
1996.
America on Line (AOL), premier service en ligne, avec près de 8 millions
d'abonnés et un chiffre d'affaires de 1,1 milliard de dollars,
était le seul à offrir une interface et un navigateur
propriétaires. Il a dû, comme les autres services commerciaux en
ligne, s'ouvrir à Internet.
Beaucoup de prestataires sont même passés d'une stratégie
d'ouverture à une stratégie d'intégration totale dans le
réseau des réseaux.
Le rachat du service commercial de Compuserve, numéro deux des services
en ligne américains, a procuré à AOL 3 millions
d'abonnés supplémentaires. Celui-ci, devenu la première
marque en ligne du Web, se recentre sur son métier de fournisseur et
assembleur de contenus, abandonnant à UUnet la gestion de ses
infrastructures de réseaux. Poursuivant son expansion, AOL entend
fournir non seulement de l'information mais du divertissement (ce en quoi
Microsoft a échoué) et diversifier ses sources de revenus
(publicités, abonnements, commissions sur transactions...).
Après avoir lancé, durant l'été 95, son
réseau MSN (Microsoft Network), comme un service propriétaire en
ligne, la firme de Seattle s'est rapidement tournée, elle aussi, vers le
Web, pour devenir un gros fournisseur d'accès Internet, avec quelques
services interactifs en plus.
Ayant échoué dans sa stratégie tendant à
positionner son site dans le domaine du divertissement, Microsoft s'est
lancé dans les guides de proximité (genre Pariscope de grandes
villes américaines), en espérant en faire des points
d'entrée dans ses sites commerciaux Expedia (voyages) Carpoint (vente de
voitures) Cinemania (films) et Music Central (pour les CD).
Les réseaux tels qu'AOL ou MSN, subissent la concurrence des moteurs de
recherche comme Yahoo, Hotbot, Excite, Infoseek, Lycos financés par la
publicité (57(
*
)), dont les sites
sont parmi les plus visités du Web, parce qu'ils peuvent offrir,
gratuitement, des services comparables.
Cependant, les moteurs de recherche, points de passage obligés sur
Internet, ne se contentent plus désormais des seuls revenus
publicitaires : ils entendent toucher une commission sur les ventes en
provenance de leur site, tirant ainsi parti de l'explosion actuelle du commerce
électronique.
Les sites de vente en ligne sur Internet sont de plus en plus nombreux,
essayant de satisfaire à la règle des 3C (Cost, Convenience,
Choice), en offrant des articles moins chers, plus variés, faciles
à commander.
De nombreuses galeries marchandes virtuelles (Cybermall) se sont
développées, réussissant à se faire connaître
et à prospérer.
Après les livres et les disques, ce sont certainement les ventes de
voyages qui connaissent le plus grand succès.
Les progrès en cours dans les domaines de l'assouplissement de la
réglementation de la cryptographie et de l'utilisation de cartes
à puce autorisent les plus grands espoirs quant à un réel
essor à venir du commerce électronique sur Internet :
Concernant le cryptage, le souci d'en élargir la diffusion des
méthodes, afin de renforcer la confidentialité des transactions,
indispensable au développement du commerce en ligne, doit être
concilié avec les préoccupations des pouvoirs publics de
défense nationale et de lutte contre les réseaux internationaux
de malfaiteurs.
Les puissances étrangères ne doivent pas pouvoir accéder
aux techniques de chiffrement des services secrets nationaux ni les
trafiquants, terroristes ou délinquants en tout genre, utiliser des
procédés inviolables pour communiquer à l'insu des
autorités.
Les logiciels de navigation d'outre-Atlantique proposent des options de
cryptage utilisant des clés de 128 bits, plusieurs milliards de
milliards de fois plus résistants.
Il s'agit d'un assouplissement de la position officielle américaine
initiale. Même si des
" hackers "
parviennent à
déchiffrer des messages codés, ils ne peuvent pas le faire pour
les millions de transactions simultanées.
Afin de contourner les règles américaines, Sun Microsystems a
sous-traité à une petite entreprise russe le développement
d'un système de cryptage doté de clés allant de 56
à 128 bits qu'il compte diffuser internationalement.
En France, les décrets publiés au J.O., le 25 Février
1998, définissent l'utilisation et les conditions d'usage des moyens de
cryptologie pour protèger les données.
Un système de
" tiers de confiance ",
dont les
Etats-Unis paraissent vouloir s'inspirer, après l'échec de leur
projet de
" clipper chip "
(58(
*
)) a été prévu (mais
imagine-t-on la mafia déposer ses clés de cryptage chez de tels
intermédiaires) ?
Pour favoriser le développement du commerce électronique, il est
important, dans ce domaine de la cryptologie, que des accords cohérents
et compatibles soient rapidement conclus entre les principaux pays qui joueront
un rôle essentiel dans cette nouvelle économie.
Par ailleurs, sont proposés et testés des projets tendant
à adapter au commerce électronique sur la toile, les
systèmes de paiement couramment utilisés dans les magasins
affiliés aux réseaux de cartes bancaires.
Deux propositions françaises rivales s'affrontent. Elles ont en commun
de se référer à un protocole de transactions
sécurisées (SET), soutenu par IBM, Microsoft, Hewlett-Packard...
et de prévoir l'utilisation de cartes à puce, domaine
d'excellence nationale.
- n Le premier consortium, qui comprend Bull , le Crédit Agricole et d'autres banques, a adapté SET pour en faire un standard, C. SET, qui prenne pleinement en compte les atouts des nouvelles puces. Son projet Europay propose une chaîne de commerce, sécurisée de bout en bout, qui assure, d'une part, le cryptage, par la puce, de la transaction, et, d'autre part, des liaisons avec les serveurs et le catalogue électronique du commerçant, ainsi que la banque du client (dont l'identité et la solvabilité peuvent être vérifiés).
- n Le deuxième ensemble, E - Comm, regroupe notamment IBM et Microsoft et, côté bancaire, la BNP, la Société Générale, le Crédit Lyonnais...
En juin 1998, France Telecom et le consortium E-Comm vont lancer un nouveau système de micropaiement.
Développé par Cap Gemini sur le standard international SET, le nouveau dispositif distribuera au client (et au commerçant) une fois pour toutes un certificat d'authentification à installer, sous forme logicielle, dans l'ordinateur utilisé pour commercer sur Internet, en faisant de tout petits achats.
En fin de mois ou au delà d'un plancher, la facturation reprenant chaque paiement à l'acte sera alors déclenchée par un intermédiaire.
Dans le cadre de l'accord France Telecom- E.Comm, France Telecom jouerait ce rôle d'intermédiaire et facturerait les clients directement sur leurs notes de téléphone.
L'identification du porteur de la carte, à piste, se fait une fois pour toute par l'intermédiaire d'un serveur d'accréditation.
Celle-ci n'est utilisée, en quelque sorte, que comme un moyen d'obtenir la signature de l'acheteur.
L'utilisation du langage Java fait l'unanimité. Il permet de télécharger de nouvelles applications, d'envisager des cartes multifonctions, interopérables...
Jusqu'ici, les fabricants de cartes développaient un logiciel d'application spécifique pour chaque client. Avec Java, il devient non seulement possible de faire évoluer le programme de la carte à n'importe quel moment, mais aussi d'ajouter ou d'ôter à la demande de nouveaux logiciels d'applications. Les cartes à puce de tous les constructeurs vont, en outre, devenir compatibles.
Ainsi, la carte à puce de demain ne se contentera plus de manipuler des données. Elle deviendra une véritable machine à traiter de l'information, grâce aux instructions écrites en langage Java, téléchargées dans des mémoires flash, réinscriptibles, aux capacités de plus en plus fortes (bientôt 64 kilooctets) et exécutées par des microprocesseurs de plus en plus puissants (32 bits).
Les technologies correspondantes sont développées dans le cadre de programmes européens (projet Cascade du programme Esprit pour les microprocesseurs et projet Eurêka Medea).
Les enjeux en sont majeurs. Il s'agit, en effet :
-
n de préserver et d'exploiter l'un des rares points forts
français et européen (Gemplus est le leader mondial de la carte
à puce) dans le domaine des NTIC.
n de prendre position sur des marchés considérables : plus de 10 milliards de francs à l'aube du XXI e siècle pour le marché européen de la carte à puce (2,8 milliards en 1996), qui représente aujourd'hui la moitié du marché mondial et devrait croître de 50 % par an les prochaines années.
Ø Quant aux ventes sur Internet, leur total devrait atteindre 66 milliards de dollars en 2000, dont 7 milliards pour les ventes directes au consommateur, selon Forrester Research.
Certains éditeurs se sont spécialisés dans la protection d'oeuvres musicales (Aris Technologies) ou photographiques (Digimarc Corporation). Cette dernière a développé un logiciel de marquage permettant de coder, de manière invisible, toute image soumise au copyright. Cette technique dite du "watermarking" (ou filigranes numériques) permet d'identifier le propriétaire d'une photographie et en interdit la modification.
La société propose également un service, Marcspider, qui permet de conserver la signature du propriétaire et donc de repérer les " voleurs d'images ".
L'image est, du reste, l'un des domaines dans lesquels les NTIC permettent l'apparition de produits entièrement nouveaux.